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28 novembre 2017 2 28 /11 /novembre /2017 15:24

LES FUSILLéS

Restés debout dans le granit
Face à tous ceux qui les renient
Devant la mer en cheveux blancs
Quatre F.T.P. sont en vigie
Puisqu'ils avaient donné leur vie
Et leur amour pour un printemps. 
J'ai voulu en garder raison
En combattant d'un coeur sauvage
Pour atteindre au dernier rivage... 
Mais jamais n'en vint la saison ! 
         Printemps trahi, volé au temps
         J'en pleure sous mes cheveux blancs. 
              

                                   Charles Tillon 
                          Plage de Deauville, le 9 avril 1978


Mot manuscrit à la main de CT

Cher ami, cette note de voyage en remerciement pour votre hospitalité dans Bretagnes par temps de gel.. 
Bien à vous 
Charles Tillon


Note de Michel Kerninon.

En mars 1978 la "gauche unie" venait de perdre les élections législatives.  

Tableau de Charles Tillon - Grève au Pays Bigouden

Tableau de Charles Tillon - Grève au Pays Bigouden

1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance

Michel Kerninon, ancien journaliste au Télégramme, écrivant aussi dans d'autres revues des textes sur la littérature, la politique, l'histoire, militant syndical, a eu la gentillesse de nous faire parvenir ce huitième exemplaire de la revue "Bretagnes" dont le siège se trouvait à Morlaix, Impasse de la Fontaine-au-Lait, daté de mars 1978.

On y trouve un long et passionnant entretien de Charles Tillon par Michel Kerninon (réalisé en janvier 1978 à la Bouexière, en Bretagne, où Charles Tillon était retiré depuis 1975) à l'occasion duquel Charles Tillon, dont l'épouse, Raymonde Tillon-Nédelec, ancienne résistante communiste et députée à la libération comme lui, est décédée cette semaine, revient sur son itinéraire de militant et de responsable politique, sa participation à l'histoire du mouvement ouvrier et du communisme, et sur les leçons qu'il en tire, tout en se prononçant aussi sur les perspectives d'avenir pour la gauche en période de rupture du programme commun et de l'alliance PCF-PS.

Michel Kerninon précise les conditions de cet entretien, mûrement préparé, et enregistré au magnétophone:

"Deux autres collaborateurs de la revue Bretagnes étaient du voyage matinal d'hiver glacé ce jour-là dans ma 2CV en route de Morlaix vers La Bouexière chez les Tillon qui venaient de construire dans un lotissement, tout à fait comme un jeune couple. Leurs enfants avaient à peu près mon âge ou un peu moins.

Et donc les amis que je vais te présenter étaient présents et intervenants au cours de la journée, comme au restaurant (qui nous fut offert par le couple Tillon; et Charles, joyeux d'être en notre compagnie, avait même "exceptionnellement" pris un Ricard à l'apéro) J'avais longuement et soigneusement préparé et conduit l'entretien.

Ces camarades, je les indique. Il s'agit de Kristian Keginer, poète et écrivain de Morlaix, qui achève aujourd'hui une belle carrière ... à la Caisse des Dépôts.

Et de Michel Bescond, à l'époque journaliste au Télégramme avec moi, ancien grutier au port de Marseille et devenu spécialiste de marine, la pêche en particulier et il a mis un place un système de cotation des prix du poisson payé en criée, publié dans le journal, ce qui a bouleversé quelques secrets de mareyeurs et fait le bonheur des marins.

Ensuite, il fut l'un des dirigeants-actionnaire du Chasse-Marée puis créateur de la revue Armen. Il fut ensuite directeur salarié de Coop-Breizh, coopérative qu'il a redressée. Et enfin Michel quitta Coop Breizh (siège à Spézet) et devant co-directeur des Editions d'art Palantines jusqu'à la liquidation.

Après cette rencontre avec Charles et Raymonde Tillon, un couple attachant s'il en est, nous avons gardé des liens assez forts et entretenu une correspondance. Je me souviens en particulier de l'envoi d'un poème assez désespéré de Charles en vacances sur la côte normande, tandis que la gauche se déchirait. Mais sans doute était-ce à l'époque moins grave que ce qui se passe aujourd'hui dans notre pays et en Europe. " . (Michel Kerninon)

Décédé en 1993 à Marseille, Charles Tillon est né en 1897 à Rennes.

Ajusteur à l'arsenal de Brest en 1916, il s'est embarqué comme matelot mécanicien sur le croiseur "Guichen". En 1919, par solidarité avec la révolution bolchevique que combat l'armée française, il provoque une mutinerie sur le "Guichen" en Méditerranée et est condamné au bagne pour 5 ans, et envoyé au Maroc. Bénéficiant finalement d'une amnistie comme les mutins de la mer Noire, il devient ouvrier ajusteur à Nantes, puis adhère au Parti Communiste en 1921. Adhérent à la CGT, il soutient la scission avec la création de la CGTU en 1923 et devient permanent de la CGTU en 1924.

C'est à ce titre qu'il est très actif dans la grève des pêcheurs et des sardinières du Pays Bigouden et de la région de Douarnenez, se faisant même élire conseiller municipal sur la liste communiste de Daniel Le Flanchec en 1925 à Douarnenez en même temps que la première femme élue illégalement, Joséphine Pencalet.

A Michel Kerninon, en 1978, il dit avec passion l'importance dans sa vie de ces combats avec les pêcheurs et les ouvrières du pays Bigouden et de Douarnenez:

"J'ai donc appris à devenir ce que le "Comité des Forges" de l'époque appelait un "gréviculteur". La plus belle des grèves, la plus héroïque et la plus empreinte de sentiment populaire fut certainement pour moi la grève de Douarnenez. Alors j'en ai fait d'autres, au milieu de ceux qui parlaient la langue bretonne, je suis vraiment devenu non seulement un Breton de la région des fortifications qui défendaient la Bretagne autrefois, c'est à dire de l'Ille-et-Vilaine mais de cette Bretagne plus profonde, moins connue et si vivante, celle du Finistère, des Côtes-du-Nord, cette Bretagne "qui va au-devant de la mer" (...) En Bretagne, "il y avait une grande misère, le long des côtes surtout. Pour le reste, il n'y avait pratiquement pas d'industrie. Sur la côte, la pêche nourrissait l'industrie de la conserve; à la fois la pêche du 19e siècle et le début d'une industrialisation de la conserve. Les pêcheurs étaient des artisans. Ils allaient à la mer et ne connaissaient qu'elle. Mais, à terre, ils se défendaient mal. Les tempêtes ne leur faisaient pas peur, mais ils restaient désarmés devant les préfectures et leurs moyens de police. Soutenus par l'appareil d'Etat, les acheteurs s'entendaient pour contraindre les pêcheurs à vendre le moins cher possible. Mais voilà bientôt qu'en Bretagne, la grande grève des usines de Douarnenez rayonnait de la juste fierté d'avoir vaincu le patronat le plus rapace qu'on puisse trouver puisqu'il avait osé aller jusqu'à l'organisation du crime pour terroriser la population et faire tuer, s'il l'avait pu, le maire communiste Le Flanchec! Avant la grève, les pêcheurs n'étaient pas syndiqués, il fallait donc organiser dans le même syndicat le patron de la barque qui gagnait un peu plus, et ses matelots, ses compagnons de tempêtes et de souffrances. Ce n'était pas simple et c'est sans doute pourquoi il n'y avait pas eu, jusque là, de syndicat durable. Mais les femmes avaient le leur. Et la fierté qui les avaient animées gagnait en 1925 tous les ports de Bretagne. La colère déferlait parmi les ouvrières les plus exploitées, comme à Pont-l'Abbé ou à Concarneau, où une jeune fille d'usine sur quatre ou cinq était tuberculeuse... Le mouvement victorieux des femmes d'usine a entraîné les pêcheurs à mieux prendre conscience de leurs droits, et qu'en labourant la mer, ils étaient la source de tout. Mais le patronat de la côte aussi s'organisait. Et, au lieu de petits syndicats locaux, les patrons jusqu'à Saint-Jean-de-Luz, s'unissaient en un énorme Comptoir d'achat soutenu par le Comité des armateurs de la marine marchande et par l'Administration maritime. Alors commença leur grande offensive pour rationaliser l'industrie de la pêche, pour exporter des capitaux et des usines au Portugal, au Maroc, là où les salaires sont les plus misérables. Une "révolution" sur le dos des salariés et qui dure encore.. Nous avions été heureux pendant deux ans. Mais viendraient les défaites! Rationaliser l'industrie de la pêche pousserait à rationaliser l'industrie de la conserve. Aussi, commençait une autre histoire de la mer..."

A l'époque où il rencontre Michel Kerninon, Charles Tillon a déjà pris des grandes distances avec le Parti Communiste, parti dont il a été exclu en 1970, en même temps que Roger Garaudy, Jean Proteau, et Maurice Kriegel Valrimont (pour dénonciation entre autre de la répression du printemps de Prague et de l'invasion soviétique en Tchécoslovaquie) après avoir été écarté de la direction du Parti dont il faisait partie depuis 1932, date de son intégration au Comité Central, en 1952, pour désaccord avec Thorez et la ligne stalinienne de l'époque. C'est de la sorte avec beaucoup d'esprit critique que Tillon analyse le fonctionnement du parti communiste quand il y militait encore et après son éviction. Il raconte son voyage en URSS en 1931 comme représentant de la CGTU, sa mission en Espagne en 1939 pour tenter d'évacuer, sans soutien, 20 000 Républicains du port d'Alicante, son analyse du pacte germano-soviétique, et, un peu, son action dans la résistance, ses rapports avec de Gaulle dont il a été un des ministres communistes à la Libération (de l'Air, de l'Armement, et de la reconstruction).

Charles Tillon, à l'origine de la création des FTP et du premier appel à la résistance au fascisme hitlérien le 17 juin 1940, ancien député maire d'Aubervilliers à la Libération, restera une très grande figure de l'engagement communiste et social dans le tourbillon et les tragédies du XXe siècle. Un homme droit, indépendant, qui eut aussi le courage de dénoncer l'inacceptable.

1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
1978: Charles Tillon revient sur sa traversée du siècle et ses engagements avec Michel Kerninon dans la revue Bretagnes n°8 : Désenchaîner l'espérance
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