Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
9 octobre 2020 5 09 /10 /octobre /2020 08:10

 

Fin août dernier, le groupe Véolia a lancé une OPA sur le groupe Suez, pour 32 % des parts détenues par le Groupe ENGIE.

Dans ce contexte de compétition nationale et internationale de plus en plus aigue, cette opération concernant deux géants de la gestion de l'eau et des déchets exige la tenue dans les plus brefs délais d'une conférence national avec un vrai débat démocratique, conduit par l'Etat et associant tous les acteurs concernés : des collectivités jusqu'aux usagers, en passant évidemment par les salariés des deux groupes et leur direction.

 

 

Les récentes révélations médiatiques confirment en effet qu'une telle restructuration d'acteurs essentiels à la gestion de l'eau, des déchets et de l'énergie, ne sauraient s'opérer dans le secret des conseils d'administration des entreprises, autour de seuls enjeux capitalistiques, fussent-ils pour affirmer la primauté d'un groupe français sur la scène internationale.

Le débat qui s'est ouvert avec l'OPA concerne en effet des questions essentielles pour les usagers, pour notre pays et bien au-delà de nos frontières : l'eau, sa distribution dans un contexte économique et social déjà très grave et dans une trajectoire climatique de plus en plus inquiétante et la collecte et le traitement des déchets.

4000 emplois pourraient être menacés selon les syndicats, dans deux groupes réalisant 27 milliards  d'euros de chiffre d'affaires pour pour VEOLIA et 18 milliards pour Suez. Une telle catastrophe sociale est à ce titre inacceptable. Elle pourrait en outre s'accompagner d'une vente à la découpe des activités de collecte et de traitement des déchets, avec un affaiblissement des services dus aux collectivités et aux usagers et un coût de collecte et de traitement plus élevé pour les populations.

Plus largement, le PCF considère tout particulièrement l'eau comme un bien commun de l'humanité. Sa gestion ne peut donc relever de seuls intérêts privés et de stratégies de concurrences toujours plus exacerbées, mais au contraire viser à l'égalité territoriale dans la République (le M3 est deux fois plus cher en Guyane qu'en Provence Alpes Côtes d'Azur) et permettre d'agir concrètement pour la gratuité des 3 premiers mètres cubes.

Elle doit doit aussi permettre de mobiliser les atouts de tous les acteurs, privés et publics, pour viser a satisfaire les besoins des usagers, des entreprises, des services publics, en bref, de toute la société.

Pour ce faire, alors que peut se constituer un quasi monopole dans le cadre de l'OPA Véolia-Suez, le Parti communiste français appelle l'Etat à prendre l'initiative de constituer un grand service public national de l'eau, avec la création d'un pôle public réunissants tous les acteurs économiques, garantissant l'égalité du prix de l'eau et de l'accès à tous et partout sur le territoire national, fédérant les acteurs publics aujourd'hui dispersés, coordonnant les investissements publics et privés indispensables, faisant converger les compétences et les savoir-faire.

Cet outil au service de la maîtrise publique de l'eau doit permettre une gestion démocratique, associant les usagers, les collectivités et leurs syndicats, les régies et Sociétés d'Economie mixte, le Parlement et tous les acteurs de la filière.

C'est pour le PCF une condition indispensable à la défense de l'emploi et des savoir faire dans les groupes de la filière, mais aussi un levier indispensable pour garantir une gestion de cette ressource conforme aux ambitions écologiques que doivent porter la France et l'Europe. 

 

Partager cet article
Repost0
8 octobre 2020 4 08 /10 /octobre /2020 07:23

 

C'est en pleine conscience de la situation catastrophique de nos betteraviers que les députés communistes se sont opposés à la réintroduction des noénicotinoïdes. Ils l'ont fait en portant des propositions pour sortir de cette impasse et éviter une nouvelle campagne de dénigrement de nos agriculteurs.

 

 

Ce retour en arrière n'est pas une réponse acceptable. Il occulte la dangerosité de cette catégorie de pesticides au caractère cancérogène probable, qui contribue également à l'effondrement des populations d'insectes et notamment des abeilles. Il ouvre la porte à d'autres régressions, à d'autres dérogations dans d'autres secteurs, masque les difficultés et la misère de la recherche publique et montre que l'Etat n'a aucun scrupule à sacrifier la sécurité des populations et du cadre de vie.
 
Suite à de très nombreuses mobilisations, l'interdiction des néonicotinoïdes avait été actée lors du vote de la loi biodiversité en 2016, défendue à l'époque par la secrétaire d'État Barbara Pompili, aujourd'hui Ministre de l'Ecologie, opportunément absente du débat au Palais-Bourbon.
En fait, ce gouvernement mène une politique d'effets d'annonce dans le but de verdir sa politique pour réaliser ensuite l'inverse. Au lieu de dynamiser la recherche publique pour mettre au point un produit de remplacement et de nouvelles pratiques agricoles, il a laissé le temps passer et les agriculteurs devant le parasite.
La réalité, c'est que les betteraviers sont confrontés aux règles de la concurrence libéral mondialisée. Cette réalité exige des réponses politiques et un accompagnement de l'Etat à la hauteur des enjeux, en instaurant notamment un régime public d'assurance et de gestion des risques en agriculture.
Ne laissons pas faire cette nouvelle capitulation au détriment des hommes et de la planète. Oui, ne touchons pas à l'essentiel !

 

Partager cet article
Repost0
8 octobre 2020 4 08 /10 /octobre /2020 07:18

 

 

La pêche et l’aquaculture constituent des secteurs économiques d’une ampleur relativement modeste, et pourtant essentiels sur le littoral. Notre pays possède un grand linéaire côtier… et pourtant nous sommes importateurs de produits de la pêche.

*Michel Le Scouarnec est ancien maire de Auray, ancien sénateur.

La pêche française est très variée : pêche maritime sur des navires embarqués, mais aussi pêche à pied. La pêche maritime repose sur un peu plus de 7000 navires, dont 4500 en métropole et 2500 dans les outre-mer. Notre flotte est essentiellement artisanale : on compte moins de 1 000 navires de plus de 12 m et moins de 200 navires de pêche industrielle de plus de 25 m. On compte près de 16000 marins, dont près d’un tiers en Bretagne, mais les emplois en mer génèrent d’autres emplois à terre. À Lorient, par exemple, il faut ainsi multiplier par trois le nombre de marins pour avoir le total des emplois générés par la pêche. Notre flotte de pêche débarque chaque année 550000 t de poissons, crustacés et coquillages, générant un chiffre d’affaires de 1,1 milliard d’euros. Ces chiffres incluent les thoniers senneurs tropicaux, qui assurent à eux seuls 150 millions de chiffre d’affaires.

L’aquaculture constitue l’autre volet de l’exploitation de la mer. La France est le deuxième producteur aquacole européen, avec 160 000 t et presque 550 millions de chiffre d’affaires pour la conchyliculture, et 40 000 t et 125 millions de chiffre d’affaires pour la pisciculture ; 3 000 entreprises pourvoient plus de 8 500 emplois (en équivalents temps plein). La production d’huîtres domine l’aqua - culture française, notre pays assurant 85 % de la production européenne. Pourtant nous sommes très déficitaires en produits de la mer. Nos importations représentent entre 80 et 85 % de notre consommation, essentiellement saumon, crevettes et cabillaud. Il en résulte un déficit commercial de 4,5 milliards d’euros. Pour le réduire, on peut mettre en place une nouvelle dynamique des filières pêche et aquaculture, pour mieux profiter de notre façade maritime de 7 200 km de côtes, tant en métropole qu’outre-mer.

Le faible développement de l’aquaculture marine, en dehors des productions traditionnelles d’huîtres et de moules, est au demeurant incompréhensible, alors que partout dans le monde, et en particulier en Asie, c’est l’aquaculture qui a permis de répondre à la demande croissante de produits alimentaires venant de la mer.

La conjoncture est plutôt positive aujourd’hui pour les pêcheurs et aquaculteurs : les prix du poisson, à la différence de ceux de la viande, se maintiennent à des niveaux élevés. De surcroît, les faibles cours du pétrole donnent une bouffée d’oxygène aux navires de pêche, gros consommateurs de carburant. La période actuelle permet donc de relancer une dynamique d’investissements et de progrès dans la pêche et de favoriser l’essor de l’aquaculture marine, au point mort depuis de nombreuses années.

Le comité interministériel de la mer d’octobre 2015 a plaidé en ce sens, prévoyant de simplifier les dispositions relatives aux autorisations de pêche. Le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) est doté de 588 millions d’euros, auxquels s’ajoutent les aides régionales, soit, en tout, près de 800 millions d’aides publiques sur sept ans pour la pêche et l’aqua - culture; la modernisation de la pêche doit en être le but et doit être menée dans le strict respect des exigences sanitaires et environnementales. 

Au port de La Rochelle, des marins-pêcheurs débarquant leur pêche. Une partie est chargée dans un camion, l’autre partie sera vendue sur place à la criée.

POUR UNE GESTION DURABLE DES RESSOURCES HALIEUTIQUES

La ressource dépend, outre la lutte contre les pollutions océaniques, de la façon dont on l’exploite. En matière de pêche, la politique commune de la pêche (PCP) met en oeuvre une gestion équilibrée et strictement contrôlée. Des progrès techniques sont attendus pour adapter les filets aux nouvelles réglementations européennes. Ceux-ci éviteraient la capture des poissons qui ne « font pas la taille ». Les deux derniers rapports de l’Union européenne indiquent que certains stocks sont en voie de reconstitution, même si les poissons se déplacent.

Un accord a été trouvé sur les totaux admissibles de captures (TAC) des espèces d’eau profonde pour 2019 et 2020. Ce compromis tient compte des enjeux de durabilité propres à ces espèces, tout en préservant les intérêts de la flotte française, en particulier face au défi de l’obligation de débarquement généralisée en 2019. Pour les stocks principalement pêchés par les navires français, la diminution du TAC de dorade rose n’a été limitée que de 10 % et sera complétée par des mesures nationales en vue de protéger les juvéniles. Les TAC de sabre noir et de grenadier de roche ont diminué respectivement de 5 % et 18 % en 2019 et seront stables en 2020. Aujourd’hui encore plus qu’hier, il faut répondre aux attentes fortes des citoyens européens en matière de qualité et de sécurité de leur alimentation ainsi que de préservation des ressources naturelles. En matière d’aquaculture, aucun développement n’est possible sans maîtrise et de la qualité des eaux et des pollutions côtières, car cette activité est très sensible aux variations du milieu naturel. L’assainissement des effluents sur le littoral doit donc être renforcé.

L’aquaculture doit aussi avoir une reconnaissance juridique plus forte; elle était attendue pour donner une définition plus précise de l’aquaculture et renforcer la portée des schémas régionaux de développement de l’aquaculture marine, créés par la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche de 2010 mais qui n’ont jusqu’à présent produit aucun effet. Il s’agit aussi de renforcer l’arsenal juridique à disposition des pouvoirs publics pour faire respecter un niveau élevé de qualité des eaux conchylicoles. Ces propositions en matière de pêche et d’aquaculture font d’ailleurs consensus parmi les professionnels. 

DES NAVIRES ET DES HOMMES 

Le renouvellement des navires est encouragé dans le secteur de la pêche maritime avec l’élargissement de la définition de la pêche artisanale, et la meilleure gestion de la ressource est favorisée par l’attribution de pouvoirs disciplinaires accrus aux organisations de producteurs. En matière de discipline, il faudra réfléchir à l’élargissement des pouvoirs des gardes jurés pour lutter contre la pêche illégale et les pratiques illicites, en appui des services de l’État.

À côté du renouvellement des navires, nécessaire du fait d’une moyenne d’âge d’environ 25 ans (l’âge moyen des marins est de 41 ans), la proposition de loi encourage l’arrivée de nouveaux dirigeants dans les organisations professionnelles en limitant à 65 ans l’âge des élus au sein des comités de pêche maritime et des élevages marins. Reste la question du casier judiciaire des patrons pêcheurs, qui crée des difficultés à certains marins pour embarquer sur les navires. Le statut des dirigeants de coopératives maritimes et des élus au sein des comités de pêche doit être consolidé, car ces activités sont très prenantes et mal valorisées. En matière de pêche, il faut également que le confort et les performances des bateaux s’améliorent pour rendre le métier attractif.

Les ports de l’Atlantique (Lorient, Boulogne, Le Guilvinec) sont bien plus importants que ceux de Méditerranée (Sète, Marseille). La diversification de l’activité doit y être favorisée, et les professionnels fondent beaucoup d’espoirs sur le développement du pescatourisme. La pêche à pied emploie environ 1500 professionnels. Son importance a souvent été sous-estimée; la mise en place d’un fonds de mutualisation pour faire face à des événements climatiques ou sanitaires, fonds qui serait financé en partie par les crédits européens du FEAMP, est à envisager.

Enfin, l’information du consommateur sur l’origine des produits de la mer servis en restauration est un élément de nature à mettre en confiance et à favoriser la demande. Enfin, il faut insister sur le fait que la présence des flottes de pêche dans les différentes eaux du globe a un fort aspect géostratégique, au même titre que celle des flottes de commerce sur telle ou telle route, ou encore des flottes militaires. Il faut donc inclure les navires de pêche dans la flotte pour toute réflexion stratégique. 

LES ZONES DE PÊCHE APRÈS LE BREXIT  

Depuis le Brexit, les craintes sont fortes pour l’avenir… Une grande partie des pêcheurs français et européens vont dans les eaux britanniques. L’enjeu principal, en particulier pour les pêcheurs français, est l’accès aux zones Ouest, Écosse et Nord Irlande. La pêche française réalise seulement 19 %, en valeur, de ses prises dans les eaux britanniques, loin derrière la Belgique (50 %) et les Pays-Bas (34 %), mais en volume des captures la proportion grimpe à 50 % pour les pêcheurs bretons et à 75 % pour ceux des Hauts-de-France. Les volumes capturés dans les eaux britanniques sont vendus en Europe; le Royaume-Uni ne possède pas une flottille suffisante pour pêcher les stocks disponibles ni écouler ses produits.

Parcs à huîtres (Cancale). La production ostréicole domine l’aquaculture française.

Nous risquons une crise très grave si la Grande-Bretagne venait à nous interdire l’accès à son espace maritime; les conséquences ne sont pas évaluées avec précision pour le moment. Jusqu’à ce jour, Britanniques et Français jouaient gagnant-gagnant; demain, si nos pêcheurs sont écartés des zonages actuels autorisés, les conséquences seraient très lourdes. Et qu’en sera-t-il du débarquement de la pêche britannique dans nos ports pour sa transformation? Rien n’est réglé pour l’heure. Nous sommes actuellement dans une période de transition qui devrait permettre de déboucher sur un accord. Des négociations vont s’ouvrir fin février. Elles comporteront un dossier prioritaire: celui de la pêche. En cas de Brexit dur, donc en cas d’interdiction totale des trois zones de pêche britanniques, le risque serait considérable de voir de très nombreux navires venir pêcher au sud, dans le golfe de Gascogne, en concurrence avec ceux qui s’y trouvent déjà. Autre souci : la forte baisse des apports extérieurs, notamment venant des Britanniques (50 % des poissons vendus sous contrôle portuaire à Lorient proviennent aujourd’hui du Royaume-Uni). Ainsi, toute la filière serait touchée gravement : pêcheurs, mareyeurs, poissonniers, grande distribution, entreprises de transport… et de tous les ports français. Savoir partager la mer peut nous amener à un accord profitable à tous.

DÉVELOPPER L’AQUACULTURE 

Depuis la loi de 2010, des schémas pour l’aquaculture doivent être élaborés. Le saumon, par exemple, est l’espèce la plus importée en France. On aurait pu penser et espérer que le développement de l’aquaculture dans notre pays comblerait ce retard et ce déficit considérables, mais, hélas, elle ne démarre pas car sans investissements et sans acteurs. L’Europe n’a sûrement pas été efficace dans ce domaine.

La politique de développement de l’aquaculture doit viser à l’installation de fermes aquacoles en mer, ce qui est conforme aux objectifs des schémas régionaux de développement de l’aquaculture marine. Or l’aquaculture marine à terre, à proximité du littoral, rencontre des difficultés liées à la loi Littoral, particulièrement dans son application aux « dents creuses » rendues inconstructibles. Enfin, Ifremer doit mener des recherches car nous manquons de chiffres et de certitudes sur les ressources halieutiques existantes. Il nous faudrait un outil vraiment fiable et performant, mais Ifremer manque de moyens, comme le démontre la fermeture du site de La Trinité-sur- Mer (Morbihan). 

ASSURER LE RENOUVELLEMENT DE LA FLOTTE ET DES HOMMES 

S’il est important d’investir dans de nouveaux bateaux, il est urgent de développer les filières de déconstruction, tant pour la pêche que pour la plaisance, ce qui permettrait de créer beaucoup d’emplois et d’améliorer considérablement les conditions de travail. Et il faut aussi cesser d’entasser les épaves le long de nos côtes, c’est une action de dépollution indispensable.

Le renouvellement des générations est nécessaire à la pérennité de la pêche maritime. Malgré ses atouts, le métier de marin est difficile,mais il offre des possibilités d’évolution de carrière, de simple matelot à patron pêcheur, ou encore mécanicien. L’amélioration de la situation économique des entreprises de pêche a permis de revaloriser les rémunérations des pêcheurs, entre 2000 et 8 000 €. L’âge moyen des marins pêcheurs est de seulement 41 ans, mais l’activité est en partie assurée par des salariés de passage qui n’y font pas carrière, et la filière manque d’environ 800 à 1 000 matelots. La professionnalisation des marins constitue un enjeu fort.

Certains navires sont aussi restés à quai durant l’été 2015 à cause de recrutements insuffisants, notamment pour le segment de la pêche au large, pour des marées de plus d’une semaine… La modernisation des navires peut constituer la réponse en créant un outil de travail plus adapté, plus confortable pour de meilleures conditions de vie à bord. Un brevet de technicien supérieur (BTS) maritime spécifique à la pêche a été lancé en 2014. 

UNE GESTION QUI ASSURE LA PRÉSERVATION DU MILIEU MARIN ET DES ESPÈCES

Plusieurs directives de protection de l’environnement ont été prises par l’Europe. La principale directive environnementale applicable au milieu marin est la directive-cadre Stratégie pour le milieu marin (DCSMM). Adoptée en 2008, elle est le pilier environnemental de la politique maritime intégrée européenne. Elle engage tous les États membres à évaluer et à préserver la qualité de leur milieu marin. Elle vise à atteindre le « bon état écologique » en 2020. « Garantir l’utilisation durable des ressources de pêche » est l’objectif majeur qui renouvelle la cible de l’atteinte de rendement maximal durable (RMD) pour les stocks halieutiques, il se décline en 14 actions de l’Union européenne.

Des initiatives locales permettent d’avancer. Ainsi, à Lorient il y a la volonté de promouvoir une pêche raisonnable en utilisant des engins de pêche sélectifs qui permettent de réduire les rejets des poissons et crustacés qui n’ont pas la taille minimale de capture, en limitant les prises annexes en mer et en valorisant des coproduits à terre (têtes de poisson, arêtes, peaux), en collectant et en traitant les déchets rapportés au port, en réduisant des rejets de CO2 dans l’air par la diminution de la consommation de gazole grâce à la modification des trains de chaluts, en respectant les tailles minimales et les volumes de pêche autorisés par l’Union européenne, en soutenant la construction de nouveaux navires plus efficaces et moins impactants sur l’environnement.

L’économie bleue doit être source de développement durable et représente une richesse exceptionnelle pour peu que le monde en prenne soin.   

Partager cet article
Repost0
7 octobre 2020 3 07 /10 /octobre /2020 05:59

 

Thello c’était la première entreprise concurrente de la SNCF dans le transport de voyageurs. Elle opère depuis 2011. L’existence de cette compagnie était une nécessité politique pour les pouvoirs publics français afin de réaliser la concurrence et prouver que ça pouvait marcher. C’est pourquoi jusqu’en 2016, Transdev, propriété a 70% de la Caisse des Dépôts et Consignations (bras armé financier de l’Etat français) en est actionnaire aux côtés de Trenitalia, filiale de la compagnie publique italienne FS. Pour l’Italie, c’est un double objectif : répondre à l’agressivité de la SNCF sur le marché italien, et aussi acquérir un certificat de circulation et se forger un nom et de l’expérience dans le transport de voyageurs en France afin de se préparer à s’attaquer au Graal (les concessions de TER dont la rentabilité est garantie par les subventions publiques et dont il était programmé l’ouverture à la concurrence quelques années plus tard). La mort du train Paris Venise était donc presque annoncée à la création lorsque l’ouverture à la concurrence permettrait de se lancer sur d’autres segments.

Le modèle choisi par Thello est d’ailleurs caractéristique : très peu d’investissement dans le matériel roulant, sous-traitance de presque toutes les tâches (donc engagement social minimal), et aucune création d’autres liaisons en 10 ans.

Résultat : la Valeur ajoutée de l’entreprise est NÉGATIVE et elle est déficitaire à hauteur d’environ un quart de son CA chaque année depuis 2011. Ce modèle n’a donc aucun avenir. Il faut dire aux salariés de Thello qu’ils ont été bernés, utilisés, exploités, et aujourd’hui sacrifiés.

Pourquoi ce modèle n’avait pas d’avenir ? Parce que c’est celui d’une « PME du ferroviaire », qui se concentre sur un seul trafic (ou un nombre réduit). Or le ferroviaire, avec ses coûts fixes importants, nécessité au contraire une politique de volumes (diminuer le poids relatif des coûts fixes en les amortissant sur le plus grand nombre de trains possible) et une industrialisation de ses process (salariés spécialisés travaillant sur ce grand nombre de trains et d’activités). Le modèle de PME est donc très coûteux. Le patronat tente de compenser ce défaut en exploitant au maximum les salariés, en leur imposant une grande polyvalence et en pressant encore plus les sous-traitants. Mais même comme cela, ça ne marche pas. Thello en est la démonstration (de même que les petites compagnies privées de Fret). C’est en partie pour cela que la CGT s’oppose au système de concessions TER et TET, et à la concurrence dans le Fret, car elles encouragent la création de PME sur des bouquets restreints de lignes. Dans le cas du TER et du TET, l’inefficacité économique du modèle devrait être masqué par les subventions publiques. Mais cela signifie que l’argent public va être gaspillé. Dans le cas du FRET, les déficits des compagnies étaient bien visibles et confirmaient notre analyse. Ils seront désormais masqués eux aussi par des subventions publiques (200 millions par an, annoncés dans le cadre du plan de relance).

La CFDT appelle l’état à subventionner Thello. Ce n’est pas une bonne solution pour de multiples raisons :

1) cela revient à valider le financement public d’intérêts (donc de profits) privés.

2) cela revient à gaspiller de l’argent public pour soutenir un modèle structurellement inefficace.

3) cela revient à favoriser le morcellement du système ferroviaire en de multiples PME avec la conséquence de développer la sous-traitance, la polyvalence, la sous qualification des postes, et donc le dumping social.

La seule solution viable pour le train Paris-Venise (comme pour les autres et pour le Fret) est sa reprise par l’entreprise publique SNCF. Les salariés pourraient facilement être intégrés par la SNCF.

Pour la rationalisation de l’utilisation de l’argent public et pour répondre aux besoins de la société, il faudra ensuite poser l’exigence d’un retour à une politique publique de volumes voyageurs et marchandises (développement des liaisons de jour y compris sur les petites lignes, relance massive du train de nuit, etc...) et l’abandon des carcans juridiques qui empêchent l’efficacité économique du modèle publique (autoriser à nouveau la mutualisation des moyens humains et matériels entre toutes les activités, abandonner les processus d’appel d’offre coûteux en ressources juridiques, et retour à une structuration pour l’efficacité de la production et non pour coller au découpage des marchés).

Laurent BRUN

Cheminot syndicaliste

 

Partager cet article
Repost0
6 octobre 2020 2 06 /10 /octobre /2020 06:02

 

BERNARD FRIOT - Sociologue et économiste

La création en 1946 du régime général de Sécurité sociale par la mobilisation massive des militants communistes de la CGT sous l’impulsion d’Ambroise Croizat a été le commencement de trois mutations considérables du salaire et de la production. Une partie du salaire a échappé aux employeurs, car elle a été socialisée selon un taux de cotisation unique interprofessionnel et gérée dans des caisses où les représentants élus des travailleurs étaient majoritaires. Une partie du salaire a été déconnectée de l’emploi et liée à la personne : les parents de deux enfants et plus percevaient un salaire indexé sur celui des ouvriers de la métallurgie et les retraités un remplacement de leur salaire de référence. Une partie du salaire a consisté en monnaie en nature pour soutenir une production des soins de santé (10 % du PIB) libérée du capital : investissement hospitalier subventionné par l’assurance-maladie, soignants fonctionnaires ou libéraux passant convention avec la caisse, production des médicaments dans des entreprises publiques.

La meilleure défense, c’est l’attaque ! Défendre la Sécu, c’est mobiliser pour sa généralisation : toutes les productions et tout le salaire doivent être mis en sécurité sociale.

Premièrement, le salaire doit entièrement échapper aux employeurs. La valeur ajoutée est partagée aujourd’hui entre les revenus du travail et ceux du capital, donc entre ceux qui la produisent et ceux qui la parasitent. Au contraire, toute la valeur ajoutée doit être cotisée dans le régime général de Sécurité sociale, qui, géré par les travailleurs-citoyens sans patron ni État, versera tous les salaires et prestations sociales. Y compris aux travailleurs indépendants. Qu’elles soient individuelles ou collectives, les entreprises cotiseront et c’est le régime général qui versera les rémunérations, ce qui permettra de mutualiser les ressources des secteurs riches et des secteurs pauvres.

Deuxièmement, la totalité du salaire doit être liée à la personne, de sa majorité à sa mort. Le salaire doit devenir un droit politique, universel pour tout adulte résident. Les seuls travailleurs à avoir conservé leur salaire pendant le confinement ont été les fonctionnaires, parce qu’ils sont payés pour leur grade, un attribut de leur personne, et non pour leur poste, et cette situation doit devenir la norme pour tous les adultes. Il faut distinguer la validation sociale des activités comme travail (toute activité n’est pas du travail, et il est d’ailleurs très important que tout dans notre vie ne relève pas de la valeur économique) et la reconnaissance des personnes comme travailleuses. Cette reconnaissance doit être constante, sans accrocs de chômage, de handicap, d’insertion ou de retraite. Comme le dit la CGT, la qualification doit passer du poste à la personne. À 18 ans, chacun, quel que soit son passé scolaire ou son handicap, doit devenir titulaire du premier niveau de qualification et donc de salaire, soit le Smic revendiqué (1 700 euros net). Le confinement a montré que les premières de corvée sont à la fois très mal payées et bien plus nécessaires que les premiers de cordée : une hiérarchie des salaires de 1 à 3 paraît raisonnable, avec donc un salaire plafond de 5 000 euros. La carrière salariale, entre 1 700 et 5 000 euros, pourrait s’opérer à la fois par une progression à l’ancienneté et par des épreuves de qualification.

Troisièmement, une hausse massive des salaires par de la monnaie en nature doit engager la mise en sécurité sociale de bien d’autres productions non capitalistes que les soins. Quand on sait que le salaire médian est de 1 700 euros par mois, porter le salaire minimum à 1 700 euros revient à augmenter la moitié des salaires et la majorité des pensions de retraite et allocations de chômage, et, en aval, une partie des salaires supérieurs au salaire médian. Comme dans les années 1960-1970 pour l’accès aux soins de santé, cette hausse se fera par de la monnaie en nature. Notre carte Vitale sera abondée chaque mois de plusieurs centaines d’euros qui ne seront dépensables qu’auprès de professionnels conventionnés, qu’ils soient producteurs ou distributeurs d’alimentation, de transports de proximité, de logement, d’énergie ou de culture, etc. La liste n’est pas exhaustive. Et, bien sûr, ne seront conventionnés que les entreprises et indépendants dont les travailleurs, payés à la qualification personnelle, sont les propriétaires d’usage de l’outil et donc décident du travail.

La production de ces branches sera définie, dans son contenu et ses méthodes, par délibération entre les parties prenantes dans des caisses de Sécurité sociale à déclinaisons territoriales diverses selon les productions. Les caisses subventionneront l’investissement, qui ainsi échappera aux banques et groupes financiers. Nous assurerons par la souveraineté populaire une part suffisante de la production pour libérer notre économie du chantage capitaliste et poursuivre victorieusement la lutte pour le communisme.

Partager cet article
Repost0
5 octobre 2020 1 05 /10 /octobre /2020 06:01

 

CATHERINE MILLS MAÎTRESSE DE CONFÉRENCES HONORAIRE, DIRECTRICE DE LA REVUE ÉCONOMIE ET POLITIQUE

La création de la Sécurité sociale en 1945 visait à répondre au besoin de justice sociale, en dépassant les limites des législations sociales de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle concernant les retraites, la famille ou la santé, par une nouvelle législation prenant en charge l’ensemble des besoins sociaux. En même temps, il s’agissait de sortir de la crise systémique du capitalisme de l’entre-deux-guerres et d’œuvrer à la reconstruction économique du pays.

Le choix du mode de financement du système de Sécurité sociale a été déterminant. Il s’agit d’un financement à partir des cotisations sociales, lié à l’entreprise, lieu où les salariés créent les richesses, un principe moderne et révolutionnaire. Les salariés cotisent en fonction de leur capacité contributive et peuvent recevoir des prestations et des soins en fonction de leurs besoins. Les cotisations sociales en fonction des salaires versés dans les entreprises servent à financer des prestations qui permettent de développer la capacité contributive des salariés. Elles sont enracinées dans le lieu de création des richesses et source de dynamique économique, ce qui donne les moyens de financer la protection sociale. C’est un choix de société, le choix d’une solidarité étendue, de la responsabilité sociale des entreprises, d’une Sécurité sociale gérée principalement par les salariés. Cela constitue un facteur de développement des ressources humaines, un moteur pour un autre type de progression de la productivité du travail, un autre type de croissance. C’est le choix d’une action à la racine sur le type de production des richesses en accroissant la part de salaires et des fonds sociaux dans la valeur ajoutée. Ce financement permet en même temps de financer les solidarités, concernant les prestations familiales, la santé, les retraites.

Sur le plan théorique, la Sécurité sociale et son financement contribuent à contrecarrer la suraccumulation du capital par des formes nouvelles de dévalorisation structurelle. Les nouveaux mécanismes de régulation et les transformations de structures après la Seconde Guerre mondiale concernent notamment l’extension du secteur public et la création de la Sécurité sociale, avec un financement public et socialisé qui ne participe pas à la course à la valorisation du capital. Les prestations sociales permettent d’élargir le développement des richesses produites à partir de l’entretien de la force de travail mieux formée, reposée, bénéficiant de meilleures conditions de travail et de vie, donc plus motivée et plus dynamique. Les cotisations sociales, prélevées sur les richesses créées, sont une part de la valeur ajoutée (VA) créée qui n’est pas affectée au profit, ni directement aux salaires, et visent à répondre à des besoins sociaux. Ce financement socialisé de la reproduction de la force de travail permet le développement de la capacité productive de valeur ajoutée des salariés.

Les cotisations sociales sont calculées en fonction des salaires versés et le produit de ces cotisations est mutualisé. Cependant, contrairement à une formule répandue, les cotisations sociales ne sont pas du salaire « différé » ou « socialisé ». En effet, le salaire est défini à la fois par négociation contractuelle entre le patron et son salarié et par les grilles des conventions collectives (conventions d’entreprise, de branche). Le salaire a un caractère plus ou moins marchand, ce n’est pas le cas pour les cotisations, qui ne sont pas soumises à négociations concernant les régimes obligatoires de base. Si la cotisation prélevée sur la VA est proportionnelle aux salaires, la prestation versée dépend des besoins sociaux. Ainsi, le salarié est soigné en fonction de sa maladie, non des cotisations sociales versées. C’est le principe de « à chacun selon ses besoins et de chacun selon ses moyens ».

Largement déconnectées du rapport salarial, les cotisations et leur affectation ne répondent pas à une équivalence marchande entre ce qui est versé et ce qui est reçu, chacun reçoit selon ses besoins et contribue selon ses moyens. C’est le principe de solidarité universelle intra et intergénérationnelle. Le financement de la Sécurité sociale constitue un terrain essentiel de la bataille de classes pour la production et la ­répartition des richesses produites qui accompagne celle pour les salaires, mais sans se confondre avec elle. La cotisation sociale inscrit ainsi le financement de la Sécurité sociale dans une dynamique économique et sociale à partir de l’emploi et des salaires, qui en sont les leviers. La nature de la cotisation sociale a justifié en 1946 le principe de conseils d’administration des caisses de Sécurité sociale principalement pilotés par les salariés. Elle nécessiterait aujourd’hui de nouveaux droits d’intervention des salariés dans les gestions des entreprises et des institutions sociales. Face à la crise systémique actuelle dans laquelle nous ont plongés les réformes libérales, une réforme progressiste de la Sécurité sociale et de son financement est indispensable, elle s’appuierait sur la promotion et la sécurisation de l’emploi, de la formation et des revenus, en visant la construction d’une nouvelle civilisation.

 

Partager cet article
Repost0
5 octobre 2020 1 05 /10 /octobre /2020 05:58

 

MICHEL ETIÉVENT HISTORIEN ET AUTEUR

L’ordonnance du 4 octobre 1945 s’inscrit comme une étape dans le long processus de la bataille pour la protection sociale. Un combat séculaire pour la dignité qui s’enracine dans les volontés de substituer aux compassions de la charité la force de la solidarité. Il traversera la bataille des corporations avant de se nourrir des grandes inventions sociales de la Révolution française, où les sans-culottes proclameront dans la Déclaration des droits de l’homme de 1793 le droit imprescriptible à la santé : « Les secours publics sont une dette sacrée. » L’intention est lumineuse mais restera lettre morte au fil d’un XIXe siècle, où le patronat de la révolution industrielle prolétarise à outrance ce que Victor Hugo appellera les « bataillons miséreux des travailleurs ».

Face à cette exploitation génératrice de souffrance sociale et aux carences de l’État en matière de santé, la classe ouvrière va devoir désormais tenter de continuer à prendre en charge elle-même sa propre protection sociale. Naîtront ainsi une floraison de mutuelles ouvrières tendant à limiter les « carences sociales », mais n’offrant souvent qu’une protection aléatoire. Ce mouvement mutualiste, les luttes syndicales acharnées de la fin du XIXe et début du XXe siècle aboutiront néanmoins à une première victoire, poussant l’État à promulguer la loi du 30 avril 1930 sur les « assurances sociales ».

« Ce fut là une avancée, nous confiait M. Petit, militant CGT, président de la première caisse de Sécurité sociale en Savoie en 1946. Cependant, les assurances ne couvraient qu’une faible partie de la population, les remboursements étaient très faibles et les prestations limitées. Même chose pour la retraite. Il existait bien une loi de 1910 instaurant une retraite pour les plus pauvres, mais le patronat avait réussi à faire supprimer le caractère d‘obligation de cotisation et la plupart étaient obligés de pousser l’activité jus qu’au bout. La retraite alors, c’était le cimetière. »

À l’aube de la guerre, la grande majorité des salariés (5 millions sur 7 millions) vivent ainsi dans les angoisses de l’insécurité sociale… C’est au cœur du programme du Conseil national de la Résistance du 15 mars 1944 que naîtra le socle fondateur de la Sécurité sociale. Reprenant au mot près l’une des intentions de la Déclaration des droits de l’homme de 1793, la phrase est lumineuse : « Nous, combattants de l’ombre, exigeons un plan de complet sécurité sociale visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail avec gestion par les intéressés et l’État. »

Ces mots brûlants de modernité donneront naissance à une vaste réflexion collective menée sous la maîtrise d’œuvre d’Ambroise Croizat à Alger en relation constante avec le CNR et en lien étroit avec les services du ministère de la Santé, dirigé par le communiste François Billoux de septembre 1944 à novembre 1945. Elle prendra chair dans la promulgation de l’ordonnance du 4 octobre 1945, sous le ministère du Travail d’Alexandre Parodi, donnant ainsi naissance à la Sécurité sociale. Mais l’ordonnance n’est qu’un texte ronéoté et des intentions.

Reste maintenant à bâtir l’idée et à ouvrir l’immense chantier. Dès l’aube de 1946, 138 caisses seront édifiées en moins de sept mois par un peuple anonyme de travailleurs, essentiellement des militants CGT, sur le temps de congé ou après leur temps de travail « pour en finir, selon les mots de Croizat ministre du Travail dès novembre 1945 et maître d’œuvre de l’opération, avec l’indignité des vies dans l’angoisse de l’accident, ou des malheurs de l’enfance ». Quatre principes charpenteront l’institution : l’unicité : tous les « risques sociaux » (maladie, maternité, vieillesse, accidents du travail…) sont désormais regroupés dans une seule caisse en proximité des assurés. La solidarité : pilier de l’édifice. Système de répartition financé par les richesses créées dans l’entreprise à travers le « salaire socialisé » de la cotisation. L’universalité, sous-tendue par l’idée de soigner toute la population et « de suivre l’assuré de sa naissance à son décès ». Sans oublier la démocratie, cette volonté de confier la direction de l’institution aux bénéficiaires eux-mêmes.

« La Sécurité sociale fut mise en place dans un enthousiasme indescriptible car, pour la première fois, nous avions conscience de bâtir nous-mêmes notre avenir ! » écrivait en 1946 le président du conseil de la CPAM de Savoie. Elle dépassait enfin un système d’assurances inégalitaire pour devenir un droit obligatoire pour tous. Les réticences s’affirmèrent très vite du côté des médecins libéraux, du patronat, des assurances privées, mais le rapport de forces de la Libération permettra de l’imposer : 28 % des voix au PCF, 5 millions d’adhérents à la CGT, une classe ouvrière grandie par sa résistance héroïque, un patronat sali par sa collaboration.

C’est cette institution solidaire que patronat et gouvernement s’acharnent aujourd’hui à détricoter pour ouvrir le chemin au privé. Revenir aux années d’indignité, livrer la « Sécu » aux appétits des assurances, celles que les bâtisseurs de 1945 dépossédaient afin d’envisager un avenir solidaire. Mais ces attaques ne sont pas nouvelles. Elles hantent la presse dès 1946 et seront suivies de soixante-quinze ans de démantèlement, à travers de multiples programmes qui mettront à mal l’institution. « Jamais nous ne tolérerons que soit rogné un seul des avantages de la Sécurité sociale », rappelait Ambroise Croizat. À l’heure où sont menacés les conquis sociaux nés du CNR, ces mots résonnent comme un cri vers nous pour que la Sécurité sociale ne soit pas une coquille vide livrée au privé, mais reste ce que les militants de la Libération ont voulu qu’elle soit : un vrai lieu de solidarité, un rempart contre le rejet, la souffrance et l’exclusion.

 

Partager cet article
Repost0
4 octobre 2020 7 04 /10 /octobre /2020 05:55

 

Les assurances privées s’étendent à la maladie, au chômage et à la vieillesse, avec le danger de voir deux mondes se créer : ceux qui se soignent, partent en retraite, et les autres.

La fraude fiscale pratiquée par les plus riches, astronomique, montre déjà leur volonté de ne pas participer au pot commun de la civilisation que constitue l’impôt. Ce refus d’une collectivisation au moins fiscale démontre un rejet manifeste du vivre-ensemble. Dès lors, la ségrégation est en marche. Elle se retrouve dans le refus d’habiter les mêmes quartiers, d’apprendre dans les mêmes écoles et de se soigner dans les mêmes hôpitaux.

En 1946, 98,5 % des soins étaient remboursés. Aujourd’hui, ce seuil est tombé à 70 %

À ce sujet, si les hôpitaux privés se multiplient, il existe une autre injustice qui va se développant et témoigne du rejet d’une même communauté de destin : celui de l’accès au soin et du financement de la protection sociale face aux risques de la vie, qu’il s’agisse de la maladie, du chômage, de la retraite et de la dépendance. L’explosion des assurances privées est ainsi devenue un facteur aggravant d’inégalités et de divisions entre citoyens. En 1946, à la suite de la fondation de la Sécurité sociale, 98,5 % des soins étaient remboursés. Aujourd’hui, ce seuil est tombé à 70 %, le privé grignotant toujours plus sa part. Le problème étant que les mutuelles privées proposent différents types de couvertures, à différents tarifs : moins on paie, et moins on est remboursé. Le principe fondateur de la Sécu selon lequel chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins est ainsi sévèrement entamé.

Le tout se décline dans chaque aspect de la vie : assurance habitation, assurance automobile, assurance professionnelle, assurance-vie et assurance pour la retraite. Qui a les moyens de payer sera bien couvert. Le tout se greffant sur des inégalités salariales qui se creusent, et des inégalités de patrimoine telles que les 10 % des plus riches détiennent près de 50 % du patrimoine global. Les mutuelles d’entreprise, de leur côté, montrent de fortes disparités de l’une à l’autre, selon les contrats négociés. Il reste encore beaucoup à grignoter pour le marché, les dépenses de Sécurité sociale représentant plus de 450 milliards d’euros par an. Mais, déjà, le phénomène de renoncement aux soins face au reste à charge se renforce. Chacun n’est pas protégé de la même manière lors d’un sinistre. Sans parler de la réforme des retraites voulue par Macron, qui séparera le monde en deux si elle aboutit : ceux qui auront de quoi se payer une retraite privée et ceux qui mourront au travail.

 

Partager cet article
Repost0
4 octobre 2020 7 04 /10 /octobre /2020 05:51

 

Un forfait payant sera mis en place dès 2021 pour les passages dans les services d’urgences sans hospitalisation. Un scandale, selon les acteurs du secteur, qui va inciter les malades à ne pas se soigner.

Glissée au milieu du projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS), la mesure était presque passée inaperçue. Alors que plusieurs réformes tarifaires ont été repoussées pour cause de crise sanitaire (psychiatrie, soins de suite et de réadaptation…), tous les malades se rendant aux urgences seront, eux, sommés de mettre la main à la poche dès 2021. Les passages dans ce service ne nécessitant pas d’hospitalisation feront ainsi l’objet d’un montant fixe, en lieu et place de l’actuel ticket modérateur laissant 20 à 30 % du coût des soins aux malades, souvent remboursés pour ceux disposant d’une complémentaire santé.

 

Course aux petites économies

Si, selon le gouvernement, ce « forfait patient urgences » permettra « de limiter les situations de reste à charge très élevé ». Pour les professionnels du secteur, il s’agit d’un scandale absolu. « Ce n’est pas éthique, les patients n’ont pas à payer s’ils habitent dans un secteur où il n’y a pas de médecins généralistes, déplore Frédéric Adnet, responsable du Samu 93 et chef des urgences de l’hôpital Avicenne à Bobigny. On fait culpabiliser les personnes qui viennent parfois pour une otite ou une rage de dents et que l’on arrive à soulager. D’autant que cela va concerner un grand nombre d’usagers : 80 % des passages aux urgences ne débouchent pas sur une hospitalisation. » Dans sa course aux petites économies pour limiter un déficit de la Sécurité sociale creusé par le Covid, le gouvernement ne recule devant rien. Si les femmes enceintes, les malades chroniques ou encore les invalides étaient exonérés de ticket modérateur, tous se verront bien appliquer une version minorée de ce forfait « patient santé urgences ».

 

« Il faut réorganiser la médecine de ville »

De son côté, la Fédération hospitalière de France (FHF), interrogée par les Échos, n’est pas convaincue de l’efficacité de cette disposition. « Nous sommes très dubitatifs sur la responsabilisation attendue, car les assurés veulent avant tout aller à l’hôpital pour accéder à son plateau technique lourd », explique la FHF, redoutant les effets sur « les 5 % de patients qui n’ont pas de mutuelle et qui accèdent aux soins via les urgences ». Comme le souligne Christophe Prudhomme, urgentiste à Avicenne et porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf), « c’est une décision populiste, on transforme les usagers en boucs émissaires. C’est devenu très compliqué d’avoir un rendez-vous avec un généraliste dans la journée. Ils ne prennent plus les gens pour une entorse, par exemple. La question de la fracture numérique se pose aussi. Tout le monde n’a pas accès à Doctolib et aux visioconsultations. Il faut réorganiser la médecine de ville, pas autour des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), comme le voulait le gouvernement, mais autour des centres de santé ». Une nouvelle fois, les usagers des déserts médicaux seraient les plus pénalisés. « On fait comme si ce problème n’existait pas, soupire Michèle Leflon, présidente de la coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et des maternités de proximité. Les personnes vont éviter d’aller aux urgences pour des problèmes potentiellement graves. Heureusement, des initiatives émergent. À Laval (Mayenne), un collectif de citoyens va porter plainte pour non-égalité de l’accès aux soins sur le territoire car la situation est déjà dramatique. »

 

Les passages aux services des urgences ont doublé en vingt ans

Bien loin de la réalité, le gouvernement poursuit donc sa logique de désengorgement des services d’urgences, où les passages ont doublé en vingt ans (atteignant 21,4 millions en 2017). C’est le sens de la réforme du modèle de financement des structures des urgences devant entrer en vigueur au 1er janvier 2021. Tout comme celui du « forfait de réorientation », censé inciter financièrement les hôpitaux à rediriger 5 à 10 % des malades non urgents vers la médecine libérale. Cette expérimentation contestée, voulue par le ministre de la Santé, Olivier Véran, n’a finalement jamais été menée à cause la pandémie. « On ne tient pas compte des besoins, poursuit Christophe Prudhomme, nous manquons de lits, 3 400 ont été fermés dans les hôpitaux en 2019, mais aussi de personnel. Nous faisons face à un flot de démissions car la charge de travail est intolérable. »

Des salaires en berne

Le salaire net moyen dans la fonction publique hospitalière a diminué de 1 % en euros constants, en 2018, comparé à 2017, après quatre ans consécutifs de hausse, selon des chiffres de l’Insee publiés mercredi. Cette moyenne prend en compte tous les salariés des hôpitaux et des établissements médico-sociaux. En 2018, un agent de la fonction publique hospitalière (FPH) percevait en moyenne 2 308 euros net par mois en équivalent temps plein.

 

Partager cet article
Repost0
4 octobre 2020 7 04 /10 /octobre /2020 05:49

 

Issue du programme du Conseil national de la Résistance, cette création originale mise en chantier par Ambroise Croizat, avec ses quatre piliers (vieillesse, maladie, chômage, famille), n’en finit pas de susciter les convoitises tant ses principes demeurent novateurs.

Fondée le 19 octobre 1945, la Sécurité sociale célèbre ses trois quarts de siècle. Soixante-quinze années d’une conquête historique pour le monde du travail, imaginée par la Résistance à l’occupation nazie en pleine Seconde Guerre mondiale. Soixante-quinze années d’une « invention » qui a profondément transformé la condition de millions de salariés, leur offrant la possibilité de se soigner, de partir en retraite, d’aider leur famille… Une histoire mouvementée également, car, depuis sa fondation, la Sécu a toujours été l’objet d’attaques visant à réduire sa portée transformatrice pour la société française. La Sécu aiguise les appétits du capital, désireux de s’emparer d’une vaste couverture qu’il transformerait en marché. Mais la crise sanitaire du Covid-19 et ses chocs économique et social démontrent à nouveau, s’il en était besoin, l’utilité de ses « amortisseurs sociaux ». La Sécurité sociale est un bien commun, une propriété collective, mais aussi une solution aux transitions écologique, sociale et démographique en cours.

 

1 - Un régime par et pour les travailleurs repris par l’État

Des quatre piliers de la Sécurité sociale, il en est un que l’État, allié au patronat, n’aura eu de cesse d’attaquer pour ébranler l’édifice : sa gestion démocratique. Inédit en tous points, son mode de direction reposait à l’origine sur une gestion par les bénéficiaires eux-mêmes. Une volonté imposée, certes, par un rapport de forces à l’époque favorable à la CGT, mais qui subira, dès le début, les attaques de ses adversaires syndicaux, patronaux et politiques. Car la collecte des cotisations a dans les plans de Croizat ceci d’extraordinaire qu’elle ne dépend ni de l’État ni des employeurs, mais des représentants des travailleurs.

En 1958, Charles de Gaulle enfonce le premier coin en instaurant le contrôle préalable des budgets des branches et la nomination des directeurs des caisses, auparavant élus par les assurés. Mais, déjà dix ans plus tôt, l’État, en sous-main, avançait ses pions pour contrer la gestion ouvrière. Ainsi, « l’intervention de l’État n’en fut jamais absente », expliquent Bernard Friot et Christine Jakse dans les colonnes du Monde diplomatique. « D’abord légère, elle s’accentue au fil des années : contrôle financier (1948), mise sous tutelle des caisses déficitaires (1950), création de l’Inspection générale de la sécurité sociale (1960, devenue Igas en 1967 – NDLR), réduction des pouvoirs des conseils et professionnalisation des dirigeants des caisses (1960) », listent les deux sociologues. Mais, en matière de gouvernance, l’estocade est portée en 1967, lorsque les ordonnances Jeanneney fixent les règles du paritarisme. Elles établissent le passage d’une gouvernance répartie à 75 % pour les salariés et 25 % pour le patronat à l’égalité parfaite. Il suffit dès lors qu’un syndicat minoritaire ou piloté par les employeurs bascule du côté du patronat pour qu’il prenne la main.

Un nouveau « basculement » s’opère ensuite dans les années 1980, « où on retire peu à peu les prérogatives des syndicats, en même temps que l’idéologie néolibérale infléchit la réflexion vers la protection individuelle plutôt que la protection collective », explique Gilles Perret, documentariste, réalisateur du film la Sociale. Et Laurent Fabius, alors premier ministre, ouvre la protection sociale aux assurances privées. En 2004, Philippe Douste-Blazy, ministre de la Santé, met un terme au conseil d’administration de la Sécurité sociale. C’est la fin de la représentation salariée dans les caisses. Jean-Pierre Raffarin, l’année suivante, referme le chapitre en actant l’éviction des délégations ouvrières dans le processus décisionnel, renvoyant les syndicats à un simple avis consultatif.

 

2- La fiscalisation, vecteur de désappropriation

De même que l’État n’a eu de cesse de prendre la main sur les instances décisionnaires, de même s’est-il attaqué à coups de « réformes » successives au mode de financement de la Sécurité sociale pour mettre la main sur le grisbi. À chaque fois, ces modifications par la loi ont eu pour objet de s’attaquer à la cotisation sociale comme source de financement pour la remplacer par l’impôt. En 1990, le gouvernement de Michel Rocard crée ainsi la CSG (contribution sociale généralisée, 2 % à l’époque, 28 % aujourd’hui). Cinq ans plus tard, Alain Juppé ajoute la CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale). Avec Emmanuel Macron, cette tendance à fiscaliser a pris une nouvelle dimension, avec des suppressions de cotisations sociales compensées par l’impôt. Il s’agit de pertes de salaire « socialisé » et différé, doublé d’une baisse des remboursements pour les salariés. « C’est un encouragement au séparatisme des riches », alerte le coordinateur de la France insoumise, Adrien Quatennens.

L’opération n’est pas seulement comptable : elle constitue une attaque des fondements mêmes de la Sécurité sociale. « Les gouvernements qui ont mis en place ces réformes reviennent sur la logique des fondateurs de la Sécu ! » s’indigne Adrien Quatennens, selon laquelle « chacun contribue à hauteur de ses moyens et reçoit en fonction de ses besoins ». Le député communiste Pierre Dharréville développe : « L’objectif est de modifier la philosophie même de la Sécurité sociale », de la placer « dans une logique de solidarité nationale, plutôt que de véritable protection et de progrès social, et lui ôter son caractère transformateur de la société ». Selon l’élu PCF, la Sécu est un « transformateur » en permettant « de faire échapper des ressources aux appétits du capital et de faire du travail un vecteur de droits au travers de la cotisation ». Et de souligner également la « dimension d’appropriation » dans les principes fondateurs : « La Sécu est un bien commun, elle appartient à ceux qui la font vivre. La fiscalisation crée une sorte de sentiment de perte de propriété commune, on en fait une assurance comme une autre en la diminuant. » Selon lui, la bataille à mener est donc celle de sa « réappropriation ».

 

3 - Son avenir passe par son extension

Attaquée par le patronat et les derniers gouvernements en date, la Sécu demeure pourtant une idée d’avenir, insistent ses défenseurs. Mais comment faire pour arrêter son démantèlement ? À court terme, il s’agirait de « sanctuariser les recettes » de notre système de protection sociale et de « mettre fin à la confusion des budgets de l’État et de la Sécurité sociale », plaide l’économiste Michael Zemmour, enseignant à Paris-I et à Sciences-Po Paris. L’existence des complémentaires santé, « inefficaces dans leur rôle assurantiel », serait également à remettre en cause, pour celui-ci.

La Sécu comme collecteur, et financeur unique, du système de santé s’impose aussi comme un préalable absolu, pour le sociologue Frédéric Pierru. L’objectif est d’aboutir à un système réellement universel, avec « 100 % de remboursement par la Sécu » pour tous. Dans le champ de la santé, le chercheur estime que le modèle de la médecine libérale est à bout de souffle. L’occasion de développer partout sur le territoire des « centres de santé pluridisciplinaires », dans lesquels les praticiens pourraient être salariés, mais également de réinvestir massivement dans l’hôpital public et de mettre fin à l’existence des cliniques privées « qui n’ont aucune raison d’exister, puisqu’elles ne gardent que les risques les plus rentables pour laisser les plus lourds à l’hôpital public ». Mais, plus fondamentalement, la clé de la pérennité de la Sécu réside dans son extension à d’autres domaines, si l’on en croit le sociologue et économiste Bernard Friot. « On pourrait augmenter le salaire minimum de 500 euros sous forme de cotisations sociales qui seraient portées au crédit de la carte vitale. Cette somme mensuelle pourrait alors être dépensée auprès de professionnels conventionnés dans le domaine de l’alimentation, mais aussi de la culture. Ils seraient rémunérés par un salaire à vie, attachés non pas à leur poste mais à leur qualification », précise-t-il.

 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Le chiffon rouge - PCF Morlaix/Montroulez
  • : Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste. Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale. Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.
  • Contact

Visites

Compteur Global

En réalité depuis Janvier 2011