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1 novembre 2020 7 01 /11 /novembre /2020 07:24
Yvonne Abbas (source: documentation photographique L'Humanité) - Héroïques - Femmes en résistance Volume 1 de Antoine Porcu aux éditions du Geai Bleu

Yvonne Abbas (source: documentation photographique L'Humanité) - Héroïques - Femmes en résistance Volume 1 de Antoine Porcu aux éditions du Geai Bleu

Portrait de résistante communiste -

7. Yvonne Abbas (1922-2014)

(100 ans d'engagements communistes)

Souvent très jeunes, les femmes du Nord ont été particulièrement nombreuses à s'engager très tôt dans la lutte contre l'occupant nazi. Yvonne Abbas était l'une d'entre elles.

Née le 29 avril 1922 à Pérenchies (Nord), morte le 13 décembre 2014 à Loos (Nord) ; Yvonne Abbas fut sténodactylo, militante communiste et syndicaliste CGT du Nord, résistante FTP, internée et déportée, femme de fusillé, membre du bureau national de l’Amicale de Ravensbrück , conseillère municipale de La Madeleine (Nord).

Fille de Mustapha Abbas, manutentionnaire mort en 1933 de tuberculose et de Marie Huysentruyt, ouvrière du textile, veuve de guerre, Yvonne Abbas, avec une formation de sténodactylo, entra dès quatorze ans aux Nouvelles épiceries du Nord, où elle adhéra à la CGT-Alimentation, puis dans l’industrie textile où elle milita au syndicat CGT du textile. En 1938, elle devint militante des Jeunes filles de France et participa également aux activités des Amis de la nature, à celles des Auberges de jeunesse, et aux FSCGT. 

Jeune communiste avant la guerre, elle s’était mariée le 16 juillet 1938 à La Madeleine (Nord) avec Florent Debels (1920-1942) et resta militante avec son mari qui organisa un des premiers groupes FTP du Nord ; elle fut notamment chargée du matériel de propagande, du ravitaillement et du logement de nombreux résistants. Yvonne Abbas n'a pas encore 20 ans quand elle devient résistante. Ses premières actions consistent à fabriquer des journaux clandestins. Pour cela, il faut des rédacteurs, du papier journal, des machines à écrire, donc des dactylos, et aussi des stencils et autres machines à imprimer. Yvonne, très active, recrute, assure la liaison avec d'autres groupes, notamment avec le secteur de Cambrai-Caudy. Son petit appartement, place de la Boucherie, à La Madeleine sert à héberger des résistants condamnés à mort par contumace.  Un groupe de résistants tombe dans les mailles de la police. Torturés à mort, certains craquent. Des noms sont livrés, dont celui d'Yvonne Abbas.

Arrêtée le 29 avril 1942, le jour de ses vingt ans, elle resta cinq jours au commissariat de Lille où des policiers s’efforcèrent, sans ménagements mais en vain, de lui faire dénoncer son mari et d’autres illégaux. Elle est battue, torturée, et c'est en loque qu'elle est traduite devant un tribunal spécial de Douai siégeant à huisclos.

Le 31 juillet 1942, la section spéciale de la cour d’appel de Douai la condamna à deux ans de prison pour « activité terroriste ». Elle fut internée à Cuincy (Nord), à la Roquette à Paris, à la Centrale de Rennes (Ille-et-Vilaine). Libérable en mai 1944, elle dut à la « vigilance » du préfet du Nord son internement à sa sortie de prison, car « militante et propagandiste active du Parti communiste, l’intéressée me paraît susceptible de reprendre son activité communiste ». Elle fut internée à la forteresse de Romainville (Seine, Seine-Saint-Denis) puis déportée à Ravensbrück (Allemagne) puis à Holleischen, libérée par les partisans polonais et tchèques, accompagnant des troupes alliés. Yvonne Abbas a passé 37 mois de sa jeune vie en captivité en France, en Allemagne et en Tchécoslovaquie. Elle a connu l'enfer de la vie de déportée: la faim, le froid, le manque absolu d'hygiène, les appels interminables, les coups de cravache des Kapos. Mais elle a aussi connu la solidarité et la résistance des femmes déportées, notamment les communistes qui sont corps pour survivre, les plus nombreuses possibles, et aider les plus faibles. 

Son mari fut arrêté le 2 mai 1942, à Sin-le-Noble (Nord) chez Charles Loubry (jeune résistant de 17 ans ; déporté) à la suite d’une « fuite » d’un résistant gravement blessé et cependant torturé et fusillé. De la prison de Cuincy, il fut envoyé à la prison de Louvain (Belgique) où le tribunal militaire allemand le condamna à mort le 5 juin 1942 pour « détention d’armes à feu et propagande illégale communiste ». Il fut fusillé au crépuscule du 1er juillet 1942 au fort du Vert-Galant à Wambrechies (Nord).

Grâce à la sollicitude du maire de La Madeleine, le docteur Happe, Yvonne va progressivement retrouver force et santé.

Jeune veuve, Yvonne Abbas-Debels eut du mal à retrouver du travail. Mariée le 27 mars 1948 à La Madeleine avec Jacques Charles Pouillande, elle divorça en 1963. Elle devint employée municipale de La Madeleine jusqu’à sa retraite et fut plus tard conseillère municipale communiste.
Elle consacra une partie importante de son militantisme aux anciens résistants, comme vérificatrice des médailles militaires, membre du comité national de la FNDIRP, du bureau national de l’Amicale de Ravensbrück, et comme présidente du comité de Lille de l’ANACR. Inlassablement elle allait témoigner dans les établissements scolaires, accompagnait les voyages scolaires sur les lieux de déportation et s’impliquait dans le concours national de la résistance pour les collégiens.
Médaillée de la Résistance, reconnue Combattante volontaire de la Résistance, elle fut nommée officier de la Légion d’honneur le 18 juin 1992, puis devint la première femme du Nord a être élevée au grade de commandeur le 18 septembre 2014.
Le centre de PMI protection maternelle et infantile d’Haveluy porte son nom depuis mai 2009.

Yvonne Abbas est décédée le 13 décembre 2014 à Loos (Nord).

Sources:

Héroïques - Femmes en résistance Volume 1 de Antoine Porcu aux éditions du Geai Bleu

https://maitron.fr/spip.php?article9627, notice ABBAS Yvonne, Clémence [épouse DEBELS Yvonne] par Roland Delacroix, Yvette Fabre-Anselin, version mise en ligne le 2 septembre 2015, dernière modification le 2 septembre 2017.

Lire aussi:

Portrait de résistante communiste - 6. Hélène Le Chevalier, résistante costarmoricaine et militante du secours populaire clandestin (100 ans d'engagements communistes)

Portrait de résistante communiste - 5. Jacqueline Lautier dite Ginette (100 ans d'engagements communistes)

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31 octobre 2020 6 31 /10 /octobre /2020 11:36
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)
Inauguration de l'exposition retrospective du travail photographique de Jean-Marc Nayet (photos Jean-Luc Le Calvez)

Quelques photos prises par Jean-Luc Le Calvez de cette exposition inaugurée hier, vendredi 30 octobre, à 18h30.

Avec deux des filles de Jean-Marc et Lucienne ainsi que deux de leurs petits-enfants...dejà grands. Au côté de Lucienne, Philippe Grincourt l'ami photographe de Jean Marc Nayet avec qui il partageait cette passion et tant de projets.

Photos et commentaire de Jean-Luc Le Calvez

Exposition « rétrospective Jean-Marc Nayet », du 30 octobre au 8 novembre (LE TELEGRAMME)

Une exposition « rétrospective Jean-Marc Nayet » se tiendra dans la salle du préau, du 30 octobre au 8 novembre, après son inauguration le 29 octobre. Dans un communiqué, l’adjoint Guy Airaud déclare : « En février 2020, l’ami Jean-Marc Nayet nous faussait compagnie sans prévenir… Empreint d’humanité, Jean-Marc a toujours photographié ses contemporains. Les poilus lors des cérémonies de commémorations à Béthune, dans le Pas-de-Calais, d’où il était originaire, les enfants palestiniens dans le camp de Wavel au Liban, au travers de l’association Morlaix-Wavel dont il était le président, les musiciens dans les bals populaires, les fanfares avec ses amis de Pattes à Caisse. Grand amoureux de l’Irlande, il photographiait la vie dans les pubs. En 2019, il a photographié des dessins de poilus réalisés par l’artiste Guy Denning sur papier kraft et collés sur les murs du village de La Feuillée. Il a aussi accompagné l’artiste plasticien Pierre Chanteau dans le projet de l’œil en Finistère. L’idée d’une rétrospective de l’ensemble de son travail dans la salle du préau de Locquénolé, lieu qu’il a fait tant vivre, permet à ses amis de lui rendre un dernier hommage. Le choix difficile de l’éditing parmi les tirages photographiques de Jean-Marc est à la charge de son épouse Lucienne et de son ami photographe Philippe Grincourt ».

Pratique

Ce panorama photographique sera visible les mercredis, jeudis, de 15 h 30 à 19 h, de 15 h 30 à 20 h 30, les vendredis. Fermé les lundi et mardi. Contraintes sanitaires à respecter.

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31 octobre 2020 6 31 /10 /octobre /2020 09:19
 Hélène Le Jeune, née Le Chevalier, députée communiste des Côtes-du-Nord sous le IVe République du 24 décembre 1946 au 4 juillet 1951, Née le 22 avril 1917 à Kergrist-moëlou (Côtes d'Armor - France). Décédée le 15 avril 2006 dans le Gard (photo Assemblée Nationale) .

Hélène Le Jeune, née Le Chevalier, députée communiste des Côtes-du-Nord sous le IVe République du 24 décembre 1946 au 4 juillet 1951, Née le 22 avril 1917 à Kergrist-moëlou (Côtes d'Armor - France). Décédée le 15 avril 2006 dans le Gard (photo Assemblée Nationale) .

Portrait de résistante communiste

- 6. Hélène Le Chevalier, résistante costarmoricaine et militante du secours populaire clandestin

(100 ans d'engagements communistes)

Hélène Le Chevalier est née dans le centre-Bretagne à Kergrist-Moëlou en avril 1917.

Son père, M. Le Chevalier, était marchand de bois (selon le registre d’état civil), sabotier (selon la déclaration de sa fille). Ses parents, ruinés par la crise économique des années 1930, étaient influencés par l’Église.

Après avoir obtenu son Brevet élémentaire, elle prépare son entrée à l’École normale. Reçue première du département au concours d'entrée, elle n'est pas reçue pour raisons médicales. Aidée par l'épouse de l'écrivain Louis Guilloux, Hélène prépare son Bac tout en assurant des remplacements d'institutrice dans le secteur de Rostronen en 1939 et 1940. Elle sera finalement admise à titularisation comme institutrice grâce à l'intercession de Louis Guilloux. En contact avec les militants communistes par le biais de son frère, secrétaire de la cellule de Kergrist-Moëlou , c'est cependant par sa rencontre avec deux institutrices exerçant dans l'école où elle est affectée comme suppléante à la rentrée 1939, Maria Chevallier et Elise Masson, qu'elle s'engage dans la Résistance communiste à partir de 1940. Sa rencontre avec l'épouse de Marcel Cachin alors qu'elle vient d'adhérer au PCF sitôt après son interdiction lui permet de découvrir les écrivains Romain Rolland, Henri Barbusse, Paul Vaillant-Couturier, et de lire les œuvres de Karl Marx.  

Dès son retour à Kergrist-Moëlou, elle convainc son amie la postière Rosa Hénaff de rejoindre le PCF et la résistance. Sa position de postière se révèle être un atout précieux pour recevoir sous des adresses fictives des colis des tracts et journaux aussitôt distribués dans la région. 

En automne 1940, Hélène se voit confier la responsabilité de mettre sur pied, bien que frappé d'interdiction depuis 1939, un comité du Secours populaire. Des groupes se sont ainsi constitués à Callac, Rostronen, Guingamp, avec pour mission de collecter de l'argent afin d'envoyer des colis aux prisonniers de guerre et de venir en aide aux familles de résistants et militants communistes emprisonnés. Le travail de solidarité est complété par un travail de propagande, distribution de tracts appelant à la lutte contre les restrictions et la vie chère.

Devant la recrudescence de l'activité des femmes, la police surveille particulièrement Hélène Le Chevalier considérée comme étant une meneuse. En mars 1943, elle est arrêtée par des agents de la section de protection anti-communiste (SPAC), ce qui provoque une manifestation spontanée d'une centaine de femmes cherchant à empêcher le véhicule des sbires d'emmener Hélène en prison. Rosa Hénaff est arrêtée à son tour en août. La répression fut particulièrement brutale en ce mois d'août 1943. Plus de cinquante femmes du département sont arrêtées, victimes de la félonie d'un responsable communiste passé au service du SPAC. Parmi ces femmes figurait Simone Bastien, responsable de la JC et des FTP pour le département des Côtes-du-Nord. Elle fut arrêtée par la SPAC à Guingamp le 7 août 1943.

1920-2020: 100 ans d'engagements communistes en Finistère: 95/Simone Bastien (1921-2006)

Inculpée de "menées politiques et terroristes", Hélène est incarcérée à la prison de Guingamp pendant cinq mois avant d'être transférée au camp de La Lande en Indre-et-Loire. 

Hélène Le Chevalier est finalement libérée le 20 décembre 1943 grâce à l'intervention du grand écrivain breton Louis Guilloux auprès du commissaire de Saint-Brieuc. Après une semaine passée chez ses parents à Kergrist-Moëlu, elle reçoit la visite de Jean Le Jeune, responsable des F.T.P.F, son futur mari. Elle passe dans la clandestinité, se cachant près de Plestin-les-Grèves. Au bout de quelques semaines, elle fut affectée à l’état-major du PC clandestin dans une petite ferme à Saint-Nicolas-du-Pélem. Elle fut la secrétaire de Poirot, Maurin, et de Louis Picart, Yves, futur membre du comité central du PCF à la Libération, jusqu’à la libération du département au début août 1944. Elle est affectée tout d'abord au secrétariat de la direction départementale des F.T.P puis à la direction régionale et interrégionale du PCF en juin 1944.

Hélène Le Chevalier va vivre avec Jean Le Jeune à partir de novembre 1944. 

Le 2 août, elle rédige l'appel du PCF régional à l'insurrection. Le 5 août, Saint-Brieuc est libéré par la Résistance. Le 6 août, les troupes américaines qui foncent vers Brest traversent la ville pavoisée aux couleurs de tous les pays de l'alliance anti-hitlérienne.

A la Libération, le PCF compte 12 000 adhérents dans les Côtes-du-Nord, selon Jean Le Jeune, le mari d'Hélène Le Chevalier: beaucoup de jeunes des F.T.P, du Front National de Libération (30 000 adhérents dans le département), de l'Union des Femmes Françaises.    

Hélène Le Chevalier, en tant que secrétaire de l'Union des Femmes Françaises dans les Côtes d'Armor,  et son mari Jean Le Jeune, chef des F.T.P, avec Jean Le Paranthoën, secrétaire fédéral du PCF dans les Côtes-du-Nord, visitent un des hôpitaux de région parisienne où sont entassés les déportés survivants au retour d'Allemagne, devenus de vrais squelettes. Ils retrouvent là plusieurs camarades et proches amis résistants des Côtes-du-Nord, dont certains mourront quelques semaines après comme Victor Provost, le beau-père de Jean Le Paranthoën. 

Quelques mois plus tard, au début de 1945, se tient le premier congrès de l'Union des femmes françaises, riche de 6 500 adhérentes issues des rangs de la Résistance. Hélène Le Chevalier est élue secrétaire départementale avec Hélène Bello, membre du Comité départemental de Libération. 

Le mariage d'Hélène Le Chevalier avec Jean Le Jeune a lieu en août 45. Jean Le Jeune raconte: "Hélène et moi vivions ensemble depuis plusieurs mois depuis ce retour du front du 11 novembre 1944, avec des hauts et des bas, bien entendu, comme chez tous les jeunes.  Mais pour pouvoir créer un foyer, il fallait quitter l'hôtel, trouver un appartement et se procurer un trousseau (draps, vaisselle...). Or, tout se vendait avec des bons d'achat et sans mariage, on ne pouvait obtenir de bons. Aussi décida t-on naturellement de se marier. Moi j'étais pleinement d'accord mais Hélène par contre était réticente. En effet, elle tenait beaucoup à son indépendance. Je la rassurais sur le fait que la mariage ne devait pas être une entrave à la liberté individuelle".  Mariée en , Hélène Le Chevalier prit le nom de son époux, Jean Le Jeune, et devint Hélène Le Jeune.

Jean Le Jeune, né à Plévin en 1921, dans une commune du Sud-Ouest des Côtes d'Armor, au pied du Mont Noir, issu d'un milieu relativement modeste (sa mère tient un petit commerce, épicerie, mercerie, et confectionne et repasse des coiffes bretonnes, son père est journalier agricole, son grand-père boucher de campagne), s'est engagé dans la Résistance en 1942 après avoir fait l'aéronavale comme ouvrier qualifié dans le sud de la France:

"L'année 1942 aura été l'année où je pris une grande décision, écrit-il dans Itinéraire d'un ouvrier breton par l'ancien responsable des F.T.P des Côtes-du-Nord (2002, Saint-Brieuc). En octobre ou en novembre, je ne me souviens plus très bien, on avait écouté ensemble chez Jean Le Cloarec, mon voisin, la adio de Moscou qu'on parvenait à capter assez facilement sur les ondes. Le premier anniversaire de la fusillade de Châteaubriant était évoqué. J'avais été particulièrement touché par le courage et l'attitude du jeune Guy Môquet. Il avait écrit su les murs de sa baraque: "Vous qui restez, soyez dignes de nous les 27 qui allons mourir". Ce message était à mon avis adressé à tous les jeunes, en tout cas, il m'est allé droit au cœur. Dès lors, une seule chose comptait pour moi: rejoindre le Parti communiste et la Résistance". Au début du printemps 1943, Jean Le Jeune et son camarade Cloarec reçoivent la visite de Louis Picard, le responsable régional du Parti, dit Yves dans la résistance, dans l'atelier du camarade menuisier. Ils sont chargés de se mettre en contact avec les F.T.P de Maël-Carhaix, et de distribuer tracts et numéros de l'Humanité clandestine. Jean Le Jeune va alors participer à la création d'un détachement F.T.P dans sa commune, baptisé Guy Môquet et composé de trois groupes de huit. "Le travail de recrutement était relativement facile, bien que nous exigiions d'abord l'adhésion au Parti, ce qui nous obligeait à agir avec prudence. On laissait de côté les personnes de Droite et de l’Église, en tout cas dans l'immédiat, ce qui était un tort car tous les jeunes du pays avaient leur place dans les rangs des Francs-Tireurs, comme ils l'ont montré par la suite. En attendant, le fils du sacristain ayant eu vent de notre organisation, vint me voir en me suppliant de l'introduire dans le groupe. Il accepta d'emblée d'adhérer au Parti et à notre code d'honneur. On lui donna un nom et un matricule. Il prouva par la suite qu'on avait eu raison de lui faire confiance. En effet, un jour on lui demanda d'aider à transporter le corps d'un adjudant allemand à plusieurs kilomètres de l'endroit où l'Allemand avait été tué.

Très vite, nous avons créé d'autres groupes dans les communes environnantes, à Paule, Le Moustoir, Tréogan: cela coïncidait avec notre travail de propagande contre le travail obligatoire en Allemagne... Ainsi, pas un seul jeune du pays ni des communes environnantes n'est allé en Allemagne, par contre ils rejoignaient les rangs des Francs-Tireurs".  Après la vague d'arrestations par la SPAC en août 43 chez les F.T.P et dans la résistance communiste, l'état-major de la résistance communiste et Jean Le Jeune va prendre du galon, devenant permanent du Parti, sous les ordres du commissaire aux Effectifs des FTP dans les Côtes-du-Nord, Marcel Perrot, dit Andrieux, chargé à 22 ans du commandement du secteur sud-ouest des Côtes d'Armor: Maël-Carhaix, Rostronen, Gouarec, Saint-Nicolas-du-Pélem, Corlay, Bourbriac, Callac.    

Entrée au comité départemental du PCF en 1945, Hélène Le Chevalier est candidate en 1945 aux élections législatives, puis de nouveau en 1946, sans être élue.

Jean Le Jeune raconte que pour les élections législatives du 2 juin 1946, Hélène Le Jeune qui fait partie des 2 femmes présentées par le Parti communiste des Côtes-du-Nord avec Georgette Manesse fait toute sa campagne en étant enceinte de son futur fils, Pierre. Le 29 mai 46 elle apporte la contradiction à René Pleven, candidat UDSR. Son fils Pierre naît le surlendemain, la veille des élections.

C’est en tant que " ménagère ", sans profession, qu’elle se présenta à tous les scrutins. Lors des élections du 2 juin 1946 pour la seconde Assemblée constituante, elle figurait en quatrième position sur la liste communiste conduite dans les Côtes-du-Nord par les députés sortants Marcel Hamon et Guillaume Daniel. La liste recueillit 78 976 voix sur 280 275 suffrages exprimés (28,17 %), et le PCF emporta deux des sept sièges à pourvoir ; le MRP obtenant trois sièges dont celui de Marie-Madeleine Dienesch, et la SFIO deux sièges. Placée en troisième position, Hélène Le Jeune se présenta aux élections législatives du 10 novembre 1946 en troisième position. La liste communiste continua sa progression avec 86 717 voix sur 275 377 suffrages exprimés (31,45 %), mais ne parvint pas à enlever un troisième siège. Suite à la démission, en janvier 1947, d’Auguste Le Coent élu au Conseil de la République, Hélène Le Jeune fit son entrée à l’Assemblée nationale, le 31 janvier 1947, à l'âge de 29 ans.

Une situation difficile pour elle puisque son fils est tout jeune, quelques mois à peine, et qu'elle ne souhaite pas le laisser à la maison. Hélène vient d'avoir la deuxième partie de son bac (elle a passé la première partie en prison en 1943) alors qu'elle était enceinte de Pierre et souhaite plutôt devenir institutrice que députée. Il faut toute la pression du Parti pour l'amener à accepter la fonction, et elle reprochera amèrement à Jean Le Jeune, son mari, secrétaire départemental du PCF des Côtes-du-Nord, à l'époque, de n'être pas intervenu "en sa faveur". Le couple habite à l'époque dans une seule pièce de trois mètres sur quatre environ, au rez-de-chaussée, rue Maréchal Foch. 

"Tout cela n'aida pas à la bonne marche de notre ménage,  raconte Jean Le Jeune, qui malheureusement se disloquait peu à peu. Durant cinq années de son mandat, on ne se voyait que très rarement. Elle arrivait à la maison généralement le samedi matin après avoir voyagé toute la nuit au moment même où je m'apprêtais à me rendre à la fédération pour préparer les réunions du soir. Le samedi après-midi, j'allais au bureau fédéral. Le dimanche, j'avais également à animer des réunions un peu partout dans le département même à la sortie des messes car il y avait là toujours du monde. Hélène avait ses compte-rendus de mandat à faire ce qui n'était pas non plus évident". Jean Le Jeune sera élu au Comité Central à Strasbourg en juin 1947. Hélène, de nouveau enceinte, menace de divorcer. 

"Nommée membre de la Commission des affaires économiques, Hélène Le Jeune siégea en outre au sein de la Commission du ravitaillement, dont elle fut élue vice-présidente, et au sein de la Commission de la défense nationale. La plupart des textes qu’elle déposa concernent la question du ravitaillement ; elle se pencha en outre sur l’adaptation de la législation sur la famille, en poussant notamment à la création de nouvelles crèches. Hélène Le Jeune intervint en outre à plusieurs reprises à la tribune de l’Assemblée. La vigueur des propos qu’elle tint le 4 décembre 1950, au cours de la discussion du projet de loi portant amnistie relative aux faits de collaboration, suscita de vifs remous dans l’hémicycle : « je veux me faire l’écho de l’indignation qui s’empare de la population de notre région, la région bretonne, depuis que le projet d’amnistie est en discussion devant l’Assemblée nationale. » Au cours de la législature, Hélène Le Jeune vota la confiance au cabinet Blum (17 décembre 1946), mais la refusa à Paul Ramadier (4 mai 1947). Elle vota, entre autres, contre la loi électorale instituant le système des apparentements (7 mai 1951)" - Article du Maitron sur Hélène Le Chevalier, Alain Prigent.

Alain Prigent poursuit: "Placée en troisième position sur la liste communiste aux élections législatives du 17 juin 1951, Hélène Le Jeune ne fut pas réélue, pas plus qu’aucun candidat communiste. La liste, toujours conduite par Marcel Hamon, recueillit 69 340 voix sur 260 610 suffrages exprimés (26,6 %), mais les listes apparentées, conduites pour la SFIO par Antoine Mazier, pour les radicaux par René Pleven et pour le MRP par Henri Bouret, obtenant plus de la majorité des suffrages, elles emportèrent la totalité des sept sièges à pourvoir. Pendant son mandat de députée, elle prit une part très active au sein du mouvement des Combattants de la paix. Le 11 mai 1950 à l’issue d’une manifestation en gare de Saint-Brieuc contre le passage d’un train en provenance de Brest et transportant des tourelles de canon à destination de Rochefort, dix autres responsables de la CGT et de la fédération communiste des Côtes-du-Nord, furent emprisonnés pendant sept mois à Fresnes, et à la prison des femmes de La Roquette pour les trois femmes Madeleine Bardelli, Armande Daniel et Yvette Mallet. Deux autres militants entrèrent dans la clandestinité, Roger Ruelleux, secrétaire de l’UD-CGT et son époux Jean Le Jeune, membre du comité central. À partir du 22 janvier 1951 dans le procès dit « des 12 » de Saint-Brieuc, les prévenus furent acquittés à l’issu d’un procès ayant eu une résonance nationale.

En 1951, Hélène reprend ses études. Son statut d'ancienne résistante et d'ancienne députée communiste ne vont pas faciliter son recrutement à l'éducation nationale dans un contexte de guerre froide. Ce n'est qu'en 1954 qu'elle obtient un poste en dehors de la Bretagne. Affectée tout d'abord dans le département de la Manche, à Octeville près de Cherbourg: "Hélène n'était que stagiaire et son salaire n'était pas suffisant pour nourrir toute la famille. Elle préparait son CAP le soir après ses cours et le jeudi, chaque semaine, elle allait suivre des stages à Cherbourg. Elle a préparé son CAP et l'a brillamment obtenu... Hélène a enseigné un an à Octeville où on s'est fait de très nombreux amis parmi les camarades. C'étaient pratiquement tous des ouvriers, simples, modestes, très sympathiques: on s'invitait les uns chez les autres tour à tour. De l'autre côté de la place où nous habitions se trouvait un médecin qui lui aussi était membre du parti. J'allais lui apporter l'Huma-Dimanche toutes les semaines, c'était quelqu'un de formidable. Quand les copains allaient le consulter, il ne les faisait pas payer. Il était le premier médecin à pratiquer l'accouchement sans douleur dans la région..." (Jean Le Jeune) 

Elle sera mutée à sept reprises. Au printemps 1955 elle obtint un poste à Boissy-Monvoisin, près de Mantes-la-Jolie (Yvelines). Elle enseigna ensuite à Villeneuve-Saint-Georges (Seine-et-Oise, Val-de-Marne). En 1962, elle obtint un poste de directrice à l’école Vigneux-sur-Seine (Essonne) où elle deviendra directrice de son groupe scolaire.

Le couple Le Jeune se sépara en 1966 et divorça en 1980.

Lorsqu’elle fut en retraite, Hélène Le Jeune s’installa à Saint-Brieuc. Restée fidèle au PCF, sans responsabilité particulière dans la fédération des Côtes-du-Nord [Côtes-d’Armor], elle vécut les dernières années de sa vie auprès de sa fille Sylvie à Anduze (Gard). Hélène s'est éteinte en avril 2006 dans le Gard, à l'âge de 89 ans.

Lors de son décès, l’Humanité, le 18 avril 2004, lui consacra un article dans la rubrique « Carnet ».

Louis Guilloux s’est inspiré de son engagement pour construire le personnage de Monique dans Jeu de Patience (Prix Renaudot en 1949).

Sources:

Article de Alain Prigent dans le Maitron (2011): Hélène Le Jeune (née Le Chevalier)

Héroïques Femmes en résistance Tome 2 de Antoine Porcu (éditions le Geai Bleu)

Itinéraire d'un ouvrier breton par l'ancien responsable des F.T.P des Côtes-du-Nord de Jean Le Jeune (2002, Saint-Brieuc)

Article Wikipédia sur Hélène Le Chevalier

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31 octobre 2020 6 31 /10 /octobre /2020 07:59
Attaques contre les communistes. L’escadre de l’ignominie (Olivier Gebhurer, Vendredi 30 Octobre 2020 - L'Humanité)
Attaques contre les communistes. L’escadre de l’ignominie
Vendredi 30 Octobre 2020
 

Olivier Gebuhrer Maître de conférences en mathématiques, retraité

Notre pays se remet difficilement de l’effroi et de l’indignation provoqués par l’odieux assassinat de Samuel Paty, victime du fascisme à prétexte islamique. Tout le corps enseignant est saisi d’inquiétude devant les menaces insaisissables pesant sur l’exercice de son métier, et la nation tout entière tente dans son hommage de se rassembler dans la ferveur de ses valeurs fondatrices.

C’est ce moment que choisit Monsieur le maire de Cannes (LR) pour réunir dans un même rappel le temps de la lutte contre le fascisme et « celui de la lutte contre le communisme ». C’est ce moment que des anonymes ignobles choisissent pour taguer le siège national du Parti communiste français. C’est ce moment que choisit Marion Maréchal pour, dans une tribune à FigaroVox, en appeler à la guerre sainte contre l’islam, qui, selon elle, vise l’Europe et « ses valeurs depuis treize siècles ».

Ce faisceau, cette escadre viennent de loin et n’ont rien d’une coïncidence. Les propos du maire de Cannes, objet d’une lettre ouverte, n’ont fait à ce jour l’objet d’aucune réprobation de la droite politique dite « républicaine ». Cette déclaration attente à la fois à la mémoire de Samuel Paty et à l’honneur des innombrables martyrs communistes de la barbarie nazie ! De quel temps parle donc Monsieur le maire ? De celui où l’occupant nazi pourchassait sans merci les communistes, les torturait, les fusillait et les envoyait en camp d’extermination avec l’aide active de ses supplétifs pétainistes traîtres à la patrie profanée ? De quel temps parle Monsieur le maire ? Du temps où le Parti communiste français était interdit, sa presse illégale, ses parlementaires emprisonnés en Algérie ?

En vérité, tous ces faits ont une propriété commune ; ils innocentent le fascisme. De quelque variété que l’on parle, de quelque attribut qu’il se pare, y compris religieux, le culte de la mort, celui du chef, celui d’une terreur sans fin contre toutes celles et tous ceux qui, en France, se reconnaissent dans la construction complexe d’une République démocratique, sociale, laïque où Liberté, Égalité, Fraternité ne soient pas de vains mots, et communs au fascisme qu’il est devenu vital d’identifier comme tel. Au fascisme et à lui seul.

Pendant qu’ici on disserte sur le « séparatisme », là on fustige « l’islamo-gauchisme », un seul ennemi est désigné à la vindicte, cet ennemi c’est, entre autres, le seul parti politique qui se soit dressé contre toutes les compromissions, le seul qui ait condamné Munich et la politique dite « d’apaisement », le seul qui ait organisé et combattu les armes à la main face à la barbarie nazie, le seul qui se soit dressé contre toutes les aventures coloniales, le PCF dont les fautes pâlissent devant les pages de gloire écrites avec le sang de ses militantes et militants.

Cette escadre de l’ignominie suppose la construction sans attendre d’une riposte à la hauteur de toute la gauche, de toutes les forces démocratiques. Se rassembler, débattre, agir et décider ensemble, telle est l’urgence.

Olivier Gebhurer

Ancien membre du conseil national du PCF, fils de Max Gebuhrer, déporté au camp de Djelfa en 1940, médecin du maquis FTPF d’Ardèche et veuf de Sonia Gebuhrer-Adam, née en 1944 à la prison de Fresnes, quartier des condamnés à mort.
Attaques contre les communistes. L’escadre de l’ignominie (Olivier Gebhurer, Vendredi 30 Octobre 2020 - L'Humanité)
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31 octobre 2020 6 31 /10 /octobre /2020 07:16
Disparition. Alain Rey nous prenait la main par les mots (Maurice Ulrich, L'Humanité, 29 octobre 2020)
Disparition. Alain Rey nous prenait la main par les mots
Jeudi 29 Octobre 2020 - L'Humanité

Linguiste et philosophe du langage, le célèbre maître d’œuvre des dictionnaires Le Robert, auteur de quelque trente ouvrages sur la langue, est mort à 92 ans. Il nous parle encore.

 

Il était gourmand de mots. Pas du genre radin à se cacher dans un coin ou à les goûter en petit comité choisi. Il était partageux. Alain Rey n’est plus. Il s’en est allé à 92 ans, après 68 ans passés dans la grande famille des dictionnaires, de la langue française, des langues régionales, de l’argot. Il fut un secrétaire perpétuel de l’Académie française, Maurice Druon, pour lui reprocher de « ramasser les mots dans le ruisseau ». Il aurait pu sans doute lui répondre et peut-être y a-t-il pensé, oui, c’est vrai, c’est la faute à Voltaire, c’est la faute à Rousseau. Il savait mettre son encyclopédique savoir à la portée de tous, non parce qu’il le bradait, mais précisément parce qu’il respectait les auditeurs et s’adressait à l’intelligence. Qui ne l’a entendu sur France Inter avec sa chronique le Mot de la fin, sur France 2 avec Démo des mots. On aimait à la télé le voir avec sa moustache et ses longs cheveux blancs qui en faisaient un personnage à la fois rare et familier, goûtu lui-même.

Alain Rey ne s’est pas contenté de commenter la langue. Contre les bouches serrées il était ouvert aux apports extérieurs, comme à ceux du parler courant et que consacrait l’usage.

Bien sûr, il avait attaché son nom aux Robert, le petit et le grand (neuf volumes). C’est en 1952 qu’il répond à une petite annonce. Un Paul Robert, avocat, veut lancer un dictionnaire alphabétique. Le jeune Alain Rey, né en 1928 à Pont-du-Château dans le Puy-de-Dôme (la bibliothèque y porte son nom), est passé par la Sorbonne pour des études de lettres et d’histoire de l’art. En 1964, il devient le directeur de publication des dictionnaires de la maison d’édition. Parallèlement aux Robert, il est à la manœuvre pour le Dictionnaire historique de la langue française, pour le Dictionnaire culturel en langue française. Ses propres publications, au nombre d’une trentaine, comptent des titres savoureux comme son Dictionnaire amoureux du diable.

Mais Alain Rey ne s’est pas contenté de commenter la langue. Contre les bouches serrées il était ouvert aux apports extérieurs, comme à ceux du parler courant et que consacrait l’usage. Il parlait volontiers de la « créolisation » de la langue, mais ne se privait pas de ferrailler dès que son appauvrissement menaçait ou qu’elle se gangrenait de l’intérieur par le machisme ou la violence. Il savait aussi mettre en garde. Certains, disait-il dans un entretien dans nos colonnes, savent se servir des mots « pour endormir, impressionner et agir sur le malheureux pékin ».

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30 octobre 2020 5 30 /10 /octobre /2020 11:37
Walden Gauthier, séance collage à Morlaix le 27 octobre

Walden Gauthier, séance collage à Morlaix le 27 octobre

Corentin Derrien - Mariane Gauthier Destable - Walden Gauthier - Lucienne Nayet - Jean-Luc Le Calvez - les cinq camarades du PCF Pays de Morlaix à Châteaubriant dans la carrière le 18 octobre 2020

Corentin Derrien - Mariane Gauthier Destable - Walden Gauthier - Lucienne Nayet - Jean-Luc Le Calvez - les cinq camarades du PCF Pays de Morlaix à Châteaubriant dans la carrière le 18 octobre 2020

Châteaubriant dans la carrière le 18 octobre 2020 - Lucienne Nayet, Ian Brossat, Walden Gauthier - 3 générations unies dans l'affirmation des valeurs du communisme

Châteaubriant dans la carrière le 18 octobre 2020 - Lucienne Nayet, Ian Brossat, Walden Gauthier - 3 générations unies dans l'affirmation des valeurs du communisme

Walden Gauthier, 16 ans, a adhéré aux Jeunesses Communistes il y a quelques mois, au printemps dernier, pendant le confinement. Élève brillant, après son collège à Lanmeur, où il a développé sa passion de l'histoire (au côté de M.Cueff) il est devenu lycéen en section Langues renforcées au lycée Châteaubriant à Rennes. Walden, qui habite Plouigneau, est aussi un mélomane passionné de Jazz, un excellent pianiste, et s'intéresse à la politique et au communisme, notamment depuis l'an passé et sa participation aux rassemblements contre la réforme des retraites à points Macron. Particulièrement curieux et mûr intellectuellement et politiquement, il incarne cette nouvelle génération prometteuse qui porte l'avenir du communisme français.        

6 questions à Walden Gauthier

- Pour toi, que représente le communisme ? En quoi est-ce encore un idéal et un engagement actuels ?

Je suis attaché aux principes de base du communisme, ceux de la justice sociale et de l’internationalisme. Le monde de la finance dans lequel nous vivons manque cruellement d’humanité, et c’est d’ailleurs l’un des thèmes majeurs défendus par le PCF aujourd’hui derrière l’engageant slogan : « L’Humain d’abord ». Un combat on ne peut plus actuel, toujours en écho avec l’approche de Marx : l’unicité humaine dans l’égalité, l’identité humaine dans ses différences. Je me retrouve ainsi dans cette ouverture à la pluralité où résonnent notamment les luttes féministes et le combat contre le racisme, tout autant d’ailleurs que dans les actions de longue date du PCF en faveur de l’éducation et de la culture.

- Comment es-tu venu toi-même à faire ce pas de l'engagement ? Est-ce courant dans ta génération, autour de toi ?

J’ai décidé de m’engager auprès des JC en plein confinement pour prendre part à la reconstruction d’une France en crise. J’y vois l’opportunité historique d’un changement radical des mentalités, par la mise en lumière des véritables conséquences d’un gouvernement libéral sur des populations toujours plus menacées par le chômage et la misère. Si ce genre d’engagement était courant au siècle dernier chez les jeunes, je n’ai pas l’impression qu’il le soit aujourd’hui. Ma génération est certes sensible à certains combats, tels que l’écologie ou le féminisme, mais peu sont réellement intéressés par la politique de terrain et la nécessité de combats concrets à mener. Paradoxalement, nombreux sont ceux qui se complaisent dans la société de consommation avec toutes les inégalités que celle-ci engendre. Le désir de se battre en faveur du collectif est en perte de vitesse, et il semble être remplacé par un individualisme rationnel et de pseudo- combats qui servent en réalité à se blanchir la conscience.

- Quelles sont les figures politiques et historiques qui t'inspirent ?

Je suis inspiré par les communistes qui se sont battu pour la libération de la France durant la Seconde Guerre Mondiale, et qui furent l’âme de la résistance intérieure, mais également les porteurs du triangle rouge ayant succombé sous la botte nazie. Ces hommes et ces femmes ont combattu le fascisme pour défendre la liberté. Leurs actions de haute lutte, souvent au risque de la mort, ne doivent pas être oubliées, et l’on doit veiller à ce qu’elles demeurent gravées dans les livres d’histoire. Les combats pour la paix et l’émancipation de l’Homme menés par Jean Jaurès, ses talents d’orateur et d’écrivain m’intéressent fortement. Je dois également évoquer mon attachement à Marx et à Engels, puisque c’est par le Manifeste que j’ai été introduit à la pensée communiste, et l’ampleur de leur apport à cette théorie me fascine. Je me réjouis qu’il me reste encore tant de choses à lire et à découvrir pour approfondir mes connaissances dans un domaine qui annonce le Progrès humain.

- Pourrais-tu nous parler de la Commémoration des fusillés de Châteaubriant ?

C’était une cérémonie très émouvante. Comme je l’ai dit plus haut, je suis très attaché à l’histoire de la Résistance, et c’est un honneur d’avoir pu déposer la gerbe du Musée de la Résistance Nationale auprès de Lucienne Nayet, Présidente de ce Réseau. C’est un événement qu’il faut absolument continuer d’honorer. C’est important aujourd’hui de dénoncer la barbarie nazie et de commémorer le courage des camarades communistes tombés pour une juste cause, et je compte y retourner dans le futur, avec la JC de Morlaix au complet, voire si possible avec ma classe de lycée !

- Qu'est-ce que tu as envie de vivre et d'apporter dans ton militantisme ?

En s’engageant, on fait le lien entre les gens qui ont combattu dans le passé et les réalités d’aujourd’hui qui appellent toujours à résister. C’est la volonté d’appartenir à cette famille historique, celle de devenir un chaînon de son histoire qui m’anime aujourd’hui. Si les JC me permettent de perpétuer le mouvement communiste, je pense aussi pouvoir y développer mon esprit critique en apprenant notamment à débattre. Depuis mon adhésion, j’ai également fait de très belles rencontres au sein du Parti, et c’est cette émulation collective qui me plaît.

- Sur quoi d'après toi le PCF et les JC doivent travailler dans la période pour gagner de l'audience auprès des jeunes ?

Je pense qu’il y aurait un travail immense à faire autour du terme « communisme ». C’est aujourd’hui un mot totalement dévoyé, souvent confondu pour le discréditer avec le stalinisme et les régimes dictatoriaux. Le fait qu’il soit ainsi discrédité génère beaucoup de préjugés défavorables, d’où la difficulté d’atteindre les jeunes. Même si c’est un mot chargé de sens se rapportant à l’esprit de partage, je me demande parfois s’il ne faudra pas l’effacer pour faire ressortir nos idées qui n’ont aucun rapport avec le régime de Staline. Les jeunes sont de plus en plus éloignés de la politique, et souvent envahis par des idées reçues, ce qui rend compliqué l’approche. Il y a un énorme travail de pédagogie à accomplir. Et cependant il en va de l’avenir, de notre avenir.

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30 octobre 2020 5 30 /10 /octobre /2020 11:36
Point de vue - Confinement? - par Enzo de Gregorio
"Depuis le mois de septembre, le gouvernement nous rabâche que les universités ne sont pas de lieux de contamination à la Covid-19, que nous étudiants, nous nous contaminons dans les soirées étudiantes (interdites depuis la rentrée), dans les bars et restaurants (fermés dans de nombreuses villes et fortement réglementés dans les autres).
Aujourd'hui, nous entendons que nos facs pourraient de nouveaux fermer pour une durée indéterminée. Mais à quoi bon comme nous ne nous contaminons pas là-bas ?
Le gouvernement serait-il en train de mentir depuis le mois de septembre ou bien, utilise t-il la crise afin de continuer une politique de démantèlement du monde éducatif primaire, secondaire et supérieur ?
(...)
A partir de vendredi, le confinement sera de nouveau la norme. Nos restaurants, nos bars seront de nouveaux fermées, des familles seront impactés.
Nos petites librairies, nos magasins de centre-ville dit non essentiels seront de nouveau fermés, mettant en péril leur survie déjà fragile.
En parallèle, Amazon, C Discounts, et les supermarchés seront ouverts et vendront des jouets, des bouquins que nous aurions pu aller acheter au magasin du bout de la rue.
A quelques semaines de Noël, nos magasins payent une nouvelle fois le prix fort, ils payent le dépassement du gouvernement, ils sont les premières victimes de la crise économique post covid.
Aujourd'hui, mais aussi et surtout demain, soutenons nos petits commerçants, ceux qui font vivre nos villes et nos villages, anime nos campagnes et les marchés l'été, achetons local, achetons chez le libraire du bout de la rue, chez le chausseur du village voisin ou bien au caviste de la ville voisine".
 
Enzo de Gregorio, 18 ans, étudiant à Brest, adhérent du PCF Pays de Morlaix et des MJCF
 
Lire aussi:
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30 octobre 2020 5 30 /10 /octobre /2020 11:35
Jacqueline Lautier dite Ginette

Jacqueline Lautier dite Ginette

Portrait de résistante communiste -

5. Jacqueline Lautier dite Ginette

(100 ans d'engagements communistes)

Lu dans Héroïques Femmes en résistance Tome II, Antoine Porcu (éditions Le Geai bleu)

Née en 1926, adhésion en 1943, résistante de la première à la dernière heure, "Ginette" a eu une jeunesse bien remplie. Elle débute avec son père cheminot et son épouse, qui, dès l'interdiction du PCF, subissent les tracasseries policières. Jacqueline Lautier assure la liaison avec les militants communistes qui éprouvent des difficultés à se réunir. En 1942, la cellule se reconstitue. L'action du Parti dans les quartiers de Nice, au port, devient tangible. Le père de Jacqueline, Marcel Consalvi, plus connu sous le nom de Marius, est l'objet de soins particuliers. Aux premières lueurs de l'aube, la police investit son domicile. Tout est fouillé, de la cave au grenier. Les policiers sont à la recherche d'indices permettant d'inculper Marius qui, en déplacement à Toulon, échappe à l'arrestation. Les policiers ne prêtent pas attention à Jacqueline, qui n'a pas encore 16 ans, et qui assiste, muette, colère rentrée, au saccage du domicile familial. Elle en profite pour s'échapper. Une seule pensée la guide: aller à Toulon prévenir son père. Il ne doit pas rentrer à Nice. Jacqueline le remplace dans la distribution de tracts avec son groupe de jeunes. Mais bientôt le port est cerné. La 18e brigade policière, mitraillette au poing, entasse ce jeune monde dans un tramway réquisitionné pour la circonstance. Qualifiés de terroristes, ces jeunes, dont le plus âgé a 18 ans, sont accusés d'avoir commis une série d'attentats qui effectivement avaient eu lieu sans qu'aucun membre du groupe n'y ait joué le moindre rôle. Devant l'absence de preuves, la police remet tout le monde en liberté. Mais de nouvelles arrestations frappent la résistance. Nice devient trop dangereuse. Jacqueline se réfugie dans la clandestinité. En septembre 1943, elle rejoint Marseille et devient courrier de la région Sud-Est à l'état-major FTP.  En 1943, elle adhère au PCF, revient à Nice, mandatée pour assister à une réunion de responsables des maquis. Elle se se déplace pour la Résistance dans les Bouches-du-Rhône, les Alpes Maritimes, les Basses-Alpes (Haute-Provence aujourd'hui),  transporte des armes d'un point à l'autre de Nice à utilisant le tramway. La direction des FTP apprend que Ginette-Jacqueline est surveillée par la Police. Elle est aussitôt envoyée dans le Vaucluse où elle assure la liaison courrier des maquis en vélo. C'est dans un de ces maquis que Jacqueline apprend l'attaque du Vercors. Jacqueline fera aussi partie des partisans qui libérèrent Avignon avant l'arrivée des alliés, une volonté du commandement communiste des FFI, anciens FTP, dans le cadre d'un mot d'ordre d'insurrection générale. 

 

 

Lire aussi:

Portrait de résistante communiste : 4 - Marie-Claude Vaillant-Couturier (100 ans d'engagements communistes)

Portrait de résistante communiste - 3 - Maï Politzer 1915-1943 (100 ans d'engagements communistes)

Portrait de résistante communiste: 2 - Madeleine Braun, cofondatrice du Front National, première femme vice-présidente de l'Assemblée Nationale (100 ans d'engagements communistes)

Portrait de résistante communiste - France Bloch-Sérazin, Chimiste de la résistance armée, 1913-1943 (100 ans d'engagements communistes)

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30 octobre 2020 5 30 /10 /octobre /2020 11:01
Budget de la Sécurité sociale : Pénurie, fragilité, dénuement - par Pierre Dharréville, membre de la direction du PCF, député des Bouches-du-Rhône.
Budget de la Sécurité sociale : Pénurie, fragilité, dénuement

Depuis trois ans maintenant, nous dénonçons les budgets de la Sécurité sociale qui se succèdent, nous dénonçons les choix politiques qu’ils représentent, l’affaiblissement de la sécurité sociale, la casse de l’hôpital public. Ces budgets, les uns après les autres, ont conduit le pays dans cet état de grande pénurie, de fragilité extrême, de dénuement face au surgissement du virus. Le gouvernement a été rattrapé par le réel. La situation dans les hôpitaux est catastrophique : c’est le revers de la médaille d’une politique qui renonce à prendre l’argent là où il est.

Dans les établissements, la tension est palpable. La colère aussi. Au moment où l’on constate une grande perte de sens, entendre la rengaine – « c’est un problème d’organisation » – exaspère. Le gouvernement a beau répéter qu’aucun gouvernement n’a fait autant pour la santé, ça ne va pas. Le Ségur de la santé ne rattrape pas le retard pris pendant des années, ne concerne pas tous ceux qu’il devrait embrasser et ne saurait être présenté pour solde de tout compte. Il nous fait seulement passer de la vingt-deuxième à la dix-huitième place européenne pour la rémunération des infirmières. Mais le personnel continue à s’en aller, refusant de persister à vivre ce jour sans fin.

Dès le mois de mars, il aurait fallu engager un grand plan de recrutement et de formation pour ajouter du personnel dans les hôpitaux et l’accompagner d’un plan d’investissement en matériel, en lits de réanimation et en lits en général. Il y avait, dans l’urgence, des actes forts à poser pour anticiper et commencer à changer de trajectoire. 3 400 lits ont été fermés en 2019 et 4 200 en 2018, 100 000 en vingt ans, mais le gouvernement annonce 4 000 créations en 2021.

Le gouvernement a dû faire des entorses à sa doctrine, financer assez massivement les dépenses Covid-19, et ajouter quelques touches avec des amendements mais le compte n’y est toujours pas.

Parmi les mesures positives, il y a l’allongement du congé de paternité ou de parentalité et la diminution du rôle de la T2A. Mais le problème, c’est que le gouvernement continue à ne pas tirer les leçons de l’épreuve et à se contenter d’affichage. Les dépenses exceptionnelles pour lutter contre le Covid-19 sont inscrites dans le budget, ainsi que les mesures du Ségur de la santé, même si elles sont insuffisantes et inégalitaires. Mais on continue à compresser le reste du financement, avec 4 milliards d’efforts demandés, dont 800 millions à l’hôpital. Quant à l’effacement d’un tiers de la dette des hôpitaux, le gouvernement le conditionne à « des engagements d’assainissement de la situation financière ». Les CREF (1) et autres COPERMO (2) continuent de courir ; c’est proprement insensé. Si l’on regarde plus loin, c’est assez logique puisqu’il souhaite maintenir le cap de l’assèchement des ressources de la Sécurité sociale, chargée de surcroît depuis quelques mois d’une dette covid indue, et de l’affaiblissement du principe même de la cotisation. Il essaie de régler le problème de l’hôpital à côté de l’hôpital, au lieu d’annoncer une nouvelle ère, avec l’ouverture de nouveaux services, de lits, de postes et une meilleure articulation avec la ville et l’ensemble du système de santé.

Dans ce budget, on trouve aussi la création, prétendument historique, d’une cinquième branche dédiée à l’autonomie. Comme pour la réforme des retraites – que la lucidité devrait conduire à abandonner au lieu de s’entêter –, on nous dit que c’est la grande réforme sociale du quinquennat. Mais là encore, on n’est pas au rendez-vous. Les objectifs assignés à la CNSA (3) ne nous rassurent pas. Le gouvernement refuse de créer une nouvelle ressource alors même que le rapport Libault évalue à 6,5 milliards les besoins de financement en 2024. Il a rejeté nos propositions en la matière. Ce défi appelle une ambition politique forte, garantissant à chacun un droit universel à l’autonomie, ce qui nécessite un niveau élevé de couverture sociale et l’existence d’un grand service public décentralisé de l’autonomie. C’est le sens de notre proposition d’établir un droit universel à l’autonomie qui garantisse à chacun et dans les mêmes conditions l’accès aux prestations d’autonomie, le libre choix des personnes sur le maintien à domicile et la réduction du reste à charge en établissement pour les assurés. Là où nous proposons de répondre à une nécessité sociale, le gouvernement s’en tient à une logique d’affichage et à des mesures comptables.

C’est donc un budget en trompe l’œil qui masque mal que la Sécurité sociale est peu à peu transformée en instrument de secours public et utilisée comme une variable d’ajustement des politiques économiques. Au moment où l’on fête ses 75 ans, comment ne pas s’interroger sur ces orientations qui dessinent une société moins protectrice et moins solidaire, où les patients, pourtant ayants droit, sont toujours plus regardés comme des clients potentiels pour le marché ?

Pierre Dharréville, membre du CEN, député des Bouches-du-Rhône.

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1. Contrats de retour à l’équilibre financier.

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30 octobre 2020 5 30 /10 /octobre /2020 09:00
Laurent Brun à Quimper en meeting pour les Européennes avec Marie-Pierre Vieu et Glenn Le Saoût - printemps 2019

Laurent Brun à Quimper en meeting pour les Européennes avec Marie-Pierre Vieu et Glenn Le Saoût - printemps 2019

CONFINEMENT ?
- par Laurent Brun
 
Le problème de notre pays c'est que le Gouvernement Macron est engoncé dans une idéologie ultra libérale fanatique qui le conduit à ne pas anticiper, ne pas intervenir sur les outils économiques et se contenter de faire du marketing politique. Ce n’est pas de l’incompétence. C’est du dogmatisme.
 
Le confinement est une mesure très archaïque. Comme on ne sait pas quoi faire d’autre, on fige le pays en espérant que ça fige le virus. C’est une mesure du moyen âge, qui peut se comprendre lorsqu’on est « surpris» en mars, que l’on ne dispose pas des plus élémentaires moyens matériels, et que l’hôpital est incapable de faire face à une épidémie massive.
 
Mais 8 mois plus tard, pourquoi est-on en situation de n’avoir pas plus de choix ?
 
Le confinement est un désastre économique et social. Sa mise en œuvre une seconde fois me met personnellement très en colère. Et ce n’est pas la colère hypocrite du MEDEF dont les membres les plus éminents, en bons capitalistes sans morale, ont profité de la pandémie pour s’enrichir ou pour restructurer et délocaliser les industries. C’est la colère des milliers de pauvres qui vont se noyer dans des difficultés financières supplémentaires parce que perdre quelques euros de revenu est un drame pour eux. La colère des milliers de chômeurs supplémentaires et de tous ces jeunes qui débarquent sur le « marché » de l’emploi dans ce contexte. La colère des filières culturelles ou sportives qui meurent. La colère des salariés des « commerces non essentiels » qui sont abandonnés. La colère de la sécu exsangue parce que ses caisses sont prises pour un distributeur automatique par le Gouvernement alors que les profits ne sont même pas égratignés. La colère pour les infirmières et les médecins qui servent de paillasson à leur Ministère, comme les profs d’ailleurs. La colère des premiers de corvée à qui on promet une 2ème vague plus meurtrière que la 1ère. La colère pour nous tous.
 
Nous devons nous confiner. Mais nous devons aussi demander des comptes à ce Gouvernement inconséquent...
 
Je ne m’étends pas sur la situation, nous la connaissons tous. Même Macron, tout de mépris vêtu, est obligé de reconnaître les erreurs. Mais il s’en exonère immédiatement sous le prétexte qu’on ne pouvait pas faire autrement. Responsable mais pas coupable. On l’a déjà entendu et c’est la question principale : pouvait on faire autrement ?
 
Sans aucun doute puisque d’autre pays y sont parvenus.
 
En octobre, la Chine - pays d’1,3 milliards d’habitants - prenait de nouvelles mesures ciblées et massives des qu’elle détectait quelques dizaines de cas... pas de seconde vague à l’horizon.
 
Le Vietnam ne compte que quelques cas détectés, tous importés, ces dernières semaines.
 
Pendant que l’Amérique du Sud plonge comme l’Europe, Cuba n’a connu que 87 décès et la pandémie semble sous contrôle. Il faut rajouter que l'île révolutionnaire a envoyé près de 50 000 médecins dans divers pays du monde pour aider à soigner (dont 15 en Martinique).
 
Objectivement, il n’y a pas que les pays socialistes qui s’en sortent bien : la Nouvelle Zélande (pays qui a renationalisé son chemin de fer il y a quelques mois - spéciale dédicace) s’inquiétait le 15 octobre d’une possible recrudescence après avoir détecté 1 cas !!! Des mesures énergiques étaient immédiatement prises...
A chaque fois il semble y avoir une caractéristique commune : on détecte vite car on test systématiquement et massivement, et on agit pour circonscrire le foyer infectieux.
 
Donc que devrait-on faire en France ?
 
Nous sommes « en guerre » selon le Président Macron. Et pourtant il se contente d’attendre le virus derrière la ligne Maginot des mesures barrière. La encore, je précise qu’il faut effectivement appliquer ces mesures. Mais elles ne sont que symboliques et manifestement peu efficaces. C’est ce qu’on applique quand il n’y a plus rien d’autre. C’est comme si toute la sécurité des circulations ferroviaires reposaient seulement sur le port du gilet orange. Heureusement que nous avons les mesures techniques lourdes et les procédures de sécurité, sinon il y aurait des morts tous les jours ! Le gilet ne sert modestement que lorsque toutes les autres mesures ont été débordées... donc en fait, il vaut mieux éviter d’avoir à s’en remettre à lui, même s’il faut le porter !
 
Donc, c’est parti pour le confinement. Déjà on s’interroge : pourquoi l’État se contente d’interdire et n’organise pas?
Il faut réquisitionner les centres de colo ou de vacances (qui de toutes façons ne servent pas) pour loger correctement les SDF, les orphelins, et tous ceux qui sont en détresse.
A ce titre, le Comite Central d’Entreprise SNCF avait mis à disposition des pouvoirs publics ses propriétés lors du précédent confinement mais très peu ont été utilisées... Ensuite il faut stopper les procédures d’expulsion locative (je sais, la trêve commence le 1er novembre, mais elles reprennent le 31 mars et rien ne sera réglé à ce moment là d’après le conseil scientifique, donc autant anticiper et trouver des solutions alternatives).
Il faut également assurer le ravitaillement des personnes isolées, ou celles qui ne peuvent pas sortir (handicapées), ou celles qui ne devraient pas sortir car jugées fragiles face au virus. Certaines mairies ont mis en place des choses mais c’est insuffisant et inégal d’une ville à l’autre. Pourquoi ne pas mobiliser les personnels municipaux pour les livraisons et réquisitionner les plateformes de la grande distribution pour l’approvisionnement... la « guerre », c’est le moment où on organise la survie, pas celui où on fait des expériences de décentralisation libérale !
Concernant l’application numérique pour tracer les cas contacts. Il y a clairement un manque de confiance des citoyens vis à vis de ce dispositif. La crainte principale semble être le flicage ou l’utilisation mercantile des données collectées par l’entreprise privée fabricante. Plutôt que de faire la morale, le Gouvernement devrait chercher à faire la transparence : confier la création et la gestion de cet outil à un organisme public au dessus de tout soupçon (l’INSEE ou une autre structure disposant d’un peu d’indépendance pourrait s’en occuper), et créer un organisme de contrôle de l’utilisation avec des représentants de toutes les tendances politiques, d’associations, et même de citoyens tirés au sort. Bref, tout faire pour que ce dispositif ne soit plus un objet de controverse mais redevienne un outil technique neutre au service de l’intérêt général. Au passage, l’indépendance des fonctionnaires grâce à leur statut, ça sert à ça...
Si on veut limiter le confinement dans le temps, faire baisser rapidement le taux de contamination et surtout éviter une remontée lors du confinement, il faut tester, tester, tester !!! Mais pas selon le système actuel (on ne test que les cas symptomatiques donc c'est déjà trop tard, et on attend les résultats trop longtemps donc ça ne sert à rien). Il faut passer au test systématique afin de débusquer tous les cas non symptomatiques, les confiner rapidement et ainsi briser la chaîne de contamination. Donc déjà il faut des tests rapides et simples d’utilisation (les test anti géniques donnent un résultat en 30 minutes et ne nécessite pas de geste médical). La chine en dispose depuis mars après avoir organisé la coopération de 22 de ses universités afin de les développer... en France ils débarquent à peine parce qu’on laisse les entreprises privées et le marché les développer... Grâce à eux il est possible de créer de véritable check-point partout, par exemple à l’entrée des EHPAD (ce qui permettrait d’autoriser les visites), évidemment à tous les points d’entrée du pays, et dans n’importe quelles structures repérées comme génératrice de foyers d’infection. L’armée pourrait être mobilisée pour créer des points de test dans les quartiers, dans les gares, dans les centres commerciaux. Les employeurs pourraient également être mis à contribution : ils ne veulent pas du confinement, et bien qu’ils organisent les tests systématiques à la prise de service.
En France 287 grandes entreprises emploient 4 millions de salariés, ce serait déjà ça de moins à organiser pour les pouvoirs publics. Si on élargit aux entreprises de taille intermédiaire c’est 7,5 millions de salariés de plus. Enfin l’école et l’université pourraient aussi être des lieux de tests massifs. Et une fois la détection largement déployée, il faudrait confiner immédiatement les cas positifs, en prévoyant des dispositions pour les exonérer du travail et les indemniser (afin qu’ils ne soient pas récalcitrants à se faire tester), et aussi pour les isoler de leur famille s’ils le souhaitent (dans le cas contraire, c’est toute la famille qui serait confinée). Si ce genre de dispositif était déployé réellement, le confinement systématique ne serait plus nécessaire. Et on disposerait aussi de statistiques fiables sur l’évolution de l’épidémie.
Pour terminer, il faut se préoccuper sérieusement de la dernière ligne de défense, l’hôpital public, qui est dans un état grave. Macron fanfaronne en expliquant qu’on ne peut rien faire puisqu’il faut 5 à 10 ans pour former le personnel. Il faudrait déjà néanmoins afficher l’arrêt des fermetures de lits et une programmation pluriannuelle de formation et d’embauche de personnel médical. Ça ne résoudrait pas nos problèmes d’aujourd’hui mais ça éviterait d’en créer dans 10 ans, comme l’ont fait Sarkozy et Hollande. 10 ans c est demain.
Ensuite il faut remotiver sérieusement les effectifs existants, stopper l’hémorragie. Au delà du plan d’embauche il faut de la reconnaissance : les personnels revendiquent 300€ d’augmentation mensuelle, accordons leur immédiatement, sans mégoter ! La CGT a chiffré la mesure à 8,7 milliards. Certains en seront horrifiés mais c’est 1/10e du CICE qui n a crée aucun emploi, c’est la moitie du plan d’aide au secteur aérien qui licencie à tour de bras, etc... et c’est une vraie mesure de relance parce qu’en plus, ça dope la consommation et donc la reprise économique...
Coté réaction immédiate pour faire face à la vague, il faut une mobilisation générale pour soulager la médecine de ville et les urgences, pour faire les tests partout, etc... cette mobilisation pourrait par exemple s’incarner dans la réquisition des spécialités non essentielles (chirurgie plastique et plein d’autres). Ces gens ont fait médecine. Ils ne peuvent peut être pas traiter un patient en réa, mais ils peuvent sûrement aider aux étapes antérieures de la maladie. Il faut réquisitionner les personnels et infrastructures privées, et pourquoi pas solliciter l’aide des pays qui ont déjà vaincu la maladie. Les personnels de santé eux mêmes ont probablement des idées sur la manière de leur apporter des moyens. La aussi il ne faut pas ergoter !
Nos lits de réa, qui devaient passer à 15000 avec des respirateurs made in France qui ne sont finalement jamais arrivés, doivent effectivement être augmentés. 50 lits en moyenne par département c'est un scandale. Lancer une entreprise publique de fabrication de ce genre de matériel ne serait pas du luxe. Et en profiter pour rouvrir quelques hôpitaux fermés récemment pourrait aussi être utile, notamment pour ne pas reporter trop d’opérations et de traitement des autres maladies graves. Si les chinois arrivent à construire un hôpital de campagne en 15 jours, nous devrions pouvoir rafraîchir et re équiper un bâtiment assez rapidement (Hôtel-Dieu à Paris et à Lyon, Val de Grâce...). Peu importe qu’ils aient été cède pour des opérations immobilières. Si on peut mettre entre parenthèse le code du travail, pourquoi ne le pourrait on pas avec le code du commerce ? On reprend ce qui n’aurait jamais dû être vendu, dans l’intérêt supérieur de la Nation !
 
Alors bien sûr tout cela coûte beaucoup d’argent. Donc dans les mesures d’urgence, il faut aussi trouver de quoi assumer. A situation exceptionnelle (nous sommes en guerre ou pas ?), mesure exceptionnelle : les sociétés du CAC40 prévoient 30 milliards de dividendes à leurs actionnaires cette années, taxons cela à hauteur de 50, 70, ou 100%, en fonction de ce qui est nécessaire.
 
Si l’on élargit à toutes les sociétés cotées de France, on peut imaginer qu’au moins 80 à 100 milliards sont mobilisables. Et si l’on rajoute les grandes fortunes, les très hauts revenus, la rémunération des propriétaires d’entreprises non cotées, on voit qu’il n’y a pas trop de problème.
Si Chypre a pu prélever 60% de l’épargne de ses citoyens au delà de 100000€ pour faire face à une petite crise financière, nous pouvons faire pareil sur les grosses fortunes pour affronter la pire pandémie de notre siècle. Et si nous voulions être encore plus efficaces, on ne se contenterait pas de taxer, on reverserait la somme sous forme de salaire exceptionnel aux salariés, l’État en récupèrerait au moins 20% sous forme de fiscalité, les collectivités locales en profiteraient aussi, et la sécu - grâce aux cotisations sociales - en récupèrerait 30%, et ça doperait un peu la consommation pour relancer les spectacles, les librairies, les restau, etc...
Le dernier point c’est la mise en œuvre.
2 étapes : dès maintenant, trouver des formes de lutte sociales pour exiger des mesures concrètes de son entreprise, d’ une autorité de santé, d’un préfet... la CGT peut y contribuer alors syndiquez vous, organisez vous, battons nous !
Et en 2022 on vire ces incompétents et on se mobilise massivement pour porter au pouvoir des gens qui mettront réellement des solutions en place !
Voilà, j’écris tout parce que ça fait du bien de formaliser ses idées pour les soumettre au débat. Je n’en peut plus des commentaires permanents sur les chaînes d’info et de la répétition stupide des éléments de langage du gouvernement dans la plupart des médias. Oui on peut faire autrement que l’enchaînement d’imbécilités qu’ils nous imposent !!
 
Laurent Brun
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