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6 juillet 2019 6 06 /07 /juillet /2019 06:09
Les dangers du traité de libre-échange Mercosur - par Patrick Le Hyaric
 
Les dangers du traité de libre-échange Mercosur

Qu’est-ce que l’accord avec le Mercosur ?

L’accord avec le Mercosur est un grand accord commercial avec les géants agricoles d’Amérique du sud regroupés dans un bloc commercial qui rassemble le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay.

Il crée une vaste zone commerciale de libre-échange Union-européenne – Mercosur qui englobera 800 millions de personnes. Dans cette zone 93% des produits sud-américains pourront rentrer sur le territoire européen sans restriction ni droits de douane et 91% de produits européens pourront le faire dans l’autre sens. Il permettra aussi un accès facilité aux marchés publics sud-américains et services tels que les télécommunications et les transports.

Pour les exportateurs européens de services ou de produits industriels comme l’automobile, les machines-outils ou la chimie, c’est considéré comme une bonne nouvelle, car ce sont à terme 4 milliards d’euros de droit de douanes en moins, c’est aussi autant de perdu pour les États sud-américains et la contrepartie demandée par le Mercosur est lourde de conséquences.

En quoi cet accord est dangereux ?

En échange de l’ouverture des marchés sud-américains sur les services et produits industriels, le Mercosur obtient des concessions significatives sur l’agriculture. Les restrictions dont nous disposions pour protéger nos filiales d’élevages de bœufs notamment, de poulets et de porcs volent en éclat. C’est toute l’agriculture européenne, notamment les petites exploitations, qui sont menacées de fermeture face à la concurrence des géants sud-américains. C’est la consécration d’un modèle productiviste avec des fermes-usines géantes pourtant responsables d’une misère sociale terrible au Brésil – qu’on pense au mouvement des paysans sans-terre -, et qui va accélérer la déforestation de l’Amazonie pour produire toujours plus pour le marché européen.

Par cet accord, les dirigeants européens pourtant en partance décident de transférer une partie de notre souveraineté alimentaire au Mercosur. C’est tourner définitivement le dos au modèle de l’agriculture paysanne en le soumettant à une concurrence sud-américaine imbattable.

Il confirme une tendance entamée avec l’accord avec le Canada et le Japon : celui de la segmentation de notre agriculture. Nous aurons d’un côté une agriculture à haute valeur ajoutée avec des appellations européennes protégées (comme le Roquefort, le jambon de Parme, la Feta…) exportées plus facilement au Mercosur ; et de l’autre côté une agriculture de produits de base, les céréales, les viandes que nous sous-traitons aux géants agricoles en échanges de l’ouverture de leurs marchés.

La Commission a beau jeu d’annoncer que 351 appellations européennes seront légalement protégées dans les pays du Mercosur, mais pour tous les petits éleveurs français qui font des viandes de qualité sans être couverts par ces appellations c’est la fin face aux géants sud-américains, comme le groupe brésilien JBS, premier producteur de viandes au monde.

Au final on peut résumer cet accord à des voitures allemandes contre du bœuf brésilien élevé sur des pâturages conquis sur la forêt amazonienne.

Peut-on croire à la « vigilance » de Macron ?

Non car les concessions sur l’agriculture ont déjà été faites sur le bœuf il y un an lorsque le gouvernement français n’a pas bloqué l’offre de la Commission d’un quota de 99 000 tonnes de bœuf sud-américain sans droits de douane. Les producteurs agricoles du Mercosur sont déjà très bien structurés pour l’export, donc ils pourront très rapidement occuper les marchés obtenus et les inonder. Face à cela, les mécanismes européens de protection sont beaucoup trop lents, et les petits producteurs européens déjà trop fragilisés par la libéralisation des marchés agricoles. C’est leur mort assurée.

Pareil pour l’environnement, le Président Macron et la Commission peuvent clamer autant qu’ils le veulent que les parties signataires s’engagent à respecter les accords de Paris, les chapitres « développement durable » des accords de commerce de la Commission ne contiennent aucune obligation légale environnementale, contrairement aux parties commerciales. Enfin qu’attendre de son interlocuteur brésilien, Jair Bolsonaro élu avec le soutien de l’agro-business et dont les premiers actes au pouvoir ont été de défaire les protections environnementales et de faciliter la déforestation de l’Amazonie ?

Cet accord est-il anti-démocratique ?

Il l’est des deux côtés de l’Atlantique. Côté européen les négociations ont été faites sur la base d’un mandat de négociation datant de 1999 ! Depuis ces 20 années à aucun moment la Commission n’a cherché à actualiser son mandat auprès des gouvernements européens ou auprès du Parlement européen.

Côté sud-américain l’aboutissement des négociations est le fait de deux hommes. Jair Bolsonaro est arrivé au pouvoir au Brésil après un coup d’État judiciaire qui a mis Lula en prison avec le soutien des lobbys évangélistes et des gros producteurs agricoles. Mauricio Macri, le président argentin, va surement perdre les élections face à Christina Fernandez Kirchner et se hâte de signer cet accord avant de quitter le pouvoir.

Cet accord doit encore être validé par le Parlement européen et l’Assemblée nationale. Pour notre agriculture, pour la lutte contre la déforestation en Amazonie, pour la qualité alimentaire, pour le respect de la démocratie en Amérique du Sud comme en Europe, nous devons l’arrêter.

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5 juillet 2019 5 05 /07 /juillet /2019 05:56
Jérusalem, quartier arabe du vieux Jérusalem auprès de la porte de Damas grignoté par les colons israéliens - ici maison dite "de Sharon" (photo mission AFPS, 2015)

Jérusalem, quartier arabe du vieux Jérusalem auprès de la porte de Damas grignoté par les colons israéliens - ici maison dite "de Sharon" (photo mission AFPS, 2015)

Inauguration de la place Jérusalem à Paris: Indignation et solidarité avec le peuple palestinien

 

Intervention de Pascal Torre pour le Parti communiste français

Seule le prononcé fait foi

Comme l'a souligné Pierre Laurent, sénateur de Paris et président du Conseil national du PCF, l'inauguration d'une place Jérusalem à Paris aurait pu être une belle idée si elle ne faisait pas abstraction du contexte, si elle permettait d'éclairer le sort des populations brisées par des décennies de violence et si elle frayait un chemin vers la paix. Malheureusement, les choix effectués par la maire de Paris, Mme Anne Hidalgo, ont délibérément tourné le dos à ces exigences.

Cette inauguration, qui résulte d'une demande du président du Consistoire des communautés juives a été conçue dans la perspective exclusive de conforter les liens qui unissent Paris avec l'État d'Israël. Il en a résulté une immédiate instrumentalisation politique puisque Joël Mergui s'est empressé de déclarer que Jérusalem est la "capitale d'Israël" en violation du droit international et de la position de la France. Or, Jérusalem est une ville importante pour toutes les confessions. L'invitation du maire de Jérusalem, notoirement connu pour ses positions extrémistes, et le fait que les autres religions n'aient pas été associées ont conforté ce choix partisan de Mme Hidalgo.

Cette inauguration a éludé la situation de Jérusalem, ville dont la partie orientale a été annexée et dont l'environnement fait l'objet d'une colonisation illégale, méthodique et implacable depuis 1967. Jérusalem n'est pas uniquement une ville israélienne. Les Palestiniens sont victimes d'une violence inouïe, subissent une politique de terreur et d'apartheid sur leur propre terre. La souffrance des populations de Gaza en témoigne quotidiennement. Cela Mme Hidalgo ne l'ignore pas.

Cette inauguration se déroule également dans un contexte international délétère. Benyamin Netanyahou et Donald Trump ont décidé conjointement de mettre un terme à toute idée de création d'un État palestinien. La reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l'État hébreu, la remise en cause du statut des réfugiés, l'aval donné à l'annexion du Golan et de la Cisjordanie constituent une accélération d'une politique qui entend humilier et marginaliser les Palestiniens jusqu'à leur capitulation. Lors de la conférence de Manama à Bahreïn, Jared Kushner en écho aux revendications de l'extrême droite israélienne a piétiné la légalité internationale. Cela Mme Hidalgo ne l'ignore pas.

Cette inauguration aura été perçue dans ses objectifs et dans sa forme comme une caution à la politique d'Israël. Pas un mot n'a été prononcé contre la colonisation, la souffrance des populations et l'exigence d'un État palestinien. Il ne faut donc pas s'étonner de la polémique qui n'a pas cessé d'enfler. Le droit de chaque État à vivre en paix et en sécurité, la nécessité de combattre de toutes nos forces un antisémitisme croissant constituent des exigences légitimes. Cependant ces objectifs ne pourront être atteints qu'en faisant prévaloir la justice, le respect du droit afin de bâtir une paix juste et durable. Cette décision qui divise, qui transpose sur notre territoire ce conflit, exacerbe les tensions.

Le Parti communiste français (PCF) entend poursuivre et amplifier sa solidarité avec le peuple palestinien alors que les manoeuvres américaines, confortées par certains États arabes et encouragées par Israël, voudraient à jamais anéantir leurs droits inaliénables.

Pascal Torre

Inauguration de la place Jérusalem à Paris: Indignation et solidarité avec le peuple palestinien - Pascal Torre, Pierre Laurent, élus communistes de Paris

Non à la confiscation de Jérusalem!

 

Sur proposition de la Maire de Paris, Mme Anne Hidalgo, le Conseil de Paris a voté le 12 juin la création d’une place de Jérusalem.

Cela aurait pu être une bonne idée, pour éclairer la population sur la situation de cette ville martyre, fracturée, divisée, puis annexée; pour rappeler la nécessité absolue de mettre fin à la violation du droit international et du droit humanitaire que constitue l’annexion de Jérusalem par Israël, et pour condamner sans ambiguïté le fait accompli et la loi du plus fort.

Une bonne idée aussi s’il s’était agi d’en faire un symbole de paix, en rappelant que cette ville, que les Israéliens ont conquise par la force et qu’ils considèrent comme leur capitale, est aussi la capitale revendiquée par les Palestiniens, et un symbole particulièrement fort de leur identité nationale. Et, sur le plan religieux, en donnant toute leur place aux trois religions monothéistes pour lesquelles Jérusalem est une ville sainte.

Anne Hidalgo a choisi une autre voie, celle de céder aux réseaux d’influence pro-israéliens, en localisant cette place à côté du futur centre européen du judaïsme, et en invitant à l’inauguration le maire de Jérusalem, le maire d’une ville illégalement annexée à Israël, et l’artisan des plans d’urbanisme qui développent les colonies israéliennes et expulsent les habitants palestiniens de Jérusalem de leurs maisons.

Cette démarche est particulièrement mal venue dans le contexte de la décision étasunienne de reconnaissance de Jérusalem comme capitale d'Israël et semble ainsi se situer en continuité. Comme cela a été rappelé en décembre 2017 par de nombreux États dont la France, le droit international ne reconnaît aucune souveraineté sur Jérusalem en l’absence d’accord entre les parties, et l’annexion de Jérusalem Est par Israël a été explicitement condamnée par l’ONU.

Nous refusons cette logique d’exclusion promue par Mme Anne Hidalgo dans la droite ligne de la politique israélienne d’apartheid consacrée par le vote de la loi de l’État-nation du peuple juif en juillet 2018. Nous demandons que la place de Jérusalem soit déplacée dans un lieu qui respecte pleinement la diversité culturelle et religieuse de Jérusalem, et que soit clairement marqué le projet d’en faire le symbole de la nécessaire reconnaissance du droit et de la recherche d’une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens.

Nous appelons tous les habitants d’Île-de-France à se rassembler le dimanche 30 juin à 15h Place du maréchal Juin, pour protester contre la démarche scandaleuse de la maire de Paris, et porter l’exigence de la justice et du respect du droit international.

Le Collectif national pour une Paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens dont est membre le PCF.

a dénomination d’une place Jérusalem doit être annulée !

Lors du conseil de Paris de juin dernier, a été soumise au vote des conseillers une délibération concernant la dénomination d’une place Jérusalem, en remplacement d’une rue ayant disparue.

Dans l’exposé des motifs aucune mention des objectifs de la Ville d’utiliser celle-ci dans le but de commémorer l’amitié qui unit la ville de Paris à l’État d’Israël comme l’écrit Mme Hidalgo dans cette même lettre.

Aux inquiétudes de nos groupes, a été répondu qu’en aucun cas cette dénomination ne serait utilisée à des fins « geo-politiques » comme Catherine Vieu-Charier l’a d’ailleurs souligné dans sa réponse au conseil, nous étions simplement dans la tradition parisienne de donner des noms de villes à nos rues. Nous avons émis des réserves, et nous nous sommes abstenus forts de ces assurances données.

Las, deux jours à peine après le conseil nous découvrons par un tweet de Joël Mergui, président du Consistoire central israélite de France, qu’en réalité, cette dénomination fait suite à une demande directe qu’il aurait faite à Anne Hidalgo lors de la visite du président israélien Reuven Rivlin à l’Hôtel de Ville.

Ce qui nous a étonnés c’est l’inauguration expresse de cette place et l’invitation du maire de Jérusalem connu pour ses prises de position et ses actions en faveur de la colonisation. Nous sommes choqués de voir qu’aucun des représentants des trois communautés religieuses creuset de Jérusalem n’y sont invités, et encore plus de l’absence de représentant de l’autorité palestinienne.

L’ensemble de ces faits, mis bout à bout, semble légitimer une confiscation de Jérusalem par l’État d’Israël alors que nous aurions pu en faire un symbole de la paix entre les peuples et les différentes communautés.

Pour toutes ces raisons, nous demandons à Mme Hidalgo de renoncer à cette inauguration vécue comme une provocation et qui ne respecte pas les positions prises par la diplomatie française sur le statut de Jérusalem.

Pour cela nos organisations seront présentes au rassemblement prévu par le « collectif national pour une paix juste et durable » pour protester de cette décision le jour même de l’inauguration, si celle-ci n’est pas annulée.

Communiqué des élus communistes de Paris, 25 juin 2019

[Sénat-Paris- Affaires étrangères]
L’inauguration d’une « Place de Jérusalem » en plein Paris aurait pu être une belle idée, l’occasion d’adresser un message de paix et une exigence de respect du droit international, au moment où l’une et l’autre sont gravement bafoués par les décisions conjuguées du gouvernement Nethanyaou et de l’administration Trump.
Le gouvernement Nethanyaou accélère chaque jour la colonisation de Jérusalem-est, foulant au pied les résolutions de l’ONU et tous les droits des Palestiniens, faisant de leur vie quotidienne un calvaire , enfreignant chaque jour le statu quo régissant la cohabitation des trois religions juive, chrétienne et musulmane dont le Consulat de France est le garant international. Et l’administration Trump appuie cette annexion pure et simple en déplaçant son ambassade à Jérusalem, en dépit d’une très large condamnation internationale, dont celle de la France.
Mais force est de constater que l’inauguration de cette place a pris un sens contraire aux messages qu’elle aurait dû permettre d’envoyer depuis Paris. Conçue à la demande du consistoire des communautés juives de Paris, n’associant à aucun moment ni la Mission de Palestine, ni les responsables des autres religions, n’invitant que le maire israélien, ardent défenseur de la colonisation, elle est présentée comme un acte de solidarité avec l’État d’Israël, au moment où son gouvernement nie tout autant la souveraineté partagée sur la ville que son caractère multiconfessionnel.
Loin de rassembler, cette inauguration va diviser Il est encore temps de revenir sur cette décision. Paris doit rester une ville qui porte haut et fort dans le monde le message d’une paix plus nécessaire que jamais, une paix que pourrait si magnifiquement symboliser une Jérusalem devenue capitale partagée de deux Etats.

Pierre Laurent
sénateur de Paris
vice président de la commission des affaires étrangères

Inauguration de la place Jérusalem à Paris: Indignation et solidarité avec le peuple palestinien - Pascal Torre, Pierre Laurent, élus communistes de Paris
Inauguration de la place Jérusalem à Paris: Indignation et solidarité avec le peuple palestinien - Pascal Torre, Pierre Laurent, élus communistes de Paris
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5 juillet 2019 5 05 /07 /juillet /2019 05:20
Les parlementaires communistes avec le député Jean-Paul Le Coq, les sénatrices et sénateurs Laurence Cohen, Pierre Laurent, Christine Prunaud avec Hadja Idrissa BAH notamment (source: page Facebook de Christine Prunaud)

Les parlementaires communistes avec le député Jean-Paul Le Coq, les sénatrices et sénateurs Laurence Cohen, Pierre Laurent, Christine Prunaud avec Hadja Idrissa BAH notamment (source: page Facebook de Christine Prunaud)

Christine Prunaud, sénatrice communiste des Côtes d'Armor et Hadja Idrissa BAH (source: page Facebook de Christine Prunaud)

Christine Prunaud, sénatrice communiste des Côtes d'Armor et Hadja Idrissa BAH (source: page Facebook de Christine Prunaud)

Pierre Laurent, sénateur communiste de Paris, avec Hadja Idrissa BAH (source: page Facebook de Christine Prunaud)

Pierre Laurent, sénateur communiste de Paris, avec Hadja Idrissa BAH (source: page Facebook de Christine Prunaud)

Au Sénat, le 25 et 26 juin
Rencontre avec Hadja Idrissa BAH,
Présidente du Parlement des enfants et des jeunes filles leader de Guinée.
A l’initiative de mes collègues Laurence Cohen et Pierre Laurent une belle rencontre avec cette jeune ambassadrice, activiste du combat en Guinée contre l’excision, le mariage forcé et le viol.
Agée seulement de 19 ans, Hadja nous a exposé avec une conviction rare son engagement contre les violences faites aux femmes et en faveur de l’égalité homme/femme : en Guinée 97 % des filles sont excisées et 52% sont mariées avant leurs 18 ans.
Selon Hadja : « les filles ne sont rien devant les hommes justement parce qu’elles sont des filles ». Et de continuer « il n’y aura pas de parité, tant que la femme est réduite à une minorité ».
La Guinée s’est dotée de loi contre ces violences « mais le problème, c’est leur application » ! Tout en évoquant « le poids des traditions ou des religions qui enferment », elle nous a affirmé que « le meilleur était à venir ».
Je salue le courage et la maturité de Hadja qui démontre une fois de plus que les violences sexuelles sont partout.
Notre combat féministe est universel, ensemble faisons reculer les inégalités basées sur le genre.
Sénateurs Communistes Républicains Citoyens et Écologistes
PCF - monde

(source: page Facebook de Christine Prunaud)

Hadja Idrissa Bah « Les fausses croyances religieuses pèsent plus que la loi  »
Jeudi, 27 Juin, 2019 - L'Humanité

Guinée. Fondatrice du Club des jeunes filles leaders de Guinée, Hadja Idrissa Bah, 19 ans, est dans son pays une figure de la lutte contre les mutilations génitales et le mariage des enfants. Entretien.

 

Comment expliquer qu’en Guinée 97 % des femmes sont victimes d’excision ?

Hadja Idrissa Bah La population est à plus de 90 % musulmane et elle continue d’utiliser ce contexte pour justifier la pratique des mutilations génitales. Or, ce n’est en rien une obligation religieuse. Ceux qui la pratiquent pensent qu’il faut maintenir les coutumes africaines. De plus, l’excision est une forme de commerce.

Un commerce ?

Hadja Idrissa Bah Aujourd’hui, on organise des cérémonies au cours desquelles on donne de l’argent aux exciseuses pour qu’elles déclarent devant les médias qu’elles vont « lâcher le couteau ». Mais la somme ainsi gagnée est épuisée en trois jours et elles reprennent leur activité. Il faut donc privilégier des actions de longue durée, former ces femmes pour qu’elles aient des activités génératrices de revenu, comme cela s’est fait avec succès au Sénégal. La deuxième question à se poser est celle des parents. Ils vendent notre corps. Lorsqu’on ampute notre corps – et je veux prononcer ce mot-là –, lorsqu’on enlève une partie intime de nous, les parents s’attendent à ce que les marraines et parrains offrent des habits et cadeaux. Il faudrait sensibiliser, informer davantage les parents.

Quels sont les autres atteintes aux droits des femmes ?

Hadja Idrissa Bah 51 % des jeunes filles sont mariées avant l’âge de 18 ans. Des filles de 13, 12 ans sont données à un époux. Certaines grandes filles également, parce que, dans notre communauté, on pense qu’une fille non mariée ne peut participer à toutes les cérémonies. Elle n’est pas considérée comme une grande personne et est mise de côté. Les ONG et le gouvernement s’inquiètent également des viols sur des mineurs, contre des jeunes filles, parfois des bébés, par les parents, les proches, les voisins et des enseignants. Enfin, on observe une déscolarisation des jeunes filles. Lorsqu’elles se marient, elles sont obligées d’arrêter leurs études pour s’occuper du foyer.

L’État est-il volontariste pour faire appliquer les lois contre l’excision et le mariage précoce ?

Hadja Idrissa Bah Il est engagé tant au niveau national qu’international. Ainsi, la Guinée est le quatorzième pays à avoir signé la convention mondiale sur les droits des enfants. Notre Code pénal, notre Code civil et notre Code des enfants abordent tous la protection des jeunes filles contre les mutilations génitales féminines, le mariage des enfants et le viol des mineurs. Mais les traditions, les coutumes et les fausses croyances religieuses pèsent plus que la loi.

C’est donc une bataille culturelle que vous menez avec le Club des jeunes filles leaders que vous avez fondé ?

Hadja Idrissa Bah Nous tentons de faire en sorte que les lois soient appliquées. Nous vulgarisons celles-ci, pour qu’elles ne soient pas gardées dans des tiroirs. À tous les niveaux, on sensibilise les jeunes filles, les leaders religieux, communautaires et politiques et suscitons des actions répressives avec la police pour empêcher le mariage des enfants.

Quels types d’action menez-vous ?

Hadja Idrissa Bah La loi est avec nous. Une fille qui va être mariée ou un membre de sa famille peut nous appeler en numéro masqué. On donne alors rendez-vous à la fille ; on échange avec elle, on lui redonne confiance et on l’emmène. On joue en quelque sorte à une prise d’otage. On la place en sécurité et, avec la police, on va chez ses parents. On le fait parfois dans ma voiture, car les policiers n’ont pas de carburant. On leur dit : « Vous voulez donner votre fille en mariage, mais savez-vous que la loi l’interdit ? » Certains l’ignorent, d’autres disent qu’ils ont toujours donné leurs enfants en mariage. On leur explique quelles sont les amendes et peines de prison encourues. Quand ils reviennent sur leur décision, ils prennent l’engagement de ne pas faire de mal à la fille, de faire qu’elle reste intégrée socialement, qu’elle poursuive des études si elle en faisait, ou qu’elle puisse se former à un métier.

Si on nous prévient du mariage, le jour J, on arrête le mariage avec les camions de police, les médias, alors même que les gens sont en train de danser. On récupère alors la fille dans sa belle robe de cérémonie. Ce type d’action est sensible, car toute la famille est regroupée.

Y a-t-il une prise de conscience chez les hommes ?

Hadja Idrissa Bah Des jeunes garçons féministes nous accompagnent et nous soutiennent. Nos passages dans les écoles, dans les endroits où il n’y a pas que des filles, nous permettent de faire passer notre message, et certains sont émus. On leur dit : « Nous sommes appelées à être vos futures femmes, nous sommes vos sœurs, nous sommes vos mères. Vous ne pouvez rester les bras croisés pendant que vos mamans sont battues, que vos sœurs de lait sont mariées à un monsieur qu’elles ne connaissent pas. » Alors, certes, nous avons des hommes qui, sur les réseaux sociaux, disent qu’il faut conserver la tradition africaine. Ils sont bêtes. S’ils ont un smartphone, c’est qu’on n’est plus au XVIIIe siècle. Si on voyage en avion, on a accès aux technologies, c’est qu’on n’en est pas resté aux traditions. On est au XXIe siècle et la jeunesse en a marre.

Entretien réalisé par Gaël De Santis
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4 juillet 2019 4 04 /07 /juillet /2019 06:27

Merci à Yves Jardin (AFPS pays de Douarnenez) pour la traduction et la transmission de cet article.

http://maki.org.il/en/?p=18953

Le Hadash et les partis arabes s’unissent à nouveau pour les prochaines élections générales
PCI / il y a 6 jours
 
Le Hadash (Le Front Démocratique pour la Paix et l’Egalité - Parti Communiste d’Israël) (1) et trois partis politiques représentant la minorité nationale arabo-palestinienne d’Israël, Ta’al (2), Ra’am (3) et Balad (4), ont annoncé qu’ils s’uniront à nouveau pour les prochaines élections à la Knesset
Hadash MK Ayman Odeh and Secretary General of the
            Communist Party of Israel, Adel Amer, during a meeting in
            Haifa

Le député du Hadash, Ayman Odeh, et le Secrétaire Général du Parti Communiste d’Israël,  Adel Amer, pendant un meeting à Haïfa (Enregistrement: page Facebook du Hadash)

Les quatre partis s’étaient unis une première fois en 2015 dans la campagne pour la  20ème Knesset, à la suite de la décision législative adoptée à l’initiative de l’extrême-droite pour relever le seuil électoral pour entrer à la Knesset (5) à 3,25% (un minimum de 4 sièges), qui était de façon précise dirigé contre la représentation des arabes à la Knesset, en formant la Liste Unie qui avait obtenu 13 sièges dans le parlement de 120 membres en devenant le troisième groupe politique.

Après leur prestation décevante aux élections d'avril, où les quatre partis, faisant campagne en deux blocs, ont obtenu 10 sièges au total, le mouvement actuel d’unification, comme en 2015, est destiné à  amplifier la participation électorale et à améliorer la représentation de la minorité arabe et des forces progressistes juives au parlement d’Israël. Le pays se dirige vers ses deuxièmes élections générales cette année, le 17 septembre, après que le premier ministre d’extrême-droite, Benjamin Netanyahu, ait échoué à former une coalition de gouvernement majoritaire à la suite du scrutin d’avril.

Le député du Hadash, Ayman Odeh, l’éventuel chef du groupe, a déclaré jeudi, 20 juin, que cela avait été une erreur de faire campagne de façon séparée. Odeh a dit après l’annonce de la décision: «nos forces sont unifiées, nous avons des passés semblables, des vues semblables pour notre avenir, et, à partir d’aujourd’hui, une liste commune. Nous nous battrons pour les droits des Arabes dans ce pays, pour la paix, et pour la démocratie pour tous les citoyens d’Israël. » Le quotidien communiste Al Ittihad a rapporté qu’un forum commun se réunira dans les jours prochains pour décider de la constitution finale de la liste.

Les partis ont déclaré qu’une liste commune n’était pas moins importante aujourd’hui qu’elle ne l’était en 2015, compte tenu particulièrement de l’adoption l’an dernier  de « la  Loi raciste, coloniale de l’Etat-nation (6) et de ses conséquences, les politiques discriminatoires, le siège (de Gaza), la confiscation des terres dont les Arabes sont propriétaires, la pénurie de logements disponibles dans la communauté arabe, la volonté  des pouvoirs établis de vider de tout son sens notre citoyenneté et de notre volonté de combattre la criminalité et la violence croissantes dans nos communautés.» 

Le communiqué publié conjointement par les quatre partis a déclaré que les résultats des dernières élections – dans lesquelles ils ont perdu trois sièges – constituaient un « coup rude pour le travail politique » dans la communauté arabe. A ce titre, il était essentiel d’en tirer des conclusions et d’en retenir les enseignements.

Le communiqué a ajouté: «à cette fin, il y a de nouveaux défis au niveau diplomatique, particulièrement à la suite des démarches de l’administration des EU  de mettre en oeuvre l’«Affaire du Siècle » en reconnaissant Jérusalem comme la capitale d’Israël et en y transférant l’Ambassade des EU, en reconnaissant l’annexion des Hauteurs du Golan, à la suite des attaques  contre l’UNRWA (l’organisation des NU pour les réfugiés palestiniens, dont le budget a été coupé par les EU); et à la suite des inquiétantes «conversations régionales » qui ont lieu, telle que la prochaine conférence  qui doit se tenir à Manama, la capitale de Bahreïn.”

(traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT de l’AFPS sur les prisonniers palestiniens) 
 
(1) Le Hadash (= nouveau en hébreu), créé en 1977, réunit diverses organisations de gauche  dont la plus importante est le Parti Communiste d’Israël, parti israélien binational, qui conserve son statut indépendant; le Hadash avait cinq sièges dans la Knesset élue en 2015);
 
(2) Ta'al (acronyme en hébreu pour le Mouvement arabe pour le renouveau), parti nationaliste arabe fondé en 1996; aux élections de janvier 2009, juste à la fin de la première attaque israélienne contre Gaza, l’alliance Ta’al- Ra’am fut interdite de se présenter aux élections.
 
(3) Ra’am  (acronyme en hébreu pour la Liste arabe unie), parti créé en 1996, par l’union du Parti démocratique arabe et des éléments de la branche Sud du Mouvement islamique et du Front d’unité nationale.
 
(4) Balad (acronyme en hébreu pour la Ligue démocratique nationale), parti nationaliste arabe créé en 1995, progressiste et démocratique; comprend aussi des militants juifs. 
 
(5) Knesset (= assemblée): parlement monocaméral de l’Etat d’israël, siégeant à Jérusalem; il compte 120 députés, élus à la proportionnelle avec un seuil électoral de 2 %, porté en 2014 à 3,25 %, pour une durée de 4 ans; mais sur 20 Knesset élus, 13 ont été dissoutes et les élections anticipées sont fréquentes en Israël.
 
(6) Le 19 juillet 2018, a été adoptée une loi fondamentale à valeur constitutionnelle (Israël n’a pas de constitution écrite), faisant d’Israël l’«Etat-nation du peuple juif »; cette loi officialise et aggrave un régime d’apartheid, qui existait  déjà de fait en Israël.  
 
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2 juillet 2019 2 02 /07 /juillet /2019 09:33
Italie. Solidarité pour la « capitaine Courage »
Lundi, 1 Juillet, 2019

Carola Rackete, aux commandes du Sea-Watch 3, a été interpellée en Sicile, après quinze jours d’errance forcée en mer, avec 42 migrants à bord de son bateau.

 

«Dévoué, le marin accepte l’incertitude du lendemain, est prêt à affronter le danger et à agir par tous temps et en tous lieux, quelles que soient les circonstances. » Ces mots sont inscrits en première page du Livret des valeurs de la marine française. La capitaine Carola Rackete, aux commandes du navire humanitaire Sea-Watch 3, n’a fait qu’obéir à ces valeurs. Elle force le respect. À son arrivée, samedi, dans le port de Lampedusa (Italie), pour y débarquer 42 exilés sauvés des eaux 17 jours plus tôt, la jeune femme a dû faire face à l’attaque d’un navire de guerre, envoyé pour la stopper par le très xénophobe ministre italien de l’Intérieur, Matteo Salvini. Mais au final, rien n’aura empêché cette scientifique, spécialisée dans la navigation en Arctique et en Antarctique, de mener jusqu’au bout sa mission de sauvetage. Une vingtaine de policiers l’attendaient à sa descente du navire pour l’assigner à résidence. De nombreux militants de la solidarité étaient là aussi, venus l’applaudir pour avoir su tenir tête au nouveau « duce » (guide – NDLR) de l’extrême droite européenne et avoir fait revenir de force l’humanité en Europe.

Des messages haineux, sexistes et xénophobes...

« Carola, merci d’avoir mis ton corps dans cette bataille de civilisation », a publié sur Twitter l’écrivain antimafia Roberto Saviano, parmi des centaines d’autres messages rendant hommage à la jeune capitaine allemande. « Vous avez obéi à la loi des hommes, les mêmes hommes qui, il y a plus de 70 ans, ont plongé dans le trou noir de l’histoire, ceux qui relèvent encore la tête aujourd’hui. »

Ces derniers étaient, pour leur part, une poignée à vociférer sur le quai. « Les menottes ! », « J’espère que tu vas te faire violer par ces nègres », ont-ils aboyé, se plaçant à la même hauteur de langage et de pensée politique que leur mentor, Matteo Salvini, qualifiant, l’avant-veille, Carola Rackete d’« emmerdeuse » qui lui « casse les couilles ». La fachosphère française également, sur le site de Riposte laïque notamment, diffuse depuis toute une série de messages haineux, sexistes et xénophobes, et qualifiant les naufragés secourus par le bateau humanitaire de « 42 futurs égorgeurs ».

La justice italienne doit annoncer aujourd’hui, à l’issue d’un interrogatoire mené par le parquet d’Agrigente, en Sicile, si la capitaine de 31 ans sera effectivement poursuivie. Comme sa consœur Pia Klemp, en attente de son procès depuis 2017, elle est passible de quinze ans de prison. Elle pourrait également être accusée de « résistance à un bateau militaire ». Un délit passible de trois à dix ans de réclusion.

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas, demande, quant à lui, une « clarification rapide » des accusations. « Sauver des vies est une obligation humanitaire, a-t-il déclaré samedi. Le sauvetage en mer ne doit pas être criminalisé. » La France, elle, se contente d’annoncer qu’elle peut accueillir dix des exilés mis à l’abri par Carola Rackete. « Ni la Commission européenne ni aucun gouvernement européen n’ont trouvé la solution pour le débarquement des 40 survivants, déclare pour sa part l’ONG qui affrète le navire humanitaire. C’est finalement la capitaine Carola Rackete qui, étant à la fois forcée et aussi prête à prendre ses responsabilités, a enfin mis en sécurité ces personnes. »

Une cagnotte pour l’aider à financer ses frais de justice atteignait bientôt, hier après-midi, les 400 000 euros tandis que dans plusieurs communes d’Europe se tenaient des rassemblements de soutien à la « capitaine Courage ».

Émilien Urbach
Italie. Solidarité pour la capitaine Courage Carola Rackete, interpellée à bord du Sea-Watch 3 en Sicile, pour avoir sauvé 42 migrants à bord de son bateau (L'Humanité, 1er juillet 2019)  
Avec Carola Rackete et Pia Klemp, pour la justice et l’humanité

https://you.wemove.eu/campaigns/avec-carola-rackete-et-pia-klemp-pour-la-justice-et-l-humanite

Au gouvernement italien
Au Parlement européen, à la Commission européenne et aux gouvernements de l'Europe
A tous les citoyens et citoyennes de l'Europe

Cette pétition prend la suite de l’appel publié les 27 et 28 juin sur Le Monde, Paris, et Il Manifesto, Rome : « Sea-Watch 3 : C’est maintenant qu’il faut inverser la destruction du droit et de l’humanité », avec 700 signataires. Elle est proposée par le Comité Européen contre la Criminalisation du Sauvetage en Mer (CECCSM).

Un appel international

En faisant arrêter la capitaine Carola Rackete comme « hors la loi » et l’accusant de « rébellion » militaire, en séquestrant son navire comme « bateau pirate », en menaçant l’ONG propriétaire d’une « maxi-sanction » de dizaines de milliers d’euros, le Ministre Matteo Salvini qui semble exercer désormais dans son pays un pouvoir sans limites vient d’ajouter le délire à l’infamie. C’est lui qui place l’Italie en dehors du droit international et des principes fondamentaux dont nos Etats tirent leur légitimité démocratique. De graves conséquences vont s’ensuivre si on n’y fait pas obstacle.

De son côté, en « forçant le blocus » de la douane italienne après 14 jours d’atermoiements de l’UE et l’aveu d’incapacité lamentable de la CEDH, en accostant malgré l’interdiction à Lampedusa pour sauver ses passagers en détresse, la Capitaine du Sea Watch 3 n’a fait que son devoir. Elle en a assumé les risques mais ne doit pas en payer injustement le prix. Il appartient aux citoyens d’Europe et à leurs gouvernements – premiers concernés et impliqués – de faire immédiatement le nécessaire pour que cesse la persécution illégale et déshonorante contre les sauveteurs et l’équipage du Sea Watch 3.

Ne l’oublions pas cependant : une autre capitaine allemande est jugée en Italie pour avoir sauvé plus d’un millier de vies en Méditerranée : accusée d’aide à l’immigration clandestine et de complicité avec les « passeurs », Pia Klemp risque vingt ans de prison pour les vies qu’elle a sauvées – ce qui provoque l’indignation de beaucoup en Europe et dans le monde mais ne semble pas émouvoir nos gouvernements. On veut faire peur aux sauveteurs, mais Carola et Pia ne seront pas les dernières à prendre de tels risques alors que l’hécatombe des noyades se poursuit en Méditerranée avec la complicité des Etats qui devraient l’empêcher.

Nous exigeons donc que le gouvernement italien se ressaisisse, abandonne ses poursuites, libère immédiatement la capitaine Rackete et débloque le Sea Watch 3 pour qu’il puisse poursuivre sa mission. Nous exigeons qu’il accueille les hommes, femmes et enfants rescapés de la guerre et de la noyade, en concertation avec les ONG et les autres pays européens, et instruise correctement leur demande d’asile. Nous exigeons qu’il cesse de criminaliser la solidarité exercée au nom des droits humains par ses propres citoyens. Nous exigeons qu’il cesse d’ameuter l’opinion publique contre les migrants dénués de tout et forcés de quitter l’Afrique.

Nous appelons le nouveau Parlement européen à proposer, la Commission à élaborer, et les Gouvernements à décider enfin, dans l’esprit de la Convention de Genève, la politique commune de l’asile, ainsi que les règles de répartition équitable des personnes qui permettront à l’Europe de remplir ses obligations, de restaurer sa légitimité morale, en faisant preuve de sa capacité politique. Nous les appelons à respecter les conventions SOLAS et SAR qui imposent le débarquement en lieu sûr des personnes secourues en mer, en déclarant que ni la Libye ni la Tunisie ne sont aujourd’hui des lieux sûrs. Nous les appelons à ordonner la reprise des sauvetages en mer et à cesser de financer et d’entraîner les garde-côtes libyens qui traquent et torturent les fugitifs sous prétexte de lutter contre les trafics. Toute autre attitude est en réalité criminelle, elle relève de la lâcheté et de l’idiotie. En voulant épargner des conflits à l’Europe, elle les aiguise et détruit son propre avenir.

Enfin nous appelons tous les citoyens et citoyennes d’Europe à s’élever contre la politique d’hostilité envers les réfugiés et les migrants dont l’Italie aujourd’hui se fait gloire et que d’autres pays pratiquent de façon hypocrite. Nous les appelons à se solidariser avec Carola Rackete et Pia Klemp. A l’heure où Matteo Salvini et d’autres cherchent ainsi à nous entraîner dans l’ignominie, ces femmes courageuses, avec leurs équipages, sont l’honneur du continent européen. Citoyens et citoyennes de l’UE, battons-nous pour les libérer et rejoignons-les dans leur combat qui s’amplifie. Il est certes difficile, mais ses enjeux sont incontestables : contre l’arbitraire, contre l’hystérie xénophobe et le racisme, pour le droit, pour la vie humaine, pour l’hospitalité et aux côtés de tous ceux qui la font vivre. Ne restons pas spectateurs.

Photo: SeaWatch

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2 juillet 2019 2 02 /07 /juillet /2019 06:00
Commerce. Quand l’UE et le Mercosur signent le pillage de la planète (Cathy Dos Santos, L'Humanité, 1er juillet 2019, et entretien de Eric Serres avec Maxime Combes)
Commerce. Quand l’UE et le Mercosur signent le pillage de la planète
Lundi, 1 Juillet, 2019

L’accord conclu entre Bruxelles et les pays du cône sud-américain prévoit de faire sauter les taxes douanières, entraînant des désastres pour les filières agricoles et l’environnement. Il doit encore être ratifié par chaque parlement.

 

Les multinationales et autres investisseurs rêvaient depuis longtemps d’une zone commerciale gigantesque, « libre et non faussée ». L’Union européenne et le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay) se proposent de la leur offrir sur un plateau en or avec une quasi-impunité fiscale, sociale et environnementale aux conséquences désastreuses dans ces domaines de part et d’autre de l’Atlantique. Après vingt ans de tractations et de marchandages pour savoir qui remportera le plus gros morceau de la bête, ces deux blocs de 777 millions d’habitants sont convenus, vendredi, de la création d’un accord de libre-échange qui pèsera pour près d’un quart du PIB mondial. « Accord commercial fait ! Un moment historique. Au milieu des tensions commerciales internationales, nous sommes en train d’envoyer un signal fort que nous appuyons le commerce basé sur des normes », a jubilé dans un tweet le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui entend quitter ses fonctions, en brandissant le texte tel un trophée de guerre.

« Tournant historique en faveur de l’ouverture économique »

C’est « une conquête » pour Buenos Aires, alors que le président de droite Mauricio Macri devra affronter une élection présidentielle à l’issue incertaine en raison de l’impopularité de ses réformes libérales et austères. « Tournant historique (…) en faveur de l’ouverture économique », s’est félicité le Brésil du président d’extrême droite, Jair Bolsonaro, qui offre, avec cet accord, du pain bénit à ses soutiens de l’agrobusiness et aux multinationales qui exploitent les territoires amazoniens.

Ces satisfactions ne parviennent pas à étouffer les salves de critiques qui ont accompagné cette nouvelle phase de libéralisation des échanges commerciaux. Car, l’accord UE-Mercosur, c’est une affaire de gros sous aux retombées sociales et économiques asymétriques en raison de la levée des taxes douanières et de l’ouverture de marchés, jusqu’alors réglementés. L’organisme sud-américain exigeait des impôts de l’ordre de 91 % sur les produits en provenance de l’Europe. En retour, cette dernière éliminera jusqu’à 92 % de ses taxes sur les importations en provenance du cône sud. Le deal conclu n’épargne aucun domaine, mais des secteurs clés sont particulièrement touchés. L’Europe pourrait à l’avenir exporter ses produits industriels, notamment de la filière automobile. Elle serait également avantagée en ce qui concerne l’importation de métaux rares pour les hautes technologies, faisant la part belle aux compagnies extractivistes, au détriment des normes environnementales. Elle sortirait également gagnante sur le terrain des marchés publics – infrastructures, télécommunications – des pays du Mercosur qui avaient jusqu’à présent mis leur veto à ces secteurs stratégiques pour leur propre économie. Les Latino-Américains, quant à eux, ont finalement remporté la palme des négociations en obtenant un feu vert – conditionné à des normes sanitaires et environnementales à la marge – leur permettant d’inonder les Vingt-Huit de produits agricoles et agro-industriels : bœuf, volaille, sucre, éthanol, jus d’orange, café instantané…

Depuis l’an 2000, le chapitre agricole a été la pierre d’achoppement des négociateurs au point de faire capoter la trentaine de rounds de pourparlers qui ont eu lieu. Il pourrait d’ailleurs constituer le principal obstacle à la mise en œuvre de l’accord, qui, pour voir le jour, devra encore être ratifié par l’ensemble des parlements des États membres, puis par le Parlement européen, ainsi que par les assemblées nationales des pays latino-américains concernés. Et pour cause, ces derniers constituent à eux seuls une puissance agricole à même de dévaster l’agriculture européenne. Selon l’accord conclu – aux vastes zones d’ombre –, le Mercosur aurait gagné de pouvoir exporter 99 000 tonnes de viande bovine avec des taxes douanières réduites à 7,5 %. Lors de précédentes tractations, les Latino-Américains exigeaient que ses exportations soient libres d’impôts, contre les 70 000 tonnes avancées par l’UE. Le compromis final n’en est pas un, et il risque d’affaiblir à mort une filière de la viande déjà très fragilisée, la Fédération nationale bovine estimant que la baisse du nombre d’élevages bovins a doublé depuis 2017. Pour rappel : le Mercosur exporte déjà près de 250 000 tonnes de bœuf vers l’Europe, soit 75 % des importations totales de l’UE. Le nouvel accord, dont tous les aboutissants ne sont pas connus, pourrait dévaster les éleveurs européens. De l’aveu du commissaire européen à l’Agriculture, Phil Hogan, l’UE a opéré des « concessions significatives », à même de poser, a-t-il dit, non sans euphémisme, « certains défis pour les agriculteurs européens » que « l’aide financière » d’un milliard d’euros « en cas de perturbation du marché » ne saurait pallier.

« 74 % des produits phytosanitaires au Brésil sont interdits en Europe »

La possible déferlante de produits agricoles et de l’agrobusiness a soulevé une vague de contestation en Europe. Cette « politique commerciale a deux poids et deux mesures » creuse le fossé « entre ce qui est demandé aux agriculteurs européens et ce qui est toléré des producteurs du Mercosur » quant aux normes sanitaires et environnementales, a protesté la Copa Cogeca, la puissante fédération qui regroupe les syndicats agricoles de l’UE. Même tonalité pour le principal syndicat allemand, le Deutscher Bauernverband, qui estime que « beaucoup d’exploitations agricoles familiales » seront en danger si l’accord est ratifié. En France, les réactions à charge n’ont pas manqué, des Jeunes Agriculteurs à la FNSA qui, par la voix de Christiane Lambert, ont fustigé « un coup dur pour l’agriculture ». « 74 % des produits phytosanitaires utilisés au Brésil sont interdits en Europe », a-t-elle alerté. C’est là l’autre préoccupation majeure qui avait déjà été soulevée par 340 ONG européennes et sud-américaines concernant l’impact environnemental.

Salve de critiques des syndicats agricoles et des partis politiques

« On ne peut pas promouvoir une agriculture durable et faire du climat une priorité, et importer sa viande de l’autre bout de la planète en favorisant un modèle agricole intensif responsable de 80 % de la destruction de la forêt amazonienne », a vivement réagi l’eurodéputé PS Éric Andrieu. Pour Esther Benbassa, d’Europe Écologie-les Verts, l’accord est « une catastrophe écologique », tandis que le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, a mis en garde contre « un projet qui va abîmer la planète, notre santé et l’agriculture française ». La France insoumise appelle à un rassemblement, mardi, devant le Parlement européen, pour dénoncer un « accord opaque » conclu « au cours de la vacance parlementaire et sans transmission de la moindre information aux députés sortants ».

Alors que l’eurodéputé LaREM Pascal Durand qualifie la signature du projet de « jour funeste », le président français Emmanuel Macron a évoqué un « bon » texte, tout en parlant de « vigilance » dans sa mise en œuvre. L’hôte de l’Élysée avait pourtant juré sur tous les tons qu’il n’y aurait pas de signature tant que Brasília ne confirmait pas son soutien à l’accord de Paris sur le climat, dont Jair Bolsonaro a menacé de se retirer. Avant de se coucher face aux pressions de ses partenaires européens. À l’issue du sommet du G20 à Osaka au Japon, le locataire du Planalto, climatosceptique par excellence et fossoyeur de l’Amazonie, a griffonné son accord de principe, les promesses n’engageant que ceux qui y croient.

Cathy Dos Santos
Maxime Combes : « On ouvre encore plus les portes à l’agrobusiness »
Lundi, 1 Juillet, 2019

Salué par Macron, le traité de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur entraîne une levée de boucliers de la part de nombre d’organisations non gouvernementales. Entretien avec Maxime Combes, économiste à Attac et militant pour la justice climatique.

 

 

Emmanuel Macron avait promis qu’il ne signerait pas un mauvais accord. Et pourtant, ce traité de libre-échange avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay) va encore une fois à l’encontre de ses dires ?

Maxime Combes Clairement ! On donne notamment une légitimité à un Jair Bolsonaro alors que celui-ci remet en cause de manière permanente les régulations environnementales au Brésil. Il a démantelé le ministère de l’Écologie. Il favorise la déforestation au profit de l’agrobusiness et viole les droits de populations indigènes. Signer cet accord, c’est lui délivrer un blanc-seing. Mais, au-delà, regardons les répercussions en Europe. L’UE, en acceptant d’importer des produits agricoles (viande bovine, volaille) et en continuant à importer massivement du soja (transgénique), va fortement déstabiliser son secteur agricole.

Un tel accord va-t-il aussi à l’encontre des efforts faits par certains en Europe pour mettre sur pied une agriculture responsable ?

Maxime Combes C’est un très mauvais signal qu’on donne. Cet accord va avoir des impacts négatifs sur la capacité des pouvoirs publics et du monde paysan à organiser une transition vers une agriculture locale et de qualité. On ouvre encore plus les portes à l’agrobusiness et à ses multinationales.

Au-delà de l’agriculture, qu’en est-il aussi du secteur de l’énergie ? Ainsi l’Argentine et ses hydrocarbures non conventionnels. Ne va-t-on pas inciter ce pays à produire toujours plus et à détruire encore ?

Maxime Combes Le mandat avec lequel la Commission européenne a négocié avec le Mercosur n’a jamais été rendu public. On ne sait rien des secteurs qui ont été mis sur la table. Il est clair, par contre, que cette fuite en avant fera primer les intérêts des multinationales sur les exigences sociales, les droits humains, la lutte contre le réchauffement climatique et la protection de la biodiversité. Tout cela est lié à la nature même des règles qui organisent le commerce international et sur laquelle se base la signature de ces accords. Ces règles imposent que rien ne puisse entraver un accord, et ce, même s’il nuit à des principes fondamentaux.

Est-il encore possible que les pays européens, qui doivent ratifier le traité, le retoquent ?

Maxime Combes Il faut d’abord rappeler que le mandat commercial avec lequel la Commission européenne a négocié est fondé sur des règles édictées au siècle passé. Or celles-ci sont aujourd’hui obsolètes. Cette vieille doctrine européenne qui voulait placer l’Europe au cœur des négociations économiques n’est plus d’actualité. Le climat et les inégalités sociales sont les seuls enjeux de demain. Ensuite, tout est possible. Nous sommes sûrement devant un accord mixte, qui mêle des enjeux de commerce, mais aussi des éléments qui ne sont pas liés à celui-ci. Or ces éléments extérieurs doivent aussi être ratifiés par les parlements de chaque État membre et, pourquoi pas, invalidés. Du coup, rien n’est terminé. Ces derniers jours, il y a eu de très fortes mobilisations de nombreux secteurs : ONG, syndicats et monde agricole dans son ensemble. Pour rappel, le Parlement européen était extrêmement divisé lorsqu’il a fallu discuter avec l’Amérique de Donald Trump. Pourquoi pas dès lors avec le Brésil de Bolsonaro ?

Entretien réalisé par Éric Serres
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30 juin 2019 7 30 /06 /juin /2019 09:02

 

La Cour suprême devait examiner, hier, une demande de remise en liberté de l’ancien président de gauche. Les agissements de l’ex-juge et désormais ministre de la Justice, Sergio Moro, sont contestés par ses pairs.

On ne compte plus les mauvais rebondissements de l’affaire Lula. Et le dernier épisode n’est pas de nature à corriger le déni de démocratie dont est victime l’ancien président du Brésil (2003-2010). La deuxième cour du Tribunal suprême fédéral (STF) devait examiner, hier, la demande d’Habeas Corpus déposée par ses avocats, l’an dernier. Lundi, la juge et présidente de cette instance, Carmen Lucia, a annoncé qu’elle retirait la requête de remise en liberté de Lula de l’ordre du jour pour la reporter à la reprise de leur session, en août prochain. Avant de se raviser. À l’heure où nous écrivons ces lignes, la session du STF n’était toujours pas achevée, et une volte-face de dernière minute n’était pas à exclure. À l’heure où le pouvoir judiciaire brésilien est ébranlé, le STF confirme sa prise de parti dans la conjuration tentaculaire qui, après avoir destitué la présidente de gauche Dilma Rousseff, a écarté le leader historique du Parti des travailleurs du jeu politique brésilien, en l’empêchant de se présenter à la présidentielle de l’an dernier. Depuis avril 2018, Lula se trouve derrière les barreaux, après avoir été condamné à une peine de plus de 9 ans de prison pour un triplex dont il n’a jamais été propriétaire et ce, au mépris de la présomption d’innocence. Il est désormais de notoriété publique que le juge anticorruption Sergio Moro a manqué à tous ses principes. Les récentes révélations du site The Intercept Brasil concernant des messages échangés entre le désormais ministre de la Justice du président d’extrême droite Jair Bolsonaro et les représentants du parquet, dont le procureur Deltan Dallagnol, témoignent de « graves irrégularités » lors de l’enquête « Lavage express ».

Les Nations unies à nouveau saisies

« Non seulement Sergio Moro a conduit les procédures en toute partialité, mais c’est en réalité lui qui a dirigé l’accusation, au mépris des règles les plus fondamentales de la procédure au Brésil (…) Il a manipulé les mécanismes de la délation récompensée, orienté les travaux du ministère public, exigé le remplacement d’une procureure qui ne lui donnait pas satisfaction, et dirigé la stratégie de communication de l’accusation (…) Cette stratégie a été poursuivie de façon secrète, en étroite collaboration avec le parquet. Cela s’ajoute au fait que Sergio Moro avait placé sur écoute les avocats de Lula et décidé de son propre chef de ne pas respecter une décision d’un juge d’appel ordonnant la mise en liberté de Lula, violant ainsi la loi de manière éhontée », dénoncent d’éminentes personnalités du monde judiciaire, dont Baltasar Garzon et Mireille Delmas-Marty dans une tribune publiée dans le Monde du 25 juin.

Au Brésil, le malaise est palpable. Trente juges ont demandé, lundi, à l’Association des juges fédéraux la suspension du ministre Sergio Moro, informe la Folha de São Paulo. « Les conduites rapportées sont totalement contraires aux principes éthiques et aux règles juridiques qui doivent régir l’action d’un magistrat ; lorsqu’un juge agit de manière partiale au point de confondre son action avec celle d’un organe accusateur, la crédibilité du pouvoir judiciaire est mise en échec », déplorent-ils.

Pour la première fois depuis le début de l’affaire, le rapporteur de l’ONU sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, Diego Garcia-Sayan, a lui aussi fait part de ses inquiétudes quant aux attaques proférées par Sergio Moro lors de son audition par la commission justice du Sénat, où il s’en est pris au journaliste Glenn Greenwald, à l’origine des révélations. À cette occasion, le protégé de Jair Bolsonaro, sans qui sa victoire à la présidentielle aurait été impossible, s’est défendu de tout écart de conduite. Pourtant, rappelle Diego Garcia-Sayan, « les principes d’intégrité et de neutralité » ont été rompus durant l’enquête.

Les avocats de l’ancien chef d’État ont décidé de saisir à nouveau les Nations unies concernant les agissements illégaux de Sergio Moro. La défense du célèbre prisonnier politique entend également dénoncer les récentes pressions exercées par les forces armées et le gouvernement sur le pouvoir judiciaire afin d’empêcher toute libération de Lula.

Cathy Dos Santos

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29 juin 2019 6 29 /06 /juin /2019 06:56
Catherine Wihtol de Wenden avait été l'invitée des Jeudis Rouges des sections PCF de la 8e circonscription du Finistère, Réseau Partage des Savoirs, à Quimperlé, pour une conférence d'éducation populaire cette année, le 28 mars 2019, qui avait rassemblé beaucoup de monde. 
Le sort des migrants. Le droit émergent à la mobilité
Vendredi, 28 Juin, 2019

Catherine Wihtol de Wenden

 

L’élection d’un nouveau Parlement européen et la poursuite des épisodes de morts en Méditerranée, des murs, des camps et des situations d’illégalité du séjour dues aux migrations appellent une nouvelle politique concertée entre les États européens entre eux et entre les institutions européennes et les États, contrairement à la crise passée, marquée par le défaut de solidarité entre les pays européens et le manque de confiance entre les États et la Commission de Bruxelles.

Tout d’abord, une remise à plat complète de la politique européenne d’immigration et d’asile, compte tenu de ses dysfonctionnements, s’impose, en questionnant le principe du renforcement des frontières extérieures de l’Europe. La suppression des accords de Dublin II sur l’asile, en débat depuis quinze ans, est nécessaire, car le principe « one stop, one shop » (tout demandeur d’asile doit obligatoirement demander l’asile dans le premier pays européen où il a mis le pied) ne fonctionne pas car ce système ruine l’insertion future des nouveaux arrivants qui ne souhaitent pas rester dans ce pays sans réseaux de connaissances familiales ou de compatriotes, ni perspectives d’insertion professionnelle.

Tout demandeur d’asile en Europe doit en outre avoir les mêmes chances d’avoir une réponse uniforme à sa demande quel que soit le pays européen auquel il s’adresse, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui car chaque pays conserve un pouvoir d’appréciation de la situation de crise dans le pays de départ où des considérations politiques, diplomatiques, commerciales peuvent interférer alors que la transparence entre pays européens serait de mise.

Ensuite, l’Europe doit suivre les lignes tracées par le pacte de Marrakech de 2018, « pour une immigration sûre, organisée et régulière », c’est-à-dire ouvrir davantage ses frontières à l’immigration de travail légale dans les secteurs non pourvus par les nationaux. Cette disposition permettrait de résoudre la difficulté de faire la part des profils de demandeurs d’asile et de migrations économiques. Les migrants cherchant du travail ne seraient plus obligés de se présenter sous le jour d’une demande d’asile (avec beaucoup de risques d’être déboutés) du fait de la suspension, depuis 1974, de l’immigration de travail salarié, ou de faire appel à des passeurs en Méditerranée et de traverser la Libye avec le concours des trafiquants en s’exposant à des formes d’esclavage et à la mort en mer (2 275 en 2018).

Enfin, face à l’ampleur des échecs des politiques de reconduction à la frontière, de retour, des dispositions répressives et dissuasives et au coût de l’approche sécuritaire des migrations, il convient au contraire de considérer celles-ci comme un phénomène banal, correspondant à une tendance structurelle du monde et non à une pratique criminelle. Les migrants fuient les inégalités dans un monde interdépendant, les crises et les conflits, le chômage massif des jeunes, la gestion politique de pays faillis, la corruption, l’absence d’espoir. Or, l’inégalité du droit à la mobilité qui dépend du passeport (soumis ou non à l’obligation de visa) est l’une des inégalités les plus mal vécues dans le monde d’aujourd’hui, qui considère la mobilité comme une forme de modernité et de développement humain. Il n’est plus possible d’imaginer un monde où seuls les habitants du nord de la planète peuvent circuler librement et un monde du Sud contraint à rester derrière ses frontières en attendant un hypothétique développement futur car le développement est lui-même lié aux migrations. Le droit à la mobilité est l’un des droits émergents de ce début du XXe siècle.

Juriste, politologue, directrice de recherche au CNRS

Le sort des migrants. Le droit émergent à la mobilité - Catherine Wihtol de Wenden - L'Humanité, 28 Juin 2019
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27 juin 2019 4 27 /06 /juin /2019 10:54
Plan Trump : l’arnaque du siècle !

http://www.france-palestine.org/Plan-Trump-l-arnaque-du-siecle

Ce devait être une conférence, c’est devenu un atelier économique : des chefs d’entreprises et de fonds d’investissement y côtoient les rares responsables politiques qui ont accepté de se compromettre dans cette mystification. Le plan de la Trump Company a été dévoilé : des mesures hors sol pour tenter de liquider une fois pour toutes les droits du peuple palestinien.

La vision de Trump de la reconnaissance des droits du peuple palestinien est simple et claire : tout doit disparaître. Depuis son arrivée au pouvoir, il s’est exprimé sur tous les volets : feu vert à la colonisation, reconnaissance de l’annexion de Jérusalem, acceptation de l’occupation, préparation de l’annexion d’une partie de la Cisjordanie, enterrement de la question des réfugiés palestiniens : toutes les atteintes par Israël au droit international et au droit humanitaire sont validées par les USA. La loi du plus fort et le fait accompli en guise de règle.

Le cadre politique est donc posé. Pour y parvenir : le soi-disant « miracle économique ». Le mirage d’une société prospère et dynamique construite à coups de pétrodollars sur les ruines des droits du peuple palestinien.

Qu’attendent les écoliers palestiniens, sinon de pouvoir se rendre à l’école sans passer par les points de contrôle de l’occupation, sans vivre cette humiliation matin et soir, et sans craindre de trouver leur maison détruite au retour de l’école ou un père, une mère, un frère emprisonné ?

Que valent les discours néo-coloniaux d’un développement piloté de l’extérieur et de « protection de la propriété privée », comble du cynisme lorsque l’on sait que le vol par Israël des maisons, des terres et des ressources palestiniennes se poursuit depuis plus de 70 ans ?

Ce dont la Palestine et les Palestiniens ont besoin pour pouvoir vivre, travailler, développer leur société, c’est la fin de l’occupation de leur terre par Israël, la fin de la colonisation, la fin des politiques discriminatoires et bien évidement la levée immédiate du blocus de Gaza. Le plan pour y parvenir passe par l’application des résolutions de l’ONU que les USA ont balayées d’un revers de manche pour plaire à leur allié israélien.

Mme Hanan Achraoui, conseillère de Mahmoud Abbas n’a pas déclaré autre chose : "Commencez par lever le siège de Gaza, par arrêter le vol par Israël de notre terre, de nos ressources et de notre argent, donnez-nous la liberté de mouvement et le contrôle sur nos frontières, notre espace aérien, nos eaux territoriales [...] et ensuite regardez-nous construire une économie dynamique et prospère en tant que peuple libre et souverain".

Aux côtés des Palestiniens, l’Association France Palestine Solidarité réaffirme qu’aucune solution ne pourra voir le jour sans un règlement politique basé sur le droit international et le droit à l’autodétermination des peuples. L’entreprise de liquidation de la question palestinienne menée par Donald Trump doit être dénoncée pour ce qu’elle est et la France doit prendre ses responsabilités en s’engageant enfin vers cette solution politique.

Laissons la conclusion à Dominique de Villepin : « On n’achète pas l’indépendance d’un peuple. On n’achète pas la dignité d’un peuple. Cinquante milliards pour fermer sa gueule et accepter d’être dépouillé de ses droits : c’est ignoble ! Ce plan est mort-né ».

Le Bureau national de l’Association France Palestine Solidarité
26 juin 2019

 

Palestine - Plan Trump : l’arnaque du siècle ! (communiqué AFPS, 27 juin 2019)
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26 juin 2019 3 26 /06 /juin /2019 11:00
Tensions Etats-Unis / Iran : la périlleuse escalade -  Pascal Torre (secteur international du PCF)

Tensions Etats-Unis / Iran : la périlleuse escalade

Pascal Torre (PCF)


Les attaques de deux pétroliers japonais et norvégien en mer d'Oman le 13 juin, après les actes de
sabotage de quatre navires en mai, marquent une nouvelle étape dans la dangereuse surenchère entre
l'Iran et les Etats-Unis. Cet engrenage s'est accéléré depuis que Washington s'est retiré unilatéralement
de l'accord sur le nucléaire et a mis en place un régime de sanctions.


L'heure est désormais à l'escalade.

Donald Trump, ses alliés israéliens et des pétromonarchies du Golfe accusent Téhéran d'avoir fomenté ces opérations, sans preuves tangibles, conduisant les pays de l'Union Européenne à exprimer de la prudence dans l'attribution des responsabilités voire de la perplexité.

Quant à l'Iran, elle dément toute implication. L'offensive américaine se traduit également par un renforcement de ses capacités militaires avec l'envoi d'un porte-avion, de missiles Patriot et d'un contingent supplémentaire de 1000 soldats. La destruction d'un drone espion américain au dessus du territoire iranien a conduit D. Trump à ordonner des frappes aériennes avant qu'il ne se rétracte. Enfn, la politique de pression maximale empêche désormais l'Iran d'exporter son pétrole, menaçant d'asphyxie une économie minée par la crise, les inégalités et la corruption.

Les Etats-Unis agissent en violation complète du droit international et imposent leur volonté au monde par leur règle d'extra-territorialité.
L'étranglement de l'économie iranienne pousse ses dirigeants à faire le dos rond, alors que la population
soufre désormais de pénuries, d'absence de perspectives et d'accentuation de la répression contre toute
velléité d'expression démocratique. Les femmes sont particulièrement visées par ce déchaînement de
violence. Le consensus qui s'exprime sur l'exigence de résistance pousse certaines forces à accentuer la
militarisation du système et à poursuivre la politique milicienne d'interventionnisme régional. Faute de
dividendes politiques et économiques, Téhéran fait aussi monter la pression en annonçant que ses
réserves d'uranium enrichi dépasseront les limites prévues par l'accord sur le nucléaire dés le 27 juin.
Tandis que les provocations se multiplient, rejetées par les opinions publiques respectives, les Etats-Unis
et l'Iran proclament ne pas vouloir d'une nouvelle guerre au Moyen-Orient et s'installent dans un statu quo propice à tous les dérapages. Pour les iraniens, confrontés à des tensions internes et à des
interrogations sur leur politique étrangère controversée, ni l'escalade régionale, ni le dialogue avec D.
Trump ne constituent une alternative crédible. Quant à la stratégie de Washington, elle apparaît dans
l'impasse. Le président américain n'est pas parvenu, dans sa croisade, à enrégimenter les pays
signataires de l'accord sur le nucléaire. Il s'agace de son incapacité actuelle à faire fléchir l'Iran alors qu'il
est engoncé dans un double discours : officiellement, il appelle à négocier sur le nucléaire, les missiles
balistiques et la politique régionale tout en souhaitant officieusement un renversement du pouvoir
actuel. Mais surtout, D. Trump manifeste, comme son prédécesseur, le souhait de se retirer du Moyen-
Orient tout en multipliant les foyers de confits avec la volonté de peser sur les évènements. Enfin, dans
la perspective du scrutin de 2020, D. Trump ne se contentera pas de résultats limités sur le dossier iranien afin de flatter sa base électorale.

Le Parti communiste français (PCF) s'inquiète et condamne cette dangereuse escalade qui risque
d'embraser à nouveau un Moyen-Orient exsangue. Il dénonce la politique de sanctions américaine qui accentue la souffrance et la pauvreté du peuple iranien et conforte ce pouvoir théocratique dans la répression des forces démocratiques.
Il appelle la France et l'Union Européenne à ne pas céder aux injonctions de D. Trump en n'appliquant pas les sanctions, en maintenant leur engagement en faveur de l'accord sur le nucléaire et en refusant de se laisser entraîner dans une politique agressive.

Pascal TORRE, responsable-adjoint du secteur international du PCF, en charge du Maghreb et du Moyen-
Orient

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