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21 mai 2020 4 21 /05 /mai /2020 05:45

 

Alors que rarement la recherche médicale française n’a suscité autant d’attente, le sénateur Pierre Ouzoulias dénonce le manque de moyens du secteur. Entretien.

Sénateur et chercheur au CNRS, Pierre Ouzoulias observe de près la ­politique de recherche menée par le gouvernement français, ­notamment en cette période d’épidémie. Il pointe les manques de moyens et d’organisation qui empêchent les laboratoires publics d’avancer plus ­rapidement dans la recherche de traitement contre le Covid-19 et dont pourraient souffrir aussi les autres pans de la recherche.

 

La France fait partie des États qui réalisent le plus d’essais cliniques pour trouver un traitement contre le Covid-19. Pensez-vous, comme Olivier Véran, que « s’il y a un pays qui doit trouver un médicament qui marche, il y a de bonnes chances que ce soit le nôtre » ?

Pierre Ouzoulias Je ne pense pas. D’abord, je ne suis pas certain qu’il faille se réjouir du nombre élevé d’essais cliniques en cours, car cela souligne un manque d’organisation criant de la recherche. La pandémie a mis en lumière les carences structurelles de la recherche française, de moyens et d’organisation, parcellisée en plusieurs structures, ce qui empêche de donner une réelle direction, une impulsion et un programme clair. Le gouvernement a créé l’organisme Care qui, en principe, devrait coordonner ces travaux, mais rien n’est fait. Le président de la République nous répète que nous sommes en guerre, mais la communauté scientifique observe qu’il n’y a pas d’état-major, pas de moyens et pas de troupes. On est resté sur le système classique, avec des études lancées via des appels à projets qui ajoutent de la lourdeur administrative, donc du temps et de la disparition de moyens. Cette organisation nous empêche de savoir si tous les domaines de la recherche sont couverts et s’il y a besoin d’investir davantage dans des domaines dans lesquels la France n’est pas représentée. Ce bilan n’a pas été fait et le manque de coordination freine l’avancée de la recherche. Le gouvernement a été incapable, même en ces temps de ­pandémie, de changer ce qui handicape la ­recherche publique en France.

"L’exécutif est incapable de gérer cette crise puisqu’il reste dans un dogme libéral qui considère que l’État n’est pas la solution mais le problème."

 

Emmanuel Macron a promis d’augmenter rapidement le budget de la recherche, est-ce déjà le cas ?

Pierre Ouzoulias Les plans de finances rectificatifs récemment votés ne prévoient aucun moyen supplémentaire pour la recherche. C’est absolument catastrophique. En tant que sénateur, j’ai posé plusieurs fois la question à la ministre de l’Enseignement ­supérieur et de la Recherche, Frédérique Vidal, mais elle nous balade. On nous dit que ça va arriver mais on risque d’attendre longtemps. Ce que je crains, c’est que les enveloppes dont disposent l’Agence nationale de la recherche (ANR) mais aussi l’Inserm ou le CNRS restent les mêmes mais qu’on demande d’augmenter celles consacrées à la recherche de traitement ou de vaccin. L’argent va donc venir d’autres sujets de recherche qui vont être abandonnés. C’est inquiétant et on voit déjà que des études ont dû être arrêtées car elles n’étaient plus financées. D’autres sont mises entre ­parenthèses car l’urgence est l’épidémie, ce qui est normal, et le budget général est beaucoup trop mince, contrairement à ce que disent les dirigeants. Il y a un double langage, sur ce que promet Emmanuel Macron et ce que fait concrètement le ­gouvernement, qui est insupportable. L’exécutif est incapable de gérer cette crise puisqu’il reste dans un dogme libéral qui considère que l’État n’est pas la solution mais le problème. Quand bien même toute cette crise nous montre le contraire.

 

Ces manques de moyens pour la recherche publique ont donc un impact aujourd’hui sur la recherche de traitements ?

Pierre Ouzoulias Oui, à cause de ces ­problèmes de moyens, de coordination, mais aussi de confiance envers les chercheurs, la France ne se donne pas les moyens d’être dans la course au traitement. La crise sanitaire souligne les problèmes dont souffre la recherche médicale en France depuis des années. L’exemple flagrant, c’est qu’on a abandonné, il y a dix ans, une recherche de fond sur la famille des coronavirus, uniquement pour des raisons budgétaires. Ces études auraient pu permettre d’en savoir plus sur les ­propriétés du virus, la manière de le ­neutraliser et donc de gagner beaucoup de temps. C’est caractéristique d’une ­recherche qui fonctionne par à-coups et qui abandonne ses financements lorsque le domaine en question n’est plus la priorité du moment. Il y a aussi un retard très fort en termes d’équipements. Aujourd’hui, les chercheurs français qui étudient la structure du virus n’ont pas accès aux mêmes microscopes qu’en Chine, ils ne peuvent donc pas aller aussi vite. Et il n’y a aucune volonté de mettre en place les moyens pour récupérer ce retard.

"Nous voyons bien, avec la crise environnementale et sanitaire, que le capitalisme financiarisé et globalisé est totalement dépassé et ne peut apporter aucune solution durable."

 

Au début de l’épidémie, les gouvernements et les chercheurs saluaient une coopération inédite entre laboratoires et États. Quelques mois plus tard, cette solidarité ne s’est-elle pas fissurée ?

Pierre Ouzoulias La communauté scientifique internationale échange beaucoup, il y a une vraie coopération de ce côté-là. Concernant la stratégie des laboratoires privés et des États, c’est très différent. Le scandale Sanofi le montre bien. Les laboratoires pharmaceutiques ont pour la plupart abandonné la recherche de traitements, car l’incertitude fait que le risque financier est trop important. En revanche, comme la découverte d’un vaccin pourrait servir à l’ensemble de l’humanité, avec un retour sur investissement potentiellement prodigieux, ils se sont jetés dessus. Et pour permettre la levée de fonds, Sanofi et d’autres jouent la concurrence entre les États, avec cette forme de chantage qui consiste à dire : « Les États-Unis investissent tant, si vous voulez qu’on produise le vaccin en France, il va falloir donner plus ». Les États sont donc concurrents. L’essai Discovery, qui patine parce que les pays européens qui devaient rejoindre la France ne l’ont finalement pas fait, montre bien que chaque pays préfère travailler dans son coin. Les États sont dans la poursuite de la course économique qu’ils se livrent depuis des décennies. C’est la première pandémie qui touche l’humanité de manière aussi globale, pourtant, pour la combattre, la réaction est celle d’un nationalisme tel qu’on ne l’a pas connu depuis 1945. Il est pourtant évident que ce n’est qu’en travaillant ensemble qu’on sortira plus rapidement de la crise. La logique ­ultralibérale se poursuit, contre l’intérêt de tous. Alors même que nous voyons bien, avec la crise environnementale et sanitaire, que le capitalisme financiarisé et globalisé est totalement dépassé et ne peut apporter aucune solution durable. Les idées portées par la gauche n’ont jamais été aussi ­modernes et aussi efficaces pour apporter des solutions pour notre humanité.

 

entretien réalisé par Florent Le Du

 

 

 

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21 mai 2020 4 21 /05 /mai /2020 05:38

La pandémie qui a paralysé le monde entier, son économie, sa vie sociale, culturelle, démocratique n’a pas fait bouger d’un iota les choix du gouvernement Macron/Philippe. Les promesses du nouveau monde n’ont pas fait illusion et, très vite, chacune et chacun a pu se rendre compte que le pouvoir actuel n’est que la nouvelle enveloppe du vieux monde libéral où l’argent et les premiers de cordée font la loi. Dans les lois de finances rectificatives votées au Parlement en mars et en avril derniers, les fondamentaux libéraux sont bien en place.

 

 

Nous portons systématiquement des propositions alternatives

Le gouvernement a fait le choix, d’emblée, de ne pas toucher à la fiscalité installée dès le début du quinquennat. Rappelons-en ici les éléments les plus saillants, les cadeaux aux plus fortunés de ce pays, la suppression de l’ISF (qui rapportait plus de 5 milliards d’euros par an), le plafonnement de la taxation des dividendes à 30 %, un taux unique, plus de progressivité, le fameux PFU (prélèvement forfaitaire unique). Pour les autres, souvenez-vous, hausse de la CSG pour les retraités, baisse des APL…, le ton était donné. Comment s’étonner dès lors que la pauvreté augmente dans notre pays avec 14 % de personnes vivant sous le seuil de pauvreté et, là encore, la pandémie a encore aggravé les inégalités.

À chaque débat budgétaire, que cela soit en loi de finances initiale en fin d’année ou à l’occasion des débats sur les lois de finances rectificatives, les parlementaires communistes portent systématiquement des propositions alternatives. Quand le gouvernement refuse de toucher à la fiscalité, nous proposons de faire contribuer davantage les grosses fortunes et les gros patrimoines. Pourquoi ? Par dogmatisme, par idéologie ?

Examinons les faits, du côté des revenus d’abord. Si l’on considère les revenus des Français en 2017, voilà la situation : il y a en France 38 millions de foyers fiscaux, 37,5 millions de foyers ont un revenu inférieur à 100 000 euros par an, au-delà de 9 millions d’euros de revenus annuels ils sont 218 foyers fiscaux.

Une fiscalité progressive qui doit solliciter les plus riches

Nous proposons systématiquement de rétablir l’ISF pour les patrimoines supérieurs à 1,3 million, nous proposons une fiscalité progressive sur les dividendes. Rappelons à ce stade, que l’an dernier la France a été le distributeur le plus généreux en termes de dividendes distribués aux actionnaires !

Nous proposons aussi d’augmenter le nombre de tranches d’imposition aujourd’hui au nombre de 5 (il y en avait 14 dans les années 80), le taux maximum est à 45 %, nous proposons d’ajouter des tranches au sommet de la pyramide pour atteindre 60 %, voire plus pour les très hauts revenus. S’agissant du patrimoine, les inégalités sont également abyssales. Selon l’INSEE, 10 % des ménages français détiennent la moitié du patrimoine. Plus personne ne peut nier l’aggravation des inégalités. Un projet de loi de finances rectificative ambitieux se doit de solliciter les plus riches.

D’autres mesures sont portées par nos groupes parlementaires, sur la TVA notamment qui est la première ressource fiscale de la République, près de 50 % des recettes fiscales, l’impôt le plus injuste qui soit. Nous proposons de créer un taux de TVA à 30 % sur les produits de luxe - une activité d’ailleurs qui continue de bien se porter en France et dans le monde -, une mesure qui permettrait d’alléger la TVA sur les produits de première nécessité. Là, pour justifier son refus, le gouvernement et la majorité sénatoriale se réfugient derrière les règlements européens. Soit, eh bien changeons-les !

Un nécessaire débat sur la souveraineté financière et monétaire

Le choix de nos gouvernants est donc de financer par la dette ; notre pays va ainsi contribuer à nourrir les marchés financiers mondiaux pour financer toutes ces mesures (ces marchés sont les banques, les assurances, les fonds d’investissement). Dans les 2 415 milliards de dettes de la France, combien de centaines de milliards d’euros leur ont été versés en intérêts depuis des décennies ? Il faudra, à un moment donné, que ce débat sur la souveraineté financière et monétaire de la France s’engage dans ce contexte.

Enfin, il y a ce combat inlassable à mener contre le scandale de l’évasion fiscale des grands groupes qui nourrit aussi notre dette depuis longtemps. C’est un combat que nous ne cesserons de mener.

Chaque débat budgétaire est donc un moment particulier pour mener le débat politique de fond. C’est ce que nous devons faire les uns et les autres, nous au Parlement, et nous tous dans le pays avec nos concitoyen·ne·s.

Éric Bocquet, sénateur du Nord.

 

 

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20 mai 2020 3 20 /05 /mai /2020 05:36

 

En Direct avec Loïc Pen, médecin urgentiste CGT à l'hôpital de Creil (Oise). Vos réactions suite aux promesses du gouvernement ? 

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19 mai 2020 2 19 /05 /mai /2020 05:54

 

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19 mai 2020 2 19 /05 /mai /2020 05:38

 

Presstalis est passé devant le tribunal de commerce, vendredi 15 juin. La messagerie poursuit son activité, mais en sacrifiant sa filiale, la SAD, et ses 512 salariés. 

Entretien.

 

Est-ce que vous avez eu connaissance, avant l’audience du mardi 12 mai au tribunal de commerce, de cette idée de brader 512 emplois sur les 900 que compte Presstalis ?

Guillaume Dumoulin. Ça nous a pris par surprise. Très vite, entre décembre et février, les projets de la direction ont muté vers l’idée d’un redressement judiciaire du groupe. On savait qu’il y aurait moins d’emplois à la clé, mais nous nous attendions à ce qu’ils soient discutés, comme d’habitude. Ce qui nous a surpris, c’est l’absence d’accord, y compris dans la dernière ligne droite, alors que cela faisait huit mois que les coopératives de magazines, d’un côté, et de quotidiens, de l’autre, discutaient entre patrons. Nous avons négocié jusqu’au dimanche 10 mai. Et le lundi 11 mai, la direction nous a annoncé un redressement judiciaire pour Presstalis, mais une liquidation pour toute la province. C’est un peu le coup de massue.

 

Comment les journaux sont-ils distribués en province, sans relais ?

Guillaume Dumoulin. Il n’y a pas de plan B. Le problème, c’est que tous les savoir-faire qui étaient dans la maison sont partis. Michèle Benbunan (à la direction de Presstalis de 2017 à 2019) a fait du mal. Le groupage des quotidiens, la messagerie s’appuient ensuite sur des dépositaires, en province. Elle a vendu du rêve aux éditeurs, en prétendant qu’on pouvait livrer directement chez le diffuseur, sans intermédiaire. Sauf que ça n’existe pas dans la vraie vie, ou ça reviendrait encore plus cher. En bref, elle a cassé la cohérence du système. Et, surtout, elle a été l’instigatrice de la modification de la loi Bichet, qui de notre point de vue crée une situation assez problématique. Parce que la loi Bichet obligeait les éditeurs à faire du commun, du collectif. Or, maintenant, ils n’ont plus cette obligation. Travailler ensemble, alors qu’ils se détestent, ce n’était déjà pas facile quand c’était obligatoire. Maintenant que ça ne l’est plus, c’est chacun pour soi. C’est donc tout le système de péréquation qui est mis en danger. Et on le voit aujourd’hui avec les magazines et les quotidiens, qui se tapent dessus en se reprochant d’être celui qui coûte cher. Et l’existant, la maison, est en train de tomber.

C’est illusoire de croire que les ouvriers du livre vont se laisser faire. C’est notre métier, on ne veut pas le perdre, et on ne lâchera pas.

 

Mais, du coup, c’est toute la chaîne d’emplois qui est impactée ? Vos emplois, mais aussi ceux des diffuseurs, des marchands de journaux et, in fine, l’existence même des journaux ?

Guillaume Dumoulin. Je pense que le gouvernement est le plus irresponsable qui soit. Il n’a pas joué la sécurité. Toutes ces dernières années, même quand c’était difficile (compte tenu de la situation de crise de la presse écrite, Presstalis a subi déjà deux crises très importantes depuis dix ans – NDLR), l’État est toujours intervenu. Alors oui, on peut dire : « L’État paie et ça coûte. » Mais, quand on regarde, on parle de la démocratie dans la 7e puissance du monde. Et on n’est pas sur des sommes si folles, alors que nous livrons tout le territoire national en presse tous les jours, que nous avons un des réseaux les plus performants au monde, et le nombre de magazines le plus important qui existe dans les pays développés. C’est le gouvernement qui laisse tomber : quand l’État décide de ne pas soutenir les SAF, c’est qu’il a une volonté de laisser tomber la province, avec à mon avis une méconnaissance du dossier, puisqu’ils pensent qu’ils vont pouvoir trouver des solutions de repli pour pouvoir continuer à distribuer. Mais il n’y a pas que les flux physiques : il y a tout le flux informationnel, la remontée d’argent. En bref, tout ce qui était fait par les dépositaires est aujourd’hui à l’arrêt.

 

Ce qui va mettre les éditeurs dans la difficulté très vite, non ?

Guillaume Dumoulin. D’autant qu’ils ne s’entendent pas. Or, même pour faire un plan de secours, il faut s’entendre. Ça laisse 512 emplois sur le carreau d’emblée. Et les diffuseurs sur la paille, alors qu’ils sortent tout juste du confinement. Beaucoup sont restés fermés. Les Relay, par exemple, devaient tout juste rouvrir. Et les courtines, soit toute la presse hippique, étaient en arrêt complet. Ils ont rouvert lundi dernier. Et dès mardi, avec la liquidation de la SAD, le journal est resté bloqué… Si on voulait achever le réseau, on ne s’y prendrait pas autrement. Dans le système, en 1995, il y avait 700 relais sur le territoire, et 61 début 2017… C’est une vraie hémorragie ! Nous étions alors 7 000 salariés dans le groupe, nous sommes 900. Et avec le projet en cours, il ne restera plus que 265 personnes. Les directions de Presstalis ont toujours fait payer l’emploi. Après, les volumes baissant, il est normal qu’il y ait moins de monde. Mais là, ils vont beaucoup plus vite.

Dans le système, en 1995, il y avait 700 relais sur le territoire, et 61 début 2017… C’est une vraie hémorragie !

 

Le SGLCE-CGT a fait appel de la décision du tribunal. Comment ça va se passer pour vous ?

Guillaume Dumoulin. On se retrouve au chômage, avec nos indemnités payées par les AGS.Ça veut dire que c’est la collectivité qui va payer le passif social des gros éditeurs. Alors qu’ils auraient les moyens de le faire. Mais nous n’en sommes même pas là. Notre travail, il ne disparaît pas ! On a un président-directeur général, Cédric Dugardin, qui veut nous prendre notre boulot et le donner à d’autres. Et nous, nous envoyer au chômage. Mais ça, on ne l’acceptera jamais. Et c’est illusoire de croire que les ouvriers du livre vont se laisser faire. Ça va mettre le réseau à feu et à sang, parce que les gars n’ont plus rien à perdre. D’ailleurs, les actions se multiplient partout.

 

À qui Cédric Dugardin veut-il donner votre boulot ?

Guillaume Dumoulin. La messagerie a une obligation de distribution sur tout le territoire. Elle s’appuie sur des réseaux de dépositaires, les fameux 61 dépôts que vous citiez tout à l’heure. Parmi eux, une partie est à 100 % de Presstalis. Ce sont les dépôts SAD et Soprocom, qui sont sacrifiés. Et tout le reste, ce sont des indépendants. Des patrons lambda. On est de la sous-traitance. La seule différence, c’est que nous, notre capital est possédé par la maison mère.

 

Mais du coup, c’est illusoire de penser que des indépendants vont revenir moins cher ?

Guillaume Dumoulin. Les zones à couvrir étant de plus en plus grandes, le transport coûtera toujours autant, si ce n’est plus. Après, sincèrement, je pense qu’ils veulent « se taper » les ouvriers du livre. Ils se débarrassent de la CGT en même temps. Ils font d’une pierre deux coups.

 

Vous continuez à faire grève. Et vous appelez les salariés du secteur, y compris ceux qui ne sont pas dans la distribution, à vous soutenir ?

Guillaume Dumoulin. Oui. On l’a vérifié sur Lyon. Les dépositaires traitent aussi des magazines locaux : Lyon Capital, Lyon Mag, la Tribune de Lyon… Ceux-là n’ont aucune solution de repli pour se faire distribuer. Ils n’en ont pas les moyens. Ça va être un massacre industriel et économique sur tout le secteur. Si des titres meurent, les industries de labeur vont moins imprimer. Il va y avoir une vraie casse de l’emploi.

Nous livrons tout le territoire en presse tous les jours, nous avons un des réseaux les plus performants au monde, et le nombre de magazines le plus important de tous les pays développés.

 

Jusque dans les rédactions. Mais quid de tout le discours autour du numérique ?

Guillaume Dumoulin. Aujourd’hui, il y a des journaux, comme le Figaro ou le Monde, qui diffusent très bien sur le numérique. Mais ça ne paye pas. Les salles de rédaction ne sont pas payées par Internet. La publicité est vampirisée par les Gafa, ils sont dépendants. Aujourd’hui, 70 % à 75 % des revenus des journaux, même avec un tirage en baisse, c’est le papier. S’il n’y a plus de papier demain, les salles de rédaction seront vides. Des journalistes vont se retrouver au chômage. Toute la profession est concernée. Je pense qu’on n’a pas été suffisamment réactifs, collectivement, au moment de la modification de la loi Bichet. Nous, on a alerté, mais je pense que personne n’a mesuré, au-delà même de la profession, à quel point la démocratie était attaquée. Là, ce qui est en train de se passer, c’est qu’ils sont en train de tuer tous les petits, il ne va plus rester que les gros éditeurs… Comme ils auront du cash, ces derniers pourront négocier des tarifs, et les autres ne pourront pas suivre. Et ils disparaîtront. C’est une vraie attaque contre le pluralisme.

 

Vous êtes très remontés…

Guillaume Dumoulin. Parce que nous, on a travaillé, pendant le confinement. On nous a dit que la presse, c’est indispensable, qu’il n’y aurait aucune faillite. On a travaillé sans masque, les premières semaines, sans gel, sans rien. Et comme on avait une boîte au bord du dépôt de bilan, il n’y a pas grand monde qui voulait nous avancer des choses sans qu’on les paye cash. On a continué à travailler, pour assurer. On a même exercé la solidarité en distribuant les invendus dans les Ehpad et les éditeurs nous ont félicités pour cette action. C’était génial de voir la presse se mobiliser. Et à la fin, ils nous licencient comme des malpropres, comme des voyous.

Personne n’a mesuré, au-delà même de la profession, à quel point la démocratie était attaquée.

 

Vous avez un mot d’ordre pour exercer cette solidarité concrètement ?

Guillaume Dumoulin. Dès mardi soir dernier, il y a eu un appel syndical. Par solidarité, les imprimeries se sont arrêtées, et il y a eu des arrêts et des débrayages dans les sièges. On a eu aussi un arrêt de la distribution sur Paris, parce que, même s’ils sont en redressement judiciaire, ils savent que le tour d’après sera le leur, s’il ne se passe rien de plus. Maintenant, le syndicat a lancé une cagnotte, pour organiser la solidarité financière pour les salariés de la SAD, parce que la lutte va peut-être durer. Même si nous espérons que ça se règle avant, pour nous comme pour les titres. Plus le conflit va durer, plus ça va fragiliser les titres. Chaque jour, c’est un titre qui peut disparaître. Ils vont essayer de nous contourner. Donc, on va demander aux camarades de partout de refuser qu’on livre notre boulot à d’autres personnes. C’est notre métier, on ne veut pas le perdre, et on ne lâchera pas.

 

Les éditeurs de quotidiens ne vont pas tenir tous seuls… Ils sont structurellement déficitaires…

Guillaume Doumoulin. À un moment, les quotidiens arriveront à s’entendre avec les magazines. Ils peuvent d’ailleurs parfaitement s’entendre après nous avoir liquidés. Ils se seront débarrassés de 512 emplois. Et en plus, ils ne payent rien, c’est la collectivité qui prend le relais. Il fait rêver, leur monde d’après.

 

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18 mai 2020 1 18 /05 /mai /2020 16:45
A l'issue du 1er tour des municipales, le Parti communiste 3eme parti de France en nombre d'élus municipaux pour l'instant avec 1072 élus!

Au 1er tour des élections municipales, nous sommes le 3eme parti de France en nombre d'élus municipaux !

Plus de 1072, contre à peine 268 pour Macron et LREM.

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18 mai 2020 1 18 /05 /mai /2020 12:31

 

Alors que les dirigeants de SANOFI ont avoué récemment, avec une certaine maladresse de communication, qu’ils comptaient maximiser leurs profits en cas de découverte d’un vaccin, en le réservant aux plus offrants, à savoir dans un premier temps les USA, une pétition, signée par des milliers de personnes dont des scientifiques de renommée mondiale ainsi que des personnalités de la société civile provenant du monde entier, réclame tout l’inverse !

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Appel pour mettre le futur vaccin contre le Covid 19 dans le domaine public 

 

Alors que la pandémie de Covid-19 continue de causer des ravages à travers le monde, la recherche d’un vaccin efficace se poursuit, tant dans l’industrie pharmaceutique que dans la recherche publique. En effet, tout le monde converge vers l’idée qu’en définitive, la seule façon d’éradiquer définitivement la pandémie est de disposer d’un vaccin qui puisse être administré à tous les habitants de la planète, que ce soit en milieu urbain ou rural, aux femmes comme aux hommes, vivant dans les pays riches ou des pays pauvres.
 
L’efficacité d’une campagne de vaccination repose sur son universalité. Les gouvernements doivent le rendre accessible gratuitement. Seules les personnes qui souhaitent bénéficier de services spéciaux peuvent payer pour ces services et pour le vaccin.
 
Pour être accessible à tous, les vaccins doivent être libres de tout brevet. Ils doivent être du domaine public. Ceci permettra aux gouvernements, aux fondations, aux organisations caritatives, aux philanthropes et aux entreprises sociales et solidaires (c’est-à-dire les entreprises créées pour résoudre les problèmes des gens sans en tirer profit) de le produire et/ou le distribuer partout dans le monde.
 
La découverte d’un nouveau vaccin est un processus long (estimé à 18 mois dans le cas de l’actuelle pandémie, ce qui est un record absolu de vitesse). Cette recherche est couteuse. De nombreux laboratoires de recherche commerciaux qui se consacrent à cette recherche s’attendent à un retour sur investissement élevé. Il faut trouver une façon qui permette un retour sur investissement juste en échange de sa mise dans le domaine public. La chose la plus importante est de mettre le résultat dans le domaine public, afin de le rendre disponible pour être produit par quiconque dans le respect des processus règlementaires internationaux.
 
Les gouvernements, ou un groupe de gouvernements ou de fondations, des philanthropes, des organisations internationales comme l’OMS, avec des soutiens privés et publics, peuvent en fournir le financement.
 
Mais la question éthique cruciale qu’il faut résoudre est celle de déterminer le montant des retombées qu’un laboratoire ou un inventeur peuvent s’octroyer pour un médicament sauvant des vies et nécessaire par tous les habitants de la planète.
 
En même temps, il faut aussi considérer l’honneur et la reconnaissance mondiale que l’on donne à l’inventeur ou aux inventeurs et aux laboratoires qui mettent cette découverte dans le domaine public de manière inconditionnelle, sans contrepartie financière ou à prix coûtant.
 
Dans ce contexte, des précédents peuvent nous inspirer. C’est l’histoire du vaccin contre la polio. Dans les années 1950, la polio était une maladie terrible, aussi causée par un virus, qui affectait les enfants (environ 20 000 cas par an), causant une paralysie à vie. Jonas Salk (1914-1995), un biologiste américain, a inventé le premier vaccin contre la polio. Pour développer ce vaccin, il a reçu un financement d’une Fondation fondée par le Président Roosevelt, avec des dons de millions d’américains. Sans compter la participation de 1,4 millions d’enfants sur lesquels le vaccin a été testé.
 
Les chercheurs développant des innovations thérapeutiques comme les vaccins ont besoin de la coopération de tous. Un vaccin ne peut fonctionner que si des inoculations sont réalisées à grande échelle.
 
Salk n’a jamais breveté son invention. Il n’a pas demandé de droits d’auteur. La seule chose qui l’intéressait était de diffuser le vaccin le plus largement possible, aussi vite que possible.
 
C’est le bon moment pour mettre en place une norme mondiale où nous ne serions pas aveuglés par l’argent, oubliant la vie de milliard de gens.
 
Catherine Belzung, Professeure de Neurosciences à l’Université de Tours
Antonine Nicoglou, Maîtresse de conférences à l’Université de Tours
Luigino Bruni, Professeur à l’Université LUMSA, Rome
Muhammad Yunus, Professeur, Prix Nobel de la Paix 2006, Bangladesh

 

Je signe pour que le futur Vaccin contre Covid 19 soit mis dans le domaine public : cliquez ici pour signer

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17 mai 2020 7 17 /05 /mai /2020 08:59
Article d'Yvon Huet dans la Vie Nouvelle de mai-juin 2020 sur l'inauguration du nouveau musée de la résistance de Champigny sur Marne avec Lucienne Nayet
Article d'Yvon Huet dans la Vie Nouvelle de mai-juin 2020 sur l'inauguration du nouveau musée de la résistance de Champigny sur Marne avec Lucienne Nayet
Article d'Yvon Huet dans la Vie Nouvelle de mai-juin 2020 sur l'inauguration du nouveau musée de la résistance de Champigny sur Marne avec Lucienne Nayet

Un article de Yvon Huet sur Lucienne Nayet et l'inauguration du nouveau musée de la résistance nationale a Champigny-sur-Marne dont elle est la présidente, c'est dans la revue Vie nouvelle, revue nationale des retraités CGT, mai-juin 2020.

Article transmis par Jean-Luc Le Calvez

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17 mai 2020 7 17 /05 /mai /2020 05:59
Photo France Chapa - Meeting de Ian Brossat à Rennes

Photo France Chapa - Meeting de Ian Brossat à Rennes

Jeudi, 14 Mai, 2020 - L'Humanité
Déconfinement : « Les maires considèrent que l’État a été absent », affirme Ian Brossat

Entretien. La Coopérative des élu.e.s communistes et partenaires a enquêté auprès des maires qui en sont membres sur la préparation du déconfinement et la gestion de la crise sanitaire. Entre colère, détermination et exigence, Ian Brossat, le président de l’association, en dresse le bilan.

 

Nombre de maires pointent des problèmes liés à la question des masques. Quelles sont les principales critiques et est-il encore temps de redresser la barre ?

Ian Brossat La centaine de maires qui nous a répondu considère unanimement que dans cette affaire l’État a été absent. Nombre d’entre eux parlent d’une gestion « lamentable », « consternante », « catastrophique » ou encore « calamiteuse ». L’un d’eux va même jusqu’à dire, reprenant la métaphore du président de la République : « On nous envoie en guerre, sans les armes. » Dans le même temps cependant, une grande majorité de communes déclarent qu’elles auront les masques, parfois en retard certes. Les communes permettent cet accès à un équipement minimal. Mais au vu du risque que l’épidémie s’installe pour les mois à venir, il va bien falloir que l’État prenne le relais et assume pleinement ses responsabilités. C’est la raison pour laquelle le Parti communiste réclame le remboursement des masques par la Sécurité sociale. Il n’est pas normal que des familles aient à consacrer parfois 100-150 euros de budget pour se protéger et protéger les autres.

La réouverture des écoles a suscité de nombreuses inquiétudes. Quel bilan de la préparation de ce déconfinement ressort de votre enquête ?

Ian Brossat Les maires soulignent unanimement que cette affaire, elle aussi, a été très mal gérée par l’État. 70 % d’entre eux considèrent que l’ouverture des écoles au 11 mai a été prématurée. Ce taux est particulièrement élevé dans les communes rurales. Dans les communes populaires de la métropole parisienne, les maires considèrent que l’absence d’école pendant une longue période dans ces quartiers pèse très lourdement sur la vie des enfants de milieux modestes. C’est l’une des motivations qu’ils pointent pour la réouverture des écoles. Tous considèrent que l’État ne leur a pas donné de consignes claires et facilement applicables. Néanmoins, et c’est là encore un paradoxe, 63 % d’entre eux déclarent être en mesure de rouvrir cette semaine. Cela témoigne de l’esprit de service public qui les anime. Ils réussissent grâce à leur énergie, leur dévouement et celui des agents à assumer des responsabilités qui au départ ne devraient pas leur incomber.

Les maires, en première ligne, font face à une autre question, celle des moyens financiers grevés par des dépenses imprévues. Quel est l’état des lieux et qu’attendez-vous du gouvernement ?

Ian Brossat L’impact est doublement négatif. D’une part, des dépenses supplémentaires interviennent à court terme avec les masques, la désinfection des écoles, l’adaptation des locaux, etc., comme à moyen terme avec l’augmentation des dépenses sociales. Dans le même temps, les recettes vont très sérieusement baisser. Les estimations sont claires : les pertes cumulées des collectivités territoriales en 2020 et 2021 risquent de s’élever à 4,9 milliards d’euros parce que leurs ressources sont très liées à la conjoncture. Il va y avoir un vrai choc sur leurs finances. On ne peut pas leur demander de faire toujours plus avec toujours moins. Le gouvernement - qui a redécouvert les maires à l’occasion de la crise des gilets jaunes et qui les a re-redécouverts à l’occasion de cette crise du coronavirus - va devoir donner des moyens nouveaux aux collectivités territoriales pour faire face. Les élus communistes travaillent en ce moment avec nos sénateurs à une proposition de loi à cette fin, notamment via un fonds de soutien de 4,9 milliards d’euros sur deux ans.

L’organisation au mois de juin des élections municipales trouve de nombreux soutiens. Quelle est votre position ?

Ian Brossat Nous disons une chose assez simple : la décision relative aux élections municipales doit être guidée par des impératifs sanitaires et non pas politiciens. C’est pourquoi nous étions très hostiles à l’idée d’un report de ce scrutin au mois de mars 2021, couplé aux régionales, qui circulait il y a encore quelques mois. Nous souhaitons que le gouvernement s’en tienne au calendrier prévu. Si sur la base du rapport des autorités sanitaires qui doit être rendu le 23 mai il apparaît possible de tenir le deuxième tour à la fin juin, nous y sommes favorables.

L’argument économique est aussi avancé, peut-il s’entendre ?

Ian Brossat Si les écoles, les magasins, les chantiers peuvent reprendre, il n’y a aucune raison que les élections municipales ne puissent pas se tenir, sauf contrordre des autorités sanitaires. Il est également vrai que les collectivités territoriales par leurs investissements contribuent très largement à l’économie, et notamment pour le BTP. Or, de fait, tant que le deuxième tour n’a pas lieu dans les 5 000 communes concernées, qui représentent 40 % de la population, une bonne part des projets sont à l’arrêt et cela pèse notamment sur ce secteur très pourvoyeur d’emplois.

Entretien réalisé par Julia Hamlaoui
Déconfinement : Les maires considèrent que l’État a été absent , affirme Ian Brossat (L'Humanité, 14 mai 2020)
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17 mai 2020 7 17 /05 /mai /2020 05:46
4 milliards d'euros versés aux actionnaires cette année - L'obscénité du libéralisme sauce SANOFI - Pierre Laurent

L'obscénité du libéralisme sauce #SANOFI est à vomir

Paul Hudson, directeur de Sanofi au niveau mondial, a dit clairement où penchait le coeur des actionnaires : du côté de celui qui met le plus de dollars sur la table. Les vaccins du Covid-19 iront d'abord là où çà rapporte, aux Etats-Unis. La France doit d'urgence reprendre la main de cette multinationale à base française.

Cette annonce fait suite au versement de 3,949 milliards d'euros le 6 mai dernier aux actionnaires et alors que ce groupe a englouti plus d'un milliard d'aides publiques sous forme de CICE et de CIR.

Voici le vrai visage du capitalisme qui se frotte les mains quand il y a une pandémie mondiale.

Si la santé n'est pas une marchandise, mais un bien commun de l'humanité, le groupe pharmaceutique SANOFI doit être intégré dans un pôle public français du médicament. Fort de ce pôle public la France pourrait reprendre l'initiative au niveau de l’Union européenne pour garantir une coopération industrielle internationale qui contribue le moment venu à un accès universel au vaccin contre le Covid-19.
Arrachons le médicament aux griffes du marché et de la rentabilité à tout prix !

#PlusJamaisCa

Vendredi, 15 Mai, 2020 - L'Humanité
Le chantage de trop de Sanofi : Big Pharma ne peut plus faire la loi

En prétendant délivrer son éventuel vaccin d’abord à l’Amérique de Donald Trump, Sanofi fait scandale, et dope les partisans d’une remise au pas des multinationales, afin de répondre aux besoins sanitaires sur la planète. D'autant que ce chantage du géant pharmaceutique n’est que la pointe émergée d'un système de prédation d'argent public et de restriction de l'accès aux traitements. Explications.

 

Le directeur général de Sanofi pouvait-il imaginer le scandale qu’il allait déclencher ? Mercredi soir, Paul Hudson a, avec ou sans naïveté, déclaré à l’agence de presse financière Bloomberg qu’en cas de mise au point réussie d’un vaccin contre le nouveau coronavirus par la multinationale française, les États-Unis seraient les premiers servis. Rien de plus normal, à ses yeux : pour essayer de protéger sa population, l’administration Trump aurait accepté de « partager le risque » en glissant quelques dizaines de millions d’euros à Sanofi dès le mois de février ; ils ont donc « droit aux plus grosses précommandes ». Au fond, le transfuge de Novartis qui a pris la tête de Sanofi l’été dernier n’a rien fait d’autre qu’édicter la règle cardinale des affaires au sein des Big Pharma : « Celui qui paye commande. » C’est le business, quoi !

Voir aussi : Le business du coronavirus : comment l'industrie pharmaceutique veut dicter leur conduite aux politiques

Un géant qui bénéficie de milliards d’euros de la BCE

Mais voilà, tout remonte à la surface. Les superprofits, les pénuries, les logiques financières à l’œuvre dans la recherche qui doit être rentable, la privatisation des profits émanant de connaissances bâties dans un cadre public au départ, les aides d’État sans aucune contrepartie, etc. Sur ce dernier point, en plus du crédit d’impôt compétitivité emploi (Cice), du crédit d’impôt recherche (CIR) et des autres cadeaux donnés aveuglément en France, Sanofi se débrouille très bien en la matière à l’échelle européenne. Le géant pharmaceutique français était, l’année dernière, parmi les trois plus gros bénéficiaires de la manne de la Banque centrale européenne (BCE), à travers ses achats d’obligations émises par les multinationales (voir notre enquête) : d’après une estimation arrêtée en juillet 2019 par le quotidien économique italien Il Sole 24 Ore, ce sont 4,42 milliards d’euros au total qui lui avaient été apportés, et depuis lors, ce montant a, à l’évidence, encore gonflé, étant donné que la BCE vient d’acheter deux nouveaux lots de titres de dettes de Sanofi ces dernières semaines, au taux défiant toute concurrence de 1 % et 1,5 %.

Les États-Unis, eldorado des labos pharmaceutiques

Paul Hudson s’étend moins sur un autre aspect qui peut expliquer le privilège que Sanofi voudrait accorder aux États-Unis : pour les grands groupes pharmaceutiques mondiaux, le pays demeure un eldorado absolu car les prix des traitements et des vaccins n’y sont pas encadrés, et du coup les bénéfices attendus peuvent vite s’avérer mirobolants. Jeudi, Olivier Bogillot, le président de Sanofi France, a, lui, choisi d’en rajouter dans une forme d’enchère, en appelant l’Union européenne à être « aussi efficace » que Donald Trump « en nous aidant à mettre à disposition très vite ce vaccin ». Une manière de reluquer allègrement sur le pactole de 7,4 milliards d’euros amassé dans le cadre d’un appel aux dons, avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la fondation Bill et Melinda Gates notamment, lancé il y a une quinzaine de jours par Bruxelles…

Des accords avec Gilead, détenteur du brevet du Remdevisir

Le chantage de Sanofi n’est, en réalité, que la pointe émergée de l’iceberg, comme l’illustre une autre information tombée à peu près au même moment. Connue pour ses tarifs souvent prohibitifs sur le marché américain, la multinationale Gilead, détentrice des brevets sur le Remdevisir, un des traitements qui, malgré des résultats controversés jusqu’ici, figure dans divers essais cliniques en cours pour soigner les malades atteints par le nouveau coronavirus, a officialisé un accord de licence avec plusieurs autres labos dans le monde afin de permettre une production et une distribution plus importante de ce médicament, développé dans la sphère de la recherche publique avant d’être privatisé. Mais ce programme écarte, d’après l’ONG états-unienne Public Citizen, près de 3,7 milliards de personnes dans le monde entier qui devront toujours passer par Gilead, selon ses capacités de production et à ses conditions financières, pour obtenir le traitement éventuellement efficace.

Vaccins et traitements, des biens publics 

Un accès universel à des tarifs abordables sur la planète pour tous les futurs médicaments et vaccins contre le Covid-19… Cette exigence de civilisation a pris une ampleur sans précédent depuis le début de la pandémie. Elle sera au centre de l’assemblée générale de l’OMS qui démarre mardi prochain, en l’absence des États-Unis, qui ont suspendu leur participation financière à cet organisme multilatéral sans doute plus nécessaire que jamais.

Voir aussi : Pourquoi Donald Trump torpille l'OMS en pleine pandémie

En dépit du sabotage de Donald Trump et de ses alliés, comme le Brésilien Jair Bolsonaro, de plus en plus de dirigeants se positionnent sur la ligne d’un classement comme « biens communs mondiaux » des éventuels vaccins anti-coronavirus. « Ce n’est pas le moment de placer les intérêts des multinationales et des gouvernements des pays les plus fortunés au-dessus de l’impératif universel qui est de sauver des vies, ou de laisser ce devoir moral aux forces du marché, écrivent le premier ministre pakistanais, Imran Khan, le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, et une cinquantaine d’ex-chefs d’État et de gouvernement dans une tribune parue ce jeudi. L’accès aux vaccins et aux traitements, ces biens publics mondiaux, est dans l’intérêt de toute l’humanité. Nous ne pouvons pas laisser les monopoles, le jeu de la concurrence et les nationalismes bigleux se mettre en travers du chemin. »

Un appel à la coopération mondiale

Alors que l’Union européenne soumet une proposition à l’assemblée générale de l’OMS visant à constituer sous l’égide de l’institution multilatérale un pôle d’échanges sur les traitements et vaccins anti-Covid-19, les coalitions d’ONG et d’associations essaient de se faire une place dans un cadre où les représentants de Big Pharma ont encore leurs entrées, à la différence des citoyens. Dans un communiqué publié ce jeudi et signé par 250 organisations du monde entier (dont Oxfam, MSF, Attac), elles appellent à entrer résolument dans une logique de « solidarité » et de « coopération mondiale ». « Le développement de médicaments, en s’appuyant sur des monopoles privés, est un échec pour le monde, dénoncent-elles. Les gouvernements devraient soutenir une recherche scientifique librement disponible et des pratiques de recherche pour les besoins sanitaires liés au Covid-19 qui permettent d’allier innovation et l’accès aux résultats. Les propriétaires des technologies de santé devraient placer les brevets, les secrets industriels, le savoir-faire, les cellules souches, les droits d’auteur, les logiciels, les données et toute autre propriété intellectuelle pertinente dans le domaine public. »

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