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10 août 2019 6 10 /08 /août /2019 07:11
Migrations. Les demandeurs d’asile privés d’argent liquide
Vendredi, 9 Août, 2019

L’aide d’État versée aux demandeurs d’asile ne pourra plus être utilisée que pour des paiements par carte. Une réforme contestée par les défenseurs des droits des étrangers.

 

Plusieurs directions territoriales de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) ont reçu le message depuis le 23 juillet. « Chers collègues. À compter du 5 septembre, la carte qui sert aux demandeurs d’asile à toucher leur allocation deviendra une carte de paiement uniquement, écrit Didier Leschi, directeur général de cet organisme dépendant du ministère de l’Intérieur. Elle ne permettra donc plus à un demandeur d’asile de retirer de l’argent liquide d’un distributeur de billets. La carte dans sa nouvelle fonctionnalité permettra de réaliser gratuitement 25 paiements par mois dans tous les commerces équipés d’un terminal de paiement électronique. Au-delà le retrait sera facturé 50 centimes. Il s’agit de limiter les retraits qui ont un coût pour l’Ofii. » Le 2 août, cette information a été officialisée et rendue accessible à tous sur la page Facebook de l’Ofii.

Une personne qui dépose, en France, un dossier de demande d’asile n’a droit qu’à une seule source de revenus : l’ADA (allocation pour demandeur d’asile). Ce maigre pécule est calculé en fonction de sa situation familiale. Il varie de 190 euros par mois pour un bénéficiaire isolé à 476 euros par mois pour un couple avec deux enfants. Une famille de six personnes touchera, pour sa part, une allocation de 660 euros par mois.

Les magasins solidaires ne sont pas équipés de machine à carte 

Le Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies (UNHCR) préconise que les allocations versées aux réfugiés le soient en liquide, « pour la défense des droits et des personnes en exil », rappelle dans un communiqué le Collectif Nation Refuge. C’est ce que la France faisait jusqu’à maintenant, et la réforme annoncée ne s’accompagne pas d’arguments véritablement convaincants.

« Nous avons constaté des problèmes concernant des fonds non utilisés. Par exemple, quand on a moins de 10 euros sur la carte, il n’est pas possible de retirer cet argent parce que les distributeurs de billets ne fournissent pas des billets de 5  euros », a tenté de justifier Didier Leschi.

Les associations de défense des droits des étrangers, qui dénoncent un nombre maximum de paiements gratuits « beaucoup trop juste » correspondant à moins d’un achat par jour, ont tenu pour leur part à rappeler au directeur de l’Ofii, dans une pétition en ligne, que « les épiceries sociales et solidaires, les brocantes et les marchés (ne) sont que rarement équipés (de machine à carte) ».

Mais, pour la bonne âme de la haute fonction publique, ces associations se trompent sur ses intentions. Lui argue qu’il ne cherche qu’à protéger les demandeurs d’asile, au motif que « la manipulation d’argent liquide expose le demandeur d’asile à des phénomènes comme le vol ou le racket ».

L’annonce de l’Ofii provoque néanmoins un véritable tollé. « On se demande pourquoi ils inventent des trucs pareils, a, de son côté, réagi l’ancienne eurodéputée Marie-Christine Vergiat, aujourd’hui vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme, sur les réseaux sociaux. L’objectif serait notamment de les empêcher d’envoyer de l’argent à leur famille dans leur pays d’origine. Quand on sait que cet argent représente trois fois l’aide publique au développement ! Et ça prétend lutter contre les causes profondes de migration. Ces gens sont de dangereux malades. »

Face à l’opposition que suscite sa réforme, l’Ofii assure que tout est encore à l’étude et qu’elle fait toujours l’objet de discussions. « L’Ofii suit les orientations fixées par l’État et, sur le principe, la décision est prise, a d’ailleurs tenté de se dédouaner Didier Leschi. Toutefois, il faut voir si son application se fera le 5 septembre ou si, pour des raisons techniques, elle doit être retardée. »

En réalité, les imprimantes du ministère de l’Intérieur tournent déjà plein pot pour l’édition de documents, traduits en une dizaine de langues, afin d’informer les demandeurs d’asile du fait que le gouvernement a bel et bien choisi de leur rendre la vie de plus en plus difficile.

émilien Urbach
Migrations. Les demandeurs d'asile privés d'argent liquide (vendredi 9 août 2019, Emilien Urbach, L'Humanité)
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10 août 2019 6 10 /08 /août /2019 05:27
PABLO DE LA TORRIENTE BRAU

PABLO DE LA TORRIENTE BRAU

 

Cet intellectuel cubain devenu communiste s’engage, à la vie, à la mort, convaincu de la complémentarité de l’antifascisme et du combat national. À l’été 1936, de son exil à New York, il écrit : « Je pars en Espagne. »

Pablo de la Torriente Brau explique à ses amis, déjà grandes figures intellectuelles, Nicolas Guillen, Ruben Martinez Villena, secrétaire du petit Parti communiste de Cuba, Raul Roa, dans sa lettre d’exil du 4 août 1936 : « Je suis absolument convaincu que le monde entier tourne autour de la révolution espagnole. L’importance de la révolution espagnole est mondiale. » Roa sera plus tard ministre des Affaires étrangères de Fidel Castro. Dans la lettre du 6 août à Juan Marinello, alors intellectuel communiste, Pablo défend avec passion sa décision : « J’ai eu une idée merveilleuse : je vais en Espagne, participer à la révolution espagnole. » La missive se poursuit : « L’idée a explosé dans mon cerveau, et depuis lors, elle illumine la grande forêt de mon imagination. » Le projet désiré devient axe de vie. « Je crois fermement que je peux faire beaucoup pour la révolution cubaine, parce qu’il semble que la révolution espagnole ait à Cuba de profondes répercussions », confie-t-il à Raul Roa. Le journaliste entre en Espagne par Portbou, le 20 septembre 1936, convaincu de prolonger les luttes cubaines d’émancipation. Combattant des milices populaires, puis commissaire politique, le jeune militant intellectuel meurt très tôt, sur le front de Madrid, les armes à la main, à Romanillos, près de Majadahonda, le 19 décembre 1936. Il avait à peine 30 ans et un charisme de leader atypique : un physique d’athlète, le regard sombre, un humour de « guajiro » (paysan) taquin. Toujours aux avant-postes, commissaire de guerre de la division de El Campesino. En quatre mois, il écrit 14 chroniques. La première d’entre elles : Des avions pour l’Espagne.

Reporter au journal Ahora, il est à la fois journaliste, narrateur et protagoniste

Pablo comprend très vite toute la grandeur poétique et humaine d’un autre de ses amis : Miguel Hernández, poète de la terre. Pablo le « nomme » commissaire culturel. Miguel, l’ancien berger d’Orihuela, l’autodidacte qui déclame sur le front républicain ses vers aux combattants. Désespéré par la mort du « camarade Pablo », Miguel Hernández écrit la poignante Deuxième Élégie. Le corps de son compagnon sera jeté dans une fosse commune.

À Cuba, le jeune intellectuel avait pris tous les risques. Emprisonné à plusieurs reprises (27 mois au total), il impulse deux grandes grèves, en 1930 et 1935, et doit s’exiler en avril 1935. Dans la vague révolutionnaire de ces années 1930, il crée l’Orca, fonde la radicale Aile gauche étudiante, écrit Batey… Le « Patio de laureles » de l’université vibre de ses exhortations à l’insurrection, à « serrer les rangs », de ses convictions antifascistes. « Arriba (En avant) muchachos ! » L’insurrection provoque la chute du dictateur Machado, le 12 août 1933. Le véritable pouvoir est alors exercé par un groupe de sergents dirigés par un inconnu, Fulgencio Batista. Les Cubains sympathisent massivement avec les « Espagnols rouges ».

Pablo, reporter au journal Ahora, décrit la chute du tyran. À la fois journaliste, narrateur et protagoniste. Un statut qu’il conjugue et assume. La révolution a un prix. À La Havane, il collabore aussi à la revue El Veterano et au quotidien Nuevo Mundo.

Aveugles ceux qui ne voient en Pablo de la Torriente Brau qu’un « propagandiste ». Comme les 1 056 volontaires cubains des Brigades internationales, très divers politiquement, communistes, « guiteristes de Joven Cuba », anarchistes, socialistes (peu de Noirs), il conçoit l’engagement en Espagne comme le maillon d’une chaîne ininterrompue, insurrectionnelle, « internationaliste », de libération.

Il n’a même pas eu le temps de terminer son roman, Aventure du soldat cubain inconnu, dans lequel il imagine une rencontre avec le fantôme d’un soldat cubain qui, par erreur, fut envoyé au feu lors de la Première Guerre mondiale. Le traitement moderne et satirique du thème (les stupidités de la guerre) surprend. Pablo lie son métier d’écrivain, sans l’aliéner, à l’engagement sur les divers fronts de lutte. Dans un autre écrit, Presidio modelo (Prison modèle), de publication posthume, comme la plupart de ses écrits, il dénonce l’inhumanité du système pénitentiaire. Son célèbre texte, Realengo 18, décrit les conditions épouvantables de vie des paysans dans les montagnes cubaines de l’Orient. Des « realenguistas » y ont recréé une communauté utopique, « un pays différent, bien plus beau que Varadero, une société idéale communiste ».

Jean Ortiz

 

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10 août 2019 6 10 /08 /août /2019 05:25

Par Cécile Dumas 


Dans une période où les questions migratoires sont complètement sorties de leur contexte, utilisées et manipulées par les « artisans » de la haine, du complot, des fausses nouvelles (fake news), de la recherche de coupables, il est indispensable d’approfondir le débat pour raconter un autre récit et retrouver la définition de l’hospitalité.

IMMIGRATION : FAISONS AVANCER LE DEBAT (« Cause Commune » - Revue d’action politique du PCF – Mars 2019).

Il est essentiel de rappeler en permanence que les migrations sont constitutives de l’humanité et une réalité qui existe depuis des siècles.

 

De quoi parle-t-on ?

L’immigration extraordinaire provoquée par les guerres et les conflits ne doit pas faire oublier que certains pays accueillent en continu une immigration ordinaire. C’est le cas de la France et cette immigration ordinaire due aux mariages mixtes, au regroupement familial, aux études à l’étranger est loin devant la migration de travail qualifié et l’obtention de statut de réfugié. En 2018, ce sont 255 550 obtentions de premier titre de séjour – 50 % sont des étudiants ou des motifs familiaux – et 33 380 attributions de l’asile. Et cela dans un pays de 65 millions d’habitants (France métropolitaine).

Fin 2017, on comptait environ 258 millions de migrants internationaux dans le monde, soit 3,3 % de la population mondiale contre 111 millions en 1990, soit 2,9 %. Au niveau international, il n’existe pas de définition universellement acceptée du terme « migrant ». Il s’applique aux personnes se déplaçant vers un autre pays ou une autre région aux fins d’améliorer leurs conditions matérielles et sociales, leurs perspectives d’avenir ou celles de leur famille. Le nombre de migrants est en augmentation toute relative quand on prend soin de comparer cette hausse à celle de la population mondiale. Rappelons aussi qu’en 1900 les migrants internationaux représentaient 5 % de la population mondiale et que cela concernait à l’époque, avant tout, les Européens. Aujourd’hui, contrairement à bien des idées reçues, les mouvements Sud/Sud dépassent les mouvements Sud/Nord et 60 % des migrants ne quittent pas l’hémisphère Sud.
Cent cinq millions de migrants sont originaires d’Asie, 60 millions d’Europe et 36 millions d’Afrique. Au prorata de la population respective des continents, ce sont toujours les Européens qui migrent le plus.
Le changement majeur de la période actuelle est que les migrations concernent quasiment tous les pays qui sont à la fois, points de départ, d’arrivée et de transit. Les migrations se sont mondialisées.
Le mot « crise » a donc bien, dans la bouche de l’extrême droite ou de dirigeants européens et français, une fonction politique qui traduit la volonté des gouvernements des pays européens de durcir les politiques migratoires en particulier vis-à-vis des pays du Sud et cela en surfant sur le populisme, le nationalisme et la xéno­phobie.
On pourrait plutôt utiliser ce mot pour qualifier le nombre de personnes déracinées, c’est-à-dire obligées de fuir leur domicile. Le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) en dénombre 68,5 millions, soit un accroissement de 16,2 millions pour la seule année 2017, dont 6 % vivent en Europe.

« Depuis trente ans, le solde migratoire de la France oscille entre 50 000 et 100 000, soit autour de 0,1 % de la population. »

Le constat est clair : l’Europe est bien loin d’être une terre d’accueil pour ces déracinés. 
En revanche, 90 % de ceux qui ont obtenu une protection internationale par un État de l’Union européenne sont arrivés par la Méditerranée, qui est la voie la plus dangereuse du monde. Entre le 1er janvier 2014 et le 2 mai 2016, plus de 8 412 personnes sont mortes en Méditerranée et 208 en Europe. 
Pour terminer cette série de données chiffrées et permettre de prendre du recul, notons que, depuis trente ans, le solde migratoire de la France (différence entre les entrées et les sorties) oscille entre 50 000 et 100 000, soit autour de 0,1 % de la population.

 

Pourquoi en est-on arrivé à ce débat totalement irrationnel ?

Rappelons tout d’abord que Nicolas Sarkozy a eu la main sur la politique migratoire pendant neuf ans, quatre ans en tant que ministre de l’Intérieur, de mai 2002 à mars 2004, puis de juin 2005 à mars 2007, et cinq ans comme président de la République, de 2007 à 2012. Durant ces neuf années, six lois sur l’immigration ont été présentées et votées. À partir de 2005, Sarkozy se présente comme l’homme de la rupture sur la question des politiques migratoires ; il mêle sécurité, intégration et identité nationale avec des arguments avant tout répressifs. Tous ses discours et ses argumentaires sont alors basés sur le méfait du recrutement massif de travailleurs immigrés, sur sa volonté de réduire le regroupement familial et son refus de se soumettre aux « diktats de la pensée unique de gauche », qui prive le peuple de donner son avis objectivement. Pour justifier sa volonté de restreindre les migrations et de « choisir ses migrants », il tente de réécrire l’histoire et de manipuler l’opinion publique. Il veut augmenter l’immigration du travail et réduire le regroupement familial.

En 2010, en pleine crise économique et financière, alors que le chômage augmente, Marine Le Pen profite du vide et de l’absence de réaction de la gauche pour désigner les responsables du chômage : les étrangers. Nous entrons dans une surenchère verbale avec une grande manipulation des chiffres vus précédemment par l’extrême droite mais aussi par la droite (cf. Éric Ciotti au sujet des chiffres du ministère de l’Intérieur de 2018).

« Cette solidarité concrète se heurte à l’absence de solutions politiques et en particulier à l’Europe forteresse qui actuellement préfère construire des murs que des solidarités pour favoriser un accueil digne des migrants. »

François Hollande essaie ensuite de calmer les excès verbaux mais la machine fake news est lancée depuis trop longtemps. Les images de la « Jungle de Calais » et des migrants sur les rochers à la frontière franco-italienne de Menton ont un effet terrible sur l’opinion publique en 2015. Le gouvernement socialiste ne bouge pas d’un pouce pour faire changer les choses et faire preuve de solidarité européenne. à l’apogée de l’arrivée des réfugiés fuyant la guerre en Syrie, le gouvernement de Manuel Valls s’engage à accueillir un peu plus de 19 000 demandeurs d’asile alors que l’Allemagne en accueille plus d’un million.
Le manque de courage politique des gouvernants, l’assimilation constante des questions migratoires et des problèmes de sécurité laissent place à un discours extrémiste, populiste, nationaliste et débouche sur une régression des conditions d’accueil des migrants dans notre pays.

 

Et maintenant que faire ?

Ce tournant de 2015 a aussi montré la capacité de résistance, de révolte et d’organisation de citoyens solidaires, malgré les pressions judiciaires. Des centaines de militants communistes dans toute la France agissent aux côtés des associations pour permettre aux migrants de passage ou aux demandeurs d’asile d’accéder à leurs droits.

C’est cette solidarité concrète qui remet au cœur du débat quelques réalités, numériques mais surtout humaines. Des chemins de migration sont diffusés, expliqués. Aucun chiffre ne peut tenir face à de tels témoignages, en particulier sur la traversée de la Libye ou de la Méditerranée.
Mais il est évident que cette solidarité concrète se heurte à l’absence de solutions politiques et en particulier à l’Europe forteresse qui actuellement préfère construire des murs que des solidarités pour favoriser un accueil digne des migrants.

Après des mois d’audition et de travail auprès des associations, des militants de la solidarité, des universitaires, le Parti communiste français publie une brochure en avril 2018, Pour une France hospitalière et fraternelle, une Europe solidaire (voir ci-dessous). Avec cette contribution, le Parti communiste français veut mettre en débat une nouvelle approche des enjeux migratoires, qui s’appuie évidemment sur le droit international et sur des propositions d’accès aux droits, de vie digne, et surtout défend l’indispensable mise en place de voies légales et sécurisées de migration, seule façon effective de démanteler les trafics d’êtres humains.
Il est urgent de réorienter la politique migratoire européenne et de la mettre en conformité avec la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 qui énonce que « toute personne a le droit de circuler librement, de choisir sa résidence à l’intérieur d’un État, toute personne a le droit de quitter tout pays y compris le sien, et de revenir dans son pays ».

 

Cécile Dumas est membre du conseil national du PCF. Elle est responsable adjointe du secteur International, chargée des enjeux migratoires.

 

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Published by Section du Parti communiste du Pays de Morlaix - dans POLITIQUE NATIONALE
10 août 2019 6 10 /08 /août /2019 05:18

À propos de « Progressistes »

 

La revue Progressistes est un trimestriel articulant les enjeux du monde du travail, de l’environnement, et les avancées scientifiques et techniques.

Chaque numéro est organisé autour d’un dossier spécifique et des rubriques régulières en lien, plus ou moins distendu, avec l’actualité immédiate.

Nombre de ses articles font appel à des spécialistes dont les préoccupations vont bien au delà des seuls aspects purs de la science, de la technologie ou de la technique qu’on peut habituellement retrouver ailleurs.

Au cours de ce mois d’août notre Blog vous propose quelques articles de « Progressistes » parus entre novembre 2018 et août 2019.

 

ALLONS BIENTÔT MANQUER D'EAU ? (Revue Progressiste)
ALLONS BIENTÔT MANQUER D'EAU ? (Revue Progressiste)
ALLONS BIENTÔT MANQUER D'EAU ? (Revue Progressiste)
ALLONS BIENTÔT MANQUER D'EAU ? (Revue Progressiste)
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Published by Section du Parti communiste du Pays de Morlaix - dans Ecologie
10 août 2019 6 10 /08 /août /2019 05:13

 

Le directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité, Florent Gueguen, dénonce un projet de réforme de l’aide médicale de l’État (AME) stigmatisant pour les étrangers et dangereux pour tous.

Quels sont les projets du gouvernement concernant l’aide médicale de l’État ?

FLORENT GUEGUEN Je viens de rencontrer la directrice adjointe du cabinet d’Agnès Buzyn, ministre de la Santé. L’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale des finances (IGF) ont été missionnées pour élaborer un rapport dont on promet qu’il ne correspond pas forcément à la position de la ministre. Mais le ministère de l’Intérieur, au nom d’un supposé « appel d’air », souhaiterait réduire l’offre de soins aux étrangers, et le ministre des Finances pencherait, pour sa part, pour une réforme du financement de l’AME. Les conclusions de ce rapport vont intervenir à la rentrée, au moment de l’ouverture des débats sur l’immigration à l’Assemblée nationale, et au moment de l’élaboration de la loi de finances. En réalité, le projet gouvernemental vise clairement à détricoter l’AME.

 

Quels sont les grands axes étudiés par cette mission d’enquête ?

FLORENT GUEGUEN Ils posent trois hypothèses sur la table. Toutes très inquiétantes. La première correspond à une réduction du panier de soins par rapport aux prestations aujourd’hui remboursées. Elle vise notamment les questions de santé mentale. La prise en charge psychique et/ou psychologique des personnes qui ont effectué un parcours d’exil traumatisant est pourtant cruciale. La remettre en cause serait extrêmement dangereux, notamment pour ceux qui sont obligés de vivre à la rue. La deuxième hypothèse qu’ils énoncent est l’instauration d’un ticket modérateur. Leur logique est simpliste : les étrangers éligibles à l’AME ne cotisent pas à la Sécurité sociale ; il faut donc trouver un moyen de les faire payer. Mais ce sont des publics sans ressources du fait de l’absence de droit au travail en France. Toute intégration d’un ticket modérateur ou de toute autre forme de paiement aura pour conséquence d’éloigner toute une partie de la population du recours aux soins. En 2011, Sarkozy avait mis en place un ticket d’entrée par le biais de timbres fiscaux. Ça avait été un fiasco.

 

Et la troisième hypothèse ?

FLORENT GUEGUEN Ce serait de créer des structures de soins spécialisées pour les étrangers. C’est clairement une manière de les discriminer. Et avec la stratégie actuelle de recensement des étrangers par les structures sociales, cela représente un danger supplémentaire pour les étrangers, qui se retrouveraient de facto stigmatisés et possiblement identifiés, pour ceux qui sont sans titre de séjour, comme personnes en situation irrégulière.

 

De tels projets pourraient impacter tout le système de soins français…

FLORENT GUEGUEN En effet. Nous soutenons, par principe, l’accès au soin universel en France, mais aussi parce que, si on soigne moins bien les étrangers, cela aura un impact sur l’ensemble de la société. Les personnes à la rue peuvent être porteuses de maladies contagieuses, telles que la tuberculose ou la gale, qui doivent être soignées rapidement et sans condition, sinon la maladie pourrait toucher toute la population. Si on réduit le panier de soins aux seuls soins urgents, ça conduira, à terme, à traiter des situations plus difficiles et plus chères pour le système de santé. Les étrangers malades se reporteront, de plus, sur les services d’urgences, et les dépenses seront plus importantes pour les hôpitaux. Est-ce vraiment le moment de charger les urgences, alors qu’elles rencontrent les difficultés qu’on connaît aujourd’hui ?

 

Comment les associations comptent-elles réagir ?

FLORENT GUEGUEN Un certain nombre d’organismes ont déjà fait un courrier au président de la République pour pointer les risques d’une réforme de l’AME en termes de santé publique. On va maintenant saisir les parlementaires et mobiliser l’opinion publique. Les médecins et les organismes publics de soins doivent également se mobiliser. Nous nous battons sur le principe d’un accès égalitaire et universel aux soins. Avec d’autres, nous portons l’idée que l’AME devrait fusionner dans la Sécurité sociale. Ça permettrait d’éviter la stigmatisation des étrangers et de réaliser des économies sur la gestion administrative. Mais ce sont des propositions à rebours des projets du gouvernement.

 

Entretien réalisé par Émilien Urbach

 

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9 août 2019 5 09 /08 /août /2019 07:25
Rol-Tanguy. Le tableau de Guy Denning et la stèle en gare de Morlaix au rassemblement d'hommage organisé en gare de Morlaix par le PCF

Rol-Tanguy. Le tableau de Guy Denning et la stèle en gare de Morlaix au rassemblement d'hommage organisé en gare de Morlaix par le PCF

Henri Rol-Tanguy Le combat précurseur de l’Espagne
Jeudi, 8 Août, 2019

Lanceurs d'alerte en 1939 14/29. Figure de la Résistance et de la libération de Paris, le colonel avait engagé la lutte contre le fascisme dans les rangs des Brigades internationales. Pour lui, aider l’Espagne républicaine, c’était combattre le franquisme, soutenu par Hitler et Mussolini.

 

À Barcelone, à la fin des cérémonies organisées en l’honneur du 60e anniversaire de la création des Brigades internationales (BI), le colonel Henri Rol-Tanguy, alors que nous l’interrogions sur son rôle dans la libération de Paris, nous disait : « Vous me rappelez à chaque fois mon action dans la lutte contre les nazis et pour la libération de la capitale. Je vous réponds avec plaisir. Pourtant, sachez que c’est l’Espagne et notre combat précurseur contre le fascisme qui demeurent en première place dans ma mémoire. Nous avions compris avant l’heure que Franco et Hitler préparaient en Espagne la tragédie qui allait suivre. C’est là-bas que j’ai appris à me battre contre le fascisme. »

Henri Tanguy est né à Morlaix le 12 juin 1908. Il s’est installé à Paris en 1923 et deviendra ouvrier métallurgiste hautement qualifié, membre de la CGTU et du Parti communiste. « C’est la menace fasciste révélée en février 1934 qui fait vraiment entrer dans le combat politique, et surtout syndical, ce métallo passionné de vélo et d’une grande curiosité intellectuelle », écrit l’historien Roger Bourderon.

Henri Tanguy est membre de la commission exécutive du Syndicat des travailleurs de la métallurgie, responsable des jeunes et de l’activité dans les entreprises avec Jean-Pierre Timbaud, depuis octobre 1936. Il est plus particulièrement chargé d’animer la campagne de solidarité avec la jeune République espagnole après le putsch fasciste.

Jean Morawski, dans un article publié dans l’Humanité au lendemain de la mort de Rol-Tanguy (le 6 septembre 2002), rappelait qu’« André Marty, élu secrétaire, aux côtés de Dimitrov, lors du VIIIe (et dernier) congrès de l’Internationale communiste réuni à Moscou, du 25 juillet au 21 août 1935, avait été délégué en Espagne, un an plus tard. L’ancien de la mer Noire avait demandé, en février 1937, qu’on lui envoie de jeunes cadres en renfort ». Henri Tanguy fut du nombre.

Il rejoignit Marty à Albacete. Il y exerça les fonctions de commissaire politique de l’arsenal, du parc automobile des BI, puis d’une usine de fabrication de grenades. Puis il fut nommé responsable de la main-d’œuvre étrangère, avec grade de capitaine, dans les usines installées en zone républicaine. En octobre 1937, il est commissaire politique du bataillon d’instruction des volontaires francophones, basé à Villanueva de la Jara. Deux mois plus tard, la situation s’aggravant, il conduisit un millier de volontaires dans le secteur de Barcelone. Puis on le retrouva commissaire politique de la 14e brigade, la « Marseillaise », commandée par Marcel Sagnier, ancien peintre en bâtiment. De juillet à septembre 1938, il participa, à Tortosa et dans la sierra Caballes, à l’offensive sur l’Èbre. De retour en France, après le départ des Brigades, il reprit ses fonctions au Syndicat des métaux et au comité de la région parisienne du PCF. Des années plus tard, il disait : « De février 1937 au 8 mai 1945, j’ai toujours été au combat. J’ai encore, dans le corps, une balle de mitrailleuse qui m’a frappé, le 18 juin 1938, sur le front de l’Èbre. Nous étions 8 000 Français à avoir rejoint les Brigades. Sur 35 000 à 40 000 brigadistes, 15 000 étaient partis de France. 3 000 Français furent tués en Espagne. 3 000 autres anciens brigadistes périrent, par la suite, pendant la Résistance. »

« Rol », son dernier pseudo dans les années de clandestinité (il l’adjoignit à son nom de famille), lui avait été inspiré par l’Espagne : « Rol, c’était un camarade, un ami, originaire d’Épinay. Il commandait, avec le grade de capitaine, le bataillon » Commune de Paris « reconstitué après avoir été décimé. Il est tombé à la sierra Caballes, au cours des derniers combats, en septembre 1938 ». Dévoilant, le 20 octobre 1994, une plaque commémorative de l’épopée des BI, au siège du comité national du PCF, le colonel Henri Rol-Tanguy, élevé au rang de grand-croix de la Légion d’honneur, était de ceux pour qui la résistance au fascisme n’avait pas commencé en 1939, ni en 1940, mais bien en 1936. Aider l’Espagne, c’était combattre le franquisme, soutenu par Hitler et Mussolini. C’était répondre à l’urgence de défendre les valeurs républicaines. C’était un devoir si l’on voulait empêcher l’encerclement militaire de l’Hexagone par des dictatures fascistes : celles du Portugal, de l’Italie, de l’Allemagne et de l’Espagne.

Sur les cartes de l’Amicale des anciens volontaires en Espagne républicaine, le témoin a été passé aux enfants au sein de l’Acer, les Amis des combattants en Espagne républicaine, dont la secrétaire générale n’est autre que la fille de Rol, (Claire Rol-Tanguy), on pouvait lire : « La solidarité internationale que nous avons assurée au peuple espagnol en 1936-1939, au cours de sa lutte héroïque contre l’agression fasciste, s’alliait à notre souci de sauvegarder sur les Pyrénées la sécurité de la France. Notre internationalisme s’allie à l’amour de la patrie dont nous avons fait preuve dans la Résistance. »

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9 août 2019 5 09 /08 /août /2019 06:55
Droits des femmes. Le Planning familial au régime sec
Jeudi, 8 Août, 2019

L’institution cinquantenaire pourrait faire les frais de réallocations des fonds qui cachent l’insuffisance des moyens alloués à l’égalité hommes-femmes.

 

Le Planning familial est-il la dernière victime en date des tours de passe-passe budgétaires du gouvernement en matière de droits des femmes ? L’antenne locale du Rhône a tiré la sonnette d’alarme fin juillet. La nouvelle convention, qu’elle venait de recevoir des services déconcentrés de l’État, lui attribuait une subvention de 109 000 euros pour ses actions de sensibilisation, contre 122 000 euros en 2018. S’y ajoutait la perte de 30 000 euros, discrètement intégrés dans l’allocation de 2019, alors qu’ils étaient prévus au titre du budget 2018. Au total, 43 000 euros en moins en un an pour le travail d’éducation et de prévention. « Nous avons perdu l’équivalent d’un temps plein, alors que, déjà, nous n’arrivons pas à répondre à toute la demande d’information sur le département », s’insurge Margot Béal, une des administratrices de l’association.

« Démêler le vrai du faux »

En pleine campagne de communication pour mettre en valeur le Grenelle sur les violences faites aux femmes, qu’elle va organiser début septembre, la secrétaire d’État pour l’Égalité hommes-femmes, Marlène Schiappa, n’a pas manqué de réagir à cette mauvaise publicité. « Les subventions du gouvernement au Planning sont en augmentation constante depuis deux ans, avec notamment + 100 000 euros et cette année + 36 % », a-t-elle répondu sur son compte Twitter. « Comme d’habitude, Marlène Schiappa fait du n’importe quoi sur les chiffres. Les associations sont fatiguées d’avoir à passer leur temps à déchiffrer les annonces pour démêler le vrai du faux. Il faudrait la publication précise et détaillée du budget alloué au droit des femmes » soupire Raphaëlle Rémy-Leleu, porte-parole d’Osez le féminisme !

Les subventions destinées aux actions de sensibilisation ont effectivement connu une hausse, symbolique, au niveau national : 100 000 euros. Mais le gouvernement a choisi de déshabiller Paul pour habiller Pierre : les subsides seront désormais répartis entre un plus grand nombre d’associations. Le Planning familial, institution classée à gauche, pourrait être pénalisé. « Sur les 1,4 million d’euros que l’on reçoit généralement, seuls 580 000 ont pour l’instant été promis », s’inquiétait début août Caroline Rebhi, coprésidente nationale du Planning familial.

La modification de la répartition du budget est aussi géographique. Selon la liste établie en 2018 par le ministère, une réallocation des fonds est prévue entre les départements jugés sous-dotés ou surdotés. « Cette répartition entre ceux qui ont trop et ceux qui n’ont pas assez n’a pas de sens. Nous avons été classés dans la liste des surdotés alors que l’année dernière, faute de moyens suffisants, nous avons dû renoncer à 47 séances de sensibilisation dans 14 structures » souligne Margot Béal.

Autre source de questionnement, il n’y a pour l’instant aucune trace des hausses de budget dont devaient bénéficier certains Plannings départementaux. La majorité des Plannings qui ont reçu leur budget ont annoncé des baisses, mais l’incertitude règne alors que, contrairement aux années précédentes, 50 des 74 antennes locales n’ont toujours pas reçu leurs notifications. « Ce flou montre que, malgré les grandes opérations de communication qui présentent le droit des femmes comme une grande cause nationale, le gouvernement n’est ni sérieux ni crédible, estime Raphaëlle Rémy-Leleu. Il continue de se contenter de réallouer l’argent d’une association ou d’un thème à l’autre, au lieu d’augmenter les fonds d’un budget globalement très insuffisant. »

Camille Bauer

La subvention « éviction du conjoint » divisée par deux. En Isère, la subvention destinée à financer l’éviction du domicile du conjoint violent a été réduite de moitié en juillet, passant de 14 000 à 7 000 euros, a annoncé, lundi, l’Association d’aide aux victimes. Ce dispositif expérimental avait pourtant déjà permis d’éloigner trois auteurs de violences, en leur donnant accès à un appartement et à un suivi social.

 

Droits des femmes. Le Planning familial au régime sec (L'Humanité, 8 août 2019, Camille Bauer)
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9 août 2019 5 09 /08 /août /2019 06:30
Enfance. Le Loiret veut se débarrasser des jeunes étrangers isolés
Jeudi, 8 Août, 2019

À Orléans, un collectif d’associations, de partis politiques et de syndicats dénonce la mise à la rue, programmée au 31 août, de 150 mineurs isolés. Au quotidien, ces adolescents doivent déjà subir des conditions de vie précaires. Reportage.

 

Orléans (Loiret), correspondance.

«Quand j’ai débarqué à Orléans, il n’y avait ­personne pour m’accueillir. C’est le com­missariat qui a fait les démarches pour que je sois pris en charge. » Sylvain (1), à bientôt 16 ans, est arrivé du Cameroun en 2017. Il y a laissé sa mère, incapable de subvenir aux besoins de ses deux enfants. Il raconte son périple d’une voix posée qui évoque plutôt celle d’un jeune adulte éprouvé devenu mature trop tôt. « Une tante m’a fait passer en France par la voie maritime via la Libye, l’Italie et la Belgique. J’ai choisi la France, car il y avait une ­communauté africaine importante et moins de racisme que dans d’autres pays. » Après un passage par Paris et comme des dizaines d’autres jeunes de son âge, Sylvain est d’abord pris en charge par l’aide sociale à l’enfance de Tours, en Indre-et-Loire. Là-bas, l’accueil se passe dans de bonnes conditions. « Le département m’a admis, pris en charge et logé à l’hôtel avant que je quitte la ville pour Orléans. » Là, les choses se gâtent.

Pour les mineurs isolés présents en France – qui a signé la convention internationale des droits de l’enfant le 26 janvier 1990 –, la loi impose de ne faire aucune différence en fonction de la nationalité de l’enfant à ­protéger. La législation prévoit « un placement à l’aide sociale à l’enfance soumis à des obligations », telles « l’orientation du mineur dans une structure ou dans une famille habilitées en protection de l’enfance » et « la réalisation de démarches en vue de la scolarisation ou de l’inscription dans une formation professionnelle », comme récemment rappelé dans un jugement de la cour d’appel d’Orléans.

« Lâchés dans la nature dans la discrétion la plus totale »

Dans les faits et depuis plusieurs années, le département du Loiret mène la vie dure à ces mineurs, dont 150 pourraient être jetés à la rue au 31 août, faute de prise en charge. Une situation qui conduit associations, syndicats et partis politiques de gauche à occuper régulièrement les parvis du conseil départemental et de la préfecture de région. « Pour les jeunes mineurs devenus majeurs ou titulaires d’un diplôme, l’accompagnement n’est pas obligatoire, explique Ségolène Petit, du Collectif de soutien aux jeunes isolés étrangers du Loiret (Cojie). Mais, au fil des semaines, de nombreux jeunes sont lâchés dans la nature dans la discrétion la plus totale. »

Avant d’être abandonnés à leur sort, ces jeunes, comme Diallo (1), 16 ans, sont « parqués » dans des hôtels bas de gamme. « Nous avons une chambre, un petit déjeuner et deux repas à base de riz et de pâtes, explique le jeune homme, également originaire d’Afrique subsaharienne. L’hôtel où je suis logé ne fait que ça, nous sommes les seuls résidents. Le propriétaire a totalement cessé ses activités et même ouvert un autre hôtel pour doubler ses capacités d’accueil. » Autant dire que le business est rentable. C’est dans l’un de ces hôtels, fin juin, qu’un jeune mineur est décédé dans des conditions troubles. « On n’a pas d’éducateurs en nombre suffisant et aucun accompagnement sérieux pour nos études, dénonce Sylvain. À Tours, on nous écoutait, on nous aidait. Ici, à Orléans, le département délègue à des commerçants. »

Tous n’ont pas connaissance de leurs droits

Comme si cela ne suffisait pas, ces jeunes se retrouvent souvent coincés dans un imbroglio administratif. « Dans les réunions, les associations de soutien nous conseillent, à juste titre, d’être scolarisés ou de trouver un apprentissage, explique un autre jeune. Un camarade qui avait deux CAP a trouvé une entreprise en alternance, mais le patron a refusé de payer la taxe d’apprentissage, du coup on lui demande de quitter le ­territoire. » Ce dernier a opté pour un recours devant les tribunaux, mais tous n’ont pas connaissance de leurs droits, d’où l’importance des réunions menées par les comités de soutien. « Nous avons saisi le Défenseur des droits et lancé une pétition pour que ces jeunes ne se retrouvent pas à la rue, explique Franck, du collectif immigration de la CGT du Loiret. Ils sont pour la plupart en apprentissage, donc futurs salariés corvéables à souhait, d’où notre implication dans la bataille. »

Contacté par l’Humanité, le conseil départemental se justifie : « À ce jour, 415 mineurs non accompagnés sont pris en charge par le département jusqu’à leur majorité ou la fin de leur année scolaire (…). Dès lors qu’ils ont 18 ans ou à la fin de leur année scolaire, ces jeunes entrent dans le droit commun et relèvent alors de dispositifs gérés par l’État, notamment dans le cadre de sa ­politique migratoire. » Frappant d’humanité. Le département précise cependant que certains jeunes devenus majeurs et dans certaines conditions peuvent « bénéficier du dispositif “allocation jeunes ­insertion Loiret” ».

Face à ces situations, certains élus se mobilisent. Michel Ricoud, conseiller métropolitain PCF, a tiré la sonnette d’alarme : « Je suis intervenu auprès du président de la République, des parlementaires, des élus de la métropole pour qu’ils ne laissent pas faire ce véritable drame humain. » Le collectif appelle, de manière régulière et jusqu’au 31 août, à de nouveaux rassemblements de soutien.

(1) Les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés.
Joseph Korda

Le casse-tête de l’authentification des papiers. « Document authentique mais pas recevable » : c’est la formule utilisée par les préfectures pour signifier leur refus d’accepter l’acte de naissance des mineurs étrangers comme preuve de minorité. Pour prouver leur identité, il est demandé aux jeunes de contacter l’ambassade de France de leur pays pour qu’elle authentifie leurs documents. Certaines refusent ; d’autres, comme celle du Pakistan, disposent d’enquêteurs pour le faire. Souvent, leurs investigations conduisent à l’invalidation des papiers. Parfois à tort. De même, à leurs 18 ans, les jeunes arrivés seuls en France ont le plus grand mal à obtenir un titre de séjour les autorisant à travailler. Ainsi se décline la panoplie des tracasseries administratives visant à retarder leur prise en charge ou à les écarter des institutions censées les protéger.

Enfance. Le Loiret veut se débarrasser des jeunes étrangers isolés - L'Humanité, jeudi 8 août 2019, Joseph Korda
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9 août 2019 5 09 /08 /août /2019 05:40

 

Cinq ans après leur reprise de l’usine de thés et d’infusions de Gémenos, près de Marseille, les ex-Fralib rencontrent à nouveau un problème de trésorerie et relancent leur campagne de financement participative.

La coopérative Scop-TI (Société coopérative ouvrière provençale de thés et infusions) traverse une nouvelle crise, mais rien qui ne soit insurmontable pour les anciens salariés de Fralib. En cause, le manque de trésorerie en raison du coût logistique et l’inertie des banques.

Après 1 336 jours de lutte contre le géant de l’agroalimentaire Unilever, les anciens salariés de l’unité de Gémenos, près de Marseille, ont réussi à sauver leur usine, racheter les machines et créer leur propre marque. Une victoire qui leur a permis de créer la coopérative Scop-TI il y a cinq ans. Mais, malgré le succès de la marque, l’équilibre financier n’est pas encore atteint. « Tous les spécialistes disent que l’installation d’une marque sur le marché prend une décennie », a expliqué Gérard Cazorla, un des dirigeants de Scop-TI, à l’Humanité Dimanche. Et, pour remporter de nouveaux marchés, la coopérative a besoin de fonds. « Nous souhaitons faire progresser l’entreprise, mais nous n’avons pas les conditions favorables pour y arriver », déplore Olivier Leberquier, directeur général délégué de la coopérative. Le temps de latence est long entre un appel d’offres lancé par un acheteur et son aboutissement en retour sur investissement. Entre douze et dix-huit mois. « Nous engageons des frais importants liés au développement de la coopérative, c’est pourquoi nous manquons de trésorerie », poursuit-il.

Les donateurs sont toujours aussi solidaires

Deux ans après une première crise, la coopérative relance sa campagne de sociofinancement sur le site Internet de Scop-TI. Et les donateurs sont toujours aussi solidaires qu’en 2017. 29000 euros ont été récoltés depuis le 1er juillet. Une somme importante, certes, mais ne permettant pas encore à la Scop de sortir de la crise. Les coopérateurs ne chiffrent pourtant pas leur objectif. « Nous ne voulons pas figer notre campagne de financement dans le temps, ni indiquer un montant précis. Nous préviendrons les donateurs dès que nous aurons atteint notre point d’équilibre », précise Olivier Leberquier. Depuis 2017, près de 316 000 euros ont été collectés.

Les banques restent pour autant frileuses. « Le Crédit mutuel ne s’est pas encore prononcé, mais il nous a autorisé un découvert temporaire de 50 000 euros jusqu’à la fin de l’été », explique le directeur général. Cependant, le Crédit coopératif maintient ses positions. « À nouveau, la banque ne nous épaule pas. En 2017, notre dossier avait également été refusé. Pourtant, notre chiffre d’affaires est en hausse depuis cinq ans. » Il a même été multiplié par dix depuis 2014 et devrait atteindre les 4 millions d’euros cette année. Les coopérateurs sont donc dans l’obligation de s’appuyer sur d’autres leviers. La vente en ligne de la gamme bio Scop-TI et des produits de la gamme 1336, en référence aux jours d’occupation de l’usine de Gémenos, leur permet de récupérer des fonds. Les machines non utilisées de l’usine, car trop nombreuses pour la production actuelle, sont également en passe d’être vendues à d’autres entreprises. Et pour initier cette nouvelle phase de développement tout en réduisant les frais, un projet de reprise du terrain sur lequel se situe l’entreprise, est en cours par des mutuelles. Cela permettrait de faire baisser le montant du loyer que paye actuellement la coopérative à la métropole d’Aix-Marseille. Les négociations sont déjà amorcées et devraient rapidement aboutir.Mais malgré la mise en place de ces différents modes d’action, la coopérative continue de rencontrer un problème de trésorerie. Les salariés coopérateurs se serrent eux aussi la ceinture. « Ils ont abandonné leur 13e mois », indique le directeur général. Quelques milliers d’euros qui ont renfloué les caisses de la Scop. « Je reste optimiste. Nous sommes toujours là depuis la création de Scop-TI, il y a cinq ans. Et nous allons continuer à nous battre. Nous n’allons rien lâcher », souffle le directeur général. D’ici à la fin de l’année 2019, la Scop aimerait pouvoir employer deux derniers coopérateurs, anciens salariés de l’époque Fralib Unilever. Mais aussi, à terme, créer de nouveaux emplois.

Mélanie Costa

 

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9 août 2019 5 09 /08 /août /2019 05:38

Par Gérard Streiff

 
L’étude de Matthew Stewart, intitulée « La nouvelle aristocratie américaine », parue dans The Atlantic de juin 2018, est singulière. Ce philosophe montre, avec force documents et non sans humour, comment la société américaine se fracture, comment se recompose la classe dominante, dont il dit faire partie, comment ce processus menace la démocratie, comment aussi des changements s’imposent. Un propos américain qui n’est pas sans point commun avec notre propre histoire.

 

On connaît tous ce chiffrage hautement symbolique : 1 % des plus fortunés accapare l’essentiel des pouvoirs au détriment de 99 % de la planète. Pierre Laurent avait titré un essai (99 %,  le Cherche-Midi, 2016) sur cet affrontement radical. Le mouvement Occupy Wall Street en avait fait son étendard : « Nous sommes les 99 %. » L’écrivain et philosophe américain Matthew Stewart explore ce thème, le nuance et le module dans une étude intéressante, probablement discutable mais riche en enseignements. Stewart distingue trois classes : celle des 0,1 %, les plus fortunés des plus fortunés, soit 323 000 personnes, familles comprises, une caste bien plus étroite encore que le 1 % évoqué ordinairement ; les 90 % qui forment l’essentiel du peuple ; et enfin, entre les deux, les 9,9 %, enfants de la « méritocratie », dit-il, qui n’auraient qu’un objectif : se consolider en tant que classe, se barricader sur leurs privilèges, devenir bourgeois comme les bourgeois, comme on aurait dit en 1968.

Les 0,1 % sont, selon lui, les grands gagnants de la concentration des richesses : ils détenaient 10 % de la richesse américaine en 1963 et 22 % en 2012. Dans le même temps, les 90 % « inférieurs » ont perdu en trois décennies douze points, soit autant que ce que les 0,1 % ont engrangé. Et entre les deux, il y a un groupe « qui va très bien, qui a conservé sa part de tarte […] et qui en tant que groupe possède beaucoup plus de richesses que les deux autres réunies ».

On dit, on répète que la société américaine est ouverte, que la mobilité sociale est son credo et que l’inégalité est en quelque sorte le prix à payer. Faux, dit l’article : la mobilité sociale américaine diminue. « Il y a un mythe fondateur de la méritocratie américaine : notre succès n’a rien à voir avec l’échec des autres. » Mais l’auteur montre comment ces 9,9 % construisent des murs pour barricader leur pouvoir. « L’argent est peut-être la mesure de la richesse mais il est loin d’être la seule. La famille, les amis, les réseaux sociaux, la santé personnelle, la culture, l’éducation et même le lieu de résidence sont également des moyens d’être riches. Ces formes de richesses non financières ne sont pas simplement des avantages d’être membres de notre aristocratie. Ils nous définissent. Nous sommes des gens de bonne famille, en bonne santé, avec de bonnes écoles, dans de bons quartiers et dotés de bons emplois. » Il détaille avec une sidérante précision ces divers éléments. On y apprend par exemple que « l’obésité, le diabète, les maladies cardiaques, rénales et hépatiques sont deux à trois fois plus fréquents chez les personnes dont le revenu familial est inférieur à 35 000 dollars que chez celles dont le revenu familial est supérieur à 100 000 dollars. »
Et le plus important, souligne-t-il, c’est que « nous avons appris à transmettre tous ces avantages à nos enfants ».

 

Une société qui se calcifie

L’étude s’attarde sur les dépenses incroyables fournies par les membres de ce groupe en matière d’éducation (écoles privées, collèges de marque, universités ciblées). Cette « bonne éducation » assure ensuite « une prime », un bonus tout au long de la vie professionnelle. Ce n’est pas vraiment une question de compétence mais de « marque », d’appartenance à la bonne filière. Cela vaut pour toutes les carrières de médecin, d’avocat, de financier, par exemple. Stewart signale que le pouvoir fédéral, dont ce groupe aime se plaindre, sert en fait parfaitement ses intérêts, ponctionnant les plus pauvres (sous diverses formes de fiscalité indirecte et de taxes notamment) pour redistribuer la manne aux fortunés. Le lieu de résidence aussi est essentiel, ce qu’il appelle « le code postal doré. » « Le code postal est ce que nous sommes. Il définit notre style, annonce nos valeurs, établit notre statut, préserve notre richesse et nous permet de transmettre à nos enfants. Cela étrangle aussi lentement notre économie et tue notre démocratie. »
L’auteur se veut lucide. « La classe méritocratique a maîtrisé le vieux stratagème de la consolidation de la richesse et du transfert des privilèges aux dépens des enfants des autres. Nous ne sommes pas les témoins innocents de la concentration croissante de la richesse, nous sommes les principaux complices d’un processus qui étrangle lentement l’économie, déstabilise la politique américaine et érode la démocratie. Nos illusions de mérite nous empêchent maintenant de reconnaître la nature du problème que représente notre émergence en tant que classe. Nous avons tendance à penser que les victimes de notre succès ne sont que les personnes exclues du club. Mais l’histoire montre très clairement que, dans le genre de jeu auquel nous jouons, tout le monde perd au final. »

« Les 9,9 %, enfants de la “méritocratie” n’auraient qu’un objectif : se consolider en tant que classe, se barricader sur leurs privilèges. »

Ses critiques visent juste : « Le défi permanent de notre époque est de renouveler la promesse de la démocratie américaine en inversant les effets calcifiants de l’accélération des inégalités. Tant que l’inégalité régnera, la raison sera absente de notre politique. »

Il termine son étude sur un appel à inverser l’ordre des choses : « Le genre de changement qui compte vraiment nécessitera l’intervention du gouvernement fédéral. Ce qui crée un pouvoir monopolistique peut aussi le détruire. Ce qui permet à l’argent d’entrer dans la politique peut aussi le supprimer. Celui qui a transféré le pouvoir du travail au capital peut le restituer. Le changement doit aussi se produire aux niveaux national et local. Sinon comment allons-nous ouvrir nos quartiers et restaurer le caractère public de l’éducation ? »


Trump et le ressentiment

L’élection présidentielle de 2016 a marqué un tournant dans l’histoire du ressentiment aux États-Unis. En la personne de Donald Trump, le ressentiment est entré à la Maison-Blanche. Il est né d’une alliance entre un minuscule sous-groupe des 0,1 % de super-riches (pas nécessairement tous américains) et un grand nombre de 90 % qui représentent à peu près tout ce que ne représentent pas les 9,9 %. La grande majorité de ces électeurs sont les perdants de la nouvelle économie ; ils ne sont pas pauvres mais ils ont des raisons de se sentir jugés par le marché, et jugés insuffisants. Les comtés qui ont soutenu Hillary Clinton représentaient 64 % du PIB alors que les comtés de Trump n’en comptaient que 36 %. Aaron Terrazas, économiste à Zillow, a montré que la valeur moyenne des maisons dans les comtés de Clinton était de 250 000 dollars, tandis que la moyenne dans les comtés de Trump était de 154 000 dollars. En tenant compte de l’inflation, les comtés de Clinton ont bénéficié d’une appréciation du prix de l’immobilier de 27 % entre janvier 2000 et octobre 2016. Cette hausse n’était que de 6 % dans les comtés de Trump. De la même manière, les habitants du « pays Trump » ont été les perdants dans la bataille de la santé. Selon Shannon Monnat, professeure agrégée de sociologie à Syracuse, les comtés de la Rust Belt qui ont voté Trump sont ceux qui ont perdu le plus grand nombre de personnes ces dernières années, morts de désespoir (alcool, drogue, suicide). […] Ceci explique que l’un des mots préférés de Trump est « injuste ». C’est le seul mot que le ressentiment veut entendre.
Extrait de Matthew Stewart, « La nouvelle aristocratie américaine », The Atlantic, juin 2018.

Cause commune n° 10 • mars/avril 2019

 

 

 

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