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Comme tous les ans, le ministère de l’Intérieur publie les chiffres concernant l’immigration. À une époque où la droite, l’extrême droite et le gouvernement ne veulent que manipuler les esprits et surfer sur la haine, les interprétations des chiffres sont trop souvent malveillantes et oublient quelques réalités.
La première réalité à remettre en place si l’on cherche les motifs de leur augmentation, elle s’appelle Covid. En effet, les comparaisons sont faites par rapport à l’année 2020, année de pandémie mondiale qui a stoppé toute mobilité et en particulier les migrations lointaines. Les chiffres sont donc juste un retour aux réalités de 2019.
Le seul chiffre qui continue à être très faible est celui du nombre de visas donnés, 733 000 en 2021 contre 3,5 millions en 2019. Mais cette très forte diminution ne fait pas l’actualité car elle gène le monde financier, y compris de droite ou pire. C’est en effet le signe de la non-reprise du tourisme international et en particulier du tourisme venant de Chine et des États-Unis.
Au sujet des demandes d’asile, le chiffre est toujours inférieur à celui de 2019 et cela malgré l’effondrement de l’Afghanistan, malgré la multiplication de pays instables, malgré les catastrophes naturelles dues au réchauffement climatique. Le nombre de statuts de réfugiés délivrés par la France est toujours aux alentours de 35 000. Ce chiffre et celui des expulsions montrent clairement la politique forteresse, la politique de repli sur soi de la France.
Notre pays abandonne l’hospitalité, la fraternité, l’accueil, et refuse le débat sur la liberté de circulation et d’installation.
D’ailleurs certaines voix du monde économique commencent à dire que le nombre de titres de séjour délivrés pour raison économique, en particulier dans les métiers en tension, serait insuffisant.
Autre information qui n’a pas fait la Une des journaux. L’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) appelle la présidence française du conseil de l’Union européenne et la République tchèque qui assurera cette présidence en juillet, à donner la priorité à une meilleure protection des réfugiés en Europe et dans le monde.
Cet organisme international signale que la généralisation des propos xénophobes dans les discours politiques et la multiplication des obstacles physiques et législatifs à l’accès au territoire pour y demander l’asile dans l’Union européenne ont continué à mettre en danger des personnes fuyant la guerre, les conflits et les persécutions.
« Le droit de demander l’asile est un droit humain fondamental. Il doit être préservé, en particulier dans les situations extraordinaires ou en cas d’urgence », a déclaré Gonzalo Vargas Llosa, représentant du HCR pour les Affaires européennes. Elle fustige dans ces propos les pratiques politisées et clivantes qui cherchent à instrumentaliser les mouvements de population et vont à l’encontre du droit international.
Le HCR exhorte les présidences à réaliser des progrès sur des questions clés, telles que la solidarité intra Union européenne, les conditions d’accueil et les procédures d’asile équitables et rapides.
Gonzalo Vargas Llosa explique dans cet appel que le nombre d’arrivées dans l’Union européenne reste largement « gérable » (les chiffres le montrent distinctement). Elle rappelle aussi que près de 90 % des réfugiés vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire, et encourage donc les présidences à renforcer la solidarité mondiale envers les personnes déplacées de force.
Voilà une belle leçon à débattre et à faire connaître dans les campagnes électorales actuelles.
Cécile Dumas
responsable adjointe du secteur international du PCF
chargée des questions migratoires
Pierre Laurent:
Hier soir, sur LCI, Valérie Précresse a bénéficié de près de trois heures d’antenne pour parler d’elle-même et de son projet pour la France. Un projet dont l’application aboutirait à réduire les ressources de la Sécurité sociale, de l’UNEDIC et surtout des caisses de retraite. En réalité la candidate LR propose une augmentation des salaires nets de 10 % durant le quinquennat sans qu’il en coûte un centime aux employeurs.
Deux semaines après la première émission d’un nouveau genre inaugurée à Uzerche en Corrèze avec Valérie Pécresse et à l’initiative de BFMTV, la chaîne d’info LCI a produit hier soir à Paris un copié collé avec, là aussi, la candidate LR à la présidence de la République comme première invitée. Comme sur BFM, l’émission a duré de 20H50 à 23H30. Comme sur la chaîne concurrente, il n’y eut pas d’interruption publicitaire. De même, six électeurs, quatre femmes et deux hommes ne croyant plus guère aux paroles politiques, furent invités à écouter la candidate dans le studio de LCI pour être interrogés sur leur ressenti en fin d’émission.
L’émission était animée par David Pujadas et Ruth Elkrief. Pour mieux connaître l’intimité de la candidate, les téléspectateurs eurent droit à une photo sur écran de Jean-Louis Pécresse, le mari de la dame ainsi qu’un éloge d’une adolescente à sa maman. Puis, pendant que la candidate répondait aux questions des deux journalistes, les visages des six invités défilaient à tour de rôle en petits flashs sur l’écran afin de guetter leur intérêt, seconde après seconde. On parla de la présence de la France au Mali après l’annonce du renvoi de l’ambassadeur ; puis ce fut le tour de la situation en Ukraine, des quotas annuels d’immigrés que la France accueillera si Valérie Précresse devient présidente de la République, du renvoi des clandestins, de la délinquance, du mariage homosexuel, de la procréation médicalement assistée.
La soirée était déjà très avancée quand vint de moment de parler des sujets économiques et sociaux. Il fallait donc les traiter rapidement alors que l’émission avait été plutôt ennuyeuse jusque-là. On prit tout de même me temps de passer de brefs extraits des récents discours où l’on revoyait la candidate LR accuser à cinq ou six reprises le président Macron d’avoir « cramé la caisse » avec sa politique du « quoiqu’il en coûte » depuis deux ans.
Les propositions économiques et sociales de la candidate furent alors présentées en quelques minutes. Valérie Précresse a redit qu’elle fera augmenter les salaires de 10 % durant le prochain quinquennat si elle devient présidente de la République. Ce sera 3 % de plus dès l’été 2022. Mais cette première augmentation ne coûtera rien aux patrons puisque la candidate a redit que l’équivalant de ces 3 % sera soustrait des cotisations qui alimentent les caisses de retraites. La candidate veut mettre en place une « conférence » au cours de laquelle les entreprises décideront des augmentations de salaires à venir. Il faudrait que cette augmentation cumulée atteigne 5 % dès la fin de l’année 2023, les 5 % suivants étant obtenus durant les trois dernières années du mandat.
Valérie Pécresse a aussi promis « des baisses d’impôts, des baisses de normes (sic) et je continuerai la baisse des cotisations retraite », a-t-elle affirmé. Elle a aussi promis de mettre fin aux 35 heures de travail hebdomadaire avant d’ajouter ceci : « je veux la liberté pour les entreprises. Elles décident et à partir de 35 heures toutes les heures supplémentaires sont défiscalisées et ne supportent pas de charges ».
Alors que David Pujadas s’était montré pointilleux sur certains sujets, cette partie du projet de la candidate LR n’a suscité aucune question de sa part, pas plus que de celle de Ruth Elkrief. Pourtant, le recours sans limite aux heures supplémentaires défiscalisées et délestées de toute cotisation ne manquerait pas de provoquer des effets pervers. Pour rependre le langage de la candidate LR, on peut dire que Valérie Pécresse veut « cramer » les caisses de retraite en augmentant considérablement le nombre d’heures travaillées qui pourront échapper à toute cotisation sociale.
Outre la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) et les caisses de retraites complémentaires, la Sécurité sociale et l’UNEDIC subiront, suite à ce choix politique, une baisse sensible de leurs ressources alors qu’elles sont décisives pour la préservation de notre santé et pour ne pas laisser une partie de la population sombrer dans la grande pauvreté quand elle perd son emploi. Car dès lors qu’ils dépenseront moins pour chaque heure de travail payée en heure supplémentaire, les patrons flexibiliseront les horaires journaliers, hebdomadaires et mensuels plutôt que d’embaucher. Comme Valérie Précresse veut aussi faire passer l’âge de départ à retraite de 62 à 65 ans, elle calcule peut-être que la durée de vie moyenne des hommes et des femmes de ce pays reculera bientôt au lieu de progresser.
La France compte aujourd’hui 14,6 millions de retraités dont 6,5 millions d’hommes et 8,1 millions de femmes. La pension moyenne mensuelle nette était de 1 390 € en 2020. Mais celle des femmes est très en deçà de ce chiffre. Ces hommes et ces femmes ont cotisé durant leur vie de travail pour acquérir ce droit et tout actif de ce pays sera un jour retraité à condition de ne pas mourir avant. Le droit çà la retraite acquis à la Libération est mis en cause dans le projet de Valérie Pécresse qui se réclame pourtant du gaullisme.
Il est donc dommage et difficilement compréhensible que David Pujadas et Ruth Elkrief se soient abstenus de poser la moindre question sur le devenir de la vie en société quand une candidate à la plus fonction de l’État avance l’idée d’une telle régression sociale.
La course à l’Élysée se jouera aussi sur la question climatique. Mais le président sortant ne pourra capitaliser sur son bilan en la matière. Celui qui se rêvait en leader mondial du climat est allé de renoncement en renoncement. Et, à la fin, les plus pauvres paient la facture.
Dans un rapport publié ce mercredi, le Réseau Action Climat rappelle : « À l’issue de ce quinquennat, la plupart des indicateurs sont dans le rouge. »
Souvenons-nous de 2017. À peine un pied posé à l’Élysée, Emmanuel Macron répondait « Make Our Planet Great Again » à Donald Trump, qui entendait sortir son pays de l’accord de Paris. Un quinquennat plus tard, passé à faire gober des couleuvres à ses ministres de l’Écologie, la douche est forcément glaciale. Pour le climat, pour la biodiversité, pour les plus précaires. Voilà donc l’heure du bilan, à l’approche d’une présidentielle où l’environnement est devenu l’une des priorités des Français. Sans surprise, il n’est pas glorieux. Dans un rapport publié ce mercredi, le Réseau Action Climat (RAC) pointe des « résultats insuffisants et une méthode à revoir ». Avant lui, Attac dressait le même constat dans un livre publié la semaine dernière. Bref, rien ne va ou presque. « À l’issue de ce quinquennat, la plupart des indicateurs sont dans le rouge », rappelle le RAC. Retour sur la mandature du renoncement climatique.
On le sait : les plus riches sont aussi ceux qui polluent le plus. Une politique équitable demanderait donc aux principaux responsables du réchauffement climatique de contribuer davantage à l’effort. « Mais c’est en dehors du logiciel macroniste de taxer les plus riches », assure Quentin Parrinello, responsable plaidoyer chez Oxfam, organisation membre du RAC. Conséquence : l’exécutif augmente, fin 2018, la taxe carbone et fait grimper le prix des carburants, obligeant les plus pauvres à payer la facture de la transition énergétique. Naît alors le mouvement des gilets jaunes sur les ronds-points et dans les rues et la taxe finit par être abandonnée. « La fiscalité écologique est une façon de faire changer les comportements des consommateurs, explique Quentin Parrinello. Mais puisqu’ils n’avaient aucune alternative, les précaires ne pouvaient changer leur comportement. Ils ont donc subi. »
Pour la justice sociale et climatique, on repassera donc. Puisque, plutôt qu’une taxe sur le kérosène censée pénaliser les plus riches et les multinationales, l’actuelle majorité a préféré augmenter l’« éco-contribution » sur les billets d’avion d’un montant qui varie « entre 1,5 et 18 euros », note le RAC. Une goutte d’eau. Autre renoncement : le malus « au poids » dans l’automobile qui devait viser les véhicules lourds polluants en augmentant le prix d’achat de 10 euros par kilo au-dessus de 1,8 tonne. Une mesure qui concerne 2 % du marché alors que la Convention citoyenne sur le climat préconisait de fixer le seuil à 1,4 tonne pour cibler 26 % du marché. « Macron ne veut pas toucher à la croissance de certaines industries polluantes. Mais plus on le fait tard, plus ça sera difficile », conclut Quentin Parrinello.
Pour permettre à un pays de se défaire de ses émissions de CO2, il ne suffit pas de le contraindre, il faut aussi lui offrir des alternatives. Dans tous les secteurs économiques, des politiques de décarbonation sont possibles sans que cela pèse sur les citoyens. Et plus, même : bien ficelées, elles peuvent contribuer à renforcer l’équité. « Tout le monde se déplace, se nourrit et se chauffe », résume Anne Bringault, coordinatrice des programmes du RAC. Un atout, quand l’enjeu est justement « d’embarquer tout le monde dans la transition ». Or, sur ce point, le quinquennat d’Emmanuel Macron n’a pas donné l’orientation attendue.
Premier secteur émetteur de gaz à effet de serre (31 % en 2019), celui des transports cumule les lacunes, pour ce qui est, par exemple, de renverser la dépendance à la voiture individuelle. Les politiques cyclables ont certes bénéficié d’un plan dédié, mais il reste minimal. « Le niveau d’investissement de l’État atteint à peine 0,75 euro par habitant et par an », avance le RAC dans son rapport. Le transport ferroviaire, pour sa part, a continué de vieillir. L’âge moyen des lignes est de vingt-neuf ans, « contre dix-sept ans en Allemagne et quinze ans en Suisse », et pire encore : de plus de trente-six ans (36,7) pour les plus petites lignes, qui, depuis 2017, ont perdu une centaine de gares et haltes ferroviaires. Dans le même temps, les politiques structurelles sont loin d’avoir contribué à réduire les distances à parcourir au quotidien. « En milieu urbain, souligne Attac, le foncier devient rare et cher, aggravant les problèmes de logement, mais aussi de transport pour celles et ceux qui travaillent en ville sans avoir les moyens d’y habiter. » Extension des déserts médicaux ou recul des services publics dans les communes rurales et les zones périurbaines sont allées dans le même contresens écologique.
Les politiques alimentaires (24 % de notre empreinte carbone) n’ont pas mieux soutenu la transition. La promesse électorale d’Emmanuel Macron d’intégrer 50 % de produits bio ou issus de circuits courts dans les cantines scolaires et les restaurants d’entreprises en 2022 est loin d’avoir été tenue : la part du bio dans la restauration collective n’était que de 5,6 % en 2020.
Foin de transition écologique juste sans transition sociale équivalente : depuis 2018, organisations environnementales et syndicats de travailleurs se sont tous mis d’accord sur ce point. « La question de la justice sociale ne se limite pas à la question écologique, mais cette dernière ne se résoudra pas sans justice sociale », résume Vincent Gay, d’Attac. Anticiper les transitions industrielles de façon à ne pas les faire subir aux travailleurs s’avère en ce sens indispensable. L’industrie lourde (75 % des émissions de l’industrie) est singulièrement concernée, sans se voir pour autant contrainte d’anticiper sa conversion. Le plan de relance de l’économie française au sortir de la crise aurait pu être l’opportunité de le faire : il s’en est abstenu. « En revanche, Emmanuel Macron a mis en œuvre sa réforme de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour en faire une entreprise financière gérée selon les standards du marché », relève Attac. Un processus de privatisation rampant, poursuit l’organisation, qui pourrait peser lourd sur les emplois liés à la transition. « La CDC finance plus de 70 % de la construction et de la réhabilitation des logements sociaux, ainsi que la plupart des infrastructures et des équipements d’intérêt général. » Au total, note encore Attac, elle « est le principal investisseur dans le doma ine de la transition écologique et sociale ». Selon l’Ademe, la transition énergétique dans le seul secteur de la construction pourrait générer 196 000 nouveaux emplois d’ici à 2050.
(Photo Le Télégramme/Jean-Luc Padellec) - sur la photo, des représentants de la gauche brestoise, dont 4 camarades du PCF: Enzo de Gregorio, représentant de la JC 29, Erwan Rivoalan, Jean-Paul Cam, Eugénie Cazaux.