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8 juillet 2016 5 08 /07 /juillet /2016 06:12

Prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité requis contre Serge Dassault

7 JUILLET 2016 | PAR YANN PHILIPPIN

Au terme de son procès pour blanchiment de fraude fiscale, le parquet a requis deux ans de prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité contre Serge Dassault. Mediapart raconte comment l’avionneur n’a cessé de dissimuler ses tirelires offshore au fil des scandales de corruption, jusqu’à leur régularisation tout sauf spontanée.

Serge Dassault n’ira pas en prison, mais risque fort de perdre le siège de sénateur auquel il tient tant. Au dernier jour de son procès pour blanchiment de fraude fiscale, le parquet national financier a requis, jeudi 7 juillet, deux ans de prison avec sursis, cinq ans d’inéligibilité et 9 millions d’euros d’amende contre l’avionneur, sénateur LR et ancien maire de Corbeil-Essonnes, qui a planqué jusqu’à 31 millions d’euros sur quatre comptes au Liechtenstein et au Luxembourg. Le verdict a été mis en délibéré au 1er septembre.

« Pour Serge Dassault, il y a sa loi et il y a la loi des autres », a asséné la procureur Ulrika Delaunay-Weiss. « Il y a la République et ses mandats politiques, dont on recherche les honneurs comme à la cour du roi, et l’arrière-cour de Serge Dassault, dans laquelle celui-ci piétine et bafoue les valeurs républicaines. Il vous appartient de dire que […] le droit s’applique aussi, ne lui en déplaise, à Serge Dassault », a-t-elle lancé au tribunal.

Ce procès a en effet montré l’immense mépris de Serge Dassault pour la justice de son pays. Après avoir annulé à deux reprises son audition pendant l’enquête, le sénateur n’a pas daigné se présenter à son propre procès. Soulignant qu’il s’agit pourtant de la procédure « normale », le président du tribunal a même suggéré de modifier le calendrier d’audience si Dassault « se décidait à venir nous donner quelques précisions ». Sans succès.

Le week-end dernier, Dassault était pourtant tranquillement au baptême de la promotion Marcel Dassault de l’École de l’air à Salon-de-Provence. « Il est évidemment beaucoup moins glorieux de se retrouver devant la 32e chambre correctionnelle en tant qu’industriel et sénateur, pour avoir dissimulé pendant plus de quinze ans des dizaines de millions à l’administration fiscale », a lancé la procureur Ulrika Delaunay-Weiss.

En l’absence de Dassault, sa version s’est résumée aux rares et brefs courriers qu’il a envoyés pour régulariser ses cagnottes. Il y explique avoir hérité ces fonds de son père, Marcel Dassault. Il jure même qu'il n’était « pas au courant, même après le décès de mes parents, du fonctionnement de ces comptes », qui étaient soi-disant« placés sous la responsabilité de [son] frère », décédé en 2011. Ses avocats insistent d’ailleurs sur le fait qu’il a régularisé la situation de sa propre initiative en juin 2014. Ils ont même plaidé, sans rire, qu’il « était dans l’ignorance, en tout cas précise, de ses avoirs à l’étranger ».

C’est un pieux mensonge. Grâce aux quelques informations livrées à l’audience, et aux éléments issus de la procédure pour achats de votes, Mediapart peut démontrer que Dassault connaissait très bien ses caisses noires, qui n’ont cessé d’être déplacées au fil des scandales de corruption, sans doute pour mieux les dissimuler. Et qu’il n’a régularisé la situation qu’après avoir été pris la main dans le sac, en donnant le moins de détails possibles.

Là où Serge Dassault dit la vérité, c’est sur le fait que cette cagnotte lui vient de son père. Selon la version distillée par la famille, et confirmée jeudi par ses avocats, Marcel Dassault, déporté à Buchenwald en 1944 parce que juif, avait planqué de l’argent en Suisse dans les années 1950 « pour se protéger et protéger sa famille », parce qu’il avait« peur de revivre la guerre ». Il se fait d’ailleurs construire à ce moment-là une belle villa à Genève, au bord du lac Léman. On a appris à l’audience que la demeure est louée par l’État à la famille Dassault, parce qu’elle abrite la résidence de l’ambassadeur de France auprès de l’ONU à Genève !

Si Dassault n’est pas venu, c’est parce que ses tirelires offshore constituent en fait sa caisse noire, utilisée pour verser des pots-de-vin en Belgique et pour financer la corruption électorale présumée à Corbeil-Essonnes. Ce qui lui vaut une mise en examen pour achats de votes dans une autre enquête.

Mais de cela, personne n’a parlé à l’audience. Pour des raisons de procédure, les éléments issus de l’enquête pour achats de votes (relevés bancaires, auditions du comptable suisse de Dassault) n’ont pas pu être versés au dossier. Idem pour ceux recueillis à la demande du parquet par la justice luxembourgeoise, parce que le blanchiment de fraude fiscale n'existe pas dans ce beau pays. Il était donc interdit de les évoquer au tribunal. Et les trois avocats de Dassault, qui ont monopolisé l’audience avec leurs recours de procédure, guettaient le moindre faux pas. Faute de documents, l’enquête n’a même pas pu établir l’origine des fonds !

Ce qu’oublie de dire la famille, c’est que Marcel, par ailleurs député de l’Oise, s’est servi de cette caisse noire pour financer ses amis politiques du RPR (devenu LR) et ses campagnes électorales. Pour gérer ce magot suisse, Marcel a embauché deux professionnels locaux d’une fidélité et d’une discrétion absolues : l’avocat Luc Argand et le comptable Gérard Limat.

À la mort de Marcel en 1986, les fonds reviennent à son épouse Madeleine (décédée en 1992), et à ses deux enfants Claude (décédé en 2011) et Serge. Mais contrairement à ce que prétend Serge Dassault, c’est bien lui, et pas son frère, qui semble, en tant que nouveau patron du groupe aéronautique Dassault, le nouveau gardien de la cassette familiale.

Il rencontre d’ailleurs, pour la première fois, le comptable occulte Gérard Limat une semaine après le décès de son père, très probablement pour être initié au secrets financiers helvètes. Serge Dassault « est un grand ami, un ami très proche. Je ferai n'importe quoi pour lui tant que la loi m'y autorise », a dit le comptable dans le cadre de l’affaire des achats de votes présumés, dans laquelle il est mis en examen.

Trois ans plus tard, en 1989, Serge Dassault semble en tout cas avoir été tout à fait informé par Limat : il utilise l’un des comptes suisses détenu par sa mère, dissimulé derrière la société écran Sophie SA, pour verser 1,5 million d’euros de pots-de-vin au parti socialiste flamand, afin obtenir un contrat militaire en Belgique. Le scandale éclate dans la presse en mars 1995. Coïncidence : une partie de ses avoirs suisses sont transférés six mois plus tard vers deux comptes au Liechtenstein, détenus par deux fondations ad hoc nommées Pégase et Balzane, qui garantissent l’anonymat complet du bénéficiaire.

En 1998, Dassault est renvoyé devant un tribunal belge, qui le condamnera à deux ans de prison avec sursis pour « corruption active ». Sans doute par prudence, son comptable a transféré, quelques mois avant son procès, une autre de ses tirelires suisses au Luxembourg, sur un compte ouvert au nom de la société écran Merger Investments, immatriculée aux Îles vierges britanniques. Le bénéficiaire en est officiellement son comptable helvète Gérard Limat, en vertu d'un contrat de fiducie passé avec Dassault, ce qui ajoute une deuxième couche d'opacité.

Serge Dassault a été élu maire de Corbeil en 1995. Dans la foulée, il demande au précieux Limat de lui livrer du cash à Paris, qu’il devait tirer des comptes des fondations au Liechtenstein. Jusqu'en 2012, le comptable suisse a livré la bagatelle de 53 millions d’euros de billets à Dassault en personne, directement dans son bureau parisien des Champs-Élysées, en particulier en période d’élections municipales.

Mais patatras, le 8 juin 2009, le Conseil d’État invalide l’élection de Dassault pour « dons d’argent » aux électeurs. Huit jours plus tard, le 16 juin, l’avionneur ferme les fondations. Désormais, le comptable Limat utilise essentiellement le compte luxembourgeois Merger pour financer les remises d’espèces, mais aussi les virements bancaires qui ont grassement rémunéré les agents électoraux présumés de Dassault.

Après avoir longtemps enterré l’affaire (lire ici), la justice se décide à ouvrir une information judiciaire pour achats de votes le 21 mars 2013. Coïncidence : le comptable Limat ouvre un mois plus tard un nouveau compte luxembourgeois à la banque Pictet, dissimulé derrière la société écran Mouzara, et y transfère la quasi-totalité des fonds du compte Merger, qui a servi à financer la corruption électorale présumée : il n’y a plus que 1,3 million d’euros dessus fin 2013, contre 14,9 millions un an plus tôt. C’est ce qu’on appelle prendre ses précautions…

Le coffre-fort secret de Dassault au Luxembourg

Cela n’a pas suffi. Les juges d’instruction et les policiers de l’office anticorruption (OCLCIFF) ont retrouvé la trace du comptable suisse. Deux commissions rogatoires internationales sont lancées. Le 12 février, le Luxembourg autorise la transmission à la France de son rapport d’enquête, qui révèle l’existence du compte luxembourgeois Merger. Coïncidence : il est fermé deux jours plus tard !

Mais il est désormais impossible de planquer l’argent sous le tapis. Le 12 mars 2014, Gérard Limat, auditionné et perquisitionné en Suisse, fournit de nombreux documents. Le compte Merger est grillé. La mort dans l’âme, Dassault doit se résoudre à régulariser sa situation auprès du fisc et de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) : il a menti dans ses déclarations de patrimoine de sénateur, délit puni de trois ans de prison.

Toutefois, dans ses courriers du 4 juin 2014, il ne mentionne qu’un seul compte au Luxembourg, sans le nommer (il s’agit du compte Merger) et sans donner de chiffres. Surtout, il passe sous silence les deux fondations au Liechtenstein et le compte luxembourgeois Mouzara, qui abrite pourtant la quasi-totalité du reliquat de ses fonds occultes (11,4 millions contre 1,3 million pour Merger).

Le fisc comme la HATVP ignorent alors totalement les liens entre ces cagnottes et l’enquête pour corruption. Dans son courrier adressé au ministre du budget, Christian Eckert, Dassault suggère qu’il s’agit simplement d’une histoire de vieux compte suisse, créé par son père. Pourtant, il se passe une chose étrange : pendant quatre mois, Dassault ne fournit aucun document ni élément complémentaire, ni au fisc, ni à la HATVP. Le 27 octobre 2014, le président de la Haute autorité, visiblement agacé, s’en plaint au notaire et conseiller fiscal de Dassault, Bernard Monassier. C’est à la suite de cette relance qu’il révèle trois jours plus tard aux autorités l’existence du compte Mouzara.

Le 17 novembre, France Inter et Libération révèlent publiquement comment Dassault a utilisé le compte Merger et les deux fondations pour se faire livrer du cash par Gérard Limat et financer ses agents électoraux présumés à Corbeil. Le président de la HATVP tombe de l’armoire, et joint au dossier l’article de Libé (écrit par l’auteur de ces lignes).

Coïncidence, Serge Dassault se fend une semaine plus tard d’un courrier au président de la HATVP, où il avoue pour la première mois avoir été le bénéficiaire des fondations Pégase et Balzane. « Il n’est pas exact de sous-entendre que ce serait sous l’effet d’un article de presse que Monsieur Serge Dassault se serait précipité pour venir informer la Haute autorité », s’est indignée à l’audience son avocate Jacqueline Laffont.

Le 13 novembre 2014, la HATVP a dénoncé Serge Dassault au parquet national financier (PNF), qui a immédiatement ouvert une enquête pour omission de déclaration de patrimoine par un parlementaire et pour blanchiment de fraude fiscale. Serge Dassault a séché ses deux convocations et a livré peu d’éléments à la justice. Le tribunal n’a pas pu vérifier l’origine des fonds (« ça reste le grand mystère », a soupiré le président) et encore moins retracer les mouvements financiers et l’usage de l’argent, en particulier les 19,6 millions qui ont disparu du compte Merger entre 2011 et 2013. « Nous n’avons dans la procédure aucune indication de ce qu’a pu devenir ce petit delta de 19,6 millions », a ironisé le président.

Le notaire Bernard Monassier, chargé par Dassault de mener la régularisation, jure pourtant avoir fait son possible pour récupérer les infos auprès des gestionnaires suisses, le comptable Gérard Limat et l’avocat Luc Argand. Dans son témoignage auprès des enquêteurs, lu à l’audience, il raconte avoir eu de « grandes difficultés », au point d’avoir dû agiter la menace du possible lancement d’une commission rogatoire internationale !

La collaboratrice de Me Monassier a raconté aux policiers son voyage surréaliste au Luxembourg. Alors qu’elle était munie d’une procuration en bonne et due forme, elle n’a pu avoir accès ni aux informations bancaires ni au coffre-fort de Serge Dassault. Elle a dû refaire une demande écrite une fois rentrée à Paris. Il lui a été répondu que le coffre luxembourgeois avait été fermé en février 2014, sans la moindre indication sur son contenu…

Le Luxembourg ayant interdit à la justice française d’utiliser les informations bancaires, elle a dû se contenter des informations livrées par Dassault et des documents trouvés en perquisitions chez son notaire français. Lesquels semblent très partiels. L’enquête sur les achats de vote a en effet montré que Dassault possédait aussi deux comptes helvètes au Crédit suisse de Genève et chez UBS à Zurich, qu’il n’a pas mentionnés dans ses demandes de régularisation.

Puisqu'il était interdit d'évoquer dans cette procédure le contexte de l'affaire, le parquet s'est abstenu. La procureur Delaunay-Weiss a tout de même souligné que les fondations au Liechtenstein ont été créées juste après la première élection de Dassault comme maire de Corbeil en 1995. « Ça n’a pas de sens social que Serge Dassault puisse rester dans son siège de sénateur et siéger à la commission des finances, a ajouté le second procureur, Patrice Amar. Où est la décence commune quand le représentant du peuple se moque à ce point du représenté ? »

Les avocats de Dassault ont réclamé la relaxe. Ils ont dénoncé dans leurs plaidoiries le « vide » du dossier, soulignant qu'il n'y avait pas de preuves que l'avionneur était propriétaire des fonds depuis quinze ans et qu'il avait ordonné les transferts d'argent vers les sociétés offshore. Me François Artuphel a soutenu sans ciller qu'il s'agit de fonds dont le milliardaire « n’avait probablement même pas connaissance ». Dassault les connaissait en tout cas suffisamment pour avoir téléphoné à trente-trois reprises à son comptable suisse Gérard Limat, afin qu'il lui livre des sacs plastique remplis de billets à Paris.

En conclusion, Me Pierre Haïk a tenté de redorer l'image particulièrement écornée de l'avionneur, cet « homme traîné dans la boue, caricaturé ». « Quels éléments justifieraient une telle humiliation à l’égard d’un homme âgé de 91 ans qui a régularisé sa situation ? », a-t-il ajouté au sujet des peines requises par le parquet. Sans compter qu'une condamnation serait une « atteinte inéluctablement portée à l’image d’un groupe[Dassault aviation – ndlr] qui fait, en ces temps difficiles, la fierté de la France ».

Serge Dassault « a toujours considéré qu’il était juste, vous allez peut-être sourire, de faire bénéficier les plus démunis d’une partie de sa fortune », a poursuivi Me Haïk, en insistant sur l'attachement viscéral de son client à la ville de Corbeil-Essonnes et à « ses habitants ». Quand on sait que l'ancien maire y a gagné le cœur de ses administrés à coup de millions, avec l'aide de caïds de cités grassement rémunérés dont l'un vient d'êtrecondamné à 15 ans de prison pour avoir tenté d'assassiner un opposant à Dassault, on ne sait plus s'il faut en « sourire » ou en pleurer.

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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 15:38

Une vidéo utile sur le point de l'actualité : Pierre Laurent face aux journalistes du Monde , de

France info , de l'AFP et de LCP .

http://www.tv-replay.fr/redirection/06-07-16/questions-d-info-lcp-an-11748373.html

Pierre Laurent face aux journalistes du Monde, de France Info, de l'AFP, et de LCP
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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 15:30

Communiqué des député-e-s du Front de gauche

Une majorité de Français opposés à la loi travail et aux méthodes gouvernementales : seulement 56 députés pour les soutenir !

Le recours à l’article 49-3 par le Gouvernement pour faire adopter sa loi travail en nouvelle lecture, ne laissait qu’une option aux députés opposés à ce texte pour en obtenir le rejet : l’adoption d’une motion de censure.

Prenant acte de l’impossibilité de réunir les 58 signatures nécessaires au dépôt de cette motion, les députés du Front de gauche regrettent que les députés socialistes qui disaient s’opposer au texte ou même à la brutalité gouvernementale n’aient pas saisi ce seul levier institutionnel pour mettre un terme au mépris affiché, par le Gouvernement, envers le peuple et ses représentants.
De fait, sans motion de censure, le texte est aujourd’hui adopté avec la complicité de la droite qui en approuve la philosophie.

Les députés du front de gauche utiliseront tous les moyens institutionnels pour obtenir le retrait de ce texte (comme le recours au Conseil constitutionnel) et en appellent à la poursuite de la mobilisation, sans laquelle rien n’est possible.


La liste des 56 signataires de la motion de censure

10 députés Front de Gauche, 10 députés écologistes, 23 députés frondeurs socialistes et 13 divers gauche, dont Philippe Noguès (Morbihan) ont eu l'engagement réel de donner leur nom pour présenter cette motion de censure contre la plus grande attaque contre les syndicats et le droit social commise par un gouvernement dit de gauche depuis la Libération: les médias l'appellent la "motion des frondeurs", évacuant au passage le combat constant des députés du Front de Gauche.

10 députés Front de Gauche, 10 députés écologistes, 23 députés frondeurs socialistes et 13 divers gauche, dont Philippe Noguès (Morbihan) ont eu l'engagement réel de donner leur nom pour présenter cette motion de censure contre la plus grande attaque contre les syndicats et le droit social commise par un gouvernement dit de gauche depuis la Libération: les médias l'appellent la "motion des frondeurs", évacuant au passage le combat constant des députés du Front de Gauche.

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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 15:29
Accord sur le commerce et les services - Un traité peut en cacher un autre: intervention à l'Assemblée Nationale de Marc Dolez, député PCF-Front de Gauche

Accord sur le commerce des services : Un traité peut en cacher un autre

jeudi 7 juillet 2016

Dans les questions au gouvernement, Marc Dolez, le député du groupe Communistes, Républicains, Citoyens a interpellé le Premier ministre sur le TISA.

Derrière le TAFTA – Trans-Atlantic free trade agreement, ou accord commercial transatlantique – , il y a aussi le TISA – Trade in services agreement, ou accord sur le commerce des services !

Dans une totale opacité, l’Union européenne, les États-Unis, le Canada et une vingtaine d’autres pays négocient actuellement un accord sur le commerce des services. Ce traité de libre échange, le TISA, vise à libéraliser les activités de services, qu’il s’agisse des transports, des télécommunications, des services financiers, mais aussi de l’eau, de l’éducation ou de la santé.

Sous l’influence du lobbying des multinationales américaines, l’objectif est limpide : réduire autant que possible les barrières de la concurrence, accélérer privatisations et dérégulations, endiguer toute velléité de réglementation par les États. L’égalité de concurrence irait jusqu’à exiger que tout soutien financier apporté aux services publics soit explicitement exclu, ou également ouvert aux prestataires de services privés à but lucratif. De surcroît, une clause du traité rendrait impossible tout retour en arrière.

Devant une telle atteinte à la souveraineté de la France et une telle menace pour nos services publics, ma question est double : le Gouvernement est-il prêt à demander l’arrêt immédiat de ces négociations dont la conclusion est annoncée pour la fin de l’année ? En tout état de cause, s’engage-t-il à exclure toute ratification ?

Réponse du secrétaire d’État chargé du commerce extérieur :

...."Nous avons des réserves très précises sur les points que vous avez évoqués. Les services publics tout d’abord : en l’état actuel des négociations, ils sont protégés par ce que l’on appelle une clause transversale, c’est-à-dire que quel que soit le secteur concerné, il ne sera pas possible de remettre en cause les services publics existants, ni les services publics futurs qu’un État souhaiterait créer. C’est pour nous une ligne rouge très claire. Concernant la transparence, nous avons obtenu la publicité du mandat de négociation en mars 2015"...

Intervention de Marc Dolez à l’Assemblée nationale

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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 15:26
Marie-George Buffet

Marie-George Buffet

Loi égalité et citoyenneté

Explication de vote de M-G Buffet à l’Assemblée

jeudi 7 juillet 2016

Ce texte vise à répondre au profond malaise social et démocratique auquel fait face notre pays, sur fond de crise économique, de chômage de masse et de désarroi d’une jeunesse confrontée à la précarité et à l’absence de perspectives. Cette jeunesse aspire tout à la fois à accéder plus facilement à la formation, au logement, aux soins et à la culture, et à s’impliquer plus fortement dans le processus démocratique comme dans un travail qualifié, producteur de richesses pour la nation.

Ce texte est-il au niveau des réponses attendues par nos concitoyens en matière de démocratie, de mixité sociale et d’égalité ? Pas vraiment.

Il faut bien reconnaître qu’il s’agit plus d’une série de mesures diverses et de portée inégale que d’un texte porteur de sens et de réformes de fond. À vouloir embrasser trop de sujets, le projet de loi passe à côté de grands enjeux tels que l’autonomie des jeunes et le financement du logement social.

Toutes les mesures que vous nous proposez sont prévues à moyens constants.

Or peut-on prétendre lutter contre les inégalités sans financements ? Nous le savons toutes et tous : les politiques d’austérité conduites depuis des années ont fait reculer les services publics et amoindri les financements dédiés à la culture, à l’éducation populaire et au tissu associatif dans nos villes. La baisse des dotations aux collectivités locales affecte directement la qualité des services rendus aux habitants.

Ces remarques étant faites, nous reconnaissons sans peine que votre texte comporte des avancées concrètes dans différents domaines.

En matière de citoyenneté et d’émancipation des jeunes, nous saluons la création du congé d’engagement associatif, pour les salariés et les étudiants, et la reconnaissance du droit d’association aux mineurs.

Nous saluons aussi les mesures renforçant la place des jeunes dans les instancespolitiques territoriales. Ayant participé au gouvernement qui a créé le Conseil national de la jeunesse et les conseils départementaux des jeunes, je ne peux que m’en féliciter.

En revanche, nous sommes beaucoup plus critiques quant à l’extension du service civique par l’élargissement des structures d’accueil et la pratique de l’intermédiation. En dépit de l’encadrement du dispositif, obtenu par voie d’amendement, cet élargissement risque d’entraîner la constitution d’une nouvelle trappe de précarité pour les jeunes, alors que ceux-ci demandent qu’on facilite leur insertion durable sur le marché du travail.

En matière de logement, nous souscrivons à l’obligation faite aux maires de réserver 25 % des logements sociaux, hors quartiers prioritaires de la politique de la ville, aux familles les plus modestes. Dans le même esprit, nous soutenons les mesures visant à prolonger et renforcer la loi SRU, tant en matière de sanction des maires défaillants que d’obligation de construction de logement social.

Nous refusons, en revanche, les dispositions relatives au supplément de loyer de solidarité et le durcissement des conditions de perte du droit au maintien dans les lieux : ces mesures traduisent la volonté, qui n’est pas nouvelle, d’une spécialisation accrue du parc social au bénéfice des publics les plus fragiles. Pour assurer la mixité sociale, il importe au contraire que le logement social conserve sa vocation généraliste puisque 60 % des ménages répondent aux conditions de ressources. Il convient de mieux accompagner le parcours résidentiel des ménages en proposant d’autres moyens d’action, afin de s’assurer qu’aucune famille ne consacre plus de 25 % de ses revenus à son logement. C’est un enjeu essentiel.

Pour ce qui concerne la lutte contre les discriminations, nous nous félicitons des mesures visant à lutter contre les violences dont font l’objet les femmes étrangères ainsi que du renforcement des dispositifs de répression des délits de provocation, de diffamation et d’injures racistes. Nous saluons, car ce fut pour nous un long combat, l’extension des circonstances aggravantes de racisme, de sexisme et d’homophobie à l’ensemble des crimes et délits. Enfin, l’Assemblée a voté unanimement la pénalisation de la contestation de crimes contre l’humanité et de la négation des génocides, de la traite et de l’esclavage.

Le texte occulte toutefois un sujet majeur : celui du droit de vote des étrangers, un acte porteur d’égalité toujours promis mais jamais réalisé. Je regrette enfin que la création d’un récépissé de contrôle d’identité ait été refusée.

Malgré ces insuffisances, ce texte comporte des mesures qui vont dans le bon sens.Nous le voterons donc, dans l’espoir que la navette parlementaire permettra de lui donner plus de force et de cohérence.
Sur le site de l’Assemblée nationale

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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 14:32
Nicolas Sansu sur le budget: corset budgétaire et ordolibéralisme

Finances

Sansu Nicolas : corset budgétaire et ordolibéralisme

jeudi 7 juillet 2016

Sansu Nicolas est intervenu à l’Assemblée nationale sur le "projet de Règlement des comptes pour 2015". Il a développé les trois principaux enjeux de ce texte :

1) Le CICE

La nouvelle augmentation du CICE, qui passerait de 6 à 7 % de la masse salariale correspondant aux salaires inférieurs à 2,5 SMIC porterait l’impact budgétaire du CICE à 25 milliards d’euros par an en rythme de croisière, soit 1,2 point de PIB.

Alors que l’impôt sur les sociétés rapportait environ 50 milliards d’euros au début du quinquennat, il ne rapportera plus que 25 milliards d’euros à son terme.

Outre son inefficacité notoire et son coût abyssal pour les finances publiques, le CICE est particulièrement problématique puisqu’il crée ce que l’on appelle une trappe à bas salaires" a démontré le député. C’est aussi un transfert d’impôts vers les ménages.

"Réduit à peau de chagrin à cause du CICE, l’impôt sur les sociétés constitue désormais moins de 10 % des produits fiscaux de l’État. Cette diminution est compensée par la fiscalité indirecte, d’abord la TVA, le prélèvement le plus injuste car le plus régressif.

D’autre part, ces mesures en faveur des entreprises sont financées par des coupes dans les budgets de l’État, de la Sécurité sociale et des collectivités territoriales – nous retrouvons là les fameux 50 milliards d’euros d’économies".

2) Les collectivités territorirales

La diminution de 3,7 milliards d’euros en 2015, faisant suite à la baisse de 1,5 milliard de dotations


"En 2015, la baisse des investissements excède 4 milliards d’euros. C’est cette récession imposée aux collectivités locales qui a permis de tenir le déficit public car les collectivités ont diminué leurs emprunts. Voilà la réalité des comptes publics 2015.
Cette baisse de dotations est une erreur politique et économique car elle pèse sur l’emploi, avec des dizaines de milliers de postes supprimés dans le bâtiment et les travaux publics, mais aussi sur le maintien du patrimoine collectif, sur les services apportés aux populations, et d’autant plus lorsque les territoires sont plus fragilesaux collectivités locales en 2014, a eu des conséquences très néfaste
s."


3) La dette
La dette de 2 100 milliards d’euros sert d’abord et avant tout à justifier les restrictions et l’austérité, c’est un instrument de domination de la pensée, les tenants de l’ordolibéralisme tiennent l’argument massue pour écarter toute solution alternative.

Au fond, la soutenabilité de la dette – qui a atteint 96 % du PIB fin 2015 – dépend avant tout du différentiel entre taux de croissance et taux d’intérêt réel.

Le député présentera le 8 juillet, en commission des finances, des propositions dans cadre de la mission d’évaluation et de contrôle sur la transparence et la gestion la dette publique.

Lire l’intervention de Nicolas Sansu

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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 08:07
L'autodestruction du Parti socialiste, par Remi Lefebvre, Le Monde Diplomatique - juillet 2016

Militants en fuite, élus en déroute

L’autodestruction du Parti socialiste

Subjugué par les dogmes du « marché libre » et rivé aux consignes de Bruxelles, le président François Hollande s’obstine à imposer le démantèlement du code du travail, faute de lutter efficacement contre le chômage. Comme une majorité de syndicats, de Français et de parlementaires rechignent, il tente un passage en force, au mépris même de toute logique électorale.

par Rémi Lefebvre

Pour le Parti socialiste (PS) français, l’heure du bilan approche. Rarement un parti aura été aussi rapidement abîmé par son passage aux affaires. En 2012, il tenait l’ensemble des pouvoirs entre ses mains. Quatre ans plus tard, il a perdu un nombre considérable d’élus et, à moins d’un an de l’élection présidentielle, la cause paraît entendue : M. François Hollande, qui se prépare à l’évidence à solliciter le renouvellement de son mandat, n’est même pas assuré de figurer au second tour. L’impopularité du président comme celle de son premier ministre battent des records historiques.

Les défaites à toutes les élections intermédiaires n’ont en rien arrêté la fuite en avant libérale dont la « loi travail » marque l’apogée. Malgré la timide embellie de l’emploi, qui servira sans doute de justification à la candidature de M. Hollande, la politique de l’offre engagée dès l’automne 2012 ne produit toujours pas de résultats. Pour valoriser l’action du gouvernement, que le peuple de gauche désavoue massivement, le PS reprend mot pour mot les éléments de langage de la droite en 2012 : la nécessité de la« réforme » s’est imposée pour « préserver le modèle social français ».« La politique de l’offre n’est ni de droite ni de gauche : elle est nécessaire », a pu déclarer M. Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement. Désormais, l’aversion suscitée dépasse de très loin les franges de la gauche radicale et la déception que provoque immanquablement l’exercice « réformiste » du pouvoir. Comment comprendre ce qui s’apparente à une autodestruction ?

Se dirige-t-on vers la fin du PS ? Quelle rationalité électorale poursuivent les élites socialistes, par ailleurs si « raisonnables » ?

Si leur stratégie apparaît incertaine, elle dérive d’un postulat qui fonde la cohérence et la constance du gouvernement : la politique menée, aussi suicidaire qu’elle puisse paraître, n’est pas négociable. Elle découle dans une large mesure de contraintes européennes que M. Hollande, contrairement à ce qu’il avait annoncé durant la campagne de 2012, n'a pas renégociées. Les choix idéologiques sont si marqués qu'ils prennent le pas sur les intérêts électoraux du parti.

Dès lors qu'aucune inflexion n'est envisageable et que le PS n'a plus la base électorale de sa politique, il est condamné à fabriquer un improbable électorat de substitution, au centre gauche, et compte s'appuyer sur la prochaine élection présidentielle pour le faire émerger.

Jusqu'à présent, le PS appartenait à ce type de parti que le politiste italien Angelo Panebianco a appelé à "électorat-professionnel", c'est à dire voué à un seul objectif: la maximisation des performances électorales. Entre 2002 et 2012, il est devenu un parti de professionnels de la politique locale - élus et collaborateurs d'élus. En 2012, quand il accède au pouvoir national, il dirige la quasi-totalité des régions, 60% des départements, les deux tiers des villes et même, pour la première fois de son histoire, le Sénat. Quatre ans plus tard, la machine électorale est dévastée. Au cours des 22 législatives partielles qui ont eu lieu dans cet intervalle, le PS a été éliminé dès le premier tour dans la moitié des circonscriptions où il présentait un candidat.

Après avoir fait prospérer le socialisme municipal dans des proportions jamais atteintes, M. Hollande, lui-même ancien président du conseil général de la Corrèze, en est devenu le fossoyeur. En 2014, son parti a perdu 162 villes de plus de 9000 habitants - un record pour des élections municipales. Il ne dirige plus que cinq régions et vingt-six départements. Le "parti des élus" a été sacrifié sur l'autel d'une politique de compétitivité aussi inefficace qu'impopulaire. Repliés sur leurs fiefs locaux depuis 2002, les notables socialistes se sont peu à peu désintéressés des débats idéologiques nationaux. Tétanisés par les défaites, ils semblent attendre que le cycle du pouvoir se referme pour retrouver une opposition qui fut jadis confortable.

Ces échecs électoraux massifs et répétés ont eu des effets considérables sur l'organisation partisane. L'armature du PS se désagrège dans ses profondeurs territoriales. Les assistants, collaborateurs d'élus et permanents ont été victimes de ce qui s'apparente à des plans de licenciement successifs, alors qu'ils exercent souvent des responsabilités essentielles dans l'appareil, à la direction des sections ou des fédérations. Certaines fédérations sont en cessation de paiement. L'historique fédération du Nord a perdu depuis 2012 de nombreuses villes (Roubaix, Tourcoing, Dunkerque, Maubeuge, la communauté urbaine de Lille...), le département, la région et la moitié de ses militants. Pour résorber une dette de 1 million d'euros, la direction fédérale a dû se résoudre à vendre une partie de son siège.

La "loi travail" piétine le congrès

Enfin, le parti dans son ensemble connaît une hémorragie de militants sans précédent. Les renouvellements de cartes au 1er décembre 2014 ne dépassaient pas 60 000 adhérents, soit largement 50 000 de moins qu'en 2012. Le phénomène va bien au-delà des habituels flux et reflux liés à l'exercice du pouvoir.

A quoi bon demeurer dans un parti exsangue et dévitalisé, qui n'a plus son mot à dire? Le premier ministre, M. Jean-Christophe Cambadélis, donne un peu mieux le change que son prédécesseur, M. Harlem Désir, d'une remarquable passivité; mais la démocratie interne est inexistante. Le président de la République estime n'avoir pas de comptes à rendre à un parti dont il n'a pas tiré son investiture, puisqu'il doit sa candidature à une primaire ouverte.

Les résultats du congrès de Poitiers, en juin 2015, ont été complètement ignorés, alors qu'ils étaient censés définir la ligne politique du parti. Dans la motion majoritaire, dont M. Cambadélis était le premier signataire, une position par anticipation sur la loi El Khomri avait été prise. On y lit: "Il faut rétablir la hiérarchie des normes: la loi est plus forte que l'accord collectif, et lui-même s'impose au contrat de travail".

Soit l'exact inverse de la proposition que le gouvernement s'acharne à défendre. S'appuyant sur le socle de légitimité du congrès, un rapport demandant une réorientation de la politique gouvernementale a été adopté par le bureau national à une très large majorité en juillet 2015. Il a été balayé d'un revers de main par le premier ministre, Manuel Valls, qui n'a cessé, depuis, de radicaliser sa ligne sociale-libérale.

La "loi travail", qui ne faisait pas partie des engagements de 2012, n'a jamais été discutée au PS; elle n'a fait l'objet d'aucun vote au bureau politique. La direction du parti a même renoncé à produire un programme en vue de l'élection présidentielle. Mieux vaut orienter le futur candidat à l'aide de "cahiers" que formuler un programme qu'il n'appliquera pas: c'est en substance, ce que le premier secrétaire a expliqué lors du conseil national du 6 février 2016.

Comme le parti n'assure plus son rôle de régulation des différends et de production d'un point de vue commun, les débats se sont déplacés dans l'arène parlementaire, où les députés frondeurs organisent une résistance très médiatisée, mais jusqu'ici marginale. Un cap a été franchi avec leur tentative de déposer une motion de censure contre le gouvernement lors du débat sur la "loi travail", en mai 2016. Si beaucoup de députés socialistes désapprouvent sans doute la politique du gouvernement, la plupart d'entre eux, par résignation ou manque de courage, ne souhaitent pas affaiblir le président de la République, en pensant que leur sort électoral dépend du sien. L'approche de la débâcle finale n'y change rien: fatalisme et présidentialisme font leur oeuvre.

Reconnaissant que le PS est au bout d'un cycle, le premier secrétaire prône désormais son "dépassement" autour de la Belle Alliance Populaire, fédération de la"gauche de transformation" regroupant associatifs, syndicalistes, intellectuels et partenaires du PS. Il s'agit de s'adresser au peuple de gauche "au-delà des appareils radicalisés contre le PS". Lors du lancement de cette initiative, le 13 avril, M. Cambadélis s'affichait aux côtés de MM. Jean-Vincent Placé et Jean-Luc Bennahmias, ainsi que des responsables du Parti Radical. Même M. Robert Hue, habituelle caution communiste du PS, a refusé de participer à ce replâtrage.

La destruction du parti apparaît comme une stratégie délibérée de M. Valls qui, avec un cynisme à peine contenu, se projette au-delà de la débâcle à venir. Le premier ministre s'emploie à créer les conditions d'une candidature de M. Hollande vouée à l'échec, et à entériner le schisme des "deux gauches irréconciliables". Fortement minoritaire lors de la primaire de 2011 (il n'avait recueilli que 5,63% des suffrages des sympathisants), il cherche à liquider le "vieux parti", comme l'un de ses modèles, M. Anthony Blair, l'avait fait avec le Labour au Royaume-Uni, pour réinitialiser le jeu politique au centre. Selon lui, plus son parti sera dévasté, plus son oeuvre aura de chances de réussir. Il est désormais débordé sur sa droite par le ministre de l'économie Emmanuel Macron, qui adopte la même stratégie hors du PS et cherche la surenchère dans la "transgression" des marqueurs politiques de gauche.

La stratégie de M.Hollande apparaît plus obscure et incertaine. Il semble miser sur les dernières chances de réélection que lui laissent la progression du Front National (FN) et la désunion de la droite, qui s'est lancée dans l'aventure d'une primaire ouverte peu conforme à sa culture politique. L'une des lois de la Ve République est peut-être que le président doit sacrifier à l'essentiel, c'est à dire sa réélection, quel qu'en soit le prix pour son parti. M. Hollande ne peut désormais plus jouer que sur les ressources de sa fonction.

Il cherche d'abord à sécuriser sa candidature. Les partisans d'une primaire ont voulu l'entraîner dans cette procédure pour sortir de l'impasse à gauche. Le PS a dans un premier temps adopté une position attentiste, avant d'en accepter le principe, mais en excluant tout préalable afin de mieux en compromettre le déclenchement. Après quelques hésitations, communistes et écologistes ont finalement refusé de s'engager dans une démarche qui pourrait contraindre à soutenir M. Hollande s'il sortait victorieux. Au terme de ce jeu de poker menteur, les socialistes peuvent pérorer: "Pour le moment, le seul parti qui se bat pour une primaire, c'est le Parti socialiste" déclare ainsi M. Christophe Borgel, secrétaire national chargé des élections. M. Cambadélis a envisagé un temps de convoquer un congrès extraordinaire pour modifier les statuts et dispenser M. Hollande de participer à une telle procédure, avant de changer d'avis et de convaincre le président en exercice d'accepter une primaire (conseil national du 18 juin). Comment interpréter ce revirement?

Distancé par la droite et l'extrême-droite dans les sondages, rattrapé, voire dépassé à gauche par M. Jean-Luc Mélenchon, M. Hollande ne peut espérer retrouver une certaine légitimité qu'en obtenant sa désignation par cette procédure. Il prend de court ses opposants "frondeurs" qui peineront peut-être à désigner un candidat commun. Toujours tacticien plutôt que stratège, le chef de l'Etat espère sans doute aussi que les électeurs de gauche se détournent de la primaire, limitée aux partis soutenant le gouvernement, ce qui permettrait une surreprésentation des plus légitimistes pouvant lui être encore favorables. D'autant plus que le PS? faute de temps et de moyens militants, sera sans doute dans l'incapacité d'ouvrir autant de bureaux de vote qu'en 2011.

Les gardiens de la République

Monsieur Hollande cherche à empêcher la dispersion des candidatures à gauche au premier tour.

Il s'est employé à diviser les écologistes, avec un succès certain. La nomination au gouvernement de trois ministres écologistes en janvier 2016 a rempli son office. L'explosion du groupe parlementaire Europe-Ecologie-les Verts (EELV) à l'Assemblée Nationale en mai a mis encore un peu plus à mal l'hypothèse d'une candidature de Mme Cécile Duflot.

Enfin, le président peut compter sur la droitisation du jeu politique, à laquelle il a lui-même largement contribué, mais qui peut se déplacer sur la gauche dans les mois qui viennent. L'action du gouvernement a déporté le centre de gravité du pensable et du dicible vers la droite, comme en témoigne la réécriture de la "loi travail" au Sénat.

Le président compte que la surenchère libérale à laquelle donne lieu la primaire des Républicains, pleinement décomplexés (suppression de l'impôt sur la fortune et des 35 heures, réduction massive du nombre de fonctionnaires...) réinstalle le clivage gauche-droite. Une victoire de M. Nicolas Sarkozy à la primaire serait très favorable à M.Hollande. Le PS entonne déjà le refrain de 1986: "Au secours, la droite revient!", "Les Français vont enfin comparer", s'écrie M. Le Foll.

Le discours convenu sur le "tripartisme", avec la qualification annoncée de la présidente du FN, Mme Marine Le Pen, au second tour de la présidentielle, permet déjà aux dirigeants socialistes de se positionner comme les gardiens de la République.

(...) Si irréaliste que cela puisse paraître, le PS n'a donc pas encore complètement renoncé à l'idée d'une victoire en 2017. M. Mélenchon fait quand à lui le même calcul qu'en 2012; passer devant le candidat du PS au premier tour pour lui retirer sa rente de position dominante, et le "pasokiser" - c'est à dire le marginaliser, comme le Parti socialiste grec, en lui retirant son monopole de parti à vocation majoritaire à gauche. Mais, dans cette hypothèse, désormais plus crédible qu'il y a 4 ans, une victoire relative suffirait-elle à passer le cap du premier tour?

C'est à une recomposition de grande ampleur que doit s'atteler la gauche, au-delà de ses corporatismes d'appareil mortifères. Les socialistes les plus progressistes pourraient y contribuer; à moins qu'ils soient aspirés dans le jeu politicien et le cycle des défaites "refondatrices" au PS. Déjà, Mme Martine Aubry et les frondeurs enjambent la défaite à venir et préparent le futur congrès. Le PS est peut-être à l'agonie; mais il a démontré au cours de sa longue histoire (le cas de la défaite cuisante de 1993 effacée dès 1997 est exemplaire) une capacité de résilience qui fonde sa longévité historique.

Rémi Lefebvre

Professeur de Sciences Politiques à l'Université de Lille II

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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 07:13

Deuxième échec pour une motion de censure de gauche à l’Assemblée

6 JUILLET 2016 | PAR CHRISTOPHE GUEUGNEAU

Les frondeurs socialistes, les communistes et les écologistes ne sont pas parvenus à réunir les 58 signatures nécessaires pour déposer un texte censurant le gouvernement de Manuel Valls. Comme en mai, il leur a manqué deux voix.

Même scénario, même chiffre, même échec. Comme lors de la précédente utilisation par le premier ministre Manuel Valls de l’article 49-3 de la Constitution, les députés frondeurs du PS, les écologistes et les communistes ne sont pas parvenus à réunir les 58 signatures nécessaires pour déposer une motion de censure de gauche contre le gouvernement. Comme la fois précédente, il leur a manqué deux signataires. Sur Twitter, Bruno Le Roux, le patron des députés socialistes, se permettait de chambrer ses camarades, quelques minutes seulement après l’heure maximale pour déposer une motion : « Une nouvelle fois le convoi s’arrête au Morbihan sans aller jusqu’à la Nièvre… #radiolondres ».

Le PS avait menacé d'exclure de ses rangs les députés qui voteraient une motion de censure. D'autres menaces visaient les investitures des députés.

Dans le détail, et comme ils l’avaient annoncé, deux députés de la motion D au dernier congrès, celle menée par Karine Berger, ont retiré leur signature : Alexis Bachelay (député des Hauts-de-Seine) et Yann Galut (Cher). Interrogé par Mediapart, Yann Galut s’en explique.

« Je préférais une autre réponse politique qu’une motion de censure qui n’avait aucune chance d’aboutir », affirme-t-il. « C’était voué à n’être qu’un coup d’épée dans l’eau, a fortiori après la décision du bureau national du PS [qui visait à exclure tout personne votant une motion de censurendlr] », ajoute-t-il. Pour le député, « Valls n’attend que ça, il veut nous pousser à la faute et récupérer derrière le parti ». « La réponse doit venir pendant la primaire. Karine Berger a évolué là-dessus, nous ne soutenons plus Hollande, à nous maintenant de trouver concrètement les conditions d’une alternative au président sortant », indique-t-il. Le courant de Karine Berger devrait à cet effet organiser une « petite université d’été ».

Les députés Isabelle Bruneau (Indre) et Laurent Kalinowski (Moselle) n'ont pas signé non plus. En mai dernier, ce dernier avait expliqué qu’il voulait envoyer un message au président. Il semble qu’il ne l’ait plus jugé nécessaire cette fois.

De nouveaux signataires, tous socialistes, sont venus contrebalancer ces départs : Sylviane Alaux (Pyrénées-Atlantiques), Philippe Baumel (Saône-et-Loire, signataire de la motion B menée par Christian Paul et Benoît Hamon lors du dernier congrès), Nathalie Chabanne (Pyrénées-Atlantiques, elle aussi proche de Benoît Hamon), et enfin Hervé Féron (Meurthe-et-Moselle, lui aussi signataire de la motion B).

Jointe par Mediapart, Fanélie Carrey-Conte, députée PS de Paris et signataire des deux motions de censure, est dépitée mais pas surprise : « On savait que ce serait difficile. Depuis hier, le contexte était très difficile avec des menaces et des pressions de toutes parts. » Mais « on ne pouvait pas laisser sans réponse le coup de force de Manuel Valls. Il fallait agir pour montrer aux gens qui se mobilisent dans la rue depuis des semaines qu’on ne les lâchait pas ».

Pour cette proche de Christian Paul, Yann Galut « se trompe » car, selon elle, « ce n’est pas une affaire de primaire ni de parti, mais une affaire citoyenne ». « La Constitution ne nous laissait que cette solution pour répondre. Ce n’est pas un geste anodin de déposer une motion de censure, c’est certes la deuxième fois en quelques mois, mais c’est tout de même quelque chose d’exceptionnel », ajoute-t-elle. Maintenant, les « frondeurs » vont« prendre le temps avant de revenir pour la suite. Mais ce qui est sûr, c’est que le temps politique n’est pas terminé, avec une troisième lecture à venir, et le temps syndical non plus. On va continuer le combat ».

Du côté du Front de gauche, c’est la déception. Dans un communiqué, « les députés du Front de gauche regrettent que les députés socialistes qui disaient s’opposer au texte ou même à la brutalité gouvernementale n’aient pas saisi ce seul levier institutionnel pour mettre un terme au mépris affiché, par le gouvernement, envers le peuple et ses représentants ». Les mêmes députés « utiliseront tous les moyens institutionnels pour obtenir le retrait de ce texte (comme le recours au Conseil constitutionnel) et en appellent à la poursuite de la mobilisation, sans laquelle rien n’est possible ».

Un autre texte de motion a circulé ces dernières 24 heures, à l’initiative de Nuit debout. La commission économie avait fait parvenir un projet (à lire ici) par l’intermédiaire du député communiste André Chassaigne. Celui-ci, beaucoup moins marqué politiquement, était censé rallier la gauche comme la droite. La proposition n’a cependant pas réussi à convaincre, les députés frondeurs préférant un texte ancré à gauche.

Adoptée, la loi travail repart donc au Sénat pour une deuxième lecture, avant de revenir à l’Assemblée d’ici le 20 juillet pour une adoption définitive. Sans doute avec un nouveau 49-3, à moins que, les vacances aidant, il se trouve une poignée de députés pour la voter sans discussion.

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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 05:07
Affaire Mimran: les 200.000 dollars qui enfoncent Netanyahou

6 JUILLET 2016 | PAR FABRICE ARFI ET DOV ALFON (HAARETZ)

La retranscription du premier interrogatoire d’Arnaud Mimran dans le dossier du “casse du siècle” contredit les déclarations du premier ministre israélien, selon lesquelles il n’aurait touché de l’affairiste français qu’une unique donation de 40 000 dollars en 2001.

La retranscription du premier interrogatoire d’Arnaud Mimran dans le dossier du “casse du siècle” – la fraude aux quotas carbone – contredit les déclarations du premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, selon lesquelles il n’aurait touché de l’affairiste français qu’une unique donation de 40 000 dollars en 2001.

Une enquête menée conjointement par Mediapart et le quotidien israélien Haaretz a permis de découvrir que Mimran, considéré comme l’un des cerveaux de cette escroquerie, la plus importante que la France ait jamais connue, a mentionné le nom de Netanyahou dans une réponse à une question des enquêteurs au sujet de l’un des acteurs et témoins clés du dossier, Jérémy Grinholz, aujourd’hui réfugié en Israël sous l’identité d’Eithan Liron.

Selon la retranscription de l’audition menée par la douane judiciaire, dont le contenu est rendu public pour la première fois, Mimran a assuré qu’il ne connaissait pas le rôle précis joué par Grinholz dans la fraude et il a ajouté : « Je l'ai vu la première fois début 2009 [en Israël]. J'y allais souvent à l'époque, comme Marco [un associé dans la fraude – ndlr] y était et, à cette époque, c'était les élections. Je suis proche de Netanyahou dont j'ai financé [la campagne] à hauteur de 200 000 dollars. »

En d’autres mots, dans sa réponse, Mimran laisse clairement sous-entendre que son versement de 200 000 dollars est lié à la campagne électorale de 2009, qui a permis à Netanyahou d’accéder à la tête du gouvernement israélien. Si cette affirmation devait être vérifiée par la justice israélienne, elle serait très embarrassante pour Netanyahou, un tel versement étant illégal au regard des règles de financement de campagne en Israël.

Un porte-parole de Netanyahou affirme : « C’est un total non-sens. Les faits sont clairs : la seule donation de Mimran est de 40 000 dollars, elle a été faite en 2001 pour une fondation, comme la loi le prévoit, à une époque où M. Netanyahou était un citoyen privé. » Netanyahou, qui fut premier ministre jusqu’en 1999 puis de nouveau ministre à partir de 2002, avait créé la fondation en question pour financer ses activités publiques, principalement des actions de diplomatie menées pour le compte de l’État d’Israël. « Les attaques répétées sur l’affaire Mimran, qui sont simplement destinées à occulter les grandes réalisations du premier ministre faites au nom d’Israël, ne seront d’aucune utilité, qu’il s’agisse de l’attaque précédente, lancée lors de sa visite historique en Russie, ou de celle-ci, en pleine visite historique en Afrique », poursuit le bureau de Netanyahou.

Certaines sources, en plus de Mimran lui-même, assurent que “l’escroc du siècle” présumé a par ailleurs célébré l’élection de Netanyahou en 2009 en petit comité avec le chef du gouvernement d’Israël, dans un hôtel de Tel Aviv. L’étude des allers-retours de Mimran en Israël à cette même période, qui correspond aux moments forts de la fraude aux quotas carbone, est de nature à le confirmer.

Selon les listes d’entrées et de sorties du territoire israélien obtenues par les enquêteurs français auprès des autorités aéroportuaires d’Israël et de l’aéroport du Bourget, près de Paris, Mimran s’est rendu en Israël à bord de son jet privé dans la matinée du 2 février 2009, est revenu en France dans l’après-midi du 5 février, est retourné en Israël dans la matinée du 10 puis est rentré en France dans la soirée du 12. L’élection israélienne, qui a porté Netanyahou à la tête de son pays, a eu lieu, elle, le 10 février.

Arnaud Mimran © DR

Le frère d’Arnaud Mimran, Benjamin, avait été convoqué par les douaniers quelques jours plus tard, le 3 février, pour être interrogé à son tour sur son éventuelle implication dans la fraude aux quotas carbone. Après avoir démenti tout rôle dans l’escroquerie, il a été interrogé sur d’éventuels déplacements en Israël en compagnie de son frère et d’un autre escroc présumé, Mardoché “Marco” Mouly.

Analysant la plupart de ses déplacements, il a assuré ne pas se souvenir de l’objet précis de ses visites en Israël. Mais pour son voyage du 10 février 2009, il a affirmé : « Ça ne me dit rien, mais c’est peut-être bien pendant l’élection de Netanyahou. »

Durant le procès du CO2, dont le jugement sera connu jeudi 7 juillet, Arnaud Mimran avait lui-même rendu publique l’histoire de ses dons à Netanyahou, et évoqué des versements totalisant un million d’euros. Ce témoignage ne contredit pas nécessairement sa déclaration en garde à vue au sujet des 200 000 dollars, dans la mesure où les libéralités de Mimran en faveur de Netanyahou comportent, au-delà des versements d’argent, de nombreuses dépenses effectuées durant des années.

Le mystère des comptes de New York

Comme Mediapart et Haaretz l’ont déjà rapporté, Mimran a payé au couple Netanyahou de coûteuses vacances à Courchevel, dans les Alpes, ou à Monaco en 2003, comme en témoigne une photo prise à l’époque. Mimran a aussi laissé Netanyahou utiliser gracieusement à sa guise son appartement parisien de l'avenue Victor-Hugo pendant ses séjours parisiens, et ce à plusieurs reprises selon des proches de Mimran. Depuis les premières révélations de Mediapart et Haaretz, le premier ministre d’Israël a changé de version au moins trois fois sur la nature exacte de ses relations, amicales ou financières, avec Mimran

La chaîne de télévision israélienne Channel 2 a en outre rapporté, lundi 4 juillet, que la police avait ouvert une enquête sur « une nouvelle affaire » visant Netanyahou. Celle-ci porte sur l’argent qu’il aurait reçu de plusieurs hommes d’affaires étrangers après son arrivée à la tête du gouvernement en 2009. La question est aujourd’hui de savoir si ce« nouveau » cas ne serait pas en réalité lié, directement ou non, à l’affaire Mimran et ne pourrait pas offrir de nouveaux développements au dossier à la lumière des nombreux paiements effectués par Mimran en 2009 et 2010 au profit de comptes bancaires domiciliés en Israël ou ailleurs dans le monde.

Selon les documents réunis par Mediapart et Haaretz, l’essentiel des transferts de fonds réalisés par Mimran au profit de ses partenaires israéliens et d’autres connaissances israéliennes ont été opérés depuis deux comptes logés aux États-Unis, comme cela ressort du dossier d’instruction.

Le premier, utilisé pour réaliser de nombreux paiements en Israël en lien avec la fraude aux quotas carbone, est un compte personnel ouvert au nom d’Arnaud Mimran à la Safra National Bank de New York, sous le numéro 6104355. Depuis ce compte, le 23 février 2010, Mimran a par exemple autorisé un virement bancaire de 180 000 euros vers un compte à la banque Leumi ouvert au nom d’un office notarial de Jérusalem nommé Bénichou-Bernstein.

Le transfert est accompagné de la mention « avance sur l’achat d’une propriété », mais Mimran a affirmé aux enquêteurs ne pas se souvenir à qui devait être affectée cette propriété. Le notaire Bénichou-Bernstein a refusé de répondre aux questions de Mediapart et Haaretz.

Moins d’un mois plus tard, alors qu’il séjournait en Israël, Mimran a aussi transféré un million d’euros depuis son compte à la Safra Bank au profit de celui d’un certain David Cohen à la Israel Discount Bank, dans la ville d’Eilat. Mimran a assuré cette fois aux enquêteurs que David Cohen était un agent immobilier et qu’il avait donné l’argent en vue de l’achat d’une propriété pour quelqu’un dont il ne se souvenait plus le nom… Mediapart et Haaretz ont localisé deux agents immobiliers nommés David Cohen, mais ceux-ci démentent catégoriquement tout lien avec Mimran et les transferts en question.

Un autre homme d’affaires a aussi été embarqué dans l’enquête sur les mystérieux paiements de Mimran en Israël. Les enquêteurs – juges et douaniers – ont en effet découvert que Mimran utilisait fréquemment le compte en banque d’un ami de la famille, un Argentin répondant au nom de Leandro Liberman. Un homme de paille, d’après la justice. Selon les propres déclarations de Mimran, Liberman l’a autorisé à utiliser son compte pour contourner d’éventuelles restrictions légales américaines.

Mimran a notamment utilisé le compte de Liberman, ouvert lui aussi à la Safra Bank de New York, sous le numéro 6109292, pour verser 400 000 euros à une société baptisée Isramart pour « l’achat d’un diamant comme cadeau ». Mimran, une fois de plus, a dit aux enquêteurs ne plus se souvenir quel était vraiment l’objet du paiement et à qui était destiné le prétendu diamant. Le paiement avait été validé par un simple fax envoyé depuis le centre d’affaires du David Intercontinental Hotel de Tel Aviv.

Durant l’instruction, les juges avaient commencé à confisquer les biens de Mimran et d’autres prévenus du “casse du siècle” et, à cette fin, ils avaient demandé aux autorités israéliennes d’identifier tous les comptes en banque et le patrimoine liés directement ou indirectement à l’argent de la fraude au CO2.

Dans le même temps, les juges ont essayé de cartographier tous les transferts vers Israël liés à d’autres accusés du CO2. C’est le cas, par exemple, de l’agent immobilier Eddie Abittan. Durant son interrogatoire, Abittan a affirmé qu’il avait reçu 2 millions d’euros de Mimran sous forme de prêt, qu’il lui a remboursés par la suite. Mais Mimran a juré aux enquêteurs qu’il ne connaissait pas Abittan et qu’il avait transféré les 2 millions vers son compte à la demande de son associé présumé dans la fraude au CO2, Samy Souied, qui sera assassiné à Paris en septembre 2010.

Le nom de Mimran est cité dans ce dossier comme possible commanditaire du meurtre, bien qu’aucune mise en examen n’ait été prononcée à ce jour dans cette affaire faute de charges, comme c’est aussi le cas dans d’autres affaires criminelles sur lesquelles plane l’ombre fuyante du même Mimran. Ce dernier dément la moindre implication dans les meurtres reliés à la fraude au CO2.

Dans le volet purement financier de l’affaire, dont le jugement sera rendu ce jeudi au tribunal de Paris, le procureur de la République avait requis dix ans de prison ferme contre Mimran, les menottes à l’énoncé du jugement et la confiscation de son patrimoine. En un mot : la fin de la liberté et la ruine. Celles-ci précipiteront-elles la chute de Netanyahou dans leur sillage ?

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6 juillet 2016 3 06 /07 /juillet /2016 12:45

Communiqué de la CGT VINCI après la consultation à NDDL.

Notre-Dame-des-Landes : Non aux expulsions, non aux travaux


Le Collectif national des syndicats CGT du Groupe VINCI considère que la consultation du 26 juin 2016 sur le « transfert » de l’aéroport de Nantes-Atlantique à Notre-Dame-des-Landes n’a été pour le gouvernement qu’un nouveau moyen de manipuler l’opinion pour tenter de justifier son désengagement au profit du privé, dans un déni de démocratie avéré.

Cet ersatz de référendum ne résout en rien les problèmes légaux posés par le projet de construction d’un nouvel aéroport ; il reflète avant tout la volonté des parties intéressées (gouvernement Valls et VINCI) de passer en force avant l’échéance de la déclaration d’utilité publique.
C’est pourquoi, face à autant de mépris, nous réitérons notre demande qu’il ne soit procédé à aucune expulsion ni expropriation sur le site, que rien ne soit entrepris tant que tous les recours ne seront définitivement tranchés, et qu’il soit mis un terme à toutes les opérations d’intimidation et de stigmatisation des habitants de la ZAD, auxquels nous réaffirmons notre solidarité.
La question simpliste posée aux seuls électeurs de Loire-Atlantique, sur la base de données incohérentes, voire périmées, n’a fait que contourner la nécessité d’une remise à plat d’un projet compromis de toutes parts. Cette consultation, orchestrée et orientée par des promoteurs avides, prive le Grand-Ouest et les citoyens de la région d’une authentique réflexion sur leur avenir et les choix de développement qui leurs sont nécessaires.
C’est pourquoi nous réclamons à nouveau qu’une étude indépendante et sérieuse soit menée,
notamment pour étudier les avantages et inconvénients du maintien en exploitation et du
développement de l’aéroport de Nantes Atlantique, sur la base de données fiables et actualisées.

En tant qu’organisations syndicales responsables et motivées par les intérêts collectifs de nos concitoyens et des salariés du groupe VINCI, nous réaffirmons notre volonté de travailler sur des projets dont nous puissions être fiers pour leur utilité sociale et sociétale. Aussi, nous dénonçons toutes formes de PPP, dites de « Partenariat Public Privé », qui ne font qu’alimenter des profits privés sur des biens publics, au détriment de l’intérêt collectif – comme nous en avons eu l’exemple en 2006, avec la grande braderie des concessions d’autoroutes à des grands groupes dont VINCI fait partie.

Nous renouvelons notre mise en garde contre la menace que ce genre de contrats fait peser sur les emplois,les salaires et les conditions de travail, le dumping social étant la seule façon de satisfaire les conditions abusives de rentabilité imposées à de telles concessions.
C’est pourquoi, en tant que salariés de VINCI, directement concernés par cette affaire, nous refusons
d’être associés en quoi que ce soit aux basses œuvres d’AGO, filiale du Groupe, et répétons notre
refus de servir de mercenaires pour démarrer un chantier dans les pas d’une nouvelle opération « César ».

Nous appelons l’ensemble des salariés et des citoyens qui partagent les termes de cette déclaration à
se rendre sur la ZAD de Notre Dame des Landes les 9 et 10 juillet prochains pour en témoigner et défendre l’intérêt de tous.

Montreuil, le 30 juin 2016

Communiqué de la CGT Vinci après la consultation du 26 juin sur l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes (30 juin 2016)
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  • : Le chiffon rouge - PCF Morlaix/Montroulez
  • : Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste. Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale. Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.
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