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Mélinée Soukémian est née le 13 novembre 1913 dans une famille de fonctionnaires hauts gradés de l'administration ottomane des Postes de Constantinople. Elle a 3 ans quand ses parents arméniens sont massacrés par les Turcs dans le cadre du plan organisé de génocide en 1915 qui a fait près plus d'un million de victimes arméniennes. Orpheline, elle est recueillie avec Armène sa soeur, d'un an de plus qu'elle, dans une mission protestante de Smyrne, sur la mer Egée (Izmir), puis transportée après la guerre Greco-Turcs se traduisant par de nombreux massacres et des épurations ethniques en Grèce d'Europe à Thessalonique et à Corinthe, dans un orphelinat. Le 14 octobre 1926, grâce au comité américain su Secours arménien et syrien, Mélinée et sa soeur Armène arrivent à Marseille.
Mélinée Soukémian est née le 13 novembre 1913 dans une famille de fonctionnaires hauts gradés de l'administration ottomane des Postes de Constantinople. Elle a 3 ans quand ses parents arméniens sont massacrés par les Turcs dans le cadre du plan organisé de génocide en 1915 qui a fait près plus d'un million de victimes arméniennes. Orpheline, elle est recueillie avec Armène sa soeur, d'un an de plus qu'elle, dans une mission protestante de Smyrne, sur la mer Egée (Izmir), puis transportée après la guerre Greco-Turcs se traduisant par de nombreux massacres et des épurations ethniques en Grèce d'Europe à Thessalonique et à Corinthe, dans un orphelinat. Le 14 octobre 1926, grâce au comité américain su Secours arménien et syrien, Mélinée et sa sœur Armène arrivent à Marseille. Elle suit une école de dactylo à Marseille puis au Raincy, en région parisienne. Elle s'installe dans le 2e arrondissement de Paris. Ses propriétaires, amis et protecteurs sont des parents de Charles Aznavour, alors Shahnourh Aznavourian, un petit protégé de Missak et Mélinée Manouchian qui vont accompagner ses premiers contacts avec la chanson. Majeure en 1934, elle a le statut d'apatride et relève de l'Office des réfugiés arméniens. Missak et Mélinée tombent amoureux l'un de l'autre en 1935, après s'être rencontrés en 1934. Ils sont tous les deux communistes, viscéralement antifascistes, membres de la HOG, le comité de secours pour l'Arménie, et de la MOI (Main d’œuvre étrangère du Parti communiste, avec ses groupes de langues). Il vit au 79 rue des Plantes à Paris et elle rue Louvois dans le 2e arrondissement. Il a 28 ans, est "beau comme une statue grecque" assure Mélinée, elle en a 22. Leur mariage est célébré le 22 février 1936, l'année du Front Populaire, tout un symbole. En 1937, Missak et Mélinée Manouchian accompagnent les deux enfants Aznavourian, Aïda et Charles à un radio-crochet de la place Pigalle, et le futur Charles Aznavour, 10 ans, termine premier en imitant le style de Maurice Chevalier !!! Aïda, seconde! Le 26 septembre 1939, Missak est arrêté avec d'autres militants communistes suite au Pacte Germano Soviétique, transporté à la prison de la Santé. Le 7 octobre, il est relâché contre une promesse de mobilisation volontaire dans l'armée comme 83 000 étrangers engagés volontaires. Il rejoint sa caserne à Colpo dans le Morbihan, près de Vannes. Pendant ce temps, la police continue à traquer les communistes, et Mélinée, doublement suspecte en tant qu'étrangère, citoyenne de seconde zone (elle n'a par exemple pas le droit de recevoir un masque à gaz) et communiste, est contrainte de détruite de nombreux documents compromettants sur les activités de la HOG et des communistes arméniens. En juin 1940, à la débâcle puis la démobilisation, Missak est affecté de manière autoritaire à l'usine Gnome et Rhône d'Arnage, dans la Sarthe, sous le contrôle des autorités. Elle fabrique des moteurs d'avions. Missak vit alors au Mans. Mélinée, enceinte, se sent contrainte d'avorter. En juin 41, Missak est de nouveau arrêté, dans le cadre d'une rafle préventive contre les communistes organisée sur ordre des nazis avant leur attaque contre l'Union soviétique. Elle est envoyé à Compiègne, au camp de Royalieu. Mélinée fait 120 km à vélo pour le rejoindre, lui remettre un colis et le saluer à la barbe des sentinelles allemandes. A l'été 41, Missak est de nouveau libéré, les autorités allemandes n'ayant pu établir avec certitude qu'il était toujours communiste. Il devient alors responsable de la section arménienne de la MOI, une de ses 14 branches, sous la direction de Louis Grojnowski, de Jacques Kaminski, et de Victor Blajek qui a remplacé Arthur London. Durant plusieurs mois, le couple s'implique dans le TA, le travail allemand alors sous la direction d'Arthur London, consistant à infiltrer pour le coup les supplétifs de l'Armée allemande d'origine soviétique, et les enrôlés des régions annexées du Reich.
En mars 42, la FTP MOI se met en place comme unité combattante structurée sous la direction de Boris Holban, militant communiste juif roumain de Bessarabie, région située entre la Moldavie et l'Ukraine actuelle, né en 1908. Le premier détachement est plutôt constitué de Roumains comme Holban, le second regroupe des juifs polonais le troisième des Italiens, et le quatrième s'occupe des déraillements. Les FTP-MOI s'inspirent des premières expériences de lutte armée de l'OS-MOI. Manouchian est un adjoint d'Holban, puis prendra sa place à partir de l'été 1943, sous la direction de Joseph Epstein, "Colonel Gilles", quand Holban est muté vers d'autres tâches. Mélinée participe aussi à certaines opérations des FTP-MOI. Elle quitte l'organisation après les arrestations de novembre 43, dont celle de son mari. C'est donc entre l'été 43 et mi-novembre 43 que Manouchian dirige les FTP-MOI de région parisienne avant la rafle du 16 novembre et l'exécution de 22 d'entre eux le 21 février 1944. Après l'arrestation de Manouchian, Mélinée est cachée par les parents de Charles et Aïda Aznavour. La douleur du deuil digérée, Mélinée reprend sa place dans la Résistance et le "travail allemand" de renseignement de la MOI. Elle résiste du côté de Thouars dans les Deux Sèvres, à Paris, écrit des tracts à destination de "malgré-nous" supplétifs allemands arméniens enrôlés dans la Wehrmacht. Elle participe au retournement de soldats allemands d'origine soviétique qui rejoignent la Résistance en juillet 1944. Après la guerre Mélinée milite à la JAF, la Jeunesse arménienne de France. Elle devient française en 1946. Puis elle fait le choix de rejoindre l'Arménie soviétique où elle vivra de à partir de 47 à Erivan. En 1963, elle rentre à Paris et elle décède le 6 décembre 1989.
Source: Gérard Streiff, Missak et Mélinée Manouchian, Un couple en Résistance. L'Archipel, Janvier 2024, 21€
Missak Manouchian - Ivre d'un grand rêve de liberté - Édition Points, janvier 2024, anthologie bilingue français/arménien des poèmes de Missak Manouchian (13,90€), préface d'André Manouchian, Introduction de Didier Daeninckx
La relation entre Arthur Rimbaud et Paul Verlaine, deux des plus grands poètes de la littérature française, fut autant passionnée que tumultueuse, dans une période de l’Histoire qui ne l’était pas moins, marquée par la Commune de Paris.
Début septembre 1871. « Venez chère grande âme, on vous attend à Paris. » Arthur Rimbaud, depuis Charleville, a déjà écrit à deux reprises à Paul Verlaine. Il n’a pas 17 ans. Il lui exprime son admiration et joint à son envoi plusieurs de ses poèmes. Les Effarés, Accroupissements, le Cœur volé, les Assis… Il lui envoie une seconde lettre quelques jours après : « J’ai fait le projet de faire un grand poème et je ne peux travailler à Charleville. Je suis empêché de venir à Paris étant sans ressources. Ma mère est veuve et extrêmement dévote »…
Paul Verlaine lui a envoyé une première réponse, assez énigmatique : « J’ai comme un relent de votre lycanthropie (…) vous êtes prodigieusement armé en guerre. » La lycanthropie est l’aptitude à se transformer en loup-garou les nuits de pleine lune. Le jeune poète est déjà allé à Paris, en vagabond, du 19 avril au 3 mai. La Commune n’est pas encore tombée, mais sa chute lui inspirera les Mains de Jeanne-Marie, en hommage aux femmes de la Commune enchaînées , « Elles ont pâli, merveilleuses, au grand soleil d’amour chargé, sur le bronze des mitrailleuses à travers Paris insurgé ». De retour à Charleville, il parle à son ancien professeur Georges Izambard des colères folles qui le poussent vers « la bataille de Paris où tant de travailleurs meurent encore tandis que je vous écris »…
Paul Verlaine, qui l’appelle à venir à Paris, est son aîné de dix ans et déjà un poète reconnu. Il s’est marié quelques mois plus tôt avec Mathilde Mauté, 17 ans, d’une famille aisée et cultivée. Louise Michel est une intime, présente à la cérémonie. La jeune femme est rapidement enceinte. Verlaine est nommé au bureau de presse de la Commune où il rédige ses communiqués. C’est dans cette famille qu’arrive Rimbaud, génial mais mal dégrossi. Bien qu’il n’y reste qu’une vingtaine de jours, il est déjà devenu un sujet de conflit dans le couple dont le bébé, Georges, naît le 30 octobre. Verlaine est souvent ivre, violent. Dès la mi-novembre, la nature de ses relations avec Rimbaud, qui repart cependant quelque temps à Charleville, semble avérée.
Le 2 avril, Verlaine, qui pense avoir renoué avec Mathilde après une séparation, écrit à Rimbaud. « C’est ça, aime-moi, protège et donne confiance (…) Mais quand diable commencerons-nous ce chemin de croix, – hein ? » Réponse de Rimbaud : « Quand vous me verrez positivement manger de la merde, alors seulement vous ne trouverez plus que je coûte cher à nourrir. » Verlaine : « Ne jamais te croire lâché par moi. » En mai, il prépare son retour à Paris : « Dès ton retour m’empoigner de suite. » Il écrit « prudences ! » avant de lui donner des conseils, « faire en sorte, au moins quelque temps d’être moins terrible d’aspect qu’avant : linge, cirage, peignage, petites mines »…
Il espère apaiser le climat avec sa femme. Mais quelques jours après son retour, Mathilde comprend, le couple éclate de nouveau. Début juillet, les deux poètes partent ensemble. En septembre, ils sont à Londres où ils retrouvent les communards en exil. Ils se séparent à deux reprises, Rimbaud retournant en France, mais leur relation reste au beau. Verlaine, le 18 mai : « Frérot, j’ai bien des choses à te dire (…) tu seras content de ta vieille truie (…) je suis ton old cunt ever open ou opened, je n’ai pas là mes verbes irréguliers. » C’est cru. On peut au choix traduire cunt par con, chatte, salope…
Mais en juillet, le ton change. Verlaine veut retrouver Mathilde et leur fils. « Tu dois au fond comprendre, enfin, qu’il me fallait absolument partir, que cette vie violente et toute de scènes sans motif que ta fantaisie ne pouvait m’aller foutre plus. Seulement, comme je t’aimais intensément (Honni soit qui mal y pense), je tiens aussi à te confirmer que si d’ici à trois jours je ne suis pas avec ma femme, dans des conditions parfaites, je me brûle la gueule (…) nous ne nous reverrons plus en tout cas. » Rimbaud, qui lui a envoyé une lettre presque en même temps, lui demande à l’évidence d’oublier une scène – « Oui, c’est moi qui ai eu tort. » À la réception, le lendemain, de la lettre de rupture, il ironise : « Quant à claquer je te connais, tu vas donc, en attendant ta femme et ta mort te démener, errer, ennuyer des gens (…) crois-tu que ta vie sera plus agréable avec d’autres que moi : Réfléchis-y ! - Ah ! Certes non ! »
Le 7 juillet, il lui écrit encore. « Sois sûr de moi, j’aurai très bon caractère. À toi. Je t’attends. Rimb. » Trois jours plus tard, à Bruxelles, c’est Verlaine qui tire sur lui et le blesse. Il sera condamné à deux ans de prison pour son acte et pour pédérastie, quand bien même Rimbaud a retiré sa plainte.
À sa sortie de prison, en janvier 1875, il revoit brièvement Rimbaud qui lui aurait alors remis le manuscrit des Illuminations. En décembre de la même année, il lui adresse une longue lettre qui sera la dernière : « Je te voudrais tant éclairé, réfléchissant. Ce m’est un si grand chagrin de te voir en des voies idiotes, toi si intelligent »…
Au Harar, le patron de l’entreprise où Rimbaud travaille à partir de 1880 a eu vent de qui était son employé. Quand il l’interroge sur sa vie parisienne, il répond : « J’ai assez connu ces oiseaux-là. » Il écrit à sa mère qu’il voudrait gagner assez d’argent pour rentrer au pays et trouver une gentille fille qui voudrait bien l’épouser. Il meurt de la gangrène à Marseille, le 10 novembre 1891. Il a dit à sa sœur Isabelle, qui est venue près de lui : « J’irai sous la terre et toi tu marcheras dans le soleil. » Verlaine, alcoolique, presque clochardisé, finit ses jours avec sa compagne Eugénie Krantz pour qui il écrit certains de ses poèmes les plus sensibles. Il meurt le 8 janvier 1896 avec le titre de Prince des poètes décerné par ses pairs. Son dernier poème, Mort, paraît ce même mois : « Les armes ont tu leurs ordres en attendant de vibrer à nouveau dans des mains admirables »…
« Rimbaud, 4 juillet 1873
Reviens, reviens, cher ami, seul ami, reviens. Je te jure que je serai bon. Si j’étais maussade avec toi, c’est une plaisanterie où je me suis entêté, je m’en repens plus qu’on ne peut dire. Reviens, ce sera bien oublié. Quel malheur que tu aies cru à cette plaisanterie. Voilà deux jours que je ne cesse de pleurer. Reviens. Sois courageux cher ami. Rien n’est perdu. Tu n’as qu’à refaire le voyage. Nous revivrons ici bien courageusement, patiemment. Ah je t’en supplie. C’est ton bien d’ailleurs. Reviens, tu retrouveras toutes tes affaires. J’espère que tu sais bien à présent qu’il n’y avait rien de vrai dans notre discussion. L’affreux moment ! Mais toi, quand je te faisais signe de quitter le bateau, pourquoi ne venais-tu pas ? Nous avons vécu deux ans ensemble pour arriver à cette heure-là ! Que vas-tu faire. Si tu ne veux pas revenir ici, veux-tu que j’aille te trouver où tu es ? (…) Sois courageux. Réponds-moi vite. Je ne puis rester ici plus longtemps. N’écoute que ton bon cœur. Vite, dis si je dois te rejoindre. À toi toute la vie. »
« Verlaine, mai 1872
Cher Rimbe bien gentil, je t’accuse réception du crédit sollicité et accordé, avec mille grâces, et (je suis follement heureux d’en être presque sûr) sans remise cette fois. Donc à samedi, vers 7 heures toujours n’est-ce pas ? D’ailleurs, avoir marge, et moi envoyer sous en temps opportun.
En attendant, toutes lettres martyriques chez ma mère, toutes lettres touchant les revoir, prudences, etc... chez M. L. Forain, 17, quai d’Anjou, Hôtel Lauzun, Paris, Seine (pr M. P Verlaine).
Demain, j’espère pouvoir te dire qu’enfin j’ai l’Emploi (secrétaire d’assurances).
Pas vu Gavroche hier bien que rendez-vous. Je t’écris ceci au Cluny (3 heures), en l’attendant. Nous manigançons contre quelqu’un que tu sauras de badines vinginces. Dès ton retour, pour peu que ça puisse t’amuser, auront lieu des choses tigresques. Il s’agit d’un monsieur qui n’a pas été sans influence dans tes 3 mois d’Ardennes et mes 6 mois de merde. Tu verras, quoi. »
Colette Grégoire, dite Anna Gréki, est née le 14 mars 1931 à Batna région rurale continentale où ses parents étaient instituteurs, à 60 km de là, à Menéa, un petit village menant à l'oasis de Biskra. Son père est de gauche modéré, républicain, radical-socialiste. Ses parents sont volontaires pour aller enseigner dans les Aurès et son enfance sera éblouie par son amitié avec les Berbères des Aurès et ces paysages.
"... Aucune des maisons n'avait besoin de porte
Puisque les visages s'ouvraient dans les visages
Et les voisins épars simplement voisinaient
La nuit n'existait pas puisque l'on y dormait...
Mon enfance et les délices
Naquirent là
A Menaâ - commune mixte Arris
Et mes passions après vingt ans
Sont les fruits de leurs prédilections
Du temps où les oiseaux tombés des nids
Tombaient aussi des mains de Nedjaï
Jusqu'au fond de mes yeux chaouïa"
Un point important que Sorek fait remarquer dans son livre, c’est que Zayyad et le communisme sont indissociables. La vision de Zayyad était fermement enracinée dans la solidarité de classe, l’anticolonialisme et le cosmopolitisme. De plus, Zayyad n’hésitait pas à défendre ses points de vue, réprimandant même Gamal Abdel Nasser en 1959 – le dirigeant arabe le plus populaire de l’époque, et même à ce jour – d’avoir adopté une position anticommuniste. La foi inébranlable de Zayyad en l’idéologie marxiste modelait sa vision dans le sens d’une réconciliation juste des Palestiniens et des Israéliens et d’un optimisme constant à propos d’un partenariat commun entre Palestiniens et Juifs.
« Il cherchait des ponts vers les Israéliens juifs en raison de sa foi en une humanité partagée, en une affiliation de classe partagée. » (Sorek, p. 282).
Kateb Yacine n’a cessé d’écrire, amassant au fil de ses pérégrinations des documents, multipliant les rencontres, les expériences. Ici, vers 1965.- Photo publiée dans l'Humanité
Et la figure de Nedjma fera des apparitions récurrentes dans son œuvre, fantôme incarné qui franchit le temps et l’espace, toujours là avec, à ses côtés, Lakhdar et Mohamed.
En 1958, le metteur en scène et ami Jean-Marie Serreau monte le Cadavre encerclé, de Kateb. Cela fait quatre ans que l’Algérie est le théâtre d’une guerre sans nom. Les autorités françaises interdisent la pièce. Elle se jouera au Théâtre Molière, à Bruxelles, dans un climat de grande tension. Dans la distribution, Serreau, mais aussi José Valverde, Edwine Moatti, Paul Crauchet ou encore Antoine Vitez.
« Notre théâtre, confiait-il en 1975 à Colette Godard dans le Monde, est de combat. (…) Nous défendons, nous attaquons, c’est une forme d’action politique dans la ligne de la Révolution.(…) Nous ne faisons peut-être pas du théâtre, mais nous créons le débat idéologique sans lequel toute révolution n’est qu’un exercice militaire. » Kateb ne cède rien, ni aux sirènes de la gloire, ni au confort d’une reconnaissance réelle, ni au public qu’il bouscule dans ses retranchements : « Il faut le harceler, ne pas le laisser reprendre son souffle. Le vrai théâtre est un combat pour le public et contre lui », dira-t-il.
Son théâtre est aussi subversif par sa langue : indisciplinée, rugueuse, joyeuse. Le lire et le relire aujourd’hui est à la fois vertigineux et salutaire. Comme un Gatti, un Benedetto, ses écrits sont à redécouvrir. Il serait temps de retourner à ces création denses, d’oser les remettre sur le métier. À Paris, un square dans le 13e arrondissement porte son nom. À Grenoble, une bibliothèque. Le théâtre de Tizi Ouzou. C’est peu au regard de l’immensité de son talent, de son engagement. On ne connaît pas la date de naissance exacte de Kateb Yacine. On est sûr qu’il est mort le 28 octobre 1989. Laissant une œuvre inachevée qui respire encore…