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14 février 2016 7 14 /02 /février /2016 07:32
Patrick Rambaud

Patrick Rambaud

Patrick Rambaud avait utilisé la satire entre 2007 et 2012 pour décrire le règne de "Nicolas 1er"."François le petit" est un ouvrage réjouissant sur la forme mais implacable sur le fond, dépeignant une vie politique qui glisse inexorablement vers la médiocrité.

En refermant votre livre, on hésite entre le rire et la consternation.

C'est justement parce que j'étais consterné que j'ai recommencé. Quand Sarkozy a été élu, je me suis dit "C'est pas possible, il faut faire quelque chose!" J'ai fait un livre (Chronique du règne de Nicolas 1er) et puis finalement, j'en ai écrit six. Au-delà de la chronique politique, ces bouquins sont aussi des panoramas de l'époque. Et il faut bien reconnaître que notre époque, en plus des horreurs qu'elle charrie, est passablement ridicule.

Pourquoi avoir choisi cette forme littéraire si particulière?

C'est de la satire, dans la vieille tradition latine qui existe depuis des siècles, depuis Horace en fait. Si vous lisez Horace aujourd'hui, vous allez être étonnés. A 21 siècles de distance, il est capable de vous dresser le portrait d'un emmerdeur comme on en connaît tous. C'est exactement le même! Le type qui vous accroche et dont on ne peut plus se dépêtrer. C'est ce que dira plus tard La Bruyère, en expliquant que les gens sont tous les mêmes, qu'on les retrouve partout, de tout temps.

Vous décrivez François Hollande comme quelqu'un de froid et calculateur, ce que l'on savait déjà. Mais vous évoquez aussi son absence totale de culture littéraire, son désintérêt pour le roman. Qu'est-ce que cela veut dire de lui?

Léon Blum travaillait le matin au ministère. L'après-midi, il lisait. Mitterrand était un homme cultivé. Avant lui, Giscard lisait Maupassant. De Gaulle aussi était un grand lecteur. Certes, c'était une autre époque, mais quand même... Depuis Sarkozy, on a des analphabètes? Hollande, en plus, est un énarque. Or, il y a deux choses qui n'intéressent absolument pas les énarques: l'histoire et la littérature. Alors que ce sont quand même les deux sujets qui font un bonhomme, qui lui donnent du volume, une possibilité de mieux comprendre les choses.

C'est vrai que les énarques en prennent pour leur grade dans votre livre...

On parle de gamins de 25 ans qui n'ont jamais bossé et qui décrochent tout de suite de gros postes dans l'administration alors qu'ils n'ont jamais rien vécu. C'est terrible! Pour moi, ce sont des zombies. Et il y en a partout, dans tous les couloirs...

On sent que vous prenez énormément de plaisir à brosser des portraits. Par exemple, celui de Laurent Wauquiez, énarque lui aussi, qui apparaît comme l'archétype du félon...

Ce n'est pas moi qui le dis. Ce sont ses amis! Quand je regarde le dossier que j'ai sur Wauquiez, toutes ces coupures de journaux, tout le monde dit que c'est un traître! Pour faire un portrait, il faut un trait de caractère. Là, je l'avais.

Vous attendiez-vous à ce que François Hollande soit un aussi bon sujet de livre?

Au début, je me suis dit: "On en a fini avec Sarkozy, je vais pouvoir passer à autre chose". Et puis, en voyant le résultat catastrophique des débuts de Hollande, je me suis dit: "C'est pas possible, il est trop con!". En fait, tous ces gens ne pensent qu'à leur réélection.

Vous dites qu'il s'inspire du "Bréviaire des politiciens" du cardinal Mazarin. N'est-ce pas là la marque d'un profond cynisme?

Hollande ressemble à Mazarin d'une façon tragique. Dans son Bréviaire, Mazarin dit notamment que, pour régner, il faut s'entourer de caractères complètement différents. Hollande ne fait que ça. Il prend comme conseillers Aquilino Morelle et Emmanuel Macron, qui n'ont absolument rien à voir, il associe dans son gouvernement Valls et Taubira... On appelle ça la synthèse? Je n'y vois que du calcul.

François Mitterrand aussi était comparé à Mazarin...

Oui, mais Mitterrand avait du charisme, de la hauteur, une épaisseur réelle. On le sentait quand il entrait dans une pièce. Aujourd'hui, ils n'ont plus que la carcasse.

L'omniprésence de la vie privée nourrit aussi votre livre. Comment voyez-vous cette évolution?

Cela a commencé avec Giscard, qui a fait entrer la vie privée à l'Elysée. Avec Sarkozy, c'est Closer qui y est entré... Et Hollande continue. Cela commence avec le premier tweet de Valérie Trierweiler, à peine un mois après son élection. Après ça, on poursuit sur le mode grotesque, avec la Vespa et le casque... C'est complètement tocard!

L'environnement a aussi beaucoup changé...

Bien sûr! La pression populaire est énorme. Il y a internet, les chaînes d'info en continu, les sondages. Vous avez quinze sondages tous les jours. Ces gens nous disent qu'ils ne les regardent pas mais c'est faux: ils passent leur temps à les interpréter pour savoir comment manœuvrer en vue de gagner les prochaines élections. Cela devient un jeu de société mais ce n'est plus une méthode de gouvernement.

Derrière la forme, votre livre contient aussi une fine analyse politique. Comment travaillez-vous?

Je lis les journaux tous les matins, du Monde à Closer. Une documentaliste m'aide également en constituant des dossiers. Une fois qu'on a tout ça, on prend un grand tamis, on secoue au-dessus et on voit ce qu'il reste. Le livre sur Hollande ne s'est pas fait sur le même rythme que les chroniques de la présidence Sarkozy. Sarkozy, c'était à chaque fois sur un an. Là, c'est sur deux ans et demi, il y a donc beaucoup plus de choses à brasser. Et il y en aura encore dans deux ans.

D'autant que ça repart fort, avec, par exemple, le débat sur la déchéance de nationalité...

Alors ça, c'est un fumigène absolument génial. Tu jettes ça et derrière, on ne voit plus rien. Alors que c'est complètement idiot, c'est un sujet complètement con. S'empailler là-dessus, c'est ridicule... Ce ne sont que des calculs, des manœuvres, des manipulations qu'on voit venir à 300 mètres.

Propos de Patrick Rambaud recueillis par Samuel Ribot, ALP.

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13 février 2016 6 13 /02 /février /2016 09:03
Jean Gadrey - Portrait Alter eco plus

Jean Gadrey - Portrait Alter eco plus

Voici une tribune que nous a signalée notre camarade Jean Dréan qui montre bien que la réduction du chômage n'est qu'affaire de volontarisme politique et de renonciation aux politiques libérales de préservation des intérêts de la finance pour mettre l'humain au centre des choix économiques. Seul le peuple peut imposer cette réorientation.

Contre le chômage, "ils" essaient tout sauf... ce qui le réduirait vraiment. La raison est simple: "Ils" restent dans la logique de la mondialisation néolibérale, de la course effrénée à la compétitivité par les bas coûts salariaux et les bas coûts de l'Etat, de l'austérité pour le plus grand nombre.

Cette course est un mauvais jeu à somme négative pour l'emploi, et même les pays ou le chômage semble faible voient croître la pauvreté salariale et la pauvreté tout court, parce qu'on y encourage les petits et mauvais boulots en détruisant des protections sociales.

On peut pourtant créer et sauvegarder des millions d'emplois utiles et décents en France dans la période à venir en menant des politiques réalistes, répondant aux besoins urgents, pour lesquelles les moyens existent, sans qu'il y ait besoin d'attendre pour cela le retour d'une croissance qui ne reviendra probablement pas, ou seulement à de faibles niveaux. Plusieurs volets doivent être combinés, chacun correspondant à un potentiel d'emplois utiles.

Le premier est celui des besoins de services du bien-vivre associés à des droits actuellement en deshérence: pour les personnes âgées ayant besoin d'accompagnement, pour la petite enfance, pour les personnes handicapées, pour l'éducation, la santé, la culture et les services publics qui souffrent de l'austérité alors que l'évasion fiscale fait perdre chaque année des dizaines de milliards d'euros aux recettes publiques.

Le second volet est celui de la RTT sans perte de revenu pour 90% des personnes: le partage du travail lié à celui des revenus (la réduction des inégalités). Pas seulement la réduction hebdomadaire (par exemple les 32 heures), mais aussi la RTT tout au long de la vie. Le mouvement historique de RTT a permis dans le passé de créer ou sauvegarder des millions d'emplois. Si on en était encore aux 1900 heures moyennes annuelles des années 1960, on aurait environ 5 millions de chômeurs s'ajoutant aux 5 millions actuels! Or, ce mouvement historique a pris fin en 2002, ce qui a amplifié la hausse du chômage.

Le troisième volet est celui des emplois d'une transition écologique socialement juste. On commence à disposer de scénarios solides. L'enjeu, de type humanitaire, est urgent, pour le climat, la biodiversité, etc. Des centaines de milliers d'emplois, dans leur grande majorité non délocalisables, peuvent - et doivent - être ajoutés pour y faire face.

Dans l'agriculture et dans l'industrie, la chute dramatique des emplois depuis plusieurs décennies pourrait être stoppée ou au moins fortement ralentie si le productivisme était battu en brèche au bénéfice d'une transition vers la qualité et la soutenabilité écologiques, si cette transition s'appuyait sur une sécurité sociale professionnelle, et sur un vrai droit de préemption des salariés lorsque le capital déserte des entreprises viables. Lorsqu'on fait le bilan chiffré de ces volets de création et sauvegarde d'emplois répondant à des besoins d'avenir, on s'aperçoit, comme nous avons pu le faire dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie dans un "manifeste" pour l'emploi, que le chômage pourrait être réduit d'un tiers en 5 ans et de plus de la moitié en 10 ans.

Cela implique toutefois d'en finir avec une politique économique plus ou moins dictée par le Medef et les lobbies bancaires.

Pour aller plus loin, le blog de Jean Gadrey: http://alternatives-economiques.fr/blogs/gadrey

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13 février 2016 6 13 /02 /février /2016 08:12
Paris - Le Parti communiste a dénoncé vendredi la disparition d'un secrétariat d'Etat aux Droits des femmes à part entière, désormais rattaché au ministère de la Famille et de l'Enfance à l'occasion du remaniement ministériel de jeudi.

Dans un communiqué, le PCF a qualifié cette nouvelle appellation de "goutte d'eau supplémentaire contre les droits des femmes et de faute politique". "Comment le gouvernement peut-il renoncer à l'égalité pleine et entière des femmes dans tous les domaines de la vie '" s'est interrogé le parti.

"Après avoir en début de quinquennat créé un ministère des Droits des femmes, de plein exercice, puis avoir au milieu de mandat réduit ce ministère à un secrétariat d'État, voici à présent le retour des stéréotypes les plus rétrogrades", a fustigé Laurence Cohen, responsable nationale Droits des femmes/féminisme du PCF, qui signe le communiqué.

"Le champ de la famille et de l'enfance est-il donc définitivement et exclusivement l'apanage des femmes'" a-t-elle demandé, s'indignant d'un "retour en arrière" et d'un "affront fait aux femmes".

"À quelles sirènes le gouvernement est-il sensible, si ce n'est à celles des partisan-e-s de la manif pour tous '" a-t-elle regretté.

Le PCF a averti: "À quelques semaines du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, les communistes continueront à montrer que les combats féministes sont toujours d'actualité".

Jeudi, l'ex-ministre communiste des Sports Marie-Georges Buffet s'était déjà émue sur Facebook: "On croit rêver", avait-elle écrit après l'annonce du remaniement ministériel.

La députée LR Nathalie Kosciusko-Morizet a également dénoncé le rattachement du secrétariat d'Etat aux Droits des femmes à la Famille et à l'Enfance: "Création d'un ministère de la Famille de l'Enfance et des Droits des femmes: Hollande a oublié la couture et le repassage", a-t-elle ironisé dans un tweet.

(site Internet de l'express)

le communiqué complet de Laurence Cohen, pour le PCF:

Ministère Droits des femmes, Famille et Enfance : renoncements et stéréotypes !

Goutte d’eau supplémentaire contre les droits des femmes et faute politique ! Comment le gouvernement peut-il renoncer à l'égalité pleine et entière des femmes dans tous les domaines de la vie? Après avoir en début de quinquennat, créé un ministère des Droits des femmes, de plein exercice, puis avoir au milieu de mandat, réduit ce ministère à un secrétariat d’État, voici à présent le retour des stéréotypes les plus rétrogrades.

Droits des femmes = famille = enfance ! Le champ de la famille et de l’enfance est-il donc définitivement et exclusivement l’apanage des femmes ? Quel retour en arrière, quel affront fait aux femmes qui luttent au quotidien pour changer la société, pour en finir avec le patriarcat. À quelles sirènes le gouvernement est-il sensible, si ce n'est à celles des partisan-ne-s de la manif pour tous ?

À quelques semaines du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, les communistes continueront à montrer que les combats féministes sont toujours d’actualité, pour libérer la société des aliénations qui empêchent l’émancipation humaine.

Laurence Cohen, responsable nationale Droits des femmes/féminisme du PCF

Laurence Cohen, sénatrice communiste, animatrice du pôle égalité femmes-homme

Laurence Cohen, sénatrice communiste, animatrice du pôle égalité femmes-homme

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13 février 2016 6 13 /02 /février /2016 08:02

La gauche ? Son futur vient de loin

Le capitalisme agressif et destructeur. Boursouflée de profits, la finance internationale tente d’imposer dans le dos des peuples le TAFTA ou TTIP. Ce partenariat de commerce et d'investissement entre les Etats-Unis et l’Europe ambitionne d’anéantir les velléités de souveraineté, d’émancipation et d’indépendance des peuples. Aux prises avec leurs contradictions, les Occidentaux otanisés poussent leur agressivité jusqu’à l’horreur. Ils bombardent ou laissent bombarder (Syrie) à tous vents. Au nom de la protection de « nos intérêts vitaux », ils se partagent les espaces pour l’exclusive jouissance des super-milliardaires, néo-colonialistes, nationalistes et autres dictateurs. Des kilomètres de murs, de barbelés et de portails sécuritaires sont érigés. Le « Non » rejette le traité établissant une Constitution pour l'Europe au référendum du 29 mai 2005 ? Le Traité est signé. Puis, familier des reniements et remaniements, François Hollande entérine les désiratas de la finance internationale prédatrice… Libéraux et prédicateurs assènent « libérons l’entreprise, l’époque a changé ». Grassement appointés, experts, idéologues et médias veulent achever le droit au travail, le code du travail, la sécurité sociale, l’école laïque, la démocratie, la paix. Après les avoir créés, les supermultinationales entretiennent le chômage de masse et « la dette ». A leurs bottes, leurs valets exacerbent le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. « Ils » inventent l’islamophobie dans le but de dresser leurs victimes « les unes contre les autres ». Macronisés, leurs commis d’Etat rabaissent les Services publics, éducation, formation, santé, transport, logement, le sport et la culture, au rang des marchandises. Au diable les besoins et aspirations des classes populaires, la loi du profit et du marché est leur seule boussole. Vive le commerce des armes. Les guerres d’assaut deviennent un marché en rafales. « Ils » nourrissent leur domination de l’instrumentalisation des peurs, violences et terrorismes. Dotés d’un outillage sophistiqué, les services de renseignements justifient les guerres et interventions policières en voie de privatisation. Politique canonnière, état d’urgence, surveillance et destruction sociale confortent l’exploitation et l’oppression de l’immense majorité par une infime minorité. Mondialisation capitaliste, désenchantement européen, technologie et automatisation engendrent l’accroissement des inégalités et génèrent une anxiété massive et de dangereux « replis ».

La force motrice de la transformation ? En 2007, Marie George Buffet recueille l’insignifiant 1,93% aux présidentielles. Les législatives sont à peine moins moches. A la Libération, le PCF recueillait 28,6% aux législatives de 1946 ! Le Front de Gauche surgit des phénomènes qui ont conduit à l’échec. Donc, apparition du Front de Gauche en janvier 2009. Ses initiateurs rassemblent les militants au Zénith. L’appel du PCF, du Parti de Gauche et de la Gauche unitaire est entendu. Après son relatif succès aux présidentielles de 2012, le Front de Gauche patine et ne parvient pas à ouvrir une perspective de transformation favorable à l’engagement du monde du travail et du peuple. Las, les mauvaises régionales à peine digérées, les regards empressés se tournent vers les échéances électorales de 2017. Cela, sans avoir pris le temps d’analyser les causes de la panne endémique. A la vérité, les composantes du Front de Gauche ne professent ni la même conception ni le même processus à développer. Ses fondateurs vivent le FdG comme un cartel électoral susceptible de conforter leur propre existence tandis que nombre de leurs partenaires le vivent comme un pas vers la création d’une « nouvelle force politique motrice ». Historiquement, la gauche s’est déployée à partir d’un courant réformiste et d’un courant révolutionnaire. Ces deux courants sont eux-mêmes traversés par diverses « écoles de pensée ». Depuis le siècle dernier, le Parti communiste incarnait le courant révolutionnaire. Cette phase est-elle achevée ? Cette question doit s’inscrire dans le débat. Si la « gauche » est au plus mal, ses deux courants, réformiste et révolutionnaire, continuent d’irriguer le peuple déçu, sceptique et plus que désorienté. Il se sent bafoué par les dominants du Parti socialiste convertis au libéralisme. Porosité de la vie oblige, le courant révolutionnaire pâtit lui-même de cette conversion. D’autant qu’il vasouille depuis longtemps et qu’il ne parvient pas à se constituer en force motrice, dynamique, autonome, créatrice, unitaire et attractive. Sa (re)constitution ne serait-elle pas la tâche prioritaire de notre temps ? A cette étape, le Front de Gauche génère toujours de l’espoir. L’éclosion du nouveau surgira de la convergence « des luttes et mouvements sociaux et de l’action politique ».

Les classes populaires ? Les chômeurs et précaires, les salariés en sursis ne supporteraient pas « les parlotes des politiques de tous bords ». Les jeunes adeptes du système D, « un p’tit job et un p’tit truc à côté », n’y croiraient pas davantage. Aussi, les diagnostics, thèses et hypothèses des penseurs, marxistes et amis, demeurent à « exploiter ». Les solutions se nichent dans un va-et-vient dynamique avec le salariat et le peuple. Elles se nichent dans une transformation radicale de nos pratiques trop souvent conduites d’en haut. Les primaires à gauche ? Riposte positive ou complaisance au système ? Rustine démocratique, compassion culpabilisatrice ou exclusion du peuple lui-même ? Un peu de tout ça ? Avons-nous essayé l’essentiel ? Non. C’est pourquoi vit l’espoir. Pain, liberté, paix, ce triptyque a fondé les combats populaires et démocratiques. Bizarrerie, la COP21 n’inscrit pas les activités des forces armées, guerres, essais nucléaires, militarisation des économies, dans les causes de la détérioration des écosystèmes et du déréglement climatique. Pour le poète, « il n’y a pas de modèle pour qui cherche ce qu’il n’a jamais vu ». Certes, mais nous ne partons pas du néant. Fussent-elles perfectibles, les analyses des avancées et échecs, les expériences sociales et démocratiques, les « connaissances scientifiques » des évolutions du monde sont disponibles. La difficulté à surmonter réside dans leur mise en cohérence politique.

La prise en compte de tous les phénomènes est l’art de la politique. La reconnaissance de la complexité ne signifie nullement l’acceptation du réel, tel qu’il est, ad vitam aeternam. C’est l’inverse. Le réel ? La politique invite à dénouer ses fils enchevêtrés. La dialectique et le mouvement contre le binaire et ses platitudes. Le combat de la Grèce le confirme, plus d’épines que de roses bordent la route du changement. Pourtant, si le capitalisme phagocyte la société, il n’est pas toute la société. Entravée, elle développe de l’espérance. Le capitalisme étant inamendable, il s’agit de créer le nouveau rapport de forces susceptible d’ouvrir le processus « démocratique-révolutionnaire », souhaitable et libérateur. Nous apprenons des échecs ? Apprenons des réalisations moins visibles des producteurs, créateurs et gens de peu. Inventons une autre dimension conceptuelle du « communisme vivant et de nouvelle génération ». Valorisons l’émancipation, expérimentons l’appropriation sociale et démocratique des leviers économiques, partageons les savoirs. Faisons vivre l’égalité, la citoyenneté, la solidarité et la démocratie sur le terrain, à tous les niveaux et dans les entreprises. Changeons d’échelle, de visée et de méthodologie. En recherche, la proposition de transformation sociale, démocratique et écolgique, est vivante. Pas à pas, elles retrouvera sa crédibilité pour peu qu’elle soit, d’abord, l’œuvre des premiers intéressés eux-mêmes. Laissons les remaniements de la soumission, les coups et opérations médiatiques aux guides et rabat-joie éternellement frustrés. Regardons devant. Dégageons-nous du somnambulisme ambiant et décorticons la complexité des phénomènes à considérer dans leur totalité. Les immondes réalités sociales et périls encourus par les humains, notre planète, nos terres et océans, nous pressent de dessiner un autre chemin, un autre futur. La France en commun ? Oui, en élargissant notre action au monde, en appui sur les forces sociales travailleuses les plus déterminées. Les probabilités de catastrophes sont palpables ? Les voies qui conduisent à un autre monde ne le sont pas moins. Posons nos vieilles lunettes. Ensemble, véritablement ensemble, nous verrons plus clair.

Louis Aminot Brest le, 12 février 2016

Technicien à statut ouvier à la retraite Membre de l’Association des Communistes Unitaires et d’Ensemble!

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13 février 2016 6 13 /02 /février /2016 07:52

Hauts-de-Seine

117 millions d'euros se sont évaporés chez Patrick Balkany

Patrick Balkany est le maire de Levallois-Perret depuis 1983 (avec une période d'interruption de 1995 à 2001): plusieurs fois condamné pour ses pratiques mafieuses, sans cesse réélu grâce à ses pratiques clientélistes. Un rapport de la cour régionale des comptes dans un document de 192 pages pointe des "anomalies significatives" dans la gestion qui atteignent un total de 117 millions d'euros.

Rappelons que la ville de Levallois-Perret détient le record de France de l'endettement par habitant, soit 8444 euros pour chacun des 65 000 habitants. A tel point qu'en 2015, les impôts locaux ont été augmentés de 10% afin de boucler le budget.

Des emprunts toxiques avaient été souscrits par la collectivité auprès de Dexia et de la Société Générale: il en a coûté 17 millions à la Ville pour renégocier ces mauvais prêts. La Cour régionale des comptes s'interroge par ailleurs sur un marché "d'accompagnement et de conseil en communication" passé entre Levallois et la société de communication Bygmalion, celle qui avait servir à payer un certain nombre de collaborateurs de l'UMP et à enrichir certains responsables à l'occasion des Présidentielles. Bygmalion proposant bien sûr des prix bien supérieurs à ceux de ses concurrents. Pour la mise à disposition de consultants en communication Bygmalion, il en a coûté 218 000 euros à la ville alors que celle-ci a déjà 18 personnes qui travaillent à plein temps dans la communication.

A Levallois-Perret, on ne se déplace pas non plus sans son chauffeur, accessoire indispensable du parrain: un pour le maire, utilisé également comme garde du corps, un pour Isabelle Balkany, épouse et première adjointe, et un pour les directeurs des services.

Une enquête pénale ouverte sur la gestion de Levallois-Perret http://www.ouest-france.fr/ile-de-france/hauts-de-seine/levallois-perret-une-enquete-penale-ouverte-sur-la-gestion-de-balkany-4032549

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12 février 2016 5 12 /02 /février /2016 10:56

En proposant hier dans son allocution à TF1 et France 2 un référendum local sur l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, François Hollande a créé la surprise, car cela constitue un revirement par rapport à la justification de la légitimité du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes au nom de la raison technicienne des experts économiques et de l'aménagement du territoire, de la responsabilité des élus et de la valeur de la démocratie représentative et du prétendu message envoyé par des électeurs élisant depuis des décennies des élus locaux, régionaux, favorables à l'aéroport.

On peut considérer que cette "fausse bonne annonce est un piège" comme certains opposants historiques à l'aéroport mais il y a un tout de même un paradoxe à refuser la consultation directe du peuple sur ce projet qui soulève les passions et controverses depuis des années, qui impacte grandement, non seulement l'écologie, mais aussi l'aménagement du territoire des régions Bretagne et Pays-de-Loire. Nul de peut prétendre avoir la vérité révélée et décider pour tous, pas plus un petit groupe d'élus, de technocrates et de milieux d'affaires, que des associations et des activistes écologistes.

Le référendum permet une appropriation populaire de la question politique, un vrai débat public, un échange d'arguments sur le fond du dossier, sur ses tenants et aboutissants.

On dira: le diable est dans les (gros) détails.

S'il s'agit d'un référendum local à l'échelle de la communauté d'agglomération, du département, certains le voient aboutir sur la victoire certaine du Oui à Notre-Dame-des-Landes, disant qu'il risque de se transformer en référendum pour ou contre la ZAD, et de donner le coup de grâce à la résistance contre ce grand projet d'infrastructure à l'utilité et au modèle économique plus que douteux. Je ne sais pas s'il faut être aussi défaitiste sur la maturité politique du peuple: c'est en tout cas une position a priori qui n'est pas tenable.

Le Front de Gauche à l'occasion des élections Régionales en Bretagne s'était battu pour ce référendum tout en disant, avec plusieurs arguments (agricoles, écologiques, liés à l'aménagement du territoire, au mode de gestion capitaliste en PPP, aux priorités budgétaires pour l'Etat et la Bretagne) que, selon lui, cet aéroport de Notre-Dame-des-Landes ne se justifiait pas et avait beaucoup plus d'effets négatifs que positifs.

Aujourd'hui, il faut exiger que ce soit, sinon tous les Français, ce qui pourrait s'entendre sur une question aussi emblématique, du moins tous les habitants des régions Pays-de-Loire et Bretagne qui soient consultés sur ce projet d'aéroport car la construction de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes aurait des incidences sur notre aménagement du territoire, la fermeture des petits aéroports de proximité à l'ouest breton, la densification et l'étirement plus grand encore de la métropole nantaise avec une vitalité économique et démographique se déplaçant toujours plus à l'est de la Bretagne, sur l'axe Rennes-Nantes et le littoral sud du Morbihan.

La Bretagne souffre déjà du décrochage du centre-Bretagne et de l'ouest par rapport à l'est, la région débloque des budgets en lien avec les dessertes de transport pour Notre-Dame-des-Landes: il est normal que les bretons aient voix au chapitre.

Pour notre part, nous ne sommes pas opposés à ce référendum mais nous réclamons d'y participer en tant que finistériens, et nous savons que nous aurons tous les arguments à disposition pour montrer l'inutilité et la nocivité de ce nouvel aéroport à l'ouest de Nantes.

Ismaël Dupont

A lire aussi:

NDDL. Un référendum local après 20 ans de discorde [Chronologie]
http://www.ouest-france.fr/environnement/amenagement-du-territoire/notre-dame-des-landes/nddl-un-referendum-local-apres-20-ans-de-discorde-chronologie-4030617

NDDL. François Hollande demande un référendum local avant octobre
http://www.entreprises.ouest-france.fr/article/nddl-francois-hollande-demande-referendum-locall-avant-octobre-11-02-2016-254553

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11 février 2016 4 11 /02 /février /2016 11:50

C’est sur TF1 que Jean-Luc Mélenchon a décidé hier soir de rendre publique sa candidature à l’élection présidentielle. Certes, la formule est un peu alambiquée : il « propose » sa candidature. Mais il ne fait aucun doute que cette proposition est davantage qu’une hypothèse. Un site – jlm2017.fr – est déjà en ligne et il en a fait la promotion de façon réitérée lors de l’émission.

Mélenchon a jeté toute son énergie dans cette nouvelle bataille. Il s’y sent conduit par une analyse de l’état de la gauche. D’abord, il a récusé encore une fois l’hypothèse d’une primaire de toute la gauche. On le comprend : elle n’a aucun sens tant les bases politiques communes se sont davantage dissoutes pendant le quinquennat.

Il fait ensuite mine de ne voir aucune force favorable à une primaire de l’autre gauche. Il n’en est évidemment rien : l’idée d’un rassemblement des forces opposées à gauche à la politique gouvernementale s’exprime et se défend. Mais il récuse cette possibilité. Il est convaincu d’être le seul représentant crédible d’une alternative au hollandisme. En fait et plus au fond, il ne croit plus à une dynamique possible autour des partis et des forces constituées, notamment au Front de gauche.

Il décide donc de se présenter en s’adressant directement au peuple. D’où son choix d’un média de plus large audience – le 20 heures de TF1. D’où surtout son modèle d’une mobilisation citoyenne "à la Bernie Sanders" dont il fait aujourd’hui sa référence.

La gauche, selon lui, n’est plus une réserve de mobilisation. Il fera donc campagne au nom du peuple. Son slogan est trouvé : "La France insoumise, le peuple souverain". Sa visée est « l’intérêt général humain ». Sa méthode se trouve dans la sortie des traités européens et dans une laïcité affirmée.

Sur ces bases, Jean-Luc Mélenchon escompte un soutien direct et massif à travers son site Internet. Il met ses alliés de la gauche de gauche devant le fait accompli. Il ne négociera rien. C’est à prendre ou à laisser. On verra rapidement ce qu’il en est de ses espoirs de rassemblement citoyen sur une telle base.

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11 février 2016 4 11 /02 /février /2016 09:27
Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de TF1 (AFP-Le Monde)

Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de TF1 (AFP-Le Monde)

On le sentait, Jean-Luc Mélenchon ne pensait qu'à ça depuis 2012, se remettre en selle pour les fièvres narcissiques d'une nouvelle campagne présidentielle où le candidat de la gauche de gauche de toute façon ne pouvait être que lui, selon lui.

C'est désormais chose faite, Jean-Luc Mélenchon a annoncé sa candidature aux Présidentielles sur TF1 hier soir, refusant "la petite scène des (hypothétiques) primaires de la gauche", sans qu'elle fasse l'objet de discussions ou d'une validation collective impliquant les différentes composantes et les militants au niveau du Front de Gauche.

C'est Mélenchon, très gaullien, au-dessus des partis, face aux Français.

Comme souvent avec lui, on est agacé par la politique du fait accompli, les accents mégalos et le fait césariste qui prime, à rebours de tous les discours sur la VI ème République et la lutte contre les excès du présidentialisme, le projet et le collectif avant l'égo.

Jean-Luc Mélenchon, qui est brillant, plutôt constant dans ses discours depuis des années, bien connu maintenant et qui utilise aussi assez bien les médias, du moins pour y être invité car il sait y créer l'événement et la sensation, même si ça se retourne parfois contre sa crédibilité, a bien sûr des arguments à faire valoir pour faire un score correct au premier tour des présidentielles (les sondages à 15 mois des présidentielles lui donnent 10% d'intentions de vote, mais cela ne veut pas dire grand chose) mais il sera sans doute en deçà de 2012 car depuis, Jean-Luc Mélenchon a déçu et énervé plus d'un de ses électeurs de 2012 par ses foucades, ses excès, son discours pas toujours respectueux et manquant de mesure, certaines saillies populistes.

Nous ne nierons pas sa contribution très forte, décisive, à la réussite de la campagne du Front de Gauche en 2012, qui, même sans être à la hauteur des espérances qu'elle avait fait naître à un moment au niveau du résultat numérique, a permis de mettre l'accent sur les questions sociales et démocratiques dans cette présidentielle, et de remettre la rupture au goût du jour.

Bien sûr, le fond des idées qu'il défend contre le libéralisme, l'austérité, le pouvoir de l'oligarchie reste juste, mais il aurait été intéressant de pouvoir décider de manière collective des moyens de leur donner le plus efficacement possible un débouché dans le réel en faisant en sorte de ne pas multiplier les candidatures à la gauche de Hollande ou Valls, sous peine d'être tous condamnés à la marginalité et à un second tour droite-extrême-droite qui ne peut contenter personne à gauche.

Croire à son étoile est une condition pour réussir le pari de convaincre mais cela ne suffit pas.

Surtout, ce sera difficile pour Mélenchon de rassembler et de faire campagne en comptant sur les seules forces d'un Parti, le Parti de Gauche, qui ne compte plus que quelques milliers d'adhérents (moins de 10 000) et peu de ressources. Il y a bien sûr tous les militants, tous les électeurs du Front de Gauche et de ses composantes, mais ils vont probablement être très partagés.

D'où l'appel au peuple, au "nouveau parti des internautes", mais quand on se met a priori en marge de toute construction unitaire dans la gauche de gauche en mettant tout le monde devant le fait accompli, quand on met sa personne, pensée comme le sauveur suprême, avant la construction collective du projet, c'est plus difficile d'élargir.

Pour nous, le projet, le programme, et la construction politique, importent bien plus que le casting, que le bonhomme: nous n'excluons pas de voter et d'appeler à voter pour Jean-Luc Mélenchon, si c'est le mieux à même en 2017 d'être utile pour mobiliser autour des idées de rupture avec l'austérité, le libéralisme, et de donner quelques chances à la victoire d'une gauche différente du néo-libéralisme et du néo-conservatisme de Valls et Hollande, mais nous sommes échaudés par l'expérience du partenariat compliqué au niveau du Front de Gauche avec Jean-Luc Mélenchon, et actuellement fort sceptiques et agacés par ces pratiques individualistes dont on peut discuter le sens des responsabilités.

Déclarer sa candidature à la présidentielle sur la chaîne de télévision de Bouygues avant de le faire dans sa camp politique et face aux militants du Parti de Gauche ou du Front de Gauche, c'est tout un symbole.

Ismaël Dupont

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Sur Public Sénat:

La "proposition" de candidature à la présidentielle du porte-voix du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon n'a été "ni discutée ni décidée" avec le Parti Communiste.

La "proposition" de candidature à la présidentielle du porte-voix du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon n'a été "ni discutée ni décidée" avec le Parti communiste, a assuré mercredi soir à l'AFP Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF.

"Cette proposition n'a été ni discutée ni décidée dans le cadre du Front de gauche", composé du Parti de gauche, du PCF et d'Ensemble de Clémentine Autain, a-t-il déclaré, assurant l'avoir apprise "en regardant TF1".

"On se s'explique toujours pas pourquoi il n'est pas possible de discuter avec Jean-Luc Mélenchon", a-t-il ajouté, alors que le Parti communiste participe au processus d'une primaire de la gauche et des écologistes, totalement refusé par le député européen.

Selon M. Dartigolles, "le peuple de gauche est très inquiet de la tournure que prennent les événements, très inquiet de la manière dont 2017 se présente". "Le peuple de gauche n'a pas besoin d'une candidature en solo, il n'est pas préoccupé par le casting, ce qu'il attend c'est une nouvelle espérance", a-t-il observé.

Jean-Luc Mélenchon a annoncé sur le plateau du 20 heures de TF1 mercredi qu'il proposait sa candidature à la présidentielle de 2017.

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10 février 2016 3 10 /02 /février /2016 16:47

Le texte de loi pour la prolongation de 3 mois de l'état d'urgence a été adopté hier au Sénat par 315 voix contre 28, dont tous les Sénateurs communistes et Front de Gauche qui ont voté contre, et une partie des écologistes.

Aucun sénateur n'avait voté contre l'instauration de l'état d'urgence en novembre. Elle avait été adoptée par 336 pour et 12 abstentions (11 Communistes Républicains Citoyens et 1 écologiste).

A l'Assemblée Nationale, un amendement prévoyant le retrait de la loi de l'article 2 sur la déchéance de nationalité a été repoussé par 176 voix contre 118. Ont voté contre la la déchéance de nationalité tout les députés PCF et Front de Gauche, la majorité des écologistes, des socialistes frondeurs et une partie des Républicains.

L'article 2 du projet de loi inscrivant la déchance de nationalité dans la Constitution n’a été voté, mardi 9 février, qu’avec 14 petites voix d'avance, par 162 voix contre 148 (et 22 abstentions). Le vote a révélé une fracture croissante entre partisans et opposants du texte, au sein même de la majorité socialiste. Si 119 socialistes ont voté pour, 92 ont voté contre, bien au-delà de l'aile gauche du parti ou des "frondeurs". Le texte divise également au sein du groupe Les Républicains (LR), où 32 députés ont voté pour alors que 30 ont voté contre. Le groupe Front de gauche, les "frondeurs" socialistes, la majorité des écologistes ainsi que des radicaux de gauche ont voté contre.

Voir la déclaration de Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, au sortir de ce vote:

Révision constitutionnelle : « Mettre un terme à l'examen du texte en votant contre »

Le vote à l'arraché, hier soir à l'Assemblée, de la déchéance de nationalité confirme que la révision constitutionnelle peut être mise en échec. Elle ne rassemble pas les 3/5 des parlementaires nécessaires à sa ratification. J'appelle l'ensemble des députés de gauche et les partisans de la République à mettre un terme à l'examen de ce texte en le rejetant cet après-midi lors du vote solennel à l'Assemblée nationale.

La révision constitutionnelle proposée par le Président de la République n’apporte aucune réponse aux enjeux auxquels doit faire face notre peuple. La banalisation et la glorification de l’état d’urgence alimentent l’illusion d’une solution sécuritaire. L’invocation de la déchéance de nationalité contribue à nourrir des réflexes identitaires dangereux et des analyses erronées de la situation. Dans le même mouvement, la réforme pénale qui s’annonce vise à faire entrer dans le quotidien des mesures d’exception réduisant les droits et libertés individuelles. Les communistes s’opposent à cette dérive sécuritaire du pouvoir et à l’approfondissement des logiques de division populaire. A l’inverse, c’est en étant pleinement elle-même, en s’appuyant sur la vitalité démocratique de notre peuple que la République pourra relever le défi de l’avenir. C’est en s’efforçant d’honorer sa promesse de liberté, d’égalité et de fraternité qu’elle parviendra à recréer une unité.

Jamais la précipitation et l’improvisation ne devraient présider à la modification des textes fondamentaux de la République. Le tournant pris pas ce débat est de plus en plus politicien et nauséabond. Il ne sert une fois de plus que les idées d’extrême droite dont notre peuple doit se dégager d'urgence.

Le Parti communiste français appelle à amplifier l'action pour une véritable visée d'émancipation humaine. C’est une tout autre modification constitutionnelle qu’il faut mettre à l’ordre du jour, d’une tout autre ampleur et d’un tout autre contenu : pour un nouvel acte fondateur d’une VIème République s’appuyant pleinement sur la souveraineté populaire et la participation citoyenne.

Pierre Laurent

Pierre Laurent

Eliane Assasi

Eliane Assasi

Voici le discours d'Eliane Assassi, sénatrice communiste Front de Gauche de Seine St Denis, et présidente du groupe CRC (Communistes, Républicains, Citoyens) hier, mardi 9 février au Sénat: 

Une justice soumise, dans bien des circonstances, à la puissance administrative et à la puissance policière

La France vit depuis plus de deux mois et demi sous un régime d’état d’urgence. Sa mise en œuvre dès le 13 novembre pour rétablir la sécurité et pour répondre à la terrible angoisse de nos concitoyens, suscite aujourd’hui des interrogations, une inquiétude croissante et l’hostilité d’associations et de personnalités dans leur diversité.

Depuis le 16 novembre, le Parlement est accaparé par cette question de l’état d’urgence et par la regrettable — très regrettable — initiative sur la déchéance de la nationalité.

Congrès de Versailles, première prorogation de l’état d’urgence, propositions de loi d’initiative sénatoriale pour « renforcer l’efficacité de la lutte anti-terroriste » ou pour « prévenir les actes terroristes dans les transports »… projet de loi de réforme du code de procédure pénale, projets de loi d’application de la révision constitutionnelle… ce second projet de prorogation prend place au sein d’un Maelstrom, couronné par le débat constitutionnel qui se déroule en ce moment même à l’Assemblée nationale.

Monsieur le Ministre, vous connaissez bien la principale critique à l’égard de votre dispositif : celle de l’inefficacité dans la lutte contre le djihadisme de Daech. Sur les quelque 3 200 perquisitions administratives, seules 4 enquêtes ont été ouvertes pour des faits de terrorisme et seule une personne a été mise en examen à ce jour…

Le temps me manque pour détailler les effets désastreux de ces perquisitions hors droit, de ces assignations parfois si excessives que les avant-projets de lois d’application de la révision constitutionnelle envisagent même de les assouplir quelque peu.

Le gouvernement serait-il bipolaire ? Aujourd’hui la prorogation de l’état d’urgence stricto sensu est proposée alors que dans le même temps les excès sont en partie reconnus dans les avant-projets précités. 
Peut-être ces derniers n’ont-ils pour objectif que d’amadouer une gauche récalcitrante ?

Si le dispositif de l’assignation ne respecte pas les libertés publiques selon votre propre aveu, il faut modifier ce projet de loi dès aujourd’hui. C’est ce que nous vous proposerons de faire par voie d’amendement.

Monsieur le Ministre, mes chers collègues, je repose mot pour mot la même question que j’ai posée le 20 novembre dernier : « des mesures très larges doivent être prises pour faire face à la situation, mais ne peuvent-elles pas l’être dans le cadre de notre droit commun avec un contrôle de l’autorité judiciaire ? »

Pouvons-nous accepter de maintenir cette situation qui brise l’équilibre des pouvoirs, avec d’une part, un pouvoir exécutif surpuissant et d’autre part des pouvoirs législatif et judiciaire rabaissés.

L’état d’urgence c’est un état d’exception.

Il entraine une mise en cause significative des droits des citoyens : ce qui suscite interrogations et critiques au-delà même de nos frontières.

Est-il appréciable, Monsieur le Ministre, que notre pays soit pointé du doigt par une association aussi reconnue et rigoureuse qu’Amnesty International ?

Je le dis une nouvelle fois — c’est une constante dans mes interventions depuis le congrès de Versailles — la dérive sécuritaire en cours, les propos martiaux, la remise en cause des libertés publiques c’est une victoire de Daech.

Oui ces intégristes assassins « nous tendent un piège politique » pour reprendre la formule de l’ancien garde des Sceaux, Robert Badinter, qui souligne par ailleurs que « ce n’est pas par les lois d’exception et des juridictions d’exception qu’on défend la liberté contre l’ennemi ».

Des forces comme Daech se nourrissent de la violence, du sang, et du malheur. 
Oubliez-vous que ce sont des dizaines de milliers de bombes déversées sur l’Irak qui ont donné naissance à ces combattants qui mêlent fanatisme et soif de vengeance contre la destruction insensée de leur pays de leur peuple ?

Face à ce phénomène, l’arme absolue c’est la liberté, la démocratie, la paix.

Oui il faut assurer la sécurité de notre peuple. Il faut pour cela donner les moyens humains et matériels à nos forces armées et à notre police, il faut réorganiser notre Renseignement qui lui aussi a été victime de l’austérité.

Cette politique de sécurité doit prendre place dans un vaste effort de reconstruction de notre société dévastée par des décennies de crises.

Monsieur Valls m’a heurtée quand il nous a répondu ainsi qu’à d’autres : « expliquer c’est déjà vouloir un peu excuser ».

Comme s’il pouvait exister une bienveillance de la part de ceux qui s’efforcent d’expliquer. Certes, une grande part de libre arbitre est à prendre en compte, mais le fléau de la radicalisation ne prend pas ses seules racines dans les parcours personnels. Pour mieux lutter et combattre, il est nécessaire de comprendre l’ensemble en cherchant toutes les explications.

Oui, le fanatisme religieux se nourrit de terribles fractures : là où la République faillit, là où « liberté, égalité, fraternité » ne demeurent que paroles vaines.

Combien de jeunes tomberont-ils encore dans le fanatisme ? Si des actions d’envergure ne sont pas menées sans attendre, en urgence, en grande urgence !

Le Conseil d’État dans son avis sur ce projet de loi de prorogation a lui-même signalé que l’état d’urgence doit demeurer temporaire. Cependant le « péril imminent » qui justifie l’état d’urgence, a été contourné. Ce péril imminent, selon les propos du Premier ministre lui-même à la BBC, demeurera jusqu’à l’éradication de Daech. Ce péril imminent devient donc un péril permanent.

En conséquence, l’orientation préconisée par le Conseil d’État lui-même est de faire entrer dans le droit commun l’état d’urgence ce qui sera l’objet du prochain projet de réforme du code de procédure pénale.

Monsieur le Ministre, il faut dire la vérité : l’état d’urgence va devenir permanent et la justice soumise, dans bien des circonstances, à la puissance administrative et à la puissance policière.

Pour conclure…, à mon sens, l’état d’urgence dépasse largement la réaction à la menace terroriste. C’est l’accélération du processus que nous pressentions : la montée en puissance de l’autoritarisme dans les démocraties occidentales. La violence libérale qui est à l’œuvre sur le plan économique et social exige un État fort comme le souligne par exemple l’affaire des Goodyear. Avec l’état d’urgence, le pouvoir exécutif s’affirme, le Parlement et la Justice s’inclinent.

Nous sommes en guerre martelez-vous ! Mais quels sont donc vos projets de paix, Monsieur Le Ministre ? Comment allez-vous apaiser notre pays, redonner l’espoir ? Comment allez-vous participer à l’essor de la fraternité en France et dans le monde ?
Nous sommes de plus en plus nombreux à être las des propos guerriers et des coups de menton.

Nous sommes de plus en plus nombreux à vouloir comprendre, à vouloir des actes et un discours de justice, de progrès de réconciliation ; des actes et un discours républicain et —enfin ! – des actes et un discours de gauche !

Vous l’aurez compris, le groupe CRC voter contre cette prorogation de l’état d’urgence.

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10 février 2016 3 10 /02 /février /2016 11:52

Pourquoi être ouvert à la perspective de l'organisation de primaires à gauche?

Ceux qui promeuvent de telles primaires pour beaucoup se refusent à voir la gauche française évincée du second tour des Présidentielles, ou, ce qui reviendrait sans doute au même, François Hollande ou Manuel Valls porter les couleurs du PS au 1er tour des élections présidentielles et capter (mal) le vote utile de gauche.

François Hollande et Manuel Valls, menant une politique néo-libérale, néo-conservatrice, de droite, n'ont aucune légitimité pour représenter les valeurs et l'électorat de gauche aux élections présidentielles de 2017.

Actuellement, on sait que dans le cadre d'une situation politique figée, avec Hollande d'un côté du côté du nouveau parti libéral démocrate qu'est devenu le PS dans ses instances dirigeantes soumises aux logiques présidentielles et européennes-libérales, et Mélenchon, en candidat auto-proclamé de la gauche de la gauche, dont l'effet de surprise et de rassemblement est peut-être un peu émoussé, plus d'autres candidats très certainement à la gauche du PS, il n'y aurait guère de résultat concluant à attendre pour les citoyens et militants en attente d'une vraie politique de gauche à l'issue des premiers et seconds tours des présidentielles.

Les primaires peuvent être un moyen de déjouer le pronostic d'un 2nd tour Sarkozy ou Juppé - Le Pen, un moyen, si un débat peut se développer sur les politiques de fond à mener pour sortir le pays du chômage de masse, des inégalités, de la crise culturelle, démocratique et sociale dans laquelle il s'enfonce, pour faire émerger une candidature beaucoup plus rassembleuse et représentative de la diversité de la gauche que celle de Hollande ou Valls.

De la gauche du PS au Front de Gauche, en passant par les écologistes, il peut y avoir des marges de manœuvre pour trouver un projet de gouvernement et un candidat commun. Au Portugal, le bloc de gauche et le Parti Communiste soutiennent un gouvernement socialiste qui tourne le dos à l'austérité, qui augmente le SMIC, qui résiste aux sirènes et à la pression de fer du libéralisme autoritaire européen. A la gauche du PS, on partage avec les composantes du Front de Gauche et les écologistes sans doute un certain nombre de diagnostics communs sur la gravité de la politique du gouvernement et ce qu'il faudrait faire dans un premier temps comme réformes d'urgence.

En même temps, tout cela reste bien conditionnel et non exempt de contradictions et de dangers.

En l'absence d'une participation de François Hollande aux primaires, l'objectif de réunir la gauche autour d'un candidat pouvant accéder au second tour est très hypothétique à supposer qu'il se représente, et en sa présence, on voit mal comment les électeurs, sympathisants et militants de la gauche de gauche pourraient s'engager à voter au 1er tour pour le vainqueur des primaires ... même si c'est Hollande, Valls ou Macron.

Le candidat commun de la gauche pouvait être une possibilité dans les années 60 ou 70 quand il y avait certaines convergences idéologiques entre Mitterrand, épousant à l'époque des thèses marxistes par opportunisme, et les communistes, aujourd'hui, quelles convergences il y a t-il entre Hollande, Valls, et les électeurs du Front de Gauche? Aucune. Pour nous, ce sont des hommes de droite.

Les candidats que l'on pourrait trouver à la gauche du PS pour tirer une candidature commune de gauche - Taubira, Hamon, Montebourg ou autres - peuvent aussi poser question, dans la mesure où ils ont soutenu des années de politique gouvernementale austéritaire et libérale.

Les Primaires à gauche pourraient être sur le papier un moyen de créer une dynamique d'implication politique citoyenne contrariant le scénario annoncé d'un second tour droite-extrême-droite, elles pourraient faire entendre d'ici quelques mois la diversité des voix et des projets de gauche (ce qui n'est pas vraiment le cas aujourd'hui) et mettre dans le débat présidentiel des thématiques centrales comme l'austérité, le pouvoir de la finance, le chômage, le développement des inégalités, l'Europe, et faire émerger de nouvelles exigences du peuple vis à vis de la gauche.

L'exemple des primaires du Parti Travailliste en Grande-Bretagne avec la percée de Corbyn et celui des primaires du Parti Démocrate aux Etats-Unis avec la percée de Sanders peuvent nous donner des arguments en faveur des primaires pour déverrouiller un système institutionnel sous contrôle de l'oligarchie.

Mais elles peuvent aussi se résumer à une histoire de casting: qui est le mieux placé pour accéder au second tour et l'emporter éventuellement au second tour?

Par ailleurs, le Parti Communiste est engagé sur une plate forme de rupture anti-austéritaire, anti-libérale, avec le Front de Gauche, qui, quoique affaibli, peut aussi profiter des Présidentielles pour retrouver une audience et remettre le peuple en mouvement.

La première tâche ne serait-il pas de s'entendre avec les partenaires - Ensemble et le Parti de Gauche un objectif, une stratégie, un projet, un candidat communs? Même avec l'objectif de dépasser le cadre et la nature actuels du Front de Gauche et de rassembler plus largement.

Tout cela mérite qu'on y réfléchisse sérieusement.

Cette tribune de Michaël Foessel donne quelques éléments de réflexion en défaveur des primaires.

A propos des primaires….

Par Michaël Fœssel, philosophe, et membre du conseil de rédaction de la revue "Esprit".

Le mantra des primaires

Nul ne disconviendra que la gauche française traverse l’une des crises idéologiques les plus profondes de son histoire. Qu’il s’agisse de la politique économique, de l’Europe, des migrants ou du terrorisme, il n’est pas un seul enjeu fondamental où un espoir de consensus se dessine à l’horizon du camp progressiste.

Le point de non retour a peut-être été atteint avec le projet de réforme constitutionnelle du gouvernement (qui ne comporte pas seulement l’article sur la déchéance de nationalité). A l’intérieur même du Parti socialiste, le conflit porte désormais sur la nature de l’État de droit, ce qui n’est pas une mince affaire, même pour des dirigeants politiques habitués à mettre beaucoup d’eau dans leur vin.

Dans un contexte aussi délétère, on pourrait croire que toutes les opportunités d’aggiornamento sont les bienvenues. C’est ce qu’ont dû penser les signataires d’une pétition qui, autour de Thomas Piketty, ont réclamé l’organisation d’une primaire qui réunirait tous les candidats potentiels de la gauche et des écologistes lors de la prochaine élection présidentielle[1].

Conscients du fait que l’un des principaux obstacles à l’unité de la gauche réside dans la politique menée par François Hollande, ils préconisent une solution qui, du moins en apparence, ne s’abrite pas derrière l’évidence présidentialiste. Dans le schéma préconisé par les pétitionnaires, Hollande devrait lui-même se soumettre à une telle présélection par les urnes. N’est-il pas souhaitable de soumettre la politique présidentielle au verdict des électeurs de son camp?

Pour autant qu’on l’applique même au Président en exercice (ce qui ne se fait nulle part pour l’instant), la logique des primaires a le mérite de rejouer la légitimité démocratique à la fin de chaque mandat. Mais, même de ce point de vue, le bénéfice est ambigu. Loin de limiter la personnalisation de la politique, les primaires consacrent le système présidentiel.

L’exemple américain montre parfaitement ce que l’institutionnalisation des primaires fait à la politique: campagne électorale permanente, financiarisation exponentielle de la vie publique, personnalisation à outrance des enjeux. On cite toujours Barack Obama pour vanter les primaires; c’est malheureusement Donald Trump que nous avons aujourd’hui sous les yeux. Dans les conditions actuelles du débat public, rien ne garantit que ce mode de désignation favoriserait l’émergence d’un «Pablo Iglesias à la française», ce qui est peut-être le rêve secret de Thomas Piketty et de quelques autres.

Après l’adoption absurde du quinquennat, les primaires achèvent en effet de soumettre le temps politique au temps médiatique, les joutes oratoires l’emportant de manière définitive sur la confrontation des projets. A un moment où le système présidentiel français manifeste dramatiquement ses limites, la réduction de la politique à un concours entre têtes d’affiches ne peut qu’aggraver le discrédit du politique.

Les partisans des primaires (Terra Nova en 2012, la gauche du PS aujourd’hui) insistent sur la légitimité que le vote citoyen apporte au futur candidat. Déjà discutable en principe, cette réduction de la légitimité à l’élection est contredite par les faits. Pour ce qui est du passé, on peut juger de la «légitimité citoyenne» dont a pu bénéficier François Hollande: sa courbe de popularité s’est effondrée dès le lendemain de son accession à l’Elysée. Les millions de voix récoltées lors des primaires socialistes n’ont rien fait pour garantir une légitimité qui s’est d’abord abîmée sur les promesses non tenues.

Au contraire, un des vices principaux de l’élection du Président de la République au suffrage universel est de convaincre l’heureux élu qu’il dispose d’une légitimité à toute épreuve. Autrement dit, adoubé deux fois par le suffrage populaire (celui des primaires et celui de l’élection proprement dite), il se croit doublement autorisé à ne tenir aucun compte de ses promesses de campagne (par exemple la renégociation du Traité européen sur l’équilibre budgétaire). Nous savons déjà que les primaires sont une machine à s’affranchir un peu plus du sérieux de la parole publique.

Pour ce qui concerne l’avenir, les partisans des primaires affirment que la procédure est tellement populaire que tous les partis seront contraints de l’adopter. Comment expliquer, alors, que le seul parti qui, à coup sûr n’y recourra pas (le Front national) se porte aussi bien? La logique de la Vème République est plus que discutable, mais tant que l’on n’aura pas rompu avec elle (ce que les pétitionnaires ne proposent nullement), elle s’impose de manière implacable.

Dans l’état actuel des institutions, la seule véritable «primaire» est constituée par le premier tour de l’élection présidentielle où les citoyens sont invités à trancher entre les candidats et les projets qu’ils portent. Que l’articulation entre un candidat et un projet ne soit « naturelle » que pour l’extrême-droite en dit long sur l’état de la démocratie française. Mais aucun recours à des primaires ne sera en mesure de répondre à cet état de fait.

Car les primaires ne sont qu’un moyen de déléguer aux électeurs le soin d’arbitrer les conflits idéologiques que les partis sont incapables d’affronter. Comme il est exclu de faire voter les citoyens sur des motions programmatiques (ce qui aurait déjà plus de sens), on les invite à se prononcer sur des personnalités.

Y a-t-il là un bénéfice démocratique quelconque? La démocratie implique la participation du peuple à l’élaboration de la loi, pas seulement le petit avantage narcissique de désigner le chef. Dans cette désignation, les sondages font office de critères : en 2007 (primaires militantes) comme lors des dernières élections présidentielles (primaires ouvertes), ce sont eux qui ont joué le rôle principal dans la désignation du candidat socialiste. Hélas, le procédé n’est vertueux que le temps d’une campagne.

Nous sommes par là ramenés au point de départ: l’éclatement de la «gauche» française qui fait douter même de l’univocité de ce vocable. Y répondre par des primaires, c’est supposer que Jean-Luc Mélenchon pourrait s’engager à faire campagne pour François Hollande (ou pour Manuel Valls, voire Emmanuel Macron…) dès le premier tour, et vice versa. Il suffit de poser la question pour y répondre.

Il faut manifester une solide croyance dans la magie du vote populaire pour penser qu’il suffira à combler l’abîme qui sépare les positions politiques de ceux qui se réclament du mot de «gauche». L’adage selon lequel «quand on ne sait pas décider, on vote» fonctionne ici à plein. Il peut, à la rigueur, fonctionner le temps d’une campagne. Mais quand est venu le temps de gouverner, les équivoques éclatent au grand jour, accroissant encore un peu plus la défiance des citoyens pour la parole publique.

Les primaires sont comparables à des soins palliatifs qui évitent à la gauche (on en dirait à peu près autant de la droite classique) de regarder en face ses propres contradictions. Encore le remède participe-t-il ici au mal: les primaires ôtent aux militants des partis le droit de participer à l’élaboration des programmes pour les réduire au statut de supporters mis au service d’une écurie présidentielle. Si, à la faveur de la lassitude populaire à l’égard de Nicolas Sarkozy, l’illusion a pu fonctionner en 2012, elle est condamnée aujourd’hui à l’échec.

Michaël Fœssel

[1] Libération, 11 janvier 2016. En plus de Piketty, on compte parmi les premiers signataires: Daniel Cohn-Bendit, Yannick Jadot, Michel Wievorka, Marie Desplechin, Romain Goupil, Dominique Méda, Julia Cagé.

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