Depuis deux ans, Emmanuel Macron promet que tout va changer.
Le Président de la République a tour à tour annoncé vouloir « changer de méthode », « ouvrir une nouvelle page », « sortir des sentiers battus ». On ne devait pas reprendre « le cours normal de nos vies sans que rien n’ait vraiment été compris, sans que rien n’ait changé ». Puis, il a prévenu que « le jour d’après ne sera pas un retour au jour d’avant », et proposé « de tirer toutes les leçons de la crise du coronavirus » tout en parlant d’une indispensable « réinvention » et d’un « nouveau chemin ».
Son intervention de ce jour, sous la forme classique d’un entretien télévisé, se solde par une nouvelle impasse.
Après un long mea culpa sur des réformes qui n’ont pas été vécues comme « justes », Emmanuel Macron ne change pas pour autant de politique. Les plus riches conserveront l’ensemble des cadeaux fiscaux. Les entreprises, qui bénéficient des aides publiques, sont appelées à une « modération sur les dividendes » et à prendre des jeunes en apprentissage, mais toujours sans la moindre contrainte. Face à une crise économique et sociale de grande ampleur, à un tsunami à venir en termes de destructions d’emplois, le Président de la République est apparu sans réponses nouvelles, acceptant la baisse des salaires, avec le chantage aux licenciements, si cela s’accompagne d’un « dialogue social ».
Présenté comme une priorité de la relance, l’emploi des jeunes reste confiné à des réponses bien en deçà des urgences et des besoins. La réforme des retraites est réintroduite à l’agenda avec un mensonge : non, les premiers de corvées qui sont apparus comme les véritables premiers de cordées n’en seraient pas les « grands gagnants ».
Enfin, défendre la transition écologique ne s’accompagne d’aucun chiffre, aucun financement, aucun objectif précis.
Comment changer sans changer de cap politique ? Sans un nouveau modèle de développement ? Sans une rupture avec des politiques économiques et sociales qui aggravent dangereusement les gâchis humains et écologiques ?
Le chemin proposé par le chef de l’Etat conduit aux mêmes voies sans issues pour le pays et pour notre société. Après le mouvement des Gilets jaunes auquel l’exécutif n’a pas répondu en terme de justice sociale et de démocratie, après la très forte secousse sur l’avenir des retraites, après une crise sanitaire qui a mis en lumière combien l’humain devait être la première des priorités, rien n’y fait...le GPS macronien reste bloqué.
Ce pouvoir ne connaît qu’une seule destination : celle d’un monde où, au final, sur l’essentiel, rien ne doit changer.
Bercy envisage de prolonger la CRDS jusqu’en 2042, afin de faire payer la crise sanitaire et ses conséquences aux travailleurs et aux familles, plutôt qu’en augmentant les impôts des riches.
Cacher cette dette que je ne saurais voir. Depuis quelques semaines, Bercy travaille à isoler une partie de la dette publique, ces 150 milliards d’euros liés aux mesures prises pendant et après la pandémie. Le but : faire baisser le taux d’endettement de la France pour qu’il ne dépasse pas les 100% de PIB et ne pas faire payer les plus fortunés. Puisqu’avec une dette qui devrait représenter 121 % du PIB à la fin de l’année, la France va connaître une situation qu’elle n’a plus connue depuis la seconde guerre mondiale, lorsque le taux d’endettement avait franchi le seuil des 250 %.
La piste évoquée par Bruno Le Maire est d’enfouir la dette dans une structure particulière, comme la Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (Cades) qui a planquée celle de la sécurité sociale. Pour rembourser la dette sociale, la CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale), avec son taux à 0,5%, était apparue sur les fiches de paie, mais aussi des pensions de retraite, des allocations chômage ou maladie, des revenus du capital, des loyers, mais aussi des aides au logement, des allocations familiales… la CRDS est partout. Et, le gouvernement pourrait décider d’une prolongation de ce prélèvement jusqu’en 2042. Une façon pour Emmanuel Macron de faire semblant de respecter sa promesse, à savoir « ne pas financer ces dépenses en augmentant les impôts ». Car, explique Bercy, « cela permettrait ne pas créer de nouvel impôt et de rembourser la dette à prélèvement constant ». Sans compter que cette « prolongation serait même indolore » pour les Français, dixit Bruno Le Maire.
Reste que la CRDS devait être supprimée en 2009, avant d’être prolongée en 2024, puis le mois dernier jusqu’en 2033. Ce nouveau report, n’en déplaise à Emmanuel Macron, revient bien à augmenter les impôts des travailleurs, de presque 8 milliards d’euros chaque année, et ce, pendant 18 mois, pour financer les cadeaux fiscaux aux entreprises, sans qu’aucune contrepartie ne soit exigée. Un mécanisme qui permet à la fois de rassurer le patronat sur la continuité des aides publiques pour la période qui s’ouvre, tout en planifiant un remboursement dont le coût reviendra intégralement aux travailleurs.
Une injustice que dénonce l’économiste David Cayla, d’autant que « ce prélèvement n’est absolument pas progressif ». Ce membre du club des « économistes atterrés » estime que le coût de la crise sera « bien plus élevée que ces 150 milliards d’euros. L’économie a été traumatisée à l’échelle mondiale, ce qui nécessitera des dépenses sociales, avec l’explosion du chômage et le chômage partiel, mais aussi d’autres mesures qu’il faudra financer ».
Pour David Cayla, cette annonce montre que l’exécutif « ne veut rien transformer, rien changer de sa politique. L’habillage comptable consiste à stériliser cet évènement exceptionnel pour faire comme si rien ne s’était passé ».
Mais aussi, il s’agit pour le gouvernement qui refuse d’augmenter l’impôt des plus riches, de respecter les critères de Maastricht. Pierre Moscovici, le nouveau père la rigueur de la cour des comptes n’a d’ailleurs pas tarder de réagir, voyant dans ce cantonnement de la dette « un signal positif ». « Le prolongement de la CRDS (...) tel qu’évoqué par le gouvernement, permettrait en effet de conserver une ressource pour rembourser la dette de crise et cela signifie bien que quelqu’un la rembourse » a expliqué le sage de la rue Cambronne. « Cette mesure, si elle voit le jour, doit s’inscrire dans une stratégie globale qui fixe la trajectoire de moyen terme de l’ensemble des finances publiques », a-t-il ajouté.
Alors que la crise économique de 2008 avait été suivie par un fort recours aux énergies fossiles, l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA) a dévoilé récemment un « plan de relance durable ». Focalisé sur le secteur de l’énergie, l’objectif de ce plan de long-terme consiste à la fois de permettre une remise sur pied des économies, de créer des emplois en nombre tout en opérant une transition structurelle qui permette de répondre aux enjeux climatiques.
Trois ans pour tout changer de fond en comble : c’est ce que suggère l’IEA dans son plan de relance durable focalisé sur le secteur de l’énergie dès l’année prochaine. Selon elle, l’enjeu est notoire car les décideurs politiques doivent agir dans un court laps de temps pour avoir des impacts durables sur l’économie et sur les infrastructures énergétiques. Ayant comme visée la stimulation des économies, la création de millions de nouveaux emplois à l’échelle mondiale, ce plan de l’IEA vise également la réduction durable des émissions de gaz à effet de serre afin de répondre entre autres aux objectifs des accords de Paris. Mettant l’accent sur six secteurs clés, à savoir l’électricité, les transports, l’industrie, le bâtiment, les carburants et l’innovation, l’IEA propose près de vingt mesures évaluées sous différents aspects.
En tout et pour tout, ce plan de relance nécessiterait de mobiliser seulement 1000 milliards de dollars, soit 0,7% du PIB mondial et pourrait permettre de gagner un peu plus d’un point de croissance par an. Alors qu’elle estime que près de 6 millions d’emplois sont menacés dans le secteur de l’énergie sur les 40 millions actuellement existants à cause de la pandémie, elle affirme que ce sont un peu plus de 9 millions d’emplois par an pendant trois ans qui pourraient être créés grâce aux mesures de son plan. L’objectif affiché ? Permettre une meilleure résilience face à des crises futures et viser une réduction de 4,5 millions de tonnes de dioxyde de carbone atmosphérique d’ici 2023.
Plus que tout, l’IEA insiste sur l’importance de la coopération internationale pour pouvoir mettre en cohérence les actions respectives de chaque pays et rétablir des chaines globales d’approvisionnement en énergie. Pour l’agence, trois orientations clés sont centrales : la focalisation sur la sécurité énergétique ; la révision voire la réaffirmation des engagements pour des transitions vers des énergies propres ; la création de filets de sécurité pour les entreprises et les consommateurs. Elle estime également que des leçons peuvent être véritablement tirées de la dernière crise économique qui a eu lieu en 2008-2009. D’une part, il faut déployer à grande échelle les politiques existantes pleines de succès pour permettre des retours sur le plan économique et en termes de création d’emplois. D’autre part, elle insiste sur l’importance de la recherche et développement, afin d’être prêts sur le plan technologique. Plus largement, elle considère que la formation tout comme la remise à niveau des travailleurs est cruciale pour qu’ils puissent développer des compétences nécessaires au déploiement de projets sur l’énergie.
Un plan ambitieux avec des mesures concrètes pour le long-terme
L’IEA fait un véritable plaidoyer pour des investissements durables car, d’après elle, cela permettra un soutien et des créations en termes d’emplois, tout en délivrant une énergie abordable et fiable. Plus largement, investir dès maintenant de manière pérenne dans l’énergie serait bénéfique pour le reste de l’économie avec de véritables effets indirects. Mieux encore, cela est incontournable selon l’agence pour garantir une réorientation structurelle de ce secteur, en vue de répondre à des objectifs de long-terme quant au défi climatique, l’accès à l’énergie et la durabilité. La pandémie a mis en exergue la nécessité urgente de soutenir et de créer de l’emploi dans un contexte où l’environnement monétaire fluctue et où les marchés des énergies fossiles sont volatiles. Également, cette même pandémie a développé selon l’IEA une conscience accrue des bienfaits d’une énergie propre et sûre, ainsi que la possibilité de changer durablement les usages et comportements.
Au-delà des enjeux qu’elle brosse, l’agence avance des mesures concrètes. Pour ce qui est de l’électricité, on retrouve l’extension et la modernisation des réseaux énergétiques, afin de basculer vers des infrastructures numériques, des réseaux intelligents ; le développement massif des énergies renouvelables que sont l’éolien et le solaire photovoltaïque ; le maintien des énergies hydrauliques et nucléaires dans le mix énergétique en raison de leurs faibles émissions de gaz à effet de serre ; de réels investissements en R&D pour réduire drastiquement les émissions et pollutions des énergies fossiles comme le charbon et le gaz. Quant aux transports, l’IEA met l’accent sur l’encouragement à l’achat de nouveaux véhicules plus efficaces et sobres ; la promotion des trains à grande vitesse au détriment de l’avion et des véhicules individuels pour assurer un meilleur maillage territorial et une réelle décentralisation ; l’amélioration des infrastructures urbaines afin de réduire la pollution et la congestion, au travers d’une meilleure disponibilité des bornes de rechargement pour les véhicules électriques individuels, du développement des bus électriques et de l’extension de l’espace urbain accordé aux piétons et aux cyclistes.
Ensuite, pour ce qui a trait au bâtiment, filière qui emploie 10% des travailleurs à l’échelle mondiale, la meilleure efficience énergétique des logements sociaux et administratifs, et dans la foulée dans l’industrie, doit être selon l’agence un premier cheval de bataille pour réduire véritablement les factures énergétiques, battre en brèche la précarité énergétique, améliorer la santé et le confort et renforcer la résilience notamment face aux événements climatiques. Toujours sur ce secteur, le déploiement des appareils ménagers connectés doit être plus que jamais mis en avant, pour réduire la consommation énergétique et les coûts d’opération du système électrique, et ce de manière conjointe avec le recyclage efficace d’appareils ménagers comme les réfrigérateurs qui contiennent de puissants gaz à effet de serre. Si on s’intéresse ensuite à l’industrie, il s’agit ici selon l’IEA d’améliorer l’efficience énergétique et l’électrification à l’échelle mondiale et sur cet aspect, les gouvernements peuvent engager une série de mesures fiscales incitatives. Il y a également nécessité à renforcer le recyclage des déchets et de matériaux tels que les plastiques, et repenser en amont le design des produits manufacturés pour limiter les déchets plus efficacement.
Enfin, en ce qui concerne les carburants, l’agence de l’énergie considère qu’il faut améliorer les procédés existants pour réduire les émissions de méthane, puissant gaz à effet de serre, provenant du pétrole et du gaz, et de permettre la reconversion des travailleurs qualifiés de secteur, menacés de licenciements, dans la réduction de telles émissions. Une réforme drastique des subventions aux énergies fossiles est également nécessaire selon l’IEA, ainsi que le soutien et l’extension des biocarburants, secteur à fort potentiel d’emploi de travailleurs peu comme très qualifiés. Pour conclure, l’agence met l’accent sur l’innovation : sans cette dernière, « la transition vers des systèmes énergétiques modernes, propres et résilients seraient mis en jeu » et « les gouvernements ont un rôle majeur à jouer en soutenant l’innovation, notamment dans des domaines que le secteur privé perçoit comme trop risqués ». C’est ainsi que l’IEA insiste sur la nécessité de développer activement les recherches sur les technologies basées sur l’hydrogène, sur les batteries, sur les petits réacteurs nucléaires modulaires et sur la capture, l’utilisation et le stockage du dioxyde de carbone.
Quelles conclusions peut-on tirer de ce plan de relance durable ?
De manière centrale, en promouvant une modernisation importante du secteur de l’énergie pour répondre aux défis économiques, sociaux et écologiques du moment, cette dernière nous montre de manière sous-jacente l’importance de la formation des travailleurs au sens large. En effet, il s’agit d’être en mesure de développer des technologies nouvelles et efficaces et d’être en mesure de les maitriser et de les comprendre, en premier lieu pour les travailleurs impliqués mais aussi pour les utilisateurs et utilisatrices de ces technologies. De tels changements, une telle valorisation de l’innovation nécessite de développer véritablement l’enseignement supérieur pour former des travailleurs qualifiés qui maitrisent une large palette de compétences clés. De fait, cela suppose de rompre avec des décennies de libéralisation de l’enseignement supérieur marquées par le sous-financement chronique, le morcellement des formations et la non-reconnaissance du travail des étudiants.
Plus que jamais, il est nécessaire de financer massivement les universités et laboratoires publics pour stimuler l’émulation et la création, de créer un salaire étudiant dans le cadre d’une sécurité emploi-formation pour reconnaitre le travail intellectuel des étudiants et sécuriser les parcours de formation des salariés. Il s’agit aussi de conditionner réellement les aides publiques au secteur privé dans le domaine de la recherche et du développement, pour garantir la création d’emplois stables et stables et surtout la formation d’un nouveau tissu industriel en France et en Europe. Alors que l’étude économique de l’IEA a été faite conjointement avec le Fonds Monétaire International et accorde un rôle prépondérant au secteur privé et aux marchés dans son plan de relance, c’est bien le renversement des logiques de compétition auquel il faut résolument œuvrer.
La remise en cause des logiques de libéralisation et de mise en concurrence des travailleurs et des territoires depuis des décennies aux échelles européenne et mondiale est cruciale. Sans cela, il est clairement impossible de permettre par exemple un développement véritable d’un pôle efficace de l’énergie, d’un réseau ferroviaire maillant tout le territoire, d’une éducation, d’un enseignement supérieur et d’une recherche libérés des logiques de rendement immédiat qui se font au détriment des objectifs de long-terme que vise le Plan de relance durable de l’Agence Internationale de l’Énergie. Pour répondre aux enjeux clé de notre époque, pour permettre une relance industrielle et écologique, c’est bien du côté du secteur public que les solutions sont à trouver.
Depuis le 18 juin, une commission d’enquête enchaîne les auditions de responsables politiques, de directeurs d’agence et de scientifiques pour déterminer l’impact, la gestion et les conséquences de l’épidémie du coronavirus.
Pierre Dharréville, qui en est membre, en détaille les enjeux et en dresse un premier bilan pour « l’Humanité Dimanche ».
Qu’attendez-vous de cette commission d’enquête parlementaire sur le Covid-19, qui va se poursuivre tout l’été ?
Nous devons tirer toutes les leçons de la crise et des dysfonctionnements de sa gestion, en établir les causes afin de mettre les autorités devant leurs responsabilités. Les politiques libérales mises en œuvre ces dernières décennies ont conduit à placer notre système sanitaire dans un profond dénuement. Les auditions des anciens ministres de la Santé et de leurs décisions – coupes budgétaires, réduction du personnel, suppression du nombre de lits d’hospitalisation – l’ont démontré.
Après l’expérience de la commission d’enquête parlementaire sur « l’affaire Benalla », il serait catastrophique de ne pas parvenir à effectuer un travail sérieux, à la hauteur des attentes. Cette commission, où LaREM est majoritaire, devra aller au bout et rendre un rapport sans entraves. Pour autant, nous ne sommes pas la justice, même si des éléments peuvent lui être transmis en cas de constat de graves manquements.
Quel bilan tirez-vous des premières semaines d’auditions, pendant lesquelles vous avez entendu le directeur général de la santé, Jérôme Salomon, des membres du conseil scientifique, des anciens ministres, des scientifiques ?
On a pu mieux comprendre le déroulement des événements, notamment en matière de stocks stratégiques, qui ont manqué au moment de la crise. C’est le cas pour les masques, avec des changements de doctrine en 2011 et 2013 qui n’ont pas toujours été suivis, la destruction de masques périmés en 2018 et leur non-renouvellement. Ce point a créé du trouble, l’investigation est donc importante. L’ancienne ministre Agnès Buzyn (auditionnée le 30 juin – NDLR) a déclaré qu’elle n’était pas au courant de ces faits. Si ces informations ne lui ont pas été remontées, c’est un problème. Comment se fait-il qu’après la destruction de 600 millions de masques, il n’en soit commandé que deux fois 50 millions ? Les instructions sont données par le ministère, donc une responsabilité politique est engagée, quoi qu’il arrive.
Nous avons pu voir les conséquences de l’intégration des différentes agences sanitaires au sein de Santé publique France, en 2016, dans un contexte de compression des dépenses et des effectifs réduits de 20 % en moins de dix ans. Avec des moyens diminués, des missions ont dû être abandonnées.
Quels sont les autres thèmes que vous espérez aborder ?
Nous avons très peu parlé pour l’instant des pénuries de médicaments, il va falloir y venir. Nous devons aussi nous intéresser aux questions des conflits d’intérêts dont plusieurs scientifiques nous ont parlé. Le capitalisme s’est insinué profondément dans le domaine de la santé et ce n’est pas sans poser problème. C’est aussi pour cela que la santé doit relever de politiques publiques fortes. Notre groupe parlementaire tient d’ailleurs toujours à disposition une proposition de loi pour créer un service public du médicament.
Le pilotage de la gestion de la crise doit également être interrogé. On nous vante le conseil scientifique, dont les membres ont été choisis par le président de la République lui-même. Une sorte de conseil du prince qui prend le pas sur les institutions, sans stratégie véritablement lisible. Le fait d’avoir renvoyé les décisions politiques à un avis scientifique ou technique doit être questionné. Cet avis est nécessaire mais ne doit pas prendre le pas sur la démocratie. Or, celle-ci a été mise sous cloche.
Drôles de mœurs politiques ! Quelques heures seulement avant de changer de premier ministre, le président de la République convoque la presse régionale, chargée d’imprimer ses mots. Ceux du sang, de la sueur et des larmes. « La rentrée sera difficile, il faut s’y préparer » : tel est son message. Il n’a pas précisé « surtout pour les classes populaires », mais les détenteurs de capitaux auront compris que cette prédiction ne les concernait guère.
Sans débat, sans bilan, sans analyse publique du scrutin municipal et n’ayant retenu de ce dernier que la forte résistance de la droite, il refuse d’écouter le grand silence des urnes qui confine à la sécession civique. Peu lui importe l’expression majoritaire d’un peuple qui n’est plus dupe de rien et cherche à se débarrasser d’un système qui l’étouffe et le spolie, tandis que les puissants ripaillent à la table du festin. Le problème de M. Macron n’est pas le pays, les travailleurs, l’avenir des jeunes, mais sa réélection dans deux ans. Voilà ce que cachent les mots « nouvelle phase du quinquennat ».
Il échoit à M. Castex, fortement recommandé par M. Sarkozy, de la mener à partir des orientations du monarque et de son obsession à servir les intérêts du capital, alors que les ordonnances dérogeant au droit commun prises pendant le confinement sont toujours en vigueur. Il s’agit d’arrimer la politique du côté droit et d’empêcher un candidat de droite d’émerger d’ici à l’élection présidentielle.
La seconde signification, la plus importante et liée à la première, réside dans la volonté de renforcer la présidentialisation du pouvoir dans des proportions jusqu’ici inconnues. Réputé fin technicien, connaisseur des rouages étatiques, fin politique proche des territoires, M. Castex aura pour mission de préparer les élections régionales et départementales dans la perspective de la présidentielle. Il n’aura pas à mettre en œuvre la politique d’un gouvernement en débat avec le Parlement, mais bien celle décidée depuis le palais présidentiel. La fonction constitutionnelle de premier ministre est ainsi sacrifiée à l’aune d’une prétendue « efficacité » et au mépris des principes démocratiques. Et il faudra attendre l’adresse du président à la nation, le 14 juillet, pour que le premier ministre soit autorisé à prononcer son discours de politique générale. Du jamais-vu !
C’est donc le président, et lui seul, qui conduira la politique de la nation sans, qui plus est, avoir de comptes à rendre devant le Parlement, de toute façon totalement caporalisé. Le scénario du duel Macron-Le Pen va sans doute être réactivé car on sait en haut lieu la nécessité d’un épouvantail pour garantir une réélection et surtout pour faire avaler les destructions sociales envisagées, dont la réactivation d’une contre-réforme des retraites.
Déjà, le vieux refrain selon lequel « il n’y a pas d’argent magique » est répété en boucle alors que des milliards ont été débloqués pour venir en aide aux grandes entreprises qui multiplient pourtant les plans de licenciement. Les envolées lyriques sur de possibles « nationalisations » au début de la crise sanitaire ont laissé place au « laisser-faire » actionnarial arrosé d’argent public. Airbus, Renault, Alcatel, Air France, Smart et tant d’autres : combien de salariés dans les entreprises directement concernées et la sous-traitance vont aller rejoindre la cohorte de chômeurs sans que l’État ne daigne intervenir autrement qu’en garantissant, grâce aux aides publiques, les performances financières des grands groupes ? Combien de jeunes sur le carreau ?
La crise sanitaire sert ainsi de prétexte pour imposer l’allongement de la durée du temps de travail, l’une des priorités de cette fin de quinquennat, tandis que les privés d’emploi seront amputés de leurs droits. Le pouvoir entend ainsi mener une guerre sociale soutenue. Pour s’y opposer victorieusement, l’été doit servir à préparer un indispensable automne de luttes, mais aussi à construire un autre cap politique pour faire émerger une majorité de changement social, écologique et démocratique.
Sommée de compléter sa déclaration d’intérêts, dans laquelle elle avait omis plusieurs mandats, la nouvelle ministre du Travail, bientôt en charge de la réforme des retraites, a des liaisons dangereuses avec le privé.
Élisabeth Borne a fort à faire. À 59 ans, l’ex-ministre de la Transition écologique hérite du portefeuille du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion. À son ancienne fonction, elle avait pour tâche de faire oublier François de Rugy, pincé en plein « homardgate ». Rue de Grenelle, elle devra faire mieux que Muriel Pénicaud, coutumière des boulettes et des « à peu près ». Surtout, l’ancienne directrice stratégique de la SNCF aura pour mission de remettre sur les rails la réforme honnie des retraites (précédemment portée par le ministère de la Santé), qu’Emmanuel Macron ne compte pas abandonner.
Omission de mandats
Mais Élisabeth Borne est rattrapée, depuis la fin juin, par des potentiels conflits d’intérêts. Le 23 juin, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a sommé la ministre de modifier sa déclaration d’intérêts. La raison ? Six mandats y ont été omis, liés pour la plupart à sa fonction antérieure de présidente-directrice générale de la RATP (transports parisiens), de mai 2015 à mai 2017.
L’affaire remonte à janvier dernier. L’hebdomadaire Marianne dévoilait qu’Élisabeth Borne n’avait pas indiqué, dans sa déclaration d’intérêts transmise à la HATVP, sa participation au conseil d’administration de l’Institut de la gestion déléguée (IGD), un lobby favorable à la délégation des services publics vers le privé. Ou, pour le dire plus clairement, à la privatisation. De quoi jeter une ombre sur l’action d’une ministre en charge des infrastructures stratégiques de l’État : Élisabeth Borne était déjà, en tant que secrétaire d’État aux Transports en 2018, à la manette de la réforme de la SNCF qui a ouvert le transport ferroviaire à la concurrence et acté l’abandon de son statut d’entreprise publique.
Fondée en 1996, l’IGD se présente comme un « organisme indépendant à but non lucratif » qui a pour objet « de promouvoir l’amélioration de la qualité et de la performance des services publics, notamment lorsque leur gestion est déléguée ». Dirigé par Hubert du Mesnil, également à la tête de la société en charge de la controversée ligne « euralpine » censée relier Lyon et Turin, ce lobby réunit dans son conseil d’administration des acteurs de la vie publique, des grandes entreprises privées du secteur de la construction et des établissements publics susceptibles de privatiser une partie de leurs activités, comme la SNCF ou la RATP.
Sur la défensive
Siègent pêle-mêle en son conseil d’administration Vinci, Eiffage, HSBC France, Bouygues Construction, Keolis, Veolia, Engie, mais aussi des personnalités politiques comme le maire de Troyes François Baroin, en sa qualité de président de l’Association des maires de France, Renaud Muselier (Régions de France) ou encore l’édile toulousain Jean-Luc Moudenc, président de France urbaine (association des grandes villes et métropoles).
Dans un premier temps, Élisabeth Borne, sur la défensive, avait taxé l’article de Marianne de « scandaleuses insinuations », affirmant « ne jamais avoir siégé au CA de cette fondation » et n’avoir commis aucune omission. « Cela n’a pas à figurer dans ma déclaration », avançait-elle, arguant que cela aurait été « automatiquement » relié à son poste au sein de la RATP. Certes, son successeur à la tête de la régie, Catherine Guillouard, y siège dorénavant, selon l’organigramme de l’IGD. Mais les rapports annuels du lobby exhumés par Marianne démontrent au contraire que le nom d’Élisabeth Borne figure bien au conseil d’administration et qu’elle avait été choisie, selon les statuts de l’IGD, « en fonction de ses compétences ».
Trois mois de sursis
Du reste, la décision de l’HATVP est un camouflet pour la nouvelle ministre du Travail. Elle dispose d’un délai de trois mois pour compléter sa déclaration. Parmi les cinq autres mandat omis, outre l’IGD, Élisabeth Borne appartenait aux conseils d’administration d’autres organismes, comme l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), la fédération d’entreprises Paris Île-de-France Capitale économique, la Fondation Groupe RATP et le comité stratégique de Fer de France.
Si la Haute Autorité estime toutefois que les « participations (omises dans la déclaration d’intérêts) ne sont pas de nature à caractériser un risque de conflit d’intérêts avec les fonctions de ministre, dès lors notamment que les intérêts en cause sont passés et que madame Borne participait à la plupart de ces organismes en raison de ses fonctions de présidente de la RATP », le parcours de la haut fonctionnaire montre des proximités avec des acteurs aux intérêts privés.
Marque de fabrique de la Macronie
Avant d’intégrer le casting gouvernemental en 2017, Élisabeth Borne, formée à l’École polytechnique et au Collège des ingénieurs, a fait un aller-retour dans sa carrière entre public et privé, entre cabinets politiques et conseil d’entreprise. Ainsi, entre 2002 et 2014, la retrouve-t-on tantôt à la SNCF, tantôt à l’urbanisme de la mairie de Paris, ou préfète de la Vienne, mais aussi directrice des concessions au sein du géant du BTP Eiffage, en 2007. Ces franchissements de la frontière public-privé sont une marque de fabrique de la Macronie : à l’image d’Emmanuel Macron qui est passé de la haute fonction publique à la banque Rothschild, ou bien de son secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, éphémère directeur financier chez MSC (fret maritime).
Le « dossier Borne » ne fait pas tant écho à l’affaire Jean-Paul Delevoye, qui avait, lui, dissimulé des rémunérations à l’HATVP, qu’il met en lumière une nouvelle fois les liaisons dangereuses entretenues entre le pouvoir et les puissances économiques privées. Et pose une question : après toutes ces polémiques, quand les ministres macronistes apprendront-ils enfin à être exhaustifs dans leur déclaration d’intérêts ?
En nommant Gérald Darmanin, accusé de viol, et Éric Dupond-Moretti, pourfendeur de #MeToo, le président oppose une fin de non-recevoir à l’exigence d’égalité.
Emmanuel Macron a choisi Gérald Darmanin, soupçonné de viol, pour diriger le ministère de l’Intérieur. Il a désigné Éric Dupond-Moretti, pourfendeur du mouvement #MeToo, au poste de garde des Sceaux. Ces décisions scandalisent les féministes. Pour elles, c’est une gifle infligée aux luttes contre les violences sexistes et sexuelles. L’indignation s’est exprimé dès mardi matin dans les rues parisiennes : « Un violeur à l’Intérieur, un complice à la Justice ! » ont scandé des jeunes militantes, près de la place Beauvau. Dans la foulée, un rassemblement s’est déroulé place de la Madeleine pour dénoncer ces nominations.
Gérald Darmanin est promu ministre de l’Intérieur au moment où la cour d’appel de Paris a ordonné la reprise des investigations concernant une accusation de viol, harcèlement sexuel et abus de confiance. Laura Jovignot, coordinatrice du mouvement #NousToutes, y voit une façon de faire perdurer la culture du viol : « Macron donne des responsabilités à un homme accusé de viol, c’est délégitimer la parole des victimes, entretenir son impunité. Des militantes font un parallèle avec le césar donné à Roman Polanski. La République française, c’est le pays de la banalisation des violences faites aux femmes. » Pour la féministe, c’est la légitimité même du ministre qui est en cause : « Gérald Darmanin n’est pas crédible pour évoquer la protection des femmes et leur intégrité physique. Comment peuvent-elles déposer plainte dans un commissariat quand leur patron est lui-même accusé de viol ? Nous demandons sa démission, et nous attendons une réaction de Marlène Schiappa. » L’ex-secrétaire d’État auprès du premier ministre en charge de l’égalité femmes-hommes est reléguée au rang de supplétive de Gérald Darmanin à Beauvau, sur le dossier de la « citoyenneté ». Tout un symbole.
L’ancienne ministre déléguée aux droits des femmes, Laurence Rossignol, juge, elle aussi, que ces attributions de postes posent « un très gros problème, parce que, au minimum, ces deux hommes n’ont aucun engagement sur ces sujets ». C’est même tout l’inverse pour le nouveau ministre de la Justice qui s’est opposé à la création du délit d’outrage sexiste. Éric Dupond-Moretti a même manifesté son mépris pour le mouvement #MeToo. « À mon époque, quand une fille refusait vos avances, on appelait ça un râteau ; de nos jours, on appelle ça un délit. Quand c’est non, c’est non, on est bien d’accord. Mais comment fait-on pour rouler un patin aujourd’hui ? On adresse un courrier recommandé AR et on attend la réponse ? » assure-t-il dans un entretien accordé à QG magazine. Interrogé sur l’affaire Weinstein et son effet miroir sur la société, il répond : « Écoutez, tous les hommes ne sont pas des prédateurs, même s’il y en a. (…). Mais il y a aussi des femmes que le pouvoir fait bander. La starlette qui va voir un producteur célèbre et lui dit “ je veux devenir une star”, et l’autre qui lui répond “d’accord, mais tu couches”, si elle couche, ce n’est pas un viol, c’est une promotion canapé. »
La sénatrice PCF Laurence Cohen s’inquiète également : « Ces deux ministres chargés respectivement d’accompagner les fonctionnaires de police et la magistrature pour lutter contre les violences ne brillent pas par leur exemplarité. Comment faire confiance à un personnage comme Dupond-Moretti ? Il est dans le combat inverse de l’histoire de la libération des femmes. » Dans une moindre mesure, la communiste critique aussi l’arrivée au gouvernement de la PDG Élisabeth Moreno. La nouvelle ministre déléguée chargée de l’égalité femmes-hommes défend les « blagues à la machine à café » : « Je ne veux surtout pas que les hommes se sentent gênés, expliquait-elle en 2018 lors d’un entretien à l’école de commerce Groupe Ionis, car ils auraient le sentiment qu’il n’y en a que pour les femmes ! Les blagues à la machine à café sont très importantes, car il ne faut pas qu’on se sente verrouillé et qu’on ne puisse plus s’exprimer. Je ne veux pas d’un climat de défiance où le sexisme met tout le monde mal à l’aise. » Trois ans après l’onde de choc #MeToo, cette nouvelle équipe ne présage décidément rien de bon pour la lutte des violences faites aux femmes.
Jean-Michel Blanquer a été nommé ministre de l'Education nationale, de la Jeunesse et des Sports. Le haut fonctionnaire voit ainsi s'élargir son portefeuille au sein de l'équipe gouvernementale du nouveau Premier ministre, Jean Castex. Il remplace Roxana Maracineanu, qui passe de ministre à ministre déléguée des Sports. Une annonce qui, selon Marie-George Buffet, députée (Gauche démocrate et républicaine) et ancienne ministre des Sports, est "un affaiblissement du rôle du ministère des Sports".
Dans le gouvernement remanié, Jean-Michel Blanquer voit son portefeuille s'élargir et devient ministre de l'Education nationale, de la Jeunesse et des Sports. Il prend la place de Roxana Maracineanu, qui est elle rétrogradée en tant que ministre déléguée aux Sports. Êtes-vous surprise par cette annonce ?
Marie-George Buffet : "Je ne suis pas du tout surprise. Déjà parce qu'il y a eu la création de l'Agence nationale du sport (ANS) et dans la note de Bercy prévoyant cette agence, on visait la suppression du ministère des Sports. Certes, nous ne sommes pas dans la suppression mais dans le fait que le ministre des Sports n'est plus une ministre de plein exercice mais une ministre déléguée. C'est donc un affaiblissement du rôle du ministère par rapport à l'ensemble des pratiques sportives."
Selon vous, cet "affaiblissement" est-il une sanction vis-à-vis de Roxana Maracineanu ou envers le ministère des Sports plus généralement ?
M.-G. B. :"Non, c'est le ministère des Sports qui est visé. Dans la note de Bercy au sujet de la création de l'Agence national du sport, il était noté la disparition du ministère des Sports. On considère que le sport n'est pas, au même titre que la culture, un droit essentiel pour nos concitoyens et donc il n'a pas besoin d'un ministère de plein exercice. C'est donc une relégation du sport."
C'est assez inédit de se retrouver avec deux ministres des Sports finalement...
M.-G. B. :"Ce n'est pas vrai, il n'y a pas deux ministres. Il y a un ministre, Jean-Michel Blanquer, qui va gérer l'ensemble de ses domaines - Education nationale, Jeunesse et Sports - et une ministre déléguée qui sera sous ses directives. Je ne vois pas très bien le sens d'un pôle éducatif qui va englober le sport, y compris le sport professionnel. Il faut qu'on m'explique en quoi le sport professionnel doit être dans le même ministère que l'éducation. C'est une incohérence. C'est relégué le sport comme quelque chose de marginal alors que c'est un droit essentiel pour les citoyens de pouvoir pratiquer la discipline de leur choix et pouvoir peut-être aspirer au plus haut niveau."
Est-ce que cette nouvelle organisation au sein du gouvernement ne risque pas de compliquer la prise en charge des dossiers ?
M.-G. B. : "Bien évidemment. Vous avez déjà l'ANS, qui gère déjà une partie des subventions du sport amateur et qui est en charge de la haute performance. Et nous avons une ministre maintenant déléguée aux sports, au sein de l'Education nationale. Il va donc falloir quand même préciser quelles sont les missions et les prérogatives de l'ANS et de la ministre déléguée aux Sports. Car au bout d'un moment, on va se demander, et c'est ce que veut Bercy, faut-il encore un ministère des Sports ? C'est vers cela que l'on tend..."
Quel bilan faites-vous de Roxana Maracineanu au ministère des Sports ?
M.-G. B. : "J'ai trouvé qu'elle avait été déterminée et courageuse, avec le peu de moyens qu'elle avait. En effet, dans ce ministère, le personnel a été éparpillé et ses moyens ont été réduits."
Quelles qualités faut-il pour être un bon ministre des Sports ?
M.-G. B. : "Déjà, il ne faut peut-être pas appartenir à la famille du mouvement sportif pour pouvoir prendre plus de recul, plus de marge. Et il faut beaucoup de détermination. C'est un milieu extrêmement attachant, avec tous ses bénévoles, c'est un milieu formidable. Et c'est un milieu qui est à roder aujourd'hui par la marchandisation, par les enjeux financiers par tout ça, et donc il faut un ou une ministre qui soit extrêmement déterminé(e) et qui fasse face à ces enjeux."
A quatre ans des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, quel est le signal envoyé par l'exécutif ?
M.-G. B. : "C'est un mauvais signal. Nous sommes à quatre ans des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Alors qu'on avait ce beau défi de faire en sorte que d'ici quatre ans on multiplie le nombre de licenciés dans les clubs, qu'on donne plus de moyens aux clubs, qu'on forme plus de jeunes pour le haut niveau, on explique aujourd'hui que finalement le sport est délégué, et qu'il n'est pas plus que délégué."
Comment aviez-vous vécu votre rôle de ministre des Sports ?
M.-G. B. :"Je l'ai découvert au début. Je n'étais pas du tout préparée à ça. Ça m'a permis de beaucoup travailler les dossiers, de concerter avec le milieu sportif, j'ai découvert des hommes et femmes, des bénévoles, formidables. Mais j'ai découvert aussi le dopage, les enjeux financiers, les enjeux des Etats qui instrumentalisaient le sport pour faire de la géopolitique, pour obtenir une bonne image. Ce n'est pas un poste de gestion uniquement mais c'est un poste qui a trait à l'éthique, à la géopolitique, au domaine politique, donc c'est un poste très intéressant."
Si on vous proposait de nouveau le poste, l'accepteriez-vous ?
M.-G. B. :"Oui, si c'était un gouvernement de gauche, très déterminé à mener une politique sociale, économique, sportive de gauche. Donc, pour le moment, ce n'est pas pour demain."
Tout juste sorti de cette période de confinement, et alors que la crise sanitaire a fortement impacté la situation des mineur-es isolé-es, le gouvernement reprend l’offensive réglementaire à l’encontre de leurs droits.
Un décret daté du 23 juin 2020 vient d’autoriser l’Etat à réduire sa contribution financière aux départements qui refusent de faire intervenir les préfectures dans le processus d’évaluation et d’identification de ces enfants.
Pour mémoire, ce sont la loi Collomb de septembre 2018 et son décret d’application du 30 janvier 2019 qui ont institué un fichier des mineur-es isolé-es permettant aux départements d’associer les préfectures à la détermination de leur minorité, et de faciliter l’éloignement de celles et ceux qui auront fait l’objet d’une décision provisoire de non-admission à l’aide sociale à l’enfance.
L’ensemble du secteur de la protection de l’enfance – et en particulier le Conseil national de la protection de l’enfance –, ainsi que la totalité des organisations qui se sont exprimées sur le sujet, ont dénoncé la confusion entre protection de l’enfance et lutte contre l’immigration irrégulière organisée par ce dispositif. Malgré quelques réserves, le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat l’ont malheureusement validé.
Un an après son entrée en vigueur, environ un tiers des départements, pour des motifs divers et variés, continue à refuser d’appliquer ce dispositif.
Aussi, à défaut de pouvoir contraindre l’ensemble des départements à conclure avec les préfectures une convention permettant de vérifier si ces enfants figurent déjà dans deux fichiers destinés au contrôle migratoire (Visabio et AGDREF) et de les inscrire dans un troisième, dénommé « appui à l’évaluation de la minorité » (AEM), le gouvernement a décidé de les frapper au porte-monnaie.
Ainsi, il recourt à présent au chantage financier pour contraindre les derniers départements réfractaires à ce mélange des genres. Ce faisant, il fait montre de son acharnement pour imposer sa logique du soupçon et du contrôle à la question de l’accueil et de la protection des mineur-es isolé-es.
Nos organisations demandent l’abrogation de ce décret, la mise en œuvre du premier accueil, l’accompagnement socio-éducatif des jeunes isolé-es, sans discrimination et dans le strict cadre de la protection de l’enfance.
Paris, le 7 juillet 2020
Liste des signataires :
CGT ; DEI France ; Fédération SUD Collectivités territoriales ; Fédération Sud santé sociaux ; FSU ; Gisti ; La Cimade ; Ligue des droits de l’Homme ; Unicef ; SNPES-PJJ/FSU ; SNUASFP-FSU ; SNUTER-La FSU Territoriale ; Union syndicale Solidaires ; Solidaires-Justice ; Syndicat des avocats de France ; Syndicat de la magistrature
Le nouveau premier ministre, Jean Castex, n’est pas un inconnu dans le monde de la santé. Il a été responsable de la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins dans le ministère de Philippe Douste-Blazy, puis directeur de cabinet de Xavier Bertrand. Son bilan est… impressionnant : généralisation de la tarification à l’activité transformant les hôpitaux en entreprises productrices de soins, mise en avant de l’ambulatoire avec des fermetures massives de lits, préparation de la loi Bachelot qui a tué la démocratie à l’hôpital, en concentrant tous les pouvoirs dans les mains du directeur. En résumé, il a mis en place une bonne partie des mesures qui ont conduit à la situation catastrophique que connaît aujourd’hui l’hôpital public et qui a provoqué la révolte des personnels. Une de ses premières déclarations a été d’annoncer vouloir boucler le Ségur de la santé avant la fin de la semaine qui suit sa nomination. Quel volontarisme ! N’en déplaise à ce monsieur, pour l’instant, aucun des partenaires sociaux n’est satisfait de ce qui a été mis sur la table par le ministre de la Santé, aujourd’hui reconduit dans ses fonctions.
À moins de débloquer enfin les milliards qui manquent pour augmenter les salaires et embaucher, son objectif paraît difficile à atteindre, sauf à passer en force. Si c’était son choix, ce serait un très mauvais début, et cela confirmerait qu’il reste dans la droite ligne de ce qu’il a accompli sous les gouvernements Chirac et Sarkozy. Les personnels de santé ne peuvent donc qu’être inquiets face à cet homme, technocrate, qui a toujours appliqué avec zèle les réformes libérales des gouvernements qu’il a servis. Cependant, les urgentistes ont eu à traiter avec lui en 2005-2006 et le rapport de forces l’avait fait céder. Cet exemple ne peut que renforcer notre engagement à poursuivre la mobilisation, notamment le 14 Juillet, avec de multiples actions, dont une grande manifestation à Paris, de la République à la Bastille.
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Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste.
Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale.
Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.