Une société apaisée sous le talon de fer du capitalisme et de la "liberté du renard dans le poulailler", des travailleurs dociles, conformistes, malléables, besogneux, comme au temps d'arrière grand-papa dans les propriétés terriennes familiales, François Régis Hutin, le brillant "moraliste" chrétien qui nous inflige chaque année son esprit de Noël dans le Ouest-France, un journal régional de qualité malgré tout, est un multi-récidiciviste en matière de volonté de discréditer les conquêtes sociales et l'esprit "d'utopie et de jouissance" des travailleurs qui veulent briser leurs chaînes.
Il y a deux ans par exemple, il se fendait d'un éditorial tout tranquille et débonnaire en apparence, rempli de haine de classe en vérité, où il comparait la France du 21e siècle, celle des 35h et des conquêtes sociales que des partis et des syndicats démagogiques voulaient défendre, à la France du Front Populaire qui, toute occupée de jouissance, de pastis et de fornication, avait parait-il conduit à la débâcle de juin 40 et à l'occupation, en prenant un retard considérable sur l'Allemagne nazie "réaliste, travailleuse", soumise à un ordre type d'ordre social.
C'était évidemment ressusciter la vieille thèse de l'extrême-droite et des milieux réactionnaires expliquant la défaite par la démagogie sociale du Front Populaire... tout en se jetant avec allégresse et impudeur dans les bras de Pétain et de l'occupant fasciste,
C'est oublier bien curieusement qu'en dépit peut-être d'un certain angélisme pacifiste du gouvernement de Front Populaire n'ayant pas conduit à une politique d'armement et de fermeté plus importante face à l'Allemagne nazie, les seuls à combattre à l'époque les fascistes, en Espagne notamment, étaient cette gauche populaire, vibrante et généreuse, communiste, anarchiste, trotskiste, qui donne des boutons au vieux et triste François Régis.
Hier, dans le Ouest-France, François Régis Hutin a à nouveau fait très fort dans le nouveau sport journalistique, très prisé depuis des semaines et le Congrès de la CGT, s' expliquant par la volonté d'écraser les dernières résistances du monde du travail et par les intérêts des propriétaires de journaux, ces grands féodaux souvent clients ou obligés du pouvoir gouvernemental (pensons à Dassault, Niel, Drahi, Bolloré...): salir la CGT, l'accuser de faire plonger la France dans le chaos, le retard économique, de la freiner dans son ascension au ciel de l'ultra-libéralisme!
Le titre de l'édito du 28 mai 2016, "Ce conflit est le contraire de la modernité".
Sous-entendu, l'exploitation et l'autoritarisme présidentiel pour imposer les intérêts du patronat, ça c'est moderne...
Le texte d'une rare violence vaut le coup d'être cité en longueur tant il s'illustre par la franchise du discours anti-syndical et anti-grève d'un conservateur libéral en matière économique qui se retrouve très bien dans la politique du gouvernement Hollande-Valls-Macron.
Ce texte montre bien aussi à rebours le caractère complètement hypocrite et idéologique des discours lénifiants défendant le "dialogue social" entre "partenaires sociaux". Ce que ces gens veulent, ce sont des syndicats faibles, soumis, aux ordres, voire disparus...
"Non ce n'est pas le progrès qui est en marche en France ces temps-ci. Ni la modernité, ni la liberté, ni la démocratie. Au contraire, c'est le repli sur soi étouffant, le conservatisme le plus ringard, le plus nocif et aussi le plus dissimulé, le plus hypocrite".
François Régis parle t-il des partisans de la Manif pour tous?
D'islamophobes hystériques ou des islamistes fanatiques. Pensez-vous!
Il parle des centaines de milliers de français "égoïstes et irresponsables" qui ont fait plusieurs jours de grève depuis février contre la loi travail de Mme El Khomri et de M. Macron, il parle d'abord et surtout de la CGT, avec ce Philippe Martinez à la figure de grognard d'Empire qui fait frémir les mères de famille comme il faut dans les bonnes maisons.
"- Des rouges qui hurlent à nos fenêtres, oh François Régis, qu'allons-nous devenir! Ou vais-je cacher les bijoux et l'argenterie. Et la bonne qui traîne avec eux!.... "
"On veut bloquer le pays alors qu'il est déjà à la traîne derrière les autres grands pays européens. Ainsi, les investisseurs étrangers ont augmenté leurs implantations de 12% en Europe, avec des records pour la Grande-Bretagne et l'Allemagne, tandis que la France recule de 2% dans ce domaine. Notre retard s'accentue.
On a dénombré 20 000 demandeurs d'emploi en moins, bon signe même si une hirondelle ne fait pas le printemps".
Vous vous extasieriez peut-être moins à propos des hirondelles et du printemps, cher François Régis, tel un émule moderne de Lamartine, si vous faisiez partis de ces chômeurs radiés, privés d'indemnités, sortis des listes, ou parqués dans des formations bidons ou des petits boulots à la con pour soigner les chiffres du chômage.
"C'est donc maintenant qu'il faudrait souffler sur cette petite braise qui luit quand même sous la trop épaisse cendre de nos activités en berne".
Et les 800 000 chômeurs en plus causés par la politique libérale et austéritaire de Hollande, oubliés?
Ce qui est important, c'est la concomitance entre des chiffres mensuels du chômage plutôt "bons" pour les gens qui regardent ça de loin et qui n'ont jamais reniflé un chômeur de près (d'ailleurs on l'évite!) et la plus grande attaque contre le droit social imposée depuis la Libération (le dernier précédent, c'est justement le fait du gouvernement réactionnaire de Daladier qui a suivi le Front Populaire, avec la même assemblée parlementaire, devenue farouchement anti-communiste et anti-syndicale).
Montrer qu'il y a une relation entre les deux, que se battre contre la loi El Khomri, c'est vouloir condamner la France au chômage et au déclin économique. Leur propagande n'est pas plus subtile que ça, elle s'adresse à des veaux, puisque c'est comme ça qu'ils nous considèrent du haut de leur superbe.
"Et bien non, un syndicat s'acharne à l'étouffer"...
A étouffer le progrès, bien sûr... Cette petite braise d'espoir.
François Régis est un poète, un poète qui ne craindrait pas de faire fusiller la piétaille insoumise, à l'image, toute comparaison gardée, de Lamartine en 1948, des Goncourt, de Flaubert, de Maxime du Camp et de tous ces littéraires anti-conformistes de pacotille qui ont applaudi au massacre des communards parce qu'ils adoraient en secret le veau d'or de l'ORDRE ET DE LA SÉCURITÉ BOURGEOISE.
"Les syndicats proclament en permanence vouloir défendre les travailleurs et leurs avantages acquis."
Ce ne sont pas des droits, ce ne sont pas des conquêtes, ce sont des avantages acquis, en somme, des privilèges.
"Qui y serait opposé?" Toi, bonhomme. Celui qui a intérêt à faire trimer l'autre. Le propriétaire.
"Personne". Tu mens! Toi François Régis, tous les pores de ta peau se hérissent quand tu entends parler de conquêtes des travailleurs!
"Malheureusement, ces proclamations semblent oublier les six millions non encore travailleurs qui aspirent désespérément à le devenir".
La corde est désormais usée, l'argument dégueulasse ressassé: salauds de travailleurs à statut et protections collectives, salauds de syndicats, c'est vous, non les patrons, non les politiques libérales et de désindustrialisation, qui affamez et privez d'espoir ces millions de chômeurs, de travailleurs pauvres.
Si on étendait la précarité et la flexibilité à tout le monde, du travail, il y en aurait pour tout le monde...
Enfin, tout le monde, il ne faut pas exagérer non plus. Il y a un pas qu'il ne faut pas franchir: l'égalité des travailleurs devant la flexibilité oui, mais pas l'égalité des conditions tout de même.
"Or la loi El Khomri, si l'on a bien compris, veut desserrer les freins de l'emploi. Croit-on que la combattre va dans le bon sens?"
C'est sûr que dit comme ça, comme un curé qui s'adresse à un enfant de 8 ans, c'est difficile de dire Oui.
"Cette loi est certainement imparfaite. On en discerne mal les contours, mais donner plus de souplesse dans la gestion des embauches et des licenciements va dans le bon sens. Les Français, contrairement à ce que pensent les syndicats, ne veulent pas d'abord être protégés par eux mais d'abord travailler. "Qu'on laisse donc avancer la France qui veut travailler!" comme l'a écrit M. Macron".
Macron qui exhume la France qui se lève tôt.
Vous croyiez vous être débarrassés du sarkozysme en envoyant Sarkozy se faire dorer dans les îles paradisiaques et les villas de Marrakech ou autres édens pour riches bannis, on ne se débarrasse pas comme ça du discours de la grande bourgeoisie sur le bon peuple qui trime et qui regarde avec haine ces nantis qui fainéantent: rmistes, chômeurs, planqués de fonctionnaires, travailleurs à statut.
Sous-titre: "Que souffle un vent de liberté".
Non, ce n'est pas un appel à l'insurrection civique, à la révolution citoyenne, plutôt le contraire: CRS, faites le ménage, et laissez-nous faire des affaires tranquille.
"Pour cela, il faut cesser d'effrayer les investisseurs, de les détourner des embauches comme c'est le cas depuis des années avec l'instabilité fiscale, sociale, législative, et un marché du travail rigidifié".
L'investisseur, c'est le Messie dont la CGT, véritable antéchrist, retarde la venue sur la terre de France.
"Il est temps que souffle ici le grand vent des libertés, du dynamisme, dans le respect des personnes."
Le grand vent du printemps ... ou de l'hiver patronal qui balaiera toutes les conquêtes sociales et les protections des travailleurs pour installer une société libre à l'américaine ou à l'anglaise après Thatcher ?
"Au lieu de cela, on déclenche des grèves tout azimuts et l'on décourage tout le monde, en France comme à l'étranger. Oui, la grève est légale. Ce n'est pas une raison pour en abuser. Par contre, ce qui est illégal, ce sont les casses désastreuses auxquelles on a assistés... Ce qui est illégal aussi, ce sont les entraves à la circulation, à l'entrée de ceux qui veulent travailler dans leurs ateliers, leurs usines, leurs bureaux.
Cela doit être réprimé sans délai. C'est le premier devoir d'un gouvernement démocratique, sinon les gens iront chercher de l'autorité ailleurs...".
Hutin, c'est la République du bout des lèvres, celle des Versaillais, celle qui subordonne les droits imprescriptibles de l'homme (liberté, égalité,...) à la liberté et à la sécurité du propriétaire, du propriétaire des moyens de production, du riche, de l'investisseur et qui met la Police financée par l'argent de tous au service des intérêts de ces derniers.
Hutin, c'est Versailles, c'est cette France qui préfère, sinon Hitler, du moins Vichy ou tout maréchal de pacotille qui pourra réprimer le peuple insoumis, au Front Populaire ou à la Commune.
L'édito se termine par un vibrant appel:
" Le gouvernement doit tenir bon".
La sainte alliance de la réaction et du PARTI SOCIALISTE new age, version ultra-libérale...
Cette semaine pourtant, un autre chrétien éminent tenait des propos d'une toute autre teneur, le pape François.
De quoi donner des doutes ou des problèmes de conscience à François Régis.
Pensez-vous, ces gens là ont les idées de leurs conditions et de leurs intérêts, la religion n'est en eux qu'un vernis social ...
" Le pape François a ainsi dénoncé mardi dernier, lors d'une visite à une soupe populaire, le "capitalisme sauvage" et prêché pour un retour des valeurs de générosité et de charité. La semaine dernière, il avait lancé un vibrant appel à une réforme de la finance mondiale, estimant que l'impitoyable "culte de l'argent" et la "dictature de l'économie" avaient aggravé la vie de millions de personnes à travers la planète. Il a sévèrement critiqué le capitalisme sauvage qui a introduit la logique du profit coûte que coûte, du donner pour obtenir, de l’exploitation au détriment des personnes. Les résultats nous les voyons dans la crise actuelle. Nous devons tous retrouver le sens du don, de la gratuité et de la solidarité – a lancé le Saint-Père. "
A Régis Hutin, décidément je préfère François, qui a pris le nom de du mystique d'ASSISE.
Ismaël Dupont