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2 août 2017 3 02 /08 /août /2017 09:31

On croyait dimanche avoir vu un grave accident industriel. Le trafic en gare Montparnasse était hier encore largement perturbé, sans que les causes en soient connues. Des dizaines de milliers de passagers, très majoritairement attachés au service public, comme de cheminots, qui ont la fierté de leurs missions chevillée au corps, ont vécu des moments parmi les plus pénibles qui soient. Ce qu'il s'est passé, et singulièrement à cet endroit-là, atteint le paroxysme d'une dégradation généralisée, largement aussi incontestée que la rotation de la Terre autour du Soleil. Et c'est bien là où le bât blesse. « On sait qu'il y a eu un problème de gestion des priorités à la SNCF pendant de longues années. On a priorisé les lignes à grande vitesse aux dépens des lignes de proximité et c'est ça qu'on va corriger dans les semaines, les mois et les années qui viennent », déclare le député LREM préposé à la parole officielle sur les ondes de France Inter. On retrouve là l'argumentaire déployé de chef de l'État en ministre des Transports, qui porte une « loi de programmation » prévue dès le premier semestre 2018.

Oui, il y a urgence. Mais pour agir dans quel sens ? Les syndicats, fédération des cheminots CGT en tête, ne manquent d'alerter et d'interpeller l'État actionnaire sur l'état du réseau, mais aussi sur des choix de gestion qui cassent les savoir-faire et nourrissent une privatisation larvée, de sous-traitance en cascade en filialisation à tout-va. Tous comme les élus de gauche, comme en Occitanie, et singulièrement communistes, à qui l'on doit d'avoir ferraillé pour obtenir la modernisation incontestable du matériel TER dans maintes régions.

Après avoir livré à Vinci le jackpot de la LGV Paris-Bordeaux, il est assez cynique d'entendre le pouvoir parler d'arrêter les « grands projets inutiles », tandis que les présidents de droite de régions, tel Bruno Retailleau en Pays de la Loire, entament, sans que rien ni Bruxelles les y obligent, la mise en concurrence de la SNCF. Tout comme mettre en avant la ruralité pour pousser les feux de la priorité à la route, à voir le bilan social désastreux des cars Macron. Voilà qui ajoute aux raisons de se mobiliser très largement à la rentrée contre l'emballement dans la casse d'atouts publics au nom de logiques qui les minent de l'intérieur.

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2 août 2017 3 02 /08 /août /2017 09:09

Le député communiste Alain Bocquet à l’Assemblée nationale, en février dernier défendant le projet de COP fiscale. Mousse/E-Presse Photo.com

 

L’Assemblée nationale l’avait validée cet hiver, mais Matignon laisse au point mort la proposition de COP fiscale des députés communistes.

 

Il faut remonter au 2 février dernier pour avoir des nouvelles parlementaires de la COP (conférence des parties) fiscale mondiale. C’est en effet ce jour-là que l’Assemblée nationale validait la proposition du député communiste Alain Bocquet et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) pour que la France propose une COP fiscale, reprenant le principe de la COP21, liée pour sa part aux enjeux climatiques et écologiques (lire notre édition du 3 février). « Comme les gaz à effet de serre font des trous dans la couche d’ozone, les paradis fiscaux et l’opacité créent des gouffres dans la finance mondiale », avait déclaré l’élu du Nord, dont c’était le dernier mandat. Depuis, plus rien. Le texte avait pourtant été bon train dans l’Hémicycle puisque, malgré l’abstention de la droite, la commission des Affaires européennes à l’Assemblée nationale comme celle des Finances l’avaient elles aussi adopté.

 

« Contre l’évasion fiscale » et « pour la laïcité financière »

Pourtant, si le travail parlementaire avait avancé depuis cette date, la France serait bien partie pour prendre la tête de la lutte « contre l’évasion fiscale » et « pour la laïcité financière ». L’évasion fiscale prive les comptes publics de la France de près de 80 milliards d’euros et est aujourd’hui « organisée, généralisée au cœur du système financier », décrivait Alain Bocquet. Dans le discours de politique générale du premier ministre, Édouard Philippe, elle était malgré tout passée sous silence alors même que ce dernier disait vouloir moraliser la vie publique. « Mais l’indécence de l’argent, elle crève les yeux ! » tonnait Pierre Laurent, sénateur de Paris, dans son intervention en réponse au discours d’Édouard Philippe. Le premier secrétaire du PCF relevait d’ailleurs que celui-ci ne disait « rien de l’évasion fiscale, qui coûte 80 milliards par an au pays, rien de la résolution votée à notre initiative par l’Assemblée nationale pour une COP fiscale mondiale ». À l’Assemblée nationale aussi, les communistes rappellent l’engagement des députés qui ont voté la résolution à la quasi-unanimité dans la précédente mandature. Mais là encore, alors que le 20 juillet dernier le député du Nord Fabien Roussel demandait au gouvernement ce qu’il comptait faire pour agir contre les paradis fiscaux en citant « la belle idée d’une COP fiscale et financière », les ministres ont botté en touche. Dans sa réponse, le ministre des Finances, Bruno Le Maire, a réussi à ne pas dire un mot sur cette dernière, arguant que la France était « à la pointe de la dénonciation des paradis fiscaux » dans le cadre du G20. Pas assez pour faire rentrer les dizaines de milliards d’euros concernés dans les caisses apparemment.

 

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2 août 2017 3 02 /08 /août /2017 09:05

Simulacre de négociations à huis clos, organisations syndicales écartées, Parlement réduit à une armée de scribes... Tout autant que nos droits, c'est la démocratie qui est en danger !

 

Primauté à l'accord d'entreprise, licenciement sans contrainte, précarité démultipliée... Le projet de loi d'habilitation du gouvernement à modifier le Code du travail par ordonnances, adopté par le Conseil des ministres du 28 juin, manifeste sa volonté de réduire à néant les droits des salariés. La CGT appelle à manifestation et grève le 12 septembre. Et le 9, le collectif Pour nos droits sociaux organise un meeting unitaire (1). Décryptage du projet.

 

Ce projet de loi d'habilitation se décline en neuf articles, dont six principaux. En voici l'essentiel.

 

ARTICLE 1. Un code du travail par entreprise

L'objectif revendiqué est de « reconnaître et attribuer une place centrale à la négociation collective notamment d'entreprise ». En fait, cet article consacre l'inversion de la hiérarchie des normes : l'accord d'entreprise deviendrait la règle. Preuve en est qu'il est précisé que l'article 1 devra définir les domaines dans lesquels l'accord d'entreprise ne pourra pas déroger à l'accord de branche et les domaines dans lesquels l'accord de branche pourra interdire toute dérogation. Il prévoit aussi d'« harmoniser le régime juridique » du licenciement en cas de refus par le salarié des modifications de son contrat de travail induites par un accord d'entreprise. Le texte ne dit pas quelles modifications le gouvernement veut apporter. On peut craindre qu'il ne remette en cause l'assimilation de ce licenciement à un licenciement économique afin de dégager l'employeur de ses obligations (indemnités, reclassement, priorité à la réembauche...)

Il entend donner une présomption de légalité aux accords d'entreprise.

Il reviendra donc à celui qui conteste de démontrer son illégalité. Pis, cette contestation ne pourra être faite que dans un délai qui reste à fixer après signature de l'accord. Autrement dit, un texte dont on découvrirait, hors délais, qu'il ne respecte pas la loi ne serait plus attaquable. Et, cerise sur le gâteau, si un juge venait à déclarer illégal(e) tout ou partie d'un accord, il pourrait moduler « l'effet dans le temps de sa décision ». C'est-à-dire que le texte pourrait continuer à s'appliquer encore un certain temps...

Un accord d'entreprise pourra déterminer la périodicité et le contenu des consultations et des négociations obligatoires. Fini les négociations annuelles obligatoires (NAO) sur les salaires, un patron pourra, si ça lui chante, imposer une périodicité de 2, 3 ou même 20 ans !

Il entend encore « faciliter le recours à la consultation des salariés ». L'employeur pourra convoquer un référendum d'entreprise pour imposer unilatéralement ses vues au cas où aucun syndicat n'accepterait de signer. Et fixer « les modalités d'appréciation du caractère majoritaire d'un accord ». Cela veut dire qu'il pourra décider de prendre en compte tous les syndicats, même ceux qui ne sont pas représentatifs dans l'entreprise, pour atteindre 50 %.

 

ARTICLE 2. Les instances représentatives du personnel muselées

Sous couvert de « simplification et (de) renforcement du dialogue économique et social » dans l'entreprise, il s'agit de « fusionner en une seule instance les délégués du personnel, le comité d'entreprise (CE) et le comité d'hygiène et de sécurité desconditions detravail (CHSCT)». La généralisation des délégations uniques du personnel (DUP) permet d'affaiblir les représentants du personnel. Dans les entreprises de moins de 600 salariés ayant opté pour une DUP, le nombre d'élus du personnel est inférieur à celles ayant conservé trois instances représentatives du personnel (IRP) distinctes. Enfin, un élu dans une DUP bénéficie au mieux de 21 heures de délégation, soit une heure de plus qu'un DP, qu'un élu CE et qu'un élu CHSCT, pour assumer à lui tout seul leurs trois fonctions. Outre réduire les moyens, notamment d'expertise, dont disposent les représentants du personnel, la DUP permettrait de faire disparaître les CHSCT, qui sont, en raison de leur droit d'ester en justice, dans le collimateur du patronat.

La DUP serait apte à négocier. Jusqu'à présent, la négociation est du ressort des seuls syndicats représentatifs. Ce qui réduit la possibilité du patronat de faire avaliser ses projets par des syndicats « maison ». Elle protège aussi les négociateurs salariés du chantage patronal.

Pour faire passer la pilule, il s'agirait d'augmenter la présence des salariés dans les conseils d'administration, aujourd'hui obligatoire à partir de 1 000 salariés. Reste que, étant minoritaires et soumis à des clauses de confidentialité, leur présence n'a qu'un intérêt très réduit.

Enfin, le texte vise la mise en place du « chèque syndical », payé par l'employeur, et que le salarié pourra demander afin de financer le syndicat de son choix. Cette mesure est dangereuse car elle crée une subordination financière du syndicat à l'employeur. Et, dans bon nombre d'entreprises, on imagine mal un salarié demander un chèque syndical au profit de la CGT !

Un accord d'entreprise, dont on découvrirait l'illégalité hors délais, ne serait plus attaquable!

 

ARTICLE 3. Licencier, c'est facile

L'article vise surtout à assurer à l'employeur une certaine impunité. Outre la mise en place d'un barème que devra respecter le tribunal des prud'hommes quand il fixera le montant des dommages et intérêt dus à un salarié victime d'un licenciement abusif, l'article prévoit de réduire les délais de recours contentieux pendant lesquels le salarié pourra poursuivre son employeur. Une réduction des délais de prescription au-delà desquels les employeurs ne pourront plus être poursuivis n'est pas écartée.

Il entend faciliter les licenciements en réduisant le risque de les voir annulés pour vice de forme. La mise en place d'un « périmètre d'appréciation » des difficultés de l'entreprise permettra à celles qui font des bénéfices de recourir à des licenciements économiques sans problème. Ce type de licenciement sera moins encadré et les obligations patronales (reclassement, critères d'ordre...) seront revues à la baisse et varieront selon la taille de l'entreprise.

Il s'agit aussi de sécuriser « les plans de départs volontaires ». Disposition particulièrement cynique, alors que beaucoup de départs « volontaires » masquent en fait des départs contraints.

Ce texte va précariser toujours plus les salariés. Ce sont les accords de branche et non plus la loi qui décideront des motifs de recours aux CDD ou à l'intérim, de la durée de ces contrats ou de leur renouvellement sur un même poste. Les branches pourront aussi créer des « contrats à durée indéterminée conclus pour la durée d'un chantier ou d'une mission ». L'employeur n'aura qu'à décréter que le projet est réalisé pour se débarrasser du salarié sans préavis, ni recours. Enfin, le recours au travail de nuit et le prêt de main-d'oeuvre seront facilités.

 

L'ARTICLE 4. Le patronat fait la loi

Il crée un droit d'opposition patronal à l'extension d'un accord. Autrement dit, le Medef disposera d'un vrai droit de censure du gouvernement.

 

L'ARTICLE 5. La pénibilité, quelle pénibilité ?

Ce texte porte un coup sévère à la reconnaissance de la pénibilité. Il autorise le gouvernement à modifier les règles de sa prise en compte, ouvrant la porte à la mise en place de critères « maison » pour la définir ou mesurer l'exposition des salariés.

 

L'ARTICLE 6. Les vices cachés

Cet article « fourre-tout » devra, une fois rédigé, être analysé avec vigilance. Sous couvert de « corriger des erreurs matérielles ou des incohérences », il pourrait servir à introduire de nouvelles mesures hostiles aux salariés.

Les articles 7 et 8 sont des articles techniques autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnances. L'article 9, lui, repousse d'un an la mise en oeuvre du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu.

(1) L'appel « pour un Code du travail protecteur des salarié-e-s, non la loi travail XXL » à signer en ligne sur http://pournosdroitssociaux.fr

 

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1 août 2017 2 01 /08 /août /2017 07:24

Malgré les couacs au sein de la majorité, l'Assemblée a voté samedi les lois « pour la confiance dans la vie politique ». Cinq jours de débats pour une réforme étriquée. Récit.

Historique ? « Je n’utiliserais pas ce terme », dit en riant la ministre de la justice, lucide. Samedi dernier, alors que l’Assemblée nationale vient d’adopter les lois « pour la confiance dans la vie politique » (avec les voix du PS et de certains Républicains sur l'un des deux textes), Nicole Belloubet parle d’« un point de départ », d’« un marqueur politique ». Si la réforme contient des avancées incontestables (fin des emplois familiaux, contrôle des frais des parlementaires, etc.), elle paraît bien étriquée à l’arrivée. Ce mardi 1er août, sept sénateurs et sept députés doivent encore tenter de mettre les deux chambres d'accord. Car des « détails » ne sont toujours pas calés, telle la suppression de la « réserve parlementaire » à laquelle le Sénat s’accroche. En attendant, Mediapart revient sur cinq jours de débats, entre couacs et angles morts médiatiques. 

Activités de conseil : le gros raté

Samedi, 2 heures. Tout le monde veut en finir. D’ultimes amendements, parfois loufoques, défilent à la vitesse du son. Arrive soudain le « 201 » sur les déclarations d’intérêts. Il donne trois mois de « rab’ » aux députés pour dire s’ils détiennent « des participations directes ou indirectes qui confèrent le contrôle d’une société de conseil ». Qui prête encore attention ? En trente secondes, la socialiste Delphine Batho se jette sur le micro, la ministre se dit contre, les députés LREM votent pour.

C’est l’illustration d’un raté général : la question des activités de conseil des parlementaires n’a été discutée qu’en fin de course, de nuit, et au pas de charge, alors que c’était la principale leçon à tirer de « l’affaire Fillon ». Si la prohibition des emplois familiaux est utile, rappelons en effet que les emplois fictifs étaient déjà proscrits par le Code pénal, tandis que rien, strictement rien, n’interdisait au député Fillon de conseiller un milliardaire libanais vendeur de pipelines pour des dizaines de milliers d’euros… Or certaines entreprises, en l’état du texte, pourront toujours s’acheter l’influence d’un élu français.

Pas n’importe lequel, il est vrai. Les textes fixent de nouveaux interdits : seuls les députés ayant entamé leur activité de conseil un an avant l’élection pourront exercer, sans plus avoir le droit de servir des entreprises publiques, des banques, ou encore le BTP (la liste est là)… Mais le candidat Macron avait promis l’interdiction absolue durant sa campagne. « Vous avez été élu pour ça ! », tonne Alexis Corbière (France insoumise). Sur les bancs LREM, muets, les avocats trépignent. « La grande majorité des activités de conseil sont parfaitement honorables, s’indigne Émilie Chalas. Les interdire pousserait à la professionnalisation politique. » Pour Alice Thourot (avocate), il faut bien sûr empêcher l’« activité de conseil d’opportunité », lancée en cours de mandat ou de campagne, mais pas les plus anciennes. Les ambitieux de 2022 n’ont qu’à créer maintenant leur société…

À force, l’insistance de la gauche agace. « Nous venons d’apprendre par la presse que l’un de nos collègues du groupe La France insoumise aurait exercé une fonction de conseil », finit par tacler Jean Terlier (avocat lui aussi), en visant Alexis Corbière, créateur d’une boîte de communication pendant la présidentielle (radiée depuis). « Calomniateur débile ! », réplique l’intéressé, sans répondre au fond. Le verdict est de toutes façons sans appel : la mesure de prohibition totale, défendue par les groupes FI, communiste et socialiste, n’obtient que 2 voix dans les travées LREM. Quant à l’amendement PS obligeant les « députés-conseil » à lever le secret sur leur clientèle (auprès de la Haute autorité pour la transparence), il est balayé.

Pendant tout ce temps, un livre de poche trône sur le pupitre de la ministre : La Constitution commentée par Guy Carcassonne. C’est sa bible. Ancienne membre du Conseil constitutionnel, Nicole Belloubet siégeait parmi les « Sages » en 2013 quand ils ont retoqué une disposition des lois « transparence » qui, déjà, prétendait interdire toute activité de conseil aux parlementaires. Pour la gauche, il faut retenter à tout prix, tandis que la ministre explique combiner des interdictions partielles pour mieux contourner la censure et « viser l’efficacité ». « Ce n’est pas un recul, déclare ainsi Nicole Belloubet à Mediapart. On ne peut pas outrepasser la Constitution, nous sommes dans un État de droit. » Le droit au service de la politique ou de la politique au nom du droit ?

Dans la nuit, au-delà des activités de conseil, la gauche essaie aussi de plafonner l’ensemble des rémunérations annexes des députés (qui restent salariés, pharmaciens, etc.) au tiers de leur indemnité de mandat, sans le moindre succès. « Ça veut dire quoi ?, s’étrangle Christian Jacob (LR), agriculteur de métier. Qu’au mois de septembre j’arrête de traire mes vaches ! » À l’arrivée, la nouvelle loi dit juste que les sénateurs et députés devront « veiller à faire cesser » leurs conflits d’intérêts, selon des règles que le bureau de l’Assemblée sera chargé de « déterminer ». L’essentiel se jouera donc dans le huis clos d’un organe politique où, pour l’instant, 4 sièges sur 22 sont occupés par l’opposition. On hésite à compter Thierry Solère (LR membre des « Constructifs »), embauché sous la précédente législature par une entreprise de déchets à 12 000 euros par mois…

 

Mais où est donc Richard Ferrand ?

Pendant cinq jours, tous les présidents de séance, vice-présidents LREM de l’Assemblée (un chef d’entreprise, une kiné, un avocat, etc.), sont novices au « perchoir » autant qu’au Palais-Bourbon, à l’exception du patron, François de Rugy. Au moindre couac, l’opposition dégaine. Ulcéré de voir ses amendements examinés dans le désordre, le groupe communiste dénonce une confusion « entretenue ». Le placide Olivier Dussopt (PS) s’insurge contre des votes qui bégaient : « Vous avez appelé le vote deux fois, presque trois. Mais les députés [LREM] lèvent la main ou ne la lèvent pas ! De deux choses l'une : soit ça ne se reproduit pas, soit je demanderai un scrutin [électronique] sur chacun des amendements. » Le président de l’Assemblée, François de Rugy, est appelé à la rescousse.

Mais les jours suivants, rebelote. La majorité rejette par inadvertance un article de son cru, La France insoumise prend ses cliques et ses claques après un vote à main levée litigieux. Et le report du vote solennel sur le projet de loi « simple » (il y a un « organique » ensuite) finit de braquer les élus d’opposition, contraints d’annuler leur retour en circonscription ou de dénicher un collègue à qui donner délégation. Du grand bazar ? Un peu de bizutage aussi, car les droits de l’opposition ne sont jamais bafoués. Mais cette cacophonie brouille le message politique et l’opération « moralisation » n’imprime pas dans l’opinion. L’Élysée s’agace. Au point qu’Emmanuel Macron aurait déjà demandé, à en croire Le Figaro du 31 juillet, le remplacement des vice-présidents de l’Assemblée dont la technicité est jugée défaillante.

 

 

« Éviter une surpénalisation de la fraude fiscale »

« Le problème, ce n’est pas le noviciat, c’est le manque de gouvernance, décrypte un briscard socialiste. On ne peut pas laisser un groupe s’autogérer comme ça ! Les difficultés proviennent de l’absence conjuguée du président de l’Assemblée, du président de groupe [Richard Ferrand] et du ministre chargé des relations avec le parlement. » Ce dernier, Christophe Castaner, finira par s’installer sur le banc vendredi. Mais Richard Ferrand n’aura siégé que quelques minutes en cinquante heures de débat, sans même ouvrir la bouche

 

 

Au sein du groupe LREM, des « poids moyens » s’en plaignent, quand d’autres évoquent des « problèmes personnels ». L’enquête préliminaire visant le contrat de bail signé par les Mutuelles de Bretagne au profit de la SCI de sa compagne (quand il était directeur général) est dans toutes les têtes. Au PS, au-delà de ses absences, ses présences aussi font jaser : « Le “hasard” a fait que Ferrand était en séance au moment de l’amendement de Laurence Vichnievsky », ancienne magistrate (Modem) soucieuse d'inclure les « détournements de fonds privés » parmi les infractions passibles d'une nouvelle peine d'inéligibilité obligatoire. Échec assuré.

 

Fraude fiscale : le monopole de Bercy verrouillé

Richard Ferrand est bien là, en tout cas, à l’heure où le « verrou de Bercy » joue sa survie. En France, pour qu’un procureur de la République ouvre une enquête sur des soupçons de fraude fiscale, il faut une plainte préalable du ministère des finances. Dans l’ordre, le ministre du budget saisit la Commission des infractions fiscales (CIF), qui valide 85 % des dossiers, puis son administration saisit la justice pénale (seulement un millier de fois par an). À entendre le fisc, ce moyen de pression n’aurait pas son pareil pour faire rentrer les impôts et pénalités dans les caisses de l’État. Dans l’hémicycle, il y a ceux qui veulent supprimer le « verrou », et ceux qui espèrent l’assouplir. Ensemble, ils ont de quoi tenter un coup.

« Il faut retirer au ministre le pouvoir discrétionnaire d’épargner un fraudeur », gronde Alexis Corbière (FI). Non seulement les communistes applaudissent, mais certains bancs LR, et les centristes. « Qu’en est-il de l’indépendance de la justice ?, lance Philippe Vigier (UDI) à la garde des Sceaux. Cette loi ne peut pas s’attaquer à quelques icônes comme l’IRFM et la réserve parlementaires, parce que ça fait bien dans l’opinion, et laisser perdurer le verrou de Bercy ! » Nicolas Dupont-Aignan s’émeut : « Tout se passe dans le secret d’un bureau, celui du ministre, avec beaucoup d’arrangements et de salissures. »

Placide, le rapporteur général de la commission des finances, Joël Giraud, sort de sa poche une phrase d’Éliane Houlette, la magistrate qui dirige le parquet national financier, religieusement citée : « Le rôle de filtre assuré par la CIF est une bonne chose, il faut être pragmatique : nous serions dans l’incapacité de traiter l’ensemble des plaintes. » Loin d’acter le manque de moyens de la justice, Nicole Belloubet vante les « aspects extrêmement pratiques » d’un « verrou » qui permet « des rentrées fiscales non négligeables », ainsi que « d’éviter une surpénalisation systématique de la fraude ». Sur son banc, la rapporteure des projets de loi, l’avocate Yaël Braun-Pivet (LREM, premier mandat), ne dit pas la même chose, ni le contraire d’ailleurs, proposant de « procéder à l’examen approfondi du dispositif » à l’aide d’une mission parlementaire. « Des travaux, on en a des sacs et des sacs ! », fulmine André Chassaigne (PCF). Malgré le soutien de l’ensemble des communistes, des insoumis et des « Constructifs », rejoints par 27 LR (sur 41), plusieurs frontistes dont Marine Le Pen et Louis Aliot, 2 socialistes (sur 9), et un original LREM, la suppression du « verrou de Bercy » est repoussée.

Mais l’hémicycle est chauffé à blanc pour l’option de repli, moins clivante, déjà votée par le Sénat, et proposant juste une brèche dans le « verrou ». Pourquoi ne pas autoriser la justice, par exception, à engager des poursuites en solo lorsqu’elle tombe sur des faits de fraude fiscale au détour d’une enquête déjà ouverte ? Cette fois, le scrutin est serré. Tous les députés PS et Modem se rallient, laissant le groupe « macroniste » isolé et fissuré, avec 12 voix pour et 10 abstentions. L’amendement échoue à 21 voix près.

 

Les hauts fonctionnaires ignorés

Brusquement, en milieu de semaine, l’oratrice du groupe LREM annonce un nouveau nom de baptême. On bascule de « confiance dans l’action publique » à « confiance dans la vie politique ». Depuis le premier jour, les oppositions de gauche et de droite pilonnent en effet sur le pantouflage des hauts fonctionnaires et conseillers ministériels, leurs « va-et-vient » vers le privé, que l’intitulé d’origine paraît englober. « L’action publique, c’est large, sinon c’est de la publicité mensongère ! », soutient Ugo Bernalicis (FI). Or amendement après amendement, la ministre dénonce des « cavaliers législatifs », des hors-sujet. La majorité décide alors de graver dans le marbre un titre qui cible officiellement les responsables « politiques » et s’arrête aux portes de l’administration.

« Le terme pantouflage est un euphémisme pour évoquer les conflits d’intérêts de coulisse érigés en mode de gouvernance permanent, tance pourtant Delphine Batho (PS). Les membres de cabinet emportent leur carnet d’adresses dans le secteur privé puis reviennent, tout en veillant à un certain nombre d’intérêts. Il faut une frontière étanche. » L’ancien vice-président de l’Assemblée, Marc Le Fur (LR), ravit ses troupes en lâchant : « Nous, les parlementaires, sommes protégés non par notre vertu mais par la collégialité. Dans une administration, le ministre agit seul, il a un passé, des intérêts peut-être. Il en va de même pour son directeur d’administration. Alors qu’on en finisse avec la stigmatisation des parlementaires et qu’on construise une loi équilibrée ! » Le départ de Bruno Bézard, directeur du Trésor recruté en 2016 par un fonds d’investissement franco-chinois, revient sur toutes les langues, preuve que la commission de déontologie de la fonction publique (chargée de surveiller le pantouflage des fonctionnaires) serait trop coulante. Mais tous les amendements durcissant les règles, notamment sur les sas d’attente et « décontamination », sont écartés alors que le Sénat en avait adopté une batterie.

Dans les travées de La République en marche, composées à 10 % de chefs d’entreprise et 21 % de cadres du privé, on s’impatiente. « Je me permettrai d’évoquer un exemple, le mien, intervient Jacques Maire. Diplomate d’origine, j’ai travaillé dix ans dans un groupe privé puis je suis revenu en 2012 au Quai d’Orsay. Nous ne réussirons à réformer l’État que s’il y a des dizaines de passages de managers entre le public et le privé, un afflux massif de compétences [acquises] dans un environnement concurrentiel qui place le client au centre, comme il faut faire pour les usagers des services publics. »

Tout le monde ne parle pas le même langage. À gauche, François Ruffin (FI) cite un roman policier d’Edgar Poe, La Lettre volée, dans lequel l’inspecteur cherche en vain l’objet du crime, qu’il présuppose dissimulé. En réalité, le courrier est tellement en évidence que l’enquêteur passe à côté. « Comment ne pas voir le caractère grotesque d’une moralisation avec Emmanuel Macron à la tête de l’État ? », lance le député, rappelant le débauchage de l’inspecteur des finances par la banque Rothschild en 2008. « Le pantouflage, c’est la Lettre volée d’Edgar Poe », une « privatisation » de l’État que personne ne regarde.

Calmement, la majorité botte en touche. Sans se risquer sur le fond, Nicole Belloubet rappelle qu’une loi d’avril 2016, « fruit de deux ans de travail » parlementaire, a traité le sujet pour les fonctionnaires, instaurant des règles de déport en cas de conflits d’intérêts. Alors « faut-il remettre sur le métier un texte dont l’application pleine et entière ne date que d’un mois ? » Jugeant les « difficultés » tout à fait « réelles », la rapporteure de la commission des lois, Yaël Braun-Pivet (LREM), annonce une nouvelle « mission d’évaluation ». « Je ne m’engagerai pas sur un délai, glisse-t-elle. Je suis novice et ne connais pas le temps nécessaire pour une mission d’information parlementaire. » Ni, surtout, ce qu'il advient en général de ses conclusions… Sur ces questions, les plats repassent rarement deux fois au cours d'un quinquennat. À moins d'un nouveau scandale.

 

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1 août 2017 2 01 /08 /août /2017 06:07

 

Les chiffres de la balance commerciale française sont préoccupants. Depuis dix ans, les importations sont durablement supérieures aux exportations. Le phénomène a été quelque peu dissimulé par la baisse du prix du pétrole, qui a réduit notre facture énergétique. Mais, mois après mois, les déficits se sont cependant accumulés.

Nous l'avons ici même plusieurs fois démontré. Ce n'est pas dans le coût du travail que nous pouvons trouver une explication aux pertes de parts de marché des entreprises françaises. Reste le débat sur la flexibilité qui se concentre désormais autour de la réforme du Code du travail voulue par Emmanuel Macron.

Mais gardons-nous des faux constats. La flexibilité est déjà très forte en France et s'accompagne d'une productivité élevée. 87 % des embauches se font en contrat à durée déterminée. Un salarié sur six est à temps partiel, le plus souvent contraint. L'intérim est un mode de gestion des effectifs permanents dans certaines branches comme l'automobile. Enfin, en ce qui concerne la rupture conventionnelle, moins d'une rupture sur quatre correspond à une démission. Dans les trois quarts des cas, le salarié part sous la contrainte. Et voilà que, avec les ordonnances en préparation réformant le Code du travail, patronat et gouvernement peuvent faciliter les restructurations et les suppressions d'emplois censées rétablir la compétitivité du site France...

ce n'est pas le coût du travail qui explique les reculs des exportations, mais sa dévalorisation par les choix patronaux.

Le véritable handicap de compétitivité est ailleurs. Il trouve sa source dans les choix de gestion des entreprises : un taux plus faible de recherche et développement qui ne permet pas une modernisation des processus de production et des produits ; un effort de formation professionnelle qui stagne, voire régresse ; une priorité donnée à l'investissement financier. Banquiers et patrons ont oublié la notion basique de « système productif ». Le tissu industriel français est fragilisé et il est la proie de firmes étrangères et de fonds financiers anglo-saxons. Seuls surnagent quelques secteurs comme l'aéronautique, la pharmacie, l'agroalimentaire. Mais pour combien de temps encore ?

On mesure les conséquences de la dévalorisation du travail sur le commerce extérieur national. Ce n'est pas le volume des exportations qui baisse, mais le prix auquel la France vend ses produits. Le pays exporte à peu près autant de produits qu'il y a dix ans. Mais leur prix de vente baisse. Nous perdons des parts de marché en valeur parce que nous descendons en gamme !

Le Medef propose d'abaisser les salaires et les cotisations sociales pour s'adapter à cette évolution, alors qu'il faudrait viser une sortie par le haut. Il faut accroître la qualité, renforcer l'innovation, plutôt que de s'aligner sur un modèle low cost. Les leviers à mettre en oeuvre : le contrôle des aides publiques, le conditionnement de leur versement à des critères d'emploi et de progression des salaires, la sécurisation de la reprise des entreprises viables, la réforme de l'impôt sur les sociétés afin de favoriser l'investissement, la création de comités interentreprises dans les filières, l'encadrement des ruptures conventionnelles, l'interdiction des licenciements boursiers...

Il s'agit moins de trouver un hypothétique équilibre entre « flexibilité » et « sécurité » que de créer les conditions d'une dynamique des emplois, des innovations et de la sécurité collective, nécessaires pour accompagner un nouveau projet de développement.

(*) Économiste et syndicaliste.

 

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1 août 2017 2 01 /08 /août /2017 06:01

 

L'INFORMATISER C'EST ÔTER LES MOYENS DE CONTRÔLER COMMENT NOUS SOMMES PAYÉS.

Ils suppriment la feuille de paie papier pour une version électronique. En même temps, ils veulent la « simplifier » au point qu'on ne verrait plus le salaire brut, ni le détail décisif des différentes cotisations pré-affectées que nous mutualisons dans nos caisses sociales. Pourquoi un bulletin informatisé devrait-il être en même temps simplifié ?

Macron s'est engagé dans une manœuvre géante, en vue des mois de janvier 2018 et 2019, pour modifier à la fois nos salaires, brut et net, nos cotisations et nos impôts. Voilà un changement « technique » mis en œuvre bien opportunément par ceux qui ont intérêt à obscurcir nos moyens de contrôler la façon dont nos employeurs nous paient, dont nous cotisons à notre Sécu d'une part et dont l'impôt est prélevé par l'État d'autre part.

Les lois Sapin, Macron, El Khomri ont autorisé la dématérialisation de la feuille de paie... « sauf si le salarié refuse individuellement » et exige de recevoir une version papier. Et comment assurer la sécurité de ces documents ? 26% pensent déjà avoir perdu des bulletins de paie papiers. Mais n’y a-t-il pas autant de risques pour l’informatique que pour le papier ? 21% des salariés ne veulent pas de bulletin dématérialisé. 45% sont réticents à changer leurs habitudes.

 

Le décret d'application paru au « Journal officiel » en décembre 2016 prévoit que « le salarié doit être informé trois mois avant l'éventuelle fermeture d'un service en ligne, qu'il soit géré par l'employeur lui-même ou par un prestataire externe ». L'employeur est censé « garantir la disponibilité du bulletin de paie dématérialisé pendant cinquante ans, ou jusqu'aux 75 ans du salarié ». Bercy envisage déjà qu'on travaillera cinquante ans, jusqu'à 75 ans ? Qui croit que ça marchera ? 70 000 entreprises disparaissent chaque année et autant se créent. Un million d'entreprises ont moins de 11 salariés et l'informatique y laisse à désirer. Peut-être vaut-il mieux défendre encore nos bulletins de paie à la fois papier et bien détaillés ?

 

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31 juillet 2017 1 31 /07 /juillet /2017 14:06

L’HUMANITE

Vendredi 28 juillet 2017

PIERRIC MARISSAL

 

Avec son bassin de 800 mètres de long, STX est aussi le seul chantier à même d'accueillir des gros navires militaires. Damien Meyer/AFP

 

Le gouvernement a annoncé, jeudi, in extremis, la préemption à court terme de STX, afin d'éviter sa prise de contrôle majoritaire par Fincantieri. Une décision qui n'augure en rien le développement d'une stratégie industrielle.

 «À la CGT, nous préférons insister sur le mot préemption, parce qu'on n'est vraiment pas dans le cas d'une nationalisation avec tout ce que cela implique de développement industriel planifié ! » a lancé Sébastien Benoît, délégué syndical CGT de STX. La préemption des chantiers navals, annoncée jeudi aprèsmidi par Bruno Le Maire, est « temporaire » et servira à continuer à « négocier dans les jours qui viennent ». « Nous avons offert à l'industriel italien Fincantieri de prendre 50 % des parts des chantiers navals de Saint-Nazaire tout en lui laissant le contrôle opérationnel de la société. Elle a été refusée, a poursuivi le ministre de l'Économie, mais cette proposition équitable reste sur la table. » Bruno Le Maire a d'ailleurs annoncé qu'il se rendrait à Rome, mardi, pour continuer à négocier.

 

POUR MACRON, IL S'AGIT D'ÉVITER DE PERDRE TOTALEMENT

la souveraineté sur ces chantiersLa décision de l'exécutif d'exercer son droit de préemption est donc bien loin de la démarche d'un État stratège, qui nationaliserait avec en tête un projet industriel. Pour Emmanuel Macron qui, depuis son élection, annonçait vouloir rouvrir le dossier, il s'agit d'éviter de perdre totalement la souveraineté sur ces chantiers jugés cruciaux, le repreneur italien, Fincantieri, n'étant pas jugé fiable.

«Au fond, ce n'est que la poursuite d'un bras de fer, d'une partie de poker entre deux gouvernements libéraux, italien et français, qui veulent chacun préserver les intérêts stratégiques et défendre leurs actionnaires, explique Sébastien Benoît. Et en toile de fond, il s'agit aussi de continuer des tractations avec l'Italie autour des contrats militaires. » Avec son bassin de 800 mètres de long, STX est le seul chantier à même d'accueillir des gros navires militaires, dont des porte-avions. Le groupe italien devait à l'origine reprendre 48 % du capital de STX. Mais, en en prenant 7 % de plus via une fondation, le constructeur de Trieste était en position de devenir majoritaire. Rédhibitoire pour l'État français.

L'absorption des chantiers de Saint-Nazaire par le leader du secteur pouvait aussi laisser craindre que l'industriel italien ne sacrifie le site français ­ malgré son carnet de commandes plein jusqu'en 2026 ­ au premier coup dur conjoncturel, au profit de ses propres chantiers italiens. «On a expliqué en long et en large que, pour des raisons de logistique, d'espace, on ne peut pas faire à Trieste ce qu'on peut faire à Saint-Nazaire. Donc, il n'y a aucun risque de déplacer des filières de production ou de l'emploi de Saint-Nazaire à Trieste », siège de Fincantieri, s'était défendu le secrétaire d'État italien aux Affaires européennes, Sandro Gozi. Mais, comme l'État italien, actionnaire de Fincantieri, a un pouvoir de contrôle sur le groupe, il est à craindre que la sauvegarde de l'emploi à Trieste ne soit privilégiée à Saint-Nazaire. Or, dans le chef-lieu de Loire-Atlantique,pas moins de 7 300 emplois, avec les sous-traitants, sont en jeu.

 

« EN QUINZE ANS, LE CHANTIER EST PASSÉ DE 5000 À 2300 SALARIÉS. CELA A ÉTÉ COMPENSÉ PAR LE RECOURS À L’INTÉRIM ET AUX TRAVAILLEURS DÉTACHÉS.» SÉBASTIEN BENOÎT, CGT STX.

 

« Le gouvernement italien demandera à son chantier national Fincantieri de faire travailler les Italiens plutôt que les Français, c'est naturel », a renchéri Bruno Retailleau, président (LR) du conseil régional des Pays de la Loire, jeudi, sur RTL.

«Cette décision laisse un répit, a réagi l'élu communiste nantais Robin Salecroix. Un moyen pour nous de poser la question de l'avenir industriel du secteur. Car la navale française a de gros atouts et un carnet de commandes plein. Il faut qu'on soit à la hauteur des enjeux, au-delà d'un simple pacte actionnarial. Mais il s'agit d'un répit qui ne résout en rien les vrais problèmes, à savoir comment on pérennise le chantier, on y développe l'emploi dans de bonnes conditions et comment on diversifie le site, avec la construction de ferrys, navires gaziers... L'État a le devoir de se poser ces questions et d'y associer des partenaires historiques. »

On en est encore très loin. Dans sa brève allocution, le ministre de l'Économie a insisté sur le fait que, s'il voulait «libérer le travail», le rôle de l'État était aussi de le protéger. « Mais que veut-il protéger ? a demandé Sébastien Benoît. Les salariés ou ses propres intérêts? Car, au vu des mesures antisociales prévues par ce gouvernement, avec le CDI de chantier qui nous touche particulièrement, difficile d'espérer quoi que ce soit de cette préemption. En tout cas, la CGT aura les mêmes exigences envers le gouvernement qu'envers tout autre actionnaire. »

 

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31 juillet 2017 1 31 /07 /juillet /2017 14:03
L'IDEE LA PLUS BETE DU MONDE (Jack Dion  - Journal Marianne)

Nul ne sait ce qu'il adviendra in fine de la loi TravailPour en savoir plus, il faudra attendre le contenu des ordonnances, vu que le gouvernement a décidé de recourir à une pratique certes respectueuse du texte constitutionnel mais guère conforme à l'esprit de la démocratie. En revanche, le discours entendu ici et là pour justifier de passer les règles sociales au rabot laisse rêveur, tant il véhicule des idées qui feraient sursauter un enfant de 7 ans ayant conservé l'intégralité de son cerveau.

La plus étonnante d'entre elles consiste à prétendre qu'il faut faciliter les licenciements pour relancer les embauches. C'est un peu comme si on disait qu'il faut faciliter les noyades pour former des maîtres nageurs, encourager les incendies de forêt pour former les pompiers, tolérer des accidents de la route pour apprendre à conduire, ou encore encourager les guerres pour obtenir la paix.

 

Ce discours revient pourtant en boucle sur les ondes et dans les journaux.Des spécialistes de tout et de rien se relaient pour décrire avec des trémolos dans la voix l'angoisse du grand patron incapable de trouver le sommeil à l'idée de créer un emploi sans l'assurance de pouvoir le supprimer aussi sec en cas de retournement conjoncturel. Mine de rien, c'est un vrai drame humain.

 

Des pros de la communication ont donc imaginé ce raisonnement génial selon lequel pour éviter un futur regrettable (le licenciement), le mieux est de le faciliter dès aujourd'hui. On oublie au passage toutes les réformes accumulées au fil des ans pour flexibiliser et précariser le monde du travail au nom de la lutte contre un chômage qui ne baisse pas (ou très peu). Faute de s'interroger sur ce raté général, on suggère d aller encore plus vite et plus loin, comme si l'insécurité sociale était devenue un gage d'épanouissement individuel et collectif.

 

La France a mis en œuvre une centaine de réformes relatives au travail depuis le début des années 2000. Durant cette période, l'intérim a explosé, de même que les CDD, les stages et toutes les formes de jobs au rabais. Résultat : le drapeau de la défaite flotte sur le front de l'emploi. Voilà qui devrait amener pour le moins à s'interroger sur la stratégie proposée, aussi efficace que la ligne Maginot de 1940.

 

En vérité, l'emploi dépend moins du code du travail que de l'activité économique du pays. Or, cette dernière est en rade. Les carnets de commandes des entreprises sont vides, faute d'une croissance permettant de lancer des projets à long terme, et donc de s'en donner les moyens, humains et financiers. Les multinationales ont le nez fixé sur la ligne bleue de l'étranger, rêvant de délocalisations dans des lieux exotiques où la main-d'œuvre est peu onéreuse et la législation fiscale, peu sourcilleuse. Quant aux petites et moyennes entreprises, elles sont étranglées par les banques qui ne veulent prendre aucun risque et par les cadors du CAC 40 qui leur font payer les pots cassés.

 

Plutôt que de voir cette réalité en face afin d'y apporter les réponses idoines (notamment pour les PME), les docteurs de l'Eglise néolibérale ramènent tout à un seul sujet : le « coût du travail », lequel devrait être absolument réduit pour supporter la concurrence de pays comme la Chine, la Pologne ou la Slovaquie. Tout le reste - la financiarisation croissante, le diktat des banques, le racket des actionnaires - est passé par pertes et profits. Résultat : la pression sur les salaires étouffe une consommation faiblarde, assèche les rentrées fiscales et nourrit le déficit des comptes publics. Cela s'appelle un cercle vicieux. (...)

 

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31 juillet 2017 1 31 /07 /juillet /2017 09:02

L’HUMANITE

Vendredi 21 Juillet 2017

AURÉLIEN SOUCHEYRE ET OLFA AYED

 

LE GOUVERNEMENT FAIT PASSER LES COUPES DANS LES BUDGETS DE 2017 PAR DÉCRETS, PLUTÔT QU'EN FAISANT VOTER UNE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE.

 

Pour Gérald Darmanin, une seule règle, « la réduction de la dépense publique ». François Guillot/AFP

L'Assemblée nationale a débattu, jeudi, des orientations budgétaires du gouvernement, qui préparent « l'enrichissement des plus riches et l'appauvrissement des plus pauvres », selon les députés communistes et insoumis.

Le gouvernement a daigné s'expliquer jeudi devant l'Assemblée sur les orientations budgétaires à venir. Il y était attendu, après une longue cacophonie et des annonces contredisant le discours de politique générale du premier ministre, Édouard Philippe. Sans surprise, l'exécutif a défendu une sacrée cure d'austérité, avec une ponction de 4,5 milliards d'euros en 2017, pour passer sous la barre des 3 % de déficit public en 2017. Dans l'immédiat, le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a confirmé une baisse de 268 millions d'euros pour Bercy, de 282 pour les Affaires étrangères, de 260 aux Transports, de 526 à l'Intérieur, de 160 pour la Justice, de 331 à la Recherche, de 75 pour l'Éducation nationale à quelques mois de la rentrée scolaire, de 50 pour la Culture et de 850 à la Défense, ce qui a conduit mercredi à la démission fracassante du chef d'état-major des armées, Pierre de Villiers.

PAS AVARE DE CADEAUX AU PRIVÉ

Entre autres réjouissances, la purge de 18 milliards d'euros prévue pour 2018 figurait bien dans le rapport transmis, sans oublier la hausse de la CSG, la suppression de 80 % de la taxe d'habitation, et la baisse de 13 milliards du budget des collectivités territoriales sur cinq ans. « Trop de dépense publique, donc trop d'impôt. Trop de déficit, donc trop de dette. Tout est lié à la réduction de la dépense publique», a argumenté Gérald Darmanin, qui prône une « révolution copernicienne », à savoir « faire mieux avec moins », en cassant l'idée selon laquelle « plus de dépense publique, c'est plus de service ». Amen. Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a dans la foulée, lui aussi, joué du pipeau en estimant que le « record » de dépense publique en France n'empêche pas d'avoir un chômage record, avant de recycler le vieil argumentaire de la droite sur « l'assistanat » : « Trop de Français disent : "Mais dans le fond, si je restais chez moi à vivre de la redistribution, je vivrais mieux." Il n'y a pas d'avenir pour une nation dans la dévalorisation du travail. »

Pas avare de cadeaux au privé, en revanche, le ministre a aussi défendu la cession de 10 milliards d'euros d'actifs de l'État afin de «financer l'innovation», avant d'annoncer pêle-mêle la pérennisation du Cice en exonérations de cotisations patronales en 2019, et la suppression dès 2018 des cotisations maladies et chômage. L'impôt de solidarité sur la fortune, qui « décourage », sera lui remplacé par un impôt moindre sur l'immobilier. Mais, c'est promis, «la baisse des impôts permettra à tous les Français de bénéficier des efforts réalisés ». Au milieu des présents faits aux plus fortunés, au milieu de l'attaque faite aux plus démunis avec la hausse de la CSG, Gérald Darmanin a ensuite osé affirmer qu'« augmenter l'allocation handicapé et le minimum vieillesse de 100 euros par mois, ce n'est pas une politique pour les riches ». Ou comment offrir quelques miettes pour masquer un banquet... Face aux critiques des députés « les Républicains », il a dans une saillie révélatrice rétorqué qu'ils oubliaient bien vite le programme de François Fillon.

« DE L'INJUSTICE FISCALE »

Devant ces sommets d'ultralibéralisme, le député PCF Fabien Roussel a répondu sans vertige. « C'est de l'injustice fiscale caractérisée », a-t-il lancé, dénonçant « des cadeaux pour les plus aisés, des dépenses publiques au régime sec et une soumission aveugle au diktat européen de la dette ». Opposé à « l'insupportable financiarisation de l'économie, toujours plus coupée de la vie et des besoins réels », il a brisé le mythe selon lequel le pays vit au dessus de ses moyens, en rappelant que le PIB progresse sans cesse, et que « les 500 plus grandes fortunes ont augmenté ces vingt dernières années 4 fois plus vite que le PIB ! Entre 1996 et 2016, leur fortune est passée de 80 milliards d'euros à 570 milliards ! Elles représentent maintenant 26 % de notre PIB, contre 6 % auparavant. Et vous vous voulez supprimer l'ISF ? ».

Éric Coquerel, ciblant pour la France insoumise « l'arnaque » d'une hausse du salaire net alors que le gouvernement va «prendre dans la poche des salariés leur salaire socialisé», a conclu en estimant qu'en réalité « la noblesse d'argent devient une nouvelle noblesse de sang », et que le gouvernement affaiblit l'État et l'impôt « uniquement pour enrichir les plus riches ».

 

LA SÉCURITÉ SOCIALE AU RÉGIME SEC

Les administrations de sécurité sociale, déjà sévèrement fragilisées par François Hollande, devront désormais « participer à l'effort d'économies dans une proportion proche de celle de leur niveau dans les dépenses publiques, de l'ordre de 40 %, et devront s'inscrire dans une trajectoire de retour à l'équilibre à horizon 2020 », indique le rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire transmis aux députés.

 

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29 juillet 2017 6 29 /07 /juillet /2017 16:27

 

Suite à l’article du Monde Magazine, daté du 1er juillet « Le trésor perdu du PCF », j’ai écrit au directeur de rédaction. Voici le contenu de la lettre:

 

A l’attention de M. le Directeur de rédaction

LE MONDE – M Le Mag

80 Boulevard Auguste Blanqui

75 013 Paris

Monsieur le directeur,

Je sais bien que nous sommes en été et qu’il vous faut cependant remplir les pages de vos journaux. Je sais bien qu’il est devenu aujourd’hui un banal marronnier de se payer la tête du PCF en croyant étriper son histoire. Mais enfin, comme dit le sapeur Camembert, « quand on dépasse les bornes, il n’y a plus de limites ». Et là, dans l’article du Monde Magazine, daté du 1er juillet « Le trésor perdu du PCF », elles ont été allègrement franchies. On pouvait s’attendre à du sérieux, nous n’avons eu que du ridicule et de l’approximatif grotesque ce qui est bien dommage pour la réputation de votre journal. Ce papier ressemble plutôt à une mauvaise copie dans laquelle le potache cherche à épater le correcteur à coups de formules « choc » quand il ne fait qu’étaler son ignorance.

Il serait trop long – et cet article ne le mérite pas – de reprendre point par point erreurs et confusions. Il est en effet comique de voir « La Maison de la pensée française »  située  « au sein de la cantine de l’usine Renault à Boulogne-Billancourt ». Il est tout aussi bouffon qu’ André Fougeron et Édouard Pignon soient déclarés « peintres officiels du parti communiste français » (ils doivent se retourner dans leur tombe). Il est ridicule de présenter Les Lettres françaises comme « une revue » (vos « prodiges » n’en ont sans doute jamais eu un exemplaire sous les yeux !). Autant de perles auxquelles s’ajoutent quelques touches de mauvaise foi, par exemple rendre le PCF responsable du fait que des éditions luxueuses acquises par des bibliophiles soient aujourd’hui revendues (par qui ?) à prix d’or dans les salles des ventes… Encore un effort, et vos folliculaires pourraient peut-être accuser le PCF du prix exorbitant de certaines affiches de mai 1968 qui se vendent aussi très bien aujourd’hui !

Mais cessons là et venons en au fond. L’article cherche en fait à tourner en ridicule de grands artistes qui voulaient – quelle folie ! – « rendre l’art accessible aux classes populaires » et n’auraient été ainsi que des gogos aveugles sinon stupides, et on parle là, je vous le rappelle, de Fernand Léger, Pablo Picasso, Louis Aragon, Paul Eluard, Pablo Neruda, Édouard Pignon, entre autres. Ceux qui dressent ce réquisitoire semblent tout ignorer de l’histoire du XXe siècle et étalent, à peu de frais, leur mépris pour ces grandes figures ! Pour ce qui concerne l’apport des uns et des autres à l’humanité, la lutte est bien inégale, non ?

Je suis tout autant meurtri que vous ayez publié sans barguigner un papier aussi méprisant pour les ouvriers qui semblent, dans vos colonnes, voués à une bêtise indécrottable. Nous sommes décidément là en plein racisme social, délivré par ceux qui se posent comme « élite » éclairée et donneuse de leçons. Peut-être pourriez-vous leur apprendre qu’Édouard Pignon, né dans une famille de mineurs, fut d’abord ouvrier (galibot, puis manœuvre dans le bâtiment), que Fernand Léger naquit dans une famille de paysans, que etc… Et qu’on n’est pas condamné, notamment grâce à l’action d’un parti comme le nôtre, au déterminisme implacable de ses conditions sociales d’origine. Peut-être encore pourriez-vous leur signifier que bien des villes ouvrières doivent notamment aux communistes leur théâtre, leur cinéma, leur médiathèque, leur salle d’exposition… Et que la fameuse formule d’Antoine Vitez « être élitaire pour tous » est toujours aujourd’hui une excellente définition du combat communiste.

Au milieu de toutes ces fadaises, votre article répand aussi un pseudo-scoop, un peu réchauffé en fait car il a déjà été utilisé dans vos colonnes, mais pour une autre œuvre de Fernand Léger. En 2007, une délégation de la direction du PCF se serait rendue auprès du directeur d’un grand musée d’Art moderne avec l’intention de vendre la tapisserie de Fernand Léger « J’écris ton nom Liberté » qui est évidemment toujours accrochée dans l’immeuble du PCF, place du Colonel Fabien. Ce courageux directeur, qui n’hésite pas à confier à la presse pareille baliverne, souhaite rester anonyme, et on le comprend. Je ne vous demande pas de révéler son nom, car fort légitimement vous protégez vos sources mais je vous mets au défi de donner à vos lecteurs les noms des dirigeants qui composaient cette fantomatique délégation. Là, il ne devrait pas y avoir pour vous de gros problèmes déontologiques, puisque – vos collaborateurs le démontrent – tous les coups sont permis contre le PCF. Mais sachez-le, je dors tranquille !

Une dernière remarque : vos « journalistes » évoquent l’immeuble d’Oscar Niemeyer comme « un vrai bijou de famille entretenu comme une vieille Chevrolet cubaine par les derniers communistes ». On mesure la finesse du style et la hauteur de vue. Mais voilà qui ne va pas faire plaisir au ministère de la culture qui a inscrit l’immeuble au « Patrimoine » et aux dizaines de milliers de visiteurs annuels de ce site dont ils apprécient le geste architectural. Oui, le PCF s’honore de faire vivre ce haut lieu culturel au cœur de la capitale.

Monsieur le directeur, vous connaissez la boutade d’Alexandre Dumas : « J’aime mieux les méchants que les imbéciles, car parfois ils se reposent. » Je vous laisse le soin de choisir la catégorie dans laquelle ranger les auteurs de cet article. Mais dites-leur bien de ma part : nous sommes en été, et surtout qu’ils se reposent… Pour conclure, serait-il excessif de vous demander de présenter des excuses à tous les communistes pour ces fariboles que votre journal a publiées ? Je vous laisse juge.

Pierre Laurent

Secrétaire national du Parti communiste français

 

Il s'agit ici d'un extrait de cet article (lecture protégée sur le site du journal LE MONDE)

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