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10 juillet 2019 3 10 /07 /juillet /2019 09:17
Pollution. La Bretagne se noie encore sous les algues vertes - L'Humanité, 8 juillet 2019, Alexandra Chaignon
Lundi, 8 Juillet, 2019
Alexandra Chaignon

Envahie d’algues vertes, la plage du Bon Abri, à Hillion (Côtes-d’Armor), a dû être fermée pour éviter tout accident. Romi/REA

Envahie d’algues vertes, la plage du Bon Abri, à Hillion (Côtes-d’Armor), a dû être fermée pour éviter tout accident. Romi/REA

Toxiques et nauséabondes, les « laitues de mer » continuent de proliférer malgré les plans d’action qui se succèdent. Un phénomène qui pourrait être jugulé par un changement de modèle agricole.

Chaque année, c’est le même scénario : entre mai et juillet, des tonnes d’algues vertes prolifèrent sur le littoral breton, notamment dans la baie de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor). « Elles sont arrivées avec six semaines d’avance et six plages sont fermées », relevait en fin de semaine dernière André Ollivro, coprésident de l’association Halte aux marées vertes. Conséquence directe de cette prolifération intense : l’usine de Launay-Lantic, chargée du traitement des algues vertes dans la baie de Saint-Brieuc, frôle la saturation et a dû fermer en urgence, les riverains se plaignant d’odeurs insoutenables.

Le phénomène n’est certes pas nouveau mais il s’amplifie depuis l’après-guerre, et particulièrement depuis les années 1970 et l’intensification de la production agricole : il est d’ailleurs établi que c’est bien la fertilisation agricole qui est responsable à plus de 90 % des flux de nitrates qui enrichissent les cours d’eau, puis engraissent les algues vertes. Quant à sa précocité, elle s’explique par les conditions météorologiques particulières cette année : des milliers de fragments d’algues insuffisamment dispersés l’hiver dernier, un printemps lumineux et chaud, puis de fortes précipitations en juin ont fait grimper le débit des cours d’eau, donc l’apport de nitrates, qui favorisent le développement de ces « laitues de mer », particulièrement toxiques. Car en pourrissant, ces ulves produisent un gaz – le sulfate d’hydrogène – qui à concentration élevée peut s’avérer mortel en quelques minutes.

Par année, quelque 50 000 tonnes d’algues vertes sont ramassées

Il aura fallu attendre 2009 et le décès d’un homme de 48 ans qui a succombé au pied de son camion de ramassage d’algues, puis la mort d’un cheval, intoxiqué par des ulves en décomposition, pour que les pouvoirs publics lancent un plan de lutte contre les algues vertes dans les huit baies touchées. Chaque année, quelque 50 000 tonnes d’algues vertes sont ainsi ramassées par camions. Une partie est épandue sur les terres agricoles, pourtant déjà saturées en azote, l’autre partant dans des stations de traitement et de compostage spécifiques. Et pour éviter les accidents, certains maires ferment carrément leurs plages, comme à Hillion.

« Depuis dix ans, il y a une baisse de la concentration en nitrates des cours d’eau, observe Sylvain Ballu, responsable du suivi des marées vertes au Centre d’étude et de valorisation des algues (Ceva), basé à Pleubian (Côtes-d’Armor). Mais les nappes phréatiques mettent des années à se décharger de ces nitrates. » Pour les défenseurs de l’environnement, qui reconnaissent que la qualité de l’eau s’améliore, on est encore loin du compte pour ne plus avoir de marées vertes en Bretagne. « Il faut que le plan algues vertes (qui repose sur une adhésion volontaire des agriculteurs – NDLR) devienne obligatoire pour changer d’agriculture et aider les reconversions. Il faut donner plus de moyens financiers et de soutiens agronomiques », assène André Ollivro, néanmoins conscient des « efforts » de la profession.

Face à cette crise sanitaire et environnementale, les militants écologistes appellent dans un premier temps à baisser le plafond de fertilisation azotée des parcelles et, ensuite, à un changement de pratiques, et même une « révolution agricole ». Financés par de l’argent public via l’Agence de l’eau, l’État, la région et les départements, les plans s’apparentent, pour France Nature Environnement, à « une série de rustines sur une chambre à air en bout de course. Ces financements conséquents (55 millions d’euros pour le plan de lutte contre les algues vertes 2017-2021) pourraient être mieux utilisés, au profit notamment de l’expérimentation des changements de modèles à l’échelle territoriale ». Alimentation des élevages par des cultures locales, élevages biologiques ou fermiers, circuits courts, retour de l’herbe pâturée, diminution du maïs et arrêt d’engrais azotés chimiques, couverture des sols toute l’année… autant de mesures à même de faire baisser le taux de nitrate dans les eaux… et donc d’endiguer les marées vertes.

En attendant, sur le terrain, la situation devrait s’améliorer, pronostique Sylvain Ballu : « Les conditions sèches vont diminuer les débits des rivières et couper le robinet des nitrates. »

https://www.humanite.fr/pollution-la-bretagne-se-noie-encore-sous-les-algues-vertes-674564

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10 juillet 2019 3 10 /07 /juillet /2019 09:08
De quoi Libra, la monnaie Facebook, est-elle le nom ? Yann Le Pollotec PCF 10 juillet 2019

En juin 2019, Facebook annonçait la création de sa propre crypto-monnaie (1), qui aurait cours début 2020 et qui porte le nom de « Libra », en référence à l’unité de mesure du poids des pièces dans l’Empire romain : tout un symbole. Libra est lancé en partenariat avec 28 entreprises, fonds financiers, services de payement et ONG dont Visa, Mastercard, PayPal, Uber, Ebay, Booking, Spotify, l’opérateur de télécom britannique Vodafone et le français Iliad (2).

Facebook ne battra pas monnaie à proprement parler car il ne s’agit pas de création de monnaie ex nihilo mais d’un moyen de payement assis sur un panier de devises existantes. Si Libra voit effectivement le jour, Facebook va offrir ce moyen d’échange à ses plus de 2,7 milliards d’utilisateurs dans le monde, en créant la première crypto-monnaie grand public. Il deviendra, presque à l’égal des grandes banques centrales, un « tiers de confiance » à l’échelle planétaire. Il est probable qu’Amazon et Google (3) emboîte rapidement le pas à Facebook et crée à leur tour leur propre crypto-monnaie (4).

Officiellement pour Facebook, il s’agit d’offrir « une devise et une infrastructure financière mondiales simples, au service de milliards de personnes » en particulier », y compris en visant le marché des « 1,7 milliard d’adultes dans le monde (…) encore exclus du système financier et de l’accès à une banque traditionnelle, alors qu’un milliard d’entre eux possèdent pourtant un téléphone portable et que près d’un demi- Mais pour comprendre le véritable objectif que recherche Facebook, et qui va bien plus loin que celui de concurrencer le système bancaire traditionnel, il faut revenir à la jeune histoire des plateformes numériques capitalistes mondialisées. Ces plateformes sont nées sur les ruines du krach boursier de 2000 provoqué par l’éclatement de la bulle Internet en l’absence de modèle économique viable. Elles se sont développées sur la captation des données à leur profit et ont créé de véritables modèles économiques monopolistiques. Elles ont accumulé après la crise financière de 2008 une immense capitalisation boursière grâce aux milliers de milliards que les banques centrales ont injectés dans les circuits financiers. En accaparant la valeur produite par le travail de transformation des données, elles visent au monopole et à la rente. Leur stratégie est d’enfermer les usagers dans leur propre univers, ce qui est en contradiction totale avec la promesse initiale d’Internet d’une interconnexion de réseaux décentralisés où chacun était de manière égalitaire producteur et consommateur d’information. Elles sont en train de détruire Internet de l’intérieur. milliard ont accès à Internet » (5).

Ainsi Facebook à mis en place en Afrique un service d’accès gratuit à Internet par satellite, mais il ne donne accès qu’aux services et qu’aux applications de Facebook et de ses partenaires (6). Des intelligences artificielles de Google lisent tous vos mails envoyés sur Gmail et analysent vos requêtes sur son moteur de recherche, afin de vous proposer des offres commerciales vous correspondant. Amazon a l’ambition de faire passer par lui toute notre consommation, qu’il s’agisse de la nourriture, des biens manufacturés ou des biens et services culturels. Pour cela il entend installer des objets connectés comme ses enceintes Alexa chez nous afin d’enregistrer et d’analyser en permanence notre comportement. Ce qui est visé : la disparition de tous les réseaux de distribution ou leur soumission à Amazon. Dans le dispositif de l’univers Facebook, Libra servira à accumuler de précieuses données financières personnelles qui pourraient rendre Facebook incontournable en matière d’évaluation des risques de crédit.

“Un pouvoir qui n’est pas qu’économique”

Les firmes mondialisées du capitalisme de plateforme ont acquis un pouvoir qui n’est pas qu’économique. En ayant accès en temps réel à des milliards de données personnelles, au graphe social de chacun, elles connaissent mieux que les États et parfois que les individus eux-mêmes, leurs goûts, leurs désirs, leurs passions, leurs déplacements, leurs phobies, leurs angoisses, leurs addictions, leurs capacités d’interactions sociales, leurs états de santé. Cet accès et cette capacité de traitement de milliards de données personnelles et de relations entre ces données leur donnent à l’échelle mondiale un pouvoir gigantesque qui est de nature politique. On parle même maintenant d’identité numérique, voire d’État civil numérique qui serait à discrétion de ces plateformes. Ainsi on aurait une identité Facebook ou Amazon comme on a un état civil par l’État Français ou comme on avait un certificat de baptême de l’Église sous l’ancien régime. Ces plateformes deviennent des tiers de confiance à l’instar des notaires, des États, des banques à l’échelle planétaire.

Ces plateformes n’ambitionnent pas que de faire des profits ; elles ont une vision du monde libertarienne où chacun est entrepreneur de sa propre vie, pour paraphraser Michel Foucault. Facebook finance la congélation d’ovocytes de leurs salariées afin «de favoriser l’emploi des femmes et les aider à mieux maîtriser leur carrière ». Google, avec sa filiale Calico, a l’ambition de « tuer la mort ». Inspiré par le transhumanisme, Google est persuadé que l’homme et l’ordinateur vont fusionner afin de fonder une nouvelle humanité. Son PDG a déclaré : « Si nous nous y prenons bien, nous pouvons résoudre tous les problèmes du monde. » Ainsi une nouvelle idéologie est née sur les ruines des « États providences » : le « solutionnisme » (7). C’est-à-dire la croyance que chaque problème relèverait de comportements individuels et qu’à chacun de ces problèmes correspondrait une application technologique.

Le solutionnisme est un symptôme d’une grande misère de la politique. Misère d’une pratique de la politique réduite à la communication, incapable de produire du sens, de penser mondial, et renonçant à résoudre les problèmes de l’humanité. Misère de la politique, parce qu’avec le numérique, les questions de pouvoir, de participation et de représentation se posent de manière radicalement nouvelle.

Les plateformes numériques en elles-mêmes n’ont aucune valeur. Ce qui leur donne de la valeur ce sont les données qu’elles exploitent ainsi que les interactions entre ses utilisateurs. Uber n’investit pas dans les transports, ni Airbnb dans l’hôtellerie. Google ne crée pas d’informations et Youtube ne tourne pas de vidéo.

Le nuisible n’est pas la plateforme mais l’asservissement au capitalisme. Le capitalisme de plateforme doit être attaqué sur tous les fronts à la fois : lois antitrusts et démantèlement, fiscalité, protections collectives des données personnelles, droit des travailleurs, et l’alternative avec le coopérativisme de plateforme et des plateformes conçues comme des communs numériques mondiaux assurant des missions de service public comme Wikipédia.

Construire un modèle alternatif au capitalisme de plateforme devient un enjeu politique majeur de civilisation qui appelle une société communiste.

Yann Le Pollotec, responsable de la commission Révolution numérique

 

1. Une crypto monnaie est un système de paiement électronique en pair à pair. Pour en savoir plus : https://blockgeeks.com/guides/fr/quest-ce-que-la-crypto-monnaie/

2. C’est-à-dire le groupe de Xavier Niel, propriétaire de Free.

3. https://courscryptomonnaies.com/actualite/google-blockchain

4. Le groupe a déjà déposé discrètement trois noms de domaines significatifs : amazonethereum.com, amazoncryptocurrency.com et amazoncryptocurrencies.com

5. https://libra.org/fr-FR/white-paper/?noredirect=fr-FR#introduction

6. L’Inde a justement interdit ce service d’accès gratuit de Facebook car il limitait l’accès à l’ensemble d’Internet.

7. Néologisme inventé par Evgeny Morozov : « L’aberration du solutionnisme technologique pour tout résoudre cliquez ici ». Éditions Fyp

 

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Published by Section du Parti communiste du Pays de Morlaix - dans ACTUALITE NATIONALE DU PCF INTERNATIONAL
10 juillet 2019 3 10 /07 /juillet /2019 08:51
 Le peintre Mariano Otero excellait dans les portraits de femmes, à la sensualité généreuse. | ARCHIVES OUEST-FRANCE

Le peintre Mariano Otero excellait dans les portraits de femmes, à la sensualité généreuse. | ARCHIVES OUEST-FRANCE

Le peintre rennais, célèbre pour ses baigneuses et danseuses de tango, était un portraitiste des femmes hors pair. Espagnol exilé sous Franco, c’était aussi un artiste engagé.

Les Rennais ne croiseront plus le peintre Mariano Otero, qui se rendait à vélo, sept jours sur sept, à son atelier. À Rennes, où il vivait, et à Dinard, où la galerie Vue sur mer exposait le peintre depuis 27 ans, tout le monde connaissait ses baigneuses aux formes généreuses et ses danseuses de tango. À 77 ans, le peintre d’origine espagnole, qui ne passait pas un jour sans dessiner, s’est éteint d’une maladie foudroyante, entouré de sa femme, de ses filles et de son frère Antonio.

C’est pour rejoindre son père, Républicain espagnol exilé à Rennes sous Franco, que le jeune Mariano Otero était arrivé dans la capitale bretonne, en 1956, à l’âge de 14 ans. Trop jeune pour s’inscrire en école d’art, il obtient bientôt une dérogation et devient le plus jeune diplômé des Beaux-arts de France. Avec son frère Antonio, qui épousera la peintre Clotilde Vautier, ils réaliseront leurs premières expositions à trois.

Artiste engagé

Les convictions antifascistes de son père ne quitteront pas Mariano Otero. Dans les années 1960-1970, membre de l’union des étudiants communistes, il réalisera de nombreuses affiches militantes : contre la dictature au Chili, pour Amnesty international ou la défense des immigrés.

« C’est un artiste engagé politique et humaniste, son œuvre se comprend à travers l’histoire de l’Espagne déchirée » , expliquait Delphine Durand, docteure en histoire de l’art, lors d’une conférence sur le thème Mariano, peintre de l’exil, qui a fait salle comble le 2 avril, à Rennes.

Admirateur des portraits en clair-obscur de Velázquez, mais aussi de Goya et de Picasso, Mariano Otero était très attaché à la culture espagnole. Il avait fondé, en 1999, le centre culturel espagnol à Rennes.

Portraitiste des femmes

C’était avant tout un portraitiste des femmes hors pair, dont il excellait à transcrire la sensualité généreuse et un peu mystérieuse, en particulier au pastel. C’est par elles qu’il s’était lancé en peinture. « J’ai réalisé le portrait de ma mère, ma sœur, mes petites amies, confiait-il en avril, à Ouest-France. Jusqu’à Marie-Alice, mon modèle privilégié, devenu ma femme. »

Le festival du film britannique de Dinard ne s’y était pas trompé, en lui confiant la réalisation de son affiche à plusieurs reprises. On se souvient notamment de ses baigneuses au maillot reprenant le drapeau britannique.

« Paris, Londres, New York et bien sûr Madrid : notre galerie a vendu ses œuvres dans le monde entier, souligne Thierry Dobé, son galeriste dinardais. Il était sans doute trop figuratif pour les musées, dont il n’a pas cherché la reconnaissance. Ce n’est pas cela qui l’intéressait. »

Actif jusqu’au bout, Mariano Otero s’en est allé après avoir mis la dernière main à deux nouvelles expositions de ses œuvres, prévues en août, à Roscoff et à Dinard.

 

Mariano Otero, dans son atelier, quartier Cleunay. | ARCHIVES

Mariano Otero, dans son atelier, quartier Cleunay. | ARCHIVES

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10 juillet 2019 3 10 /07 /juillet /2019 08:45
Majorité municipale, une gestion du passé
 
Comme chaque année depuis le début du mandat, la majorité pratique la rétention des moyens de fonctionnement :  moyens très insuffisants accordés aux associations, aux parents d’élèves, au CCAS, en personnels municipaux, absence de réflexion globale et sérieuse sur l’ensemble des besoins sociaux, etc...
 
La municipalité dispose pourtant, très largement, des moyens de répondre à ces attentes, compte tenu qu’elle dégage chaque année un excédent de fonctionnement moyen de 500 000 € à 700 000 € (En 7 ans cela représente l’équivalent d’un budget annuel entier, soit un total de 4 000 000 €).
 
Au lieu de tout reverser dans la section investissement, une partie de ces moyens aurait pu servir à répondre aux attentes de la population (augmentation des moyens en personnels communaux, soutien aux associations, et autres besoins sociaux…).
 
Mais lorsque l’opposition évoque ces questions en conseil municipal, la municipalité voit tout de suite « rouge », au sens propre comme au sens figuré.
 
Manifestement, pour l’attelage Le Houérou / Le Vaillant et leurs autres colistiers, les questions de la  vie sociale et de l’animation de la cité sont considérées uniquement comme des coûts et en aucune façon comme des éléments indispensables à une dynamique communale.
 
Plutôt que de répondre sur ce point, et sans doute gêné aux entournures, M. Le Vaillant préfère répondre de façon très agressive dans le dernier Ignacien par l’ironie et la dérision, en se contentant de répondre qu’il n’y a pas  de magot caché dans les tréfonds de la mairie.
 
Contrairement à ce qu’il prétend, la façon de faire de la majorité est tout le contraire d’une bonne et saine gestion, car strictement comptable et peu soucieuse des besoins des habitants de Plouigneau.
 
N’oublions pas que ce sont les contribuables qui financent et qu'en contrepartie ceux-ci sont en droit d'attendre un meilleur service rendu.
 
 
C’est un mode de gestion du passé d’une majorité du passé !
 
 
Fake news
 
Que pour les besoins de son argumentation Monsieur Bernard Le Vaillant verse dans l’ironie dans le journal municipal, c’est son droit, même si ça ne vole pas haut. Cependant, de là à travestir les propos, à bidouiller les interventions des uns et des autres est un exercice parfaitement déloyal, qui dénote surtout, au fond, un déficit d’argumentation.
 
Mais il ne s’arrête pas là, et recourt aussi  à la vieille tactique du mensonge et de la calomnie «calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose », probablement pour combler précisément ce déficit.
 
Ainsi à propos de la maison médicale, il n’hésite pas à affirmer dans la dernière livraison de l’Ignacien (en caractères gras de surcroît afin que tout le monde le voie bien) : «Que par obsession partisane on vote contre une telle réalisation paraît incompréhensible. Un affront à l’intérêt général ».
 
Or, le projet d’aménagement de l’ancienne perception en maison médicale a fait l’objet d’une délibération du conseil le 23 février 2017 (réf : 2017D011) en les termes suivants «...Le conseil municipal, après en avoir délibéré, à l’unanimité, approuve le projet d’aménagement de centre médical ou de maison médicale pluridisciplinaire dans l’ancienne perception ; autorise le Maire à à confier une mission pour ce projet à un architecte, à déposer un permis de construire, à demander des subventions pour ce projet (délibération reçue en préfecture le 28/02/2017) »
 
En tentant maladroitement de bidouiller des propos et des positions, Monsieur le Vaillant dérape et se fait prendre la main dans le sac en flagrant délit de mensonge : « fake news » comme l’on dit désormais.
Différences et inégalités
 
Dans le journal de la commune la majorité Ignacienne révèle sa vraie nature par une expression idéologique d’une droite tout particulièrement conservatrice, traditionaliste et réactionnaire.
 
Et au nom des différences naturelles elle se livre à une diatribe contre les pratiques égalitaristes, affirmant que  « qu’on le veuille ou non la nature est par essence inégalitaire ».
 
Mais c’est oublier que les inégalités sont le produit de l'histoire sociale. Elles ne sont pas naturelles et leur existence n'est pas détachable du fonctionnement de l'organisation sociale qui est à leur origine.
 
Aussi l’affirmation sentencieuse de l’auteur de l’article selon qui « qu’on le veuille ou non la nature est par essence inégalitaire » est une totale falsification au service d’une idéologie parfaitement réactionnaire.
 
Les luttes pour l’égalité sont au contraire des actions historiques et sociales fondamentales pour l’émancipation humaine. Soulignons aussi que l’égalité est bien l’une des trois devises de notre République auxquelles tout républicain véritable est fondamentalement attaché... Mais il est vrai que tout le monde n’est pas républicain dans l’âme.
Fièvre électorale
 
La majorité s’agite. Elle sort de sa léthargie à l’approche des échéances municipales. Après avoir ronronné longtemps, et bien reposée, elle devient aussi très mordante à son réveil.
 
Constatons tout d’abord que la construction d’une nouvelle salle polyvalente aura lieu juste avant les élections municipales de 2020, histoire de redorer un peu le blason majoritaire et de tenter de faire oublier six ans de calme plat, ou presque en matière d’investissements.
 
Malmenée par certaines associations qui se plaignent d’un manque flagrant de soutien municipal, la majorité essaie aussi de faire oublier son immobilisme et ses insuffisances en opérant à la sauvette quelques petites retouches ici ou là.
 
A pied, à cheval...ou en voiture ?
La majorité est-elle fâchée avec les services de la poste ?
 
En tout cas ce sont désormais des agents municipaux qui sont chargés de livrer l’Ignacien dans les boîtes aux lettres des habitants de la commune.
 
Encore une curieuse idée ! C’est peut-être le fruit d’une réflexion profonde de notre majorité dans son obsession de réduire les coûts de gestion par tous les moyens.
 
Déjà, cela ne va pas dans le sens d’un soutien au service public de la poste qui se trouve pourtant  bien malmené en ce moment.
 
Mais au final ne sont-ce pas là des économies de bouts de chandelle ? Cela ne va-t-il pas conduire à mettre davantage de véhicules sur la route ?
 
Sans doute ce ne sera bon, ni pour l’environnement ni pour le poste carburant du budget de fonctionnement de la commune. Au passage soulignons que cela viendra s’ajouter aux augmentations en 2018 du poste énergie-électricité (+ 37 %) et du poste combustibles (+ 22 %) augmentations pour lesquelles l’opposition n’a d’ailleurs obtenu aucune réponse lors de sa demande en conseil.
 
Au lieu de transformer les agents municipaux en facteurs, il serait préférable de consacrer ce temps-là à réaliser des missions communales qui ne manquent pas.
 
A propos de l’Ignacien, une petite suggestion de réduction de coûts : ne pourrait-on pas demander à notre premier adjoint de réduire le volume de la brochure en la diminuant de ses notes de lecture et carnets de voyage personnels ?
Personnels municipaux
 
La commune vient de s’agrandir après la fusion des communes historiques du Ponthou et de Plouigneau. Même si l’ancienne commune du Ponthou n’est pas très grande, cela aura pour conséquence d’accroître encore  la superficie que devra couvrir le service des espaces verts.
 
Ce service souffrait déjà d’un manque criant d’effectifs ne lui permettant pas de tout assurer. En plus on lui demande de venir de temps à autre en renfort de celui de la voirie qui lui non plus n’arrive pas, manifestement, à assurer l’ensemble de ses missions.
 
Tout cela fait que l’on a vu ces derniers temps les habitants se retrousser les manches, qui nettoyer un fossé envahi par les herbes ici, qui nettoyer le bord de sa rue là, qui ramasser lui-même les feuilles et les branches suite à un coup de vent là-bas...Toutes choses qui relèvent normalement du service public communal.
Répondre aux urgences
C’est ce à quoi appelle le Parti communiste.
Urgence pour notre industrie. Non aux privatisations d’ADP et de la Française des Jeux.
Urgence pour la santé. Sauver nos hôpitaux publics et nos EPHAD. Non aux fermetures de lits. Embauche de 100 000 emplois au plus vite.
Urgence pour le pouvoir d’achat. Hausse de 20% du SMIC, en deux ans, dans le privé comme dans le public. Hausse des salaires et des retraites.
Urgence pour la justice fiscale. Rétablir l’ISF. Mettre en place un impôt juste, progressif, sur tous les revenus, y compris ceux du capital, pour que les gros payent gros et que les petits payent petit.
Urgence pour le climat. Non à la fermeture des petites lignes ferroviaires, doubler le fret ferroviaire et agir pour la gratuité des transports en commun partout où c’est possible.
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10 juillet 2019 3 10 /07 /juillet /2019 08:30
Frida Kahlo et Diego Rivera dans une manifestation du Syndicat des Travailleurs Techniques, peintres et sculpteurs le 1er mai 1929. Ce syndicat, véritable vecteur de la révolution muraliste, qui avait pour membre Rivera, Orozco, Siqueiros et Charlot, s'était doté d'un journal, "El Machete", au titre flanqué de la faucille et du marteau

Frida Kahlo et Diego Rivera dans une manifestation du Syndicat des Travailleurs Techniques, peintres et sculpteurs le 1er mai 1929. Ce syndicat, véritable vecteur de la révolution muraliste, qui avait pour membre Rivera, Orozco, Siqueiros et Charlot, s'était doté d'un journal, "El Machete", au titre flanqué de la faucille et du marteau

Frida Kahlo, portrait de la portraitiste

Frida Kahlo, portrait de la portraitiste

Tina Modotti et Frida Kahlo

Tina Modotti et Frida Kahlo

Frida et Diego Rivera, 1928

Frida et Diego Rivera, 1928

Frida et Diego Rivera (1950)

Frida et Diego Rivera (1950)

Frida sur son lit d'hôpital et de torture juste avant sa mort

Frida sur son lit d'hôpital et de torture juste avant sa mort

L'excellent et émouvant film "Frida" (2002) de Julie Taymor avec Salma Hayec a permis au grand public de redécouvrir la beauté torturée des oeuvres de Frida Kahlo et sa vie passionnée et douloureuse prise dans les tourmentes de l'amour, du handicap et de l'histoire.   

Récemment, une exposition au Grand Palais à Paris a permis de découvrir directement certaines des oeuvres les plus célèbres de l'artiste mexicaine, dans le contexte de la peinture de l'art du du début du XXe siècle au Mexique.

Frida Kahlo est née le 6 juillet 1907 à Coyocan, banlieue chic de Mexico. Elle est la fille d'un émigrant allemand, Karl Wilhem Kahlo, joallier puis photographe, et de Matilde Calderon Gonzalez, fille d'un général espagnol et d'une famille d'ascendance indienne.

Elle passe son enfance d'un contexte de guerre civile, avec la révolution de Maduro contre la dictature de Portifirio Diaz en novembre 1910, suivie de dix années d'affrontement d'une extrême violence avec la guerilla de Zapata et Pancho Villa. Son père, épileptique et taciturne, homme d'ordre et de routines, est cultivé, goûte particulièrement la philosophie de Schopenhauer, lit Nietzsche, Goethe, Schiller. Frida, à qui une attaque de poliomyélite à six ans laisse une jambe atrophiée, fait des études brillantes, parmi les premières filles admise à l'Ecole préparatoire nationale de Mexico, se destine à la médecine.

C'est la préférée de son père, qui la laisse grandir comme un "garçon manqué", apprendre le dessin et la peinture. La chute de la dictature de Diaz, qui provoque un appauvrissement de la famille, le père, photographe officiel des monuments historiques, se retrouvant privé d'une partie de ses commandes, et Frida a été obligée de faire tout un tas de petits métiers quand elle était adolescente: comptable dans une scierie, caissière dans une pharmacie, sténéodactylographe, apprentie graveuse. 

Le 17 septembre 1925, alors qu'elle se déplace en bus avec son petit ami Alejandro, elle est victime d'un terrible accident quand un tramway percute le bus et l'éventre, écrasant de nombreux passagers. Triple fracture à la colonne vertébrale, fracture des côtes; fracture de la clavicule, triple fracture du bassin, perforation du vagin, onze fractures à la jambe droite, Frida était promise à la mort mais se rétablit provisoirement grâce à la force de sa volonté de fer.

Pendant un mois, à l'hôpital, sa soeur aînée, la proscrite, celle qui s'est enfuie de chez elle à quinze ans avec la complicité de Frida, pour vivre avec son petit ami, veille sur elle. A l'hôpital, Frida lit Bergson, Proust, Zola, Jules Renard, des articles sur la révolution russe. Elle écrit à son amoureux Alejandro dès qu'elle est en état de tenir un crayon.    

Après la sortie de l'hôpital, le 17 octobre 1925, commence une longue période de convalescence pour cette jeune fille de 18 ans, d'immobilisation dans des corsets de plâtre successifs. Alejandro se fait distant, il finit par partir en Allemagne et ne reviendra au Mexique que fin 1927. 

Quand elle quitte son plâtre, Frida abandonne ses études, se rapproche du leader communiste estudiantin German de Campo, et d'un groupe d'artistes bohème où l'on trouve  la belle comédienne et photographe Tina Modotti, le jeune et romantique révolutionnaire cubain Julio Antonio Mella, adversaire du dictateur Machado et premier secrétaire du parti communiste cubain, qui sera assassiné au bras de Tina Modotti dans une rue de Mexico. Frida s'inscrit au Parti communiste mexicain (PCM) et Tina lui fait cadeau d'une broche en émail, faucille et marteau, qu'elle épingle elle-même sur son corsage noir.

La biographe de Frida Kahlo, Christina Burrus, raconte que c'est "chez Tina, modèle du muraliste, pour la déesse de la Fertilité dans les fresques du "Chant à la terre et à ceux qui la travaillent et qui la libèrent" de l'ancienne chapelle de Chapingo qu'elle rencontre Diego Rivera, plus de quarante ans; plus d'un mètre quatre-vingts, cent cinquante kilos, l'un des Tres grandes, celui qui avec José Clémente Orozco et David Alfari Siqueiros s'est vu confier par José Vasconcelos, le ministre de l'Education publique, la mission d'instruire et d'élever le peuple mexicain - analphabète à 80% - en lui racontant son histoire sur les murs des édifices publics".      

Diego a déjà connu plusieurs femmes - Maria Gutierrez Blanchard, rencontrée en Espagne, la Russe Angelina Beloff, rencontrée à Paris, Marevna Vorbev-Stebelska, et la sensuelle Lupe Marin, devenue son épouse dont il a deux enfants - mais il tombe sous le charme de Frida, et se fiance avec elle, malgré les réticences du père de Frida. "L'union d'un éléphant et d'une colombe", commente, amère, la famille de Frida, dont le père seul est présent au mariage, le 21 août 1929.

Frida, par solidarité avec Diego, démissionne alors du Parti Communiste Mexicain, qui a exclu son mari du Comité Central, après un voyage en Union Soviétique décevant pour Diego Rivera. Bientôt, elle attend un bébé mais avorte, pour des raisons médicales.

En novembre 1930, Frida et Diego partent pour San Francisco, recommandé par de riches collectionneurs mexicains qui permettent aux autorités américaines de surmonter leur méfiance et leur répulsion pour ce communiste qu'est Diego Rivera. Le couple revient au Mexique en juin 1931, Diego étant chargé de décorer l'escalier monumental du Palais National.  En novembre 1931, les époux regagnent les Etats-Unis, pour que Diego y travaille au Moma de New-York et à Détroit. Frida s'ennuie à New-York, dans l'ombre de la gloire de Diego, elle est indignée par les inégalités sociales, la grande pauvreté crée par la Dépression, par les hôtels où les Juifs sont interdits de séjour. 

En juillet 1932, Frida perd son deuxième enfant aux Etats-Unis, à cause des complication dues à son accident. Elle commence à se mettre à la peinture à cette époque, dépeignant avec beaucoup de crudité, et un sens du symbolisme, la cruauté de la vie et la souffrance. 

 

 

      

Fresque de Diego Rivera au Palais National de Mexico

Fresque de Diego Rivera au Palais National de Mexico

Frida et l'avortement (1932)

Frida et l'avortement (1932)

Frida Kahlo - Auto-portrait à la frontière du Mexique (1932)

Frida Kahlo - Auto-portrait à la frontière du Mexique (1932)

Frida Kahlo photographiée par son père en 1932 après la mort de sa mère, Mathilde Calderon

Frida Kahlo photographiée par son père en 1932 après la mort de sa mère, Mathilde Calderon

Fresques de Rivera au Rockefeller Center de New-Yor: "L'Homme à la croisée des chemins envisageant avec espérance et élévation le choix d'un avenir meilleur" (1933)

Fresques de Rivera au Rockefeller Center de New-Yor: "L'Homme à la croisée des chemins envisageant avec espérance et élévation le choix d'un avenir meilleur" (1933)

La mère de Frida, Mathilde, meurt en septembre 1932 d'un cancer du sein. Son enfant, puis sa mère, cela fait beaucoup pour Frida, qui rejoint Diego à Détroit. Diego est bientôt obligé de quitter les Etats-Unis car les thématiques communistes et marxistes de ses peintures murales au Rockefeller Center, à Manhattan, sont victimes d'une violente campagne de presse. Diego Rivera refuse de remplacer la tête de Lénine comme Rockefeller l'invite à le faire. Les fresques sont détruites quelques mois plus tard.

Frida reprend de la vigueur pour mobiliser et défendre la liberté de l'art. Son argent dépensé, en décembre 1933, grillé pour les grosses commandes officielles ou privées aux Etats-Unis, Diego Rivera consent enfin à revenir au Mexique. La maison design des Ribera devient selon les mots de Christina Burrus, "la Mecque de l'intelligentsia internationale: écrivains, peintres, photographes, musiciens, comédiens et militants s'y croisent dans une atmosphère bohème". Frida souffre des infidélités de Diego. 

Elle est victime d'un nouvel avortement contraint, au troisième mois de grossesse. Son pied la fait souffrir atrocement. "Diego, écrit Christina Burrus, est furieux d'être rentré au Mexique et se venge de son humiliation new-yorkaise au deuxième étage du palais des Beaux-Arts en faisant figurer John D. Rockefeller au milieu des prostituées, dans une scène de débauche où une hélice géante agite les germes de la syphilis". Il couche avec la soeur de Frida, qui ne le supporte pas, va prendre un appartement seule au début de 1935 et peint des tableaux atroces où la souffrance se lit à coeur ouvert.       

Mais Frida et Diego reprennent bientôt leur vie commune mouvementée et déchirée par les disputes et les infidélités, se mobilisent pour le camp républicain au début de la guerre d'Espagne, aidant à collecter des fonds. En 1937, ils accueillent de la maison de famille de Frida, la Casa Azul, Léon Trotski, impitoyablement pourchassé ainsi que sa famille par Staline et ses agents, et Natalia Sedova, tous les deux chassés de Norvège.  Trotski ne parlant pas un mot d'espagnol à son arrivée, c'est Frida qui lui sert de guide et d'interprète au Mexique. Ils communiquent en anglais et ont une liaison amoureuse de quelques mois, même si Frida, régulièrement trompée, continue à aimer Diego, qui est paradoxalement très jaloux lui-même. 

André Breton et sa femme Jacqueline rejoignent bientôt eux aussi Frida et Diego, Breton et Trotski écrivant ensemble le manifeste "Pour un art révolutionnaire et indépendant". Le galeriste américain Nicolas Levy propose une exposition à Frida dans sa galerie new-yorkaise, sa première exposition personnelle. Breton écrit au sujet des oeuvres de Frida: "L'art de Frida Kahlo est comme un ruban bigarré noué autour d'une bombe". 

Loin de Diego, Frida couche avec Julien Levy, puis avec le photographe Nickolas Murray qui l'a aidé à monter son exposition à New-York, qui s'avère une franche réussite: la moitié des tableaux vendus, une critique enthousiaste. En janvier 1939, Frida gagne la France à l'invitation des surréalistes et anciens dadas pour y faire connaître son art, est hébergée chez les Breton, 32, rue Fontaine, dans le IXe arrondissement de Paris. Elle écrit à Nickolas Muray resté à New-York, avec une belle emphase ordurière : "Jusqu'à mon arrivée, les peintures étaient à la douane, parce que ce fils de pute de Breton n'avait pas pris la peine de les sortir. (...). La galerie n'était absolument pas prête pour l'exposition (...). J'ai dû attendre des jours entiers comme une imbécile jusqu'à ce que je fasse connaissance de Marcel Duchamp (peintre merveilleux) qui est le seul à avoir les pieds sur terre dans cette bande de cinglés de dingos de fils de putes de surréalistes".  Elle est exposée par le marchand de Dali avec d'autres tableaux et objets évoquant le Mexique et ne se sent pas reconnue à sa juste valeur. Elle rencontre Paul Eluard, Max Ernst, qui la fascine, et qu'elle juge glacial. "Yves Tanguy et Juan Miro sont enthousiastes, Kandinsky est touché aux larmes par son oeuvre, Picasso lui offre une paire de petites mains montées en boucles d'oreilles, en symbole d'amitié", raconte Christina Burrus.

En mars 1939, elle quitte Le Havre pour New-York où elle découvre que son amant Nickolas Muray s'est trouvé un autre amour. Quand elle revient au Mexique, c'est pour retrouver sa soeur dans la vie de Diego. Trotski a quitté la Casa Azul, en désaccord avec Diego Rivera, qui a quitté la IVe Internationale. En octobre 1939, Frida Kahlo  et Diego Rivera divorcent par consentement mutuel. Frida se sent seule, est victime d'une dépression, se met à boire. Ses oeuvres du moment sont tourmentés, hantées par la mort, le suicide.

Trotski échappe à une première tentative d'assassinat en mai 1940 avant d'être tué à coups de piolet par Ramon Mercader, agent de Staline, que Frida a connu à Paris. Elle est arrêtée, soupçonnée par les autorités mexicaines, et subit un long interrogatoire.

Puis elle rejoint Diego à San Francisco et se remarie avec lui un an après leur divorce, ayant retrouvé un certain équilibre s'accommodant des infidélités réciproques. Ils s'installent à nouveau à la Casa Azul même si Diego conserve son atelier-garçonnière.    

Le père de Frida, devenu misanthrope et encore plus taciturne après la mort de sa femme, meur en avril 1941. Frida est très affectée. Diego, même s'il a quitté la IVe Internationale, est à la fois inquiet après l'invasion de l'URSS et la cible des attaques des communistes mexicains du PCM. En 1943, Frida est nommée professeur de l'Ecole de peinture et de sculpture du ministère de l'Education mexicain. Elle travaille au côté de l'artiste Benjamin Perret.

En 1944, les séquelles de son accident se font encore sentir, plus cruellement que jamais. Elles ne peut plus se tenir ni assise, ni debout, elle est obligée de porter un corser d'acier et de rester immobile alitée pendant des mois. Elle supporte la douleur grâce à la morphine mais en devient accroc. Ses peintures se font de plus en plus obsessionnelles et douloureuses. Les drogues la plongent dans un état second propice aux cauchemars.

En 1948, elle est admise à nouveau au Parti Communiste, et y plaide contre l'arme atomique. Sa ferveur communiste va croissant à mesure qu'elle s'enfance de les souffrances et les infirmités de son hospitalisation. Une dernière fois, le 2 juillet 1954, elle prend part avec Diego à une manifestation communiste pour protester contre la destitution du président du Guatemala, Jacobo Arbenz. Ce sera la dernière sortie officielle du couple Rivera - Kahlo en tête des manifestants, et Frida, en mater dolorosa, sur son fauteuil roulant.  

Frida meurt à 47 ans à la Casa Azul le 13 juillet 1954, après avoir offert une bague la veille à Diego pour leurs 25 ans de mariage. On dit que dans son chagrin Diego Rivera, au sortir du corps du crématorium, s'empara d'une poignée de centres de Frida Kahlo et l'avala.  

 

A lire:

Frida Kahlo, "Je peins ma réalité" , Christina Burrus (Découvertes Gallimard) 

Autres articles d'Ismaël Dupont: 

Tina Modotti (1896-1954): photographe et agent communiste cosmopolite au destin extraordinaire

Mexique enchanté, Mexique maudit, Mexique de l'art et de la culture révolutionnaires: une exposition magnifique au Grand Palais à Paris sur les artistes du Mexique entre 1900 et 1950

 

 

"Auto-portrait aux cheveux coupés" (1940): tableau symbolique que peint Frida après son divorce avec Diego

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Leon Trotski et Frida Kahlo

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Frida Kahlo et la statue olmèque (1939) - photographiée par Nickolas Muray

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Frida Kahlo - autoportrait (1940)

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9 juillet 2019 2 09 /07 /juillet /2019 08:23
Tina Modotti

Tina Modotti

COMMUNIST'ART: Tina Modotti (1896-1942): photographe et agent communiste cosmopolite au destin extraordinaire
Tina Modotti photographiée nue sur la plage - par Edward Weston

Tina Modotti photographiée nue sur la plage - par Edward Weston

Sombrero mexicain avec marteau et faucille - Tina Modotti (1927)

Sombrero mexicain avec marteau et faucille - Tina Modotti (1927)

Bandelier, corn, guitar (1927) - Tina Modotti

Bandelier, corn, guitar (1927) - Tina Modotti

Tina Modotti - Mujer con Bandera (1928)

Tina Modotti - Mujer con Bandera (1928)

Tina Modotti -  Calla Lily (1925)

Tina Modotti - Calla Lily (1925)

1926

1926

Frida Kahlo fumant, par Tina Modotti

Frida Kahlo fumant, par Tina Modotti

"Aujourd'hui reconnue comme une photographe capitale de l'art d'avant-guerre, Tina Modotti passa sa vie à la pointe des mouvements les plus avancés en art et en politique dans la première moitié du XXe siècle. Femme profondément moderne, fumant la pipe et parmi l'une des premières à porter des salopettes en jean, Modotti se moquait des conventions, dans ses relations personnelles ou professionnelles", ainsi s'ouvre la monographie consacrée à Tina Modotti, photographe, par Margaret Hooks (édition Könemann).

Tina Modotti, fut une femme libre, une sacrée beauté, une artiste et une militante au destin extraordinaire.

Elle est née à Udine, dans le Nord de l'Italie, en 1896.

Margaret Hooks rapporte que  "son père, Giuseppe Modotti, la promenait sur ses épaules le 1er mai, pour aller entendre les chants et discours politiques de ses camarades ouvriers. Quelques années plus tard, cherchant à améliorer ses conditions de vie et celles de sa famille, il émigra en Amérique. Son départ plongea la famille dans une pauvreté que Tina ne devait jamais oublier. A 14 ans à peine, elle devint la seule pourvoyeuse de revenus de la famille, travaillant de longues et pénibles heures dans une usine de soie locale. 

Quelques temps après, comme sa situation s'améliorait, Giuseppe fit venir sa femme et ses enfants à San Francisco".

Tina débarque à San Francisco en 1913. Elle trouve rapidement un emploi comme couturière dans le prestigieux magasin I. Magnin. Mais ses employeurs remarquent vite sa beauté romanesque et elle est bientôt employée comme mannequin présentant les dernières collections du magasin.

Elle se fait remarquer par le peintre Roubaix de Abrie Richey qui décide de l'épouser. Un an plus tard, elle abandonne sa carrière de mannequin pour jouer dans le théâtre italien local, participant à des opérettes de qualité médiocre. Malgré tout, son talent d'actrice la fait remarquer par un chasseur de talents de l'industrie hollywoodienne du film muet en pleine évolution. 

Tina Modotti arrive ainsi à Los Angeles fin 1918 et obtint les rôles principaux de deux longs métrages mélodramatiques: "The Tiger's Coat" et "I Can Explain". 

 A Los Angeles, Modotti fréquente le milieu des artistes, des anarchistes, des jeunes hommes qui ont échappé à leurs obligations militaires pendant la première guerre mondiale, tous fascinés par l'art moderne et l'amour libre, le mysticisme oriental et la révolution mexicaine.

C'est grâce à ce nouveau groupe d'amis que Modotti rencontre le célèbre photographe américain Edward Weston, alors marié et père de quatre garçons. La liaison entretenue par Modotti et Weston conduit Robo, le mari de Modotti, à se retirer temporairement au Mexique où il mourut subitement et tragiquement de la variole, deux jours après que Modotti l'ait rejoint. Elle resta à Mexico pour superviser une exposition des travaux de Robo, de Weston, et d'autres photographes américains, mais son séjour fut brutalement interrompu par la nouvelle de la maladie, puis de la mort de son père.   

"Cette double perte, commente Margaret Hooks, et la relation qui s'intensifiait entre elle et Waston suscitèrent une nouvelle prise de conscience chez Modotti. Elle ne pouvait plus se satisfaire des rôles stéréotypés que lui offrait Hollywood, ni de son rôle de modèle devant les objectifs de Weston". Elle commença à travailler à la photographie avec Weston et son ami Hagemayer. Son oncle Pietro Modotti était déjà photographe à Udine.

En juillet 1923, Modotti retourna au Mexique, cette fois avec Weston, son fils Chandler et un accord aux termes duquel Weston lui apprendrait la photographie en échange de son aide au studio. Le Mexique post-révolutionnaire était en pleine effervescence sociale et culturelle et leurs maisons de Mexico devinrent des lieux de réunions célèbres où se retrouvaient écrivains, artistes radicaux tels que Diego Rivero, Anita Brenner ou Jean Charlot. Le samedi soir, des fêtes tumultueuses étaient l'occasion de se travestir, de fomenter des révolutions et d'échanger des idées sur l'art.

Instruite par Weston, Tina Modotti explora les possibilités d'un art photographique avant-gardiste et volontiers formaliste. 

Mais plus son séjour à Mexico se prolongeait, plus elle éprouvait la nécessité de s'engager socialement dans son art, pour représenter le peuple en prise avec la réforme agraire et les injustices sociales.

Au coeur de la révolution culturelle mexicaine se trouvaient les fresquistes monumentaux toujours en concurrence pour trouver un espace mural apte à recevoir leurs somptueuses et immenses peintures. Son amitié avec ces peintres, en particulier avec Diego Rivera pour qui elle posa à de nombreuses reprises, fit de Modotti la photographe la plus recherchée pour ce type de travaux. Elle fut influencée par les idées communistes de ces peintres muralistes.

La rupture avec Weston eut lieu en novembre 1926. Après le départ de Weston, Modotti entra dans sa période la plus productive en tant que photographe. La demeure de Modotti était devenue un foyer d'activité pour les exilés d'Amérique Latine dont elle soutenait activement les luttes de libérations nationales. C'était aussi un lieu de rendez-vous pour des artistes mexicains comme Rufino Tamayo, le photographe Manuel Alvarez Bravo et la jeune Frida Kahlo. En 1928, elle partagea pendant plusieurs mois la vie d'un jeune révolutionnaire cubain en exil, Julio Antonio Mella, qui fut abattu devant elle par des opposants politiques dans une sombre rue de Mexico.

En dépit du caractère clairement politique de cet assassinat, le gouvernement mexicain se servit du procès contre les communistes, essayant de démontrer leur supposée immoralité en impliquant Modotti dans un "crime passionnel". "L'enquête qui s'ensuivit, raconte Margaret Hooks, prit la tournure d'une véritable inquisition sur la vie sexuelle de Tina Modotti. Sa maison fut retournée par la police et les études de nus que Weston avait fait d'elle saisies comme preuve de son immoralité, ce qui causa un tort irréparable à sa réputation et à sa carrière".

Modotti finit par être acquittée, mais l'assassinat de Mella et l'épreuve du procès provoquèrent chez elle une violente réaction qui trouva à s'exprimer dans l'engagement social. Elle s'engagea à fond dans le photojournalisme dans le journal communiste mexicain  de Mella, El Machete?   

Au début 1930, un attentat dirigé contre le président du Mexique et une vague de répression consécutive sur les membres du PCM eurent pour conséquence l'arrestation de Modotti. Elle retrouva Vittorio Vidali, agent soviétique, italien comme elle, qu'elle avait rencontré à Mexico en 1927 et tous deux gagnèrent l'Europe. Vidali tenta de convaincre Modotti de la suivre à Moscou mais elle souhaitait s'installer à Berlin. Là, elle fut en contact avec le Bauhaus. Déçue par l'Allemagne, elle rejoignit Vidali à Moscou six mois plus tard. Et de là, décida de se consacrer entièrement à la lutte pour le communisme et contre le fascisme en travaillant pour le Secours Rouge International. Utilisant plusieurs identités différentes, elle pénétra dans des pays sous régimes fascistes pour y assister les familles des prisonniers politiques. En 1936, Modotti et Vidali étaient en Espagne dès le début de la guerre civile, participant à la défense de Madrid sous les noms de "Commandante Carlos" et de "Maria". Tina Modotti joua alors un rôle important dans l'organisation de l'aide internationale à la cause républicaine.

Après la défaite des républicains en 1939, elle rentra à contrecoeur au Mexique sous une identité d'emprunt - Dr. Carmen Sanchez - elle évita les amis des amis des années 20, préférant la compagnie des réfugiés politiques en provenance de pays sous contrôle fasciste.

Vers la fin de 1941, elle reprit peu à peu contact avec certains de ses anciens amis, comme le fresquiste Clemente Orozco. Le 6 janvier 1942, rentrant d'un dîner chez un ami, l'architecte du Bauhaus Hannes Meyer, elle mourut de ce qu'on présuma être une crise cardiaque sur le siège arrière d'un taxi de Mexico.        

  

Dans "Le livre de Nella", publié en 2019 chez Skol Vreizh, l'histoire de sa mère et de sa famille italienne communiste, Bérénice Manac'h raconte la rencontre de son oncle maternel Angelo avec Tina Modotti en 1936 à Moscou:
 
"Angelo, qui a un peu plus de 16 ans, travaille d'abord pendant quelques mois au service de presse et de propagande du MOPR où il fait la connaissance de la grande artiste frioulane Tina Modotti. Celle-ci a définitivement abandonné la photographie pour se consacrer à son activité de révolutionnaire. Ils dînent ou déjeunent plusieurs fois ensemble au restaurant de l'hôtel Lux ou ailleurs, parfois en compagnie de son compagnon, le révolutionnaire Vittorio Vidali, le futur commandant Carlos Contreras de la guerre d'Espagne. Angelo traduit en français et dactylographie avec deux doigts des textes pour eux. Il est chargé des statistiques sur les brutalités policières envers les ouvriers dans les pays capitalistes. Il parlera de Tina comme d'une femme "un peu spéciale", fascinante, donnant envie de parler de choses sérieuses, que tout le monde aimait bien. Dans notre famille, on racontait qu'Angelo avait dû être un peu amoureux d'elle, qui était de 20 ans son aînée.... Tina est souvent absente de Moscou pour de mystérieuses missions à l'étranger. Un jour, comme Angelo lui rend visite dans la chambre qu'elle partage avec Vidali à l'hôtel Soyouznaïa de la rue Tverskaïa, elle lui fait admirer le magnifique appareil Leica qu'elle vient d'acheter à Berlin. Le garçon s'émerveille devant le premier 24 x 36 qu'il ait jamais vu, avec posemètre intégré. Tina lui tend l'appareil et lui demande de la photographier avec son compagnon. Quelques jours plus tard, elle lui confie le Leica pour une durée indéterminée. Angelo le gardera pendant plus de trois ans. C'est à lui que l'on doit les très rares clichés que l'on connaisse de Tina Modotti à l'époque de son séjour à Moscou, qui sont sans doute les dernières photos d'elle qui existent. Tina ne lui redemandera l'appareil qu'en 1936 lorsqu'elle quittera l'URSS pour s'engager dans les Brigades Internationales avec Vidali, devenant alors la "camarade Maria". Mais, comme le dira poétiquement Pablo Neruda dans ses mémoires, "elle avait jeté son appareil photographique dans la Moskova et s'était juré à elle-même de consacrer sa vie aux tâches les plus humbles du parti communiste". (Le livre de Nella, Bérénice Manac'h, Skol Vreizh, 2019, 22€, , p.47-48)

  Lire aussi dans la rubrique "Communist'Art" du Chiffon Rouge:

Communist'Art: Charlotte Delbo

COMMUNIST'ART: Mahmoud Darwich, le poète national palestinien, voix universelle de l'amour et de la nostalgie (1941-2008)

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Communist'Art: Soy Cuba - Un film de Michail Kalatozov, une émotion visuelle incroyable qui laisse enchantés et déconcertés - la chronique cinéma d'Andréa Lauro

 

Tina Modotti dans le film muet "The Tiger's Coat" (1920)

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Tina Modotti et Edward Winston

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Tina Modotti portrait d'Edward Weston (1924)

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Modotti par Edward Weston

Modotti par Edward Weston

Tina Modotti Edward Weston (1924)

Tina Modotti Edward Weston (1924)

Tina Modotti et Frida Kahlo

Tina Modotti et Frida Kahlo

Enfant mexicain, Tina Modotti

Enfant mexicain, Tina Modotti

Tina Modotti, femme de Tehantepec (1929)

Tina Modotti, femme de Tehantepec (1929)

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9 juillet 2019 2 09 /07 /juillet /2019 07:46
Le comité de défense de l'hôpital de Morlaix interpelle les usagers et la direction de l'hôpital sur les conséquences de la fermeture de 41 lits pendant l'été (Le Télégramme, 8 juillet 2019)
Le comité de défense de l'hôpital de Morlaix interpelle les usagers et la direction de l'hôpital sur les conséquences de la fermeture de 41 lits pendant l'été (Le Télégramme, 8 juillet 2019)
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9 juillet 2019 2 09 /07 /juillet /2019 07:16
Grèce. Le triomphe d'une droite dure. Syriza victime de l'austérité imposée par l'Europe (L'Humanité, 8 et 9 juillet 2019)
Grèce. Le triomphe d’une droite dure
Lundi, 8 Juillet, 2019

La Nouvelle Démocratie de Kyriakos Mitsotakis devance largement Syriza d’Alexis Tsipras aux législatives. Ce qui fait craindre une mise aux normes nationales-libérales du pays.

 

La droite de Kyriakos Mitsotakis a remporté les élections législatives anticipées de ce dimanche. Avec un peu plus de 40 % des suffrages, son parti, la Nouvelle Démocratie (ND), semblait assuré de disposer d’une majorité absolue à la Vouli, la chambre unique du Parlement grec. Une prime majoritaire représentant 16,7 % des députés est accordée en effet au parti arrivé en tête dans le système de répartition des sièges à la proportionnelle. Cette victoire s’inscrit comme un nouveau et inquiétant succès d’un parti qui affiche une orientation nationale-libérale, mêlant une très orthodoxe doxa sur le plan du « libre-échange » et de l’économie à une posture ouvertement nationaliste.

Syriza, le parti de gauche du premier ministre Alexis Tsipras, est crédité de 28,5 % des suffrages. Il arrive en seconde position très loin devant les autres formations politiques. La mobilisation d’une partie des électeurs de gauche soucieux de défendre les mesures gouvernementales en faveur des plus démunis n’aura pas suffi à inverser une tendance lourde à l’abstention parmi certains électeurs de gauche, déçus que le gouvernement n’ait pas réussi à tenir les promesses faites avant le scrutin de janvier 2015, qui avait marqué l’accession d’Alexis Tsipras au pouvoir.

« Réduire le périmètre de l’État »

La bascule semble se situer du côté des classes moyennes qui avaient jadis massivement voté Syriza. Fortement mises à contribution pour financer des mesures d’urgence dans la crise humanitaire qui affecte toujours le pays, elles ont boudé les urnes ou se sont laissé séduire par les promesses de baisses d’impôts avancées par Mitsotakis. Le vainqueur ne cache pas sa volonté de « réduire le périmètre de l’État. ». Traduisez : de revenir sur la redistribution des richesses qu’avait pratiquée le gouvernement Syriza contre vents et marées dans la dernière période, après avoir renoué avec la croissance et malgré les conditions de sortie du mémorandum imposé par l’UE.

Les dirigeants de l’eurogroupe et de l’Union européenne (UE) portent ainsi une terrible responsabilité. N’ont-ils pas, durant tout le premier semestre 2015, fait monter en puissance un chantage au Grexit. Au lieu de mettre en œuvre une solidarité européenne, ils se sont montrés intraitables et ils ont gardé le cap sur les règles de fer de la compétition et du monétarisme. Il n’avait alors pourtant échappé à personne combien un retour à la drachme aurait des conséquences tragiques pour le pays. La Grèce qui importe la majeure partie de ses biens de consommation courante aurait été prise dans une nasse infernale qui l’aurait conduite de dévaluations « compétitives » en plans d’austérité encore plus redoutables que ceux qu’elle venait de subir.

Le forcing libéral des nouveaux dirigeants de la Grèce laisse craindre dans l’immédiat une suppression rapide des mesures favorables aux plus pauvres. Quid de la gratuité d’accès aux soins, de ces pharmacies ou épiceries sociales ? Quid de la poursuite de l’augmentation du salaire minimum, revalorisé de 11 % par le gouvernement de gauche ? Quid du sort des petites pensions, voire de la pérennisation d’un 13e mois de retraite ?

La droite grecque a bâti une part de son succès sur un discours ouvertement nationaliste, exutoire commode aux malaises qui traversent une société malmenée par les partenaires européens et aux avant-postes de l’accueil des migrants. S’en prenant à l’accord de Prespa conclu entre Athènes et Skopje en 2018 qui prévoit la reconnaissance de la Macédoine du Nord, Mitsotakis a ainsi entonné une rhétorique, souvent proche de celle des extrêmes droites d’Aube dorée ou de Solution grecque. Selon une approche qui s’interdit d’envisager la Macédoine comme autre chose qu’une entité grecque en se référant à l’Antiquité et à la gloire d’Alexandre le Grand qui régna effectivement autour de… 330 avant Jésus-Christ sur ce territoire, qui fut intégré durant plusieurs décennies à la Fédération des Slaves du Sud (Yougoslavie).

Bruno Odent
Syriza victime de l'austérité imposée par l'Europe
Mardi, 9 Juillet, 2019

Après la victoire du parti de droite de Kyriakos Mitsotakis « Nouvelle Démocratie » aux élections législatives anticipées en Grèce, et l’échec d’Aléxis Tsipras et de son parti, Syriza, entretien avec le député européen Stélios Kouloglou, membre de Syriza.

 

Après la victoire le la droite aux élections européennes, la défaite de Syriza était annoncée. Comment expliquez-vous ce nouvel échec ? 

Stélios Kouloglou. En ce qui concerne les résultats de la Nouvelle Démocratie, il faut prendre en compte le fait que tout le système financier et médiatique a soutenu jusqu’au bout Kyriakos Mitsotakis ( président de N.D., ndlr. ) Il y a vraiment eu une propagande faite pour lui durant les mois précédant les élections. Il y avait une espèce d’embuscade contre Syriza qui était attaqué en permanence. Cela a été une campagne de désinformation magnifique. 

Nous n’avons eu aucun grand débat durant la campagne sur les grandes orientations à donner au pays parce que Mitsotakis n’était pas à la hauteur pour affronter Tsipras.

En dehors de ce poids de la propagande, quelles sont les raisons de fond de l’échec de Syriza ?

S.K. Il y a deux raisons principales à cet échec. D’abord, il y a l’austérité qui a été imposée par l’Union européenne avec le 3ème mémorandum signé par Tsipras, intervenant après les deux précédents. Même si le gouvernement a essayé de l’appliquer de manière plus souple, ça ne suffit pas. Les gens deviennent de plus en plus désespérés et mécontents. Et quand les gens sont désespérés, ils croient au miracle. Mitsotakis n’a rien dit de concret. Il a beaucoup parlé de privatisations de la sécurité sociale et des écoles. Il a promis de faire baisser les impôts en disant que si on baisse les impôts, il y aura de la croissance, et que ce sera le paradis. Mais c’est tout.

La seconde raison, c’est l’accord de Prespa ( accord entre la Grèce et la Macédoine du Nord, actant le nouveau nom de ce pays frontalier de la Grèce, désormais « République de Macédoine du Nord », ndlr. ) 

Cet accord a été attaqué de toutes parts. On nous traitait de traîtres même si tout le monde sait très bien qu’il s’agit du meilleur accord que le gouvernement pouvait signer. Mitsotakis a exploité le sentiment du peuple, il a joué la carte de l’extrême droite. Syriza a beaucoup perdu avec cet accord qui venait s’ajouter au mécontentement social. 

La bonne nouvelle, c’est que le parti d’extrême droite « Aube dorée » n’a pas pu entrer au parlement parce que leurs électeurs ont voté pour Nouvelle Démocratie. Ils l’ont fait à la fois pour se débarrasser de la gauche, et parce qu’ils étaient opposés à l’accord de Prespa. 

En ce qui concerne le pourcentage de Syriza, c’est presque 32%, ce n’est pas négligeable. C’est un résultat que tous les partis européens, qu’ils soient de gauche ou de droite, auraient bien aimé avoir.

Qui sont les électeurs qui ont abandonné Syriza après l’avoir soutenu pendant 4 ans et demi ?

S.K. D’abord, il y a une différence énorme de comportement électoral des citoyens selon leur statut social. On le voit par exemple à Athènes ou à Thessalonique, où les banlieues et les quartiers les plus pauvres ont voté massivement pour Syriza. Tandis que les quartiers les plus riches ou les quartiers de la classe moyenne ont voté pour Nouvelle Démocratie. Syriza a échoué à s’adresser à la classe moyenne, c’est pour cette raison qu’il a perdu la bataille. C’est vrai que la classe moyenne a été beaucoup taxée, beaucoup imposée.

Quelle va être la stratégie de Syriza maintenant ? 

S.K. Il faut changer de stratégie parce qu’on a fait des erreurs. 

A mon avis, il faut appliquer une politique non stalinienne, en s’appuyant sur le principe : « ceux qui ne sont pas contre nous, sont avec nous ». Il faut faire des alliances avec des petites formations et des personnalités plus proches des classes moyennes en adoptant une politique qui leur soit plus favorable. En diminuant les impôts par exemple, et en faisant avancer le développement économique.
Mais il faut aussi reconstruire le parti. 

Avec les élections législatives, nous avions en même temps en Grèce les élections locales. Or Syriza qui aux élections européennes obtenait 25 ou 30% des voix, n’est arrivée qu’à 5% ou 6% dans les listes locales qu’elle soutenait. L’influence électorale de Syriza ne correspond pas du tout à sa base réelle. Sa base correspond à un parti à 3%. 

La bureaucratie du parti n’a pas voulu s’ouvrir. Et c’est aussi la responsabilité de Tsipras. Il a bien dit qu’il fallait ouvrir les portes du parti, mais il n’a pas insisté. Il s’est d’abord préoccupé du gouvernement, des négociations avec l’Union européenne, avec Bruxelles, Merkel, etc. Or - et ceci est très important -, Syriza n’a pas de racines profondes dans la société locale. Nous n’avions personne sur place pour expliquer ce que le gouvernement a fait, notamment beaucoup de petites choses dans le domaine de la santé, de l’éducation, etc. qui ne sont pas connues par le peuple. 

Les jeunes de 18 à 24 ans ont voté massivement pour Syriza, mais il n’y a pas de jeunes dans le parti. On l’a déjà annoncé hier, il faut faire un grand parti du camp progressiste, avec un programme contre le néolibéralisme, pour l’écologie, un programme ouvert à tout le monde.

A quoi faut-il s’attendre désormais avec la droite au pouvoir ?

S.K. Ce qu’ils vont faire d’abord, c’est  de s’attaquer à des questions d’ordre public et de sécurité. Ils ont dit qu’ils allaient embaucher des milliers de policiers. 

Un groupe d’anarchistes par exemple, faisait des petites actions, rien de bien dangereux. Ils allaient dire des pamphlets devant l’ambassade des Etats-Unis ou bien écrire des slogans sur les murs. Ces actions ont été complètement gonflées par la presse. Ou bien, autre exemple, hier un groupe anarchiste qui s’appelle « Rubicon » est entré dans un bureau de vote et a volé deux urnes. Cela a donné des voix à Nouvelle Démocratie qui a exploité tous ces faits en disant qu’ils étaient inspirés par l’idéologie de Syriza. 

Le nouveau gouvernement va aussi attaquer la loi sur les Universités qui est actuellement protégée par une loi d’asile qui interdit à la police de pénétrer dans les universités. Ensuite il va petit à petit appliquer un programme de privatisation de la sécurité sociale et des hôpitaux en donnant le management de l’hôpital public aux sociétés privées. 

La presse qui est aux mains des oligarques va protéger ce gouvernement. Ils vont aussi devoir donner beaucoup d’argent à ceux qui les ont soutenus. Démocratie Nouvelle est complétement endettée. Il faudra qu’elle donne des contrats à ses donateurs. Ce parti a dépensé des sommes d’argent incroyables pour la campagne électorale. On ne sait pas où cet argent a été trouvé, mais c’est sans précédent. Le parti de Mitsotakis doit 250 millions d’euros aux banques, alors qu’ils n’ont pas un sous. Ils ont été beaucoup financés par les grands intérêts privés très puissants. En réalité, Nouvelle Démocratie est très faible. Ce parti sera très vulnérable aux demandes des oligarques.
Côté politique étrangère, rien ne va beaucoup changer. Aléxis Tsipras a mené une politique étrangère très active, en faisant par exemple l’accord de Prespa , ou en travaillant avec les pays du sud de l’UE. Démocratie Nouvelle va mener la même politique, mais en beaucoup plus passif. 

Est-ce qu’Aléxis Tsipras sort affaibli de ce scrutin ?

S.K. Non, il n’est pas menacé. Tsipras a mené une campagne très active en se rendant chaque jour dans une ville pendant plus d’un mois. Il a sous-estimé les résultats des élections européennes, mais il est bien décidé à reprendre l’offensive. Des rumeurs prétendaient ce matin que Tsipras allait occuper un poste à Bruxelles. Mais ce sont des rumeurs infondées.

 

Propos recueillis par Jean-Jacques Régibier
Grèce. Kyriakos Mitsotakis recycle les voix de l’extrême droite
Mardi, 9 Juillet, 2019

Largement devancé par une droite ultralibérale, Alexis Tsipras enregistre une défaite qui n’a, selon lui, rien de « stratégique ». Syriza pâtit de la désaffection des classes populaires mais s’affirme comme second pilier d’un nouveau bipartisme.

 

Son prédécesseur Alexis Tsipras avait choisi en 2015, fait inédit pour un premier ministre grec, de prêter serment sur la Constitution plutôt que sur la Bible. Retour aux Écritures pour Kyriakos Mitsotakis, le chef de Nouvelle Démocratie (ND), investi hier au palais présidentiel à Athènes, au lendemain d’une victoire sans appel de la droite aux élections législatives. Avec 39,80 % des voix et 158 sièges sur 300, les conservateurs raflent, sur la lancée de leur victoire aux élections européennes, la majorité absolue à la Vouli ; ils auront les mains libres pour mettre en œuvre leur programme ultralibéral : accélération des privatisations, diminution de l’impôt sur les bénéfices des entreprises, externalisation de certains services publics et programme d’« évaluation » des fonctionnaires.

Avec sa campagne aux accents extrémistes, le chef de file des conservateurs, héritier de l’une de ces dynasties politiques dont la Grèce a le secret, parvient à siphonner l’électorat d’extrême droite. Sans faire fuir, comme l’espéraient ses adversaires, l’électorat libéral pro-européen. Conséquence : les néonazis d’Aube dorée sont éjectés du Parlement. Ils ne passent pas la barre des 3 %, alors qu’ils frôlaient les 7 % et décrochaient 18 sièges aux élections législatives du 20 septembre 2015. Les nationalistes pro-Russes d’Elliniki Lysi (Solution grecque) font bien leur entrée à la Vouli, mais de justesse, avec 3,72 % des voix et 10 sièges. Quant aux souverainistes d’Anel (Grecs indépendants), longtemps alliés à Syriza et rayés du paysage politique à l’issue du scrutin européen, ils ne se présentaient même pas.

Mitsotakis affûte déjà des propositions dures pour flatter ses appuis les plus radicaux

Kyriakos Mitsotakis tire donc seul parti de la poussée de fièvre nationaliste suscitée par la conclusion de l’accord de Prespes sur le nom de la Macédoine. Par ce traité bilatéral parrainé par Berlin et Washington, la Grèce reconnaît à l’ex-République yougoslave voisine le nom de Macédoine du Nord. La démarche était censée clore une vieille querelle et lever au passage les obstacles à l’entrée de Skopje dans l’Union européenne et l’Otan. Mais l’extrême droite a hurlé à la trahison, le patron de Nouvelle Démocratie lui a emboîté le pas en fustigeant un « recul national » propre à « diviser les Grecs ».

Poussés par un sentiment de souveraineté confisquée, des milliers de Grecs sont descendus dans la rue, au début de l’année, après la ratification serrée de cet accord par le Parlement. Kyriakos Mitsotakis a gagné son pari : cette mobilisation a bien trouvé sa traduction dans les urnes.

Lorsqu’il a pris à l’arraché la tête du parti conservateur en 2015, après la déroute d’Antonis Samaras, cet ancien banquier offrait pourtant le visage d’une droite bourgeoise et policée, d’une « modération » tout européenne. Il s’est vite conformé à la ligne radicale défendue par des transfuges du Laos (extrême droite) comme les anciens ministres de la Santé Adonis Georgiadis et Makis Voridis, piliers de la politique de démolition sociale conduite sous Samaras. Le premier ne jure que par « la patrie, la religion et la famille ». Le second savoure son surnom : la Hache, en référence à l’arme dont il menaçait, à l’université, les étudiants communistes.

Dans ce nouveau paysage politique marqué par la transhumance de l’électorat d’extrême droite vers Nouvelle Démocratie, Kyriakos Mitsotakis promet d’entendre « tous les Grecs », mais il affûte déjà, sur la sécurité et sur l’immigration, des propositions dures, destinées à flatter ses appuis les plus radicaux. Chaleureusement félicité par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, il ne parle plus, par contre, de renégocier « les paramètres du post-plan de sauvetage », entendre les mesures d’austérité toujours imposées par les créanciers de la Grèce, pourtant officiellement sortie du régime des mémorandums.

Dimanche soir, Alexis Tsipras, lui, a sobrement encaissé la défaite annoncée. « L’alternance est la quintessence de la démocratie », a-t-il commenté, en adoptant d’emblée la posture de chef d’une opposition rénovée. Syriza pâtit certes de l’abstention – la plus forte depuis la chute de la dictature – et de la désaffection de classes populaires échaudées par la signature en 2015 d’un troisième mémorandum d’austérité. Mais le parti ne s’effondre pas, fait-on valoir dans ses rangs : avec 31,55 % et 86 sièges, la formation de gauche s’affirme comme second pilier d’un nouveau bipartisme.

Rassemblés dans le Mouvement pour le changement (Kinal), les socialistes de l’ancien Pasok restent durablement marginalisés : ils recueillent 8 % des voix et gagnent 22 sièges seulement, eux qui rassemblaient encore 43,9 % des suffrages en 2009, à l’aube de la crise. Les communistes du KKE confirment de leur côté, avec 5,33 % et 15 sièges, les sévères reculs enregistrés aux élections européennes, municipales et régionales. Symptôme d’une « tendance générale au conservatisme » qui confortera, sous les auspices de la Nouvelle Démocratie, « des choix antipopulaires », regrette le chef du KKE, Dimitris Koutsoumbas.

« Notre peuple punit les gouvernements qui lui imposent des mémorandums»

Toujours à gauche, les dissidents de Syriza qui avaient claqué la porte du parti à l’été 2015 en accusant Alexis Tsipras de « trahison » après le référendum sont littéralement balayés. L’Unité populaire de Panayotis Lafazanis, ancien ministre de la Restructuration de la production, de l’Environnement et de l’Énergie, opposant résolu aux privatisations, n’atteint pas même 1 %. Le Cap vers la liberté de l’ancienne présidente du Parlement, Zoé Konstantopoulou, recueille 1,46 %. Seul Yanis Varoufakis tire son épingle du jeu : sa formation, Mera25, entre à la Vouli avec 3,44 % des voix et 9 sièges. « Notre peuple punit les gouvernements qui lui imposent des mémorandums », affirmait dimanche l’ex-ministre des Finances en commentant les résultats.

Ce scrutin le confirme : les incantations sur le « retour de la croissance » n’ont pas guéri la Grèce, laboratoire européen de violentes politiques d’ajustement structurel. Les politiques d’austérité imposées par des créanciers autoritaires ont profondément et durablement affecté la société grecque, en fragilisant les classes populaires, en broyant les services publics, en compressant les salaires, en faisant de la précarité la règle sur le marché du travail. La gauche grecque, au pouvoir, a endossé cette politique, à l’ombre d’un rapport de force démesurément favorable à la finance. Les fragiles filets sociaux rétablis par Syriza en faveur des plus modestes semblent aujourd’hui dérisoires, devant la hargne d’une droite décomplexée.

Alexis Tsipras, pourtant, assume sans ciller, défend son bilan, promet, dans l’opposition, de tout faire « pour empêcher les manifestations de revanche contre les conquêtes sociales ». Ces résultats, insiste-t-il, ne traduisent pas « une défaite stratégique pour Syriza ». Ils tiennent lieu, à ses yeux, de fondations au « grand parti démocratique » qu’il veut voir prendre corps. « Nous travaillerons durement, avec obstination, afin que la victoire de ND s’avère temporaire », promet-il. L’ancien locataire du palais Maximou est pressé de revenir aux affaires. Avec, pour cap politique, un « progressisme » aux contours encore incertains.

Rosa Moussaoui
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9 juillet 2019 2 09 /07 /juillet /2019 07:12
Référendum ADP. Le PCF espère un million de soutiens en septembre
Mardi, 9 Juillet, 2019

Les communistes ont présenté hier leur mobilisation estivale pour le RIP contre la privatisation d’Aéroports de Paris.

 

Si, selon le décompte quotidien de CheckNews, le rythme de la collecte est tombé à 5 000 signatures en 24 heures en ce début de semaine, le nombre de soutiens engrangés permet de garder de l’avance. Et la démarche, engagée par 248 parlementaires de toute l’opposition (hors RN), peut puiser dans un large réservoir : 75 % des Français se disent « prêts à signer une pétition pour réclamer l’organisation (de ce) référendum », selon un sondage YouGov.

Pour la mise en place d’un « comité de suivi »

Pour animer cette campagne qui durera jusqu’en mars 2020, un nouveau collectif doit voir le jour ce jeudi, a aussi annoncé le PCF. Sous le nom de « marée populaire », celui-ci doit regrouper formations politiques, associations, syndicats… Il pourrait organiser, tout au long de ces huit mois, des rendez-vous nationaux. En attendant, les parlementaires réunis sous l’acronyme CNR (pour Coordination nationale du référendum) ne baissent pas la garde. Outre un courrier au ministre de l’Intérieur pour demander la mise en place d’un « comité de suivi » avec une rencontre hebdomadaire, ils se sont également adressés aux radios et télévisions publiques, ainsi qu’au CSA « pour que dans les meilleurs délais possibles, des dispositions soient prises pour organiser l’information » sur cette procédure qui relève, soulignent-ils, d’un « droit constitutionnel ». Des courriers restés sans réponse jusqu’à présent, ce qui pourrait conduire à une mobilisation devant France Télévisions.

La collecte des signatures pour ouvrir la voie au référendum d’initiative partagée (RIP) contre la privatisation d’Aéroports de Paris (ADP) a passé le cap des 10 % des 4,7 millions de soutiens nécessaires, la semaine dernière. Mais, avec l’été, les initiatives se multiplient pour ne pas perdre le rythme. « Nous allons aller crescendo », a promis hier la sénatrice communiste Éliane Assassi à l’occasion d’une conférence de presse, évoquant la mobilisation des militants et élus communistes, des rendez-vous estivaux et le temps fort que sera la Fête de l’Humanité, en septembre. « Je pense que, malgré toutes les difficultés, nous pourrons aboutir à au moins 1 million de soutiens en septembre », ajoute l’élue. « À chacune de nos initiatives, nous réunissons des centaines de signatures malgré le site digne de l’époque du Minitel », appuie le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, tandis que les critiques à l’égard du dispositif gouvernemental se sont multipliées depuis son lancement, le 13 juin. Encore aujourd’hui, souligne le député PCF Stéphane Peu, qui transformera sa permanence en lieu de collecte dès la semaine prochaine, « énormément de gens, pourtant pas réfractaires à Internet, ne parviennent pas à apporter leur contribution ».

Julia Hamlaoui
Référendum ADP. Le PCF espère un million de soutiens en septembre - L'Humanité, 9 juillet 2019
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9 juillet 2019 2 09 /07 /juillet /2019 07:02
Accord ue-canada. Pourquoi la France doit s’opposer au Ceta
Mardi, 9 Juillet, 2019

Le projet de ratification de ce traité commercial « climaticide » et antidémocratique est examiné aujourd’hui en commission à l’Assemblée nationale, avant un vote le 17 juillet. Associations, syndicats et ONG appellent les députés à s’y opposer.

 

C’est un démenti cinglant au prétendu « virage écologique » d’Emmanuel Macron. En donnant le feu vert à la ratification du Ceta, le président de la République non seulement donne carte blanche aux multinationales pour imposer leurs lois, mais porte la responsabilité d’aggraver encore le réchauffement climatique. Depuis le début de son application partielle, en 2017, ses conséquences néfastes sur l’environnement et la santé ont été largement documentées, notamment dans un rapport commandité par le premier ministre lui-même… La France peut encore s’y opposer. C’est le sens de l’appel de 72 organisations, associations et syndicats, qui exhortent les parlementaires à ne pas le ratifier. D’autant que, après un premier recul sur le Mercosur, la majorité macroniste peine à justifier ce passage en force. À une semaine du vote, voici cinq bonnes raisons d’exiger de vos députés qu’ils s’y opposent.

1. Le pouvoir aux multinationales

C’est l’un des points les plus controversés du traité. Si une entreprise estime qu’un État prend une décision en matière environnementale ou sociale qui nuit à ses investissements, elle pourra porter l’affaire devant un mécanisme d’arbitrage. « Ces tribunaux risquent d’être préjudiciables aux mesures prises par les États dans l’intérêt général, comme en matière de santé ou d’environnement », avertissait la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) en 2016. Et c’est déjà le cas. En 2012, le groupe Veolia a attaqué l’Égypte pour avoir augmenté son salaire minimum et exigé 140 millions d’euros de compensation, argumentant une perte de rentabilité de sa filiale dans ce pays, en vertu d’un accord commercial entre Paris et Le Caire datant de… 1974. En juin, le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi) a rendu une décision en faveur de l’Égypte. Même si c’est souvent les États qui remportent les arbitrages, l’intimidation demeure. Et parfois, les firmes transnationales remportent la mise, telle Cargill, qui s’est vu verser 80 millions d’euros de la part du Mexique, lequel avait eu le malheur d’instaurer un impôt sur les sodas pour des raisons de santé publique.

2Un traité « climaticide »

Le Ceta est en totale contradiction avec les engagements pris par la France pour lutter contre le changement climatique. « En important plus de biens et de services des deux côtés de l’Atlantique, on émet plus de gaz à effet serre. Le réchauffement va s’accélérer. C’est incompatible avec l’accord de Paris », juge Maxime Combes, économiste à Attac. D’autant que le Canada est « l’un des pires élèves du G20 en matière de lutte contre le réchauffement », dénonce l’ancien ministre de la transition écologique Nicolas Hulot. Il faut dire que le pays de l’érable est loin de donner l’exemple. Alors que la Chambre des communes du Canada a décrété, il y a quelques jours, « l’état d’urgence climatique », ni une ni deux, le premier ministre, Justin Trudeau, a posé la dernière pièce à l’édifice pour le démarrage cet été de l’allongement de l’oléoduc Trans Mountain. Ce projet devrait permettre aux pétroliers de tout poil de tripler la capacité d’extraction – près de 890 000 barils par jour – des sables bitumineux de l’Alberta. Alors que le plan climat en France, présenté en 2017, prévoit l’interdiction de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures sur le territoire français – une première mondiale –, le pétrole canadien ne rencontrera donc plus d’obstacle pour finir dans le réservoir de nos voitures.

3. Des OGM dans nos assiettes

En juin dernier, le ministre de l’Agriculture français déclarait qu’il refuserait tout « accord qui nuirait aux intérêts des agriculteurs et consommateurs français, aux exigences de qualité sanitaire et alimentaire des standards européens, et à nos engagements environnementaux de l’accord de Paris ». Didier Guillaume a-t-il vraiment pris la mesure des conséquences du Ceta, qui ouvrira le marché européen à 65 000 tonnes de viandes canadiennes issues de bovins engraissés au maïs OGM, aux farines animales et aux antibiotiques ? En clair, les dispositions du texte risquent de réduire la possibilité de réglementer les OGM ou les perturbateurs endocriniens en Europe. Et la forte baisse des barrières tarifaires va affecter de plein fouet le secteur agricole, créant une concurrence déloyale. Une fois n’est pas coutume, syndicats agricoles et ONG sont sur la même position : le Ceta « met en concurrence deux modèles agricoles qui ne jouent pas à armes égales, dénonce ainsi Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA, le principal syndicat agricole français. D’un côté, on demande aux agriculteurs européens de monter en gamme, avec des produits plus sains, d’avoir des pratiques plus respectueuses de l’environnement. De l’autre, on ouvre nos frontières à des produits agricoles qui n’offrent aucune garantie en matière sociale, sanitaire et environnementale ». Pour résumer, les intérêts commerciaux et des investisseurs primeront sur les considérations quotidiennes de la plupart des Européens et des Canadiens, à savoir une alimentation saine et de qualité.

4. Une aberration démocratique

Concocté dans la plus grande opacité, le Ceta, grâce à une anomalie démocratique tout européenne, est déjà appliqué de manière « provisoire » depuis le 21 septembre 2017, avant même le feu vert du Parlement européen et le vote dans chacun des États membres. Pire, la Commission européenne aura tout fait pour désinformer les citoyens, en affirmant notamment que ce traité ne prévoit aucun mécanisme d’arbitrage. Ce qui est vrai, puisque les auteurs du texte lui ont substitué le terme de « système de cour sur l’investissement » (ICS), qui donnera exactement le même pouvoir aux multinationales. Tout retour en arrière pourrait s’avérer extrêmement ardu puisque des clauses – dites « crépusculaires » – prévoient que ces tribunaux pourraient exister encore vingt ans après une éventuelle dénonciation de l’accord ! Ou comment donner les clés des décisions politiques aux multinationales…

5. Une machine à fabriquer de la précarité

La liberté de circulation des marchandises, des services et des capitaux est inscrite dans l’ADN du Ceta. Le Medef y voit déjà des opportunités à saisir pour les entreprises. Et pour cause : dans un contexte de concurrence accrue, les multinationales seront en position de force pour rafler les marchés au détriment des PME. Côté perdants, on compte aussi les travailleurs. En effet, la mise en concurrence des entreprises va entraîner une fuite des capitaux et des investissements là où la fiscalité et les protections sociales sont les plus faibles. Conséquence : le dumping social et fiscal va s’accentuer. Dans leur lettre ouverte, 72 organisations, dont la CGT et Attac, pointent un traité qui « facilite l’entrée sur le marché européen de produits qui ont été élaborés selon des normes inférieures aux standards européens ». Pour les salariés, la prospérité promise ne traversera pas l’Atlantique.

Alexandra Chaignon, Gaël de Santis, Lola Ruscio, Eric Serres et Maud Vergnol
 
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Accord ue-canada. Pourquoi la France doit s’opposer au Ceta (L'Humanité, 9 juillet 2019)
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