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28 janvier 2021 4 28 /01 /janvier /2021 09:33

 

Il faut savoir, c’est ouvert ou fermé ? Une enquête du Parisien, ce samedi, indique que si vous voulez aller au restaurant, à Paris, pas de problème : il suffit d’être discret, de connaître les codes et d’avoir le bon profil social. L’enquêteur donne des exemples précis (mais pas les adresses) de brasseries huppées du 16e ou dans le 6e près « d’un tribunal ». Les devantures sont fermées mais l’entrée sur cour ouverte. Dans un établissement, « les clients sont des politiciens et des hommes d’affaires qui passent par une conciergerie de luxe ». Un autre « accueille sa clientèle traditionnelle : des policiers et magistrats ! Ici juste un rideau tiré permet d’être invisible. » Dans une troisième adresse, voici « un financier venu avec cinq de ses collègues ». Pas de masques, pas de distances, et on fume, pour le fun. En conclusion, le reportage note « que les policiers n’ont pas fait la traque des restaurants clandestins une priorité : « On n’a aucune consigne », avance un commissaire. » On l’avait compris, leur priorité, ce serait plutôt de profiter des bonnes tables.

Gérard Streiff

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28 janvier 2021 4 28 /01 /janvier /2021 09:23

 

Avec les vaches de race charolaise, limousine, blonde d’Aquitaine, salers, Aubrac, rouge des prés et quelques autres, les éleveurs français disposent d’une sélection génétique incomparable dans l’Union européenne. Mais, depuis quelques années, tirer un revenu décent de ce type d’élevage devient difficile. Le prix de vente des bovins de boucherie reste bas. Des étés de plus en plus chauds et secs sont devenus des facteurs aggravants faisant croître les coûts de production et favorisant le stress chez les animaux.

Par Gérard Le Puill

 

Selon l’Institut de l’élevage, la production de viande bovine a baissé en France de 1 % durant l’année 2020. Cette baisse serait imputable à une « décapitalisation » qui consiste à vendre plus d’animaux que souhaité quand on manque de trésorerie. Car on assiste à une augmentation des coûts de productions imputable aux sécheresses de 2019 et 2020. Selon les éleveurs du Massif Central affiliés à la FNSEA, la priorité est d’obtenir des « prix couvrant les coûts de production » au moment de vendre les animaux de boucherie, ce qui n’est pas toujours le cas. Les difficultés sont encore plus grandes sur le marché des « broutards », ces jeunes bovins vendus au moment du sevrage pour être engraissés en Italie notamment. Sur le marché intérieur, les baisses de prix résultent surtout des importations de viandes issues des vaches laitières de réforme dont usent et abusent les distributeurs pour leurs promotions à prix cassés.

Dans la filière allaitante, le prix du kilo de carcasse des jeunes bovins engraissé en France pour la boucherie a toujours été inférieur à 3,70 € entre le mois d’août et le mois de décembre 2020 alors qu’il se situait entre 3,85 et 3,95 € au cours des mêmes mois en 2019. De même, les jeunes bovins maigres, ces « broutards » dont la France exporte plus de 800 000 têtes par an au moment du sevrage pour être engraissés dans d’autres pays, se sont vendus 5 à 10 % moins cher en 2020 qu’en 2019. Le prix du kilo vif était tombé 2,41 € en décembre. Il était de 2,43 € le 18 janvier dernier à Mauriac.

200 000 vaches de moins en deux ans

Alors que de nombre de vaches allaitantes dépassaient les 4 millions de têtes en 2015, 2016 et 2017, il est tombé à 3, 9 millions en 2019 et à 3,8 millions en 2020. En Europe, la France possède, et de loin, le plus gros troupeau de vaches allaitantes issues de prestigieuses races à viande. L’augmentation des effectifs a été favorisée sur plusieurs décennies par la Prime annuelle au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA) versée par l’Union européenne pour chaque mère qui fait naître un veau par an. Cela a permis de préserver l’élevage à l’herbe sur des terres peu favorables aux cultures céréalières.

Mais, en viande bovine, les marchés des pays tiers sont difficiles à conquérir, à commencer par celui de la Chine, qui fait jouer la concurrence internationale. Ces pays tiers n’ont acheté que 33 400 broutards en France sur les sept premiers mois de l’année 2020, dont 26.500 pour l’Algérie, soit un repli de 23 % sur 2019. Ajoutons que ces longs transports d’animaux vivants ne sont pas ce qui se fait de mieux en matière de bien-être animal.

Inquiétudes sur les conséquences du réchauffement climatique

La PMTVA est indispensable pour le maintien du troupeau allaitant, comme pour l’élevage à l’herbe permettant de stocker du carbone. Il serait possible et souhaitable d’en augmenter le montant par tête. Mais peut-être conviendrait-il, en même temps, de faire croître la superficie par vache sur chaque exploitation dans le cadre de la prochaine réforme de la Politique agricole commune. Cela permettrait de rendre les exploitations plus autonomes en fourrages avec un moindre chargement d’animaux à l’hectare. Car, depuis quelques mois, nous assistons aussi à une hausse de plus de 20 % des prix des céréales fourragères et des tourteaux de soja utilisés pour engraisser le bétail.

Avec le réchauffement climatique, le plus dur est peut-être à venir pour la filière française des bovins à viande. Dans l’hebdomadaire « La France Agricole » du 20 novembre 2020, un dossier était consacré à l’adaptation de cet élevage au changement climatique. L’étude indiquait que « les rendements fourragers sont attendus en forte baisse » dans les prochaines décennies. Parallèlement, « les trois dernières années de sécheresse ont également fait mûrir la réflexion des organismes de sélection quand aux orientations de leurs races respectives ». En Bourgogne prédomine la race charolaise tandis que la limousine, la salers et la blonde d’Aquitaine occupent plutôt les zones situées au sud de la Loire.

Les études concluaient que le stress des animaux ira croissant au fil des ans sur des périodes allant du milieu du printemps au milieu de l’automne. Trois graphiques figuraient côte à côte dans ce dossier, à partir d’une étude réalisée par le modèle de prédiction « Adalin RCP » dans le nord-ouest de la Saône et Loire. Le premier était consacré aux années comprises en 1986 et 2015. Sur les 100 jours les plus chauds de ces années, l’étude pointait une moyenne de 30 jours de « stress léger » dans les troupeaux de bovins sous l’effet de la chaleur. Il y avait autant de jours avec un « stress modéré ». S’y ajoutaient 20 jours de « stress marqué », dans les périodes de forte canicule. Les prévisions portant sur les années qui vont de 2030 à 2060, faisaient croître sensiblement le nombre de jours en « stress marqué » et en « stress modéré » tandis que reculait parallèlement le nombre de jours en « stress léger ». Entre 2070 et 2100 on atteignait une moyenne globale de plus de 50 jours de « stress marqué » sur 100.

La grotesque leçon d’économie du président Macron en 2019

Alors que la situation des éleveurs est difficile, la Commission européenne est mandatée par les pays membres de l’Union européenne, dont la France, pour négocier et signer des accords de libre-échange avec l’Australie et la Nouvelle Zélande, deux pays qui veulent aussi vendre plus de viande bovine en Europe. Ceci après d’autres accords déjà signés avec le Canada et les pays du Mercosur dont le Brésil et l’Argentine. Nous savons aussi que les exportations accrues de produits agricoles par les pays de Mercosur sont responsables des incendies et de la déforestation qui fait croître le réchauffement global de la planète.

Enfin, après avoir montré la complexité des problèmes actuels et à venir de la filière des bovins à viande en France, reproduisons, tels que publiés par l’hebdomadaire « l’Express » en novembre dernier, les propos tenus par le président Macron devant ces éleveurs lors d’un repas pris en commun sur le Salon de l’Agriculture en février 2019. Ce jour-là, après avoir fait la leçon aux éleveurs de porcs, le président de la République s’adressait aux éleveurs de bovins allaitants en ces termes : « Je vous ai ouvert les portes de la Chine et vous n’avez exporté que quelques tonnes. En France, les gens veulent du steak haché au restaurant, le charolais ne les intéresse pas. Donc bougez-vous ».

Cette fois encore, le parler « cash » de l’actuel président de la République le conduisait à faire étalage de son incompétence sur un dossier qu’il connaît mal. Ce faisant, il affichait aussi son mépris pour ceux et celles qui travaillent dur pour nourrir leurs semblables, sans en tirer un revenu leur permettant d’en vivre décemment.

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28 janvier 2021 4 28 /01 /janvier /2021 09:20

 

« Quoi qu’il en coûte » : sous prétexte de conjurer l’effondrement économique qui menaçait avant la pandémie, et que celle-ci a précipité, des masses énormes d’argent sont mobilisées.

En France, la récession et les dépenses supplémentaires entraînées par le chômage partiel et par le soutien aux entreprises ont creusé le déficit public de près de 200 milliards en 2020.

 

 

Tout cela n’est possible que parce que les banques centrales inondent les banques et les marchés financiers d’argent gratuit, voire subventionné (la BCE pratique un taux négatif, -1 %, pour ses prêts aux banques de la zone euro qui financent les entreprises et les ménages). Mais cet argent (1 650 milliards d’euros d’achats de titres et jusqu’à 3 000 milliards de prêts aux banques) n’est pas utilisé pour développer les services publics, ni pour protéger les salariés contre le tsunami du chômage. Banques et détenteurs de portefeuilles financiers s’en servent avec un seul mot d’ordre, celui qui inspire aussi la politique du gouvernement français : redevenez rentables !

Mais c’est précisément de là que vient la crise : de la dévitalisation des systèmes de santé et de tous les services publics au nom de l’austérité budgétaire, des pressions sur les salaires au nom de la baisse du coût du travail qui affaiblissent structurellement la demande, de l’insuffisance des dépenses de formation et de recherche qui conduisent à une mise en œuvre perverse et inefficace des nouvelles technologies… Ce sont là les dégâts de la domination du capital.

Ce n’est donc pas le retour à la rentabilité du capital qu’il faut privilégier, tout au contraire ! Ce sont les capacités de tous les êtres humains à se développer, à créer des richesses, à coopérer en partageant la production et l’usage de ces biens communs que sont le climat, la biodiversité, la qualité de l’air, de l’eau… Préparer l’avenir, ce n’est pas mettre les salariés au chômage, c’est sécuriser la situation et les revenus de toutes et tous, et développer massivement la formation, moyen d’une libre participation de chacune et chacun à la construction d’une économie émancipée du capital et de sa prédation sur la nature et sur les êtres humains.

Cela demande donc une tout autre utilisation de l’argent public, des profits des entreprises et de l’argent des banques.

Les grands groupes de l’industrie et des services, les compagnies d’assurances doivent assumer leur responsabilité sociale et écologique en faveur des salariés et des sous-traitants. Ils doivent contribuer au financement d’un plan d’urgence pour les services publics. Il faut pour cela que les salariés et leurs représentants disposent de nouveaux pouvoirs de proposition et d’intervention sur l’utilisation de l’argent dans les entreprises. Il faut aussi que l’administration fiscale retrouve les moyens de contrôler les stratégies fiscales des grands groupes et de combattre l’évasion fiscale.

Appuyées sur la masse énorme des dépôts de tous les citoyens, et sur celle des refinancements de l’Eurosystème (la Banque centrale européenne et les 19 banques centrales nationales de la zone euro), les banques doivent réserver leurs crédits aux projets répondant à des critères précis en matière économique (création de valeur ajoutée dans les territoires), sociale (emploi, salaires, formation), écologique. Elles doivent financer un programme de prêts à taux massivement réduits aux TPE-PME qui s’engagent à préserver l’emploi et les salaires de leurs salariés.

L’Eurosystème doit cesser d’injecter aveuglément des centaines de milliards d’euros sur les marchés financiers par ses achats de titres (quantitative easing). La monnaie qu’il crée massivement doit aller à un fonds européen de développement des services publics, finançant des projets démocratiquement élaborés, décidés, réalisés, contrôlés dans les différents pays de l’UE. Tout de suite, cet argent peut être prêté, en France, à la Caisse des dépôts et consignations et à BPI France pour alimenter un fonds d’urgence sanitaire et de sécurisation pour le soutien aux TPE-PME (garanties et bonifications d’intérêts) et pour le développement des services publics (santé, éducation, recherche, transports, énergie, sécurité, justice…).

Voilà autant de missions nouvelles pour toutes les institutions financières : elles rendent encore plus nécessaire la sécurisation de l’emploi et de la formation pour celles et ceux qui y travaillent, au lieu des annonces de suppressions d’emplois qui pleuvent sur les salariés des banques, et des politiques d’austérité qui mettent dans le collimateur les agents des administrations économiques et financières.

Nous appelons les compagnies d’assurance, les banques publiques, mutualistes et privées, la Caisse des dépôts, la Banque de France, les administrations du ministère de l’Économie et des Finances à jouer un rôle nouveau dans cette bataille de civilisation. Nombre de leurs salariés sont disponibles pour aider à la construction des rapports de forces, dans les luttes et dans les rassemblements politiques, en faveur de ces propositions.

Nous demandons qu’elles soient mises à l’ordre du jour de conférences locales, régionales et nationale pour l’emploi, la formation et la transformation productive et écologique. Ces conférences réuniraient des représentants des salariés – y compris du secteur bancaire et financier, des entreprises et des institutions financières – les administrations économiques, les élus. Elles adopteraient des objectifs chiffrés et contrôlables de créations d’emplois, de programmes de formation, de recherche. Elles concrétiseraient la mobilisation de toute la société contre la domination du capital et pour une nouvelle logique économique, sociale et écologique ayant en son cœur la sécurisation de l’emploi et de la formation.

 

Jacques Atlan, Frédéric Boccara, Christian Cordellier, Jean-Louis Corvaisier, Yves Dimicoli, Yvan Donnat, Denis Durand, Jean-Marc Durand, Pascaline Fourgoux, Pascal Gabay, Benoît Garcia, Alain Guichard, Stéphane Guyard, Hervé Hannoteaux, Jean-Paul Krief, Nasser Mansouri-Guilani, Dominique Micat, Marie-France Nardot, Martine Rolland, Philippe Roquencourt, Fabienne Rouchy, Patricia Tejas.

 

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28 janvier 2021 4 28 /01 /janvier /2021 09:16

 

L’épidémie de Covid-19 a révélé au grand jour ce qui n’était que méconnu : le délabrement du service public hospitalier, de tout le service de santé même. Plus largement, elle a aussi mis en relief les conséquences redoutables du capitalisme dans tous les aspects de cette crise sanitaire majeure.

*Michèle Leflon est docteure en médecine

DES MOBILISATIONS CONTRE LA CASSE DES HÔPITAUX

On le voit, des pays à système économique différent de celui que nous subissons ont mieux réussi à passer cette épreuve : Cuba, Chine, Vietnam… L’état du service public hospitalier, soumis depuis des décennies à des mesures de mise en concurrence avec le privé et de réductions des dépenses, un phénomène accentué depuis la loi Bachelot de 2009, est devenu suffisamment critique pour que le peuple réagisse. Les mobilisations ont été massives, comme la manifestation du 14 novembre 2019, voyant l’entrée dans la lutte de médecins et universitaires traditionnellement peu enclins à l’action revendicative. La catastrophe sanitaire en lien avec la première vague de Covid a été limitée, uniquement parce que les personnels hospitaliers se sont organisés, en dépit de leur administration, désemparée. Et il s’agit là d’une leçon de l’épidémie : l’organisation du travail par les salariés eux-mêmes est la plus efficace.

 

La question des masques à elle seule pose plusieurs problématiques : la question de l’imprévoyance de l’État. La catastrophe sanitaire en lien avec la première vague de Covid a été limitée, uniquement parce que les personnels hospitaliers se sont organisés, en dépit de leur administration, désemparée.

Le gouvernement, lui, n’a pas compris la leçon, puisque le projet de loi sur la prolongation de l’état d’urgence sanitaire l’autorise à prendre une ordonnance pour que les établissements hospitaliers puissent déroger aux règles s’agissant notamment de leurs assemblées délibérantes, exécutifs ou instances représentatives du personnel. Le manque de moyens de l’hôpital public, des EHPAD tout autant, est tellement voyant que le gouvernement a dû organiser sa grand-messe du Ségur de la santé (dont le seul résultat concret a été de bien maigres augmentations de salaires) et communiquer autour de la création d’une cinquième branche de la Sécurité sociale, pour la perte d’autonomie – une décision d’autant plus déplorable qu’il faudrait surtout des moyens nouveaux dans le cadre de l’assurance maladie, seule capable d’assurer une prise en charge globale de la perte d’autonomie. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021 continue dans le pur effet de communication, sans moyens concrets, en transférant à la Caisse nationale de la santé et de l’autonomie (CNSA), chargée de la gestion de cette cinquième branche,des moyens nouveaux, pris à l’Assurance maladie, mais aussi des charges nouvelles, tout en préparant ainsi le démantèlement de la Sécurité sociale.

UN RÉVÉLATEUR DES EFFETS DU CAPITALISME GLOBALISÉ

C’est plus globalement que la Covid a révélé l’état désastreux du système de santé, que ce soit la prévention, les soins primaires, la fourniture de médicaments et dispositifs médicaux ou la recherche. L’absence de masques au début de l’épidémie, par non-renouvellement au titre des économies, est connue de tous, de même que les pénuries médicamenteuses, le manque de matériel de protection ou de respirateurs.

La question des masques à elle seule pose plusieurs problématiques : la question de l’imprévoyance de l’État, la question de l’arrêt de la fabrication en France pour se tourner vers des marchés chinois et aussi celle de la duplicité des actions et discours gouvernementaux. Il y a eu les longues hésitations sur les recommandations de masques « tout public ». Il y a eu incapacité ou non-volonté pour ne pas avouer le faible niveau des réserves, à utiliser rapidement les 117 millions de masques en réserve.À lire les déclarations de Jérôme Salomon, directeur général de la Santé, et de Christophe Lannelongue, directeur de l’ARS Grand Est au début de l’épidémie, à la mission d’information de l’Assemblée nationale sur la gestion de l’épidémie, on ne comprend pas comment la demande de l’ARS Grand-Est de livraison de 5 millions de masques (moins d’un vingtième des réserves totales! ) n’ait pas pu être honorée. Mais le résultat est là, avec de multiples contaminations de soignants contribuant à la diffusion de l’épidémie. Comme l’État, certaines directions d’hôpitaux ont généré elles-mêmes des pénuries en rationnant les personnels, pour garder leurs stocks. Les masques sont aussi emblématiques d’une politique de prévention ne faisant pas appel à l’intelligence populaire, au civisme, lui préférant la contrainte. La différence entre les masques FFP2 qui protègent ceux qui le portent et les autres dont le seul but est d’éviter de contaminer d’autres personnes a disparu des médias. Le masque chirurgical est pourtant conçu, par définition, non pour protéger le soignant, mais pour éviter la contamination de la plaie opératoire.

En jouant de la contravention, de l’interdiction plus que de l’éducation pour développer le civisme, le gouvernement est contre-productif : on a vu la foule se presser dans les grandes surfaces ou les cafés la veille du second confinement. Tout ce qui n’est pas interdit serait bon ! Peut-être conscient de leurs immenses fragilités, le gouvernement ne s’est pas appuyé sur les soins de ville, sur tous ces professionnels au contact de la population… à moins que ce ne soit pure incompétence ministérielle. Les retards à leur fournir des masques ont été majeurs : nos dirigeants en ont profité pour tenter de mettre en œuvre leur politique de développement de la téléconsultation, certes utile dans certains cas, mais contribuant, en dehors de tout accompagnement, à l’aggravation des inégalités de prise en charge. Dans certains territoires, les professionnels se sont organisés,comme le témoignage cité à l’atelier du soin, organisé en septembre par de nombreuses organisations : en Haute-Vienne, avec l’aide des élus locaux, ils ont créé un centre de dépistage pour patients présentant les symptômes de la Covid. L’ARS n’est intervenue que tardivement, pour réclamer le nom d’un responsable. Là aussi, on le voit, seule une organisation démocratique du travail en commun est efficace. L’état des soins primaires est connu : manque de médecins généralistes dans la plupart des territoires, avec une très inégale répartition, ne laissant pas le temps au nécessaire travail en réseau avec les autres professionnels de santé et du social, d’autant que le statut libéral est antagonique du travail collectif.

La création par Marisol Touraine de communautés professionnelles de territoires (CPTS) est une bonne idée,et d’ailleurs les centres de santé y participent, mais elles ne fonctionnent que là où les professionnels eux-mêmes s’y impliquent fortement sans injonctions contradictoires. Elles ne sauraient remplacer un vrai service public de soins primaires autour des centres de santé.

Manque de services publics, casse de l’industrie : la crise sanitaire a révélé au grand jour un fait certain :les délocalisations appauvrissent notre pays. Le manque de médicaments, d’équipements de protection,de respirateurs a traduit concrètement les conséquences des politiques de recherche du profit avant tout. L’incapacité à restaurer rapidement les capacités de production dans notre pays témoigne de la perte d’expérience collective : un appauvrissement et matériel et intellectuel..

LA RECHERCHE, ELLE AUSSI FRAGILISÉE PAR LE SYSTÈME

Des chercheurs avaient alerté en2015 sur la nécessité de poursuivre les recherches sur les coronavirus. Mais dans notre pays capitaliste mieux vaut dépenser 6 milliards en crédit d’impôt recherche sans contrôle que de financer de la recherche publique. Après l’épidémie de SRAS en 2003, l’Union européenne avait lancé des programmes de recherche sur les coronavirus, mais dès 2006 l’intérêt était tombé. Le choix fait de favoriser la recherche privée et la rentabilité immédiate se confirme malheureusement dans le projet de loi de programmation de la recherche. Ces choix, en oubliant la recherche fondamentale, en oubliant ce qui ne conduit pas à des innovations rentables, ont des conséquences dramatiques pour la santé. N’oublions pas le peu de recherche sur le paludisme ou la dengue. Ils ont aussi des conséquences idéologiques redoutables. Comment savoir si l’intérêt des profits des laboratoires pharmaceutiques ne prime pas sur la sécurité des médicaments? Le scandale du Mediator a marqué les esprits. Tout cela conduit une bonne partie de la population à une mise en cause globale des scientifiques, de la science même, la rendant sensible aux thèses complotistes.

L’absence complète de démocratie d’instances comme la Haute Autorité de santé (HAS), dont la direction – nommée majoritairement par le président de la République et le gouvernement – décide des experts retenus, contribue à ces remises en cause, tout comme le contrôle de la plupart des grands médias par le capital financier. Cela aboutit à des polémiques comme celle sur la chloroquine. Des recherches en laboratoire avaient démontré l’intérêt de cette molécule. Mais, comme contre la dengue où elle a été essayée aussi, elle est inefficace en clinique. L’abondance des polémiques n’a pas facilité les études scientifiques, à tel point qu’il vaut sans doute mieux se référer à celles menées en Chine, dans un contexte différent de l’Occident. Ainsi, c’est non seulement par la casse du système public, en particulier de santé, du tissu industriel que le capitalisme pèse sur cette épidémie, mais c’est aussi idéologiquement. Et d’ailleurs, le mauvais état du service hospitalier a fait oublier que le mieux était de ne pas être malade : il ne s’agit pas de régler la densité de nos interrelations sociales sur le pourcentage d’occupations des lits de réanimation mais bien d’inventer une forme de distanciation physique (et non sociale) évitant les contaminations, de développer une campagne massive et efficace de tests, permettant l’isolement des seuls contaminés,en attendant le vaccin ou l’éradication spontanée de la maladie.

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28 janvier 2021 4 28 /01 /janvier /2021 09:14

Le kilo de carcasse de porc n’est payé que 1,20 € aux éleveurs depuis l’automne 2020 et ce prix ne couvre pas les coûts de production. Néanmoins, les promotions des grandes surfaces proposent en ce début d’année des prix de braderie à 1,48 € pour le kilo de côtes de porc et 1,43 € le kilo de rouelle, une pièce à rôtir taillée dans le jambon frais. Ces braderies prouvent que la loi Egalim promise par Emmanuel Macron pour tenir compte des coûts de production et votée en 2018 par sa majorité parlementaire n’a rien apporté aux éleveurs.

Par Gérard Le Puill

 

Dans un communiqué diffusé le 14 janvier dernier, la Fédération nationale porcine (FNP), affiliée à la FNSEA, appelait les consommateurs à « relancer la consommation de porc français pour éviter l’engorgement des élevages ». Elle se disait favorable aux « promos pour déjouer la concurrence et attirer les clients ». Puis elle ajoutait dans ce même texte : « pas à des prix si bas qui ne veulent plus rien dire ! Non à la course permanente au moins disant dans tous les domaines. Non au manque de respect du travail des éleveurs et de leurs partenaires ! ». Dans ce même communiqué, la FNP protestait contre le fait que le prix du kilo de côtes de porc était affiché à 1,48 € dans de nombreux magasins lors des promotions au début de ce mois de janvier.

Ces prix proposés aux consommateurs pour de la vente en découpe sont à peine plus élevés que le celui du kilo de carcasse payé aux éleveurs, lequel cote 1,20 € en moyenne depuis l’automne dernier sur le marché au cadran de Plérin dans les Côtes d’Armor. Ce prix ne couvre pas les coûts de production. Mais l’appel de la FNP n’a pas été entendu par la chaîne des magasins Leclerc. Cette dernière vient de faire distribuer dans les boîtes aux lettres des habitants d’Ile-de-France un dépliant publicitaire dans lesquels elle propose de la rouelle de porc une belle pièce à rôtir à seulement 1,43 € le kilo du 26 au 30 janvier.

Quand les promos favorisent les achats opportunistes

Les récriminations de la FNP contre les prix bradés en grande surface figuraient dans le bulletin hebdomadaire de « Culture viande » publié par « les entreprises françaises des viandes » le 15 janvier. Il nous informait, qu’en France, « les opérations de promotion à bas prix des GMS (grandes et moyennes surfaces, ndlr) ont dopé les ventes. Les abattages du Grand Ouest ont totalisé 414 000 porcs, soit le plus haut niveau depuis dix ans. Dans le même temps, les activités à l’exportation notamment vers la Chine se maintiennent. Toutefois, les prix demeurent stables (à 1,20 € le kilo de carcasse, ndlr) dans un marché redevenu lourd, maintenant que les congélateurs des consommateurs sont pleins ».

C’est une manière de reconnaître que les promotions favorisent des achats opportunistes pour la congélation afin de faire des économies, ce qui n’est guère possible pour les petits budgets. Dans un pays ou la consommation de viande porcine, charcuterie comprise, s’élève à 33 kg par an et par habitant en moyenne, pousser à consommer plus n’est pas la meilleure façon de réduire le bilan carbone de notre assiette. Surtout quand les tourteaux de soja importés d’Amérique du sud pour nourrir les cochons européens accélèrent la déforestation en Amazonie, comme l’a montré un documentaire diffusé dimanche soir sur France 5.

En janvier 2020, le porc breton cotait 1,69 € le kilo sur le marché au cadran de Plérin. Ce prix rémunérateur était alors tiré par les importations de la Chine qui manquait de viande porcine, suite aux abattages massifs dans ce pays pour éradiquer la peste porcine africaine. En Europe, son principal fournisseur était l’Allemagne. Mais, ces derniers mois, de nombreux sangliers sont morts de la peste porcine africaine sur le territoire allemand. Du coup, bien que pas un seul élevage porcin ne soit atteint par cette pandémie outre Rhin, la Chine a stoppé toute importation de viande porcine en provenance d’Allemagne par simple précaution sanitaire. Elle a, parallèlement, augmenté ses achats en provenance d’Amérique du nord et du sud. Conséquence, le surplus de viande porcine allemande doit être écoulé sur le marché européen. Le volume de l’offre étant plus élevé que la demande en dépit des promotions, le prix du porc au départ de la ferme a chuté de 30 % en moins d’un an dans notre pays.

Une hausse sensible et durable des coûts de production

Cette chute des cours se prolonge alors que les prix des aliments du bétail sont en hausse sensible depuis le début de l’automne 2020. Alors qu’elle se vendait moins de 170 € en octobre 2020, la tonne de maïs cotait 215 € le 18 janvier au marché de Creil. Entre ces deux dates, le prix de la tonne d’orge est également passé de 160 à 219 €. Entre juillet 2 020 et janvier 2021, le prix de la tonne de tourteaux de soja importés d’Amérique du nord et du sud et rendue dans les ports de Lorient ou de Montoir est passé de 320 à 450 €.

À FranceAgriMer, la réunion mensuelle du « Conseil spécialisé Grandes cultures marché spécialisé » qui s’est tenu à Montreuil le 13 janvier faisait état d’exportations en hausse vers les pays tiers pour le blé, pour l’orge et pour le maïs produits en France. « Au total, le stock de maïs français de fin de campagne, se tiendrait à moins de 1,9 million de tonnes, niveau historiquement bas », lisait-on dans le compte rendu de cette réunion. Marc Zribi, chef de l’unité Grain et sucre de FranceAgriMer, explique que la hausse des cours mondiaux du maïs est partie du continent américain de la manière suivante :

« Ainsi, le rapport USDA prévoit une production de 360 millions de tonnes aux États-Unis, une estimation en baisse de 8 millions de tonnes par rapport au mois dernier, et des exportations en baisse de 3 millions de tonnes à 65 millions de tonnes. L’Argentine et le Brésil devraient aussi connaître des baisses de productions. Or, dans le même temps, les importations de la Chine sont attendues en forte hausse à 17 millions de tonnes contre 16 millions de tonnes en décembre. Finalement, le bilan de l’offre et d’a demande se tend au niveau mondial ».

Et que devient la promesse d’Emmanuel Macron ?

Un pays comme la France pourrait produire moins de céréales pour l’exportation et cultiver davantage de protéines végétales comme le soja, le pois et la féverole pour nourrir le bétail. Moins dépendre des importations de soja an apporterait plus de stabilité dans le prix des aliments du bétail. D’autant plus que l’actuel président de la République avait fait la promesse suivante aux paysans lors de son discours du 11 octobre 2017 à Rungis : « Nous modifierons la loi pour inverser cette construction du prix qui doit pouvoir partir des coûts de production (…) et je souhaite que les négociations commerciales qui commencent dès novembre puissent refléter l’état d’esprit de la loi à venir et faire l’objet d’un engagement de toutes les parties à ces négociations sous l’autorité des ministres ».

Près de 40 mois ont passé depuis et la loi EGALIM qu’il promettait aux paysans fut votée en octobre 2 018. Mais, cette année, évoquant la négociation en cours entre les enseignes de la distribution et leurs fournisseurs de produits transformés appelés à être référencés pour 12 mois à partir de mois de mars dans les linéaires des magasins, Christiane Lambert, présidente de la FNSEA et éleveuse de porcs dans le Maine et Loire, révélait récemment que les distributeurs « veulent des rabais moyens de 4 % sur le prix d’entrée en magasin », quelle que soit l’évolution des coûts de production chez leurs fournisseurs.

Encore une promesse non tenue du président Macron.

 

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27 janvier 2021 3 27 /01 /janvier /2021 19:20
120e anniversaire la naissance d'Ambroise Croizat : La France a besoin d'un projet nourri de l'ambition du ministre des travailleurs (PCF)
120e anniversaire la naissance d'Ambroise Croizat : La France a besoin
d'un projet nourri de l'ambition du « ministre des travailleurs » (PCF)
 
 
« Jamais nous ne tolérerons que ne soit renié un seul des avantages de
la Sécurité sociale. Nous défendrons à en mourir et avec la dernière
énergie, cette loi humaine et de progrès ».
C'est cet engagement d'Ambroise Croizat, dont nous célébrons le 120e
anniversaire de sa naissance ce 28 janvier, que les communistes, avec de
nombreux syndicalistes, font vivre dans toutes les luttes des
salarié·e·s et des retraité·e·s face aux attaques portées contre notre
modèle social, par les puissances de l'argent et les gouvernements
successifs.
 
Mises en cause des droit des salarié·e·s, des droits de leurs
représentants syndicaux, contre-réformes des retraites... les
gouvernements successifs, soucieux de nourrir les appétits de la
finance, n'ont eu de cesse de s'attaquer à l'édifice bâti par le
ministre communiste.
Et alors que la campagne de vaccination balbutie et n'offre encore
aucune perspective de sortie de la pandémie, l'exécutif et sa majorité
parlementaire dessinent déjà les projets de régression qu'ils comptent
imposer au monde du travail et de la création, comme pour préparer les
consciences au pire. 
 
« Il faudra payer », tel est désormais le credo de ceux qui ont fait de
la pandémie une crise sanitaire, parce qu'ils ont, depuis des années,
affaibli l'hôpital public et perverti le financement de la Sécurité
sociale par l'austérité budgétaire, au profit du grand patronat. 
Ils veulent désormais profiter de la crise économique pour reprendre au
plus vite leur entreprise de démolition des fondements de notre modèle
social. Avec des conséquences lourdes pour le monde du travail : moins
de protection sociale, une retraite précaire et plus tardive, un
allongement de la durée du temps de travail, la précarité des contrats. 
 
Il faut aujourd'hui choisir : soit continuer à préserver le capital, les
marchés financiers et les grandes fortunes, qui nous ont mené à cette
crise inédite, soit s'engager résolument dans la réponse aux besoins de
sécurisation de la santé, de l'emploi, de la formation, du système des
retraites pour chacune et chacun. 
 
Ce choix, Ambroise Croizat l'a fait au sortir de la tragédie de la
Seconde Guerre mondiale en construisant un édifice jusqu'à lors inconnu
et a ainsi permis à notre pays de prospérer.
Aujourd'hui, pour sortir d'une crise inédite depuis 1945, le PCF appelle
à être à la hauteur de cet héritage. Il propose d'engager notre pays
dans la voie d'un nouvel âge de la Sécurité sociale et de poursuivre
ainsi l'oeuvre du Conseil national de la Résistance et d'Ambroise
Croizat. Ce sera le sens de toute son action dans les prochains mois,
dans les luttes avec les salarié·e·s comme dans les institutions.
 
 
Parti communiste français,
 
Paris, le 27 janvier 2021.
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27 janvier 2021 3 27 /01 /janvier /2021 13:33

Fabien Roussel invité de la matinale de Public Sénat, mardi 26 janvier

 

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27 janvier 2021 3 27 /01 /janvier /2021 13:25
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27 janvier 2021 3 27 /01 /janvier /2021 13:22

 

Dans un rapport publié ce lundi, Oxfam révèle que les grandes fortunes mondiales ont gagné 479 milliards d’euros à la faveur de la pandémie. Alors que des centaines de millions de personnes basculaient dans la misère.

Plusieurs études, cet automne, l’avaient déjà souligné, Oxfam enfonce le clou avec son dernier rapport : la crise sanitaire du Covid-19 a bel et bien profité aux multimilliardaires. « Les dix hommes les plus riches du monde – dont fait partie le Français Bernard Arnault – ont vu leur fortune totale augmenter de 540 milliards de dollars (479 milliards d’euros) depuis le début de la pandémie », pointe l’organisation internationale, qui lutte pour la réduction des inégalités. Dans le même temps, « entre 200 millions et 500 millions de personnes supplémentaires pourraient avoir basculé dans la pauvreté en 2020 », estime l’étude, précisant qu’il faudra « plus d’une décennie avant que le taux de pauvreté ne retrouve son niveau d’avant la crise ».

« Le soutien des banques centrales ont eu un effet de levier »

Un décalage d’autant plus impressionnant que les 1 000 plus grandes fortunes avaient, dans un premier temps, subi 30 % de pertes entre février et mars 2020. Un décrochage de courte durée puisque, neuf mois après, ces milliardaires avaient déjà reconstitué leur patrimoine d’avant la crise, avant de voir leur magot s’étoffer ces derniers mois. Pour Oxfam, ce phénomène s’explique notamment par le « soutien sans précédent des gouvernements pour leur économie ». « Mais c’est principalement le soutien des banques centrales – avec leur politique de rachats d’actions massifs pour éviter que les cours ne dévissent – qui ont eu un effet de levier », précise Quentin Parrinello, porte-parole d’Oxfam France.

Parmi ces ultrariches, certains ont directement profité de la crise sanitaire. C’est le cas de Jeff Bezos, PDG d’Amazon, qui a vu sa fortune augmenter de 69,3 milliards d’euros au cours de l’année 2020 à la faveur des confinements et des fermetures de commerces. L’extravagant milliardaire de la tech et dirigeant de Tesla, Elon Musk, a engrangé une hausse de 114,3 miliards d’euros. Moins connu que son compatriote Jack Ma mais plus riche que celui-ci, le milliardaire chinois Zhong Shanshan a connu une ascension fulgurante parmi les plus riches de la planète (+ 67,9 milliards d’euros). Pour cause : l’une de ses entreprises, Beijing Wantai, produit des tests Covid et développe un vaccin contre le virus. À l’autre extrémité, les centaines de millions de personnes qui auraient basculé dans la pauvreté (moins de 4,90 euros par jour) se situeraient pour plus des deux tiers en Asie du Sud, en Asie de l’Est et dans la région Pacifique. « La majorité travaillent dans les secteurs informels (activités hors de la législation). Elles sont exclues du régime de protection sociale, des programmes d’aide sociale et de l’accès au crédit », explique Oxfam.

Même à l’intérieur des nations les plus riches, les inégalités se sont accrues. « Alors que les milliardaires français ont connu la troisième progression la plus forte – 175 milliards d’euros, soit deux fois le budget de l’hôpital public –, on est passé de 5,5 millions de bénéficiaires de l’aide alimentaire à plus de 8 millions en septembre en France », affirme Quentin ­Parrinello. Notre champion national en la matière, le patron de LVMH, incarne parfaitement ce phénomène.

« Sur l’ensemble de l’année 2020, malgré la crise, la fortune de Bernard Arnault a augmenté de 44 milliards d’euros, soit un bond de 41 %. Après le pic de la crise, sa fortune a doublé entre mars et décembre », souligne Oxfam dans une note consacrée à la situation française. Dans le même temps, « le nombre d’allocataires du revenu de solidarité active a fortement augmenté depuis le début de la crise sanitaire (+ 150 000), pour atteindre 2,1 millions en octobre 2020, soit une augmentation de 8,5 % par rapport à octobre 2019 », rappelle ce document.

L’association avance une série de propositions pour tenter d’enrayer cette dynamique : « Investir massivement dans les services publics pour assurer les besoins de base ; revaloriser les minima sociaux et les bas salaires, à commencer par le secteur du soin ; faire en sorte que les plus riches et les grandes entreprises payent leur juste part d’impôts ; mettre en place des contreparties sociales et écologiques contraignantes pour les grandes entreprises. »

 

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26 janvier 2021 2 26 /01 /janvier /2021 08:37
Agent orange : récit d'un crime de guerre américain au Vietnam jugé 55 ans plus tard en France (Lina Sankari, L'Humanité, 25 janvier 2021)
Agent orange : récit d'un crime de guerre américain au Vietnam jugé 55 ans plus tard en France
Lundi 25 Janvier 2021

Le procès historique de Tran To Nga, ancienne résistante vietnamienne, contre 19 entreprises, dont Dow Chemical et Bayer-Monsanto, entre aujourd’hui dans une nouvelle phase au tribunal d’Évry, en région parisienne.

 

Que signifie la liberté quand le corps, des millions de corps sont prisonniers de maux incurables sur plusieurs générations ? Comment envisager la reconstruction individuelle et collective quand un poison aux molécules de taille infinitésimale se fraie un chemin partout ? Le sol, les sédiments, les nappes phréatiques, jusqu’à contaminer la chaîne alimentaire. C’est l’histoire du Vietnam qui, de laboratoire de guerre, s’est mué en petite officine de l’horreur à la faveur d’un des plus grands crimes de l’histoire de l’humanité.

Face à des combattants vietnamiens insaisissables, le président John Fitzgerald Kennedy, séduit par l’idée de s’appuyer sur « l’inventivité » américaine pour sortir de l’enlisement, lance l’opération Ranch Hand (Ouvrier agricole) afin de déloger la guérilla et affamer la population qui soutient la résistance. Réquisitionnées par le gouvernement états-unien, les entreprises chimiques utilisent un procédé de fabrication rapide qui génère la présence de dioxine dans le produit fini. Aucune n’ignore alors qu’un ou deux microgrammes par tonne peuvent provoquer des mutations génétiques. Pourtant, de 1961 à 1971, au moins 84 millions de litres de défoliant sont épandus.

 

L’histoire de Tran To Nga et de plusieurs millions de vietnamiens

C’est également l’histoire de Tran To Nga, « fille du Mékong, du colonialisme et de la guerre », ancienne résistante viêt-cong, meurtrie dans sa chair, dont le procès contre 19 firmes chimiques ayant produit ou commercialisé la dioxine TCDD entrera, aujourd’hui au tribunal judiciaire d’Évry, dans une nouvelle phase avec le début des plaidoiries, six ans après le début de la procédure. «C’est un procès unique, historique, politique et pédagogique », insiste Tran To Nga, qui a été exposée à deux reprises à l’Agent orange.

Icon Quote À chaque maladie, j’ai une anomalie, une résistance aux médicaments. Les spécialistes ne se l’expliquent pas.  Tran To Nga

En 1966, intriguée par l’avion qui survole sa cache, la combattante inexpérimentée sort. « Le C-123 vole à basse altitude. De ses entrailles s’échappe une sorte de nuage blanc qui fait tache dans le bleu du ciel. Je contemple comme on regarderait un vol d’oiseaux migrateurs sans bouger. Et, tout à coup, une pluie gluante dégouline sur mes épaules, se plaque contre ma peau », décrit-elle dans sa biographie (1). À 79 ans, l’ancienne journaliste souffre d’un diabète de type 2, d’un système immunitaire défaillant, de maux de tête, d’un cancer du sein et de nodules sous-cutanés. Sa première fille, née en 1968, a la peau qui part en lambeaux quelques jours après la naissance, et meurt de la tétralogie de Fallot à 17 mois.

Ses deux autres enfants souffrent respectivement d’alpha-thalassémie, une maladie du sang, et de chloracné, qui affecte la peau. « À chaque maladie, j’ai une anomalie, une résistance aux médicaments. Les spécialistes ne se l’expliquent pas.  » Au Vietnam, 4,8 millions d’habitants ont été directement exposés à l’Agent orange et plus de 3 millions en subissent encore les conséquences, selon l’Association vietnamienne des victimes de l’Agent orange-dioxine (Vava). « Les victimes de l’Agent orange sont les plus misérables parmi les misérables. Il faut que justice soit faite. Ils ne réclament que la dignité », poursuit Tran To Nga.

Icon Quote La complexité tient au fait que l’ensemble des sociétés sont aux États-Unis, où le droit diffère.  Amélie Lefebvre, avocate de Tran To Nga

Lever le voile sur l’origine des pathologies développées par les Vietnamiens 

Cette action en justice est souvent comparée au combat de David contre Goliath. Et pour cause, elle se révèle extrêmement coûteuse puisque la trentaine d’avocats des multinationales, dont Dow Chemical et Bayer-Monsanto, ont déployé tous les stratagèmes pour ralentir le déroulement du procès et épuiser Tran To Nga. Ils disposent de la force de frappe nécessaire : il y a quelques années, le chiffre d’affaires de Dow Chemical dépassait allègrement le PIB du Vietnam. « La complexité tient au fait que l’ensemble des sociétés sont aux États-Unis, où le droit diffère. Nous avons dû faire traduire l’ensemble des documents par des traducteurs assermentés pour que les actes soient réguliers », précise Amélie Lefebvre, l’une des avocates de Tran To Nga, au nom du cabinet Bourdon & Associés qui demande le versement d’une indemnité pour les dommages corporels et moraux. 

L’enjeu est de faire reconnaître par une juridiction française le lien entre l’ exposition aux produits phytosanitaires dont a fait usage l’armée américaine et l’ensemble des pathologies développées par les Vietnamiens. Si c’était le cas, les millions de victimes pourraient prétendre à des indemnités pour des soins extrêmement lourds et onéreux. « Nous attendons beaucoup de ce procès au Vietnam », confirme Truong Pham, responsable de la communication à Vava.

Un dossier classé secret pendant trente-cinq ans aux États-Unis

Selon des chercheurs du département de biologie de l’université de Washington, la dioxine TCDD peut favoriser « l’héritage épigénétique transgénérationnel de la maladie et les épimutations de méthylation de l’ADN dans le sperme ». Après avoir nié l’existence d’un rapport sur les pathologies graves développées par l’exposition à l’Agent orange, classé secret pendant trente-cinq ans, l’administration américaine impute désormais à l’Agent orange dix-sept pathologies, dont plusieurs cancers, ainsi qu’une vingtaine de malformations congénitales. Le procès de Tran To Nga est d’autant plus crucial que, pour l’heure, toutes les démarches des victimes vietnamiennes auprès de la justice américaine ont été déboutées. L’Oncle Sam n’a consenti qu’à 180 millions de dollars de dédommagement pour ses propres vétérans et à l’amiable afin de ne pas créer de précédent juridique.

150 000
C’est le nombre d’enfants handicapés plus de quarante ans après la guerre.

Car le cynisme va jusque-là. Fin 2017, les Américains ont achevé les travaux de décontamination de l’aéroport de Da Nang, initiés cinq ans plus tôt pour un budget officiel de 43 millions de dollars. L’ancienne base figurait parmi les vingt-huit « points chauds ». Seuls les hectares où étaient entreposés les stocks ont été décontaminés. Aucun bilan chimique n’a été dressé. En revanche, la dépollution génère bien des profits. Concernant l’aéroport de Biên Hoà, « le volume des terres imprégnées par les produits toxiques est cinq fois supérieur à celui de Da Nang. Le coût est estimé à 500 millions de dollars pour dix années de travaux », souligne Nguyên Van Rinh, président de Vava. Les travaux ont ainsi prioritairement été entrepris là où les Américains pourraient revenir. « Da Nang étant le seul port en eaux profondes du Vietnam où les bâtiments de l’US Navy pourraient s’ancrer durablement », précise l’écrivain André Bouny (2), qui a convaincu Tran To Nga d’engager cette procédure.

Les victimes servent aujourd’hui les projets géostratégiques

C’est le cas le 5 mars 2018, lorsque le porte-avions américain USS Carl Vinson mouille au large de Da Nang. Le lendemain, des marines se rendent dans le centre de protection des victimes du district de Hoa Vang. Étrange spectacle que celui de ces soldats américains contemplant l’œuvre criminelle de leurs aînés. Les victimes de l’Agent orange servent aujourd’hui les projets géostratégiques d’endiguement de la Chine dans un contexte de rivalité sino-vietnamienne sur les îles Paracels (Hoang Sa) et Spratleys (Truong Sa). « Il est difficile d’exiger de l’ancien ennemi le dédommagement des victimes de l’Agent orange, alors qu’il se pose en protecteur face à la puissance Chine voisine », abonde André Bouny. Dans les bagages américains également, des associations peu scrupuleuses telles que Living Water Initiative, une organisation évangélique qui, sous couvert d’aide alimentaire ou de projets d’éducation, voit dans l’assistance un moyen de poursuivre sa mission religieuse en Asie. Dans ce grand jeu, Tran To Nga a coutume de dire : « Je ne suis qu’une petite poussière. » Une petite poussière aujourd’hui à même d’enrayer la machine à broyer les corps et à poursuivre la guerre par d’autres moyens.

(1) Ma Terre empoisonnée, Stock, 2016. (2) Agent Orange : apocalypse Viêt Nam, éditions Demi-Lune, 2010.

Les firmes « ont fourni le produit en connaissance de cause ». Dans la lignée du Tribunal Russell sur les crimes américains au Vietnam de 1966, Paris a accueilli, en 2009, le Tribunal international d’opinion sur la responsabilité des États-Unis dans l’épandage d’agent orange sur le Vietnam. Il a conclu à la « responsabilité solidaire des États-Unis comme ayant commis l’épandage mais aussi des sociétés qui ont fourni le produit en connaissance de cause », résume Roland Weyl, président de l’Association internationale des juristes démocrates. Alors que les firmes avaient connaissance des dommages causés par le produit, la poursuite de la production à fort taux de dioxine et son usage par l’armée américaine constituent « un crime de guerre ». Le jugement porte également sur la mise en place d’une commission, financée par les responsables, recensant l’étendue des dommages et l’indemnité provisionnelle minimale à verser aux victimes

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