Ces salariées des Genêts d’or ne comprennent pas pourquoi elles ne peuvent pas toucher la prime de 183 €, alors que des aides-soignantes à l’hôpital en bénéficient. | OUEST-FRANCE
Oubliés du Ségur en Finistère : « Cette prime de 183 euros, c’est un mois de courses »
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Delphine VAN HAUWAERT
Plus de 200 salariés du social et du médico-social se sont rassemblés à Morlaix (Finistère), jeudi 21 janvier 2021. Ils dénoncent le non-versement d’une prime mensuelle de 183 €.
Pour Cyril, père de trois enfants, 183 €, c’est une semaine de courses . Avec cette somme, sa collègue Sandra remplirait le frigo pour un mois . Ces aides-soignants au foyer médicalisé Le Triskel, à Plougonven (Finistère), touchent entre 1 400 et 1 500 € par mois. Ne pas obtenir cette prime, c’est un manque à gagner important pour eux.
« Injustice »
Ils font partie de ceux que l’on appelle « les oubliés du Ségur de la santé », qui, à l’été 2020, actait la revalorisation salariale des personnels des établissements de santé et des Ehpad, à hauteur de 183 € par mois, excluant les salariés du secteur social et médico-social.
Parmi les quelque 220 salariés ayant participé à cette mobilisation départementale, Carole et Karine, aides-soignantes à la maison d’accueil spécialisée des Genêts d’or, où était organisé le rassemblement.
C’est dégueulasse , lance Karine, pour qui, là encore, 183 €, ce n’est pas rien . Avec treize ans d’ancienneté, elle gagne 1 500 € par mois, primes comprises. On fait des horaires d’hôpitaux, avec une amplitude allant de 7 h à 21 h 30, et on travaille un week-end sur deux et les jours fériés , précise Carole.
Toilettes, activités, sorties… Les deux jeunes femmes s’occupent de personnes en situation de lourd handicap. Il y a des problèmes de comportement parmi les personnes accueillies, reprend Karine. Mais on aime notre métier. Simplement, on ne veut pas le faire pour rien.
De gros écarts de salaire
Outre le non-versement de cette prime, l’aide-soignante ne comprend pas les écarts de salaires constatés dans ce secteur. Selon Joël Goron, directeur général des Genêts d’or, ces différences entre des professionnels qui s’occupent de personnes âgées et d’autres en charge de personnes en situation de handicap peuvent aller jusqu’à 300 € ».
Les disparités sont encore plus flagrantes quand ce sont les salariés d’une même entreprise qui ne touchent pas le même salaire, comme c’est le cas à l’hôpital. « On va parfois faire des remplacements dans des services qui, eux, obtiennent les 183 € », indique Cyril, du Triskel, à Plougonven, service en charge des traumatisés crâniens dépendant du centre hospitalier des pays de Morlaix (CHPM). L’aide-soignant le reconnaît : « Ça peut créer une mauvaise ambiance. »
Perte d’attractivité
En tout, dans le pays de Morlaix, ils sont « 40 agents du CHPM à être exclus du Ségur », dénonce Christophe Boudrot, de la CGT, citant, outre le Triskel, le service de soins infirmiers à domicile (SSIAD) et le centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA).
Si l’on prend en compte toutes les structures privées ou associatives sur le département, ils sont 8 000 à réclamer cette hausse de salaire.
Cela n’aide pas à améliorer l’attractivité de ces métiers, au contraire. Il y a une incidence sur le recrutement , déplore le directeur des Genêts d’or. Avec un impact sur le quotidien des aides-soignantes à la Maison d’accueil spécialisée qui, double peine, se retrouvent à travailler davantage « quand le matin on est deux au lieu de trois en poste . De quoi avoir « parfois envied’aller travailler ailleurs.
Quand il existe une cause de refus d’exécution du mandat d’arrêt européen, la remise de la personne recherchée est refusée. C’est tout. C’est ce que prévoit notre loi, en son article 695-23 du Code de procédure pénale, loi créée pour appliquer le droit européen, à savoir la décision-cadre n° 2002/584 du 13 juin 2002. Alors pourquoi ne pas l’appliquer, plutôt que de tenter un énième détournement dans la dernière ligne droite ?
En effet, en toute cohérence, on semblait toucher au but. Emboîtant le pas de la conseillère à la Cour de cassation, l’avocat général a admis qu’il ne pouvait y avoir exécution du mandat d’arrêt européen visant Vincenzo Vecchi pour la condamnation de Gênes sous une qualification équivalente de « vol en bande organisée » et qu’il n’appartenait pas à l’État d’exécution, ici la France, de décider que le délit de « dévastation et pillage » entrait dans les trente-deux cas de renvoi automatique. L’avocat général a reconnu que la France ne pouvait se substituer à l’Italie pour décider de cette qualification, alors que celle-ci, État d’émission du mandat d’arrêt européen, ne l’avait pas indiquée et n’avait pas coché la case correspondante sur le formulaire du mandat d’arrêt européen. C’est une nouvelle étape de franchie, donc, dans la course de fond judiciaire. Il s’agit là d’un beau désaveu de l’argumentaire juridique boiteux du procureur général d’Angers.
Autre nouvel obstacle franchi : la reconnaissance par le même avocat général près la Cour de cassation que le délit de « dévastation et pillage » n’a pas d’équivalent, au moins pour un des sept faits requis, là où la cour d’appel d’Angers en retient deux, et ce, car il n’existe pas de complicité passive dans le droit français. Il s’ensuit que, dès lors que le délit de « dévastation et pillage » n’est pas reconnu comme étant une infraction dans notre droit pour au moins un fait, cela implique qu’il n’y a plus de proportionnalité de la peine comme exigé par la loi européenne en son article 49-3 de la charte des droits fondamentaux.
Arrivé à ce point de bonne rhétorique qui devait le conduire à conclure que le mandat d’arrêt européen ne pouvait être exécuté et que Vincenzo Vecchi ne devait pas être remis à l’Italie, l’avocat général se cabre devant le dernier obstacle et rate la ligne d’arrivée en proposant de renvoyer le cas devant la Cour de justice européenne pour qu’elle indique une manière d’effectuer une réduction, une conversion de la peine ou un nouveau recours. Or, il n’y a pas de recours possible contre cette peine. Elle est définitive pour avoir été prononcée par la Cour de cassation italienne. Aucune réduction, aucune conversion ou aucun aménagement de la peine n’a été proposé par l’Italie lors du supplément d’information ordonné par la cour d’appel de Rennes. Et pour cause, ni la France, ni l’Italie, ni la Cour de justice européenne ne peuvent modifier une peine.
La voie de la révision n’existant pas, pourquoi s’arrêter en chemin et ne pas aller au bout du raisonnement ? Il suffit d’appliquer la loi interne française, qui a transcrit la décision-cadre européenne du 13 juin 2002. L’article 695-23 du Code de procédure pénale indique que « l’exécution d’un mandat d’arrêt européen est également refusée si le fait faisant l’objet dudit mandat d’arrêt ne constitue pas une infraction au regard de la loi française ». La Cour de justice européenne ne saura dire ni plus, ni mieux, que notre droit.
Dix-huit mois de prison et dix années d’exil, voilà le prix pour avoir manifesté le 20 juillet 2001 à Gênes. On impose pourtant à Vincenzo Vecchi la perspective de mois, voire d’années de procédure supplémentaires, alors que nous savons tous que la Cour de justice européenne sera dans la même impasse que la Cour de cassation. Pourquoi ? Nous ne voulons pas penser qu’il s’agit de gagner du temps, quitte à laisser Vecchi dans un temps suspendu qui l’empêche d’envisager tout avenir. Le droit français permet de mettre fin à cette course de fond, il suffit de l’appliquer. Et ce sera justice pour Vincenzo Vecchi.
Vallourec, Enedis, Renault... Accompagné de Céline Brulin et Hubert Wulfranc, le secrétaire national du PCF a rencontré, mardi 19 janvier, des syndicalistes de plusieurs entreprises de Seine-Maritime. Objectif : travailler aux relocalisations, en lien avec les mobilisations des salariés en lutte.
Seine-Maritime, envoyé spécial.
«On entre en période électorale, et les oreilles sont beaucoup plus ouvertes. » Le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, démarre sa visite du département par une rencontre avec l’intersyndicale de Vallourec, entreprise métallurgique dont le site de Deville-lès-Rouen sera bientôt fermé. Aux syndicalistes qui cherchent des pistes de reclassement pour leur usine, le député du Nord, accompagné de la sénatrice Céline Brulin et du député de la circonscription Hubert Wulfranc, promet d’intervenir auprès du gouvernement. « Nous avons tout intérêt à peser ensemble auprès du ministère pour obtenir la réindustrialisation du site », propose Fabien Roussel. « Il faut obtenir une réunion à Paris. »
Cette journée dans plusieurs entreprises de la banlieue de Rouen, le secrétaire national du PCF l’a voulue comme un échange avec les salariés, pour la plupart en prise avec les conséquences de la désindustrialisation, qu’elle soit liée ou simplement amplifiée par la crise sanitaire. « Lorsque ces usines ferment, ce sont les salariés qui payent, et tout le bassin d’emploi avec. » Pas question de laisser faire, pour les trois parlementaires communistes, qui souhaitent soutenir au maximum les mobilisations syndicales. Ainsi, à Cléon, ce sont quelque 687 salariés de Renault qui sont invités au « départ volontaire » par la direction du groupe.
Grève nationale chez Renault
Pour l’essentiel, ils travaillent à la production de moteurs thermiques et de boîtes de vitesses, selon un syndicaliste de la CGT, Pascal Le Manach. « On leur dit qu’ils ne servent plus à rien. » « À terme, on ne produira plus ici que de l’hybride et de l’électrique », regrettent Pascal et ses collègues. Les salariés seront en grève nationale, le 4 février. « On a investi fortement pour réduire les émissions de particules fines, il y a un vrai savoir-faire que nous devons préserver. On ne peut pas tout miser sur l’hydrogène et l’électrique. On va mener cette bataille avec vous », promet Fabien Roussel. « Nous allons la mettre au cœur des échéances électorales à venir. Avec ce système économique, on est tous perdants. Ce sont des emplois en moins, des recettes fiscales en moins, et un bilan carbone déplorable avec les délocalisations de sites de production. »
Un peu plus tôt, les trois parlementaires se sont rendus sur le piquet de grève des salariés d’Enedis, en lutte contre le plan Hercule qui vise à séparer EDF en trois entités distinctes. Un passage apprécié. « Nous remercions les élus communistes qui nous soutiennent et ont réussi à ouvrir des commissions parlementaires. » « Nous avons pu initier au Sénat un débat sur Hercule », souligne d’ailleurs la sénatrice Céline Brulin. « Nous mènerons le combat avec vous, pour vous, mais aussi pour contribuer à la relance de l’économie de notre pays », assure Fabien Roussel.
« Réquisitionner des sites de production »
En pleine crise sanitaire et en pleine polémique sur les pénuries de vaccin contre le Covid-19, les trois élus PCF ont également rendez-vous sur le site de Sanofi à Saint-Aubin-lès-Elbeuf. Le groupe entend externaliser six usines, dont celle d’Elbeuf, et mettre en concurrence les sites restants…
Ce 19 janvier, les salariés de Sanofi sont en grève. « Nous sommes un site spécialisé en antibiotiques », expliquent les syndicalistes aux élus. « Mais Sanofi ne veut pas en faire, parce que ça ne rapporte pas beaucoup. » Selon eux, « un médicament qui guérit n’est pas un bon médicament. Sanofi préfère développer des médicaments qui traitent ». Un syndicaliste rappelle en outre que le groupe pharmaceutique a perçu un milliard d’euros, en dix ans, en crédits recherche, « tout en supprimant des emplois ». Pour le secrétaire national du PCF, « nous avons besoin d’outils législatifs permettant de réquisitionner des sites de production pour faire des doses de vaccin ». Et, plus que jamais, de rappeler la proposition de son parti de créer un « pôle public du médicament ».
Pour terminer, les parlementaires communistes rencontrent enfin des acteurs de l’événementiel (intermittents, artistes et entrepreneurs) dans l’auditorium Roland-Leroy de Oissel. « Nous sommes venus avant tout pour vous écouter », prévient Hubert Wulfranc. Et l’angoisse est forte : « Les gens ont pris de nouvelles habitudes, ça ne redémarrera pas de suite » ; « Les collectivités nous attribueront-elles les mêmes budgets qu’avant la crise ? » ; « Comment va-t-on rembourser les prêts garantis par l’État ? »... « Nous avons dénoncé des décisions incohérentes », rappelle alors Fabien Roussel. « On aurait pu maintenir les lieux de culture ouverts. » De plus, selon lui, « les aides de l’État ne sont pas suffisantes ». Et mal faites. Il rappelle ainsi à un entrepreneur pourquoi il a voté contre les 10 milliards d’euros de réductions fiscales accordées aux entreprises. « Parce qu’on a accordé cette aide à toutes les entreprises, y compris les plus grandes, qui vont en absorber la majeure partie. Alors qu’il aurait fallu accorder une suppression à 100 % de la taxe foncière et de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – NDLR) sur deux ans, mais aux 520 000 TPE et PME qui en ont réellement besoin. »
Selon nos informations, le gouvernement prépare une ordonnance qui modifierait l’ordre des créanciers privilégiés en cas de liquidation judiciaire, avec à la clef une rétrogradation du privilège des salariés. Conçue malgré l’actuel tsunami social, la réforme menace une institution sociale, l’AGS, qui verse leurs salaires chaque année à près de 100 000 salariés.
Au plus fort de la crise sanitaire que traverse la France et du tsunami social qu’elle entraîne, il aurait pu sembler logique qu’Emmanuel Macron marque au moins une pause dans la cascade de réformes néolibérales qu’il a imposées au pays depuis son accession à l’Élysée. Et surtout, qu’il ne prenne pas de nouvelles mesures qui fragilisent davantage la situation des salariés, qui sont menacés par une spectaculaire envolée du chômage.
Le gouvernement prépare pourtant une réforme qui risque d’avoir des effets ravageurs sur le monde du travail puisqu’elle mettrait en très grave danger le régime de garantie des salaires, qui protège les salariés en cas de liquidation judiciaire, par le biais d’un changement de l’ordre des créanciers privilégiés qui interviendrait au détriment des salariés et à l’avantage des mandataires et administrateurs judiciaires. Ces informations, dont Mediapart a eu connaissance, confirment les premières révélations de L'Obs.
Le ministère de la justice a donc lancé une consultation des professionnels du droit, des acteurs économiques et des universitaires sur ces avant-projets de réformes, jusqu’au 15 février 2021. Et à cette fin, il a levé le voile sur deux avant-projets d’ordonnance qui sont passés jusqu’à ce jour inaperçus mais qui sont d’une considérable importance, puisqu’on y découvre une réforme qui va très au-delà de ce que propose la directive européenne. La Chancellerie propose ni plus ni moins que de dynamiter le régime de garantie des salaires, qui permet aux salariés de percevoir leurs salaires lorsque leur entreprise fait l’objet d’une liquidation judiciaire.
Pour comprendre la gravité de ce qui se trame, il faut avoir à l’esprit que ce système de garantie de salaire est issu d’une très longue histoire sociale au cours de laquelle les salariés ont profité de protections progressivement renforcées en cas de liquidation judiciaire de leur entreprise. D’abord, un décret-loi du 28 octobre 1935, pris par le gouvernement Laval, a fait en sorte que la créance de salaire, en cas de liquidation, bénéficie d’un régime de faveur en conférant une garantie patrimoniale supplémentaire aux salariés, dite « superprivilège » des salaires.
Mais ce « superprivilège » avait une faille : il ne pouvait pas protéger les salariés en cas d’insolvabilité totale de l’entreprise. C’est ce qu’a en particulier révélé le célèbre conflit Lip, qui a défrayé la chronique sociale française tout au long des années 1970. À l’époque, le CNPF, qui pouvait avoir une générosité sociale dont son successeur, le Medef, est le plus souvent dépourvu, a donc eu l’idée de proposer au législateur d’instaurer une garantie de paiement des salaires, en cas de liquidation judiciaire.
Et c’est ainsi que, par une loi du 27 décembre 1973, en son article 2 (reproduction ci-dessous), est créée l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS), avec une mission simple : lorsqu’une procédure collective est ouverte et que les fonds disponibles ne permettent pas de régler les créances salariales, l’AGS se substitue à l’entreprise débitrice défaillante, à charge pour l’AGS par la suite d’obtenir les remboursements.
En clair, grâce à la technique dite de subrogation personnelle, encadrée par l’article L.3253.16 du Code du travail, l’AGS devient créancière de l’entreprise à hauteur de ses avances et bénéficie des privilèges des salariés. La gestion opérationnelle du régime de garantie est par ailleurs confiée à l’Unédic par l’AGS, dans le cadre d’un mandat de gestion.
L’AGS est donc l’héritière de la tradition sociale d’un courant du patronat français, dont le chef de file a longtemps été sa fédération de la métallurgie. Il suffit d’aller sur le site Internet de l’association pour vérifier la philosophie dans laquelle elle continue d’inscrire son action : « Dans un monde de concurrence généralisée et mondialisée, il est important de pouvoir compter sur la solidarité. Une solidarité bien particulière : celle des entreprises qui savent qu’aucune d’elles n’est à l’abri d’un retournement de conjoncture, d’une mutation des marchés ou de difficultés financières passagères ou structurelles. C’est pour cette raison qu’a été créée l’Association pour la gestion du régime de Garantie des créances des salariés (AGS) : le fonds de solidarité interentreprises, alimenté par une cotisation patronale obligatoire payée par toutes les entreprises. La mission principale de l’AGS à vocation sociale consiste à accompagner et soutenir les entreprises dans les procédures collectives en avançant les fonds nécessaires au paiement des créances salariales. Qu’il s’agisse de conseils, d’avances financières ou de suivi, l’AGS est un véritable amortisseur social qui permet de préserver l’emploi et de maintenir la viabilité économique de l’entreprise, et plus largement de soutenir le rebond de l’activité économique française », peut-on lire.
Et puis pour finir, un troisième texte, en l’occurrence la loi du 25 janvier 1985, a encore élargi le champ d’application de la garantie de l’AGS.
Dans l’histoire du patronat, l’AGS est donc une institution atypique, construite sur une logique de solidarité, puisqu’elle a versé environ 1,2 milliard d’euros en salaire en 2020 (près de 1,4 milliard d’euros les années antérieures, quand les aides publiques étaient moins fortes) à près de 100 000 salariés. Et comme le système est financé par les remboursements que l’AGS obtient (de l’ordre de 600 millions d’euros par an) et sur une cotisation patronale (de l’ordre de 800 millions d’euros par an), il est à la fois socialement généreux, et économiquement vertueux puisqu’il ne pèse ni sur le pouvoir d’achat des autres salariés ni sur les finances publiques.
C’est donc tout cet édifice juridique, très protecteur pour les salariés, que le projet d’ordonnance risque de bouleverser. Comme le révèle l’un des textes publiés par la Chancellerie, le gouvernement souhaiterait en effet réécrire totalement l’article L.643.8 du Code du commerce et modifier en profondeur les articles L 622.17 et L 641.13, qui sont précisément les dispositions légales qui fixent l’ordre des créances et des privilèges.
Lorsque l’on scrute le principal document du ministère de la justice, qui présente ses propositions de réforme, on peut alors comprendre ce qui va changer. Mediapart s’est entouré du conseil d’un expert social réputé pour établir le tableau ci-dessous qui résume l’ordre actuel des créances et, en vis-à-vis, le nouvel ordre qui résulterait de la réforme, tel qu’il est présenté à partir de la page 30 de ce texte de la Chancellerie :
À l’examen de ce tableau qui présente la synthèse des propositions de la Chancellerie, on comprend donc ce que serait la principale rétrogradation : le superprivilège salarial de l’AGS, qui représente 40 % de ses recettes et 80 % des créances récupérées, passerait du 3e rang actuellement au 6e rang après entrée en vigueur de la réforme. Les créances de salaires non couverts par l’AGS seraient pour leur part dégradées au 10e rang.
Il est par ailleurs envisagé de retirer les actifs immobiliers des sommes récupérables par l’AGS au profit des banques. Autre avantage au profit des établissements financiers : il est prévu à leur avantage ce que notre tableau fait apparaître comme « les créances garanties par le privilège de sauvegarde » ou « le privilège de redressement judiciaire ». Et ces nouveaux privilèges seraient attribués aux banques ou à tout établissement intervenant pendant la période d’observation.
Et enfin, notre tableau fait clairement apparaître que les frais de justice liés à la liquidation, c’est-à-dire essentiellement les honoraires et commissions des mandataires et administrateurs judiciaires qui, jusqu’à présent étaient derrière l’AGS, passeraient devant elle.
Conclusion sans appel de notre expert social : « Sous prétexte d’une transposition d’une directive européenne des sécurités et en plein désastre économique, le gouvernement prépare deux ordonnances au détriment des salariés pour le bénéfice des administrateurs et mandataires judiciaires ainsi que des banquiers ».
Les honoraires exorbitants des administrateurs judiciaires
C’est donc une réforme explosive que le gouvernement prépare, qui risque d’être vivement contestée sur de nombreux plans. La première contestation sera évidemment de nature politique et sociale : comment, dans un contexte social aussi dramatique, le gouvernement se permet-il d’envisager une réforme semblable ?
Mais cette réforme sera contestée aussi pour d’innombrables autres raisons, notamment d’ordre juridique car, en ses articles 60 et 196, la loi d’habilitation permettant au gouvernement de légiférer par ordonnance dans ce domaine encadre très précisément les points sur lesquels la réforme peut porter. Or l’ordre des créanciers ne fait pas partie du nombre.
Autres critiques en perspective : si le gouvernement veut dégrader les avantages de l’AGS, qui protègent les salariés, en revanche, il consolide ceux des mandataires et administrateurs judiciaires. Or, il faut bien l’admettre, cette disposition est tout à fait choquante, car depuis des lustres, les avantages indus dont profitent ces professions, ainsi que les honoraires totalement opaques et pharaoniques dont ils jouissent, constituent un scandale interminable.
Voici bientôt vingt ans, Arnaud Montebourg avait, à juste titre, dénoncé en 2001 dans un rapport parlementaire célèbre les invraisemblables passe-droits et privilèges dont jouissaient ces professions. Dans ce rapport, le député socialiste s’attardait en particulier sur les rémunérations à couper le souffle dont elles profitaient, et présentait en particulier le tableau ci-dessous :
Commentaire du rapport : « Les rapports de contrôle effectués plus récemment par la mission d’inspection des mandataires de justice font état, sur une étude portant sur un échantillon de 22 administrateurs judiciaires et 75 mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises, de bénéfices nets moyens par mandataire de l’ordre de 2 millions de francs. […] Au vu de ces chiffres qui révèlent indubitablement une situation pour le moins florissante, il faut garder à l’esprit que les mandataires de justice sont rémunérés par des entreprises en état de cessation de paiement, et qui feront, dans 95 % des cas, l’objet d’une procédure de liquidation. »
Et le rapport ajoutait : « La réglementation incite en effet les administrateurs judiciaires, par la perception d’un droit proportionnel sur le chiffre d’affaires de l’entreprise pendant la période d’observation, à prolonger au maximum cette période d’observation, au détriment de l’intérêt d’une entreprise à bout de souffle et de celui des créanciers en attente de remboursement. Il est également inacceptable de laisser subsister des distorsions de réglementation qui conduisent à ce que l’administrateur judiciaire soit mieux payé quand il procède à la cession de l’entreprise que lorsqu’il propose sa continuation ; il n’est pas non plus pertinent de conserver, pour le mandataire-liquidateur, un tarif dégressif au prorata de la réalisation des actifs, cette dégressivité n’encourageant pas le liquidateur à tenter des actions de valorisation d’actifs. »
Or, deux décennies plus tard, rien n’a changé : les honoraires sont toujours aussi considérables et fixés de manière totalement opaque, à la discrétion des intéressés. Et de cela, Mediapart, qui a consulté plusieurs experts proches des centrales syndicales, dispose de nombreux exemples. Une seule illustration – appelons-le le « dossier X », rapporté par l’un de nos experts, qui a requis l’anonymat : « Ouvert en redressement le 28 mai 2013, puis converti en liquidation judiciaire le 23 juillet 2013, le régime AGS a avancé la somme de 2,3 millions d’euros. À ce jour, le solde à recouvrer dans ce dossier, qui n’est toujours pas clôturé, est de 1,1 million d’euros, dont 43 000 euros au titre du superprivilège. Alors que le régime AGS n’a perçu que la somme de 1,2 million d’euros au titre du remboursement de sa créance superprivilégiée, les honoraires du seul mandataire liquidateur ont été fixés à plus de 763 000 euros. »
Alors, pourquoi, au lieu de remettre en cause ces privilèges dénoncés dans ce rapport de 2001, le gouvernement veut-il faire strictement l’inverse en consolidant les avantages de ces professions, au détriment des salariés ?
L’interpellation est d’autant plus justifiée que, par surcroît, la réforme entraînerait un différé de remboursement du superprivilège pour l’AGS, comme nous l’explique l’un de nos experts : « Les mandataires judiciaires ne seraient plus ainsi tenus de procéder à la répartition des fonds tant que l’ensemble des créanciers figurant dans cette nouvelle rédaction ne sera pas fixé. L’AGS serait ainsi dépendante de la fixation des frais de justice par le mandataire judiciaire lui-même, sachant que cette rémunération est fixée dans le rapport de clôture déposé par le liquidateur. L’AGS serait donc remboursée à la clôture, sous réserve de la présence des fonds, ce qui ne saurait être acceptable au regard des délais dans lesquels ces clôtures sont effectivement prononcées : actuellement, l’AGS dénombre plus de 50 000 dossiers non encore clôturés bien qu’ayant fait l’objet d’une liquidation judiciaire depuis plusieurs années ».
La conséquence de tout cela, c’est que l’AGS risque d’être prise dans un étau. Car la rétrogradation du superprivilège pourrait entraîner, selon les experts consultés par Mediapart, une baisse des recettes de l’ordre de 320 millions d’euros en 2021. Or, quand l’État interrompra les mesures exceptionnelles de soutien à l’économie prises pour faire face à la crise sanitaire, les faillites d’entreprises risquent d’augmenter spectaculairement, ce qui sollicitera encore plus la trésorerie de l’AGS.
Or, cet effet de ciseau (généré par une baisse des recettes induite par la dégradation du superprivilège et une augmentation des versements de salaires induite par la hausse des liquidations) est d’autant plus préoccupant que l’AGS a contracté, en décembre 2020 auprès d’un pool bancaire un emprunt pouvant aller jusqu’à 2 milliards d’euros, pour faire face aux besoins de trésorerie liés au paiement estimé des salaires en 2021 et 2022, conséquence des faillites prévisibles induites par la fin des aides gouvernementales.
De bonnes sources, l’AGS serait alors dans l’obligation, si elle veut maintenir l’équilibre financier du régime, de prévoir une augmentation de 0,36 point du taux de cotisation, ce qui la ferait passer à 0,51 point, un taux sans précédent.
Or, pour le patronat, la hausse des cotisations, c’est le chiffon rouge absolu ; c’est pour lui la crainte d’un renchérissement du coût du travail, avec à la clef un effet dépressif sur l’emploi.
Interrogée par Mediapart, la Chancellerie nous a fait valoir, par la bouche de sa porte-parole, Emmanuelle Masson, que toutes ces craintes n’avaient aucun fondement. On retrouvera toutes les observations de la porte-parole sous notre onglet « Prolonger ». La porte-parole conteste en particulier que la réforme soit conduite au détriment des salariés.
Voici ses principales observations : « Il est inexact de dire que le superprivilège passe du rang 3 au rang 6. Aucun classement fiable existant à ce jour ne permet de dire que l’AGS était à tel ou tel rang ; la difficulté que tranche le projet de réforme ne concerne que le classement du rang du superprivilège des salariés bénéficiant à l’AGS (...) par rapport à celui dit des frais de justice (...). En outre, il n’était pas contesté qu’au moins une partie de ces frais de justice primait déjà le superprivilège bénéficiant à l’AGS à hauteur des avances faites. Le projet n’est absolument pas conçu au détriment des salariés : les salariés ne peuvent aucunement souffrir du rang des créances des administrateurs et mandataires judiciaires. »
La porte-parole conteste aussi que les administrateurs judiciaires soient les gagnants de la réforme : « Sur l’impact financier du classement des créances d’honoraires et des créances de l’AGS dont vous m’avez fait part, il nous paraît absolument impossible de faire de telles projections ; cela supposerait en effet que l’on puisse déterminer le montant de la trésorerie disponible dans chaque procédure où il peut y avoir concurrence entre les créances d’honoraires des AJMJ et l’AGS, et personne ne dispose de telles données. En outre, on sait que les procédures collectives ont permis de maintenir un certain nombre d’emplois, limitant ainsi les engagements de garantie de l’AGS. »
Comme l’immense majorité des procédures judiciaires s’achèvent en des liquidations, on peut, toutefois, douter de l’argument. Reste donc la question la plus importante : que cherche en fait le gouvernement ? Ne souhaite-t-il pas porter le coup de grâce à l’AGS ? Il est, en fait, de notoriété publique que la Chancellerie et, surtout, le ministère des finances formulent de vives critiques à l’encontre du système qu’incarne l’AGS, pour les raisons que l’on devine. Bercy a toujours en horreur toutes les formes de démocraties sociales qui aboutissent à ce que d’importantes institutions échappent à sa tutelle. C’est ainsi que la Sécurité sociale, au cours des quatre dernières décennies, a progressivement été étatisée, avec le résultat que l’on sait : les partenaires sociaux en ont été de facto expulsés ; le paritarisme a été mis en miettes ; et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale n’est quasiment plus qu’une annexe du projet de loi de finances. Dans ce monde autoritaire et vertical, l’État décide de tout, et les partenaires sociaux n’ont plus leur mot à dire…
Même si l’AGS n’est pas une institution paritaire mais une institution patronale, elle échappe à Bercy, qui voit donc en elle un reliquat du vieux monde – à l’opposé des valeurs de la haute technocratie du ministère des finances. Il est d’ailleurs un signe qui ne trompe pas. Déjà, au début du quinquennat d’Emmanuel Macron, un projet confidentiel avait été envisagé, avant même la directive européenne, pour refonder le système et remettre en cause le superprivilège de l’AGS. Mais le premier ministre de l’époque, Édouard Philippe, avait fini par y renoncer.
Avec cet avant-projet d’ordonnance, le gouvernement repart donc à la charge. Et il ne faut pas se méprendre sur l’enjeu de la confrontation qui se joue dans les coulisses du pouvoir et du patronat : il s’agit ni plus ni moins que de la survie de cette importante institution sociale qu’est ce régime de garantie des salaires.
En difficulté sur son vaccin, la direction du laboratoire français, imperméable aux critiques, pourrait annoncer 400 nouvelles suppressions de postes dans la recherche et le développement, fin janvier, après avoir supprimé déjà 2500 postes en 10 ans. Le fleuron hexagonal a pourtant été choyé par l’État depuis des années à coups de politiques complaisantes et de généreuses subventions publiques... Ce mardi, les salariés sont appelés à la grève par la CGT. DÉCRYPTAGE D'UN SCANDALE.
Au pays de Pasteur, l’affaire a quasiment pris des allures de polémique nationale. Distancé dans la course planétaire à laquelle se livrent les géants de l’industrie pharmaceutique, Sanofi se révèle incapable de sortir son vaccin anti-Covid avant fin 2021, soit un an après son rival Pfizer. Un sacré aveu d’échec pour le fleuron hexagonal, pourtant choyé par l’État depuis des années à coups de politiques complaisantes et de généreuses subventions publiques – au moins 100 millions d’euros de crédit d’impôt recherche par an, sans compter les remboursements de la Sécurité sociale.
Accusant les directions successives d’avoir « cassé leur outil industriel », le député François Ruffin (FI) réclame une commission d’enquête, tandis que PCF et CGT font pression sur Sanofi pour qu’il produise des doses du vaccin mis au point par les concurrents (lire notre édition du 15 janvier). De son côté, la direction tente de relativiser la déconvenue. Mais, en interne, la pilule passe beaucoup plus mal. « C’est une honte, souffle un chercheur, écœuré. Voir qu’on a été incapables de sortir un vaccin dans les temps, malgré notre statut, je trouve ça inacceptable. »
40% de chercheurs en moins
Au risque de souffler sur les braises, la direction de Sanofi pourrait annoncer, fin janvier, de nouvelles coupes claires dans ses effectifs de R&D (recherche et développement). Comme beaucoup de multinationales, l’entreprise a pris l’habitude de baptiser ses plans de restructuration de noms à vocation euphémisante. Le dernier-né s’appellerait « Evolve ». Évoqué au cours d’une réunion informelle avec les principaux représentants syndicaux début décembre, il pourrait se traduire par la suppression d’environ 400 postes de recherche.
De quoi dépeupler des équipes déjà bien mal en point… Les bilans sociaux du laboratoire en attestent : en dix ans, les effectifs sont passés de 6 387 chercheurs (2010) à 3 905 (2020), soit près de 40 % de baisse. « Le pire, c’est que la direction elle-même le reconnaît, explique un cadre de Sanofi. Le responsable monde de la R&D, John Reed, l’a admis en juillet 2019, lors d’une réunion interne réunissant tous les effectifs du groupe. Ce jour-là, il nous a expliqué que nous avions un budget de recherche 20 % inférieur à nos concurrents de taille équivalente. Et il a terminé en nous disant : “C’est à vous de prouver que vous êtes efficaces si vous voulez qu’on vous donne plus d’argent !” »
« Sous-traiter le risque »
Cette saignée ne signifie pas pour autant que Sanofi a cessé de développer des molécules, simplement qu’il a revu sa stratégie de fond en comble. Désormais, le laboratoire se recentre sur quelques axes de recherche thérapeutique – les plus rentables –, tout en externalisant massivement ses activités de R&D. « C’est simple, ils ne veulent quasiment plus rien faire en interne, résume Pascal Collemine, chimiste et délégué CGT. Leur principe de base, c’est que la recherche coûte cher, et que c’est risqué. Ils renouvellent leur portefeuille de recherche à coups d’acquisitions, ce qui permet de sous-traiter le risque. Dernièrement, ils ont dépensé 1,1 milliard d’euros pour racheter une boîte anglaise spécialisée en biopharmaceutique, Kymab. Et si jamais l’entreprise qu’ils ont rachetée ne tient pas la route, ils s’en débarrassent. »
Ce processus ne date pas d’hier. Les chercheurs ont assisté à l’inexorable transformation de leur entreprise, au cours de la dernière décennie, sur fond de financiarisation galopante. Lorsqu’on leur demande de dater le début de la grande purge, tous donnent le même chiffre : 2009. Ce n’est pas un hasard : c’est en 2009 que débarque à la tête du groupe un tout nouveau dirigeant, Chris Viehbacher, lesté d’une solide réputation de cost killer. Né au Canada, expert-comptable de formation, il a fait ses classes chez le géant de l’audit, le britannique PwC, avant d’entrer dans l’industrie pharmaceutique. En le recrutant, les actionnaires de Sanofi lui font un pont d’or (il empoche 2,2 millions d’euros sous forme de chèque de bienvenue) et comptent sur lui pour restructurer l’entreprise. Ses méthodes lui valent bien vite le surnom affectueux de « Smiling Killer » (le tueur souriant) parmi les salariés. « Ce qu’il y a de curieux en France, c’est que l’on est toujours dans la lutte de classes, feint-il de s’étonner peu après son arrivée. On oppose toujours les actionnaires aux salariés. » (le Point, 27 mai 2010).
Transforming, puis Phoenix, puis Climb… Les gens qui baptisent les plans sociaux ont probablement lu Orwell !
« C’était un financier, plus qu’un entrepreneur, se remémore Maxime (1), chercheur chez Sanofi au département oncologie. C’est à partir de ce moment que les plans sociaux se sont enchaînés : il y a eu Transforming, puis Phoenix, puis Climb… Les gens qui les baptisent ont probablement lu Orwell : ces PSE désignent exactement le contraire de ce qu’ils sont ! »
« On ne respire plus... »
En attendant, le taux de dividendes reversés aux actionnaires grimpe sans discontinuer, passant de 24 % des bénéfices en 2011 à près de 98 % deux ans plus tard (2). Entré chez Sanofi il y a près de vingt ans avec une thèse de biologie moléculaire en poche, Maxime a vécu de l’intérieur la politique d’attrition de l’entreprise. « Il y a une quinzaine d’années, on travaillait sur une demi-douzaine de grands axes thérapeutiques, raconte-t-il. Il ne reste plus désormais que l’oncologie (les cancers) et un bout de neurologie sur les maladies rares. Des pans entiers de recherche ont été abandonnés, comme la cardiologie ou les anti-infectieux. Dans certains cas, c’est clairement une question de rentabilité. Les laboratoires adorent l’oncologie, car ce sont des traitements à plusieurs dizaines de milliers d’euros par an et par patient, qui sont remboursés par la Sécurité sociale. Mais je peux vous dire que lorsque vous êtes chercheur et que le projet sur lequel vous bossez s’arrête brutalement parce qu’on pense que les bénéfices ne seront pas au rendez-vous, c’est terrible… »
Chercheur sur le site de Strasbourg, Philippe (1) est tout aussi critique. « Nos dirigeants développent la R&D aux États-Unis, car c’est là que nous réalisons notre plus gros chiffre d’affaires. Mais en France, ils sont en train de casser la recherche. Un plan social n’est pas encore terminé qu’ils en lancent un autre ! Entre les restructurations et les changements de cap permanents, on ne respire plus. Sans compter que la complexification des processus internes nous éloigne de nos missions. Chaque mois, par exemple, nous devons comptabiliser le nombre d’heures que nous passons sur tel ou tel projet, et le rentrer dans un tableau. Ce type de tâches de reporting prend un temps considérable. »
« Le nombre d’arrêts maladie est préoccupant »
À le croire, la dégradation des conditions de travail commence à peser sur l’état d’esprit des collègues : « Le nombre d’arrêts maladie est préoccupant. En 2015, un collègue s’est suicidé, en laissant derrière lui un courrier sans équivoque ; il avait certes des raisons personnelles, mais son acte était clairement lié, au moins en partie, à son déplacement sur un autre site du fait d’une réorganisation. Depuis, quand on trouve sur des bureaux de l’entreprise des inscriptions de type “Sanofi m’a tuer”, on se demande s’il ne faut pas s’inquiéter… »
Ce mardi, la CGT appelait les salariés du groupe à débrayer pour protester contre la politique sociale menée depuis plus de dix ans. Le nouveau plan Evolve pourrait bien être annoncé en CSE, le 28 janvier, au grand dam des syndicats : « C’est totalement surréaliste, peste Aline Eysseric, de la CFDT. Pour développer les médicaments du futur, nous avons besoin de R&D. Par ailleurs, mettre des gens à la porte dans un climat économique aussi dégradé est irresponsable. »« Personne ne peut valider ça, confirme Jean-Marc Burlet (CFE-CGC). Voir les effectifs baisser de manière continue, c’est insupportable. » Contactée par l’Humanité, la direction n’a pas répondu.
(1) Les prénoms ont été modifiés. (2) Calculs effectués par le Groupe de recherche pour une stratégie économique alternative (Gresea).
« Le groupe devrait intensifier ses activités de recherche »
En pleine crise sanitaire, et alors que la campagne de vaccination se ponctue de retards de livraison de doses et de risques de pénurie, la décision de Sanofi de supprimer des centaines de postes de chercheurs émeut. « Le retard de Sanofi sur le vaccin montre au contraire que le groupe devrait intensifier ses activités de recherche. La multiplication des variants au Covid-19 doit inciter à une veille pharmaceutique permanente pour avoir une réponse adéquate aux besoins de santé », fait valoir Fabien Roussel, secrétaire national du PCF. Interrogé au micro de France Info, ce lundi matin, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, abonde : « On peut s’interroger si le retard du développement du vaccin chez Sanofi n’est pas lié à cette perte de compétences, à cette perte de savoir-faire… »
Les logiques de rentabilité des grands groupes font marcher le monde sur la tête...
Alors que nous traversons une pandémie mondiale, le groupe pharmaceutique Sanofi prend la décision de supprimer entre 400 et 600 emplois dans le secteur de la recherche et développement.
5 000 postes ont déjà été supprimés en France par le groupe en l'espace de 10 ans, sur un total d'environ 25 000 salariés. Et 3 000 postes ont été supprimés sur les 6 000 postes dans la recherche et développement.
Le retard de Sanofi sur le vaccin montre au contraire que le groupe devrait intensifier ses activités de recherche. La multiplication des variants à la Covid-19 doit inciter à une veille pharmaceutique permanente pour avoir une réponse adéquate aux besoins de santé.
Pour la 26e année consécutive, le groupe Sanofi a distribué des dividendes, battant par la même son record atteignant presque la somme astronomique de 4 milliards.
Autant d'argent qui n'a pas été investi dans la recherche, la formation, les salaires. Ni dans la production, alors que les pénuries de médicaments explosent depuis 2016 (2 400 ruptures d'approvisionnement en 2020, soit 4 fois plus qu'en 2016).
C'est une prédation à grande échelle qui s'effectue, au détriment de l'emploi et de l'efficacité même de l'entreprise.
Il est déraisonnable aujourd'hui plus qu'hier encore, de laisser les mains libres aux actionnaires.
Il y urgence à développer des logiques industrielles émancipées de la loi du profit, en donnant de nouveaux droits de gestion aux salariés, afin de développer l'emploi, la recherche et la formation, afin de développer un nouveau cycle vertueux dans un objectif de réponse aux besoins de santé.
Le PCF appelle par ailleurs à la création d'un pôle public du médicament, pour garantir la souveraineté sanitaire de la France.
Tandis que l’épidémie sévit partout en Europe et que le virus et ses variants circulent sur tout le territoire, le premier ministre Jean Castex et ses ministres ont présenté les nouvelles mesures sanitaires.
Alors que la crise économique, sociale et scolaire touche de plein fouet les jeunes, le gouvernement est une nouvelle fois apparu incapable d’apporter des réponses concrètes à cette partie de la population.
Pour les lycéennes et lycéens ? Alors que l’année scolaire se poursuit et qu’une nouvelle rentrée s’est faite sous le signe de la Covid-19, le gouvernement fait le choix - et cela est essentiel - de maintenir les établissements ouverts. Les consignes sont celles de la mise en place de meilleures conditions sanitaires afin que les élèves de terminale, passant le baccalauréat à la fin de l’année scolaire, puissent le faire dans de bonnes conditions. Mais comment créer les conditions de la réussite de toutes et tous alors que les élèves ont accumulé un retard important lié aux deux confinements ? Plutôt que d’annoncer des mesurettes sur les cantines, il est urgent d’ouvrir des postes dans l’ensemble des établissements afin de désengorger les classes et permettre aux élèves en difficulté de bénéficier de réels dispositifs de rattrapages. Il s’agit là de la seule et unique solution afin de pouvoir respecter les protocoles sanitaires mais également de tenter de pallier le retard accumulé par des élèves. Aussi, l’annonce d’une campagne massive de dépistage dans les établissements a de quoi laisser perplexe, tant ce gouvernement et ses prédécesseurs se sont évertués à démanteler le système de médecine scolaire.
Les étudiantes et étudiants peut-être ? Les étudiants de première année, eux, reprendront le 25 janvier prochain le chemin des établissements pour assister à leurs TD, en demi-groupe. Pour les autres, il faudra attendre. Alors que depuis le début de la crise un étudiant sur six a été dans l’obligation d’arrêter ses études, le gouvernement n’a rien annoncé pour planifier un retour en présentiel sur le long terme, la réouverture des universités ayant été exclue par le Premier ministre. Aucun plan de rattrapage du retard accumulé n’a été pensé. Et alors qu’elle explose dans tout le pays, la précarité étudiante n’a été que brièvement abordée et aucune solution sérieuse n’a été annoncée.
Alors peut-être les jeunes travailleuses et travailleurs ? Touchés de plein fouet par la crise économique, les jeunes travailleurs sont les grands oubliés de ces annonces. Pas un seul mot ne s’adressait à ces nombreux jeunes, notamment saisonniers, alors même que la saison d’hiver aurait dû débuter et que nombre d’entre eux se retrouvent une fois de plus sans emploi, et parfois même sans aucun revenu, n’ayant pas ou plus de droits au chômage, et pour certains n’ayant pas même accès au filet de sécurité que représente le RSA. Les propos d’Élisabeth Borne nous l’avaient fait comprendre cette semaine, mais cela est confirmé maintenant : le gouvernement est incapable de proposer des solutions pérennes à la jeunesse.
Pourtant, des solutions immédiates existent : ouverture du RSA pour les moins de 25 ans, pré-recrutements massifs de jeunes dans les services publics de l’éducation, de l’énergie, de la santé et des transports, la conditionnalité des aides publiques à l’embauche et la formation de jeunes, ou encore la rémunération au minimum au Smic de tout travail. Autant de solutions inaudibles pour un gouvernement prisonnier de ses logiques libérales et dont l’aspiration première reste la satisfaction des intérêts capitalistes.
Les JC et l’UEC, moteurs de la mobilisation des jeunes
Une fois de plus, le gouvernement ne s’est pas montré à la hauteur de la nouvelle période qui s’ouvre. Aucun plan de rattrapage n’a été annoncé pour les jeunes en formation. Pire encore, rien n’a été annoncé pour lutter contre le chômage grandissant des jeunes. Les jeunes sont une nouvelle fois laissés-pour-compte avec un avenir de plus en plus incertain. Alors que cette allocution aurait pu être l’occasion d’annonces allant vers une véritable sécurisation des parcours de formations et de travail, Jean Castex et ses ministres se sont fait les porte-voix d’une politique à la petite semaine, sans aucune ambition pour la jeunesse. Si nous sommes bien la génération sacrifiée, ce n’est pas à cause de la pandémie mais des choix politiques du gouvernement.
Face à l’inaction du gouvernement, les jeunes communistes organisent des actions tout au long de la semaine. Le mardi 19 janvier, les jeunes communistes avec une dizaine d’autres organisations de jeunesse ont organisé une action coup de poing devant le ministère de l’Économie. Cette action fait suite à l’intervention de Bruno Le Maire chez Bourdin contre l’ouverture du RSA pour les moins de 25 ans.
Le mercredi 20 janvier, l’Union des étudiantes et étudiants communistes organise une manifestation pour demander la réouverture des universités et un plan de lutte contre la précarité étudiante. µ
A peine commencée, la campagne de vaccination à l’arrêt ! (Fabien Roussel - PCF)
A Saint-Amand-les-Eaux, le centre de vaccination sera limité à 20 personnes vaccinées par jour à partir de mercredi, au lieu des plus de 100 prévues ! Car ce centre, comme tous ceux du Valenciennois, subi une « pénurie » de vaccins ! Le centre de Saint-Amand, comme beaucoup d’autres en France, doit déprogrammer les rendez-vous et les repousser à une date inconnue !
Alors que le gouvernement demandait aux communes et aux hôpitaux publics d’accélérer la cadence après avoir vanté la stratégie de la lenteur, alors que le laboratoire Pfizer assurait qu’il honorerait ses livraisons et rattraperait son léger retard de cette semaine, alors que le gouvernement assurait encore hier qu’il y aurait bien en France les 2,5 millions de doses prévues dans notre pays à la fin du mois, voilà maintenant que les centres de vaccination doivent déprogrammer les personnes de plus de 75 ans qui avaient, parfois péniblement, réussi à prendre rendez-vous pour se faire vacciner !
La France a vacciné 479 000 personnes quand les autres pays européens en ont fait le double ! C’est la honte ! C’est un nouveau scandale d’Etat !
Tout cela dénote d’un grand bricolage à l’échelle du pays ! C’est pourtant grâce aux vaccins qu’il sera possible de sauver des vies et éradiquer ce virus à l’échelle de la planète.
Le gouvernement doit être transparent dans sa gestion de la campagne de vaccination, dire où sont les doses, comment elles sont distribuées, en quelles quantités et accélérer la campagne de vaccination pour protéger les Français du virus, en s’appuyant sur les maires, les préfets et les hôpitaux du pays.
Le PCF demande que tous les laboratoires puissent produire les vaccins validés par la haute autorité de santé. Ils peuvent être réquisitionnés en cas d’urgence sanitaire. Les vaccins doivent devenir des biens communs, libérés de leur brevet et mis dans le domaine public pour que chaque pays, partout dans le monde, puisse en produire en quantité suffisante, largement, au plus vite, pour protéger toute la planète. Des chercheurs, des scientifiques, des pays comme l’Afrique du Sud l’exigent.
Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, député du Nord,
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Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste.
Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale.
Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.