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3 août 2019 6 03 /08 /août /2019 09:39
Retrait des USA et de la Russie de l'INF :  Le PCF appelle à la mobilisation contre la mort du traité INF
Retrait des USA et de la Russie de l'INF :  Le PCF appelle à la mobilisation contre la mort du traité INF
 
A quelques jours des commémorations des monstrueux bombardements d'Hiroshima et Nagasaki par l'armée américaine, les 3 et 9 août 1945 et alors que la guerre était déjà perdue par le Japon et l'Allemagne,
Washington et Moscou viennent d'acter –en s'en accusant mutuellement – leur retrait du traité sur les forces nucléaires de portée intermédiaire (en anglais INF) signé en 1987.
C'est Donald Trump qui avait donné le la en février dernier, en annonçant la suspension de l'engagement américain au traité et en donnant un ultimatum à la Russie. Vladimir Poutine n'a plus eu qu'à lui emboîter le pas en rejetant son chantage : une musique bien réglée entre les dirigeants populistes etats unien et russe qui, dès lors, réouvrent franchement une ère de menace nucléaire pour le monde, à commencer par
l'Europe.
Car c'est en Europe que va se jouer cette aberrante escalade : l'OTAN sous l'impulsion des Etats-Unis et de ses plus fidèles alliés, et Russie ne vont pas manquer de déployer leurs missiles pour se placer réciproquement sous pression.
Mais il ne s'agit pas d'un jeu : la force destructrice des armes nucléaires est la promesse de la fin de la civilisation humaine et non de quelque prétendue victoire militaire. Il faut stopper cette dérive !
Le Parti communiste français appelle à la mobilisation générale pour la paix et le désarmement : ne laissons pas le sort de l'humanité aux mains de cyniques va-t'en guerre, de populistes irresponsables et de leurs
amis les marchands d'armes.
 
En juillet 2017, 122 pays ont adopté en Assemblée générale de l'ONU, un traité international d'interdiction des armes nucléaires (TIAN), c'est ce texte qui doit être mis en application, et les armements détruits. La
France dont les dirigeants ont dénigré le TIAN se doit de s'émanciper de la tutelle étatsunienne, de le signer et le ratifier sans plus tarder.
 
Citoyens, peuples du monde, peuvent imposer la voix de la paix : le 21 septembre, journée internationale de la paix, marchons très nombreuses et nombreux contre la mort du traité INF et pour l'adoption et la mise
en œuvre du traité international d'interdiction des armes nucléaires (TIAN). Levons-nous et marchons !
Le 26 septembre, journée internationale du désarmement nucléaire, le député communiste et secrétaire national du PCF Fabien Roussel, réunira en conférence à l'Assemblée nationale les actrices et acteurs d'un monde sans armes nucléaires et pour la paix.
 
Parti communiste français,
 
Paris, le 3 aout 2019.
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3 août 2019 6 03 /08 /août /2019 05:33

 

Convaincu que sa réélection se jouera sur la question migratoire, le président durcit ses politiques, en renvoyant le sort des exilés à ses voisins de l’Amérique centrale.

De la chasse aux sans-papiers dans les grandes villes aux infâmes centres de détention des migrants, Donald Trump cogne fort. Très fort. Dès la présidentielle de 2016, le candidat républicain avait fait du combat contre l’immigration l’un de ses engagements phares, en promettant à ses concitoyens la construction d’un mur sur les 3 200 kilomètres qui séparent les États-Unis du Mexique. Trois ans plus tard, après des mois de blocage au sein de la Chambre des représentants – où les démocrates sont majoritaires –, qui avait d’ailleurs conduit le président à décréter l’« urgence nationale », voilà que la Cour suprême est venue le conforter. Par 5 voix en faveur, contre 4, les juges ont autorisé vendredi le gouvernement à pomper 2,5 milliards de dollars au budget du Pentagone afin de muscler une parcelle de l’édification controversée. « Grande victoire sur le mur », a jubilé Donald Trump dans un tweet enflammé.

« Un mur n’arrange en rien notre système d’immigration, il renforce seulement notre politique délibérément cruelle et barbare de séparation des familles. Il nie le refuge à des innocents demandeurs d’asile », a, pour sa part, critiqué l’organisation Southern Poverty Law Center. De son côté, la puissante Union américaine pour les libertés civiles (Aclu) a décidé de faire appel de la décision afin de « rétablir le blocage permanent de la construction d’un mur frontalier qui utilise des fonds militaires non autorisés ».

Convaincu que son éventuelle réélection en 2020 se joue sur la question migratoire – 27 % des États-Uniens la considèrent comme prioritaire, selon une enquête Gallup –, le locataire de la Maison-Blanche cogne encore plus fort, en externalisant sa politique migratoire. Ce même vendredi, Washington a conclu un accord avec le Guatemala, faisant de la nation centre-américaine un « pays tiers sûr » pour les demandeurs d’asile aux États-Unis. À la mi-juillet déjà, l’administration a annoncé qu’elle nierait le droit d’asile aux migrants qui auraient transité par un pays tiers sans y faire une demande.

Les migrants fuient la misère et les violences du crime organisé

L’accord avec le Guatemala était jusqu’alors suspendu, en raison du veto de la Cour constitutionnelle guatémaltèque. Selon la convention de Genève sur le statut des réfugiés, un État peut refuser l’asile à un demandeur et renvoyer sa requête sur un pays tiers qui se doit, en retour, de respecter des critères très stricts : le non-renvoi du migrant dans son pays d’origine ; les droits à la sécurité sociale, au logement, à l’emploi, ainsi qu’à l’éducation ; le regroupement familial.

Le Guatemala forme avec le Salvador et le Honduras un triangle d’où sont majoritairement originaires les migrants qui frappent à la porte des États-Unis. Ils fuient l’insondable misère, les violences du crime organisé et des nombreux gangs qui pullulent dans la région. Au Guatemala, huit activistes sociaux ont été assassinés depuis le début de l’année. Les organisations des droits de l’homme de ce pays reprochent au président et ancien humoriste Jimmy Morales d’avoir signé un accord hallucinant, en l’absence de conditions d’accueil dignes de ce nom.

L’aide au développement détourné de son objet par les états-unis

L’empressement du chef de l’État, ultracontesté en raison de la corruption endémique, n’est pas étranger aux menaces proférées par Donald Trump. Il a accusé « le Guatemala d’envoyer des grands groupes de personnes, certaines avec des antécédents criminels, aux États-Unis ». « Désormais nous regardons du côté de la prohibition », a-t-il mis en garde. Pour forcer la main de son « partenaire », comme ce fut le cas aussi pour le Mexique, le maître du Bureau ovale souhaitait instaurer des taxes sur les exportations guatémaltèques en direction des États-Unis (qui s’élèvent à 3,9 milliards de dollars par an), ainsi que sur l’envoi d’argent des émigrés à leur famille. L’accord conclu offre de bien maigres consolations au Guatemala, qui ne bénéficiera que d’une augmentation des visas octroyés aux agriculteurs désireux de se rendre aux États-Unis.

Le budget consacré au développement de l’Amérique centrale pourra encore attendre. Il y a une semaine, l’administration états-unienne envisageait de transférer les fonds alloués à l’essor économique de la région aux différentes organisations de l’opposition au… Venezuela.

Cathy Dos Santos

 

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3 août 2019 6 03 /08 /août /2019 05:32

 

Depuis 2012, l’ONG Global Witness s’attelle à recenser les crimes commis à l’encontre des militants environnementaux. L’an dernier, 164 personnes ont été tuées à travers le monde.

Il s’appelait Julian Carrillo, et c’est sur son histoire que Global Witness, ONG internationale de défense des droits humains et environnementaux, ouvre son dernier rapport. Le 24 octobre 2018, le corps de ce militant mexicain, vif opposant aux exploitations minières qui phagocytent l’État du Chihuahua, a été retrouvé criblé de balles. C’est le sixième membre de sa famille à se faire assassiner dans des circonstances similaires en deux ans, le quatorzième à l’être au Mexique en un an, son nom s’ajoute donc à un macabre inventaire. À son instar, rapporte Global Witness, 163 activistes environnementaux ont été tués en 2018 à travers le monde pour avoir défendu leurs terres, leur eau, leurs forêts et plus généralement leurs droits. Selon l’ONG, 40 meurtres au moins impliquent des forces de sécurité étatiques. En moyenne, l’an dernier, « plus de trois personnes ont été assassinées chaque semaine », résume l’organisation qui, depuis 2012, s’attelle à opérer le décompte des harcèlements et homicides dont sont victimes les militants écologistes.

Les Philippines, où on dénombre au minimum 30 personnes assassinées, sont le pays qui détient désormais le record des exactions meurtrières. Des exécutions pour moitié liées au développement de l’agrobusiness, et généralement perpétuées par de véritables milices – au service d’industriels – sur lesquelles les autorités ferment les yeux, quand elles ne leur prêtent pas main-forte.

Les populations indigènes payent le plus lourd tribut

Si l’archipel asiatique détrône pour la première fois le Brésil en la matière, la situation n’y est pas nouvelle pour autant, pas plus qu’elle n’est exceptionnelle dans le monde. Plus de la moitié des meurtres constatés en 2018 l’ont été en Amérique latine, qui, depuis que l’ONG a commencé à publier ses rapports, s’est constamment rangée en tête des régions les plus affectées par ce type d’exactions, entre autres du fait d’une « forte tradition de militantisme pour les droits humains ».

Globalement, le secteur de l’agriculture industrielle arrive en deuxième position de ceux auxquels le plus de crimes sont associés (21 morts en 2018), juste après celui de l’extraction minière (43 morts). L’eau, enfin, se hisse de façon fracassante au rang des ressources pour lesquelles on tue le plus. Global Witness constate « une escalade des meurtres de défenseurs liés à sa protection ». De 4 en 2017, leur nombre est ainsi passé à 17 en 2018.

Côté victimes, ce sont les populations indigènes qui payent le plus lourd tribut, suivies de près par les petits paysans. Encore tous ces chiffres ne reflètent-ils qu’une part de la vérité. « Le bilan réel est probablement bien plus élevé, dans la mesure où beaucoup de cas ne peuvent être recensés » et que les enquêtes, localement, sont rarement menées jusqu’au bout.

Enfin, si le nombre global de meurtres identifiés en 2018 s’affiche moindre qu’en 2017 – on comptabilisait alors 207 morts –, cela ne doit pas laisser croire à une tendance durable. En juillet 2019, « les signes sont préoccupants et indiquent que la situation empire pour l’environnement et ses défenseurs », prévient l’ONG. La hausse du nombre de dirigeants populistes contribue à juguler toute velléité de protestation et, avec elle, l’usage plein et entier des droits.

Pour la première fois, Global Witness s’est ainsi attachée à recenser la criminalisation étatique de leurs actions. « Les conséquences sociales et politiques sont généralement désastreuses. » C’est le cas au Brésil, où le nouveau président, Jair Bolsonaro, a promis d’ouvrir les réserves indigènes à l’agro-industrie et à l’extraction minière.

Marie-Noëlle Bertrand

 

Les démocraties occidentales criminalisent les militants

On s’y fait nettement moins tuer, mais tout n’y est pas rose : les démocraties occidentales aussi se font épingler par Global Witness. Pour la première fois, l’ONG accorde un large chapitre aux cas de criminalisation d’activistes environnementaux. Et d’en siter plusieurs exemples. Aux États-Unis, Red Fawn Fallis, représentante indigène et opposante au Dakota Access Pipeline, a été condamnée à 57 mois de prison, accusée d’avoir brandi un revolver alors qu’elle était plaquée au sol par les forces publiques. Plus proches de nous, en Grande-Bretagne, trois militants anti-gaz de schiste se sont vu condamner à 15 et 16 mois de prison après avoir manifesté aux abords d’un site dirigé par la firme Cuadrilla… dont le Financial Times a rapporté qu’elle aurait dépensé plus de 253 millions de dollars pour obtenir le droit de produire commercialement du gaz de schiste au Royaume-Uni.

 

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3 août 2019 6 03 /08 /août /2019 05:20

 

Alors que la rencontre des sept chefs d’État se concluait, Oxfam France alertait, hier, quant aux reculs enregistrés à Biarritz. Rien de concluant pour la lutte contre les inégalités. Entretien.

Engagée dans la lutte contre les inégalités, Oxfam France a fait le choix d’avoir un pied au G7 pour y porter son plaidoyer, un pied dans le contre-G7 pour y joindre sa voix. Hier, à l’heure où le sommet était en passe de se conclure, l’ONG de développement manifestait son désarroi concernant ce qu’il en sortira.

 

À l’ouverture du G7, Oxfam affichait son scepticisme quant à ce que l’on pouvait en attendre. Qu’en est-il à l’heure de la clôture ?

ROBIN GUITTARD Nous sommes définitivement déçus. Vu l’agenda ambitieux que le président Macron s’était fixé, nous pouvions espérer quelques actes en matière de lutte contre les inégalités. Mais rien ne sortira de Biarritz sur cette question. Pire : tout indique que le logiciel à travers lequel nos chefs d’État voient le monde ne change pas. Vendredi, par exemple, des multinationales ont promis de se mobiliser contre les inégalités. Or, laisser les grandes entreprises s’autoréguler, c’est laisser faire le système qui a généré les crises dans lesquelles nous nous trouvons. Ce que nous demandons, ce n’est pas la charité, ni des contributions volontaires de la part des multinationales. C’est que soient mises en place des règles contraignantes pour que les plus riches paient leur part.

 

Des règles de justice fiscale, par exemple ?

ROBIN GUITTARD Oui. Voilà des mois que nous défendons le principe de nouvelles règles internationales de taxation minimale des entreprises, pour que celles-ci paient leurs impôts là où elles réalisent leurs bénéfices. C’est une mesure essentielle de lutte contre les paradis fiscaux et les inégalités qu’ils génèrent. L’évasion fiscale coûte près de 180 milliards de dollars aux pays en voie de développement. Pourtant, ce sujet n’a pas vraiment été à l’agenda du G7. L’approche des problèmes y a été morcelée et débouche sur des déclarations sans cohérence. C’est d’autant plus dommageable que, ces dernières années, le G7 avait su prendre quelques initiatives contre la pauvreté. Celui de Biarritz, celui du président Macron, marque, lui, l’abandon des questions de développement international.

 

Le soutien aux pays d’Afrique était cependant au cœur de ce G7…

ROBIN GUITTARD Les annonces faites, ­dimanche, lors d’un point commun entre la chancelière Merkel, le président Macron et le président Kaboré, du Burkina Faso, qui préside le G5 Sahel, témoignent précisément de ce renoncement. Toutes ces bonnes intentions affichées se concluent par un partenariat qui n’implique au final que la France et l’Allemagne et porte uniquement sur les questions militaires.

Or, l’enjeu du développement est particulièrement emblématique au Sahel. Les inégalités sont à la base de toutes les crises que la région traverse. Elles y génèrent un sentiment d’injustice sociale extrêmement fort, lequel provoque à son tour des tensions extrêmes. Nous attendions du G7 qu’il soutienne les politiques sociales des pays du Sahel, aujourd’hui pressurées par l’augmentation incessante de leurs budgets militaires. Les sept puissances auraient pu créer un fonds dédié au développement de l’éducation, de la santé, de la protection sociale… À l’inverse, ils ont choisi d’alimenter le cercle vicieux de la militarisation.

 

Le G7 avait aussi promis d’être féministe. Qu’en reste-t-il ?

ROBIN GUITTARD Il semble que le mieux que l’on obtiendra à ce sujet sera la présentation d’une liste de bonnes pratiques des pays du G7 sur les questions de genre, et une invitation faite aux pays africains d’adopter une de ces mesures dans les prochains mois ou prochaines années. Peu de chance que le droit des femmes s’en trouve bouleversé à partir de demain…

 

Y a-t-il encore quelque chose à attendre de ce type de sommet ?

ROBIN GUITTARD Nous assumons pleinement notre choix de continuer à porter des recommandations au niveau du G7. Mais nous tenons aussi à faire entendre notre voix à travers les contre-G7, comme il vient de s’en tenir un. Ce sont eux, les laboratoires permettant d’inventer de nouvelles options pour une société plus humaine. C’est là que les idées se créent.

 

Entretien réalisé par Marie-Noëlle Bertrand

 

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30 juillet 2019 2 30 /07 /juillet /2019 05:19
Immigration: le drame de l'année au large des côtes libyennes ( L'Humanité, Emilien Urbach, 29 juillet 2019)
Immigration. Le drame de l’année au large des côtes libyennes
Lundi, 29 Juillet, 2019

150 exilés sont morts jeudi en mer. SOS Méditerranée sera sur zone dans quelques jours, pour reprendre ses opérations de sauvetage.

 

Trois navires chargés de plusieurs centaines d’exilés africains auraient quitté les côtes libyennes jeudi, lorsque l’un d’entre eux a commencé à sombrer. À son bord, près de 300 personnes. 145 d’entre elles, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), ont été secourues, avant d’être reconduites vers l’enfer libyen où on estime que 5 200 personnes se trouvent dans des centres de rétention inhumains, gérés par des factions armées. Entre 110 et 150 personnes, selon les sources, auraient rejoint les profondeurs. Ce nouveau naufrage devrait porter à 600 le funeste décompte de personnes ayant péri en mer depuis le mois de janvier. « La pire tragédie en Méditerranée cette année vient de se produire, a annoncé le haut-commissaire de l’ONU pour les réfugiés (HCR), Filippo Grandi, sur les réseaux sociaux. La reprise des opérations de sauvetage en mer, la fin de la détention des réfugiés et des migrants en Libye, la multiplication des voies de sortie sûres hors de la Libye sont nécessaires maintenant. »

Ce drame intervient deux jours seulement avant que le nouveau navire de SOS Méditerranée, l’Océan Viking, ait passé le détroit de Gibraltar, samedi matin, pour rejoindre l’axe migratoire le plus mortel au monde, au large de la Libye. « Le bateau devrait être sur la zone de sauvetage dès les premiers jours d’août », a annoncé vendredi soir Jean-Pierre Lacan, administrateur de l’ONG, lors d’une soirée organisée avec les électriciens et gaziers de la Ccas, dans l’Hérault. « Ce navire est votre navire, a-t-il martelé. Un navire citoyen. »

Face à la xénophobie du gouvernement italien et à l’hypocrisie des autres dirigeants européens, les navires des ONG ont de plus en plus de mal à intervenir en Méditerranée centrale. « Si les tendances actuelles se maintiennent, nous risquons de voir plus d’un millier de personnes perdre la vie sur la Méditerranée pour la sixième année consécutive, ce qui est une sombre perspective pour nous », a pour sa part ajouté le porte-parole du HCR, Charlie Yaxley.

Ses appels comme ceux de l’OIM ne parviennent pas à infléchir la logique criminelle dans laquelle se sont engagés, depuis plusieurs années, les États membres de l’Union européenne.

Émilien Urbach
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29 juillet 2019 1 29 /07 /juillet /2019 05:54

 

Trump est égotiste, raciste, mais il n’est pas fou. Le culte de la personnalité qu’il suscite, sa stratégie d'omniprésence médiatique, sa brutalité, sont typiques des régimes autoritaires, estime Ruth Ben-Ghiat, professeure d’histoire à la New York University, spécialiste du fascisme.

New York (États-Unis), de notre correspondant.– « Go back. » Donald Trump a choqué de nombreux Américains avec une série de tweets contre quatre congresswomen, toutes des femmes de couleur de nationalité américaine. Ces élues de la gauche du parti démocrate, Trump les a enjointes à « rentrer » dans « les endroits totalement en faillite et infestés de crimes d’où elles viennent ».

Mercredi 17 juillet, en meeting en Caroline du Nord, Trump a laissé ses supporteurs chanter « Renvoyez-la » à destination de la représentante Ilhan Omar, élue au Congrès et d'origine somalienne. Pour Ruth Ben-Ghiat, spécialiste du fascisme et professeure à la New York University, il s'agit bien d'une « escalade notable » vers un régime de plus en plus autoritaire, qui emprunte des éléments au fascisme. Donald Trump a d'ailleurs récidivé en s'en prenant à l'élu noir de Baltimore (Maryland) Elijah Cummings, président de la Commission de la justice à la Chambre des représentants.

 

En 1989, Donald Trump achète une page de publicité dans le New York Times pour réclamer la condamnation à mort de cinq jeunes hommes noirs après une agression à Central Park. Ils seront plus tard innocentés.

 

Après le « Renvoyez-la » chanté par ses partisans à l’attention d’Ilhan Omar, Donald Trump a fait mine de s’excuser. Mais il ne s’agit pas de ses premiers propos racistes, loin de là. Quelle est la différence cette fois ?

Ruth Ben-Ghiat : C’est une escalade notable. Le racisme a toujours fait partie de l’ADN de Donald Trump, depuis des décennies, alors qu'il était homme d'affaires à New York [la mini-série Dans leur regard, diffusée actuellement sur Netflix, rappelle que Trump avait acheté en 1989 une page de publicité dans le New York Times pour exiger la condamnation à mort de cinq jeunes Noirs accusés, à tort, du meurtre d’une joggeuse à Central Park. Le New York Times rappelle aussi ses saillies racistes dans The Apprentice, la téléréalité qui l’a rendu célèbre – ndlr].

Mais en tant que président, il n'avait jamais désigné ainsi une personne de couleur par son nom. Tout en Ilhan Omar, Noire, ancienne réfugiée, musulmane, enrage les nationalistes blancs. Venant du président des États-Unis, il s'agit d'une immense menace, une menace physique, qui met en danger la sécurité d'une élue du Congrès. Trump cherche à faire d'Omar le symbole de tout ce que l'Amérique est censée détester.

Meeting de Trump à Greenville (Caroline du Nord), le 17 juillet. Il laisse la foule clamer « Renvoyez-là » à propos d'Ilhan Omar, représentante élue au Congrès, réfugiée née en Somalie, naturalisée américaine. © PBS

 

Ce régime est-il en train d'évoluer vers quelque chose qui n'est déjà plus une démocratie ?

Aux États-Unis, nous avons eu la ségrégation, les lois racistes dans le Sud. Mais nous n'avons pas été occupés par les nazis, nous n'avons pas eu de régime communiste, pas de coup d'État militaire. Notre idée d'un régime autoritaire, ce sont les Chemises noires de Mussolini, un coup d'État, etc.

Les Américains ont donc du mal à concevoir qu'un régime autoritaire peut en réalité s'installer peu à peu, même avec une apparence de démocratie, comme c'est par exemple le cas avec Orbán et Poutine. Mais il est indéniable que Trump emprunte au fascisme. Prenons par exemple son comportement pendant les meetings, sa relation à la foule, la façon dont il laisse son auditoire exprimer sa joie d'avoir un ennemi. Cette joie de la haine, autorisée par l'État, c'est extrêmement puissant. 

 

Faut-il donc parler de moment fasciste – c'est le mot qu'a utilisé Ilhan Omar en réponse à l'attaque présidentielle ? Ou bien « juste » d'une escalade raciste, une de plus ?

Les gens attendent souvent un signe magique où l'on pourrait dire, « ça y est, le fascisme est arrivé ». Mais cela ne se passe pas comme ça. Clairement, la façon dont il orchestre la foule lors de ses meetings, la désignation d'une cible, les tweets haineux, l'absence quasi totale de réaction au sein du parti républicain, tout cela marque une évolution, un durcissement, qui était d'ailleurs prévisible.

Trump a très tôt exigé la loyauté de ses supporteurs. Il a décidé de se constituer une base de loyalistes fanatiques. Il nourrit sa base plus qu'il ne cherche à l'étendre. Pour eux, il est un héros charismatique. Son ancienne porte-parole, Sarah Huckabee Sanders, a dit que Trump est président à la suite de l'intervention divine. Cette élévation au rang de quasi-divinité est absolument typique des régimes autoritaires. Par ailleurs, il a réussi, avec Fox News [et d’autres médias, comme la chaîne d’extrême droite OneAmerica – ndlr] à installer ce qui s'apparente à une machine de propagande étatique.

 

Avant de vous parler, j'ai échangé avec l'historien américain Robert Paxton, l'auteur de La France de Vichy, qui a forcé la France à voir la collaboration de Vichy avec les nazis. Comme vous, Paxton trouve que « certains aspects du style de Trump et de son langage ressemblent au fascisme ». Mais que d'autres, et non des moindres, s'en distinguent, comme « sa méfiance du pouvoir étatique et sa volonté de laisser les hommes d’affaires avoir ce qu’ils veulent ». Hitler ou Mussolini, dit-il, « forçaient les milieux patronaux à accepter la planification centralisée de l’économie, dans le but de réarmer et de mener une politique étrangère et coloniale agressive ». Paxton estime donc que le meilleur terme pour définir l'administration Trump est « oligarchie », davantage que fascisme.

Il y a bien sûr cet élément d'oligarchie. Trump est même le dirigeant d'une grande démocratie le plus corrompu depuis Berlusconi, à la tête d'un gouvernement constitué de millionnaires et de milliardaires qu'il a choisis. Avec la détention des migrants, l'existence de camps à la frontière, Trump précipite clairement les États-Unis vers une démocratie du XXIe siècle qui n'est plus libérale.

Là où je diffère un peu de Paxton, c'est qu'il s'intéresse moins à ce que les gens disent qu'à ce qu'ils font. Pourtant, à travers ses discours, Trump rend la violence plus acceptable. Il prépare les Américains à accepter de plus en plus de répression.

Beaucoup disent que Trump est fou, qu'il n'a pas de stratégie. Mais c'est toujours le cas des leaders autoritaires. On disait à l'époque la même chose de Hitler ou de Mussolini. Penser qu'il n'a pas de stratégie, que tout ce qu'il fait n'est que chaos, c'est à mon avis du déni. Comme tout leader autoritaire, Trump cherche à nous coloniser. À coloniser l'État, la société, les médias.

Trump est une brute. Les leaders autoritaires veulent que nous ayons peur d'eux. Trump veut nous intimider. Il utilise l'armée comme un outil politique [à la frontière ou bien avec son tout nouveau défilé militaire, inspiré du 14-Juillet français – ndlr]. Il cherche à humilier, à soumettre la société.

« Le réveil de la société civile reste possible »

 

Là encore, jusqu’où cette humiliation veut-elle aller ? S'agit-il juste d'un « ego trip » autoritaire, pour l'heure contenu par les institutions, ou de la manifestation, désordonnée mais bien réelle, d'un projet de société réactionnaire, nationaliste, destiné à restaurer la suprématie blanche ? Après tout, Trump est parfois entravé par les tribunaux, mais pas toujours, comme le prouve l'autorisation du « muslim ban » par la Cour suprême. La droite dure est organisée derrière lui. Trump a déjà nommé 125 juges, désignés à vie. Il est en train de changer pour longtemps le système judiciaire, souvent amené à approuver ou retoquer des décisions de l'administration.

Trump est très impulsif, narcissique, dans l'autoglorification permanente. Dans tout ce qu'il fait, il y a du chaos, comme chez tous les dirigeants autoritaires, Mobutu, Kadhafi ou Mussolini. Tous ces hommes ont fonctionné au chaos. Mais ils avaient aussi des principes, et ils ont mené des politiques. Et chez Trump, derrière les tweets, il y a une grande continuité. Il est très clair sur sa volonté d'établir un État nationaliste blanc, où l'on peut détenir et expulser les gens de couleur, les musulmans. Regardez aujourd'hui, ses politiques ont un impact sur la vie de millions de personnes.

J'admets bien volontiers qu'il soit difficile pour les Américains d'accepter l'idée que nous bougeons dans cette direction… Quand je parle de cela, du déclin de la démocratie libérale, d'un futur plus autoritaire, les Américains sont en général très énervés, ils ont du mal à le digérer, parce que c'est trop effrayant. L'Amérique, disent-ils, est le pays des hommes libres. Les gens de couleur, eux, sont sans doute moins étonnés, car la démocratie n'a pas été aussi égale pour eux. Trump force les Américains à regarder leur pays d'une nouvelle façon, leur propre histoire, et aussi leur présent.

Avec Fox News, la chaîne One America est un des nouveaux relais de propagande de Donald Trump. Sans aucune nuance.

 

À quoi faut-il s'attendre d'ici la présidentielle ? Et après novembre 2020, si d'aventure Donald Trump était réélu ?

Trump suggère qu'il pourrait rester à son poste malgré la défaite. Lorsque son ancien confident et avocat Michael Cohen dit que dans ce cas, « la transition du pouvoir ne sera pas pacifique », je le crois. Le nom de sa fille et conseillère, Ivanka, est déjà avancé pour une candidature en 2024. Ils ont besoin de créer une dynastie. Leur présidence est un système de corruption, qui sert à les enrichir. Et par ailleurs, Trump n'a aucune envie d'aller en prison.

 

Trump envisage d'ailleurs sérieusement d'organiser le sommet du G7 de l'an prochain dans un de ses golfs en Floride, à deux pas de sa résidence hivernale de Mar-a-Lago, dans le ghetto pour riches de Palm Beach

Trump fera tout, même lancer une guerre s'il le faut, pour rester à son poste. Il est guidé par son seul intérêt personnel.

 

Certains évoquent une évolution substantielle des institutions ou de la Constitution si Trump est réélu, sans parler de la Cour suprême qu'il pourrait alors définitivement ancrer très à droite. Il dit déjà, faussement, que la Constitution américaine lui permet de faire « tout ce qu’il veut »

Les dirigeants autoritaires disent toujours ce qu'ils vont faire. Ils lancent des ballons d'essai, ils disent des choses affreuses, ils attendent les réactions. Il a parlé d'emprisonner des journalistes, de lois contre la liberté d'expression, je pense qu'il se sentira en capacité de le faire s'il est réélu.

 

Vous écrivez actuellement un livre sur la fascination exercée par les « hommes forts ». Vous évoquez dans ce livre des personnages différents, dans des contextes différents, de Mussolini à Hitler, de Poutine à Erdogan et Trump. Au-delà des différences, vous soulignez des similarités, dans le rapport aux médias, les stratégies de répression, le culte de la personnalité, une masculinité exacerbée… À qui Trump vous fait-il penser ?

Berlusconi, pour la corruption. Et Mussolini. Sa première femme, Ivana, a dit qu'il avait sur sa table de chevet deux livres, son propre livre, The Art of the Deal, et les discours d’Hitler.

 

Comment les peuples peuvent-ils terrasser ces hommes forts ?

Ces gens sont leur pire ennemi. Beaucoup sont incompétents et cherchent à contrôler les médias pour le cacher. Ils n'écoutent personne, créent des bunkers où ils s'entourent de courtisans ou de proches. Cela finit parfois par précipiter leur fin. Ils veulent rembobiner l'histoire en arrière.

Actuellement, même dans des régimes autoritaires comme la Russie ou la Turquie, la société résiste. C'est absolument le cas aux États-Unis aussi, où les gens manifestent et s'organisent, même si cela est trop peu raconté par les médias. Avec des institutions démocratiques, le réveil de la société civile reste possible.

 

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29 juillet 2019 1 29 /07 /juillet /2019 05:51

La colonisation de la Cisjordanie par les autorités israéliennes s'accélère depuis la décision des États-unis de transférer leur ambassade à Jérusalem et d'encourager l'occupation israélienne des territoires palestiniens afin d'annihiler toute chance de paix juste et durable.

 

 

Benjamin Netanyahu s'est engouffré dans cette nouvelle violation de la légalité internationale et a ordonné la destruction de dix immeubles dans le quartier de Sour Baher à Jérusalem-Est, un territoire censé être sous le contrôle de l'Autorité palestinienne. 350 personnes sont chassées de leur maison dans le silence puisque les observateurs et les journalistes sont tenus à l'écart par d'importants dispositifs militaires. Refusant de délivrer des permis  de construire aux Palestiniens qui ne peuvent plus se loger, Israël organise leur éviction de leurs terres. Ces démolitions devraient au total concerner 100 bâtiments.

Les autorités françaises ont le devoir de s'élever contre ce nouvel acte de violence coloniale perpétré depuis ce matin à Sour Baher, et reprendre l'initiative pour mettre un coup d'arrêt à l'occupation.

D'autant que pendant que les familles palestiniennes sont mises à la rue, une délégation de parlementaires français parade à Jérusalem-Est à l'invitation d'une association d'extrême droite, Elad, engagée dans la colonisation israélienne de la ville. Ces parlementaires foulent aux pieds la position française et les résolutions internationales. C'est indigne !


Le PCF condamne ces violences et démolitions par l'armée israélienne, la colonisation illégale de la Cisjordanie et de Jérusalem Est, et les souffrances imposées aux populations gazaouies par le blocus de la Bande de Gaza.


Tandis que Washington dénie, en dépit de toutes les résolutions internationales, aux Palestiniens le droit de disposer de leur propre Etat, la France et les pays de l'Union européenne restent inertes. La France et l'UE ne doivent pas se laisser entraîner dans cet engrenage voué à l'échec.


C'est le parti d'une paix juste et durable qu'il faut faire entendre ; cela passe par la suspension de tout accord bilatéral avec Israël tant que les droits humains des Palestiniens seront bafoués, et cela passe par la reconnaissance officielle de l'État de Palestine par la France.

 

 

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27 juillet 2019 6 27 /07 /juillet /2019 07:19

 

Installés à Londres, où Boris Johnson s’apprête à devenir, aujourd’hui, premier ministre, les géants de la banque et de l’assurance ont mis toutes leurs capacités d’influence pour supprimer les règles au profit de la haute finance.

La City revient dans la course. Le célèbre centre financier de Londres avait été pris à contre-pied par le Brexit, qu’il avait combattu initialement, le considérant comme un empêcheur d’étendre son emprise sur une Europe où il a acquis une place prépondérante. Il s’inquiétait des conséquences de la perte du passeport qui lui permettait de vendre librement ses services financiers sur le grand marché européen. Mais la City s’est adaptée. Elle a même tiré parti de la situation, dans la plus grande discrétion. Au point de faire de ce Brexit non plus un handicap, mais une opportunité. Son secret : le déploiement d’un réseau d’influence de très gros calibre. Un rapport publié en juin par une association d’ONG spécialisées de longue date dans l’observation des lobbys en Europe et regroupées sous le sigle Enco (European Network of Corporate Observatories, Réseau européen des observatoires du très grand patronat) (1) révèle ses redoutables méthodes pour prendre la main sur l’après-Brexit et booster encore au passage une financiarisation qui lui est si favorable.

Tout d’abord, il faut bien cerner ce qu’est le nom du mastodonte basé à Londres. Il est loin de constituer une entité purement britannique. Les figures de proue des services financiers qui y sont regroupés appartiennent au monde global de la finance. Et, parmi eux, ceux qui ont acquis le poids le plus prépondérant viennent de l’autre côté de l’Atlantique. Ils s’appellent Goldman Sachs, Morgan Stanley ou BlackRock. Des acteurs européens comme l’allemand Deutsche Bank ou le français BNP Paribas figurent aussi dans l’organigramme de la « City of London Corporation », « l’organe de gouvernance » de la City, relèvent les enquêteurs du réseau Enco, mais ils sont loin d’y avoir la « place décisive » des champions de la finance états-unienne. Ce sont ces derniers qui y font la pluie et le beau temps.

La principale « avancée », la « coopération réglementaire »

L’engagement des lobbyistes de la City est monté en puissance après le référendum de 2016 qui a scellé le Brexit. Ils ont multiplié les interventions dans toutes les capitales, augmentant leurs dépenses ad hoc de quelque 175 %. Au chapitre des inflexions obtenues, les enquêteurs du réseau Enco relèvent singulièrement combien la France d’Emmanuel Macron a été réceptive à leurs « arguments » en baissant la fiscalité sur les plus grandes fortunes, les actionnaires et les entreprises. Sans que cet effort, qui fut parfois présenté comme le moyen d’attirer les traders vers la Place de Paris dans une course à la récupération du rôle de la City, n’ait jamais été vraiment suivi de transferts massifs des activités financières des rives de la Tamise vers celles de la Seine. Autrement dit : si les géants de la finance ont profité à plein des nouvelles réglementations françaises, ils restent persuadés que Londres, en prise avec Wall Street, saura continuer de leur offrir les meilleures garanties.

La principale « avancée » obtenue par les lobbyistes de la City pour gérer la période post-Brexit au mieux de leurs intérêts porte un nom : la « coopération réglementaire ». Derrière le vocable un peu aride se cache la recherche de moyens destinés à rendre compatibles, voire à harmoniser des normes en vigueur dans les différents marchés et systèmes financiers. Les géants de la City possèdent un outil très performant pour imposer le type de régulation qui leur soit le plus profitable : l’International Regulatory Strategy Group (IRSG ou Groupe international de stratégie régulatrice).

Omniprésents parmi les « conseillers » du gouvernement de Londres mais aussi de Paris, Berlin et d’autres capitales européennes, les représentants de l’IRSG ont réussi à se tailler une place de choix auprès de Michel Barnier, le commissaire européen chargé pour l’UE de la négociation du Brexit. Dans leurs investigations, les ONG observatrices de l’action des lobbys ont comptabilisé « pas moins de 67 rencontres entre l’équipe du négociateur français » et des organismes « d’experts » directement issus du monde de la City. Soit, soulignent-ils, « plus encore que les meetings consacrés par les mêmes aux ministres et officiels du Royaume Uni ».

La coopération réglementaire offre un avantage considérable pour façonner les futures relations entre les marchés et les grandes places financières de la planète. Elle garantit là encore la discrétion, cette seconde nature cultivée par la City. Intervenant a posteriori du tumulte médiatique autour des futures relations, politiques et commerciales entre le Royaume-Uni et ses anciens partenaires européens, elle pourra permettre de prendre des décisions mûries dans le secret d’un monde de spécialistes opportunément dépêchés par les géants de la finance.

Les enquêteurs de l’ONG Enco tirent la sonnette d’alarme

La méthode de la coopération réglementaire offre de plus l’avantage non négligeable qu’elle semble être frappée au coin du bon sens. N’est-il pas souhaitable de gérer au mieux les divergences apparues entre différentes zones ? D’autant que le Royaume-Uni et l’UE étaient autrefois membres d’une même entité. Le problème, c’est que, pilotée de fait par la finance, la recherche de deals réglementaires « pragmatiques » risque de s’apparenter à un massacre des garde-fous et autres protections des consommateurs, mis en place ici et là pour essayer de tirer enseignement des dérives qui ont conduit au krach de 2007-2008.

Les enquêteurs d’Enco tirent la sonnette d’alarme. Ils soulignent combien une certaine coopération réglementaire, instaurée au milieu de la décennie 2000, a contribué à l’effondrement financier de l’époque. Ils pointent les circonstances de la descente aux enfers de l’assureur états-unien AIG (American International Group), qui avait pu accumuler des produits à haute teneur spéculative baptisés « credit default swaps » (CDS, contrats d’échange sur défaillance de crédit). Ce qui a conduit à la seconde plus grosse faillite de l’époque après celle de Lehman Brothers. Signe particulier, relèvent les auteurs de l’enquête d’Enco, un deal dit de « reconnaissance mutuelle » passé au nom de la coopération réglementaire avait permis à l’assureur de se saisir des « normes » financières les plus « permissives ». Au prix du gonflement de monstrueuses bulles spéculatives.

Parmi les outils que les lobbyistes voudraient accrocher à la coopération réglementaire post-Brexit figure une extension du recours potentiel à des tribunaux d’arbitrage privés pour « régler » des litiges opposant un des géants de la finance à l’UE ou à un État. On irait ainsi plus loin que dans l’accord de libre-échange entre l’UE et le Canada (Ceta), qui exclut encore les services financiers de la possibilité de se pourvoir en justice contre la puissance publique.

Les recommandations des lobbyistes de la City peuvent cadrer parfaitement avec les choix du très faussement hétérodoxe Boris Johnson, champion hors catégorie dans l’usage de la démagogie et de la xénophobie durant la campagne du référendum qui a conduit au Brexit. Quant à Donald Trump, qui le soutient bruyamment, ne présente-t-il pas lui aussi de grands avantages, aux yeux des financiers londoniens ? N’a-t-il pas contribué à créer une dynamique sur les marchés quand il a liquidé aux États-Unis les modestes tentatives de régulation, comme la loi Dodd-Frank, instaurée à la suite du krach de 2007-2008... La convergence des deux chefs d’État désireux d’entraîner le monde vers un tournant national-libéral ne fait assurément plus peur à la City.

(1) Ont coopéré à cette enquête au sein d’Enco les ONG : Observatoire des multinationales, Spinwatch, Corporate Europe Observatory (CEO) et Lobby Control. Elle est disponible en intégralité à l’adresse Internet suivante : https://multinationales.org/IMG/pdf/brexit.pdf

Bruno Odent

 

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26 juillet 2019 5 26 /07 /juillet /2019 05:17
Droits humains. Colombie, rouge du sang des acteurs sociaux
Jeudi, 25 Juillet, 2019

Depuis les accords de paix de 2016, on compte 482 assassinats politiques. Des ONG parlent de 700 victimes. Journée de mobilisation, le 26 juillet.

 

Ces cris d’effroi ont noué les tripes. On y entend la peur, le désespoir et la tristesse d’un garçon de 9 ans qui vient d’assister à l’assassinat de sa mère. Ce matin du 21 juin, Maria del Pilar Hurtado Montano s’apprête à quitter le domicile familial situé dans la municipalité de Tierralta, dans le sud du département de Cordoba. Deux sicaires à moto se plantent alors devant elle. Après deux détonations, la femme de 34 ans s’écroule à terre. Le gamin, lui, explose de douleur. La vidéo où on le voit gémir a fait l’effet d’un uppercut. Le crime a été qualifié d’« odieux » par Ivan Duque, le chef de l’État de droite extrême, tandis que des membres de son gouvernement cherchaient à en réduire la portée politique. Aussitôt, le mouvement Défendons la paix a appelé à la tenue de marches « pour la vie », le 26 juillet (1).

la toute-puissance des paramilitaires

L’homicide de Maria del Pilar a profondément choqué ses voisins qui connaissaient bien cette mère de famille de quatre enfants. Elle était arrivée sur ces terres du nord-ouest du pays, il y a quatre ans, fuyant le département du Cauca où l’on enregistre encore aujourd’hui le taux le plus effrayant de meurtres politiques, en dépit de la signature des accords de paix, en 2016, entre l’ancienne guérilla des Farc-EP et l’État présidé alors par Juan Manuel Santos. À Tierralta, elle s’était impliquée dans la récupération de terres afin d’y faire construire des habitations pour les trop nombreux déshérités de cette région. Elle n’était pas syndicaliste, ni militante d’un parti politique ; c’était une leader communautaire, comme l’on dit en Colombie. Son engagement lui avait valu des menaces de mort de la part des Autodefensas Gaitanistas de Colombie, connues également comme Clan du golfe, un groupe armé qui tient la ville entre ses mains et contrôle jusqu’au moindre détail de la vie de ses 100 000 habitants. Ces paramilitaires, comme les autres qui sévissent ailleurs, vivent du commerce de la drogue et des trafics en tout genre, du racket de la population… Dans cette zone où les forces publiques ne maîtrisent rien, les « paracos » font la pluie et le beau temps au détriment des droits les plus élémentaires.

Depuis la mort de Maria del Pilar, Défendons la paix dénonce les décès de dix autres responsables sociaux – politiques, syndicalistes, paysans, Indiens, environnementalistes, défenseurs des droits humains –, du fait de leurs activités. « Les assassinats de ces dix leaders sociaux constituent dix raisons supplémentaires pour sortir dans les rues et les places publiques (…) pour la vie de ceux qui défendent la vie et la paix dans les territoires », déclare cette ONG. Les voyants sont au noir. Entre janvier 2016 et mai 2019, la Defensoria del Pueblo – une institution gouvernementale chargée de la protection des droits civils – a recensé 482 assassinats. Pas moins de 982 leaders sociaux ont été la cible de menaces entre avril 2018 et avril 2019. L’ONG Indepaz estime, quant à elle, que les victimes s’élèvent à plus de 700. « La persistance des violences armées est étroitement liée à la stigmatisation et aux discours de haine contre une vraie paix, sans impunité et comportant des alternatives aux modèles violents d’accumulation de richesses. Elle est également liée à la lenteur des réponses de l’État dans les territoires directement visés par des groupes armés irréguliers, là où les Farc-EP détenaient une grande influence et où l’appareil militaire a cessé d’être présent en raison de la démobilisation. Dans ces territoires, beaucoup de groupes d’intérêts ont renforcé leurs actions pour défendre leur position et des avantages dans une réorganisation des dynamiques d’accumulation des richesses et de la reproduction du pouvoir », analyse Camilo Gonzalez Posso, le directeur d’Indepaz, dans un document rendu public le 10 juillet, à l’occasion de la visite d’une délégation onusienne chargée de vérifier la mise en œuvre des accords de paix.

Derrière la guerre des chiffres, la guerre sale...

Depuis, les membres du Conseil de sécurité des Nations unies ont fait part de « leur sérieuse préoccupation quant aux assassinats persistants de leaders sociaux et communautaires, ainsi que des ex-membres des Farc-EP », qui s’élèvent désormais à plus de 140, leurs anciens responsables désormais reconvertis à la vie politique parlant même d’un plan d’extermination. Au terme des rencontres sur le terrain, la délégation a certes reconnu « les efforts du gouvernement pour aborder ce problème », avec la mise en place d’un « plan de protection » de ces acteurs, mais elle insiste sur « la nécessité que les mesures se traduisent par des résultats concrets pour prévenir les attaques et traduire les responsables en justice ».

Dans un récent entretien accordé à El Espectador, le président Ivan Duque faisait, lui, valoir un bilan positif de son programme, revendiquant une réduction de 30 % des assassinats des acteurs sociaux durant les six premiers mois de l’année. Il s’agit là d’un « mirage », a rétorqué sèchement Human Rights Watch. L’ONG rappelle que les autorités ne comptabilisent pas l’ensemble des cas d’homicides politiques tant qu’ils font l’objet d’une enquête des Nations unies. Une guerre des chiffres pour ne pas évoquer la guerre sale et ses raisons.

(1) Des rassemblements sont également prévus en France : à Paris, parvis du Trocadéro, à 18 h 30, ainsi qu’à Lyon, place Bellecour, à la même heure.
Cathy Dos Santos
Droits humains. Colombie, rouge du sang des acteurs sociaux - Cathy Dos Santos, jeudi 25 juillet - L'Humanité
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25 juillet 2019 4 25 /07 /juillet /2019 13:25
En Irlande du Nord, l’inquiétude accompagne le tracé de la future frontière européenne (Audrey Parmentier, Médiapart, 24 juillet 2019)
En Irlande du Nord, l’inquiétude accompagne le tracé de la future frontière européenne
Par Audrey Parmentier

En cas de Brexit, leur destin au sein de l’Union européenne prendra fin et ces villes resteront à seulement quelques mètres de la forteresse bruxelloise. Un coup dur pour les frontaliers. Balade nord-irlandaise à Newry, Belcoo et Strabane. 

Newry, Belcoo et Strabane (Irlande du Nord), envoyée spéciale.–  « Je veux mourir européen. Voilà ce que j’ai répondu à ma femme lorsqu’elle m’a demandé pourquoi je voulais un passeport irlandais. » Donal O’Donnell est un ancien journaliste nord-irlandais. Il sillonne le marché de Newry, petite ville de 27 000 habitants à cheval sur la frontière avec l’Eire. Lorsqu’il évoque le Brexit, le regard du petit homme chauve s’allume. « C’est un véritable bordel au Parlement, je n’ai jamais vu ça ! »

Donal O’Donnell raconte avoir couvert les remous de la politique nord-irlandaise « pendant plus de 30 ans ». À cette époque, le conflit – les Troubles (1968-1998) – entache la province britannique. Durant cette guerre civile, les protestants unionistes attachés à la couronne britannique étaient opposés aux nationalistes républicains en faveur d’une réunification des deux Irlandes. « Les Anglais penseront toujours qu’ils sont au sommet de tout le monde. Ils se sentent même au-dessus des Français », s’exclame Donal O’Donnell avant de trancher : « Aujourd’hui, il faut combattre le nationalisme anglais. »

Le journaliste à la retraite critique vivement le Parti unioniste nord-irlandais (DUP). Cette formation très conservatrice s’est positionnée il y a maintenant trois ans en faveur d’une sortie de l’Union européenne (UE). Devenu un allié du gouvernement minoritaire, le DUP est la clé de voûte des négociations sur le Brexit. Lors des trois votes sur l’accord négocié par la première ministre britannique Theresa May, le parti unioniste s’est distingué par son refus du backstop – filet de sécurité qui permettrait à l’Irlande du Nord de rester dans le marché unique européen en cas de Brexit.

 

« Le DUP ne prend pas en compte le souhait des Nord-Irlandais. La population a voté pour rester dans l’Union européenne », déplore Donal O’Donnell. Mais le DUP est le seul parti nord-irlandais à se faire entendre à Westminster. De l’autre côté de l’échiquier politique, l’historique Sinn Fein, nationaliste et républicain, favorable à la réunification des deux Irlandes, refuse de siéger au Parlement. « Il n’y a personne pour se lever et défendre notre cause », proteste l’ex-reporter avant de s’arrêter devant l’un des maraîchers. « Vous ne pourrez pas parler à un homme plus raisonnable », s’arrête-t-il en pointant du doigt John Bradley.

Cet ancien professeur des écoles, sexagénaire, tient depuis une vingtaine d’années un stand d’antiquaire au marché de Newry. Anciennes revues, médaillons et bibelots sont disposés sur une table en bois dépliée devant lui. « Je pense que l’Union européenne devrait dire au DUP de dégager », fustige John Bradley, qui quitte son stand quelques instants pour exprimer ses craintes : « Le retour d’une frontière dure serait un pas en arrière. J’ai peur de ce qu’il peut se passer en cas de Brexit. » Et il n’est pas le seul.

Financée par l’Union européenne, l’organisation Action Mental Health suit de près les avancées du Brexit. Situé à quelques mètres du marché, cet organisme accompagne les personnes atteintes de troubles mentaux. Dirigé par Brian Huge, le centre accueille actuellement 145 personnes. « La moitié de nos financements provient de l’Union européenne », déclare le directeur. En cas de Brexit, l’organisation perdra ces fonds européens. « Cependant, le gouvernement britannique a promis de débloquer de l’argent d’ici 2020-2022 », rassure Brian Huge. Mais cela n’empêche pas les patients du centre d’être très inquiets, à l’instar de Dell Rogers : « Où allons-nous aller si le centre vient à fermer ? »

À une dizaine de kilomètres de Newry, les pêcheurs de moules de Warrenpoint, deuxième port de l’Irlande du Nord, voyagent eux aussi en eaux troubles. Hank Waverton, un marin hollandais, fume une cigarette à l’entrée d’un pub. « Ici, il n’y a que des pêcheurs de moules. Mais la plupart des compagnies sont irlandaises ou hollandaises. Je crois que 95 % des revenus de la pêche sont reversés aux entreprises hollandaises », explique-t-il en regardant le port.

Hank Waverton témoigne des changements apportés par le Brexit. « Depuis quelque temps, la frontière est plus surveillée. Il y a deux mois, un bateau de Kilkeel, premier port d’Irlande du Nord, a été attrapé par la marine irlandaise », raconte le Hollandais. Les contrôles à répétition des deux côtés de la frontière font fuir les pêcheurs irlandais, « qui ne se rendent plus en Irlande du Nord ». Hank Waverton prend pour exemple ce qui est arrivé à l’un de ses amis : « Il avait amarré son bateau au port alors qu’il n’était pas référencé. Ça lui a coûté plus de 15 000 euros ! » Il marque une pause pour jeter son mégot : « Malheureusement, personne ne sait où se trouve la frontière. »

À l’instar des pêcheurs, les agriculteurs seront en première ligne en cas de Brexit dur. John Sheridan en est conscient. Ce fermier nord-irlandais habite à Belcoo, un petit village frontalier niché dans le comté de Fermanagh, au nord-ouest de Newry. Ce comté nord-irlandais dépend économiquement du tourisme et de l’agriculture. Depuis trois ans, cet éleveur de moutons avoue avoir gelé tout investissement pour faire face à l’incertitude liée au Brexit.

« On ne mord pas la main qui nous a nourris »

« Pour vendre de la viande, nous avons besoin d’une vingtaine de marchés pour une seule carcasse. Et ces vingt marchés n’existent pas au Royaume-Uni », se plaint John Sheridan. Il estime qu’en cas de no deal « ses moutons pourraient être taxés à 75 % ». Au volant de sa Jeep, cet éleveur de moutons roule sur les sentiers escarpés. « On traverse la frontière au niveau du pont entre Belcoo et Blacklion, en République d’Irlande. Quand j’étais enfant, les forces britanniques étaient postées au niveau de la frontière », raconte le fermier de 56 ans, sans quitter la route des yeux. Né au début des années 1960, John Sheridan a connu les Troubles, dont il garde un souvenir impérissable. « Dès qu’on voyait une boîte en carton sur la route, on se demandait s’il s’agissait d’un colis piégé », se remérore le fermier protestant.

En 1998, l’accord du Vendredi saint met fin à une guerre qui aura marqué l’Irlande du Nord pendant trente ans. « C’est un accord fantastique, très rare et unique. J’espère qu’il va continuer à nous protéger », confie John Sheridan, qui remercie l’Union européenne pour avoir facilité le processus de paix. « Bruxelles a injecté plus de 7 milliards de livres entre 2007 et 2020. C’est en partie grâce à Michel Barnier – à l’époque ministre délégué aux affaires européennes – si tout cet argent a été débloqué. On ne mord pas la main qui nous a nourris. » L’éleveur confie que sa ferme a été financée par l’Union européenne. « Je me considère comme un bébé européen », dit-il en souriant.

Un peu plus loin, il y a la bourgade de Ballyshannon, de l’autre côté de la frontière, en République d’Irlande. C’est là que vit Patrick Rooney, éleveur de moutons et de vaches laitières. « Je ne suis pas d’accord avec tout ce que l’UE a fait mais je pense que Bruxelles a coopéré correctement avec l’Irlande », estime-t-il. Le fermier irlandais craint l’arrivée sur le marché britannique des bœufs sud-américains. « Ce sont des produits inférieurs aux nôtres et dotés d’une moins bonne traçabilité », maugrée-t-il.

« En Irlande, nous avons des produits uniques et si le Royaume-Uni impose des tarifs à hauteur de 15 à 30 %, alors cela devrait détruire l’agriculture irlandaise », prédit Patrick Rooney, qui se revendique comme « européen mais irlandais dans le sang ». Lui aussi traverse régulièrement la frontière. Pour l’éleveur, son contrôle total serait impossible sans fermer les routes secondaires. « Nous allons devenir le seul pays européen qui partage une frontière terrestre avec le Royaume-Uni », continue-t-il.

Une frontière qui pourrait de nouveau séparer les villes de Strabane et Lifford. La première est nord-irlandaise et la seconde appartient à la République d’Irlande. Aujourd’hui, les voitures circulent librement entre les deux villages frontaliers. Certaines se garent au supermarché Asda implanté à Strabane. L’enseigne accueille 40 % d’Irlandais parmi sa clientèle. « S’il venait à y avoir une frontière européenne, ça nous affecterait directement, car les clients auront besoin de leur passeport pour venir faire leurs courses », explique l’une des gérantes du magasin, qui tient à rester anonyme.

Si une frontière européenne venait entraver les échanges entre Lifford et Strabane, le supermarché s’en trouverait affaibli. En effet, une partie des produits vendus dans le magasin viennent de l’Union européenne. Le retour à une frontière dure inquiète un certain nombre de commerçants à Strabane. Cette ville de 18 000 habitants est la deuxième du comté de Tyrone, après la cité d’Omagh. À Strabane, les rues du centre-ville sont bordées d’affiches électorales à l’effigie du Sinn Fein.

Le centre-ville se concentre autour de deux ou trois rues principales. Dans l’une d’elles, à l’entrée d’un magasin d’électroménager, un vendeur éclate de rire quand on lui parle du Brexit : « Ça n’arrivera pas, c’est impossible ! » Il part à la recherche du propriétaire de l’échoppe, Conor Devan. La trentaine passée, le directeur raconte l’impact du retour d’une frontière dure. « On livre beaucoup d’électroménager de l’autre côté. Avec le Brexit, on risque de connaître des difficultés en termes d’assurances. »

Mais comment se préparer au pire ? C’est la question à laquelle ne peut pas répondre Conor Doherty, le fils d’une fleuriste, à quelques pas du magasin d’électroménager. « C’est dur de se préparer car il y a trop d’incertitudes, du moins jusqu’à ce qu’une décision soit prise », explique le jeune Nord-Irlandais de 24 ans. Il reprend : « Le débat à Westminster est une vaste blague. Personne ne sait ce qu’il veut », poursuit-il.

À l’instar de Conor Devan, le fils de la fleuriste craint pour le commerce de sa mère, dont une partie se trouve en Irlande. « Nous livrons des bouquets dans le comté de Donegal [dans le nord de la République d’Irlande – ndlr] et une grande partie de nos fleurs viennent des Pays-Bas », explique le jeune homme. Il réajuste ses lunettes et reprend : « Déjà qu’on lutte contre les supermarchés qui proposent des fleurs à des prix très bas, alors le Brexit ne risque pas d’arranger les choses. »

Comme beaucoup de villages frontaliers, la ville de Strabane a voté massivement pour rester dans l’UE. Le 30 mars dernier, une centaine de personnes ont marché jusqu’à la frontière pour protester contre le Brexit. Conor Doherty aurait aimé faire partie du cortège « mais [il avait] un empêchement ». Né après les Troubles, le jeune homme avoue vouloir vivre dans l’unité. « J’ai grandi après la guerre civile et cela a affecté ma vision des choses, dit-il. Dans ma tête, je suis irlandais. Et davantage européen que britannique. »

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