Les chiffres de la balance commerciale française sont préoccupants. Depuis dix ans, les importations sont durablement supérieures aux exportations. Le phénomène a été quelque peu dissimulé par la baisse du prix du pétrole, qui a réduit notre facture énergétique. Mais, mois après mois, les déficits se sont cependant accumulés.
Nous l'avons ici même plusieurs fois démontré. Ce n'est pas dans le coût du travail que nous pouvons trouver une explication aux pertes de parts de marché des entreprises françaises. Reste le débat sur la flexibilité qui se concentre désormais autour de la réforme du Code du travail voulue par Emmanuel Macron.
Mais gardons-nous des faux constats. La flexibilité est déjà très forte en France et s'accompagne d'une productivité élevée. 87 % des embauches se font en contrat à durée déterminée. Un salarié sur six est à temps partiel, le plus souvent contraint. L'intérim est un mode de gestion des effectifs permanents dans certaines branches comme l'automobile. Enfin, en ce qui concerne la rupture conventionnelle, moins d'une rupture sur quatre correspond à une démission. Dans les trois quarts des cas, le salarié part sous la contrainte. Et voilà que, avec les ordonnances en préparation réformant le Code du travail, patronat et gouvernement peuvent faciliter les restructurations et les suppressions d'emplois censées rétablir la compétitivité du site France...
ce n'est pas le coût du travail qui explique les reculs des exportations, mais sa dévalorisation par les choix patronaux.
Le véritable handicap de compétitivité est ailleurs. Il trouve sa source dans les choix de gestion des entreprises : un taux plus faible de recherche et développement qui ne permet pas une modernisation des processus de production et des produits ; un effort de formation professionnelle qui stagne, voire régresse ; une priorité donnée à l'investissement financier. Banquiers et patrons ont oublié la notion basique de « système productif ». Le tissu industriel français est fragilisé et il est la proie de firmes étrangères et de fonds financiers anglo-saxons. Seuls surnagent quelques secteurs comme l'aéronautique, la pharmacie, l'agroalimentaire. Mais pour combien de temps encore ?
On mesure les conséquences de la dévalorisation du travail sur le commerce extérieur national. Ce n'est pas le volume des exportations qui baisse, mais le prix auquel la France vend ses produits. Le pays exporte à peu près autant de produits qu'il y a dix ans. Mais leur prix de vente baisse. Nous perdons des parts de marché en valeur parce que nous descendons en gamme !
Le Medef propose d'abaisser les salaires et les cotisations sociales pour s'adapter à cette évolution, alors qu'il faudrait viser une sortie par le haut. Il faut accroître la qualité, renforcer l'innovation, plutôt que de s'aligner sur un modèle low cost. Les leviers à mettre en oeuvre : le contrôle des aides publiques, le conditionnement de leur versement à des critères d'emploi et de progression des salaires, la sécurisation de la reprise des entreprises viables, la réforme de l'impôt sur les sociétés afin de favoriser l'investissement, la création de comités interentreprises dans les filières, l'encadrement des ruptures conventionnelles, l'interdiction des licenciements boursiers...
Il s'agit moins de trouver un hypothétique équilibre entre « flexibilité » et « sécurité » que de créer les conditions d'une dynamique des emplois, des innovations et de la sécurité collective, nécessaires pour accompagner un nouveau projet de développement.
L'INFORMATISER C'EST ÔTER LES MOYENS DE CONTRÔLER COMMENT NOUS SOMMES PAYÉS.
Ils suppriment la feuille de paie papier pour une version électronique. En même temps, ils veulent la « simplifier » au point qu'on ne verrait plus le salaire brut, ni le détail décisif des différentes cotisations pré-affectées que nous mutualisons dans nos caisses sociales. Pourquoi un bulletin informatisé devrait-il être en même temps simplifié ?
Macron s'est engagé dans une manœuvre géante, en vue des mois de janvier 2018 et 2019, pour modifier à la fois nos salaires, brut et net, nos cotisations et nos impôts. Voilà un changement « technique » mis en œuvre bien opportunément par ceux qui ont intérêt à obscurcir nos moyens de contrôler la façon dont nos employeurs nous paient, dont nous cotisons à notre Sécu d'une part et dont l'impôt est prélevé par l'État d'autre part.
Les lois Sapin, Macron, El Khomri ont autorisé la dématérialisation de la feuille de paie... « sauf si le salarié refuse individuellement » et exige de recevoir une version papier. Et comment assurer la sécurité de ces documents ? 26% pensent déjà avoir perdu des bulletins de paie papiers. Mais n’y a-t-il pas autant de risques pour l’informatique que pour le papier ? 21% des salariés ne veulent pas de bulletin dématérialisé. 45% sont réticents à changer leurs habitudes.
Le décret d'application paru au « Journal officiel » en décembre 2016 prévoit que « le salarié doit être informé trois mois avant l'éventuelle fermeture d'un service en ligne, qu'il soit géré par l'employeur lui-même ou par un prestataire externe ». L'employeur est censé « garantir la disponibilité du bulletin de paie dématérialisé pendant cinquante ans, ou jusqu'aux 75 ans du salarié ». Bercy envisage déjà qu'on travaillera cinquante ans, jusqu'à 75 ans ? Qui croit que ça marchera ? 70 000 entreprises disparaissent chaque année et autant se créent. Un million d'entreprises ont moins de 11 salariés et l'informatique y laisse à désirer. Peut-être vaut-il mieux défendre encore nos bulletins de paie à la fois papier et bien détaillés ?
Avec son bassin de 800 mètres de long, STX est aussi le seul chantier à même d'accueillir des gros navires militaires. Damien Meyer/AFP
Le gouvernement a annoncé, jeudi, in extremis, la préemption à court terme de STX, afin d'éviter sa prise de contrôle majoritaire par Fincantieri. Une décision qui n'augure en rien le développement d'une stratégie industrielle.
«À la CGT, nous préférons insister sur le mot préemption, parce qu'on n'est vraiment pas dans le cas d'une nationalisation avec tout ce que cela implique de développement industriel planifié ! » a lancé Sébastien Benoît, délégué syndical CGT de STX. La préemption des chantiers navals, annoncée jeudi aprèsmidi par Bruno Le Maire, est « temporaire » et servira à continuer à « négocier dans les jours qui viennent ». « Nous avons offert à l'industriel italien Fincantieri de prendre 50 % des parts des chantiers navals de Saint-Nazaire tout en lui laissant le contrôle opérationnel de la société. Elle a été refusée, a poursuivi le ministre de l'Économie, mais cette proposition équitable reste sur la table. » Bruno Le Maire a d'ailleurs annoncé qu'il se rendrait à Rome, mardi, pour continuer à négocier.
POUR MACRON, IL S'AGIT D'ÉVITER DE PERDRE TOTALEMENT
la souveraineté sur ces chantiersLa décision de l'exécutif d'exercer son droit de préemption est donc bien loin de la démarche d'un État stratège, qui nationaliserait avec en tête un projet industriel. Pour Emmanuel Macron qui, depuis son élection, annonçait vouloir rouvrir le dossier, il s'agit d'éviter de perdre totalement la souveraineté sur ces chantiers jugés cruciaux, le repreneur italien, Fincantieri, n'étant pas jugé fiable.
«Au fond, ce n'est que la poursuite d'un bras de fer, d'une partie de poker entre deux gouvernements libéraux, italien et français, qui veulent chacun préserver les intérêts stratégiques et défendre leurs actionnaires, explique Sébastien Benoît. Et en toile de fond, il s'agit aussi de continuer des tractations avec l'Italie autour des contrats militaires. » Avec son bassin de 800 mètres de long, STX est le seul chantier à même d'accueillir des gros navires militaires, dont des porte-avions. Le groupe italien devait à l'origine reprendre 48 % du capital de STX. Mais, en en prenant 7 % de plus via une fondation, le constructeur de Trieste était en position de devenir majoritaire. Rédhibitoire pour l'État français.
L'absorption des chantiers de Saint-Nazaire par le leader du secteur pouvait aussi laisser craindre que l'industriel italien ne sacrifie le site français malgré son carnet de commandes plein jusqu'en 2026 au premier coup dur conjoncturel, au profit de ses propres chantiers italiens. «On a expliqué en long et en large que, pour des raisons de logistique, d'espace, on ne peut pas faire à Trieste ce qu'on peut faire à Saint-Nazaire. Donc, il n'y a aucun risque de déplacer des filières de production ou de l'emploi de Saint-Nazaire à Trieste », siège de Fincantieri, s'était défendu le secrétaire d'État italien aux Affaires européennes, Sandro Gozi. Mais, comme l'État italien, actionnaire de Fincantieri, a un pouvoir de contrôle sur le groupe, il est à craindre que la sauvegarde de l'emploi à Trieste ne soit privilégiée à Saint-Nazaire. Or, dans le chef-lieu de Loire-Atlantique,pas moins de 7 300 emplois, avec les sous-traitants, sont en jeu.
« EN QUINZE ANS, LE CHANTIER EST PASSÉ DE 5000 À 2300 SALARIÉS. CELA A ÉTÉ COMPENSÉ PAR LE RECOURS À L’INTÉRIM ET AUX TRAVAILLEURS DÉTACHÉS.» SÉBASTIEN BENOÎT, CGT STX.
« Le gouvernement italien demandera à son chantier national Fincantieri de faire travailler les Italiens plutôt que les Français, c'est naturel », a renchéri Bruno Retailleau, président (LR) du conseil régional des Pays de la Loire, jeudi, sur RTL.
«Cette décision laisse un répit, a réagi l'élu communiste nantais Robin Salecroix. Un moyen pour nous de poser la question de l'avenir industriel du secteur. Car la navale française a de gros atouts et un carnet de commandes plein. Il faut qu'on soit à la hauteur des enjeux, au-delà d'un simple pacte actionnarial. Mais il s'agit d'un répit qui ne résout en rien les vrais problèmes, à savoir comment on pérennise le chantier, on y développe l'emploi dans de bonnes conditions et comment on diversifie le site, avec la construction de ferrys, navires gaziers... L'État a le devoir de se poser ces questions et d'y associer des partenaires historiques. »
On en est encore très loin. Dans sa brève allocution, le ministre de l'Économie a insisté sur le fait que, s'il voulait «libérer le travail», le rôle de l'État était aussi de le protéger. « Mais que veut-il protéger ? a demandé Sébastien Benoît. Les salariés ou ses propres intérêts? Car, au vu des mesures antisociales prévues par ce gouvernement, avec le CDI de chantier qui nous touche particulièrement, difficile d'espérer quoi que ce soit de cette préemption. En tout cas, la CGT aura les mêmes exigences envers le gouvernement qu'envers tout autre actionnaire. »
Nul ne sait ce qu'il adviendra in fine de la loi Travail. Pour en savoir plus, il faudra attendre le contenu des ordonnances, vu que le gouvernement a décidé de recourir à une pratique certes respectueuse du texte constitutionnel mais guère conforme à l'esprit de la démocratie. En revanche, le discours entendu ici et là pour justifier de passer les règles sociales au rabot laisse rêveur, tant il véhicule des idées qui feraient sursauter un enfant de 7 ans ayant conservé l'intégralité de son cerveau.
La plus étonnante d'entre elles consiste à prétendre qu'il faut faciliter les licenciements pour relancer les embauches. C'est un peu comme si on disait qu'il faut faciliter les noyades pour former des maîtres nageurs, encourager les incendies de forêt pour former les pompiers, tolérer des accidents de la route pour apprendre à conduire, ou encore encourager les guerres pour obtenir la paix.
Ce discours revient pourtant en boucle sur les ondes et dans les journaux.Des spécialistes de tout et de rien se relaient pour décrire avec des trémolos dans la voix l'angoisse du grand patron incapable de trouver le sommeil à l'idée de créer un emploi sans l'assurance de pouvoir le supprimer aussi sec en cas de retournement conjoncturel. Mine de rien, c'est un vrai drame humain.
Des pros de la communication ont donc imaginé ce raisonnement génial selon lequel pour éviter un futur regrettable (le licenciement), le mieux est de le faciliter dès aujourd'hui. On oublie au passage toutes les réformes accumulées au fil des ans pour flexibiliser et précariser le monde du travail au nom de la lutte contre un chômage qui ne baisse pas (ou très peu). Faute de s'interroger sur ce raté général, on suggère d aller encore plus vite et plus loin, comme si l'insécurité sociale était devenue un gage d'épanouissement individuel et collectif.
La France a mis en œuvre une centaine de réformes relatives au travail depuis le début des années 2000. Durant cette période, l'intérim a explosé, de même que les CDD, les stages et toutes les formes de jobs au rabais. Résultat : le drapeau de la défaite flotte sur le front de l'emploi. Voilà qui devrait amener pour le moins à s'interroger sur la stratégie proposée, aussi efficace que la ligne Maginot de 1940.
En vérité, l'emploi dépend moins du code du travail que de l'activité économique du pays. Or, cette dernière est en rade. Les carnets de commandes des entreprises sont vides, faute d'une croissance permettant de lancer des projets à long terme, et donc de s'en donner les moyens, humains et financiers. Les multinationales ont le nez fixé sur la ligne bleue de l'étranger, rêvant de délocalisations dans des lieux exotiques où la main-d'œuvre est peu onéreuse et la législation fiscale, peu sourcilleuse. Quant aux petites et moyennes entreprises, elles sont étranglées par les banques qui ne veulent prendre aucun risque et par les cadors du CAC 40 qui leur font payer les pots cassés.
Plutôt que de voir cette réalité en face afin d'y apporter les réponses idoines (notamment pour les PME), les docteurs de l'Eglise néolibérale ramènent tout à un seul sujet : le « coût du travail », lequel devrait être absolument réduit pour supporter la concurrence de pays comme la Chine, la Pologne ou la Slovaquie. Tout le reste - la financiarisation croissante, le diktat des banques, le racket des actionnaires - est passé par pertes et profits. Résultat : la pression sur les salaires étouffe une consommation faiblarde, assèche les rentrées fiscales et nourrit le déficit des comptes publics. Cela s'appelle un cercle vicieux. (...)
LE GOUVERNEMENT FAIT PASSER LES COUPES DANS LES BUDGETS DE 2017 PAR DÉCRETS, PLUTÔT QU'EN FAISANT VOTER UNE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE.
Pour Gérald Darmanin, une seule règle, « la réduction de la dépense publique ». François Guillot/AFP
L'Assemblée nationale a débattu, jeudi, des orientations budgétaires du gouvernement, qui préparent « l'enrichissement des plus riches et l'appauvrissement des plus pauvres », selon les députés communistes et insoumis.
Le gouvernement a daigné s'expliquer jeudi devant l'Assemblée sur les orientations budgétaires à venir. Il y était attendu, après une longue cacophonie et des annonces contredisant le discours de politique générale du premier ministre, Édouard Philippe. Sans surprise, l'exécutif a défendu une sacrée cure d'austérité, avec une ponction de 4,5 milliards d'euros en 2017, pour passer sous la barre des 3 % de déficit public en 2017. Dans l'immédiat, le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a confirmé une baisse de 268 millions d'euros pour Bercy, de 282 pour les Affaires étrangères, de 260 aux Transports, de 526 à l'Intérieur, de 160 pour la Justice, de 331 à la Recherche, de 75 pour l'Éducation nationale à quelques mois de la rentrée scolaire, de 50 pour la Culture et de 850 à la Défense, ce qui a conduit mercredi à la démission fracassante du chef d'état-major des armées, Pierre de Villiers.
PAS AVARE DE CADEAUX AU PRIVÉ
Entre autres réjouissances, la purge de 18 milliards d'euros prévue pour 2018 figurait bien dans le rapport transmis, sans oublier la hausse de la CSG, la suppression de 80 % de la taxe d'habitation, et la baisse de 13 milliards du budget des collectivités territoriales sur cinq ans. « Trop de dépense publique, donc trop d'impôt. Trop de déficit, donc trop de dette. Tout est lié à la réduction de la dépense publique», a argumenté Gérald Darmanin, qui prône une « révolution copernicienne », à savoir « faire mieux avec moins », en cassant l'idée selon laquelle « plus de dépense publique, c'est plus de service ». Amen. Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a dans la foulée, lui aussi, joué du pipeau en estimant que le « record » de dépense publique en France n'empêche pas d'avoir un chômage record, avant de recycler le vieil argumentaire de la droite sur « l'assistanat » : « Trop de Français disent : "Mais dans le fond, si je restais chez moi à vivre de la redistribution, je vivrais mieux." Il n'y a pas d'avenir pour une nation dans la dévalorisation du travail. »
Pas avare de cadeaux au privé, en revanche, le ministre a aussi défendu la cession de 10 milliards d'euros d'actifs de l'État afin de «financer l'innovation», avant d'annoncer pêle-mêle la pérennisation du Cice en exonérations de cotisations patronales en 2019, et la suppression dès 2018 des cotisations maladies et chômage. L'impôt de solidarité sur la fortune, qui « décourage », sera lui remplacé par un impôt moindre sur l'immobilier. Mais, c'est promis, «la baisse des impôts permettra à tous les Français de bénéficier des efforts réalisés ». Au milieu des présents faits aux plus fortunés, au milieu de l'attaque faite aux plus démunis avec la hausse de la CSG, Gérald Darmanin a ensuite osé affirmer qu'« augmenter l'allocation handicapé et le minimum vieillesse de 100 euros par mois, ce n'est pas une politique pour les riches ». Ou comment offrir quelques miettes pour masquer un banquet... Face aux critiques des députés « les Républicains », il a dans une saillie révélatrice rétorqué qu'ils oubliaient bien vite le programme de François Fillon.
« DE L'INJUSTICE FISCALE »
Devant ces sommets d'ultralibéralisme, le député PCF Fabien Roussel a répondu sans vertige. « C'est de l'injustice fiscale caractérisée », a-t-il lancé, dénonçant « des cadeaux pour les plus aisés, des dépenses publiques au régime sec et une soumission aveugle au diktat européen de la dette ». Opposé à « l'insupportable financiarisation de l'économie, toujours plus coupée de la vie et des besoins réels », il a brisé le mythe selon lequel le pays vit au dessus de ses moyens, en rappelant que le PIB progresse sans cesse, et que « les 500 plus grandes fortunes ont augmenté ces vingt dernières années 4 fois plus vite que le PIB ! Entre 1996 et 2016, leur fortune est passée de 80 milliards d'euros à 570 milliards ! Elles représentent maintenant 26 % de notre PIB, contre 6 % auparavant. Et vous vous voulez supprimer l'ISF ? ».
Éric Coquerel, ciblant pour la France insoumise « l'arnaque » d'une hausse du salaire net alors que le gouvernement va «prendre dans la poche des salariés leur salaire socialisé», a conclu en estimant qu'en réalité « la noblesse d'argent devient une nouvelle noblesse de sang », et que le gouvernement affaiblit l'État et l'impôt « uniquement pour enrichir les plus riches ».
LA SÉCURITÉ SOCIALE AU RÉGIME SEC
Les administrations de sécurité sociale, déjà sévèrement fragilisées par François Hollande, devront désormais « participer à l'effort d'économies dans une proportion proche de celle de leur niveau dans les dépenses publiques, de l'ordre de 40 %, et devront s'inscrire dans une trajectoire de retour à l'équilibre à horizon 2020 », indique le rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire transmis aux députés.
CHAQUE ANNÉE, LES MULTINATIONALES RÉUSSISSENT À FAIRE S'ÉVAPORER JUSQU'À 180 MILLIARDS D'EUROS DANS L'UNION EUROPÉENNE.
Des chercheurs pointent le rôle joué par les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l'Irlande dans le dumping fiscal mondial. Leurs législations permettent d'attirer les profits des multinationales avant de les envoyer sous des cieux moins transparents encore.
Et une étude de plus sur l'évasion et l'optimisation fiscales des multinationales ! Un groupe de chercheurs de l'université d'Amsterdam, travaillant à un projet baptisé Corpnet, a publié hier les résultats d'une enquête sur les circuits empruntés par les grandes entreprises pour leur permettre de concentrer leurs impositions dans les pays les plus arrangeants. Pour les budgets des États, chacun le sait mais il est toujours bon de le souligner au moment où Emmanuel Macron et le gouvernement Philippe envisagent de faire les poches aux plus précaires , le manque à gagner est énorme: chaque année, les multinationales réussissent à faire s'évaporer jusqu'à 180 milliards d'euros dans l'Union européenne; aux États-Unis, cette évasion fiscale est évaluée, au minimum, à près de 120 milliards d'euros. D'après les calculs du Réseau pour la justice fiscale et même du Fonds monétaire international (FMI), cités par les chercheurs, si les profits étaient pris en compte là où ils sont réellement réalisés, les multinationales devraient verser la bagatelle de 520 milliards d'euros aux États. Et sur ce montant, 180 milliards devraient aller aux pays en voie de développement, soit bien plus que le montant de l'aide au développement...
PAYS-BAS ET ROYAUME-UNI TIENNENT LES RÔLES DE PREMIER PLAN
L'intérêt de cette nouvelle étude est d'insister sur le caractère proche des paradis fiscaux, loin des images exotiques induites par leur désignation même. Dans le circuit de l'optimisation fiscale, plusieurs États membres de l'Union européenne tiennent en réalité les rôles de premier plan. C'est le cas des Pays-Bas et du Royaume-Uni, en particulier, qui, en organisant le transit de près de 40 % des investissements des très grandes entreprises, agissent comme des plaques tournantes dans le système de l'évasion fiscale. Les législations de ces deux pays permettent d'orienter les flux financiers vers les paradis fiscaux. Dans leur recensement, loin des présentations tronquées désormais mises en avant par les grandes puissances lors des G20 ou des institutions internationales comme l'OCDE, les chercheurs de l'université d'Amsterdam
distinguent deux catégories de places financières offshore : celles qui, comme les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suisse, Singapour et l'Irlande, permettent d'escamoter les profits et de les envoyer ensuite vers d'autres cieux plus cléments encore, et celles qui, comme les îles Vierges britanniques, les Bermudes, le Luxembourg, le Liechtenstein et beaucoup d'autres, permettent ensuite d'enterrer l'argent. Les juridictions placées dans la seconde catégorie ont bien souvent des liens passés ou présents, par le biais de la colonisation, avec celles de la première.
Sur les 24 paradis fiscaux listés par les chercheurs hollandais, trois sur quatre (18, au total) sont directement dépendants du Royaume-Uni. L'étape par les Pays-Bas est, elle, utilisée pour envoyer les profits à Chypre ou aux Bermudes.
La Suisse sert, elle, pour domicilier ensuite les fonds à Jersey, alors que l'Irlande est utilisée comme escale par les entreprises japonaises et états-uniennes qui placent leur argent au Luxembourg. Pour les chercheurs de l'université d'Amsterdam, le contexte des négociations sur la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne rend plus urgentes encore des formes de régulation permettant de mettre fin à ce dumping fiscal à très grande échelle. « Le ministre des Finances britannique a évoqué la perspective d'une transformation de son pays en paradis fiscal de l'Europe si l'Union européenne ne devait pas offrir un accord assez bon aux yeux du gouvernement, écrivent-ils. Mais, aujourd'hui déjà, des dépendances du Royaume-Uni se comportent effectivement comme des paradis fiscaux...
Depuis la crise financière, l'UE et l'OCDE ont accru la pression contre l'évasion fiscale, mais avec des résultats très modestes. Nous espérons que notre approche pourra aider les régulateurs à cibler les secteurs et les territoires où se concentrent les activités offshore. S'attaquer, en particulier, aux centres financiers offshore qui servent de plaques tournantes dans l'évasion paraît plus efficace que de s'en prendre aux paradis fiscaux plus éloignés qui, eux, ne cessent de se renouveler. »
La combustion d'énergies fossiles favorise le réchauffement climatique et pourrait conduire à la fonte de la glace polaire ainsi que celle des sommets des montagnes, un scénario qui conduirait à une hausse du niveau de la mer de plus de 65 mètres.
Ces cartes montrent le monde tel qu’il est aujourd’hui, à une différence près : toute la glace continentale a fondu et s’est déversée dans la mer, élevant son niveau de plus de 65 mètres et formant de nouveaux littoraux pour nos continents et les mers intérieures.
Il y a plus de deux millions de mètres cubes de glace sur Terre, et certains scientifiques affirment qu’il faudrait plus de 5 000 ans pour qu’elle fonde dans son intégralité. Si nous continuons produire du dioxyde de carbone dans l’atmosphère, il y a de fortes chances que nous créions une planète dépourvue de glace, avec une température moyenne avoisinant les 26°C au lieu des 14°C actuels.
EUROPE
Londres ? Plus qu’un souvenir. Venise ? Reconquise par la mer Adriatique. D’ici des milliers d’années, dans ce scénario catastrophique, les Pays-Bas auront depuis longtemps capitulé face à l’invasion de la mer, et la majeure partie du Danemark aura également disparu. Entre-temps, les eaux grandissantes de la Méditerranée décupleront le niveau de la mer Noire et de la mer Caspienne.
AMÉRIQUE DU NORD
Toute la façade atlantique disparaîtrait, de même que la Floride et la côte américaine du golfe. En Californie, les collines de San Francisco deviendraient un archipel et la Vallée Centrale une baie géante. Le golfe de Californie s’étendrait jusqu’au nord, au-delà de la latitude de l'actuelle San Diego – la ville n'existerait plus.
AMÉRIQUE DU SUD
Le Bassin amazonien au nord ainsi que le bassin du Río Paraguay au sud deviendraient des criques de l’Atlantique, rayant Buenos Aires, le littoral uruguayen ainsi qu’une grande partie du Paraguay de la carte. Certaines zones montagneuses subsisteraient le long de la côte de Caraïbes et en Amérique centrale.
AFRIQUE
Comparée aux autres continents, l’Afrique ne perdrait pas autant de terres au profit des eaux montantes des océans, mais la hausse des températures pourrait rendre une grande partie de son territoire inhabitable. En Égypte, les villes d’Alexandrie et Le Caire seront submergées par une mer Méditerranée intrusive.
ASIE
La Chine, désormais peuplée de 600 millions d'habitants, sera inondée, tout comme le Bangladesh et ses 160 millions d’habitants, ainsi qu’une grande partie des régions côtières de l’Inde. L’inondation du delta du Mékong ferait de la Chaîne des Cardamomes du Cambodge une zone isolée, tel un pays insulaire.
AUSTRALIE
Essentiellement désertique, le continent s’enrichirait d’une nouvelle mer intérieure, bien qu’il se verrait dépossédé d’une grande partie de sa bande côtière où vivent actuellement quatre Australiens sur cinq.
ANTARCTIQUE
Ouest Antarctique : la calotte glaciaire de l’Antarctique oriental est si vaste – elle compte quatre cinquièmes de la toute la glace terrestre – que sa fonte semble inconcevable. Elle a survécu intacte à des périodes de chaleurs antérieurs. Récemment, elle semble s’être quelque peu densifiée – en raison du réchauffement climatique. L’atmosphère plus chaude contient davantage de vapeur d’eau et celle-ci retombe sous forme de neige sur l’Antarctique oriental. Pourtant, il est peu probable que ce mastodonte survive au retour d’un climat d’Éocène.
Est Antarctique : Comme la calotte glaciaire du Groenland, l’Antarctique occidental était vraisemblablement beaucoup plus petit lors des périodes de chaleur antérieures.Il s’agit d’une région fragile du fait qu’une grande partie du continent repose sur un substrat rocheux situé sous le niveau de la mer. Le réchauffement de l’océan fait fondre la glace flottante par en-dessous, entraînant un affaissement de cette dernière.Depuis 1992, l’Antarctique occidental a enregistré, en moyenne, une perte nette de 65 millions de tonnes métriques de glace par an.
Suite à l’article du Monde Magazine, daté du 1er juillet « Le trésor perdu du PCF », j’ai écrit au directeur de rédaction. Voici le contenu de la lettre:
A l’attention de M. le Directeur de rédaction
LE MONDE – M Le Mag
80 Boulevard Auguste Blanqui
75 013 Paris
Monsieur le directeur,
Je sais bien que nous sommes en été et qu’il vous faut cependant remplir les pages de vos journaux. Je sais bien qu’il est devenu aujourd’hui un banal marronnier de se payer la tête du PCF en croyant étriper son histoire. Mais enfin, comme dit le sapeur Camembert, « quand on dépasse les bornes, il n’y a plus de limites ». Et là, dans l’article du Monde Magazine, daté du 1er juillet « Le trésor perdu du PCF », elles ont été allègrement franchies. On pouvait s’attendre à du sérieux, nous n’avons eu que du ridicule et de l’approximatif grotesque ce qui est bien dommage pour la réputation de votre journal. Ce papier ressemble plutôt à une mauvaise copie dans laquelle le potache cherche à épater le correcteur à coups de formules « choc » quand il ne fait qu’étaler son ignorance.
Il serait trop long – et cet article ne le mérite pas – de reprendre point par point erreurs et confusions. Il est en effet comique de voir « La Maison de la pensée française » située « au sein de la cantine de l’usine Renault à Boulogne-Billancourt ». Il est tout aussi bouffon qu’ André Fougeron et Édouard Pignon soient déclarés « peintres officiels du parti communiste français » (ils doivent se retourner dans leur tombe). Il est ridicule de présenter Les Lettres françaises comme « une revue » (vos « prodiges » n’en ont sans doute jamais eu un exemplaire sous les yeux !). Autant de perles auxquelles s’ajoutent quelques touches de mauvaise foi, par exemple rendre le PCF responsable du fait que des éditions luxueuses acquises par des bibliophiles soient aujourd’hui revendues (par qui ?) à prix d’or dans les salles des ventes… Encore un effort, et vos folliculaires pourraient peut-être accuser le PCF du prix exorbitant de certaines affiches de mai 1968 qui se vendent aussi très bien aujourd’hui !
Mais cessons là et venons en au fond. L’article cherche en fait à tourner en ridicule de grands artistes qui voulaient – quelle folie ! – « rendre l’art accessible aux classes populaires » et n’auraient été ainsi que des gogos aveugles sinon stupides, et on parle là, je vous le rappelle, de Fernand Léger, Pablo Picasso, Louis Aragon, Paul Eluard, Pablo Neruda, Édouard Pignon, entre autres. Ceux qui dressent ce réquisitoire semblent tout ignorer de l’histoire du XXe siècle et étalent, à peu de frais, leur mépris pour ces grandes figures ! Pour ce qui concerne l’apport des uns et des autres à l’humanité, la lutte est bien inégale, non ?
Je suis tout autant meurtri que vous ayez publié sans barguigner un papier aussi méprisant pour les ouvriers qui semblent, dans vos colonnes, voués à une bêtise indécrottable. Nous sommes décidément là en plein racisme social, délivré par ceux qui se posent comme « élite » éclairée et donneuse de leçons. Peut-être pourriez-vous leur apprendre qu’Édouard Pignon, né dans une famille de mineurs, fut d’abord ouvrier (galibot, puis manœuvre dans le bâtiment), que Fernand Léger naquit dans une famille de paysans, que etc… Et qu’on n’est pas condamné, notamment grâce à l’action d’un parti comme le nôtre, au déterminisme implacable de ses conditions sociales d’origine. Peut-être encore pourriez-vous leur signifier que bien des villes ouvrières doivent notamment aux communistes leur théâtre, leur cinéma, leur médiathèque, leur salle d’exposition… Et que la fameuse formule d’Antoine Vitez « être élitaire pour tous » est toujours aujourd’hui une excellente définition du combat communiste.
Au milieu de toutes ces fadaises, votre article répand aussi un pseudo-scoop, un peu réchauffé en fait car il a déjà été utilisé dans vos colonnes, mais pour une autre œuvre de Fernand Léger. En 2007, une délégation de la direction du PCF se serait rendue auprès du directeur d’un grand musée d’Art moderne avec l’intention de vendre la tapisserie de Fernand Léger « J’écris ton nom Liberté » qui est évidemment toujours accrochée dans l’immeuble du PCF, place du Colonel Fabien. Ce courageux directeur, qui n’hésite pas à confier à la presse pareille baliverne, souhaite rester anonyme, et on le comprend. Je ne vous demande pas de révéler son nom, car fort légitimement vous protégez vos sources mais je vous mets au défi de donner à vos lecteurs les noms des dirigeants qui composaient cette fantomatique délégation. Là, il ne devrait pas y avoir pour vous de gros problèmes déontologiques, puisque – vos collaborateurs le démontrent – tous les coups sont permis contre le PCF. Mais sachez-le, je dors tranquille !
Une dernière remarque : vos « journalistes » évoquent l’immeuble d’Oscar Niemeyer comme « un vrai bijou de famille entretenu comme une vieille Chevrolet cubaine par les derniers communistes ». On mesure la finesse du style et la hauteur de vue. Mais voilà qui ne va pas faire plaisir au ministère de la culture qui a inscrit l’immeuble au « Patrimoine » et aux dizaines de milliers de visiteurs annuels de ce site dont ils apprécient le geste architectural. Oui, le PCF s’honore de faire vivre ce haut lieu culturel au cœur de la capitale.
Monsieur le directeur, vous connaissez la boutade d’Alexandre Dumas : « J’aime mieux les méchants que les imbéciles, car parfois ils se reposent. » Je vous laisse le soin de choisir la catégorie dans laquelle ranger les auteurs de cet article. Mais dites-leur bien de ma part : nous sommes en été, et surtout qu’ils se reposent… Pour conclure, serait-il excessif de vous demander de présenter des excuses à tous les communistes pour ces fariboles que votre journal a publiées ? Je vous laisse juge.
Une information judiciaire a été ouverte contre le défenseur des migrants. Ressorti libre de sa garde à vue, il est placé sous contrôle judiciaire.
«Nous sommes dans une bataille idéologique dans laquelle tout est bon pour neutraliser Cédric Herrou, le provocateur. » Me Zia Oloumi n’y va pas par quatre chemins : pour l’avocat, le défenseur des migrants est devenu un symbole à abattre. Placé en garde à vue pour la sixième fois de l’année, Cédric Herrou avait été interpellé lundi après-midi en gare de Cannes (Alpes-Maritimes) alors qu’il accompagnait quelque 150 migrants partis déposer leur demande d’asile à Marseille.
Contrairement aux fausses informations « exclusives » véhiculées par l’hebdomadaire d’ultradroite Valeurs actuelles, Cédric Herrou n’a pas été incarcéré, il est ressorti libre du tribunal de Grasse, mercredi soir, après avoir été déféré devant un magistrat puisqu’une information judiciaire a été ouverte contre l’agriculteur pour « aide à l’entrée et à la circulation d’étrangers en situation irrégulière ».
Interdiction de sortir du territoire français
« Avec une information judiciaire, on va enfin pouvoir avoir accès au dossier et bénéficier d’une enquête à charge et à décharge », espère son avocat. L’agriculteur a été placé sous contrôle judiciaire : il a interdiction de sortir du territoire français et de se rendre dans les gares (mais il a l’autorisation de prendre le train, allez comprendre…).
Preuve que la bataille est bien idéologique, Valeurs actuelles affirme également que « les forces de l’ordre ont retrouvé son lieu d’habitation “dans un état lamentable, jonché d’excréments” » et « ont également découvert que Cédric Herrou fournissait de fausses attestations de demande d’asile ». Un tissu de mensonges, selon son avocat : « Cédric Herrou hébergeait, la semaine dernière, 250 personnes, donc sa maison ressemble à un lendemain de fête. » Quant aux fausses attestations, « il s’agit sans doute d’attestations faites par des bénévoles de la Roya citoyenne pour certifier que ces personnes comptaient demander l’asile ».
Rien n’interdit aux demandeurs d’asile de circuler librement en France et si ces 150 personnes (en majorité originaires du Soudan) n’avaient pas encore déposé leur demande (puisqu’elles s’apprêtaient à le faire), la jurisprudence dispose que toute personne qui a émis le souhait de demander l’asile en France est considérée comme un demandeur d’asile. Les 150 migrants arrêtés ont pourtant été expulsés vers l’Italie, « sans voir un avocat, un interprète ou une association ». Ce qui fait dire à Me Zia Oloumi : « On met la lumière sur Cédric Herrou pour mieux cacher ce qui se passe à la frontière franco-italienne, devenue une zone de non-droit. »
Interpellé à Cannes, l’agriculteur Cédric Herrou a été mis en examen pour « aide à l'entrée et à la circulation d'étrangers en situation irrégulière ». « Le but est de le neutraliser », dénonce son avocat. 156 migrants ont été renvoyés en Italie.
Interpellé lundi 24 juillet à Cannes à bord d'un train pour Marseille avec 120 à 156 migrants, pour la plupart soudanais, l’agriculteur Cédric Herrou a été mis en examen mercredi soir pour « aide à l'entrée et à la circulation d'étrangers en situation irrégulière », dans le cadre d’une information judiciaire ouverte à Grasse.
Après 48 heures de garde à vue – sa sixième depuis août 2016 –, le militant est sorti libre du palais de justice avec obligation de pointer toutes les deux semaines à la gendarmerie. Selon son avocat Me Zia Oloumi, son contrôle judiciaire lui interdit également de sortir de France ainsi que de fréquenter gares et parvis de gare. « Le but est de neutraliser Cédric Herrou, de masquer ce qui se passe à la frontière, estime l’avocat niçois. Il était monté dans le train à Nice avec les migrants dans l’idée de peut-être filmer ce qui se passait à la gare de Cannes, notamment les contrôles policiers. »
Le 6 juillet, dans une vidéo tournée à la gare de Menton-Garavan, Cédric Herrou et d’autres militants de l’association Roya citoyenne avaient montré comment les CRS expulsaient quotidiennement des mineurs étrangers non accompagnés par le premier train en direction de l’Italie, au mépris du droit français et international. Le Défenseur des droits, qui enquête depuis plusieurs mois sur la situation de ces mineurs à la frontière franco-italienne, s’en était ému auprès du ministère de l’intérieur.
Depuis la condamnation, le 31 mars 2017, du préfet des Alpes-Maritimes pour « atteinte grave et manifestement illégale au droit d’asile », les militants de Roya citoyenne ont trouvé un modus vivendi avec les gendarmes locaux pour permettre aux migrants qui arrivent dans la vallée d’aller déposer leur demande d’asile à Nice. Chaque semaine, des centaines de migrants prennent le train pour Nice à Breil-sur-Roya, avec des billets payés par l’association et sous contrôle des gendarmes, qui dressent la liste des partants. À leur arrivée à Nice, des militants niçois les accompagnent à la Plateforme d’accueil des demandeurs d’asile (PADA) pour enregistrer leur pré-demande d’asile.
Accompagnés de militants de "Roya Citoyenne", environ 130 demandeurs d'asile sont arrivés en gare de #Nice06 ce lundi matin. pic.twitter.com/SKAUIcTSpi
Selon un courriel envoyé le 20 juillet par l’association Forum réfugiés, à qui l’État a confié la gestion de ce premier accueil, 961 demandeurs d’asile accompagnés par Roya citoyenne ont ainsi été reçus depuis le 1er mai 2017. Mais rares sont ceux qui se présentent effectivement au rendez-vous obtenu à la préfecture des Alpes-Maritimes. Beaucoup préfèrent fuir cette région inhospitalière, où les hébergements prévus sont insuffisants. Et alors que la loi prévoit un rendez-vous dans les trois jours, à Nice, le délai est de plus d’un mois et demi.
« La grande majorité de ces 961 personnes ne s’est pas rendue à sa convocation à Nice », écrit Forum réfugiés, qui souligne que « la première motivation serait de s’établir dans un autre département. » Débordée, l'association a décidé de ne plus enregistrer que les étrangers souhaitant effectuer leur demande dans les Alpes-Maritimes. « Nous avons eu à accueillir autant de personnes en un jour que nous sommes censés en accueillir en un mois », explique Jean-François Ploquin, directeur de Forum réfugiés.
Depuis le rétablissement des contrôles à la frontière franco-italienne en novembre 2016, à la suite des attentats de Paris, cette vallée des Alpes-Maritimes est devenue un point de passage obligé pour les migrants souhaitant rejoindre la France. Ces contrôles aux frontières, dérogeant aux règles de l'espace Schengen, sont théoriquement motivés par des raisons antiterroristes, mais servent surtout à lutter contre l'immigration. La dernière dérogation exceptionnelle étant arrivée à terme mi-juillet, les autorités françaises ont notifié à l'Union européenne une prolongation jusqu'au 31 octobre – fin prévue de l'état d'urgence –, nous a indiqué la Commission européenne.
Le week-end dernier, quelque 220 migrants, qui avaient passé la frontière à pied par les montagnes, étaient hébergés sous des tentes et dans des caravanes sur le terrain de Cédric Herrou, à 7 kilomètres de l’Italie. Visible de la voie ferrée, son habitation est la première avant le village de Breil-sur-Roya.
Lundi 24 juillet, le député européen José Bové, en visite dans la vallée, et plusieurs militants les ont accompagnés vers 9 heures à la gare de Breil-sur-Roya, avec l’accord des gendarmes qui ont enregistré leurs noms. « Beaucoup de réfugiés venaient d’arriver dans la vallée, il n’y avait pas d’autre solution, souligne José Bové. Tout cela s’organise en parfaite concertation avec les autorités, qui tiennent un double langage. » Tout le monde ne pouvant entrer dans le premier train, un premier groupe d’une centaine d’étrangers est arrivé vers midi à Nice, en compagnie de Cédric Herrou et de José Bové, et a pu se rendre à la PADA, après un pique-nique dans un petit parc proche de la gare.
Les migrants devaient se diriger le parc D'Estienne-d'Orves de #Nice06. Ils se sont finalement installés place Mozart. pic.twitter.com/TcZnjsofoQ
Dès leur arrivée à Nice, Christian Estrosi, maire LR de la ville, et Éric Ciotti, président LR du Conseil départemental, ont rivalisé d’empressement pour leur faire fermer l’accès des jardins publics. Le premier a accusé à tort Cédric Herrou d’avoir « aujourd’hui aidé 200 migrants à franchir la frontière », et a indiqué avoir saisi le procureur de la République pour « détournement » de la procédure d’asile. Le second a dénoncé« cette nouvelle intrusion dans Nice de ces migrants en situation irrégulière, aidés par des associations qui profitent de cette misère humaine ».
Le deuxième groupe d’environ 120 étrangers n’est arrivé que vers 16 h 30, après la fermeture de la PADA, à cause de retards liés aux incendies. « Les réfugiés voulaient déposer leur demande d’asile dans d’autres villes comme la loi les y autorise, notamment à Nantes où certains avaient des connaissances, explique José Bové. Cédric Herrou est monté dans le train pour Marseille avec eux. » Mais tous ont été interpellés à l’arrêt suivant, à la gare de Cannes. Les étrangers ont été reconduits vers 22 heures, « dans trois bus », vers les préfabriqués de la police aux frontières (PAF) de Menton, dont le caractère illégal a récemment été confirmé par une décision de justice.
« Ils sont restés toute la nuit dans ces locaux puis ont été renvoyés en Italie mardi matin, sans différence entre majeurs et mineurs, affirme Me Zia Oloumi. On a des témoignages de réfugiés refoulés à Vintimille qui parlent de colonnes de personnes à qui on remettait des refus d’entrée. Ils n’ont pas eu d’interprète, ni d’avocat. Les autorités ne voient plus des personnes humaines avec des droits, mais des masses d’individus. »
Jean-François Ploquin, directeur général de Forum réfugiés, confirme que les migrants ont le droit « dans un délai de 120 jours, de demander l’asile dans n’importe quelle préfecture française » et qu’il n’est « pas légal de les interpeller s’ils souhaitaient effectivement demander la protection de la France ». « Alors qu’elles se trouvaient déjà sur le territoire français et souhaitaient déposer leur demande d’asile dans différentes villes de France, ces personnes, exilées majoritairement du Soudan, ont été ramenées à la frontière et remises aux autorités italiennes, en violation des textes européens et internationaux », ont dénoncé plusieurs associations, dont Amnesty International, dans un communiqué.
Saisir l'Union européenne
Quant à Cédric Herrou, les poursuites viseraient le fait d’avoir accompagné ces migrants en train de Nice (Alpes-Maritimes) à Cannes (Var). Contactée, Fabienne Atzori, procureure de la République de Grasse, a refusé de nous répondre. « La procureure ne communique pas sur cette affaire », nous a indiqué son cabinet. « On lui reproche d’utiliser les moyens légaux de demande d’asile pour permettre à des migrants de circuler, explique son avocat, Me Zia Oloumi. Les policiers lui reprochent d’avoir aidé près de 1 000 personnes à venir à Nice dans le cadre de ce protocole informel avec la gendarmerie, mais seule une quarantaine auraient effectivement déposé une demande d’asile à Nice. » Selon lui, plusieurs ordinateurs de bénévoles ont été saisis lors d’une perquisition dans sa ferme, mais aucune « fausse attestation de demande d’asile », contrairement à ce qu’avait écrit le site de Valeurs actuelles, qui avait également affirmé, à tort, que l’agriculteur avait été incarcéré.
Nous avons pu consulter le « faux » en question : il s’agit en fait d’une fiche à l’en-tête de l’association Roya citoyenne remise aux migrants au départ pour Nice. Elle rappelle la loi, qui oblige les services de police à orienter « vers l’autorité compétente » toute personne souhaitant demander l’asile (lire l'article de loi en question). « Mais ce processus n’est pas respecté par les policiers, qui ne sont souvent pas au courant et pas formés », avance Me Zia Oloumi. Dans un rapport publié en avril, Forum réfugiés indiquait que « les étrangers interpellés aux points de contrôle frontaliers ne sont pas informés de leur droit à demander l’asile », et que ceux « qui demandent l’asile auprès des autorités françaises à la frontière – parfois de façon très explicite, par écrit et en français – ne sont pas orientés vers les instances permettant l’accès à la procédure ».
Déjà poursuivi par le parquet de Nice, Cédric Herrou a été condamné le 10 février 2017 à 3 000 euros d’amende avec sursis pour avoir aidé des étrangers en situation irrégulière à franchir la frontière italienne. Soulignant la « situation globale d’indignité et de détresse dans laquelle se trouvent nécessairement les migrants, isolés […] démunis de l’essentiel », le tribunal correctionnel de Nice l’avait relaxé pour les autres faits, en faisant jouer l’exemption humanitaire. « Il ne saurait être reproché à quiconque de les avoir recueillis, logés, nourris, écoutés et entourés, afin de les restaurer dans leur dignité », indiquaient les juges niçois dans leur décision écrite.
L’immunité, créée en 2012 par le gouvernement socialiste, porte uniquement sur l’aide au séjour et non sur l’aide à la circulation : il est légal d’héberger un migrant sans contrepartie, pas de l’emmener en voiture jusqu’à chez soi. Avec bon sens, le tribunal niçois avait étendu cette immunité aux faits d’aide à la circulation : « Pour apporter […] un hébergement provisoire, Cédric Herrou a nécessairement dû véhiculer les migrants pris en charge sur le sol français. » Lors de l’audience en appel à Aix-en-Provence, les juges s’étaient montrés bien moins compréhensifs. Leur décision tombera le 8 août.
C’est la première fois qu’un juge d’instruction est saisi le concernant. Son avocat voit dans l’ouverture de cette information judiciaire l’occasion de faire la lumière sur les violations du droit dénoncées à plusieurs reprises à la frontière franco-italienne par des ONG comme Amnesty International.
Lundi midi, José Bové, en tant qu'eurodéputé, a pu visiter les préfabriqués de la PAF à Menton. Exceptionnellement, ils étaient vides. « Les policiers de la PAF ont reconnu qu’ils dépassaient les 4 heures de détention prévues par la loi, mais que ce n’était pas de leur faute car les autorités judiciaires italiennes ne répondaient qu’au compte-gouttes », dit l’élu.
À la gare de Menton-Garavan, Cédric Herrou, José Bové et Martine Landry, d’Amnesty international, ont constaté que deux mineurs étrangers étaient censés reprendre, contre leur gré, le train en direction de l’Italie. Ils ont voulu aider l’un d’eux à sortir de la gare mais « les CRS lui ont sauté dessus pour l’embarquer dans un fourgon et m’ont ceinturé par derrière », raconte José Bové, qui dénonce « un abus d’autorité sur ce jeune ». Il a également constaté la présence, « au premier étage de la gare, d’un centre de rétention clandestin, car non recensé ». Le député européen veut saisir, en septembre prochain, l’Union européenne « pour faire constater ces manquements de la France au droit européen ».
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Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste.
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