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1 décembre 2016 4 01 /12 /décembre /2016 20:29
Ousmane Sow: le scuplteur des hommes debout, est mort (L'Humanité, 1er décembre 2016)
Ousmane Sow, le sculpteur des hommes debout, est mort
AVEC AFP
JEUDI, 1 DÉCEMBRE, 2016 - L'Humanite
Ses sculptures monumentales de guerriers ont fait le tour du monde : figure majeure de l'art contemporain africain, le Sénégalais Ousmane Sow, décédé jeudi à l'âge de 81 ans à Dakar, a magnifié les grands peuples du continent noir.
En France, le grand public l'a découvert en 1999 lors d'une rétrospective sur le Pont des Arts à Paris. Ses guerriers Masaï du Kenya, ses lutteurs de l'ethnie Nouba du sud Soudan, ses Indiens d'Amérique, colosses figés dans le mouvement, au regard intense, attirent alors plus de trois millions de personnes.
"Jamais un gamin ne m'a demandé ce que mes sculptures voulaient dire. Je sculpte des hommes. J'ai tellement peur qu'on ne me comprenne pas, ou qu'on interprète mal ce que je dis, que je parle très directement. C'est la même chose en art", disait Ousmane Sow, du haut de son 1,93 m.
Né le 10 octobre 1935 à Dakar, le sculpteur n'a "jamais rêvé d'être un artiste", confiait-il en 2009. "Peut-être cela a été une chance. J'ai fait ça par plaisir".
A l'école, ce fils de comptable se plaisait à tailler de petites figurines dans des blocs de calcaire. Puis il s'est intéressé au fil de fer. Quand il part à 22 ans pour la France, il ne pense pas un instant à en faire un métier. A Paris, Ousmane Sow a parfois faim et froid. Il fait tous les métiers, puis devient infirmier et finalement kinésithérapeute. Une formation qui lui confère une parfaite connaissance des muscles et de l'anatomie dont il ne cessera de se servir plus tard pour ses créations. Après l'indépendance du Sénégal en 1960, Ousmane Sow revient s'installer dans son pays, avant de monter un cabinet à Montreuil, en banlieue parisienne. Il sculpte toujours pour son plaisir mais jusqu'à l'âge de 50 ans, détruit ses oeuvres, par manque de place notamment.
Un jour, un ami attire l'attention du Centre culturel français de Dakar sur ces sculptures et celui-ci lui consacre une exposition en 1987. Un succès, et le début d'une carrière fulgurante pour cet homme libre, qui n'a "jamais eu de patron". Ce "saut dans l'inconnu", il le représenta sur son épée lorsqu'il fut en 2013 le premier Africain à rejoindre l'Académie des Beaux-arts en tant que membre associé étranger. La série des Nouba, inspirée par les photos de Leni Riefenstahl, est présentée à la Documenta de Kassel en 1992, marquant l'entrée d'Ousmane Sow dans la cour des grands artistes contemporains. Trois ans plus tard, il expose au Palazzo Grassi, à l'occasion du centenaire de la Biennale de Venise.
Il poursuit son exploration des peuples africains avec "Les Masaï", "Les Zoulous", puis "Les Peuls", avant de s'intéresser aux Indiens d'Amérique à travers la mythique bataille de "Little Big Horn".
Ses sculptures monumentales aux tons bruns-ocres, cet homme massif les crée à partir d'une mixture secrète, macérée pendant plusieurs années et appliquée sur des ossatures de fer, de paille et de jute. Toujours sans modèle. "La kiné m'a libéré du corps parfait. Je peux me bander les yeux et faire un corps humain de la tête aux pieds", confiait le sculpteur, qui réalisait aussi des bronzes de ses oeuvres.
Ousmane Sow a aussi exploré la sculpture de grandes figures ayant marqué sa vie - Victor Hugo, de Gaulle, Mandela - et rêvait d'un "Musée des grands hommes". Au côté de ces personnalités, il voulait voir figurer son père, Moctar Sow, décédé en 1956. "Il m'a appris à avoir une énorme confiance en moi", disait-il. Sa dernière oeuvre est une tête monumentale de 2 m de diamètre, commande de la République du Sénégal. Ousmane Sow "emporte avec lui rêves et projets que son organisme trop fatigué n'a pas voulu suivre", a souligné sa famille, précisant qu'il avait fait ces derniers mois plusieurs séjours à l'hôpital à Paris et à Dakar.
 
Lire aussi :
 
Interview de Ousmane Sow par Pierre Barbancey le 30 mars 1999 dans L'Humanité
 
Les géants d'Ousmane Sow traversent les continents

Sur le pont des Arts à Paris, le sculpteur sénégalais présente notamment ses dernières statues consacrées à la bataille de Little Big Horn. Un travail spectaculaire, par les formes et les matériaux utilisés.

Né en 1935 à Dakar (Sénégal), Ousmane Sow ne pratique la sculpture que depuis une douzaine d'années. D'abord kinésithérapeute, il commence par fabriquer des marionnettes avec tout ce qui lui tombe sous la main, pour raconter des histoires. Très vite, il met au point son propre " produit ", dont il conserve jalousement le secret, et se lance dans la sculpture de grande dimension : les guerriers animistes noubas (sud du Soudan), les Massaïs (ethnie du nord du Kenya), les Zoulous et les Peuls. On peut en voir certaines sur le pont des Arts, accompagnant ses dernières productions, consacrées à la célèbre bataille de Little Big Horn, dernière victoire remportée par les Sioux, les Arapahos et les Cheyennes sur le VIIe de cavalerie du général Custer, en 1876.

Qu'est-ce qui vous a conduit à la réalisation de " Little Big Horn "? 

Ousmane Sow. Je me suis d'abord intéressé aux ethnies africaines. Little Big Horn, c'est une bataille, mais ce qui m'intéressait avant tout, c'est la vie des Indiens. Comme je ne voulais pas faire des Indiens dans leur vie quotidienne comme cela s'est passé pour les Peuls, il a fallu les replacer dans une situation conflictuelle. Ça me permettait de leur donner un mouvement, d'où le choix de Little Big Horn. Pour moi, ce n'est pas seulement un fait historique. Je voulais parler des Indiens en action.



Vous avez traité les Noubas, les Massaïs, les Zoulous puis les Peuls. Là, vous traversez l'Atlantique, à la rencontre des Indiens. Quel a été votre cheminement ?

Ousmane Sow. Les Indiens sont plus près des Africains que bien d'autres peuples. Il n'est qu'à considérer leur mode de vie, leurs croyances. Cette vie quotidienne s'apparente à celle des tribus africaines. Il y a donc une logique, une continuité dans mon travail. Ça me permet de ne pas seulement parler de nous. Je ne pense pas que, sur le pont des Arts, là où ils sont, il y ait un paradoxe. Ça ne tranche pas avec les peuplades africaines qui y sont aussi exposées.



Comment avez-vous organisé les scènes que l'on peut voir sur le pont des Arts ?

Ousmane Sow. Je les ai imaginées. Pour les hommes, ce n'était pas trop difficile. Mais pour les chevaux qu'il fallait empiler, il fallait trouver un certain écartement, donner un point d'appui pour recevoir le cheval qui allait venir dessus. Ça, je n'avais pas cette possibilité parce que, même si j'ai de la place à Dakar, là où je conçois mes sculptures, je n'en ai pas suffisamment pour les mettre en scène comme sur le pont. Il y a eu une part de chance.

Pierre Barbancey. Lorsque vous avez conçu le projet " Little Big Horn ", saviez-vous qu'elles étaient destinées au pont des Arts ?

Ousmane Sow. Il y avait un projet d'exposition qui me paraissait utopique. Je savais les difficultés à les installer dehors et surtout à un tel endroit, qui chevauche deux arrondissements de Paris. Ma compagne, Béatrice Soulé, a réussi à obtenir les accords. C'est l'idéal d'avoir un pont comme le pont des Arts, le bien nommé. C'est extraordinaire. Vous vous rendez compte de la puissance évocatrice de ce pont.


Pierre Barbancey. Vous avez beaucoup plus l'habitude de travailler sur des corps humains. Cette fois-ci, vous intégrez des animaux. Comment avez-vous abordé ce nouveau sujet ?

Ousmane Sow. Le cheval est un être parfait. Mais il ne faut pas le décrire tel qu'il est. Il faut essayer de tricher un peu, d'exagérer quelques traits pour arriver à le faire vibrer. J'ai pris le parti de l'humaniser pour lui donner - je n'ose pas dire la vie - un peu de souffle. Quand on donne un caractère à un visage, c'est la même chose. À partir du moment où le caractère cohérent est donné, on ne sait plus ce qui a été modifié. Mais, si vous n'aviez pas osé le faire par petites touches, peut-être seriez-vous passé à côté de pas mal de choses.

La technique n'est pas la même. Quand on fait cela, on est habité par d'autres propos qu'on a du mal à expliquer la tête froide, à moins d'être un professeur. L'art, c'est la liberté, la liberté d'expression. L'essentiel est que ça plaise à celui qui le fait, avant.


Pierre Barbancey. Dans votre travail de sculpture proprement dit, à quelles explorations nouvelles vous a conduit " Little Big Horn " ?

Ousmane Sow. Cela m'a permis de me libérer de mes réserves vis-à-vis de la couleur. Il y avait des habits, des instruments, des chevaux à réaliser. Donc, pour la première fois, j'ai utilisé une gamme de couleurs assez significatives. Auparavant, je me cantonnais à deux ou trois couleurs maximum. C'est une nouveauté pour moi.

C'est une question de mûrissement. Il faut qu'il y ait une certaine compréhension de ce qu'on veut transmettre comme langage. Si on prend la sculpture comme mode d'expression, je pense qu'introduire des couleurs alors qu'on ne le faisait pas avant paraît tout à fait naturel. Je ne voulais pas dramatiser la guerre à outrance. C'est une scène dramatique qui part de la confrontation de deux êtres, même deux races. Il fallait adoucir un peu, en ne mettant volontairement pas de sang, pas de plaies sur les corps. En ne mettant pas que du bleu pour les soldats. Il ne fallait pas non plus exagérer parce que ce n'était pas carnaval.

Il est des couleurs qui peuvent donner l'atmosphère de guerre tout en développant une certaine tranquillité. Ce n'était pas calculé. C'est quelque chose que j'ai voulu introduire. En réalité, en commençant à travailler, je n'étais pas tellement téméraire sur les couleurs. En construisant ma maison, je me suis laissé aller à la peindre de toutes les couleurs. J'ai trouvé ça agréable, donner de la couleur aux choses. Mais je n'ai pas transigé sur ce que je voulais dire. À partir de ce moment, les couleurs devenaient anecdotiques. C'est pour le regard, pour le plaisir de faire des mélanges. Si les formes avaient été ratées, la couleur n'aurait été d'aucun secours. La couleur, c'est un support. J'ai essayé de traduire la vie courante, sans faire de misérabilisme, c'est-à-dire rien que du noir ou du marron ou du bleu. Ça aurait été glacé.


Pierre Barbancey. Après cette expérience, la couleur va désormais vous accompagner ?

Ousmane Sow. Je n'ai pas de préjugés. Je peux revenir à quelque chose de monocolore. Je vais peut-être attaquer une nouvelle série, consacrée aux Égyptiens. Il y a énormément de couleurs, je vais peut-être reconduire ce que j'ai fait ici. Je ne sais pas encore.

Pierre Barbancey. En revanche, vous avez continué à utiliser le même type de matériau...

Ousmane Sow. C'est variable. Il y a tout de même une base, un produit contenu dans un fût qui macère pendant de longues années. Mais, une fois sortie, je peux ajouter, retrancher, épaissir, fluidifier. Je fais ce que je veux avec ce matériau de base. C'est la chance que j'ai. Lorsque vous êtes en face d'un bloc qu'il faut tailler, si vous loupez votre coup, vous faites un trou. Moi, je peux faire avec autant de finesse que possible.

Pierre Barbancey. La sculpture traditionnelle sénégalaise, et plus généralement africaine, vous influence-t-elle ?

Ousmane Sow. Quelque chose d'insensible. Quand on voit mes sculptures, même si je traite des Blancs, on s'aperçoit que c'est un Africain qui a travaillé. C'est en cela que je suis un sculpteur africain, alors que je m'adresse à tout le monde. Il y a quelque chose qui est en moi. Je suis un sculpteur d'Afrique mais pas d'art africain. Je crois que mon travail dépasse l'Afrique.

Entretien réalisé par Pierre Barbancey
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30 novembre 2016 3 30 /11 /novembre /2016 20:20
Donald Trump, idole de la droite coloniale israélienne (Sylvain Crepel, Orient XXI- lundi 28 novembre 2016)

Vers l’installation de l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem ?

Sylvain Cypel, Orient XXI, lundi 28 novembre 2016

L’élection de Donald Trump a été largement célébrée en Israël, l’un des seuls pays où l’opinion lui était largement favorable. La droite israélienne espère qu’il mettra un terme à la critique — purement formelle — de la colonisation, voire qu’il acceptera de transférer l’ambassade des États-Unis à Jérusalem.

Dans aucun autre pays au monde la détestation de Barack Obama par une majorité de l’opinion et l’espoir de voir élu Donald Trump n’auront été aussi manifestes qu’en Israël. Pour beaucoup d’Israéliens, la victoire inattendue du Donald, « The Donald », comme disent les Américains, a fait figure de divine surprise. Ministre de l’intérieur et dirigeant du parti sioniste religieux séfarade Shas, Aryeh Deri, a ainsi déclaré : « Nous devons réellement être entrés dans des temps messianiques pour que tout tourne aussi favorablement pour le peuple d’Israël. » [1]. Plus prosaïquement, le ministre de l’éducation, Naftali Bennett, chef du Foyer juif, un parti religieux ultranationaliste fer-de-lance de la colonisation des territoires palestiniens a déclaré que « l’ère de l’État palestinien est terminée » [2].

« Changement d’atmosphère »

Ce que la droite coloniale, majoritaire au Parlement israélien, attend prioritairement de cette élection, c’est d’abord un « changement d’atmosphère ». Jusqu’ici, sous Obama, et parfois même sous George W. Bush ou Bill Clinton auparavant, Israël se heurtait à un refus américain public lorsqu’il entreprenait un nouveau projet colonial d’envergure. Même si Washington opposait son veto à toute résolution contraignante au Conseil de sécurité des Nations unies, son opposition formelle bridait la marge de manœuvre du gouvernement israélien. L’espoir, exprimé par nombre d’élus de la droite, est que désormais les États-Unis regarderont systématiquement ailleurs sur l’enjeu de la colonisation. Ou, mieux, qu’ils cesseront officiellement d’y voir « un obstacle à la paix » – ce que Jason Greenblatt, un proche conseiller du « Donald », a laissé entendre deux jours après son élection [3].

La victoire de Trump a donc été instantanément « perçue par la droite israélienne comme l’occasion d’augmenter la construction de colonies » [4]. Ses membres espèrent que ce nouveau président facilitera aussi l’extension de la politique de démolition des maisons palestiniennes, en particulier à Jérusalem-Est. Leur priorité va au lancement de chantiers coloniaux auxquels l’administration Obama s’était fraîchement opposée, en particulier dans trois secteurs nommés E1, Givat Eitam et Givat Hamatos. Leur construction créerait une continuité territoriale isolant définitivement Jérusalem-Est de son environnement palestinien. Les plans israéliens sont prêts depuis longtemps, mais jusqu’ici Benyamin Nétanyahou n’a pas autorisé les mises en chantier. « Tout progrès de ces plans dans les mois à venir indiquerait un changement d’atmosphère entre Jérusalem et Washington » [5].

D’autres plans d’extension des colonies attendent un aval officiel. De même, dès le 9 novembre, lendemain de la victoire de Trump, les députés de la droite coloniale, majoritaires, approuvaient en lecture préliminaire une loi légalisant les colonies israéliennes dites « illégales » en Cisjordanie et empêchant leur démolition [6]. Nétanyahou, attendant de voir les premières mesures de Trump, s’y opposait. Mais, après une semaine de négociations pour préserver sa coalition, il finissait par s’y rallier.

Des déclarations contradictoires

Emplie d’un sentiment euphorique, la droite coloniale israélienne attend d’autres décisions de la nouvelle administration américaine. La plus symbolique touche au déplacement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem. La seconde à l’abandon de la perspective consacrant l’établissement futur côte à côte de deux États, Israël et un État palestinien, vivant « en paix et en sécurité ». Au coin des rues Hebron et Yanovski, à Jérusalem-Ouest, existe un lot que les Américains ont acquis en 1982 pour y ériger leur future ambassade. Depuis, aucune construction n’y a été lancée. De fait, tous les présidents américains, depuis Ronald Reagan, ont promis un jour à l’American Israel Public Affairs Committe (Aipac), le lobby pro-israélien de Washington, d’installer leur ambassade à Jérusalem. Mais aucun n’a donné la moindre suite à cette promesse.

Trump la mettra-t-il en œuvre ? Avant son élection, son conseiller David Friedman a déclaré que si le département d’État jugeait que déplacer l’ambassade serait « contraire à la politique américaine » de tout temps, le nouveau président leur répondrait : « Vous êtes virés » [7]. Bref, il passerait outre. Mais son autre conseiller Walid Phares a déclaré à la BBC que l’ambassade ne serait pas déplacée à Jérusalem sans « consensus ». Autant dire que ce ne serait pas pour demain…

Qui croire ? Ce qui est certain, c’est que donner réalité à cette promesse serait un précédent politique à la portée considérable. Le statut de la ville, qui devait être « internationalisée » selon le plan onusien de partage de la Palestine du 29 novembre 1947, n’a plus été rediscuté depuis sa division en 1948 entre Israël et la Jordanie, puis la conquête de sa partie orientale en juin 1967 par Israël. De sorte qu’à ce jour, aucun pays n’a installé son ambassade à Jérusalem, les États-Unis pas plus qu’un autre. Israël considère que « Jérusalem unifiée » est sa « capitale éternelle et indivisible ». Mais cette « capitale » et l’annexion de sa partie orientale palestinienne ne sont reconnues par aucun autre pays. Déplacer l’ambassade américaine à Jérusalem avant la signature d’un accord de paix entre Israël et les Palestiniens serait perçu par les Israéliens, à juste titre, comme un soutien radical à leur refus de partager la Palestine historique entre les deux peuples. Et par le monde arabe et musulman (et le reste du monde) comme une provocation. Si cela advenait, estime Mahmoud Jaraba, du Carnegie Endowment for International Peace, un tel acte américain « pourrait déclencher un nouveau cycle de violences et d’instabilité » dans toute la région [8].

Des conseillers très spéciaux

Quant à l’abandon officiel de la perspective d’un État palestinien, la droite coloniale israélienne se réjouit des premières nominations effectuées par Donald Trump. Au début de sa campagne électorale, « le Donald » avait lancé des signes contradictoires qui avaient inquiété en Israël. Il avait ainsi annoncé qu’il adopterait une position « en quelque sorte neutre » dans le conflit israélo-palestinien. Mais il s’est vite entouré d’un groupe de conseillers sur le Proche-Orient tous proches de l’extrême droite israélienne. Élu, il a fait de Steve Bannon son « conseiller stratégique » à la Maison Blanche, un homme connu pour son racisme avéré envers les Noirs, son machisme sidérant envers les femmes, sa xénophobie alimentée d’une islamophobie outrancière sur les enjeux migratoires, et même son antisémitisme, dénoncé par la Ligue anti-diffamation (LAD), le plus important organisme de lutte contre l’antisémitisme aux États-Unis. Un homme connu, aussi, pour son indéfectible soutien à la droite coloniale israélienne. Bannon devait être récemment l’invité d’honneur du diner annuel de la Zionist Organization of America, une formation sioniste d’extrême droite. Sur la pression de la LAD, il a renoncé à s’y rendre.

Pour le conseiller sur le conflit israélo-palestinien, Trump a fait appel à deux personnes très liées à cette droite coloniale israélienne. L’avocat d’affaires Jason Greenblatt a étudié dans une école rabbinique d’une colonie de Cisjordanie, et David Friedman, un ex-chroniqueur de la radio des colons en Israël, Aroutz Sheva, a présidé les Amis américains de Bet El, un fonds de soutien financier aux colons israéliens. Les deux hommes ont beaucoup œuvré à faire enlever toute référence à la « solution à deux États » de la plateforme du parti républicain pour cette élection, pour la première fois depuis trente ans. Parmi les autres conseillers proches de Trump, on trouve encore Walid Phares, un ex-responsable des Phalanges chrétiennes libanaises devenu aux États-Unis un membre actif du Centre pour la politique sécuritaire, un think tank (cercle de réflexion) qui a fait de l’islamophobie son fonds de commerce. Son fondateur, Frank Gaffney, est l’auteur de rapports conspirationnistes sur l’infiltration de la Maison Blanche par les Frères musulmans sous Obama.

Entourée de cette fière équipe, Trump a multiplié les déclarations de soutien à la politique de Nétanyahou. Mais, trois jours après son élection, il laissait entendre qu’il chercherait à amener Israéliens et Palestiniens à une « paix finale »… tout en réitérant que les colonies israéliennes ne sont « pas un obstacle » à la paix. Certains ont voulu y voir la poursuite de l’ambiguïté trumpienne. De fait, Nétanyahou a initialement réagi avec circonspection à l’égard de Trump. Pour deux raisons. D’abord, son propre réseau de relations politiques aux États-Unis est très ancré dans les milieux néoconservateurs, que Trump a beaucoup violentés durant sa campagne en répétant que la guerre en Irak avait été une erreur. Ensuite, la tonalité de la campagne de Trump était plébiscitée par l’importante fraction fascisante de son gouvernement, emmenée par Naftali Bennett, principal adversaire potentiel de Nétanyahou en cas d’élections. Mais après que Trump a emporté les élections primaires républicaines, Nétanyahou a vite tourné casaque. Son financier politique personnel, le magnat des casinos de Las Vegas et de Macao Sheldon Adelson, qui s’était tenu à l’écart du Donald, a dès lors lui aussi décidé de lui apporter son aide.

Silence sur le conflit israélo-palestinien

Nétanyahou prépare son premier rendez-vous avec Trump, lorsqu’il se rendra à la conférence annuelle de l’Aipac, du 26 au 28 mars. Selon l’ex-haut diplomate et député travailliste israélien Uri Savir, l’« objectif le plus important » du premier ministre israélien consistera à obtenir des États-Unis un « engagement tacite » pour cesser de critiquer publiquement la construction de colonies et bloquer toute initiative européenne sur le conflit israélo-palestinien « telle que l’initiative française sur la création de deux États », ainsi qu’un engagement ferme pour opposer son veto à toute velléité visant à fixer à l’ONU les « conditions de référence pour une solution à deux États » [9]. Nétanyahou tentera de persuader Trump que la question palestinienne a perdu de son importance dans la région et qu’il faut concentrer les efforts contre « le terrorisme fondamentaliste » musulman, sans distinction : qu’il s’agisse de l’organisation de l’État islamique (OEI), du Hezbollah ou du Hamas. Il cherchera aussi à le convaincre d’accroître les sanctions contre l’Iran, à défaut de pouvoir dénoncer l’accord avec Téhéran sur le nucléaire. Enfin, visiblement, Nétanyahou s’inquiète aussi d’un trop grand rapprochement américano-russe sur le dossier syrien. « Si Trump s’engage dans une réconciliation avec Poutine, écrit le spécialiste militaire du quotidien Haaretz, Amos Harel, cela constituera un formidable succès pour le régime de Bachar Al-Assad – et ce ne sera clairement pas une bonne nouvelle pour Israël, vu l’alliance d’Assad tant avec l’Iran qu’avec le Hezbollah » [10].

Quant aux Palestiniens, totalement oubliés de la campagne américaine — seul le sort des Israéliens comptait —, ils interprètent l’élection de Donald Trump, écrit Amira Hass, comme un signe supplémentaire du déclin continu de la place des Etats-Unis dans le monde [11]. La population n’imagine pas que cette élection puisse noircir plus qu’il ne l’est déjà un quotidien socialement très difficile et politiquement sans issue. Quant à l’Autorité palestinienne, elle balance entre la crainte de se voir bientôt privée, comme l’exige une partie de l’entourage du magnat américain, des subsides américains qui lui permettent d’exister, et l’idée que l’état de droit américain devrait brider les éventuelles velléités de Trump de modifier la ligne diplomatique historique de son pays, et préserver ainsi la perspective, aujourd’hui sans matérialité, d’un futur « État palestinien ».

[3Felicia Sanchez, « Trump Adviser : Israeli Settlement Building Not an Impediment to Peace », The Wall Street Journal, 10 novembre 2016.

[4Yotam Berger et Nir Hasson, « For Israel’s Right, Trump’s Election Heralds Settlement Construction Surge », Haaretz, 13 novembre 2016.

[5Idem.

[6Israël distingue les colonies « légales », établies en Cisjordanie ou sur le Golan syrien, mises en place sous autorité gouvernementale, des « illégales », érigées sur des terres palestiniennes par des militants de la colonisation sans accord du gouvernement. Selon les Nations unies, les unes comme les autres sont illégales au regard du droit international. Historiquement, les entités dites « illégales » sont vite protégées par l’armée et raccordées au réseau routier, électrique et téléphonique israélien avant, dans leur immense majorité, d’être un jour reconnues « légales » par l’État.

[7Référence à la célèbre émission de téléréalité américaine The Apprentice : You’re Fired lancée avec Donald Trump en 2004.

[8Mahmoud Jaraba, « Crushing Hopes of a Two-States Solution », in The implications of a Trump Presidency in the Middle-East, Carnegie Endowment for International Peace, 9 novembre 2016.

[9Uri Savir, « What Netanyahu wants from Trump », Al Monitor, 13 novembre 2016.

[10Amos Harel, « Israel prepares for the Age of Trump », Foreign Policy, 15 novembre 2016.

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30 novembre 2016 3 30 /11 /novembre /2016 20:18
Après la réélection d’Abbas, l’impasse pour les palestiniens

Le Congrès du Fatah, le principal mouvement de l’OLP vient de se réunir mardi à Ramallah pour la première fois depuis sept ans et il vient de réélire à sa tête, Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne qui a 81 ans. Ce qui en dit long sur la paralysie du processus politique en Palestine et sur l’impase de la relation avec Israël. Au micro d’Europe1, le rédacteur-en-chef international du JDD, François Clemenceau.

François Clemenceau, Journal du Dimanche, mercredi 30 novembre 2016

Ce qu’il y a de terrible dans cette réélection de Mahmoud Abbas, c’est que tout le monde aimerait bien que la Palestine puisse devenir une vraie démocratie avec des institutions qui représentent vraiment la totalité de la population et notamment sa jeunesse. Or les jeunes palestiniens qui ont 18 ans aujourd’hui n’ont jamais connu au pouvoir que Mahmoud Abbas depuis la mort de Yasser Arafat en 2004. Il est le patron du Fatah, donc, mais aussi de l’OLP et de l’Autorité palestinienne, tous les pouvoirs exécutifs concentrés entre ses seules mains.

Plus grave, ces leviers de pouvoirs sont des plus faibles. L’occupation israélienne de l’armée et des colons ne laisse à Mahmoud Abbas qu’un contrôle sur à peine 40% de la Cisjordanie tandis qu’à Gaza, c’est le Hamas, la faction islamiste rivale qui contrôle le territoire, entièrement encerclé par Israël et totalement dépendant de l’Etat hébreu pour son approvisionnement et son économie.

On aurait pu se dire dans de telles conditions que le mieux était peut-être de passer la main et de laisser une nouvelle génération reprendre le flambeau, mais ce n’est pas pour demain. Parce qu’il n’y a pas en fait trente six alternatives. Il n’y a personne aujourd’hui pour incarner une politique plus accommodante vis-à-vis des israéliens. Et c’est d’ailleurs le problème de Mahmoud Abbas, accusé par les éléments les plus radicaux d’être ni plus ni moins qu’un collaborateur d’Israël.

Des discordances au sein même du Fatah

Il existe en revanche des voix plus fortes au sein même du Fatah et en dehors, celles qui viennent de la société civile notamment, et qui réclament d’abord un énorme effort contre la corruption qui continue de gangrener sérieusement la direction palestinienne, en particulier les cercles les plus proches d’Abbas.

Il y a également la voix dissonante de Mohammed Dahlan l’ancien patron de la sécurité palestinienne à Gaza, exclu du Fatah et qui vit en exil aux Emirats arabes unis. Lui en appelle à un renouvellement de génération, à la libération du héros de l’intifada Mahmoud Barghouti et à une posture plus offensive face à Israël. Ces réformateurs seront-ils entendus ? Ce n’est pas le cas à ce stade. La seule concession du clan Abbas tient dans la création d’un poste de N°2 du Fatah qui sera élu la semaine prochaine et qui deviendra aussi le n°2 de l’OLP, autrement dit un très probable successeur. Mais pour quoi faire ? On ne le sait pas.

Il faudrait qu’Israël de son côté fasse preuve d’ouverture pour un retour au processus de paix. Or de ce côté-là, tout est gelé avec Benjamin Netanyahou, lui même otage de ses propres alliés nationalistes et religieux. Et ce n’est pas Donald Trump à la Maison Blanche qui tordra le bras aux dirigeants israéliens pour renégocier une solution à deux Etats. Tout cela ressemble, pour les Palestiniens et pour toux ceux qui souhaitent sortir de cette paix introuvable, à un immense gâchis.

(revue de presse de l'AFPS) 

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30 novembre 2016 3 30 /11 /novembre /2016 07:18
La fuite ou la mort: le choix terrible des Alepins de l'est (L'Orient le jour, Caroline Hayec - 29 novembre 2016)

 

« Je pense emmener ma famille du côté de la ville tenu par le régime. Dieu seul sait ce qu'il adviendra de nous. Ne m'écrivez plus, je ne veux pas avoir de problèmes une fois passé à l'Ouest. Je ne veux pas qu'ils me torturent. Merci et que Dieu vous garde. » Comme Adnane*, des milliers d'habitants des quartiers est d'Alep ont perdu tout espoir de voir les forces rebelles vaincre celles du régime et de ses alliés et préfèrent l'exode à une mort probable.

Après quatre mois de siège, et plus de 10 jours après le lancement de la plus grande offensive jamais engagée contre les zones qui échappent au contrôle de Damas, la population a sombré dans le plus profond désarroi Un tiers du bastion rebelle a cédé lors des assauts des forces du régime sur le terrain, en concomitance avec des bombardements d'une violence sans précédent. Des milliers d'habitants auraient déjà fui les zones sinistrées pour se réfugier en zone gouvernementale. Selon l'OSDH, ils seraient près de 10 000, dont 6 000 partis en direction de la petite enclave de Cheikh Maksoud contrôlée par les forces kurdes.

Selon un activiste sur place, contacté par L'Orient-Le Jour, ces familles auraient été ensuite transférées vers les zones contrôlées par le régime. D'autres ont fait état de camions entrant dans les quartiers rebelles, et de familles amassant leurs affaires à la hâte, notamment à al-Chaar, où les bombardements ont été extrêmement intenses hier. Après des mois de résistance, rythmés par la faim et les bombes, des habitants se sont donc résignés à fuir les quartiers assiégés. Aucune information fiable n'est venue confirmer ce qu'il est advenu de ces familles. « On veut partir c'est certain. Qui a envie d'affronter la mort ? Si Dieu veut nous garder en vie, alors il faut qu'on parte. Mais où ira-t-on, ça je l'ignore », confie Tarek*, un père de famille. Hier dans la soirée, Amnesty International a appelé les forces gouvernementales syriennes à veiller à ce que les civils vivant dans les zones capturées puissent circuler librement et soient protégés contre la détention arbitraire, la torture, la disparition forcée ou le harcèlement.

 

(Repère : Retour sur une année d'offensives sur Alep-Est)

 

Témoins de l'horreur
« C'est la pire des catastrophes humanitaires qui se déroule en ce moment même », témoigne Amir, un photographe des quartiers est. Malgré l'horreur dont il est doublement témoin, le photoreporter s'est-il résolu à tout abandonner pour se rendre en zone gouvernementale ? « Sûrement pas ! Les photographes sont les ennemis numéro 1 du régime », ironise-t-il. Comme Amir, Joumana refuse de s'en remettre aux forces adverses. « Les bombardements sont fous, c'est du jamais-vu, mais mon Dieu non, je ne partirai pas », dit-elle, espérant encore que la situation « s'améliore ».

« Physiquement je n'ai rien, mais moralement je suis à bout. Ma femme a terriblement peur. Mais je n'irai jamais du côté du régime, car ça veut dire choisir la mort à coup sûr. Je préfère mourir dans ma ville », confie également Yasser. Un professeur d'anglais et activiste a préféré tromper la mort en continuant à donner des cours hier après-midi. « Malgré la situation horrible aujourd'hui (hier), mes élèves ont insisté pour venir en classe », dit-il face à la caméra de son téléphone, via l'application Périscope, permettant de transmettre les images en direct.

« Je leur ai demandé de me décrire leurs vacances. (...) Je leur souhaite un avenir brillant, même si je sais que durant les prochains jours je risque de perdre certains d'entre eux », avoue-t-il.
Dans certains foyers, le désarroi est total. « Si ça continue comme cela, ce sera un carnage. Qu'est-ce qui va nous arriver ? Allons-nous tous mourir comme ça ? lance Ahmad, effondré, alors que son épouse est sur le point d'accoucher, d'un jour à l'autre, de jumeaux. Il n'y a plus d'hôpitaux, plus de médicaments, j'ai peur pour ma famille. Pourquoi le monde ne fait-il rien pour nous ? Je me pose la question sans arrêt et je ne trouve pas de réponse. »

* Les prénoms ont été changés pour des raisons de sécurité.

 

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28 novembre 2016 1 28 /11 /novembre /2016 09:57
Fidel Castro, un géant du XXème siècle (José Fort, L'Humanité, 26 novembre 2016)

Un récit de José Fort. Rarement un révolutionnaire, un homme d’Etat aura provoqué autant de réactions aussi passionnées que Fidel Castro. Certains l’ont adoré avant de le brûler sur la place publique, d’autres ont d’abord pris leurs distances avant de se rapprocher de ce personnage hors du commun. Fidel Castro n’a pas de pareil. 

Il était « Fidel » ou le « Comandante » pour les Cubains et les latino-américains, pas le « leader maximo », une formule ânonnée par les adeptes européo-étatsuniens du raccourci facile. Quoi qu’ils en disent, Fidel Castro restera un géant du XXe siècle.

Le jeune Fidel, fils d’un aisé propriétaire terrien, né il y a 90 ans à Biran dans la province de Holguin, n’affiche pas au départ le profil d’un futur révolutionnaire. Premières études chez les Jésuites, puis à l’université de La Havane d’où il sort diplômé en droit en 1950. Il milite dans des associations d’étudiants, tape dur lors des affrontements musclés avec la police dans les rues de la capitale, puis se présente aux élections parlementaires sous la casaque du Parti orthodoxe, une formation se voulant « incorruptible » et dont le chef, Chivas, se suicida en direct à la radio. Un compagnon de toujours de Fidel, Alfredo Guevara, fils d’immigrés andalous et légendaire inspirateur du cinéma cubain, dira de lui : « Ou c’est un nouveau José Marti (le héros de l’indépendance), ou ce sera le pire des gangsters ». 
 
Le coup d’Etat du général Fulgencio Batista renverse le gouvernement de Carlos Prio Socarras et annule les élections. Voici le jeune Castro organisant l’attaque armée de la caserne Moncada, le 26 juillet 1953. Un échec. Quatre-vingts combattants sont tués. Arrêté et condamné à 15 ans de prison, Fidel rédige « l’Histoire m’acquittera », un plaidoyer expliquant son action et se projetant sur l’avenir de son pays. Libéré en 1955, il s’exile avec son frère Raul au Mexique d’où il organise la résistance à Batista. Son groupe porte le nom « Mouvement du 26 juillet ». Plusieurs opposants à la dictature rejoignent Fidel. Parmi eux, un jeune médecin argentin, Ernesto Rafael Guevara de la Serna. Son père me dira plus tard : « Au début, mon fils le Che était plus marxiste que Fidel ».
 
Fidel communiste ? Fidel agent du KGB ? Fidel Castro à cette époque se définit comme un adversaire acharné de la dictature, un adepte de la philosophie chère à Thomas Jefferson, principal auteur de la Déclaration d’indépendance des Etats-Unis, et adhère au projet de Lincoln de coopération entre le capital et le travail. Raul et plusieurs de ses compagnons sont nettement plus marqués à gauche.
 
Le 2 décembre 1956, Fidel monte une expédition avec 82 autres exilés. Venant du Mexique à bord d’un bateau  de plaisance, le « Granma », ils débarquent après une traversée mouvementée dans la Province Orientale (sud-est de Cuba). La troupe de Batista les y attend. Seuls 12 combattants (parmi lesquels Ernesto Che Guevara, Raul Castro, Camilo Cienfuegos et Fidel) survivent aux combats et se réfugient dans la Sierra Maestra. Commence alors une lutte de guérilla avec le soutien de la population. Fidel Castro apparaît au grand jour dans les journaux nord-américains et européens, accorde des interviews, pose pour les photographes, parle sur les radios. A Washington, on ne s’en émeut guère lassés des frasques d’un Batista peu présentable. Après l’entrée de Fidel dans La Havane, le 9 janvier 1959, on observe avec intérêt ce « petit bourgeois qui viendra à la soupe comme tout le monde », ricane-t-on au département d’Etat. Même le vice-président Nixon mandaté pour le recevoir afin de vérifier s’il est communiste soufflera à Eisenhower : « C’est un grand naïf, nous en ferons notre affaire ».  Tant que Fidel ne s’attaque pas à leurs intérêts économiques, les dirigeants étasuniens ne s’alarment pas. Lorsque la révolution commence à exproprier des industries nord-américaines, la United Fruit par exemple, la donne change brutalement.
 
Le premier attentat dans le port de La Havane, le 4 mars 1960, sonne le prélude à une longue liste d’actes terroristes : le cargo battant pavillon tricolore, La Coubre, qui avait chargé des munitions à Hambourg, Brème et Anvers explose dans le port de La Havane faisant plus de cent morts, dont six marins français. Ulcéré, le général de Gaulle donne l’ordre d’accélérer la livraison des locomotives commandées du temps de Batista. Elles font l’objet d’étranges tentatives de sabotage. Les dockers CGT du port du Havre surveilleront le matériel jusqu’au départ des navires.
 
Une opération de grande envergure se préparait du côté de Miami : le débarquement de la Baie des Cochons. En avril 1961, au lendemain de l’annonce par Fidel de l’orientation socialiste de la révolution, le gouvernement des Etats-Unis missionne la CIA pour encadrer 1400 exilés cubains et mercenaires latino-américains en espérant, en vain, un soulèvement populaire. Fidel en personne dirige la contre-attaque. La tentative d’invasion se solde par un fiasco. Les Etats-Unis signent là leur déclaration de guerre à la révolution cubaine. Pendant des dizaines d’années, ils utiliseront toute la panoplie terroriste pour tenter d’assassiner Fidel, jusqu’à la combinaison de plongée sous-marine enduite de poison, faciliteront le débarquement de groupes armés, financeront et manipuleront les opposants, détruiront des usines, introduiront la peste porcine et des virus s’attaquant au tabac et à la canne à sucre. Ils organiseront l’asphyxie économique de l’île en décrétant un embargo toujours en vigueur. « El Caballo » (le cheval) comme l’appelaient parfois les gens du peuple, ce que Fidel n’appréciait pas, aura survécu à Eisenhower, Kennedy, Johnson, Nixon, Reagan, Ford et assisté aux départs à la retraite de Carter, Bush père et Clinton. Il dira de Bush fils « celui là, il finira très mal. »  
 
Tant d’années d’agressions, tant d’années de dénigrement et de coups tordus, tant d’années de résistance d’un petit pays de douze millions d’habitants face à la première puissance économique et militaire mondiale. Qui fait mieux ? Lorsqu’on évoque le manque de libertés à Cuba, ne faudrait-il pas d’abord se poser la question : un pays harcelé, étranglé, en guerre permanente, constitue-t-il le meilleur terreau pour favoriser l’épanouissement de la démocratie telle que nous la concevons en occident et que, à l’instar de George Bush, certains souhaiteraient calquer mécaniquement en d’autres endroits du monde, particulièrement dans le Tiers monde? Lorsque dans les salons douillets parisiens, on juge, tranche, condamne, sait-on au juste de quoi on parle ?
 
La crise des fusées ? Lorsque l’URSS dirigée par Nikita Khrouchtchev décide en 1962 d’installer à Cuba des missiles afin, officiellement, de dissuader les Etats-Unis d’agresser l’île, la « patrie du socialisme » répond à une demande de Raul Castro mandaté par Fidel. La direction soviétique fournit déjà à Cuba le pétrole que lui refuse son proche voisin. Elle met deux fers au feu : dissuader les Etats-Unis d’agresser Cuba, afficher un clair avertissement à Washington sur l’air de « nous sommes désormais à proximité de vos côtes ». La tension atteint un point tel qu’un grave conflit mondial est évité de justesse. Les missiles soviétiques retirés, Fidel regrettera que le représentant de l’URSS à l’ONU n’ait pas reconnu la réalité des faits. « Il fallait dire la vérité », disait-il. Il fut bien obligé de se plier à la décision finale de Moscou même si dans les rues de La Havane des manifestants scandaient à l’adresse de Khrouchtchev : « Nikita, ce qui se donne ne se reprend pas. »
Entre Moscou et La Havane, au-delà des rituels, les relations ont toujours été conflictuelles. Pas seulement, pure anecdote, parce que des « responsables » soviétiques ignorants faisaient livrer des chasse-neige à la place des tracteurs attendus. Les Soviétiques voyaient d’un mauvais œil le rôle croissant de Fidel dans le mouvement des non alignés, l’implication cubaine aux côtés des mouvements révolutionnaires latino-américains puis l’aide à l’Afrique. Ils ne supportaient pas la farouche volonté d’indépendance et de souveraineté de La Havane et ont été impliqués dans plusieurs tentatives dites « fractionnelles » reposant sur des prétendus « communiste purs et durs », en fait marionnettes de  Moscou, pour tenter de déstabiliser Fidel. Une fois l’URSS disparue, les nouveaux dirigeants russes ont pratiqué avec le même cynisme abandonnant l’île, coupant du jour au lendemain les livraisons de pétrole et déchirant les contrats commerciaux. Quel autre pays aurait pu supporter la perte en quelques semaines de 85% de son commerce extérieur et de 80% de ses capacités d’achat ?  L’Espagne, ancienne puissance coloniale, a laissé à Cuba un héritage culturel, les Etats-Unis son influence historique et ses détonants goûts culinaires comme le mélange de fromage et de confiture. Mais la Russie ? Rien, même pas le nom d’un plat ou d’un cocktail.
 
L’exportation de la révolution ?  Fidel n’a jamais utilisé le mot « exportation ». Ernesto Che Guevara, non plus. Ils préféraient évoquer la « solidarité » avec ceux qui se levaient contre les régimes dictatoriaux, créatures des gouvernements nord-américains. Doit-on reprocher ou remercier Fidel d’avoir accueilli les réfugiés fuyant les dictatures du Chili et d’Argentine, de Haïti et de Bolivie, d’avoir ouvert les écoles, les centres de santé aux enfants des parias de toute l’Amérique latine et, plus tard, aux enfants contaminés de Tchernobyl ? Doit-on lui reprocher ou le remercier d’avoir soutenu les insurrections armées au Nicaragua, au Salvador et d’avoir sauvé, face à l’indifférence des dirigeants soviétiques, l’Angola fraîchement indépendante encerclée par les mercenaires blancs sud-africains fuyant, effrayés,  la puissance de feu et le courage des soldats cubains, noirs pour la plupart ? Dans la mémoire de millions d’hommes et de femmes d’Amérique latine et du Tiers monde, Fidel et le Che sont et resteront des héros des temps modernes.
 
Les libertés ? Fidel, un tyran sanguinaire ? Il y eut d’abord l’expulsion des curés espagnols qui priaient le dimanche à la gloire de Franco. Complice de Batista, l’église catholique cubaine était et demeure la plus faible d’Amérique latine alors que la « santeria », survivance des croyances, des divinités des esclaves africains sur lesquels est venue se greffer la religion catholique, rassemble un grand nombre de noirs cubains. Les relations avec l’Eglise catholique furent complexes durant ces longues années jusqu’au séjour de Jean Paul II en 1998 annoncée trop rapidement comme l’extrême onction de la révolution. Ce n’est pas à Cuba que des évêques et des prêtres ont été assassinés, mais au Brésil, en Argentine, au Salvador, au Guatemala et au Mexique.
Il y eut la fuite de la grande bourgeoisie, des officiers, des policiers qui  formèrent, dès la première heure, l’ossature de la contre révolution encadrée et financée par la CIA. Il y eut ensuite les départs d’hommes et de femmes ne supportant pas les restrictions matérielles. Il y  eut l’insupportable marginalisation des homosexuels. Il y eut les milliers de balseros qui croyaient pouvoir trouver à Miami la terre de toutes les illusions. Il y eut la froide exécution du général Ochoa étrangement tombé dans le trafic de drogue. Il y eut aussi ceux qui refusaient la pensée unique, la censure édictée par la Révolution comme « un acte de guerre en période de guerre », les contrôles irritants, la surveillance policière. Qu’il est dur de vivre le rationnement et les excès dits « révolutionnaires ». Excès? Je l’ai vécu, lorsque correspondant de « l’Humanité » à La Havane, l’écrivain Lisandro Otero, alors chef de la section chargée de la presse internationale au Ministère des Affaires étrangères, monta une cabale de pur jus stalinien pour tenter de me faire expulser du pays. 
 
Ceux qui osent émettre une version différente d’un « goulag tropical » seraient soit des « agents à la solde de La Havane », soit victimes de cécité. Que la révolution ait commis des erreurs, des stupidités, des crimes parfois n’est pas contestable. Mais comment, dans une situation de tension extrême, écarter les dérives autoritaires? 
 
A Cuba, la torture n’a jamais été utilisée, comme le reconnaît Amnesty international. On tranchait les mains des poètes à Santiago du Chili, pas à la Havane. Les prisonniers étaient largués en mer depuis des hélicoptères en Argentine, pas à Cuba. Il  n’y a jamais eu des dizaines de milliers de détenus politiques dans l’île mais un nombre trop important qui ont dû subir pour certains des violences inadmissibles. Mais n’est-ce pas curieux que tous les prisonniers sortant  des geôles cubaines aient été libérés dans une bonne condition physique ?
Voici un pays du Tiers monde où l’espérance de vie s’élève à 75 ans, où tous les enfants sont scolarisés et soignés gratuitement. Un petit pays par la taille capable de produire des universitaires de talent, des médecins et des chercheurs parmi les meilleurs au monde, des sportifs raflant les médailles d’or, des artistes, des créateurs.  Où, dans cette région du monde, peut-on présenter un tel bilan ?
 
Fidel aura tout vécu. La prison, la guérilla, l’enthousiasme révolutionnaire du début, la défense contre les agressions, l’aide internationaliste, l’abandon de l’URSS, une situation économique catastrophique lors de la « période spéciale », les effets de la mondialisation favorisant l’explosion du système D. Il aura (difficilement) accepté l’adaptation économique avec un tourisme de masse entraînant la dollarisation des esprits parmi la population au contact direct des visages pâles à la recherche de soleil, de mojito, de filles où de garçons. Comment ne pas comprendre les jeunes cubains, alléchés par l’écu ou le dollar, et regardant avec envie les visiteurs aisés venus de l’étranger ? Il aura, enfin, très mal supporté  le retour de la prostitution même si dans n’importe quelle bourgade latino-américaine on trouve plus de prostituées que dans  la 5 eme avenue de La Havane. Alors, demain quoi ?
 
Fidel mort, la révolution va-t-elle s’éteindre ? Il ne se passera pas à Cuba ce qui s’est produit en Europe de l’Est car la soif d’indépendance et de souveraineté n’est pas tarie. Les adversaires de la révolution cubaine ne devraient pas prendre leurs désirs pour la réalité. Il y a dans cette île des millions d’hommes et de femmes – y compris de l’opposition – prêts à prendre les armes et à en découdre pour défendre la patrie. Fidel avait prévenu en déclarant : « Nous ne commettrons pas l’erreur de ne pas armer le peuple. » Le souvenir de la colonisation, malgré le fil du temps, reste dans tous les esprits, les progrès sociaux enregistrés, au-delà des difficultés de la vie quotidienne, constituent désormais des acquis. Il y a plus. La révolution a accouché d’une nouvelle génération d’hommes et de femmes refusant le retour au passé, des cadres « moyens » de trente à quarante ans très performants en province, des jeunes dirigeants nationaux aux talents confirmés. Une nouvelle époque va s’ouvrir et elle disposera d’atouts que Fidel n’avait pas. L’Amérique latine, ancienne arrière cour des Etats-Unis, choisit des chemins progressistes de développement, l’intégration régionale est en marche, le prestige de la révolution cubaine demeure intacte auprès des peuples latino-américains. Cuba, enfin, peut respirer.
Il n’y aura pas de rupture à Cuba. Il y aura évolution. Obligatoire. Pour qu’elle puisse s’effectuer dans les meilleures conditions, il faudra que les vieux commandants de la Révolution rangent leurs treillis vert olive, prennent leur retraite et passent la main. Les atlantes du futur, de plus en plus métissés, sont prêts. Ne sont-ils pas les enfants de Fidel ?
José Fort est un internationaliste passionné du monde, journaliste, ancien chef du service monde de l’Humanité.
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28 novembre 2016 1 28 /11 /novembre /2016 08:02
 

Aujourd'hui, McDonald's réclame 19,8 millions de dollars à la ville de Florence pour avoir essuyé un refus d'implantation d'un "restaurant" de la marque sur la Piazza del Duomo, classée au patrimoine mondial de l’Unesco
La Piazza del Duomo est un joyau mondial, elle fait partie de notre patrimoine commun. La ville de Florence, en Toscane, essaie de promouvoir la SlowFood, la culture culinaire locale, elle étudie l’implantation de jardins collectifs et de toits potagers, cette ville promeut une alimentation plus saine pour ses citoyens et tente de préserver son patrimoine tant culinaire qu'historique.
Avons-nous là un aperçu des recours que les grandes multinationales pourront intenter demain en toute légalité ? Engager des procès contre des territoires qui veulent conserver une identité culinaire, des valeurs, un patrimoine ?

Mc Donald's dénonce une "injustice manifeste", un obstacle à la liberté d'entreprendre et réclame 17,8 millions d'euros de dommages & intérêts pour le manque à gagner d'un "restaurant" qui n'existe pas !
Mais comment cela est-il possible ? Comment protéger nos territoires contre l'appétit de ces grandes multinationales ? Est-ce là un avant-goût sauce burger des accords en cours de tractation entre l'Europe et le continent Américain ?

Nous, Citoyens Européens, soutenons la courageuse ville de Florence et son maire Dario Nardella dans cette lutte. Protégeons l'historique Piazza del Duomo de l'arche jaune et de son appétit insatiable, sauvegardons le patrimoine du centre historique de cette magnifique ville qu'est Firenze !

Article du Wall Street Journal
Article de La Tribune
Article de Le Monde  

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26 novembre 2016 6 26 /11 /novembre /2016 11:00
Mort de Fidel Castro: Pierre Laurent salue un des dirigeants du mouvement de l'émancipation humaine (Europe 1)

Le secrétaire national du Parti communiste français rappelle que Fidel Castro "a libéré son peuple en 1959".

Fidel Castro, décédé vendredi soir, "restera dans l'Histoire" comme "l'un des dirigeants du mouvement d'émancipation humaine", qui a notamment "tenu tête à l'impérialisme américain", a réagi samedi le secrétaire national du Parti communiste français (PCF), Pierre Laurent.

"Il a tenu tête à l'impérialisme américain". Fidel Castro "a libéré son peuple en 1959, à l'époque où l'île était en quelque sorte le bordel et le casino des riches Américains. Et puis il a tenu tête à l'impérialisme américain. Dans le monde entier, dans l'Amérique centrale et latine, c'est un homme qui a beaucoup compté", a déclaré Laurent sur iTELE. "Ca a été dans le XXe siècle, l'un des dirigeants du mouvement d'émancipation humaine. La révolution qu'il a menée a eu lieu à l'époque de la décolonisation et s'inscrivait dans ce mouvement de restauration de la souveraineté des peuples. C'est ça qui restera dans l'Histoire", a poursuivi le sénateur de Paris.

"Son frère a été dans l'équipe de la Révolution dès le début". "Pour le reste, il y a des changements déjà en cours à Cuba (...) Je pense que ce mouvement de transformation va s'approfondir dans les mois qui viennent", a poursuivi le dirigeant communiste, soulignant que "la situation a évolué, y compris dans l'affrontement avec les Etats-Unis. "Son frère (Raul Castro) a été dans l'équipe de la Révolution dès le début. Ils sont évidemment différents, ne serait-ce que d'un point de vue personnel, et Raul a tenu un rôle moins en évidence pendant les premières décennies de la révolution, mais ils sont animés de la même volonté de maintenir la voie du socialisme à Cuba et de le faire en essayant d'approfondir régulièrement les voies démocratiques", selon Laurent.

"L'image qui va rester, c'est celle de la prise du pouvoir, de la prise du palais de la Moncada, de la révolution de 1959, celle où il a libéré son peuple. Et les images de Fidel et le Che vont également rester dans l'Histoire", a ajouté Pierre Laurent. La Moncada est en fait la caserne que Fidel Castro et ses partisans ont en vain tenté de prendre d'assaut le 26 juillet 1953. Cette date est devenue le nom du mouvement révolutionnaire du dirigeant cubain arrivé au pouvoir un peu moins de six ans plus tard.

 
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25 novembre 2016 5 25 /11 /novembre /2016 20:41
Turquie: les femmes: l'autre ennemi d'Erdogan (L'Humanité, Stéphane Aubouard, 22 novembre 2016)
Turquie. Les femmes : l’autre ennemi d’Erdogan
STÉPHANE AUBOUARD
MARDI, 22 NOVEMBRE, 2016
L'HUMANITÉ

Outre les intellectuels, les artistes, les médias et les opposants politiques, le président turc continue de mettre au pas la gent féminine. Un projet de loi permettant à un violeur d’épouser sa victime mineure a été proposé.

«La vie d’une femme est défaillante et imparfaite si elle n’a pas réussi à être mère. Une femme devrait avoir au minimum trois enfants ! » Ces quelques mots prononcés par Recep Tayyip Erdogan, le 5 juin 2016, lors de l’inauguration officielle du nouveau siège de l’association turque Femmes et démocratie, résument brièvement mais justement le programme que le Parti pour la justice et le développement (AKP) met en place depuis treize ans qu’il est au pouvoir. Une politique conservatrice et patriarcale visant tout à la fois à ghettoïser les femmes dans un rôle restreint d’épouse et de mère et, dans le même temps, à mener une politique nataliste que le président islamo-conservateur défendait récemment par une formule lapidaire : « Une famille forte pour une nation forte ! »

Une dérive au minimum misogyne, voire gynophobe

Mais voici que la pression exercée sur le corps de la femme s’accentue un peu plus ces derniers jours. Le gouvernement turc a soumis au Parlement une proposition de loi qui permet, dans certains cas, d’annuler la condamnation d’une personne pour agression sexuelle sur mineure si l’agresseur épouse sa victime. La loi est passée en première lecture et, si elle est adoptée après un second vote, ce sont au moins 3 000 jeunes femmes qui se trouveraient obligées de se marier à leur violeur. « Il y en a qui se marient avant d’avoir atteint l’âge légal. Ils ne connaissent pas la loi. Ils ont des enfants, le père va en prison et les enfants restent seuls avec leur mère », s’est ainsi défendu sans honte le premier ministre turc, Binali Yildirim, justifiant ainsi une mesure visant à « lever cette injustice ».

Le fait même qu’une telle loi ait pu germer dans le cerveau de députés de l’AKP montre à quel point les femmes sont aujourd’hui considérées en Turquie comme citoyennes de seconde zone. Les chiffres sont accablants. Seules 30 % des femmes travailleraient aujourd’hui en Turquie, et bien peu à des postes de responsabilité. Sur les bancs de l’Assemblée nationale, avant la grande purge initiée après le coup d’État avorté du 15 juillet, elles n’étaient que 14 %. La grande majorité d’entre elles étaient issues du Parti démocratique des peuples (HDP), formation politique de la gauche laïque qu’Erdogan a décidé de criminaliser depuis lors (voir l’Humanité des 7 et 16 novembre). Mais, est-ce vraiment une surprise ? L’ONU et l’Union européenne, qui condamnent ce projet de loi, se réveillent bien tard (voir ci-après). Les signaux étaient nombreux qui montrent une dérive au minimum misogyne, voire gynophobe (haine de la femme). Lundi 24 novembre 2014, il y a deux ans presque jour pour jour, dans un discours en marge d’un sommet sur la justice et les femmes à Istanbul, le chef de l’État turc exprimait sa position sur le rôle de la femme dans la société : « Notre religion a défini une place pour les femmes : la maternité. Vous ne pouvez pas mettre sur un même pied une femme qui allaite son enfant et un homme. (...) Leur caractère, leurs habitudes et leur physique sont différents (…) Vous ne pouvez pas demander à une femme de faire tous les types de travaux qu’un homme fait, comme c’était le cas dans les régimes communistes (...). »

Les Kurdes ont fait de l’égalité homme-femme leur porte-drapeau

La bataille idéologique autour du sujet féminin fait rage en Turquie. Et outre les guerres de territoires, les batailles portées par l’AKP dans les zones kurdes, que ce soit en territoire turc ou syrien, ne sont pas sans rapport avec cette bataille idéologique. Politiquement et militairement, les membres du HDP ou les miliciens du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en Turquie, tout comme ceux du Parti de l’union démocratique (PYD) ou des Unités de protection du peuple (YPG/J) dans le Rojava (Kurdistan syrien), ont depuis longtemps fait de l’égalité homme-femme leur porte-drapeau. Au sud de la Turquie comme dans le Kurdistan syrien, cette égalité se matérialise par l’existence de comaires et de députés hommes et femmes confondus. Une pratique théorisée depuis longtemps par Abdullah Ocalan, le fondateur du PKK, emprisonné depuis dix-sept ans sur une île turque. Dans un essai intitulé Libérer la vie : la révolution de la femme, le leader kurde écrivait il y a quelques années : « Sans égalité entre les sexes, aucune exigence de liberté et d’égalité ne peut avoir de sens. Le principe fondamental du socialisme est aujourd’hui de tuer l’homme dominant. » Une formule définitive qui ne plaira guère à l’homme fort d’Ankara et sa garde rapprochée.

Lire aussi :

Le pouvoir turc met la pression sur l’Union européenne

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23 novembre 2016 3 23 /11 /novembre /2016 15:00
Elias Sambar

Elias Sambar

Elias Sanbar s’adresse à Anne Hidalgo

Choqué par le vœu adopté en Conseil de Paris à propos de la résolution de l’Unesco sur Jérusalem, Elias Sanbar, écrivain, poète et délégué permanent de la Palestine auprès de l’Unesco, a écrit le 9 novembre à la maire de Paris pour exprimer « l’indignation et le sentiment d’injustice » qu’il a fait naître chez les Palestiniens. 
Nous publions ci-dessous cette lettre. 
En pièce jointe, le vœu tel qu’il a finalement été adopté et qui ne figure toujours pas sur le site du Conseil de Paris. 
Les élus EELV, PCF et PG, ainsi qu’une élue socialiste ont voté contre. 

Elias Sanbar, vendredi 18 novembre 2016

Madame la Maire de Paris,

Je viens de prendre connaissance du "voeu" que vous venez d’adopter à la Mairie de Paris sur proposition de l’exécutif municipal et je vous écris pour vous dire la consternation de la délégation de la Palestine auprès de l’UNESCO.

Quant à la forme pour commencer avec sa liste de "considérants", qui ressemblent fort aux "attendus" d’un jugement émis par un tribunal de l’Inquisition qui, dans la grande tradition de cette dernière, ne se serait pas encombré d’entendre la version de la partie injustement incriminée.

Quant au fond également. Vous auriez-vous donné la peine de lire le texte de la Résolution coupable selon vous de négationnisme, vous auriez découvert que le texte en question souligne, en toutes lettres et à deux reprises, la centralité de Jérusalem d’une part, d’Hébron et de Béthléem d’autre part, pour les trois religions monothéistes.

Auriez-vous poussé un peu plus loin votre nécessaire quête de la vérité, vous auriez découvert que le texte que vous accusez de tous les maux est un projet conjoint rédigé à la fois par la Palestine et la Jordanie.

La Palestine que j’ai l’honneur de représenter, dont vous avez dernièrement honoré le Président pour son adhésion tenace à une paix juste et à une réconciliation véritable.

La Jordanie qui, comme vous le savez est signataire d’un Traité de paix avec Israël, et dont le monde entier, gouvernement israélien en tête, s’accorde à louer la politique constructive et pacifique.

La Palestine et la Jordanie qui se retrouvent accusées selon vous d’œuvrer à délégitimer une religion, "en l’espèce le judaisme", propos que nous jugeons proprement insultants pour sa Majesté le Roi de Jordanie et le Président de l’Etat de Palestine.

Insultants également pour les vingt-quatre Etats souverains qui ont voté en faveur de l’adoption de la résolution, rétifs aux pressions et menaces de représentant de l’actuel gouvernement d’extrême droite israélien.

Vous abordez la question d’une "dénomination", celle que nous avons effectivement refusé d’adopter.

Permettez-moi de vous dire qu’auriez-vous pris la peine de nous joindre, nous vous aurions expliqué que notre refus relève d’une seule et unique conviction : la demande persistante du délégué israélien, aux antipodes d’un quelconque respect des religions, ne vise qu’à une légitimation de l’annexion de la Ville occupée en 67 sous couvert du respect de la foi des citoyens juifs d’Israël. Pratique "toponymique" commune à tous les occupants de quelque religion qu’ils se prévalent.

Nous vous aurions également montré que notre mandat ne vise qu’à une seule délégitimation, celle de l’occupation de Jérusalem-Est, capitale occupée de l’Etat de Palestine.

Le ton de ma lettre peut vous paraître choquant. Il reflète l’indignation et le sentiment d’injustice flagrante que votre décision a fait naître chez nous. Vous ne nous avez pas habitués à cela.

Je termine en vous affirmant que, convaincu du grand danger que constitue le mélange de la religion et de la politique, je demeure à votre disposition pour toute explication claire et amicale.

Je joins à toutes fins utiles le texte de la Résolution incriminée et vous prie de croire, Madame la Maire de Paris, à mes respects et à notre désir de dissiper par le dialogue le malentendu né de cette décision injuste et malvenue.

Elias Sanbar

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22 novembre 2016 2 22 /11 /novembre /2016 19:28
Lydia Samarbakhsh, responsable du secteur international du PCF avec Anne Sabourin

Lydia Samarbakhsh, responsable du secteur international du PCF avec Anne Sabourin

Intervention de Lydia Samarbakhsh, lors de la 18e Rencontre internationale des partis communistes et ouvriers

 

Chers camarades,

Je tiens tout d’abord à remercier la direction et le département International du Parti communiste du Vietnam pour l’organisation de la 18e Conférence internationale des partis communistes et ouvriers, et la qualité de l’accueil qui nous a été réservé.

J’adresse à tous les participants le salut fraternel chaleureux de Pierre Laurent, secrétaire national, et de la direction du PCF.

Le contexte de nos travaux est marqué par une forte exigence. Celle d’envoyer un signal d’espoir aux millions de travailleurs, aux peuples, aux jeunes et aux femmes, premières cibles des injustices, du monde entier qui luttent pour une société et un monde plus justes et plus humains.

Pour renforcer nos relations et approfondir nos échanges, cela implique de nous donner pour règle commune le strict respect de nos approches et de nos expériences respectives, et de nous concentrer sur nos compréhensions et des objectifs communs.

Au quotidien et dans la durée, le PCF consacre ses efforts à ouvrir, je cite notre résolution de congrès, «un processus de transformation sociale fondé sur les luttes, la bataille idéologique et les conquêtes de pouvoirs. Ensemble, nous pouvons bâtir un nouveau mode de développement productif, social et écologique, portant l’exigence féministe à l’égalité, l’aspiration à l’autonomie de chacune et chacun, l’appropriation et le partage des savoirs, des informations, des arts et des cultures», enfin pour ce qui nous concerne en France, nous voulons avec toutes les forces de gauche et citoyennes disponibles relever le défi de la refondation de la politique et de la République, et de la refondation de l’Europe.

Nous avons réaffirmé à notre dernier Congrès en juin 2016 qu’ «Au XXIe siècle, le grand dessein de l’humanité est d’en finir avec toutes les formes d’exploitation, de domination et d’aliénation, de l’homme par l’homme, de l’homme sur la femme, de l’activité humaine sur la nature.» C’est le mouvement que nous nommons pour notre part, le «communisme de nouvelle génération».

Je concentrerai mon intervention sur les enjeux devant lesquels nous sommes placés en France et dont l’issue aura un impact au plan européen comme international.

La politique menée depuis 2012 a persévéré dans le choix des politiques d’austérité et d’attaques contre les droits des travailleurs, et nous nous trouvons à la veille d’une année électorale importante avec les élections présidentielle et législatives de 2017.

Elles interviennent dans un contexte économique et social désastreux pour les catégories populaires et de crise européenne approfondie.

La fin de mandat du président François Hollande voit se profiler le danger sérieux non seulement de voir la droite reconquérir le pouvoir mais de la voir adossée à une extrême droite plus forte que jamais depuis 70 ans.

Les politiques d’austérité et anti sociale menées par les gouvernements européens et imposée par les traités européens ont conduit l’Union européenne à une crise que les dirigeants européens eux-mêmes qualifient d’existentielle.

Il n’y aura pas de statu quo possible.

Trois conceptions de la construction européenne s’affrontent:

  • une conception ordolibérale qui veut pousser les logiques libérales à leur terme au risque de déboucher sur une «Europe» à plusieurs vitesses selon une partition Nord-Sud;
  • une conception d’extrême droite de divisions qui veut se saisir des risques de dislocation du cadre libéral européen, de destruction de l’Europe, pour accélérer une dynamique de conquête du pouvoir dans chacun de nos pays et alimenter la compétition entre les nations;
  • et la 3e conception est celle que nous défendons «l’option de la reconstruction d’une Europe de coopération, de solidarité, d’une Europe de souveraineté qui doit laisser plus de place aux pouvoirs de chaque nation de négocier démocratiquement son insertion dans cette Europe de solidarité. Nous parlons d’une Europe à géométrie choisie, c’est-à-dire une Europe où la participation au projet européen doit, à chaque fois, être librement consenti par les pays.»

Cette 3e conception est confrontée à l’exigence de plus grandes et plus fortes convergences de luttes et d’actions populaires au plan européen pour renverser le rapport de forces aujourd’hui largement favorables aux marchés financiers et au patronat.

Même s’il y a encore beaucoup à faire, les derniers événements sur le CETA montrent que les forces existent pour ce combat, et que des victoires sont possibles ouvrant sur de nouvelles phases de l’affrontement avec le capital.

Devant les échéances électorales, nous travaillons à unir les forces de la gauche antilibérale et antiaustérité pour faire émerger une alternative non seulement à la droite mais au gouvernement et président sortants.
Ces derniers ont trahi jusqu’aux principes et valeurs de la gauche en menant une politique aux ordres du patronat et des marchés financiers, en aggravant les coupes budgétaires, la casse de l’outil industriel national, et en relançant une politique interventionniste en Afrique, au Proche-Orient.

Les projets de la droite pour la France et l’Europe ne permettent en aucun cas de banaliser la perspective de leur retour au pouvoir.

Si la France basculait massivement en 2017 à droite et à l’extrême droite cela aurait les pires conséquences pour l’Europe et le monde: l’exemple de la Grande-Bretagne et des conséquences du Brexit doit alerter ceux qui pensent naïvement que la colère seule, sans perspective ni espoir de transformation profonde, apporterait un changement bénéfique à notre peuple.

Les forces sociales-libérales et réactionnaires alimentent une profonde crise politique, démocratique et des institutions qui détournent des élections de plus en plus de citoyen-ne-s et travailleurs qui ont intérêt à s’unir sur un projet de transformation sociale. Divisés et démobilisés, les travailleurs restent sous la coupe de politiques faites par et pour le patronat et les marchés financiers.

Mais pour que l’espoir et la mobilisation reviennent, il est nécessaire que le mouvement populaire s’impose dans le débat politique pour tourner la page des cinq ans de pouvoir de François Hollande et bâtir un projet politique de gauche pour le pays fondé sur ses aspirations et exiences.

Ces derniers mois nous avons donc organisé à l’échelle du pays une campagne de consultation de masse sur les grandes questions sociales, économiques et politiques que les catégories populaires veulent imposer à l’ordre du jour de la campagne électorale.

Nous sommes allés à la rencontre de 400 000 personnes. 65 000 femmes et hommes ont rempli un formulaire énonçant leurs priorités, et nous allons prendre de nouvelle initiatives pour développer en profondeur ce travail politique à la fois d’élaboration et de rassemblement.

Nous lançons dans une semaine notre campagne électorale en proposant 7 axes d’action remettant les besoins humains, sociaux et écologiques au coeur de l’action politique et des enjeux des prochaines élections.

  • PRENDRE LE POUVOIR SUR LA FINANCE: avec la création d’un pôle public bancaire et la nationalisation de la BNP-Paribas et de la Société générale.

     
  • INVESTIR POUR DEMAIN: avec l’abrogation de la loi El Khomri au profit d’une loi de la sécurisation de l’emploi et de la formation, du passage aux 32h et de la retraite à 60 ans.

     
  • L’EGALITE FEMMES-HOMMES MAINTENANT! avec un renforcement immédiat des dispositifs contraignants pour l’égalité salariale et professionnelle.

     
  • UNE FRANCE PROTECTRICE ET SOLIDAIRE: avec un plan de relance des services publics et lutte contre les inégalités (suppression de la TVA sur les produits de 1ère nécessité et l’interdiction des coupures d’énergie et d’eau, et des expulsions locatives pour cause de précarité).

     
  • PRODUIRE AUTREMENT: avec la création d’1 million d’emplois dans les filières d’avenir: l’énergie avec notamment les énergies renouvelables, l’automobile propre, les transports urbains et ferroviaires, la rénovation thermique des bâtiments, l’agriculture paysanne, l’aérospatiale, la navale et le numérique.

     
  • DE LA NOUVELLE RÉPUBLIQUE AU RENOUVEAU DE LA POLITIQUE: la réduction des pouvoirs du Président de la République et la suppression du 49-3 au profit d’un renforcement de ceux de l’Assemblée et la stricte limitation du cumul des mandats accompagnée d’un statut de l’élu.

     
  • L’OFFENSIVE POUR CHANGER L’EUROPE: l’abrogation du traité budgétaire européen, quitte à retirer la signature de la France, au profit d’une loi anti-dumping social et de la création d’un fonds européen pour l’investissement et la création d’emplois.

Enfin, nous préparons le lancement de deux campagnes populaires qui touchent aux enjeux internationaux et au combat internationaliste.

L’une pour la paix et la culture de paix pour viser la construction d’un mouvement de masse pour la paix par l’appropriation populaire des grands enjeux internationaux et européens pour imposer, en la rendant incontournable, l’aspiration populaire de paix et sécurité collective, et un changement de politique internationale et européenne de la France — ce qui commencerait pour la France par quitter l'OTAN, lutter pour sa dissolution, et travailler avec l'ONU pour la mise en œuvre de cadres régionaux et multilatéraux de coopération et de sécurité collective.

L’autre «Pour une France solidaire et une France, terre d’hospitalité» pour les migrants par une bataille politique et idéologique afin de faire prévaloir, et rendre visible, un contre-discours aux appels à la haine et la violence de l'extrême droite, en même temps que nous aidons à la mobilisation pour des solutions politiques d’urgence et durables fondées sur l’exigence de solidarités à développer dans toute la société, et avec les migrants en France comme dans l'UE avec la Grèce et l'Italie, qui paient au prix fort le poids insoutenable des directives de Dublin et de l'austérité européenne.

Chers camarades,

Si le Parti communiste français participe à la 18e Rencontre internationale des partis communistes et ouvriers comme il participe à toutes les initiatives qui contribuent à renforcer les liens entre forces de gauche et révolutionnaires, c’est parce que nous croyons fermement que tout le monde a besoin de tout le monde dans nos combats à l’échelle nationale, régionale et notre engagement internationaliste contre la domination capitaliste.

Nous sommes maintenant à un stade où a grandi de manière significative la conscience des inégalités insoutenables que le capitalisme crée; cela nous appelle à jouer notre rôle pour unir toutes les forces progressistes - dans le plein respect de leur diversité - et de promouvoir des solutions politiques transformatrices pour une nouvelle phase de développement du genre humain.

Hanoï, 18e Rencontre internationale des partis communistes et ouvriers
28 au 30 octobre 2016

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