Une super énergie déployée ensemble pour le grand tri des Z'utopistes au local du PCF Morlaix. Ce samedi 17 et dimanche 18 février, environ 25 personnes de toute génération ont participé au Tri des vêtements pour les réfugiés et les associations venant en soutien aux précaires dans la bonne humeur et une belle fraternité. Bravo aux bénévoles des utopistes pour leur bel engagement collectif, la belle entente qu'ils ont créé entre eux, et leur travail énorme. Nous sommes heureux d'avoir pu les soutenir le temps d'un week-end, et on va continuer.
Le Samedi 17 février, le Ouest-France a publié notre communiqué sur le conflit au Crédit Mutuel Arkéa.Merci au journal de faire son travail pour l'expression du pluralisme politique
Arkéa: les communistes contre le "divorce"
La fédération du Finistère se positionne sur la situation du CMB Arkéa et le conflit qui pourrait mener à "un divorce qui, pour nous, aurait des conséquences très dangereuses pour les salariés et la pérennité de l'activité". Les communistes se disent "très attachés aux valeurs du mouvement mutualiste". Selon eux, "la scission comporte des risques et des interrogations multiples". Ils évoquent ainsi le risque de la dégradation de la note du CMB-Arkéa, ce qui pèserait sur le coût des ressources; le risque de voir exclues des fonds propres les parts sociales qui y sont actuellement intégrées; la perte de la "marque" Crédit Mutuel, et pour quel statut bancaire: mutualiste, coopératif, banque classique...? ; l'abandon de la solidarité nationale interfédérale. Les élus communistes soulignent aussi que "la crainte la plus importante à nos yeux, ce sont les interrogations sur les conséquences à terme sur les salariés, leurs conditions de travail et leurs emplois". Pour conclure, ils indiquent que "si les craintes que nous ne sommes pas les seuls à redouter viennent à se réaliser, les dirigeants du CMB Arkéa, et singulièrement son président, porteraient une très lourde responsabilité".
Ouest-France, pages Finistère, samedi 17 février 2018
Fédération du Finistère du Parti Communiste Français
5 rue Henri Moreau – 29 200 BREST – 06 20 90 10 52
CMB-ARKEA:
un divorce qui doit être évité car il aurait des conséquences plus que périlleuses!
Communiqué du PCF Finistère - 16 février 2018
La volonté exprimée par les dirigeant du CMB-ARKEA et de la fédération du CMB de quitter la confédération Nationale du Crédit Mutuel s’affirme de jour en jour. Les administrateurs des caisses locales vont avoir à exprimer leur choix.
Les communistes qui ont été à l’origine de la création de plusieurs fédérations de Crédit Mutuel (Marseille, Valence, Angoulême), sont très attachés aux valeurs du mouvement mutualiste et souhaitent attirer l’attention de chacun(e) sur les enjeux du conflit en cours.
La scission comporte des risques et des interrogations multiples :
-Risque de dégradation de la note du CMB-ARKEA , comme Standars & Poors vient de le signifier, ce qui pèserait sur le coût des ressources, voire sur le ratio prudentiel à moyen terme
-Risque de voir exclues des fonds propres les parts sociales qui y sont actuellement intégrées
-Perte de la « marque » Crédit Mutuel qui est la banque préférée des français, pour quel statut bancaire (mutualiste, coopératif, banque classique…?
-Abandon de la solidarité nationale interfédérale
Enfin, une crainte importante à nos yeux concerne les interrogations sur les conséquences à terme sur les salariés, leur conditions de travail et leurs emplois.
Les craintes que nous exprimons sont également exposées dans les conclusions du rapport commandé par la Direction Générale du Trésor et la Banque de France à Christian Noyer, gouverneur honoraire de la Banque de France : « Le maintien de l’unité serait nettement préférable, tant pour la stabilité de l’ensemble du monde bancaire mutualiste et la crédibilité du modèle mutualiste eu sein de l’union bancaire, que d’un point de vue prudentiel dans la mesure ou la viabilité d’ARKEA dans un scénario de séparation reste à vérifier »
Le Crédit Mutuel, composé de multiples caisses départementales ou régionales a mis des décennies avant de trouver son unité nationale. Un retour en arrière aurait un effet désastreux sur l’image de cette « famille » mutualiste en risquant de fragiliser fortement les composantes essentielles et historiques que constituent le Crédit Mutuel de Bretagne et le CMB-ARKEA.
D’ores et déjà, la fédération du Crédit Mutuel Massif Central, qui fait partie d’ARKEA, jusqu’à présent, s’est désolidarisée de la démarche engagée.
Si les craintes que nous ne sommes pas les seuls à redouter venaient à se réaliser, les dirigeants du CMB-ARKEA, et singulièrement son Président, porteraient une très lourde responsabilité.
Il n’est jamais trop tard pour renouer un dialogue et entrer en négociation sur le champ d’autonomie qui pourrait être reconnu au CMB-ARKEA, ce que n’interdisent pas les statuts de la CNCM. La nomination d’un médiateur pourrait faciliter cette démarche, le gouvernement ne pouvant se désintéresser d’un sujet aussi brûlant.
Après une année 2017 à fort déficit pluviométrique en France, plusieurs régions viennent de subir des inondations. Comme les sécheresses, ces pluies sont des conséquences du réchauffement climatique. Un degré Celsius d'augmentation de la température terrestre augmente de 7 à 8 % la quantité de vapeur d'eau accumulée dans l'atmosphère. Mais on ne sait guère où et quand les pluies vont tomber en grandes quantités. Pendant qu'il pleut en France, l'Afrique du Sud connaît sa pire sécheresse depuis un siècle et ce n'est pas le seul pays dans ce cas. On vient d'apprendre que l'année 2016 a vu les émissions de gaz à effet de serre (GES) atteindre 463 millions de tonnes en France. Elles ont dépassé de 3,6 % l'objectif initialement fixé. C'est aussi le cas de l'immense majorité des pays dans le monde, à commencer par l'Union européenne. Le réchauffement va donc continuer.
En France, les transports sont responsables de 29 % des émissions de CO2. Pour les réduire, il nous faudrait plus de transports en commun, moins de voitures et de camions sur les routes. Mais, faute d'avoir une politique d'aménagement pensée par les décideurs politiques, les spéculateurs et les bétonneurs aménagent les pôles d'activité autour des grandes métropoles en fonction de leurs intérêts. Comme habiter au coeur des villes leur coûte trop cher, les salariés modestes doivent se concentrer dans de lointaines banlieues et les accédants à la propriété vont en zone rurale pour avoir un pavillon.
Pendant qu'ici il pleut, l'Afrique du Sud connaît sa pire sécheresse depuis un siècle et sa première pénurie d'eau.
Avec la mise en place des nouvelles régions et leurs capitales régionales conçues comme des « pôles de compétitivité », nos gouvernants créent les conditions pour une augmentation durable des émissions de CO2 imputables aux transports. En 2015, selon une étude de l'Insee parue en 2017, 80 % des 900 milliards de kilomètres, voyageurs effectués en France ont été faits en voiture, 11 % en train, 8 % en car et bus, 2 % en avion. 87 % des tonnes de marchandises transportées la même année l'ont été en camion, 11 % par voie ferrée et 2 % par voie fluviale.
Le manque d'eau en 2017 a aussi augmenté les émissions de CO2 en France, car une végétation asséchée capte peu de carbone, tandis que les incendies en libèrent. Cette année, la seule réparation des dégâts des eaux conduira à faire des travaux qui seront aussi émetteurs d'un surcroît de CO2. Ces différents événements nous montrent que le climat va être l'enjeu majeur de ce siècle. C'est ce que votre serviteur explique depuis près de trois ans dans cette chronique ainsi que dans deux ouvrages parus sur le sujet en 2015 et 2017.
Lors des conférences-débats que je tiens en Île-de-France comme en province, j'ai pu observer un intérêt croissant sur ces sujets. Je reste donc disponible pour continuer. Il suffit pour cela de me contacter à l'adresse mail ci-dessous. En cette année du bicentenaire de la naissance de Marx et du congrès extraordinaire du PCF en novembre, le climat mérite d'être mis au cœur de l'actualité.
Désigné par une minorité des classes moyennes et supérieures redevables de l’impôt, le chef de l’État pousse l’érosion des principes républicains jusqu’aux limites de notre monarchie élective. Et si nous approchions de 1848 ? Et s'il y avait chez Charles Maurras comme du proto-Macron ?
Le moment Macron dévoile, jour après jour, son prodigieux vice caché. La présidentielle de l’an passé avait donné l’impression que, face à l’incarnation du pire – Marine Le Pen –, l’élu du second tour sauvait la démocratie en danger. Or son action consiste, insensiblement, à comprimer nos acquis politiques et sociaux en favorisant une atrophie démocratique des plus retorse.
Emmanuel Macron s’inscrit dans un reflux qui affecte l'ensemble des régimes représentatifs occidentaux. Ceux-ci tournent le dos aux Lumières, au progrès et aux conquêtes sociales, en se livrant à des variantes nationales puissamment caricaturales : de Viktor Orbán en Hongrie à Donald Trump aux États-Unis d’Amérique, en passant par le gouvernement de Londres issu du Brexit. Celui-ci file à l’anglaise vers le smog ; Trump sème le chaos à l’américaine ; Macron échafaude une régression à la bonne franquette…
Dans l'Hexagone et ailleurs – n'oublions pas la Guyane ni les îles éparpillées –, le tableau est sombre : destruction programmée des services publics, de la santé à l'audiovisuel, des transports à l'université bientôt subordonnée au capital non plus culturel mais monétaire. L'État favorise un grignotage de plus en plus glouton opéré par les seuls plus riches comme en témoigne, de façon métaphorique, le littoral abandonné aux appétits bétonneurs de particuliers terrassant l'intérêt général.
L'involution qu’impose aux démocraties le capitalisme mondialement effréné, consiste à liquider toute culture d’égalité. Or celle-ci repose sur le suffrage universel, qui eut cependant le plus grand mal à triompher (masculin dans les faits avant que d’être également féminin). Ce suffrage universel s’avère aujourd’hui fragile. Et menacé dans ses fondements encore mal assurés, tant ne participent plus aux élections que les couches sociales contribuant à l'impôt. Sont de plus en plus abandonnés au bord des urnes des pans entiers de la société, traités en rebuts économiques et civiques. Comme jadis, mais sans justification légale encombrante parce que mobilisant les peuples…
Au Royaume-Uni, tributaire de son aristocratie terrienne, il fallut attendre février 1918 pour que la loi sur la représentation populaire (Représentation of the People Act 1918) permît aux hommes de voter sans qu'un tel droit découlât de leur état de propriétaire. Cela durera-t-il, alors qu’un regain de thatchérisme voue les pauvres aux gémonies ? Aux États-Unis d’Amérique, prisonniers d’une guerre de Sécession jamais résolue, le vote des Noirs tient de la bataille inachevée – en dépit de la loi de 1965 (Voting Rights Act), sur laquelle Donald Trump entend revenir, tant il multiplie les restrictions pour tenir encore davantage éloignées des machines à voter les populations afro-américaines.
En France, c’est en 1848 que prit fin le suffrage censitaire, qui avait jusqu’alors permis de s’exprimer aux seuls « citoyens actifs » (payant un certain montant d’impôt), contrairement aux « citoyens passifs » jugés indignes de donner leur avis. Or tout porte désormais à croire qu’Emmanuel Macron, avec talent et doigté, envisage de redonner du… cens.
Dans un essai remarquable publié voilà quarante ans, Le Cens caché, le sociologue Daniel Gaxie écrivait : « Accordé à tous, après qu’il eut été longuement et difficilement conquis, le droit de vote est devenu l’élément essentiel du credo démocratique […] Faisant fortune de toutes les nécessités, les élites dirigeantes se sont réemparées du droit de suffrage dont elles s’étaient si longtemps et si jalousement réservé l’usage pour justifier un pouvoir qu’elles n’ont jamais cessé d’exercer. »
Et Daniel Gaxie de conclure, en disciple de Pierre Bourdieu : « Si les conditions actuelles de fonctionnement du champ politique constituent un élément essentiel de la dissimulation des rapports sociaux, elles en permettent également l’expression. Les élections, comme les sondages, sont à la fois un instrument d’occultation et une manifestation confuse, déformée, de la lutte des intérêts […] Et quand la lutte pour la conquête et l’exercice du pouvoir politique est objectivement réservée à un petit nombre d’agents spécialisés, les autres ne peuvent assister – sauf exception – qu’en spectateurs à une activité symbolique dont ils se trouvent écartés […] Le champ politique favorise ainsi, par sa seule existence, le maintien de la domination politique des catégories dominantes […] L’existence même d’un champ politique est probablement la contribution la plus cachée, donc la plus décisive, apportée à la reproduction de leur domination. »
Longtemps, l’égalité politique a donc été une égalité formelle cohabitant avec l’existence d’une société réellement inégalitaire. Désormais, tout se passe comme si le semblant d'égalité était de trop, dans nos sociétés inégalitaires qui s'assument et se revendiquent comme telles. Pour le coup, une lutte s'engage sous nos yeux pour rétrécir le suffrage universel aux seules classes moyennes et supérieures, là où son élargissement vers les couches populaires avait rythmé les combats et les débats politiques du XIXe siècle.
Si bien que la courbe d'Emmanuel Macron va croiser celle de François Guizot, pièce maîtresse du pouvoir orléaniste, qui répliquait aux partisans de l'abaissement ou de la fin du cens (celui-ci, fixé à 200 F, limitait jusqu'en 1848 le corps électoral à 240 000 individus mâles pour un pays de 36 millions d’habitants) : « Enrichissez-vous par le travail et par l’épargne et vous deviendrez électeurs. » La postérité n'a retenu que l'impératif, cet « enrichissez-vous » auquel Emmanuel Macron semble faire écho, en janvier 2015, dans un entretien aux Échos : « Il faut des jeunes Français qui aient envie de devenir milliardaires. »
Emmanuel Macron, en nos temps de recul démocratique, ainsi que François Guizot, en cette époque de progression que fut le XIXe siècle, manifestent la même volonté : compenser le principe d'égalité – héritage pesant de la Révolution française – par un impératif de sélection sociale. Dans ses Mémoires, Guizot revient sur le procès qu'il fit toujours à la démocratie : « Elle n’a pas su, elle n’a pas voulu admettre cette variété, cette hiérarchie des situations qui se développent naturellement dans l’état social et qui admettent parfaitement le mouvement ascendant des individus et le concours entre eux selon le mérite. »
Ce « mouvement ascendant », Emmanuel Macron s'en est fait le chantre en utilisant la métaphore du « premier de cordée ». C'était en octobre 2017, sur TF1 et LCI, lors de son premier entretien télévisé consenti, en France, depuis son élection : « Pour que notre société aille mieux, il faut des gens qui réussissent. Et il ne faut pas être jaloux d'eux. Il faut dire “c'est formidable !” Je crois à la cordée. Il y a des femmes et des hommes qui réussissent dans la société, parce qu'ils ont des talents – la réussite n'est d'ailleurs pas uniquement monétaire ou financières (il y a des gens qui réussissent dans les arts, dans des associations ou dans leur vie familiale). Et je veux qu'on célèbre toutes ces réussites. Il y en a d'autres pour qui la vie est plus dure, je veux les aider, par leur travail, à réussir ; et d'autres qui sont fragiles, nous les protégerons. Mais si on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée, c'est toute la cordée qui dégringole. »
Une telle défense des principes capacitaires rejoint la pensée de Guizot, pour qui on ne pouvait être un citoyen apte à infléchir la vie de la nation sans faire montre d'aptitudes, à conquérir le plus souvent – notons qu'une telle élasticité tranchait d'avec l'immobilisme conservateur qui se voulait garant d'un ordre immuable. Place non plus aux héritiers permanents, mais aux méritants en marche !
François Guizot mettait ainsi en avant « l’admirable vertu de notre gouvernement qui provoque sans cesse l’extension de cette capacité, qui va semant de tous les côtés les lumières politiques, l’intelligence des question politiques, en sorte qu’au moment même où il assigne une limite aux droits politiques, il travaille à déplacer cette limite, à l’entendre, à la reculer et à élever ainsi la nation entière ».
Le jour viendra-t-il où nous découvrirons qu'Emmanuel Macron se situe à rebours de François Guizot – celui-ci songeait à l'intelligence en recommandant de s'enrichir, alors que celui-là pense aux biens matériels en préconisant de se cultiver ?…
« L’inégalité protectrice »
Parce que le XIXe siècle était dans un mouvement de conquêtes démocratiques, Guizot ne faisait que retarder l'égalité en la conditionnant aux capacités. Il s'avérait donc plus lucide que la postérité ne l'a voulu considérer, comme l'a démontré Pierre Rosanvallon. En revanche (de l'histoire !), ce XXIe siècle marquant une nette tendance aux régressions démocratiques, Emmanuel Macron, en indexant l'égalité sur les aptitudes à l'excellence, rejoint la petite arrière-garde qui toujours clama que les masses n’ont pas les lumières suffisantes pour se prononcer sur les affaires publiques.
Les remarques acerbes du candidat puis du président Macron allaient le poser là, au sujet de ces populations « illettrées », qui regorgent de « fainéants », « irréformables » ; tous ces « gens qui ne font rien », sinon « foutre le bordel »…
Au premier rang de la cohorte se défiant du peuple, au point de ne jamais le considérer comme adulte et moteur mais toujours comme mineur et assisté, a longtemps figuré Charles Maurras. Sa préface à Mes idées politiques (Fayard, 1937) comportait un premier chapitre qui s'intitule : « L'inégalité protectrice ». Obnubilé par un ordre hiérarchique prétendument au service de la société, le théoricien monarchiste y prônait le corporatisme – ne doutons pas que les accords de branche de la « loi sur le travail » de l'été 2017 lui sembleraient un premier pas en arrière prometteur…
Maurras rejetait en ces termes la démocratie : « Il lui faut maintenir la guerre sociale : sa guerre. Elle exclut par définition tout régime corporatif, car c'est un régime de paix. L'ouvrier qui est tenté est un renégat ; le patron qui y incline, un hâbleur [...] La démocratie sociale prêche un égalitarisme contre nature d'après lequel le fort doit insulter au faible, et la faible haïr le fort. » Le fondateur de L'Action Française se ralliait ainsi à la maxime de coopération sociale articulée par Auguste Comte dans son Catéchisme positiviste : « Dévouement des forts aux faibles ; vénération des faibles pour les forts. » Le président Macron ne semble pas loin d'en prendre de la graine…
Partisan d'une présidence « jupitérienne », confessant « j'assume la verticalité » à propos de son mouvement En Marche! nanti de ses initiales (armoiries devenues !), M. Macron affirmait, en juillet 2015, à l'hebdomadaire Le 1 : « Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n'est plus là !
«On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu. »
Le dossier monarchien de M. Macron s'alourdit encore si l'on se souvient de son ode à Jeanne d'Arc le 8 mai 2016 à Orléans (« Comme une flèche […] sa trajectoire est nette, Jeanne fend le système, elle brusque l’injustice qui devait l’enfermer [...] Jeanne se fraye un chemin jusqu’au roi ») et si on la compare à ces lignes de Maurras dans Jeanne d'Arc, Louis XIV, Napoléon ( Flammarion, 1937) : « Son sens de l'ordre est tel qu'elle a volé droit au sommet ! Point de chef, point de peuple ! Point de Roi, point de France ! »
La prose de Charles Maurras apparaît comme du proto-Macron, à mesure que celui-ci se laisse tenter par les délices du pouvoir absolu, en provincial grisé par sa conquête de Paris, flanqué de sa femme devenue reine d'un quinquennat. Balzac eût croqué avec ravissement ce couple parvenu au sommet après que monsieur eut rédigé son opuscule titré d'une antiphrase impudente, Révolution, dans la propriété du sieur Fabrice Luchini aux Portes-en-Ré !
Mais la satire cède le pas à l'inquiétude quand on lit, sous la plume de Maurras, dans Dictateur et Roi (1928), ces mots que nous imaginons déjà sortis de la bouche macronnienne :
« Nous avons un gouvernement républicain et une administration monarchique : le bien public exige que cet ordre paradoxal soit renversé. L'administration doit être républicaine, puisqu'elle doit servir le public ; le gouvernement, monarchique, puisqu'il doit gouverner. Ce qui importe, en effet, à la vie des administrés, c'est la liberté ; ce qui importe à la vie politique d'une nation, c'est l'autorité, condition de l'esprit de suite, de la décision et de la responsabilité. » Le tout se résume dans cette synthèse claquante, qui ne déparerait pas chez le huitième président de la Ve République : « L'autorité en haut, en bas les libertés. »
En France, les politiques impérieuses et cassantes ont souvent valu de cuisants déboires à leurs promoteurs. François Guizot, muré dans son intransigeance de 1847, fut renversé par la campagne des banquets. Celle-ci aboutit à l'ébrouement de février 1848, juste après l'interdiction à Paris d'un de ces festins démocratiques capables, au moment des toasts, de faire vaciller les plus hauts sommets peuplés des plus vives intelligences – cependant gâtées par l'exercice du pouvoir au point de finir absorbées dans leurs ténèbres.
Guizot tempêta contre « les passions ennemies ou aveugles ». Mais la cécité était de son côté. Lamennais l'avait prédit dès 1843 : « C'est Guizot qui doit conduire la monarchie de Louis-Philippe à son dernier gîte. Il est né fossoyeur. »
Ces temps de recul que nous vivons sont peut-être propices à remettre sur le tapis la question que soulevait le grand historien Ernest Labrousse en 1948, lors du centenaire de l'affranchissement quarante-huitard : « Comment naissent les révolutions ? » Labrousse, pour évoquer le passage toujours mystérieux, déroutant et imprévisible de la crise sociale à la crise politique, avait eu cette phrase sibylline et synthétique. Elle a de quoi nous laisser tous songeurs, du chômeur au président Macron, 170 ans après février 1848 : « Les révolutions se font malgré les révolutionnaires. Alors que l’événement est là, les gouvernements n’y croient pas. Mais le “révolutionnaire moyen” n’en veut pas. » (1)
(1) Cité par Vincent Robert dans Le Temps des banquets. Politique et symbolique d’une génération (1818-1848), sa thèse passionnante (Publications de la Sorbonne, 2010, 432 p., 38 €).
Êtes-vous pour ou contre la réforme du bac dévoilée par Jean-Michel Blanquer ?
Olivier Dartigolles :M. Blanquer est présenté comme un technicien, un pragmatique. En fait, c’est un vrai idéologue qui porte un projet très régressif pour l’école. Ma génération avait la possibilité d’avoir un imaginaire qui n’était pas bridé, les enfants des catégories populaires pouvaient dire :« Je vais être professeur, chirurgien, mathématicien. »Avec la réforme du bac mais aussi la sélection au lycée et à la fac, les gamins des milieux populaires ne pourront plus accéder au métier de leur choix. Cette réforme du bac organise le tri social.
Les parlementaires communistes effectuent un « tour de France » des hôpitaux. Que proposez-vous pour l’hôpital ?
Olivier Dartigolles :L’hôpital public est en train de crever ! Les fermetures de services, la fusion d’hôpitaux, la tarification à l’acte, l’épuisement des personnels… Il faut un moratoire sur les fermetures, un financement pour l’hôpital public et un plan de recrutement pour le personnel.
Faut-il mieux organiser l’islam en France ?
Olivier Dartigolles :Vouloir organiser un islam de France est un paravent pour signifier que le problème serait l’islam. La stigmatisation de cette religion nous emmène vers le pire. Les amalgames entre ceux qui vivent leur foi et les terroristes de Daech sont insupportables.
Le PCF se tient aux côtés des Kurdes. Quelle est la suite à donner au conflit en Syrie ?
Olivier Dartigolles :Les combattants les plus courageux face à Daech étaient kurdes. Il est insupportable que la France puisse avoir une parole de solidarité envers eux et ne rien faire face à l’oppression frappant les forces démocratiques kurdes, organisée par le président turc, Recep Tayyip Erdogan.
Après ce qui s’est passé dans l’enclave d’Afrin (Syrie), la France aurait dû élever la voix, parler fortement et clairement pour dire que cette répression n’a que trop duré. Le silence de la diplomatie française est une honte. À un moment donné, il faudra mettre autour de la table l’ensemble des acteurs régionaux pour trouver une stratégie allant vers un règlement politique.
L'éditorial de Patrick Apel-Muller. Tout dans le rapport Spinetta respire l’abandon.
Il en a fallu des catastrophes ferroviaires, des grandes grèves cheminotes, des scandales retentissants pour que la nation se décide à la nationalisation. En dépit des politiques d’austérité ou des injonctions de la Commission de Bruxelles, la SNCF a résisté et fait encore bonne figure quant au service qu’elle offre, comparé à celui des chemins de fer britanniques, privatisés. Le gouvernement enclenche donc une incroyable marche arrière vers les machines à vapeur des appétits privés et de la concurrence sur les portions rentables. Les petites lignes ? Vouées à la fermeture, et les territoires desservis au désert, vaguement sillonnés par des cars lorsqu’ils sont profitables. Le TGV ? Condamné au surplace et son extension, abandonnée. Le fret ferroviaire ? Relégué au rang de filiale, délaissé au profit du transport routier polluant et dangereux. Les gares ? Celles qui resteraient ouvertes seraient bradées à une société anonyme. Le réseau ? Rabougri, il ne serait désendetté que pour être offert à une SA et privilégierait seulement la modernisation des lignes autour des grandes métropoles…
Les rapports ainsi commandés par le pouvoir ne sont pas de simples études. Ils sont des feuilles de route, des plans de marche pour le rail. L’extinction du statut de cheminot ou l’obligation faite aux agents d’accepter de nouvelles affectations sous peine d’être traités comme démissionnaires sont l’accompagnement, naturel en quelque sorte, du mépris des besoins des voyageurs. Emmanuel Macron veut que des grands capitaux croissent à grande vitesse le long des voies. Quitte à ce que l’intérêt général reste à quai. Voilà à quoi se résume le « en même temps » ! Pour faire reculer le gouvernement, une nouvelle bataille du rail devra associer le personnel de la SNCF et les usagers qui ne veulent pas être réduits au rang de clients.
C'est la sortie en France, chez Gallimard, du grand roman de l'auteure le Ministère du Bonheur suprême, dans lequel elle passe au crible le nationalisme hindou, la misère endémique et les violences en tout genre qui règnent dans « la plus grande démocratie du monde ».
Arundhati Roy, née en 1961 à Shillong (Inde), vit à Delhi. Son roman le Ministère du Bonheur suprême vient de sortir en français chez Gallimard. Pour l'occasion, chance nous est donnée de rencontrer cette grande dame à la présence lumineuse. En dehors de la littérature proprement dite, elle est connue en Inde pour ses fortes prises de position en faveur des droits humains, de l'écologie et de l'altermondialisme, tous sujets sur lesquels elle a publié des essais.
Elle a aussi travaillé pour le cinéma et la télévision, en qualité de scénariste et même d'actrice. Si la publication de ce roman sans merci sur la misère et la violence régnant dans son pays connaît là-bas, depuis le mois de juin dernier, un succès inouï, il n'a pas manqué de susciter des réactions haineuses. Dans les journaux proches du BJP (Parti du peuple indien, parti nationaliste hindou au pouvoir), on l'a traitée de « sympathisante terroriste, de communiste et de sécessionniste ». Un député de ce parti a même pondu ce tweet ignoble : « Au lieu de lancer des pierres sur les Jeep de l'armée (allusion à des manifestations d'alors au Cachemire) lapidez Arundhati Roy. » Écoutons celle qui affirme qu'« un roman, c'est presque comme une prière, il est composé de plusieurs couches qui ne sont pas destinées à être consommées, mais à dessiner un univers ». Elle nous parle.
LE MINISTÈRE DU BONHEUR SUPRÊME EST SANS AUCUN DOUTE, POUR DES LECTEURS OCCIDENTAUX, UN « LIVREMONDE », DANS LEQUEL SONT RÉVÉLÉES DES VÉRITÉS SUR CE QUE L'ON NOMME TROP VOLONTIERS, DANS LA PRESSE, « LA PLUS GRANDE DÉMOCRATIE DU MONDE »...
ARUNDHATI ROY Quand j'écris de la fiction, je m'ef-force d'édifier un univers proche de celui dans lequel je vis. Le Ministère du Bonheur suprême, tout comme le Dieu des petits riens, qui a été traduit dans 40 langues, parle de l'être humain dans un contexte spécifique. Il ne peut donc être lu comme un guide de l'Inde ! J'ai voulu saisir la manière dont le monde fonctionne. Bien que mes romans soient plongés dans un contexte indien précis, je tente de mettre au jour les rouages du monde en général.
LE MINISTÈRE DU BONHEUR SUPRÊME, QUI CONSTITUE UNE SOMME LITTÉRAIRE CONSIDÉRABLE, EST LE FRUIT D'UN TRAVAIL DE LONGUE HALEINE. POUVEZ-VOUS EN ÉVOQUER LA GENÈSE ?
ARUNDHATI ROY J'ai commencé d'être connue aprèsla parution du Dieu des petits riens, qui a remporté le Booker Prize en 1997. L'année d'après, le gouvernement indien décrétait de nouveaux essais nucléaires. Je suis sortie de mon silence, je suis descendue de mon piédestal, je me suis mise à protester et à écrire des essais politiques. Cela a duré une vingtaine d'années. Cela fait dix ans que je me suis aperçue que seule la fiction me permettait de dire ce que je voulais et avais besoin de dire. Alors, j'ai travaillé dix ans à la composition du Ministère du Bonheur suprême.
Les voyages et la réflexion politique ont aiguisé et rendu plus complexe ma façon de penser et d'écrire.
LE ROMAN DESSINE UNE SAVANTE MOSAÏQUE DE CLASSES SOCIALES, DE CASTES, DE RELIGIONS ET DE GENRES, EN MÊME TEMPS QU'IL SUSCITE UNE PROFONDE RÉFLEXION EN ACTES, POUR AINSI DIRE, SUR L'IDENTITÉ, CELLE DE L'INDIVIDU COMME CELLE DU PAYS DANS LEQUEL IL VIT, OU SURVIT, ET QUI EST CETTE IMMENSITÉ QUI A POUR NOM L'INDE...
ARUNDHATI ROY Si l'on suit ce qui se passe en Indeaujourd'hui, on ne peut que constater la montée d'un fascisme qui n'est pas exactement celui que l'on a pu connaître et qui a encore des traces en Europe, même si certains, en Inde, admirent ce fascisme-là. Il y a des massacres en cours et, bien sûr, des violences entre les castes. D'aucuns perçoivent les musulmans comme les juifs du siècle passé en Allemagne. L'Inde est le souscontinent où s'affrontent sans merci les religions, les minorités et les castes. Les tentatives de parvenir à une identité globale représentent toujours une forme de violence. Mon roman s'intéresse à ces cultures différentes, si présentes en Inde, et
représente une tentative de saisir le sens de ce gigantesque mécanisme. L'Angleterre n'a pas été le seul facteur de colonisation de l'Inde. Il y a aussi la colonisation qui vient des hindous euxmêmes et de leurs croyances.
DANS LES TENTATIVES DE SURVIE, IL Y A FORCÉMENT, COMPTE TENU DES CONTRAINTES DE CASTES, DE RELIGIONS ET DE GENRES SEXUÉS, DES RUSES DESTINÉES À PASSER LA LIGNE, POUR AINSI DIRE. N'EST-CE PAS JUSTEMENT LA CONDITION SINE QUA NON DE LA SURVIE ?
ARUNDHATI ROY Certains de mes personnages sontsimplement rusés, d'autres agissent spontanément, sans réfléchir, d'autres encore sont juste bizarres. Tous doivent trouver un moyen pour survivre. Certains se montrent, d'autres se cachent. La meilleure façon de survivre consiste à pratiquer un humour décalé !
ÉVOCATION DES MASSACRES, GUERRE LARVÉE AUTOUR DU CACHEMIRE, MONTÉE DU NATIONALISME HINDOU... VOUS N'OMETTEZ AUCUN DES PROBLÈMES MAJEURS DE VOTRE PAYS, QUI S'INSCRIVENT DANS DES CORPS. C'EST LÀ, BIEN SÛR, TOUT L'ART DU ROMAN. IL SEMBLE QU'UNE SOLUTION SOIT À VOS YEUX DANS UNE COMMUNAUTÉ DES DÉSHÉRITÉS SOLIDAIRES. TOUT AUTRE ESPOIR D'ORGANISATION DE LA SOCIÉTÉ INDIENNE EST-IL POUR L'INSTANT IMPENSABLE ?
ARUNDHATI ROY Il s'agit d'un roman, non d'un manifeste. Je trouverais curieux de me servir du roman pour faire passer des messages d'ordre politique, même si j'évoque de multiples courants politiques. J'ai de l'estime pour certains d'entre eux. J'ai de l'affection pour les camarades qui se cachent dans la forêt et continuent de se battre. Je pense à des personnages comme Moussa, au Cachemire, ou à la figure du docteur, qui représente le peuple.
Le Ministère du Bonheur suprême n'est pas fabriqué à partir de chacun des problèmes spécifiques de l'Inde. C'est un roman sur l'air qu'on respire, sur la survie au quotidien, sur la manière dont les choses sont imbriquées. Je raconte juste une histoire. Pour saisir l'enjeu, il suffit d'observer quels sont les êtres qui vivent dans le cimetière que je décris. Qui y meurt ? Qui y est enterré ? En Inde, les cimetières sont devenus des sortes de ghettos pour minorités. Mettre en scène ce cimetière ne relève pas d'une forme de réalisme magique. C'est la réalité ! Les minorités, les hijras (ce mot désigne les personnes considérées comme n'étant ni hommes ni femmes. Le mot désigne aussi leur caste ou communauté NDLR), mais aussi certains musulmans et des communistes vivent là dans une espèce de solidarité.
VOUS DITES QUE CES HOMMES ET CES FEMMES VIVENT DANS UN CIMETIÈRE RECYCLÉ EN « GUEST HOUSE ». C'EST DE L'HUMOUR. AU PASSAGE, VOUS BROCARDEZ L'INDE POUR TOURISTES ET BOLLYWOOD, CETTE FABRIQUE DE MIRAGES...
ARUNDHATI ROY C'est de l'humour, mais ce n'est pas une blague. Il se passe énormément de choses dans les cimetières indiens. Des gens comme Anjum, hijra mise au ban de la société, vont s'y regrouper, trouver là un toit, se protéger. Ce
n'est pas mon humour mais celui des personnages qui est en jeu. Ils refusent de se considérer comme on le leur demande. Ils inventent leur propre manière de vivre. Ils brouillent les pistes entre la vie et la mort, mais aussi entre les genres, ce qui nécessite une forme de courage. Un jour, quelqu'un vient dire à Anjum qu'elle n'a pas le droit de vivre là. Elle répond qu'elle ne vit pas dans le cimetière, mais qu'elle est en train d'y mourir. Poussés dans leurs retranchements, ces personnages se sont faits à l'idée de la mort, ce qui les rend dangereux.
QUE PEUT DONC LA LITTÉRATURE, VIEILLE QUESTION, DEVANT L'ÉTAT DU MONDE ET SINGULIÈREMENT LE VÔTRE, LE NÔTRE AUSSI BIEN, PUISQUE TOUT EST DÉCIDÉMENT MONDIAL ? A-T-ELLE LA CHARGE ÉCRASANTE DE LA COMPLEXITÉ À EXPLORER ET ASSUMER, LOIN DES CERTITUDES, PRIMAIRES OU BINAIRES, QUI FRACTURENT LES SOCIÉTÉS EN TOUS SENS ?
ARUNDHATI ROY En tant que romancière, je ne veuxsurtout pas fixer de règles sur ce que la littérature doit être ou ne pas être. Jadis, les écrivains faisaient peur. On les décapitait. Aujourd'hui, les politiciens les récupèrent. Les livres ne sont plus que des produits marketing. Ce qui m'amuse, quand j'écris, c'est, à l'inverse du simple essai politique, d'explorer la multiplicité des formes littéraires que permet le roman.
IL Y A EU UNE GRANDE LITTÉRATURE FRANÇAISE, UNE ALLEMANDE, UNE BRITANNIQUE, UNE RUSSE, UNE AUTRE ÉTATSUNIENNE, UNE AUTRE ENCORE LATINO-AMÉRICAINE. LE TEMPS EST-IL VENU D'UNE GRANDE LITTÉRATURE INDIENNE À L'ÉCHELLE DE «L'ÉMERGENCE», COMME ON DIT, DE CONTRADICTIONS FONDAMENTALES, QUAND BIEN MÊME PAR LE PASSÉ L'INDE A RÉVÉLÉ DES MAÎTRES ÉCRIVAINS?
ARUNDHATI ROY Je ne pense pas en termes de pays.Il me semble que les écrivains sont en dehors de
ce découpage géographique. En Inde, le roman est une forme relativement récente. Jusqu'à il y a peu, la poésie épique avait le monopole. Toutes sortes de genres littéraires demeurent possibles pour raconter des histoires. En tant que romancière, j'ai été fortement influencée par une forme de danse, très cou-
rante, avec laquelle j'ai grandi et qui permettait de raconter des histoires. La grande littérature indienne existe de tout temps. Elle n'a pas de moment originel.
LE DÉSIR D'ÉCRIRE VOUS FUT-IL PRÉCOCE ? AUTREMENT DIT, AVEZ-VOUS EU UNE AUTRE VIE AVANT CELLE-LÀ ?
ARUNDHATI ROY J'ai commencé très tôt. Je me suisinterrompue et puis j'ai repris...
AVEZ-VOUS UNE IDÉE PRÉCISE DE L'ACCUEIL RÉSERVÉ À VOTRE LIVRE LORS DE SA PARUTION EN INDE ? QU'EN EST-IL EXACTEMENT ?
ARUNDHATI ROY J'ai été très surprise. J'ai quitté lepays au moment de la parution du Ministère du Bonheur suprême. J'étais inquiète. Étrangement, ce roman est devenu un best-seller. C'est en Inde, ces temps-ci, l'un des livres qui se vend le mieux. Il est fréquemment piraté. On le trouve même dans les rues, aux carrefours, au pied des feux rouges ! C'est complètement fou.
(1) Le Ministère du Bonheur suprême, d'Arundhati Roy, traduction de l'anglais (Inde) par Irène Margit. Gallimard, 544 pages, 24 euros.
UNE MOSAÏQUE HUMAINE FORMIDABLEMENT CONTRASTÉE
Anjum naît avec « niché dans ses parties masculines » « un petit organe, à peine formé mais indubitablement féminin » (1). Une hijra, mi-homme, mi-femme. À sa suite, la romancière embrasse l'histoire passée et présente de son pays, depuis « la partition tranchant la carotide de Dieu le long d'une nouvelle frontière entre l'Inde et le Pakistan ». Cela constitue une plongée prodigieuse dans le labyrinthe d'un monde en proie à de féroces contradictions, lisibles au sein d'une mosaïque humaine formidablement contrastée, d'une gigantesque complexité. On y croise eunuques et transgenres, dalits (ou intouchables), activistes politiques, et l'on assiste à la mise en oeuvre d'une utopie réparatrice, avec un zoo pour animaux blessés et fraternité entre tous types d'exclus, narrée d'une main ferme au service d'un imaginaire fertile depuis une réalité grouillante, cruelle, vivante. Arundhati Roy n'a peur de rien.
Le témoignage d'un ancien appelé, qui pense avoir « enterré » le corps de Maurice Audin, torturé par l'armée française en juin 1957, relance l'exigence de vérité et ravive les horreurs d'une guerre dont l'État français n'a toujours pas assumé sa responsabilité.
« Je crois que c’est moi qui ai enterré le corps de Maurice Audin. » Jacques Jubier (1) a la voix un peu tremblante. Il hésite, regarde autour de lui. Mais il veut témoigner. Comme près de deux millions d’appelés, il avait préféré oublier, se taire « pour protéger (sa) famille ». Et puis, le temps a fait son oeuvre. Et la peur de « représailles » de la Grande Muette s’est dissipée. C’est l’entretien publié dans nos colonnes, le 28 janvier, avec le mathématicien Cédric Villani qui l’a convaincu. Si un député de la majorité est déterminé à faire reconnaître la responsabilité de l’État français dans l’assassinat, en juin 1957, du jeune mathématicien communiste Maurice Audin, c’est que les langues peuvent commencer à se délier… Et l’exigence d’une reconnaissance de ce crime d’État, bientôt aboutir. Avec « l’aff aire » Maurice Audin, c’est la pratique généralisée de la torture pendant la guerre d’Algérie qui refait surface. Une sauvagerie institutionnalisée, dont le refoulement a rongé comme une gangrène la société française. Mais les mécanismes de fabrication de l’oubli finissent toujours par céder. Ce nouveau témoignage en est la preuve.
TÉMOIGNAGE - «Une saloperie de communiste, il faut le faire disparaître»
Alors que la capitale est engourdie par la neige, Jacques Jubier, 82 ans, a fait le voyage depuis Lyon pour soulager sa conscience et «se rendre utile pour la famille Audin», assure-t-il. Son histoire est d'abord celle du destin de toute une génération de jeunes appelés dont la vie a basculé du jour au lendemain. En 1955, après le vote «des pouvoirs spéciaux», le contingent est envoyé massivement en Algérie. Jacques n'a que 21 ans. Fils d'un ouvrier communiste, résistant sous l'occupation nazie en Isère, il est tourneuraléseur dans un atelier d'entretien avant d'être incorporé, le 15 décembre 1955. Un mois plus tard, le jeune caporal prendra le bateau pour l'Algérie, afin d'assurer des «opérations de pacification», lui assure l'armée française. Sur l'autre rive de la Méditerranée, il découvre la guerre. Les patrouilles, les embuscades, les accrochages avec les «fels», la solitude, et surtout, la peur, permanente. Cette « guerre sans nom », il y participe en intégrant une section dans un camp perché sur les collines, sur les hauteurs de Fondouk, devenue aujourd'hui Khemis El Khechna, une petite ville située à 30 kilomètres à l'est d'Alger. Jacques Jubier nous tend son livret militaire, puis les photographies que l'armée française n'a pas censurées : d'abord, des paysages sublimes de montagnes et vallées, où on aperçoit le barrage du Hamiz, qui draine l'extrémité orientale de la grande plaine algéroise.
«IL Y AVAIT DES VOLONTAIRES POUR LA TORTURE, QUI NE SE FAISAIENT PAS PRIER»
Quelques clichés de ce camp isolé ont échappé à la censure. Sur l'un d'entre eux, un Algérien tient à peine sur ses jambes aux côtés de cinq jeunes soldats, une pelle à la main, qui sourient. Jacques est l'un d'eux. En arrière-plan, on distingue une cabane en troncs et ciment. «C'est ici qu'ils torturaient les Algériens, explique-t-il. Moi, au début, je les appelais "les partisans", et puis j'ai vite compris qu'il fallait que j'arrête. » Pendant des mois, la bière est le seul «divertissement» de jeunes soldats qui s'interrogent encore sur ces étranges opérations de «pacification». «On a vite compris de quoi il s'agissait. Il y avait des volontaires pour la torture. Certains ne se faisaient pas prier. Moi, j'ai refusé. Mon capitaine n'a pas insisté», assure-t-il. Mais il a vu, aux premières loges, le conditionnement, puis l'engrenage de la violence, individuelle et collective.
« Un trou était creusé dans le sol du camp, où les prisonniers étaient détenus entre deux séances de torture, raconte-t-il. Ils ne repartaient jamais vivants. C'était le principe. Les soldats ne se rendaient pas compte de l'horreur de ces exactions. On était conditionnés, mais nous ne réagissions pas tous de la même manière. J'ai vu des choses horribles que je n'ai jamais oubliées : la gégène, mais bien pire encore. » Dans cette guerre de renseignements, les appelés ont très vite été encouragés à commettre des exécutions sommaires et des actes de torture, avec le sentiment d'obéir à des ordres et donc de servir leur pays. Dès le début, non seulement les gouvernements savaient, mais couvraient et légiféraient.
«À MON RETOUR D'ALGÉRIE, UN COPAIN M'A DEMANDÉ COMMENT C'ÉTAIT ? J'AI COMMENCÉ À LUI PARLER DE LA GÉGÈNE ET DU RESTE. IL NE M'A PAS CRU. APRÈS J'AI ESSAYÉ D'OUBLIER.»
« Une scène m'a longtemps hanté, confie-t-il avec émotion. Un petit Kabyle de 1415 ans n'avait pas été jeté dans la fosse avec les autres Algériens. Les soldats français pensaient que ce gamin allait les aider à faire parler les autres. Mais il était devenu trop encombrant. Un jour, on part en patrouille et le capitaine l'emmène avec nous. Il s'arrête au milieu de la route et lui dit qu'il peut partir. Le petit refuse d'abord, comme s'il sentait quelque chose... et puis, il s'est enfui en courant. Ils lui ont tiré dessus avec un fusil-mitrailleur. Il a pris des rafales, est tombé à terre. Il n'était pas mort. Je revois cette scène comme si c'était hier. Le capitaine a dit aux gars : achevez-le ! Et là, j'ai vu des sauvages, ils s'y sont mis à plusieurs. Et encore, c'étaient des gars du contingent, donc vous imaginez les paras... Ils lui ont éclaté la cervelle. C'était une scène d'horreur. Je me souviens de ses grands yeux clairs qui regardaient vers le ciel... Des sauvages... »
« LÀ-BAS, LES GARS DEVENAIENT COMME DES ANIMAUX »
Déserter? «C'était impossible! Chaque soir, j'appréhendais ce qu'on allait me demander de faire le lendemain. Comme les Algériens ne sortaient jamais vivants du camp, il fallait, pour l'armée, se débarrasser des corps. On m'a donc demandé de les charger dans un GMC (véhicule de l'armée), bâché, et on devait les abandonner devant les fermes. Je ne sais pas ce que les habitants en faisaient, une fois qu'ils les trouvaient, ils devaient les enterrer sur place. Moi, je voulais du respect pour les morts. Certains osaient même fouiller les corps pour trouver trois pièces. Là-bas, les gars devenaient comme des animaux.»
Si Jacques ne songe pas à la désertion, il fait valoir une blessure au genou et finit par être muté à la compagnie de commandement pour l'entretien des véhicules dans la ville de Fondouk. C'est ici que, un après-midi du mois d'août, un adjudant de la compagnie lui demande de bâcher un camion: «Un lieutenant va venir et tu te mettras à son service. Et tu feras TOUT ce qu'il te dira.» Le lendemain matin, le temps est brumeux et le ciel bas quand un homme « au physique athlétique » s'avance vers lui, habillé d'un pantalon de civil mais arborant un blouson militaire et un béret vissé sur la tête. C'était un parachutiste. «On va accomplir une mission secret-défense, me dit le gars. Il me demande si je suis habile pour faire des marches arrière. Puis, si j'ai déjà vu des morts. Puis, si j'en ai touché, etc. » « Malheureusement oui», relate l'ancien appelé. «C'est bien», lui répond le para, qui le guide pour sortir de Fondouk et lui demande de s'arrêter devant une ferme. «Est-ce que tu as des gants? Tu en auras besoin...» Jacques s'arrête à sa demande devant l'immense portail d'une ferme assez cossue qui semble abandonnée. Il plisse les yeux pour en décrire le moindre détail qui permettrait aujourd'hui de l'identifier. «Descends et viens m'aider !» lui lance le para, dont il apprendra l'identité bien plus tard: il s'agirait de Gérard Garcet (lire l'Humanité du 14 janvier 2014), choisi par le sinistre général Aussaresses pour recruter les parachutistes chargés des basses besognes. Le même qui fut, plus tard, désigné par ses supérieurs comme l'assassin de Maurice Audin...
« ON LES A PASSÉS À LA LAMPE À SOUDER POUR QU'ILS NE SOIENT PAS IDENTIFIÉS »
Le tortionnaire ouvre une cabane fermée à clé, dans laquelle deux cadavres enroulés dans des draps sont cachés sous la paille. « J'ai d'abord l'impression de loin que ce sont des Africains. Ils sont tout noirs, comme du charbon », se souvient Jacques, à qui Gérard Garcet raconte, fièrement, les détails sordides : « On les a passés à la lampe à souder. On a insisté sur les pieds et les mains pour éviter qu'on puisse les identifier. Ces gars qu'on tient au chaud depuis un bout de temps, il faut maintenant qu'on s'en débarrasse. C'est une grosse prise. Il ne faut jamais que leurs corps soient retrouvés. » « C'est des gens importants ? » lui demande le jeune appelé. « Oui, c'est le frère de Ben Bella et l'autre, une saloperie de communiste. Il faut les faire disparaître. » Un sinistre dialogue que Jacques relate des sanglots dans la voix. C'est qu'il est aujourd'hui certain qu'il s'agissait bien de Maurice Audin. Quant à l'autre corps, il est impossible qu'il s'agisse d'un membre de la famille d'Ahmed Ben Bella, l'un des chefs historiques et initiateurs du Front de libération nationale (FLN). Sans doute un dirigeant du FLN, proche de Ben Bella... À moins que Garcet n'ait affabulé ? « Je ne crois vraiment pas. Vous savez, ces hommeslà, ils se croyaient dans leur bon droit. »
« Après les avoir enterrés, on a repris la route au nord du barrage du Hamid, poursuit-il. Je ne disais pas un mot. Après vingt minutes de trajet environ, on s'est arrêtés devant un portail. Il n'était pas cadenassé, celui-là. Ça m'a étonné. Au milieu de la ferme, il y avait une sorte de cabane sans toit avec des paravents, comme un enclos entouré de bâches. Il m'a demandé d'attendre. Quand il a ouvert la bâche : quatre civils algériens avaient les yeux bandés et les mains attachées dans le dos. Ils leur avaient fait creuser un énorme trou, qui faisait au moins 4 mètres de profondeur. Dans le fond, j'ai aperçu des seaux, des pioches et une échelle. Il m'a demandé de recouvrir les deux cadavres. Ce que j'ai fait. D'abord il m'a félicité. Puis, me dit de n'en parler à personne, que j'aurais de gros ennuis si je parle. Et ma famille aussi. Il me menace.
On est rentrés à Fondouk et il me demande de le déposer devant les halles du marché. »
INCITER LES DERNIERS TÉMOINS À PARLER
Et puis, Jacques a oublié, pour continuer à vivre. Comme toute une génération marquée à vie, murée dans le silence et la honte, il n'a pas parlé. Ni de cette nuit-là, ni du reste. Dans la Question, Henri Alleg relate un dialogue avec ses bourreaux à qu'il dit, épuisé par la torture : «On saura comment je suis mort.» Le tortionnaire lui réplique: «Non, personne n'en saura rien. » « Si, répondit Henri Alleg, tout se sait toujours...»
La recherche de la vérité, entamée à Alger par Josette Audin et relayée en France, n'est toujours pas terminée, plus de soixante ans après les faits. Le récit de Jacques permettrat-il de recoller certains morceaux du puzzle? Et d'inciter les derniers témoins à parler? Si son témoignage, qui a été transmis à la famille Audin, ne fait pas de doute sur sa sincérité et que le faisceau de coïncidences est troublant, il n'existe qu'une chance infime pour qu'il s'agisse bien de Maurice Audin. «Comme dans toutes les disparitions, l'absence du corps de la victime empêche d'y mettre un point final et rend impossible la cicatrisation des plaies de ceux que la disparition a fait souffrir», explique Sylvie Thénault. Pour l'historienne (2), qui a travaillé avec la famille Audin, ce témoignage, comme les révélations qui ont émergé dans les années 2011-2014, ont des fragilités inhérentes à leur caractère tardif. «Mais il est possible d'imaginer qu'un jour un document émerge, contenant un élément nouveau qui, telle une pièce manquante à un puzzle, viendrait conforter l'une ou l'autre des hypothèses envisageables, voire en prouver une au détriment des autres.» Peut-être que, comme l'affirmait Benjamin Stora dans la Gangrène et l'oubli, l'écriture de l'histoire de la guerre d'Algérie ne fait que re-commencer.
(1) Le témoin a souhaité garder l'anonymat mais « se tient à la disposition de la famille Audin ».
(2) « La disparition de Maurice Audin. Les historiens à l'épreuve d'une enquête impossible (1957-2004) », Histoire@Politique. Sylvie Thénault. Lire aussi de la même auteure, Histoire de la guerre d'indépendance algérienne, Flammarion. 2005
Mme Laurence Cohen interroge sur le déploiement des nouveaux compteurs d’électricité ‘’Linky’’, liés à la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Dans son rapport annuel la Cour des comptes a dressé un bilan très critique de l’installation de ces compteurs.
Alors qu’ils étaient censés être avantageux pour les consommateurs/trices avec une meilleure maîtrise des factures, il s’avère qu’au final, leur surcoût sera important pour les usagers.
Au contraire, cette installation sur l’ensemble du territoire national va être très profitable pour le gestionnaire Enedis, avec un bonus de 500 millions d’euros. Ceci pose donc des problèmes éthiques, auxquels s’ajoutent les risques sanitaires liés aux ondes électromagnétiques qui sont émises. De même, le manque de garantie pour la protection des données personnelles fournies par les compteurs, est régulièrement pointé par les associations de consommateurs.
Enfin, il semblerait que les démarches commerciales pour la pose de ces compteurs soient particulièrement insistantes, ne respectant pas le choix des consommateurs, alors que le caractère obligatoire de cette installation n’est pas spécifié dans la loi.
Au regard de tous ces éléments négatifs, elle lui demande si le gouvernement entend arrêter le déploiement de ces compteurs Linky, et ce, dans l’intérêt des consommateurs/trices.
le voeu que l'opposition municipale de gauche à Morlaix a défendu le 16 mars 2017 sur le sujet.
Il avait été rejeté par Agnès Le Brun au motif que l'installation des compteurs Linky était une disposition législative et une obligation légale.
Trois élus de la majorité avaient voté avec nous pour un moratoire et un débat contradictoire.
Voeu présenté au Conseil Municipal de Morlaix du jeudi 16 mars 2017 par Jean-Philippe Bapcérès Elisabeth Binaisse, , Jean-Pierre Cloarec, Ismaël Dupont, Hervé Gouédard, Sarah Noll, Valérie Scattolin, Jean-Paul Vermot
Des compteurs Linky qui interrogent et inquiètent: la nécessité d'une information du citoyen et d'un débat contradictoire.
Vu l’article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales ;
Vu l’article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales ;
Vu l’article L. 1321-1 du code général des collectivités territoriales ;
ENEDIS a entrepris en décembre 2015 l'installation sur le territoire national des compteurs « Linky » dits compteurs communicants parce qu'ils possèdent la faculté de transmettre à distance les relevés de consommation. Le remplacement des compteurs actuels est inscrit dans la loi de transition énergétique du 18 août 2015, transposition en droit français d'une directive européenne (2009/72/CE). D'ici à 2021, plus de 80 % des abonnés pourraient être équipés du « Linky ».
À Morlaix, des usagers ont été informés que leur mise en place pourrait se faire à compter du deuxième semestre de cette année.
Le remplacement du parc sur l'ensemble du territoire représente une dépense de 5 milliards d'euros pour 35 millions de compteurs installés, avec une durée de vie très limitée (7 à 15 ans). En considération du coût énorme d'une telle entreprise, l'Allemagne a fait le choix de renoncer à l'adoption systématique de ce système (l'obligation n'est applicable qu'aux gros consommateurs d'électricité), suivant les conclusions d'une étude qui indique que l'adoption massive des nouveaux compteurs n'est pas dans l'intérêt du consommateur allemand.
En France un nombre croissant de communes, prenant appui sur leur statut d'autorité organisatrice de distribution d'électricité, contestent la nécessité du remplacement des compteurs existants. À ce jour plus de 300 collectivités, pour des motifs économiques, sociaux, environnementaux et éthiques, ont pris position par un vote de leur assemblée délibérante contre l'installation des compteurs « Linky ».
Nous proposons d'adopter nous aussi un vœu contre le déploiement à Morlaix des compteurs connectés « Linky » en lieu et place des équipements existants .
Considérant que les compteurs électriques relèvent du domaine public de la commune,
Considérant que les communes ont pour vocation de servir l'intérêt général, et que le programme de compteurs communicants, au contraire, s'insère dans une logique de dérégulation de la fourniture d'électricité et vise à favoriser les intérêts privés ;
Considérant que l'exploitation de ces compteurs conduira à la suppression de plusieurs milliers d'emplois (4000 à 6000 selon les études), principalement d'ingénieurs et de techniciens chez ENEDIS, mais également dans les PME sous-traitantes ;
Considérant qu'il est économiquement et écologiquement non justifié de se débarrasser des compteurs actuels alors qu'ils fonctionnent et ont une durée de vie importante, que le coût de cette opération, exorbitant au regard du service rendu, sera à terme répercuté sur la facture de l'usager ;
Considérant que le compteur « Linky » rend possible la coupure de courant à distance et la réduction de puissance, comme l'augmentation automatique des tarifs de l'abonnement si constat d'une consommation supérieure, sans contact humain avec l'usager ;
Considérant que Linky émet un rayonnement électromagnétique du courant porteur en ligne (CPL) et que le Centre international sur le cancer a classé les ondes des radiofréquences comme « cancérigènes possible », de sorte que le principe de précaution devrait s'appliquer ;
Considérant que ce système fait peser un risque sur la confidentialité des données et donc sur la protection de la vie privée ;
Considérant que le compteur communicant n'apporte pas d'avantage significatif du point de vue du service rendu à l'usager, qu'il ne lui permet pas d'évaluer sa consommation énergétique poste par poste, et donc de mettre en œuvre une véritable démarche d'économie d'énergie ;
Considérant que le modèle « Linky » est déjà dépassé, qu'il existe, par exemple, des dispositifs connectés permettant de piloter des appareils électriques ;
Considérant que la dépense générée par ce programme à l'échelle nationale, pourrait être consacrée plus utilement à d'autres investissements, notamment dans le développement des énergies renouvelables ;
Considérant l'article L.322-4 du code de l'énergie qui dispose que les ouvrages et réseaux publics de distribution appartiennent aux Autorités Organisatrices de Distribution (AOD) ;
Le Conseil Municipal, après en avoir délibéré, et avant de se prononcer sur le bien fondé de l'installation des compteurs « Linky » sur le territoire de la commune de MORLAIX et du déclassement des compteurs électriques existants, appelle à l’organisation d’un débat contradictoire afin que chaque citoyen puisse se faire un avis éclairé .
Laurence Cohen, sénatrice communiste du Val-de-Marne
:
Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste.
Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale.
Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.