Nouvelle baisse des APL : Emmanuel Macron s'acharne sur les familles modestes (Ian Brossat, PCF)
JEUDI, 31 AOÛT, 2017
HUMANITE
Communiqué du Parti communiste français
Les APL pourraient à nouveau baisser, annonce Emmanuel Macron dans le magazine Le Point. Une nouvelle fois, le Président de la République choisit de faire les poches aux familles modestes, au moment où, par ailleurs, il s'apprête à faire un cadeau de 3 milliards d'euros à ceux qui paient l'impôt sur la fortune.
Cette baisse fragilisera les locataires aux revenus les plus faibles. Elle les rendra moins solvables et conduira à une augmentation des expulsions locatives.
Le PCF est déterminé à faire obstacle à cette décision au côté des locataires et des associations mobilisées pour le droit au logement.
Ian Brossat, membre de la direction du PCF en charge des questions de logement.
Ian Brossat, adjoint communiste chargé du logement à Paris
Usant des pouvoirs exorbitants que lui confèrent les institutions de notre monarchie bien peu républicaine, Emmanuel Macron engage avec les ordonnances une confrontation sociale majeure, qui pourrait consacrer une victoire importante du capital sur le travail.
C'est peu dire que l’histoire qui va se jouer ce jeudi 31 août, avec la révélation par le gouvernement du contenu des ordonnances pour dynamiter le code du travail, est d’importance. À double titre : parce que cette réforme majeure constitue un va-tout politique pour Emmanuel Macron. Qu’elle aboutisse et entre en application ou qu’elle déclenche une tempête et en sorte en lambeaux, c’est, dans tous les cas de figure, le quinquennat entier du nouveau chef de l’État qui en sera marqué, renforcé dans un cas, ébranlé dans l’autre. Mais plus profondément, c’est, avec cette réforme, le spectre d’un nouveau capitalisme qui se profile. Après plus de 30 années de lente et progressive dérégulation économique et sociale, sa mise en œuvre constituerait l’ultime coup de boutoir faisant tomber le capitalisme français issu de l’après-guerre. En quelque sorte, elle marquerait une victoire considérable et durable du capital sur le travail.
Le premier enjeu, qui est politique, est le plus facilement identifiable. Porté à l’Élysée dans des circonstances historiques exceptionnelles, par la force d’un vote de rejet du parti d’extrême droite et de sa porte-voix, Marine Le Pen, et non par un vote d’adhésion à son projet néolibéral, Emmanuel Macron a pris, sitôt au pouvoir, la responsabilité d’ignorer la gravité de la crise démocratique. Loin de dialoguer avec tout le pays et d’essayer de le rassembler, il s’est au contraire lové avec délectation dans les institutions antidémocratiques de la VeRépublique, celles du« coup d’État permanent », pour imposer de manière autoritaire, par le biais des ordonnances, une politique économique et sociale parmi les plus violentes que la France ait connues depuis la dernière guerre.
C’est le paradoxe de ce début de quinquennat. Alors que la crise démocratique que traverse la France n’a jamais été aussi profonde – parce que le pays a eu trop longtemps le sentiment que le pouvoir était sans cesse confisqué par des élites arrogantes et imbues d’elles-mêmes, ne prenant jamais le soin d’être à son écoute ou de le consulter –, Emmanuel Macron a fait aussitôt l’exact contraire de ce qui aurait été nécessaire. Au lieu de refonder notre démocratie anémiée, au lieu de redonner vie à la démocratie politique en offrant aux contre-pouvoirs et, au tout premier chef, au Parlement, un rôle véritable, au lieu de refonder notre démocratie sociale, gravement malade, en redonnant enfin aux partenaires sociaux un rôle qu’ils ont perdu depuis longtemps, le chef de l’État a usé au contraire de tous les pouvoirs exorbitants que lui confèrent des institutions autoritaires qui n’ont d’équivalent dans aucune autre grande démocratie au monde.
Triste spectacle ! Ainsi a-t-on vu, sitôt la tempête présidentielle passée, un Emmanuel Macron jouer les petits roitelets ridicules et omnipotents, décidant de tout, se pavanant d’abord pour son sacre dans la cour Napoléon, devant le Carrousel du Louvre, puis plus tard, jusqu’à Versailles, n’écoutant pas même sa propre majorité, laquelle, par surcroît, ne s’est pas affirmée – ou pas encore ? –, se comportant le plus souvent comme un conglomérat mollasson de béni-oui-oui. Tant et si bien que, loin de revivre, la démocratie est sortie encore un peu plus abîmée de ces premiers mois d’un quinquennat mimant tous les travers d’un régime monarchique.
D’ailleurs, Emmanuel Macron assume visiblement lui-même sans la moindre gène ce legs monarchique qui empoisonne depuis si longtemps la vie démocratique française. Du début jusqu’à la fin, cela parcourt même, de manière pas même subliminale, sonentretien avecLe Point, publié ce 31 août:« Par la Constitution de 1958, le président de la République n'est pas seulement un acteur de la vie politique, il en est la clé de voûte »,commence-t-il par déclarer, avant de faire référence à plusieurs au… Roi-Soleil !« ”Ne vous laissez pas gouverner ; soyez le maître ; n'ayez jamais de favori ni de premier ministre”, conseillait Louis XIV à son petit-fils le roi d'Espagne Philippe V. », poursuit-il. Puis, il ajoute :« Louis XIV avait structuré un pouvoir central assis sur une monarchie absolue parfaitement décrite par Saint-Simon : la société de cour. Celle-ci existe toujours, sous une autre forme, car la France est un vieux pays dont le fantasme monarchiste est toujours présent. Cette comparaison s'arrête là, même si notre pays a besoin d'être dirigé. Cette phrase de Louis XIV souligne aussi la nécessité de ne céder à aucune coterie. C'est cela, la vraie liberté. »Et pour finir, il y a cette ultime référence :« J'assume cette part de transcendance qui fait qu'en France le processus démocratique n'est jamais tout à fait parvenu à son terme. Louis XIV, dont vous parliez, a maçonné son royaume avec des impôts, une armée, une administration. »
C’est en cela qu’Emmanuel Macron joue gros avec ces ordonnances. Car c’est sa première véritable épreuve du feu. En quelque sorte, le« coup d’État permanent » dont use le chef de l’État va se prolonger par un« coup d’État social » – la formule utilisée par La France insoumise est assurément pertinente – dont va dépendre toute la suite du quinquennat.
Il faut bien sûr relativiser la victoire politique qu’Emmanuel Macron empocherait si, d’aventure, il parvenait à mettre en œuvre ses ordonnances. Car, sur le long terme, on devine sans peine l’effet politique prévisible. Loin de conjurer la catastrophe démocratique qui a failli porter au pouvoir en France, en mai dernier, la dirigeante d’un parti néofasciste (ou postfasciste, peu importe la dénomination retenue), la mise en œuvre méthodique d’un programme de régression sociale, avec pour premier pilier la mise à bas de pans entiers du code du travail, aurait pour effet prévisible d’alimenter encore davantage le vote protestataire et pourrait rendre inéluctable en 2022 une victoire de Marine Le Pen, qui n’a été en 2017 qu’une menace, fût-elle sérieuse.
En somme, qu’Emmanuel Macron parvienne ou non à ses fins, cela ne pourrait guère modifier, au moins à moyen terme, l’issue du scénario politique dans lequel nous sommes entrés : on pressent que tous les ingrédients sont de toute façon réunis pour que la crise démocratique à l’œuvre actuellement se creuse toujours un peu plus. C’est comme une machinerie infernale : on sent venir la catastrophe démocratique qui, un jour, pourrait balayer la République.
Mais si les événements politiques que nous vivons sont d’une considérable importance, c’est aussi parce que les mutations économiques et sociales voulues par Emmanuel Macron, avec en lever de rideau ces ordonnances, vont constituer un ultime coup de boutoir, qui pourrait faire définitivement tomber le modèle social français.
Il faut certes avoir à l’esprit que la contre-réforme voulue par Emmanuel Macron vient de très loin. Et que beaucoup d’autres coups, au fil des dernières décennies, ont déjà ébranlé le modèle social français issu de l’après-guerre et dont les heures de gloire ont été les « Trente Glorieuses ».
Le point de bascule de cette histoire, il n’est pas difficile de l’identifier : c’est la chute du Mur, en 1989. Avant cela, le mouvement de déréglementation libérale planétaire avait certes déjà commencé. Par des chocs successifs, le monde stable voulu par les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale, codifié sur les plans monétaire et financier par les accords de Bretton Woods signés en juillet 1944 et, sur le plan social, par la déclaration de Philadelphie deux mois avant – déclaration qui donnera naissance à l’Organisation internationale du travail (OIT) –, est déjà gravement ébranlé.
Il y a d’abord eu la déréglementation monétaire : décrétée le 15 août 1971 par le président américain Richard Nixon, la fin de la convertibilité du dollar en or est le premier et grand coup de boutoir, qui plonge le monde dans un univers plus instable, où les marchés financiers vont progressivement conquérir une force considérable. Dans le prolongement de la vague ultralibérale, dont les champions sont Ronald Reagan et Margaret Thatcher, la déstabilisation du monde ancien s’accélère. Dès 1984, il y a la déréglementation boursière, dont le maître d’œuvre en France – ce n’est pas le moindre des paradoxes – est le socialiste Pierre Bérégovoy. Dans le même temps, il y a les premières mesures de déréglementation du marché du travail, avec l’apparition des premières formes d’emploi précaire.
Basculement dans un nouveau capitalisme
À partir de 1986, un nouveau séisme va tout changer : les privatisations. Tout se combine et s’accélère. Dans cette fureur libérale à laquelle droite et gauche s’abandonnent, la déréglementation fiscale prend le relais : au début du second septennat de Mitterrand, la France accepte de mettre quasiment à bas sa fiscalité de l’épargne. Au printemps 1989 – les socialistes veulent tellement faire du zèle en matière de libéralisme qu’ils anticipent la décision européenne –, c’est la libéralisation définitive des mouvements de capitaux.
Le fait est donc incontestable : si le virus libéral s’immisce partout, si la logique du « moins d’État » ou du « moins d’impôt » provoque de plus en plus de ravages, il reste que jusqu’à la fin des années 1980, le modèle social français, celui du capitalisme rhénan, n’est pas encore gravement affecté. Il commence certes à se fissurer, mais il tient encore debout. En outre, ce capitalisme a ses règles : il est régi par les principes de l’économie de marché, mais les grandes entreprises privées vivent le plus souvent en endogamie ou en consanguinité avec l’État. Surtout, ce système d’économie de marché est adossé à un système fort de régulation sociale : Sécurité sociale, assurance chômage, caisses complémentaires de retraite… En clair, le capitalisme rhénan cohabite avec l’État-providence et même en tire avantage.
Ce capitalisme, c’est celui qui a pris son envol en Allemagne, après que le SPD eut abjuré le marxisme et se fut converti à l’économie de marché, à l’occasion de son congrès de 1959, tenu à Bad Godesberg, petite localité au bord du Rhin. D’où l’appellation de « capitalisme rhénan »… Ce capitalisme-là est, à l’évidence, le plus favorable au compromis social. Il a éclos et s’est consolidé sous les Trente Glorieuses ; il offre du« grain à moudre », selon la formule d’André Bergeron, le vieux dirigeant de Force ouvrière. En clair, selon les rapports de force du moment, et selon les variations de la conjoncture, le compromis entre travail et capital peut changer.
Mais le grand vent des privatisations finit par tout changer. Suscitant une montée en puissance formidable des grands fonds d’investissement étrangers dans le capital des entreprises françaises, modifiant leurs règles de gouvernance au profit de la« share holder value »(profit pour l’actionnaire) ou de la« corporate governance »(gouvernement d’entreprise), il accélère brutalement le basculement du capitalisme français, du capitalisme rhénan vers le capitalisme patrimonial à l’anglo-saxonne, un capitalisme qui fait la part belle aux actionnaires.
C’est en cela que l’effondrement du Mur constitue un événement majeur : les marchés financiers ont alors l’intuition que l’époque leur devient hautement favorable et qu’elle est propice à une modification radicale du rapport de force entre le capital et le travail.
L’Europe continentale – à commencer par l’Allemagne et la France – commence à vivre une formidable mutation du capitalisme. Progressivement, le capitalisme rhénan s’efface au profit d’un capitalisme qui exerce une véritable tyrannie sur le travail, fait la part belle aux actionnaires, avec en première ligne les fonds de pension. Un capitalisme qui ignore le compromis social et qui interdit la réforme.
C’est cette lame de fond qui finit par ébranler le modèle français. En quelques années, le taux de détention du capital des groupes français du CAC 40 par les fonds d’investissement étrangers, dont les sulfureux fonds de pension anglo-saxons, passe d’environ 5 % en 1985 à plus de 47 ou 48 % à la fin des années 1990 – au-delà de 60 % pour certaines firmes. C’est une course folle, car la France est prise d’un complexe libéral et s’ouvre aux grands vents de la mondialisation de manière plus forte que ne le font les États-Unis ou la Grande-Bretagne, qui connaissent des taux de détention par l’étranger de leurs champions nationaux beaucoup plus faibles : de l’ordre de 20 % dans le premier cas et moins de 30 % dans le second.
La droite d’abord, la gauche ensuite offrent sans complexe les grands groupes français aux marchés financiers. C’est le retour de la Monarchie de Juillet, accommodée à la sauce anglo-saxonne :« Allez-y ! Servez-vous. Tout cela est à vous. Enrichissez-vous… »
La Monarchie de Juillet est loin mais, à leur manière, Balladur et Sarkozy, puis Strauss-Kahn et Fabius marchent sur ses brisées, livrant en pâture aux marchés les plus beaux fleurons de l’économie française. Jusqu’aux services publics : de France Télécom à Gaz de France. Et, du temps où il est le ministre de l’économie de François Hollande, Emmanuel Macron poursuit ce travail de sape, en dérégulant le transport routier ou en offrant les aéroports régionaux aux appétits des grands fonds d’investissement – ou même d’oligarques chinois corrompus. Au diable le service public et tout ce qui va avec : l’égalité d’accès garantie à tous les citoyens pour des besoins fondamentaux, la péréquation des tarifs…
Les effets de contamination de ces privatisations sont considérables. Le virus modifie radicalement la vie des entreprises. Avec l’entrée au capital des grands groupes français d’actionnaires boulimiques, qui exigent des rentabilités beaucoup plus spectaculaires, les principes de gestion sont complètement bouleversés. Fini, les patrons à l’ancienne, monarques de droit divin, arbitrant au gré de leurs humeurs, de la conjoncture ou des rapports de force, en donnant satisfaction tantôt à leurs salariés par des revalorisations de leurs rémunérations, tantôt à leurs clients par des baisses de prix, tantôt à leurs actionnaires par des hausses des dividendes. Désormais, dans le nouveau système, il n’y a plus guère que les actionnaires qui comptent.
Ce sont d’abord les grilles de rémunération des entreprises qui explosent. À la solde de leurs actionnaires, et non plus arbitres d’intérêts parfois contradictoires, les PDG sont dans ce nouveau système remerciés grassement pour leur allégeance à leurs nouveaux maîtres. Stock-options, golden parachutes, retraites dites chapeaux : au fil des ans, c’est un véritable déluge d’or dont ils profitent.
Cette richesse extravagante au sommet des entreprises a pour corollaire un phénomène nouveau et massif : l’apparition des«working poors »(travailleurs pauvres). Le capitalisme anglo-saxon favorise le recours à des formes d’emploi précaire et le plus flexible possible. Pour en rester au même exemple, celui de l’automobile, près d’un emploi sur deux dans ce secteur provient désormais de l’intérim. Autrement dit, le travail ne protège plus de la précarité, voire de la pauvreté.
Le sévère diagnostic de Marx
La progression du virus va au-delà. Par effet de contagion, il fait des marchés financiers l’arbitre de toutes les grandes décisions. Rares sinon impossibles en Europe continentale jusqu’en 1999 – date d’un raid historique du Britannique Vodafone sur le groupe Mannesmann, qui traumatise toute l’Allemagne –, les OPA deviennent fréquentes et ne choquent plus grand monde. Les plans sociaux des entreprises changent de logique : autrefois, les patrons justifiaient les licenciements en prétendant qu’il fallait couper les « branches mortes » de leur groupe ; désormais, ils coupent aussi les branches basses, celles qui sont rentables mais, à leur goût, dans des proportions insuffisantes au regard de la boulimie de leurs actionnaires. Cette nouvelle époque, marquée par une véritable tyrannie du capital sur le travail, ouvre la voie à des licenciements d’un nouveau type : des licenciements boursiers, pour caresser les marchés dans le sens du poil – comme ceux de Michelin face auxquels Lionel Jospin avait avoué son impuissance.
De proche en proche, c’est tout le modèle social français qui est en passe d’imploser. Avec le développement de l’intérim, c’est tout le droit du licenciement, c’est-à-dire tout un pan du code du travail qui passe à la trappe ; avec une couverture d’assurance maladie ou une couverture retraite de moins en moins protectrice, ce sont les systèmes d’assurance privée individuelle et de capitalisation qui progressivement prospèrent. Bref, ce sont tous les grands acquis sociaux qui sont mis, les uns après les autres, par terre. Au fil des ans, c’est la déclaration de Philadelphie qui, page après page, est déchirée en mille morceaux.
Mais cette mutation que traverse la France, cette régression sociale qu’elle commence à connaître ont eu un autre effet prévisible – et dont aujourd’hui le pays paie le prix : elles ont engendré une boulimie de plus en plus forte des milieux d’affaires ; elles les ont rendus de plus en plus insatiables, les poussant dans une attitude de surenchère de plus en plus folle. Rien que de très logique ! À partir de la chute du Mur, le capital prend l’ascendant sur le travail. Et dans cette modification du rapport de force, il devient de plus en plus exigeant.
Et c’est ainsi que dans les milieux patronaux, c’est le « toujours plus » qui finit par l’emporter. Hier, il y avait des courants du patronat, à commencer par celui rassemblé autour de l’UIMM, la fédération de la métallurgie, qui préconisaient une politique de compromis social, face à d’autres courants plus libéraux. Aujourd’hui, ces temps sont révolus et les débats au sein du Medef mettent en présence des clans tous plus libéraux les uns que les autres…
Dans cette logique de surenchère antisociale, les milieux d’affaires cherchent à accréditer l’idée, de très longue date, que si la France a bel et bien connu une mutation économique majeure au cours de ces trois dernières décennies, le modèle social français n’a, lui, que peu évolué. Ce qui est une contre-vérité notoire. Dans une enquête récente(lireLes quarante ans de dérégulation qui ont mis le code du travail en miettes), nous avons souligné à quel point les coups de boutoir contre le modèle social français ont été nombreux et répétés depuis la fin des années 1970. En quelque sorte, le vœu de Denis Kessler, l’ex-numéro 2 du Medef, de détricoter le programme du Conseil national de la résistance a bel et bien été exaucé.
Mais enfin ! Cette fable d’un retard de la France dans la déréglementation de son marché du travail, et plus généralement de son modèle social, a pris au fil des ans de la consistance. Et Emmanuel Macron en est, si l’on peut dire, l’héritier : c’est lui qui a été investi par les milieux d’affaires pour porter les derniers coups contre le modèle social, pour balayer les derniers miasmes de« l’esprit de Philadelphie », pour reprendre la formule qu’Alain Supiot avait mise en titre d’un ouvrage fameux(lireJustice sociale : le manifeste de l’après-guerre aux oubliettes)pour décrire le modèle social français de l’après-guerre.
Pour le patronat – on le mesure bien au soutien enflammé et un tantinet embarrassant que Pierre Gattaz apporte ces jours-ci à Emmanuel Macron –, c’est donc, à tort ou à raison, un combat majeur qui commence. La mère de toutes les batailles : enfin, là où Jacques Chirac ou Nicolas Sarkozy ont avancé à pas mesurés, il se trouve enfin un chef de l’État qui est disposé à avancer sabre au clair.
Même si ce coup de boutoir des ordonnances n’est pas le premier, il est donc d’une considérable importance. D’autant qu’il ne fait qu’ouvrir une réforme sociale de beaucoup plus grande importance. Car après le dynamitage du code du travail, il y aura celui de l’assurance chômage et la mise à mort, grâce au basculement des cotisations vers la CSG, du seul régime social encore paritaire(lireLa dangereuse contre-révolution fiscale de Macron). Dans son entretien auPoint, Emmanuel Macron avoue d'ailleurs lui-même que le basculement des cotisation chômage a pour objet de mettre un terme au paritarisme:« L'État a donc plus que son mot à dire, puisque c'est lui qui finance ! Sortons de cette hypocrisie française vieille de plusieurs décennies ! », dit-il.
Il y a aussi de lourdes menaces qui pèsent sur le Smic, qui a pour l’instant résisté tant bien que mal à des décennies de dérégulation sociale, malgré les assauts répétés dont il a fait l’objet(lireLa réforme du Smic a déjà ses artisans).
Bref, si Emmanuel Macron gagne la bataille des ordonnances, c’est tout le modèle social français qui va en être affecté, bien au-delà du seul droit du travail. Alors que la politique contractuelle est progressivement entrée en crise dans le cours des années 1980, c’est la place même de la négociation collective qui va être remise en cause, avec la consécration de l’inversion de la hiérarchie des normes sociales et le primat donné à l’entreprise. Et même encore plus profondément, c'est une remise en cause grave du fait syndical qui se profile, dans un contexte où les grandes confédérations sont déjà en très mauvaise santé.
Autrement dit, ce n’est pas à tort, tout de même, que les milieux d’affaires placent autant d’espoir en Emmanuel Macron : si son projet aboutit, il consacrera une victoire radicale du capital sur le travail. Dans l’histoire sociale française, ces ordonnances pourraient donc constituer un point de bascule majeur.
Avec cette aventure danslaquelle il se lance, à qui Emmanuel Macron fait-il donc penser ? À Charles X, porte-drapeau de la Restauration, qui avait eu la détestable envie de promouvoir des ordonnances liberticides – ce qui avait d’ailleurs précipité sa chute(lireOrdonnances : aux sources du coup d’État permanent) ? À Louis-Philippe ou à son ministre, le conservateur François Guizot (1787-1874), qui promettait aux classes dominantes des heures fastueuses, avec son invitation célèbre :« Enrichissez-vous ! » ? En vérité, s’il est utile de se replonger dans le passé pour éclairer le présent, c’est une autre comparaison historique qui vient immanquablement à l’esprit, piochée précisément à l’époque où la monarchie de Juillet s’effondre.
Exactement à la même époque, parlant du« rôleéminemment révolutionnaire »de la bourgeoisie, Karl Marx avait eu, dans leManifeste du parti communistepublié en février 1848, des formules fameuses pour décrire les mutations que celle-ci avait su conduire :« Partout où elle a conquis le pouvoir, elle a foulé aux pieds les relations féodales, patriarcales et idylliques. Tous les liens complexes et variés qui unissent l’homme féodal à ses “supérieurs naturels”, elle les a brisés sans pitié pour ne laisser subsister d’autre lien, entre l’homme et l’homme, que le froid intérêt, les dures exigences du “paiement au comptant”. Elle a noyé les frissons sacrés de l’extase religieuse, de l’enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité petite-bourgeoise dans les eaux glacées du calcul égoïste. »
Changement d’époque ! C’est aujourd’hui un rôle éminemment régressif que jouent les milieux d’affaires, dont Emmanuel Macron est le fondé de pouvoir. Le seul constat qui reste d’actualité, c’est que le capital, s’il emporte cette confrontation importance face au travail, a bien l’intention que les réformes engagées restent submergées par« les eaux glacées du calcul égoïste ».
Dans la nuit du 22 au 23 août, Salah Hamouri, franco palestinien, a été arrêté à son domicile, à Jérusalem-Est, par l'armée israélienne, sans qu'aucun motif ne lui soit apporté ainsi qu'à sa famille.
Ces méthodes d'intimidation contre ceux qui se mobilisent pour faire reconnaître les droits du peuple palestinien à vivre dans un état libre et indépendant sont inacceptables.
Ce mardi 29 août, nous apprenions, avec consternation et colère, que notre compatriote a été condamné à six mois de détention administrative sur ordre de Monsieur Avigdor Lieberman, Ministre de la Défense israélien.
Je vous demande, Monsieur le Ministre, d'intervenir avec détermination auprès du gouvernement israélien pour protéger et obtenir la libération d'un enfant de notre République.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération.
Le coup de massue a surpris tout le monde. Le 9 août, Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, déclarait que les contrats aidés étaient « coûteux » et « pas efficaces dans la lutte contre le chômage ». Le gouvernement a rapidement mis son plan d'économie drastique à exécution. Une mesure brutale qui concerne aussi bien les renouvellements que les nouveaux contrats. Les seules exceptions admises étant notamment dans le domaine de l'éducation nationale et pour les adjoints de sécurité. Les premières lueurs d'inquiétude ont commencé à poindre chez les titulaires de ces contrats, réservés aux allocataires du RSA, aux personnes éloignées de l'emploi ou sans formation. Cette année sur le territoire national, la suppression partielle des contrats aidés par le gouvernement peut mettre 150 000 personnes au chômage rien que cette année. Le député communiste du Nord Alain Bruneel a été le premier à l'Assemblée à alerter sur les effets catastrophiques de cette suppression des contrats aidés qui fragilise, pour des économies de bout de chandelle, les plus précaires, les associations et les services publics.
"Le secteur associatif dans son ensemble n'avait pas besoin de cela, déjà fragilisé financièrement par les baisses récurrentes de subventions de la part des collectivités, qui subissent elles-mêmes les politiques d'austérité de l'Etat. Et cela ne va pas s'arranger avec le choix du gouvernement d'amputer de 13 milliards d'euros le budget des communes. Or, les associations portent des projets vitaux pour les habitants et les territoires, déjà déstabilisés par l'affaiblissement des services publics... Même si ces contrats aidés sont loin d'être la panacée - nous, les communistes, nous nous battons pour des emplois durables - force est de constater que ces contrats jouent un rôle important dans de très nombreuses associations et au service de beaucoup de services publics. Et en particulier l'école". (ALAIN BRUNEEL, député communiste, L'Humanité - 21 août)
20 000 contrats aidés devraient être supprimés dans l'éducation nationale, non remplacés évidemment par des emplois de plein droit, mieux rémunérés.
A Diwan Morlaix, c'est le poste d'ATSEM de maternelle, en charge de dizaines d'enfants et des temps de cantine, qui se voit non renouvelé. Pour une association comme Diwan, qui oeuvre avec la filière publique ou privée bilingue pour le renouvellement des locuteurs du breton, cette mesure expéditive de Macron et de la boursicoteuse de Danone Muriel Pénicault, est un vrai coup de massue. Nous soutenons pleinement le combat de l'association DIWAN pour rétablir ces contrats aidés, et en particulier celui de notre amie ATSEM à Diwan, Kristell, qui s'est engagée l'année précédente sur une démarche de reconversion, d'apprentissage sur un an de la langue bretonne, et à qui l'on avait promis le financement d'une préparation du CAP Petite Enfance.
Avec la suppression des contrats aidés, c'est aussi des voies d'accès vers la formation, la reconversion et l'emploi plus durable qui "sautent".
Ismaël Dupont.
La rentrée à l'école Diwan n'aura pas lieu lundi. En effet, un des quatre postes de type contrats aidés ne sera pas renouvelé. Lise Boulbennec, présidente de l'AEP et les parents d'élèves sont inquiets. En raison de la non-reconduction d'un des quatre postes de type contrat aidés, l'association d'éducation populaire qui a en charge la gestion de l'école Diwan de Morlaix se retrouve face à une situation critique. Une assemblée générale extraordinaire a regroupé plus de 30 représentants des familles mardi soir, dans les locaux de l'école, rue de La Cordelière. « Des postes indispensables » La présidente Lise Boulbennec a présenté la situation en rappelant que les postes concernés sont « indispensables au bon fonctionnement » de l'établissement scolaire. Les responsable de l'APE ont rencontré jeudi dernier la députée Sandrine Le Feur. Lise Boulbennec a signalé que « celle-ci nous a confirmé la démarche du gouvernement tendant à réduire l'enveloppe budgétaire attribuée aux contrats aidés et même à disparaître en 2019 mais a laissé entendre que le monde associatif n'était pas ciblé en priorité mais plutôt le domaine privé ». Les parents Diwan dénoncent cette situation arbitraire et demandent soit le maintien du poste contrat aidé, soit la possibilité de disposer d'une autre type de financement. Il a été dit au cours de cette réunion : « Il faut repenser la loi Notre ». « Diwan n'a jamais abusé des contrats aidés ! » « On le savait depuis longtemps que cette situation n'était pas pérenne ! ». La décision a été prise de ne pas organiser la rentrée lundi mais de manifester à Morlaix à 9 h devant la mairie pour aller jusqu'à la sous-préfecture. Ils participeront aussi à la manifestation samedi, à Quimper.
La rentrée à l'école Diwan n'aura pas lieu lundi. En effet, un des quatre postes de type contrats aidés ne sera pas renouvelé. Lise Boulbennec, présidente de l'AEP et les parents d'élèves sont inquiets.
En raison de la non-reconduction d'un des quatre postes de type contrat aidés, l'association d'éducation populaire qui a en charge la gestion de l'école Diwan de Morlaix se retrouve face à une situation critique. Une assemblée générale extraordinaire a regroupé plus de 30 représentants des familles mardi soir, dans les locaux de l'école, rue de La Cordelière.
« Des postes indispensables »
La présidente Lise Boulbennec a présenté la situation en rappelant que les postes concernés sont « indispensables au bon fonctionnement » de l'établissement scolaire. Les responsable de l'APE ont rencontré jeudi dernier la députée Sandrine Le Feur. Lise Boulbennec a signalé que « celle-ci nous a confirmé la démarche du gouvernement tendant à réduire l'enveloppe budgétaire attribuée aux contrats aidés et même à disparaître en 2019 mais a laissé entendre que le monde associatif n'était pas ciblé en priorité mais plutôt le domaine privé ». Les parents Diwan dénoncent cette situation arbitraire et demandent soit le maintien du poste contrat aidé, soit la possibilité de disposer d'une autre type de financement. Il a été dit au cours de cette réunion : « Il faut repenser la loi Notre ». « Diwan n'a jamais abusé des contrats aidés ! » « On le savait depuis longtemps que cette situation n'était pas pérenne ! ». La décision a été prise de ne pas organiser la rentrée lundi mais de manifester à Morlaix à 9 h devant la mairie pour aller jusqu'à la sous-préfecture. Ils participeront aussi à la manifestation samedi, à Quimper.
Nous avons appris ce week-end avec douleur le décès de René Saout, militant syndical, agent de Morlaix-Communauté du service des déchets, élu du personnel CGT.
Cette nouvelle nous remplit de peine et nous tenons à rendre hommage à René Saout, un homme chaleureux, un homme de cœur, bon vivant et prêt à combattre sans relâche, dans un esprit ouvert et de camaraderie, au service du service public et des salariés.
Nous avons eu des relations régulières avec René pour discuter de la gestion des personnels et services publics de Morlaix-Communauté.
Après les rassemblements syndicaux, il participait tous les ans aux fêtes du Viaduc, la fête de la section PCF Morlaix le 1er mai, y amenant sa bonne humeur, ses interventions passionnées parfois.
Récemment, sans être adhérent au PCF, René avait tenu à faire partie du comité de soutien à Ismaël Dupont et Muriel Grimardias, les candidats PCF-Front de Gauche aux Législatives de juin 2017 dans la circonscription de Morlaix.
Plusieurs de nos adhérents ont été très proches de lui dans leurs activités syndicales et ont le cœur lourd aujourd'hui.
Nous exprimons notre solidarité et notre chagrin à sa famille, à ses amis, à ses camarades durement éprouvés par son décès et notre reconnaissance à René Saout pour son investissement au service de ses idéaux de justice sociale, du service public et des personnels de Morlaix-Communauté.
René est parti bien trop tôt. Nul doute qu'il aurait été un des piliers de la mobilisation contre la loi travail les semaines à venir.
Un dernier hommage sera rendu à René Saout au crématorium de Saint-Thégonnec à 11h le jeudi 31 août.
La section PCF du pays de Morlaix
Le 29 août 2017
René Saout au centre avec la délégation de la CGT à la fête du Viaduc: Julien Tanguy et Philippe Mora
René Saout lors d'une manifestation contre la loi El Khomri
A apprendre pour la manif du 12 septembre, et compléter si le coeur vous en dit, ce début de Marseillaise adapté en Macronaise de notre voisin et ami Paul Dagorn.
À l’avant-veille de la présentation par le gouvernement de sa réforme du Code du travail, le secrétaire général de la CGT alerte sur la gravité d’un texte conçu pour laisser les mains libres aux grands groupes en détruisant les protections des salariés
Pour la CGT, le doute n’est plus de mise. « On va vers une remise en cause sans précédent du droit du travail », explique ce mardi dans l’Humanité Philippe Martinez. Salaires, recours aux CDD, « CDI » intérimaires : sur tous ces sujets, c’est « la fin des repères collectifs » et la « précarité à long terme » qui s’organisent, selon le secrétaire général de la CGT. « On voudrait nous faire croire qu’il s’agit d’un projet nouveau et qu’il est la seule solution pour réduire le chômage, mais c’est un mensonge d’État. (…) Est-ce que travailler une heure par mois, c’est un emploi ? En réalité, ces ordonnances sont faites pour les grandes entreprises », poursuit le dirigeant syndical.
Philippe Martinez explique dans nos colonnes comment la CGT prépare dans les entreprises la riposte avec la journée de grève du 12 septembre, qu’il envisage comme « une première étape ». « On a déjà connu des ordonnances qui ne sont pas entrées dans la loi », lance-t-il.
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR SÉBASTIEN CRÉPEL
Julien Jaulin/hanslucas
À l’avant-veille de la présentation par le gouvernement de sa réforme du Code du travail, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, alerte sur la gravité d’un texte conçu pour laisser les mains libres aux grands groupes en détruisant les protections des salariés.
Le contenu précis des ordonnances pour réformer le Code du travail reste secret, malgré les rendez-vous donnés aux syndicats la semaine dernière. Pouvez-vous confirmer que les points les plus dangereux pour les salariés y figureront ?
PHILIPPE MARTINEZ Comme on ne nous a pas donné les ordonnances, nous n’en connaissons que les tendances fortes. Mais l’on va clairement vers une remise en cause sans précédent du droit du travail. Le gouvernement continue à parler d’excès de rigidité, de manque de libertés qui seraient la cause du chômage pour justifier la casse des droits des travailleurs. Cela veut dire la fin des repères collectifs, les règles dans leur très grande globalité étant désormais définies dans chaque entreprise. Cette inversion de la hiérarchie des normes s’appliquera aussi en matière de salaires, contrairement à ce que le gouvernement prétend, puisque, même si l’on ne touche pas aux grilles dans les branches, les ordonnances devraient permettre par exemple de rediscuter dans chaque entreprise de la prime d’ancienneté, laquelle peut représenter jusqu’à 20 % du salaire. La même logique prévaut pour des droits inscrits dans le Code du travail qui concernent l’ensemble des salariés, comme le nombre de renouvellement des CDD. Cela sera renvoyé aux branches, qui pourront faire ce qu’elles voudront. Le gouvernement souhaite étendre aussi le recours au CDI dit de projet, qui n’est rien d’autre que de la précarité à long terme, puisque ce contrat pourra être remis en cause du jour au lendemain. Et puis d’autres régressions sont glissées dans les textes, comme les temps d’habillage et déshabillage qui ne seront plus comptés en heure de nuit quand le salarié termine son poste à 21 heures.
Et concernant l’indemnisation du licenciement ?
PHILIPPE MARTINEZ La tête de chapitre, c’est : on augmente un peu les indemnités légales comme le font d’ailleurs déjà certaines branches, et tout ce qui est préjudice sera barémisé. Or 85 % des jugements aux prud’hommes le sont pour faute grave d’un patron. Désormais, ce dernier pourra provisionner un licenciement, quels que soient le préjudice et la gravité de sa faute, puisqu’il saura combien il devra débourser le jour où il voudra se débarrasser d’un salarié. C’est très grave. Je pense que le gouvernement ne changera pas d’avis non plus sur sa volonté de ramener au périmètre national l’appréciation des difficultés d’un établissement ou d’une entreprise en cas de licenciement. Typiquement, cela veut dire qu’une bataille comme celle des Molex ne pourra plus être menée. C’est un scandale, quand on sait les pouvoirs comptables des entreprises pour faire passer du jour au lendemain un établissement dans le rouge. Beaucoup ont des filiales auxquelles elles louent des locaux, il leur suffit de doubler le loyer…
Les instances du personnel seront-elles fusionnées comme le gouvernement le souhaite ?
PHILIPPE MARTINEZ On nous a laissé entendre que cela sera dans les ordonnances, quelle que soit la taille de l’entreprise, suppression des CHSCT à la clé. Fusion des institutions, ça veut dire moins de moyens, moins d’élus, moins d’heures de délégation, etc. Avec la possibilité, que le gouvernement dit ne pas avoir tranchée mais qui est dans le paysage, de permettre des négociations sans syndicat dans les petites entreprises. Cela est condamné par tous les syndicats au plan européen. Une récente étude a d’ailleurs démontré que l’absence d’implantation syndicale, quel que soit le pays, favorise le creusement des inégalités, notamment salariales.
La CGT a-t-elle été entendue sur certains points ?
PHILIPPE MARTINEZ Il semble qu’on ait été entendu en partie en matière de discrimination syndicale, ce qui montre que notre bataille sur les libertés syndicales, qui a abouti à l’adoption par le Conseil économique, social et environnemental des conclusions du rapporteur CGT sur le sujet, pèse dans les discussions. Mais c’est à vérifier jeudi.
François Hollande a critiqué le projet de son successeur, en fustigeant des « sacrifices qui ne sont pas utiles ». Y a-t-il une rupture avec la loi El Khomri ?
PHILIPPE MARTINEZ On voudrait nous faire croire qu’il s’agit d’un projet nouveau et qu’il est la seule solution pour réduire le chômage, mais c’est un mensonge d’État. Il faut casser cette idée que ce sont de nouvelles têtes avec de nouvelles idées qui sont au pouvoir : ce sont les mêmes avec les mêmes mots et les mêmes logiques. On reste dans la continuité des lois Hollande-Macron. La porte qu’ils n’ont pas pu pousser jusqu’au bout l’an dernier parce que la mobilisation les en a empêchés, ils essaient aujourd’hui de l’ouvrir complètement.
Le gouvernement se targue d’une situation qui s’améliore sur le front de la croissance et de l’emploi pour justifier d’aller plus loin dans la flexibilité du marché du travail…
PHILIPPE MARTINEZ À qui profite la pseudo-reprise économique ? Aux actionnaires. La France est championne d’Europe de la distribution de dividendes ! Mais le chômage ne baisse pas réellement, les radiations de chômeurs continuent. Par contre, la nature de l’emploi change, comme on l’a vu auparavant en Espagne ou en Allemagne. Il existe désormais une Allemagne à deux vitesses entre les travailleurs qui bénéficient de conventions collectives et les contrats ultra-précaires et à temps très partiel. C’est aussi le cas en Italie, où se développe l’embauche à l’heure. Derrière l’emploi, il faut donc poser la question de la qualité du travail. Est-ce que travailler une heure par mois, c’est un emploi ? En réalité, ces ordonnances sont faites pour les grandes entreprises car les artisans et les petits patrons ne veulent pas de la loi de la jungle, ils ont besoin de conventions collectives, sinon, c’est le plus fort qui définit les règles à son avantage.
Vous avez salué la méthode du gouvernement. Beaucoup critiquent pourtant son opacité et l’absence de véritable négociation collective…
PHILIPPE MARTINEZ Quand on dit qu’on va changer profondément les choses, c’est mieux de demander l’avis des syndicats, plutôt que d’apprendre le contenu de la loi dans la presse comme cela s’est passé l’an dernier. C’est cela que j’ai dit. Mais j’ai dit aussi que la manière de procéder du gouvernement relevait de l’enfumage, parce que, à l’issue des discussions, on ne connaît pas le contenu de ses arbitrages, ni ce qu’il a retenu des dix-sept pages de propositions de la CGT. C’est tout l’art de la communication du gouvernement : faire croire qu’il y a une négociation sans dévoiler son projet, et entretenir le flou jusqu’au dernier moment pour éviter que les syndicats ne fassent front commun. C’est un semblant de négociation, on ne peut même pas parler de concertation, juste de discussion. Le gouvernement tire ainsi à sa façon les enseignements de la mobilisation de l’année dernière, ce qui montre au passage qu’elle n’a pas compté pour rien. Ils se sont dit, cette fois, on ne va pas leur mettre sous les yeux un projet définitif, on va les recevoir séparément en communiquant sur les « 50 réunions » programmées. Mais, pour la CGT, cela s’est résumé à 7 fois une heure. Et cette méthode permet de dire des choses différentes aux uns et aux autres. La CGT a demandé officiellement une multilatérale (une réunion où les organisations seraient reçues ensemble – NDLR), sans réponse du gouvernement.
La CFTC a parlé d’un rééquilibrage de la copie du gouvernement en faveur de la branche par rapport à la loi El Khomri. Le confirmez-vous ?
PHILIPPE MARTINEZ Non, puisque nous n’avons aucun texte écrit.
Vous appelez à une journée de grève le 12 septembre. Où en est sa préparation ?
PHILIPPE MARTINEZ Les militants ont diffusé un tract à un million d’exemplaires cet été. Des initiatives ont été organisées durant notre campagne auprès des saisonniers et pendant le Tour de France cycliste. Des plans de travail sont prêts pour la rentrée. Nous visons une mobilisation ancrée le plus possible dans les entreprises. Nous avons tiré les enseignements du mouvement de l’année dernière. Des manifestations, il faut en faire parce que ça se voit, mais il faut aussi des actions dans les entreprises. Donc l’idée, c’est de préparer le 12 septembre avec les salariés, entreprise par entreprise, branche par branche, afin de partir des réalités de chacun pour établir des convergences.
FO n’appelle pas au 12 septembre. Comment percevez-vous l’évolution de son discours par rapport à l’an dernier ?
PHILIPPE MARTINEZ J’écoute ce que dit Jean-Claude Mailly, il a salué la méthode par rapport à l’absence de discussion de l’année dernière. Sur le fond, le secrétaire général de FO dit : on verra le 31 août. De notre côté, nous travaillons à réussir la mobilisation du 12 septembre. Nous prenons nos responsabilités sans rien imposer aux autres syndicats. Il y a des liens, des échanges avec les syndicats de Force ouvrière qui ont débouché, dans plus d’une trentaine de départements maintenant, à des appels unitaires, même si cela ne se fait pas toujours autour du rendez-vous du 12. Une grande fédération comme celle des transports appelle au 12 septembre, donc le débat se poursuit chez les militants FO. Je note aussi la position intéressante de la CGC, même si ce syndicat dit qu’il n’est pas dans sa culture d’appeler à la grève. Et je trouve la CFDT beaucoup moins enthousiaste que l’année dernière. Enfin, chez les étudiants, l’Unef appelle au 12 septembre. Tout cela montre l’utilité de la présence de la CGT dans les réunions au ministère. Le gouvernement espérait un petit débat feutré en attendant le 31 août, nos comptes rendus aident les salariés mais aussi les militants des autres organisations à comprendre les tenants et les aboutissants de ce qui se trame. On verra jeudi les positions des uns et des autres. Il restera encore deux semaines pour préparer le 12 septembre.
Quel écho suscite votre appel à se mobiliser chez les salariés ?
Philippe Martinez On note un mécontentement et de l’effervescence. Mais on ne sait jamais à l’avance comment cela se traduira. On a vu l’année dernière qu’il ne suffit pas de signer une pétition en ligne pour qu’une grève démarre dans chaque entreprise. C’est notre travail de syndicaliste de faire en sorte que ce mécontentement s’exprime dans un « tous ensemble » plutôt que chacun reste dans son coin. Pour cela, il faut sortir des slogans trop globalisants et aller au plus près des travailleurs. Regardons la lutte très intéressante des coursiers de Deliveroo, ils incarnent le modèle du travail rêvé par Emmanuel Macron. Pourquoi se battent-ils ? Pour obtenir des garanties collectives en matière de rémunération. Et ils s’aperçoivent que sans instance représentative des salariés il est difficile de faire valoir ses revendications. Ceux qu’on présente comme les travailleurs de demain se battent pour obtenir ce qu’ont les autres travailleurs, présentés comme des archaïques et des passéistes. Nous voulons faire converger les uns et les autres, à partir de ces réalités différentes.
Y aura-t-il des suites au 12 septembre ?
PHILIPPE MARTINEZ Nous tenons une assemblée de rentrée ce mardi, nous allons y réfléchir.
Le temps, très restreint jusqu’à l’adoption des ordonnances, n’est-il pas un obstacle à une mobilisation de longue durée ?
PHILIPPE MARTINEZ Les ordonnances ne sont pas la loi, elles ont six mois pour le devenir. Il y aura un retour à l’Assemblée nationale pour décider si ces ordonnances seront inscrites dans la loi. On a déjà connu des ordonnances qui ne sont pas entrées dans la loi…
Il existe donc encore un champ pour développer la mobilisation ?
PHILIPPE MARTINEZ Bien sûr, il y a du temps. C’était déjà comme ça l’année dernière avec le 49-3 : ils essaient de mettre des barrières pour empêcher d’agir. Nous, nous faisons confiance au pouvoir d’intervention des salariés, des retraités, des jeunes, des étudiants.
Le 12 septembre ne sera donc pas un baroud d’honneur ?
PHILIPPE MARTINEZ Dans l’esprit de la CGT, le 12, c’est une première étape. En général, dans les grands tours cyclistes, il y a plusieurs étapes
Salah Hamouri, Franco-Palestinien de 32 ans, arrêté la semaine dernière par la police israélienne à son domicile, a été placé, hier, en détention administrative pour 6 mois, donc jusqu’au 22 février 2018. Mardi, il avait été présenté devant un juge de la Cour de Jérusalem qui avait décidé tout d’abord de le placer en résidence surveillée à Al-Reineh pour 20 jours, sans qu’aucune des charges n’aient été révélées, contenues dans un « dossier secret ». Le magistrat lui interdisait également l’entrée à Jérusalem (dont la partie orientale est illégalement occupée et annexée par Israël depuis 1967) ainsi que toute sortie du pays (rappelons que les Palestiniens qui veulent sortir des Territoires doivent obligatoirement passer par Israël!) pendant 3 mois, jusqu’au 28 novembre 2017. En plus de cette décision, Salah Hamouri devait s’acquitter d’une caution de 10000 shekels (environ 2300 euros).
Voici un message d'Elsa Lefort, la compagne de Salah:
Le tribunal d’occupation réuni ce jour à Jérusalem a rendu sa décision. Non content de lui avoir volé sept années de sa liberté, de l’avoir harcelé une fois sorti de prison, de l’avoir séparé de sa famille, l’occupation s’acharne. Salah Hamouri est placé en détention administrative pour une durée initiale de 6 mois. Il rejoint les 450 autres détenus administratifs palestiniens dans les geôles de l’occupant. La détention administrative est utilisée par l’occupant pour tenterde briser la volonté de toutes les personnes qui s’opposent à lui, de façon totalement arbitraire, sans charge ni jugement. Plus que jamais, nous devons amplifier la mobilisation et interpeler les autorités françaises pour qu’elles obtiennent la libération de notre concitoyen. Mille mercis à toutes et tous pour votre soutien. Le combat continue.✊
De nombreux élus français, notamment des communistes, demandent à la France de réagir après l’arrestation de l’avocat franco-palestinien.
Depuis le 23 août, l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri a été arrêté sans motif officiel (voir l’Humanité d’hier). La détention de celui qui a déjà passé plusieurs années dans les prisons israéliennes (de 2005 à 2011) devait être prolongée jusqu’à aujourd’hui. Mais, en vertu d’une pratique dite du « dossier secret », Salah Hamouri pourrait potentiellement être emprisonné pendant six mois renouvelables sans que les accusations ne soient révélées. C’est pour éviter une telle situation kafkaïenne que des associations de défense des droits de l’homme et des élus politiques Verts, de la France insoumise ou du Nouveau Parti anticapitaliste se sont indignés.
Particulièrement en pointe dans la défense de Salah Hamouri lors de sa première détention, le Parti communiste français a interpellé hier le pouvoir français. Le PCF a dénoncé dans un communiqué une « violation des droits de la défense inacceptable ». « Cette détention arbitraire infligée à Salah Hamouri, dont les autorités israéliennes sont coutumières, est totalement illégale au regard du droit et des conventions sur les droits humains internationales », affirme le communiqué. « Le président Emmanuel Macron et le ministre Jean-Yves Le Drian, qui sont restés silencieux depuis l’arrestation de Salah Hamouri, ont le devoir d’intervenir fermement aujourd’hui auprès de leurs homologues israéliens pour que notre concitoyen soit immédiatement relâché sans condition », poursuit le texte, qui demande au gouvernement français d’« agir sans plus tergiverser ».
Le 24 août, le sénateur communiste Christian Favier a adressé une lettre au premier ministre français, Édouard Philippe. « Après avoir passé sept ans dans les prisons israéliennes, libéré en décembre 2011 de manière anticipée dans le cadre d’une libération de prisonniers palestiniens contre Gilad Shalit, limité dans ses déplacements, séparé de son épouse et de son jeune enfant, Salah Hamouri subit depuis des années l’acharnement répété des autorités israéliennes », écrit le président du conseil général du Val-de-Marne. Avant de demander au premier ministre « d’intervenir sans délai auprès des autorités israéliennes pour que notre compatriote soit libéré ».
La veille, le 23 août, la députée communiste des Hauts-de-Seine Elsa Faucillon se tournait, elle, vers le président français, Emmanuel Macron, fustigeant « la politique arbitraire du gouvernement israélien » à l’égard du « citoyen d’honneur de Gennevilliers ». « La France doit agir avec force et conviction pour faire respecter les droits de Salah Hamouri et exiger au plus vite sa libération », lançait-elle.
Aucune preuve n'est produite par l'accusation, les forces armées ou la police israéliennes sur un quelconque délit commis par notre compatriote. C'est d'un arbitraire absolu. La détention administrative est illégale et contraire au droit international et aux conventions sur les droits de l'homme dont Israël peut être signataire. Avocat de prisonniers politiques palestiniens, emprisonnés illégalement par Israël, Salah Hamouri est harcelé depuis des années par le gouvernement Netanyahu parce qu'il est un militant de la paix et des droits et libertés. Comme nous l'avons fait jusqu'à sa libération en 2012 avec des milliers de jeunes communistes et de militants de la paix et de la liberté, nous allons dès maintenant agir partout, tout le temps. Liberté pour Salah. Stop à l'impunité pour Israël!
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Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste.
Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale.
Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.