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4 septembre 2018 2 04 /09 /septembre /2018 16:17
La barbarie au pouvoir en Arabie Saoudite: Halte aux exécutions

Arabie saoudite : halte aux exécutions

Les condamnations à mort se multiplient en Arabie Saoudite. Depuis le début de cette année, 134 personnes ont été exécutées.

L'objectif du médiatique Mohammed Ben Salman vise à intimider et à briser les contestations de celles et ceux qui dénoncent l'agressivité extérieure et les crimes de guerre perpétrés au Yémen, ainsi que, sur le plan national, les privatisations, l'austérité et la "Vision 2030" du prince héritier et vice-premier ministre de la pétromonarchie.

Les arrestations d'intellectuels, de militants des droits civiques et humains se traduisent par de multiples peines capitales : Ali Mohammed al-Nimr, un jeune manifestant anti-régime devrait être décapité, son corps crucifié et exposé publiquement. La jeune Issa al-Ghomghani et quatre autres militants chiites devraient subir le même sort. Elle est accusée d'avoir rassemblé des informations sur les mouvements sociaux de 2011. Quant au blogeur Samar Badawi, il purge une peine de dix ans de prison accompagnée de 1000 coups de fouet pour apostasie.

Les prétentions réformistes du régime saoudien volent en éclats devant cette terrible politique répressive. Pendant ce temps, les puissants alliés de l'Arabie Saoudite, à l'exception du Canada, font preuve d'un mutisme honteux.

Le Parti communiste français (PCF) exprime sa solidarité avec les démocrates d'Arabie Saoudite et exige leur libération. Dans l'urgence, il appelle à la mobilisation pour suspendre les exécutions. Le président de la République, Emmanuel Macron, qui se targue d'entretenir des relations chaleureuses avec le prince héritier, s'est installé dans un silence complice traduisant une capitulation de la France, et le sacrifice de vies humaines sur l'autel des ventes d'armes et autres juteux contrats commerciaux.

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30 août 2018 4 30 /08 /août /2018 19:28
Festival des autres mondes au Roudour à St Martin des Champs du 21 septembre au 21 octobre 2018 autour de Zehra Dogan, artiste et journaliste kurde dans les geôles du régime d'Erdogan
Festival des autres mondes au Roudour à St Martin des Champs du 21 septembre au 21 octobre 2018 autour de Zehra Dogan, artiste et journaliste kurde dans les geôles du régime d'Erdogan

Si vous voulez soutenir cette ambitieuse manifestation culturelle et politique pour la liberté d'expression et la liberté des peuples de Turquie, il est possible de soutenir l'organisation de ce deuxième événement important du point de vue de la solidarité internationale avec les Kurdes de Turquie dans la région de Morlaix et en Bretagne en soutenant les associations organisatrices par un financement participatif:

https://www.helloasso.com/associations/la-minoterie-a-pleine-voix/collectes/festival-des-autres-mondes-autour-de-zehra-dogan   

Lire aussi: 

Exposition Zehra Dogan à Traon Nevez - une oeuvre d'une force incroyable par une jeune artiste et journaliste féministe kurde réprimée par le pouvoir d'Erdogan et emprisonnée pour 2 ans et neuf mois

Zehra Dogan. Les yeux grands ouverts (Le Télégramme, Morlaix, Sophie Guillerm, 5 janvier 2017)

L'artiste kurde Zehra Dogan emprisonnée par Erdogan exposée à Traou Nevez à Plouézoc'h du 5 au 21 janvier 2017 - c'est parti pour plusieurs jours de rencontres, de débats, de films et concerts autour des kurdes et de leurs combats

 

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30 août 2018 4 30 /08 /août /2018 05:37

La chanteuse mythique n’est pas seulement la reine de la pop très active dans des opérations caritatives en Afrique. Elle est aussi une femme d’affaires avisée qui ne recule pas devant les placements fiscalement très avantageux.

Madonna est une personnalité au double visage : derrière les paillettes de la pop star se trouve une influente femme d’affaires. Ses multiples opérations caritatives, au Malawi par exemple, ne sont que la face publique de la Madone, qui aurait pu être aussi bien surnommée « queen of optimization ». Selon les révélations des Paradise Papers, Madonna aurait investi dans une société bénéficiant de taxes sur la plus-value quasi inexistantes. Et cette entreprise se situe… dans l’archipel des Bermudes. Pour rappel, cet État est classé 7e parmi les plus gros paradis fiscaux par l’Union européenne et avait été placé sur sa liste noire par la France. Le plus intrigant est le silence de Madonna quant à cette affaire, la vedette refusant de répondre aux requêtes du Consortium international des journalistes d’investigation (Icij), chargé de l’enquête sur les Paradise Papers.

On dit de Madonna qu’elle est arrivée à New York à 20 ans avec l’équivalent de 35 euros en poche. Aujourd’hui, l’interprète du mythique Like a Virgin est à la tête d’un empire de plus de 500 millions d’euros et a engrangé 1,2 milliard d’euros depuis le début de sa carrière. Si bien que le magazine économique Forbes la classe dans sa liste des femmes les plus riches d’Amérique. En 36e position devant Céline Dion, Beyoncé ou encore Taylor Swift, elle se retrouve parmi des femmes d’affaires telles que Marian Ilitch ou Oprah Winfrey.

ELLE BÉNÉFICIE DE LA JURIDICTION FISCALE DES LES PLACEMENTS FINANCIERS ONT ÉTÉ EFFECTUÉS PAR SON AGENT GUY OSEARY

La légende de la pop a fait fortune grâce, notamment, à ses tournées internationales. La dernière en date, le « Material Girl’s Rebel Heart Tour », lui a permis d’engranger 145 millions d’euros. Mais Madonna continue de s’enrichir grâce à toutes les marques dérivées de son image, particulièrement sa ligne de vêtements et ses parfums. L’empire économique de la « Ciccone » se base aussi sur la valeur grandissante de son capital immobilier et de sa collection d’art, dans laquelle figurent des tableaux de Picasso, Frida Kahlo et Man Ray. Madonna détient aussi une part de la société de service de streaming Tidal, dont le chiffre d’affaires dépasse les 500 millions d’euros.

Madonna dispose donc d’un autre capital à faire fructifier que celui de la célébrité. Et l’enrichissement de l’idole de la pop est en parti dû à sa pratique de l’optimisation fiscale. Entre 1998 et 2013, ses 2 000 actions investies dans l’entreprise de fournitures médicales SafeGard Medical Limited lui ont fait gagner 475 millions d’euros. Elle bénéficie de la juridiction fiscale des Bermudes, sans taxes sur les gains en capital. Elle peut donc acheter ou vendre des actions et parts de fonds d’investissement sans être imposée. Cette société a fermé en 2013 et il est désormais impossible d’accéder à des informations la concernant, que ce soit sur son personnel ou sur son activité et ses comptes. SafeGard Medical Limited laisse un flou pour les enquêteurs.

Les placements financiers de Madonna ont été effectués par l’intermédiaire de son agent, Guy Oseary, et enregistrés à son adresse. Guy Oseary est un directeur de talent mais surtout un homme d’affaires réputé et influent à l’international. Outre Madonna, il est également le manager du groupe U2. Le chanteur star de U2, Bono, est également mentionné dans l’enquête des Paradise Papers. Il aurait investi dans une entreprise basée sur l’île de Malte (voir l’Humanité du 6 août). Guy Oseary semble être familier de la construction de fortunes basées sur l’optimisation, et est peut-être le point commun fiscal des deux artistes.

 

Le guide touristique de la fraude : Hong Kong

« Créer une société offshore à Hong Kong est l’arme fiscale parfaite », assure TAS, un cabinet d’expertise comptable spécialisé dans l’optimisation fiscale. La ville, devenue le plus grand centre d’affaires d’Asie, ne s’adresse pas aux particuliers désireux de frauder le fisc, mais aux grandes entreprises. Et elle s’est donné tous les atouts pour les séduire. En premier lieu, des accords stratégiques pour éviter toute double imposition, avec l’Irlande, les Pays-Bas, les États-Unis. Hong Kong propose aussi aux multinationales des filiales à responsabilité limitée pour protéger les actionnaires, sans nécessité d’apport de capital, sans contrôle des changes (pour faire entrer et sortir des fonds sans entrave) et sans aucun impôt sur les revenus extraterritoriaux, ni cotisation, et une TVA nulle. Seuls les profits réalisés sur le territoire hongkongais sont taxables à 16,5 %. « Votre société offshore peut se gérer à distance, n’importe où dans le monde. Une adresse physique n’est pas nécessaire », explique le cabinet TAS. Grande place financière oblige, toutes les grandes banques y sont présentes, dont les françaises, qui y ont réalisé pas moins de 436 millions d’euros de bénéfices en 2014, selon un rapport de la plateforme Paradis fiscaux et judiciaires, qui rassemble ONG et syndicats.

Paul Samman

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28 août 2018 2 28 /08 /août /2018 03:49

Jean Jouzel climatologue, directeur de recherche au CEA, ancien vice-président du groupe scientifique du Giec

Pourtant loin d’être terminé, l’été 2018 marque d’ores-et-déjà un tournant dans notre lutte contre le réchauffement climatique. Feux de forêts incontrôlables en Californie, canicules sans précédent en Europe du Nord ou au Japon : de nombreux rapports scientifiques évoquent désormais le risque d’atteindre un point de rupture. Pour Jean Jouzel - chercheur dans le domaine de l’évolution du climat - nous pouvons encore agir, mais il est impératif que nous relevions l’ambition des 2 °C prévue par l’Accord de Paris.

Canicules en France, en Suède, au Japon, incendies d’une rare violence en Californie ou au Portugal : assiste-t-on à un emballement du réchauffement climatique ?

Malheureusement, les événements actuels correspondent à ce qui était envisagé depuis plus de trente ans par les climatologues. En moyenne, la température à la surface de la terre augmente de près de deux dixièmes de degrés par décennie. A ce réchauffement moyen – directement imputable aux activités humaines – s’ajoute désormais une évolution rapide des « extrêmes climatiques », expliquant notamment la recrudescence et l’intensification des vagues de chaleur, qui ne va pas aller en s’améliorant. Pour une hausse supplémentaire des températures moyennes de 1 °C, les extrêmes augmenteraient ainsi de 2 °C.

« Les épisodes de canicule se multiplient depuis le début des années 2000 »

De fait, on l’observe particulièrement cet été, les épisodes de canicule se multiplient depuis le début des années 2000. En France, nous avons été marqués par la canicule de 2003, mais n’oublions pas que d’autres pays ont connu des pics similaires depuis, comme par exemple la Russie en 2010. Des records sont ainsi battus de plus en plus fréquemment, en différents points du globe. Le rapport annuel de l’Agence américaine d’observation de l’océan et de l’atmosphère vient d’ores-et-déjà de confirmer que 2017 a été l’une des trois années les plus chaudes de la planète. Et 2018 pourrait bien battre de nouveaux records.

« Ces changements climatiques rapides sont sans aucun équivalent sur les 10 000 dernières années et nous font entrer dans un tout autre monde »

Si rien n’est fait pour enrayer cette dynamique, l’été caniculaire de 2003 – qui était 3 degrés plus chaud qu’un été de référence de la fin du XXsiècle – pourrait bien devenir la norme en France après 2050. Les étés caniculaires auraient alors des températures moyennes 6 ou 7 degrés plus élevées que cet été de référence. Par ailleurs, dans un contexte de réchauffement climatique non maîtrisé, on peut craindre des records de température de l’ordre de 50, voire 55 degrés, dans certaines régions à la fin du siècle. C’est énorme. Ces changements climatiques rapides sont sans aucun équivalent sur les 10 000 dernières années et nous font entrer dans un tout autre monde.

Pouvons-nous attribuer ces événements extrêmes au réchauffement climatique et à l’activité humaine ?

Le réchauffement moyen du globe est déjà clairement attribué à l’activité humaine et à l’accumulation de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, pour l’essentiel (75 %) dus aux dégagements de gaz carbonique causés par notre utilisation d’énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz). Le reste tenant principalement à nos usages agricoles qui rejettent du méthane et du protoxyde d’azote.

« Il ne fait désormais plus aucun doute que le changement climatique augmente la probabilité de survenue d’événements extrêmes »

Pour ce qui est des extrêmes climatiques, ils sont étudiés au cas par cas par les climatologues depuis plusieurs décennies et mes collègues sont désormais capables, grâce aux statistiques, de déterminer les probabilités de survenue de tel ou tel événement dans un contexte de réchauffement climatique. Par rapport à ce qui était fait il y a 15-20 ans, les experts climatiques sont de plus en plus sensibles à la notion dite « d’attribution » et – grâce à une meilleure documentation des phénomènes naturels et au développement de modèles climatiques plus élaborés – il ne fait désormais plus aucun doute que le changement climatique augmente la probabilité de survenue d’événements extrêmes. La vague de chaleur observée en Europe du Nord avait ainsi deux fois plus de chances de se produire aujourd’hui que dans le passé. C’est un changement de perspective important. L’étape suivante consistera à établir un lien causal direct entre ces extrêmes climatiques et l’activité humaine. Cette attribution a déjà été établie pour plusieurs pics de chaleur mais sans faire pour l’instant consensus.

 

L’ensemble de la planète, sans exception, est concerné par ce réchauffement. Les menaces sont bien sûr différentes d’une région à l’autre, mais aucun pays ne peut y échapper. On le voit cette année avec la Scandinavie, qu’on pensait à l’abri du réchauffement climatique, ou encore la Russie qui semblait épargnée avant la canicule de 2010.  

« L’Europe s’est considérée comme privilégiée pendant un temps, alors que nous sommes en réalité très vulnérables »

Sur ce plan, l’Europe s’est considérée comme privilégiée pendant un temps, alors que nous sommes en réalité très vulnérables, en témoigne la canicule actuelle. Aujourd’hui, un Européen sur 20 est, chaque année, en proie à un événement climatique extrême. Si rien n’est fait pour maîtriser le réchauffement, cette proportion pourrait atteindre deux tiers de la population d’ici 2050. Le nombre de décès liés aux extrêmes climatiques (essentiellement aux épisodes de canicule) pourrait également être multiplié par 50 dans la deuxième partie du siècle, passant de 3 000 à 150 000 victimes annuelles. Enfin, en France, une projection des risques de feux de forêts à horizon 2050 indique que des régions jusqu’ici épargnées pourraient être sujettes aux flammes, notamment dans le centre et l’ouest du pays.

Malgré tout, c’est incontestablement l’Afrique et l’Asie du Sud-Est qui sont en première ligne. Au niveau de la corne de l’Afrique (Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Somalie) par exemple, les températures dépassent régulièrement les 50 °C, et pourraient être amenées à augmenter de nouveau, rendant très compliquée l’adaptation des populations. C’est aussi ce qui attend, plus modérément la péninsule arabique. Dans certaines régions côtières, la principale crainte tient à l’élévation du niveau de la mer, tandis que la Californie est menacée par les feux de forêts incontrôlables, avec des températures qui frôlent, voire dépassent déjà les 50 °C dans la vallée de la mort.

C’est la vie sur Terre qui est menacée ?

Le GIEC a l’habitude de classer les effets du réchauffement climatique en cinq catégories. Outre l’intensification et la multiplication des « extrêmes climatiques » qui nous préoccupent aujourd’hui – et constituent la première d’entre elles – nous assistons à l’augmentation de l’acidité des océans qui absorbent chaque année 25 à 30 % du gaz carbonique que nous rejetons, mettant en danger les récifs coralliens et les animaux marins qui les peuplent. En cas de réchauffement climatique important, c’est la biodiversité dans son ensemble qui est menacée. A moyen ou long terme, certaines espèces ne pourront en effet plus se déplacer aussi vite que les zones climatiques, rendant impossible leur adaptation.

La vie humaine n’est pas épargnée puisque le réchauffement climatique cause des problèmes d’accès à l’eau, induit des déplacements importants de population (on parle de « réfugiés climatiques »), menace notre sécurité alimentaire et augmente le risque de conflits. La dernière catégorie de risques tient à l’existence de phénomènes irréversibles et donc, en premier lieu, à l’élévation du niveau de la mer.

A-t-on atteint un point de rupture ?

Le réchauffement climatique est irréversible, mais nous pouvons encore limiter son ampleur, si nous agissons rapidement. Il nous faut impérativement respecter la limite des 2 °C prévu par l’Accord de Paris, au risque d’atteindre effectivement ce point de rupture et de perdre le contrôle sur un certain nombre de phénomènes. A commencer dans les régions polaires, où le dégel du permafrost pourrait s’accentuer et libérer du gaz carbonique par décomposition de matière organique, venant grandir le stock – lié aux activités humaines – qui stagne déjà dans l’atmosphère. L’élévation du niveau de la mer avance également à un rythme soutenu : même si nous respectons l’objectif de l’accord de Paris, il pourrait atteindre 40 centimètres d’ici la fin du siècle et 1 mètre à la fin du siècle prochain. En cas de réchauffement plus important, les niveaux pourraient atteindre respectivement 1 mètre et 2 mètres supplémentaires. La fonte du Groënland serait alors également envisageable à l’échelle millénaire, ce qui conduirait à une élévation du niveau de la mer de 7 mètres.

« Il est impératif de s’atteler rapidement à la maîtrise de ces phénomènes, au risque d’enclencher un « effet domino » irréversible » et de voir notre planète se transformer en une véritable serre

Est-il suffisant de chercher à contenir la hausse des températures en deçà de 2 degrés, comme le prévoit l’Accord de Paris ? En sommes-nous encore capables ?

A scénario émetteur inchangé (c’est-à-dire sans respecter l’Accord de Paris), les températures moyennes mondiales pourraient gagner entre 4 et 5 degrés d’ici la fin du siècle. Il est donc impératif que nous respections l’objectif de maintien sous les 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, tout en sachant que la température du globe a déjà pris un degré par rapport à cette période et que notre fenêtre de tir est donc très étroite.

Problème majeur : les engagements qu’ont pris les Etats dans le cadre de cet accord ne permettent pas de tenir l’objectif. Pour le respecter, la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre devrait être trois fois plus importante et intervenir rapidement puisque le CO2 que nous émettons s’accumule au fur et à mesure dans l’atmosphère et vient grossir, chaque jour, un stock qui accélère le réchauffement climatique.

« Pour rester sous la barre des deux degrés, il ne nous reste plus que 20 ans d’émissions au rythme actuel »

Pour rester sous la barre des deux degrés, il ne nous reste plus que 20 ans d’émissions au rythme actuel. Il faut donc agir vite. C’est une question qui ne se pose plus simplement dans un long terme indéterminé, mais qui est à portée de génération : ce ne sont pas nos futurs enfants, ni petits enfants, qui sont concernés, mais bien les jeunes d’aujourd’hui.

Un relèvement de l’ambition internationale serait donc nécessaire ?

Effectivement, il faut relever l’ambition de l’Accord de Paris, mais je crains fort que cela ne soit pas à l’agenda des négociations avant quelques années. En particulier depuis que Donald Trump a acté le retrait des Etats-Unis, brisant un cercle vertueux qui venait à peine de s’enclencher. Ce revirement américain est susceptible d’avoir un effet d’entraînement sur d’autres pays signataires. La Russie, qui n’a pas pour l’instant ratifié l’Accord de Paris, pourrait ainsi ne jamais le faire. Or, il faut être conscient que, si la politique de Donald Trump est susceptible d’avoir un effet positif à très court terme sur l’économie américaine, elle sera assurément néfaste pour le pays à moyen et long terme. A l’heure actuelle, aucune nation ne peut prétendre s’exonérer des questions climatiques.

Que peut-on attendre de la COP 24, qui réunira en décembre les parties signataires en Pologne ?

La COP 24 est une belle occasion pour toucher du doigt l’éventuel relèvement des ambitions de l’Accord de Paris. Mais l’année 2018 marque tout juste la fin d’une période de trois ans où les pays ont défini les règles de l’Accord signé en 2015 : quels engagements prendre ? Comment les tenir ? Il semble donc encore un peu tôt dans les négociations pour espérer rehausser nos objectifs. Nous attendrons donc sûrement 2020 bien que, d’un point de vue purement climatique, il soit nécessaire d’agir dès maintenant. Le seul point d’espoir tient à la publication, en octobre, d’un rapport spécial du GIEC sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5 °C, qui retiendra peut-être l’attention de certains négociateurs.

En France, la loi sur la transition énergétique va-t-elle dans le bon sens ?

Nous visons une division par quatre de nos émissions d’ici 2050, tout à fait compatible avec l’Accord de Paris – et qui va même au-delà étant donné que chacun participe à hauteur de ses émissions et que les pays développés ont donc un effort plus important à fournir. De plus, Nicolas Hulot a récemment annoncé viser la neutralité carbone à l’horizon 2050, contre la deuxième partie de ce siècle dans le cadre de l’Accord de Paris. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (TECV) adoptée en 2015 marque également un progrès. Principal bémol : elle se focalise sur l’énergie et oublie les émissions du secteur agricole (méthane et protoxyde d’azote), qui sont certes moins importantes en quantité mais néanmoins loin d’être négligeables.  

« En 2017, nos émissions ont augmenté de 3,2 %, ce qui nous éloigne complètement de notre trajectoire 

Dans les textes, la situation est plutôt encourageante, avec également un Plan national d’adaptation au changement climatique qui devrait être promulgué d’ici la fin de l’année. Mais en pratique, le bilan est plus nuancé puisqu’en 2017, nos émissions ont augmenté de 3,2 %, ce qui nous éloigne complètement de notre trajectoire. En outre, nous savons d’ores-et-déjà que notre objectif d’avoir, en 2020, 23 % d’énergie renouvelable dans notre consommation ne sera pas atteint, tout comme la réduction de nos émissions de 40 % d’ici 2030 sera difficile.

Au niveau individuel, pouvons-nous encore espérer avoir un impact positif quelconque ?

Bien sûr, cela est possible et souhaitable ! En un sens, le réchauffement climatique est enthousiasmant pour les jeunes générations car il implique de changer tout notre modèle de développement : urbanisme, transport, habitudes d’alimentation et de consommation. Nous avons tous, et je m’inclus dedans, une certaine part d’égoïsme qui rend difficile la prise en compte du changement climatique à notre échelle individuelle, mais il n’y a pas de petit effort pour tendre vers un mode de vie plus sobre. Cela se joue dans les dizaines de décisions que nous prenons au quotidien, et doit être encouragé par les Etats et les collectivités locales, qui sont en première ligne de ce combat : le changement des habitudes de transport passe ainsi par l’élaboration d’une offre de transports propres par les collectivités.

« Il n’y a pas de petit effort pour tendre vers un mode de vie plus sobre »

Twitter

Et, contrairement à une idée reçue très répandue, la lutte contre le réchauffement climatique n’entrave pas la croissance mais serait, au contraire, le symbole d’un nouveau dynamisme économique. Six millions d’emplois pourraient ainsi être créés en Europe d’ici 2050 et, pour la France seule, l’Ademe évoque un potentiel de 90 0000 créations d’emplois. C’est simplement une autre forme de dynamisme que celle que nous cherchons aujourd’hui, et vers laquelle il nous faut tendre.

Propos recueillis par Aude Martin

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28 août 2018 2 28 /08 /août /2018 03:41

 

L’établissement bancaire a été surpris comme participant à un vaste système d’évasion fiscale, notamment aux États-Unis et en France. L’affaire a contribué à fixer de premières limites au secret bancaire suisse mais n’a pas fait cesser ces pratiques.

Profitant du secret bancaire, les banquiers d’UBS ont agi illégalement pour séduire de nouveaux clients internationaux. Leur soutien aux évadés fiscaux a été dévoilé en 2007, aux États-Unis, à partir de documents retrouvés par les agents du fisc au cours d’une perquisition aux bureaux du milliardaire américain d’origine russe Igor Olenicoff. Son conseiller, Bradley Birkenfeld, ancien banquier d’UBS et complice dans les irrégularités fiscales du milliardaire, a été contraint de collaborer avec le département de la Justice. Son témoignage a déclenché une enquête sur des milliers de comptes secrets ouverts par des citoyens américains en Suisse. La banque a ainsi violé l’accord signé en 2001 avec les États-Unis (le Qualified Intermediary, QI) dans lequel elle s’engageait à fournir l’identité de ses clients américains au fisc de leur pays.

Les auxiliaires d’UBS responsables de l’acquisition des clients aux États-Unis avaient clairement pour mission de contourner ces accords. Leur tâche première était de repérer des personnes aisées et de les aider à s’évader fiscalement en ayant recours aux services d’UBS. Les clients étaient recrutés lors de rencontres mondaines, souvent sponsorisées par la banque. Plus tard, les banquiers d’UBS, soutenus par des avocats et des comptables, ont usé de différentes stratégies pour cacher l’argent de leurs nouveaux clients au fisc américain. Le subterfuge visait à dissimuler les identités des titulaires par le biais de sociétés-écrans situées dans des pays tiers à partir desquels il devenait possible de contourner les accords Qualified Intermediary. Aux riches clients américains, il était également conseillé de déposer l’argent liquide et non déclaré directement en Suisse ou d’acheter des objets de luxe, œuvres d’art et bijoux.

LA BANQUE EST DEPUIS 2013 SOUS LE COUP D’UNE ENQUÊTE EN FRANCE

L’ampleur de ce système est tel que le gouvernement helvétique est entré en scène fin 2008 pour limiter les dangers qu’une condamnation éventuelle (et finalement effective) d’UBS par la justice américaine faisait craindre sur l’économie du pays. L’accord portant sur le partage des données bancaires suspectes entre les deux gouvernements – américain et suisse – représente un tournant historique pour la lutte contre l’évasion fiscale. Le processus d’abolition du secret bancaire pour les non-résidents en Suisse, lancé en 2009, est ainsi renforcé. Le programme mis en place il y a huit ans par le département de la Justice des États-Unis dans le cadre de la lutte contre l’évasion fiscale avait déjà obligé une des plus importantes banques au monde à payer une amende de 780 millions de dollars. Dans le même élan, d’autres banques ont été jugées dans le cadre de la lutte contre l’évasion fiscale américaine : Crédit suisse a dû payer 2,8 milliards de dollars d’amende en 2014 et Julius Baer, 547,25 millions de dollars en 2016.

Aujourd’hui, malgré l’intervention du gouvernement suisse et les progrès dans l’abolition du secret bancaire, UBS est toujours impliquée dans l’évasion fiscale internationale. La « société de services financiers », dont les sièges sont à Bâle et à Zurich, en Suisse, est la plus grande banque de gestion de fortune dans le monde avec des actifs investis de 2 440 milliards d’euros en 2016. Accusée d’avoir contribué activement à cette pratique suivant le même schéma mis en place aux États-Unis, la banque est depuis 2013 sous le coup d’une enquête en France et sera jugée à la rentrée 2018. Six hauts dirigeants de l’institut bancaire actifs dans les deux pays vont être jugés. Parmi ceux-ci, Raoul Weil, ancien numéro trois d’UBS, déjà accusé et acquitté après l’affaire américaine, et Patrick de Fayet, ancien numéro deux d’UBS France.

Demain Madonna, de l’aide au Malawi à son « isla bonita » des Bermudes.

Le guide touristique de la fraude

Suisse

À partir de son adoption en 1934, le secret bancaire suisse a été source de critiques concernant l’éthique des banques qui l’appliquent. Complice de l’évasion fiscale au niveau mondial, le secret bancaire a été limité pour la première fois en 2009 par les autorités des États-Unis. Le partage progressif des informations fiscales s’est ensuite mis en place grâce aux pressions internationales, aux menaces de sanctions économiques et aux procédures pénales contre les banques de la Confédération suisse. Les demandes d’assistance fiscale de la part d’autres administrations nationales ont crû à partir de 2015. L’adhésion de la Suisse aux standards internationaux de transparence fiscale a été signée récemment par un accord d’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers (EAR). Cet accord, entré en vigueur le 1er janvier 2017, concerne 38 pays mais ne serait effectif qu’en 2018, sur les données de l’année précédente. Le gouvernement helvétique espère régler ainsi certains contentieux avec ses principaux partenaires européens. Plusieurs banques suisses restent cependant impliquées dans l’évasion fiscale et… le secret bancaire, une spécialité nationale de la Confédération !

Federico Boldini

 

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27 août 2018 1 27 /08 /août /2018 03:37

 

Conjuguées au réchauffement climatique et à la croissance démographique, les inégalités d’accès à l’eau au Proche-Orient devraient encore s'accroître dans les années à venir. Pour certains experts, l’eau sert d’outil militaire à l’État hébreu pour faire avancer ses projets de colonisation. Elle constitue un point d'achoppement majeur du processus de paix.

Jérusalem, de notre correspondante. - Cinq années de sécheresse consécutives. Selon le ministre israélien de l’énergie et des ressources en eau, Yuval Steinitz, cela faisait « 100 ans » qu’un tel manque de pluie n’avait pas frappé la région. Résultat, les sources d’eau naturelles, notamment au nord d’Israël, ne cessent de voir leur niveau baisser. Et les importantes infrastructures de désalinisation et de traitement des eaux usées créées par l’État hébreu ne suffisent plus à compenser la pénurie.

« Ce type de longue sécheresse n’est pas rare dans la région mais ce sont les effets du changement climatique qui rendent la crise aussi sévère », estime Avner Adin, professeur à l’Université hébraïque de Jérusalem, spécialisé dans le traitement de l'eau et les technologies de contrôle de la pollution.

Pour remédier au problème, le gouvernement israélien a annoncé en avril 2018 vouloir mettre les bouchées doubles. Deux nouvelles usines de désalinisation vont être construites le long de la côte méditerranéenne. Le budget de l’opération n’a pas été dévoilé mais il est évalué à 400 millions de dollars, soit environ 344 millions d’euros, par usine. Le réseau de distribution en eau du pays doit également être étendu.

Parallèlement, le gouvernement Netanyahou projette de réduire le pompage des sources naturelles pour réhabiliter les rivières asséchées. Il envisagerait en revanche de prélever de plus grandes quantités d’eau douce dans le lac de Tibériade, pourtant gravement touché par la sécheresse.

Cette sécheresse qui dure frappe également de plein fouet les Territoires palestiniens et la Jordanie, tous deux fortement dépendants d’Israël pour leur fourniture en eau. En 1967, pendant la guerre des Six-Jours, l’État hébreu a pris le « contrôle de toutes les sources d’eau entre la rivière du Jourdain et la mer Méditerranée », rappelle Adam Aloni, chercheur au sein de l’ONG B’Tselem. Au moment des accords d’Oslo, il est décidé que 80 % de l’eau provenant de l’aquifère de la montagne en Cisjordanie seraient exploités par les Israéliens et 20 % par les Palestiniens.

En zone A (sous contrôle palestinien) et B (sous régime mixte), les villes palestiniennes sont en principe alimentées par la compagnie d’eau israélienne Mekorot. Mais chaque été, pendant les mois les plus arides, la pression baisse dans les tuyaux. « Le réseau de distribution passe d’abord dans les colonies israéliennes » et ces dernières « augmentent leur consommation en eau pour l’agriculture », explique Adam Aloni. Les autorités palestiniennes doivent donc rationner l’eau pour que chaque famille puisse en recevoir une fois par semaine, voire une fois toutes les deux semaines.

La situation est également critique pour les Palestiniens vivant dans la zone C, où Israël exerce un contrôle militaire et civil absolu. « Pour construire un puits ou raccorder une pompe à un tuyau, les Palestiniens ont besoin d’un permis. Mais les autorités israéliennes n’en délivrent presque jamais », constate le chercheur. Des « dizaines de communautés palestiniennes » ne sont donc toujours pas connectées à l’eau courante. Elles doivent vivre avec « 20 litres d’eau par jour par personne », une quantité largement inférieure aux recommandations fixées par l’ONU à 100 litres.

Le problème est d’autant plus dramatique dans la bande de Gaza, sous blocus depuis 2007. Contactée par Mediapart, Margaux Chinal, chargée de projets eau et assainissement à l’Agence française de développement, estime que « 95 % de l’eau utilisée » par la population de l’enclave palestinienne est « impropre à la consommation en raison de la pollution » de la nappe phréatique et de « l’intrusion d’eau salée » dans cette dernière.

Côté jordanien, l’eau est aussi une denrée rare. Le royaume hachémite est « le pays qui souffre le plus de la sécheresse dans la région », affirme Avner Adin. En ce moment, les habitants d'Amman ne reçoivent de l’eau « qu’une fois par semaine », précise-t-il. « Sans parler des milliers de réfugiés syriens installés au nord du pays, qui ont besoin de boire et ajoutent au problème. » Lors du traité de paix signé en 1994 avec Israël, la Jordanie s’est toutefois vu garantir un accès au Jourdain et à son principal affluent, le Yarmouk. L’État hébreu « a promis de continuer à fournir de l’eau à la Jordanie, même dans les années de grande sécheresse », souligne le professeur de l’Université hébraïque de Jérusalem.

«Israël vend aux Palestiniens à plein tarif une eau dont il leur a enlevé l’accès»

Ces dernières années, plusieurs experts, ONG et politiques, notamment en France, n’ont cessé de dénoncer l’emprise israélienne sur les ressources en eau de la région. D’après certains d’entre eux, l’eau servirait d’outil militaire à l’État hébreu pour faire avancer ses projets de colonisation. « Pas du tout », rétorque Avner Adin. Pour preuve, le spécialiste israélien raconte avoir mis sur pied un groupe d’experts « il y a plusieurs années », à la demande de la Croix-Rouge, pour vérifier que l’article 40 des accords d’Oslo relatif à l’eau était correctement respecté.

« Nous en avons conclu qu’Israël se conformait plutôt bien à ses engagements. Il peut y avoir des problèmes au niveau local, des conflits ici ou là, à cause de différentes raisons, mais globalement l’accord est respecté et même parfois au-delà de ce qui a été convenu », assure-t-il.

Adam Aloni réfute cette affirmation. « Nous sommes alertés sans arrêt sur de nouveaux tuyaux qui ont été coupés ou confisqués. Les Israéliens ne veulent pas que les Palestiniens restent dans la zone C, qui représente 67 % de la Cisjordanie, et ils ne leur donnent donc pas accès à l’eau. » Les accords d’Oslo, qui devaient être renégociés au bout de cinq ans, ne l’ont pas été et « la population palestinienne a presque doublé », ajoute-t-il. Selon lui, la part accordée aux Palestiniens serait ainsi tombée à « 14 % » au lieu des 20 % prévus.

Le chercheur de B’Tselem juge par ailleurs que les Israéliens maintiennent les Palestiniens dans une dépendance mortifère. Les accords d’Oslo comprenaient également une clause concernant l’eau que devrait vendre le gouvernement israélien aux habitants des Territoires palestiniens selon leurs besoins. « Le problème, c’est qu’Israël leur vend à plein tarif une eau dont il leur a enlevé l’accès », dénonce Adam Aloni.

Selon les estimations de certaines ONG, le mètre cube d’eau peut coûter jusqu’à 45 shekels (un peu plus de 10 euros) aux Palestiniens vivant dans la zone C. À titre de comparaison, le prix du mètre cube d’eau s’élève à environ 7 shekels (soit 1,64 euro) à Tel-Aviv.

Jugé illégal par Israël et menacé de destruction depuis des années, le village palestinien de Susiya, situé dans la zone C au sud d’Hébron, est un parfait exemple de cette situation ubuesque. « Depuis 2000, nous ne pouvons plus accéder librement aux 28 points d’eau [sources naturelles, puits ou système de récupération des eaux de pluie – ndlr] situés aux abords du village », explique Nasser Nawaja, activiste et porte-parole des 350 habitants de Susiya. « À chaque fois que nos bergers tentent de s’en approcher, les soldats les arrêtent », déplore-t-il, jetant un regard désabusé vers les trois miradors dressés par l’armée israélienne dans la zone tampon instaurée entre le village palestinien et la colonie israélienne voisine.

L’activiste palestinien tient à nous montrer le plus insensé. Aux abords du village, un tuyau gris affleure du sol. Il s’agit d’un pipeline de la compagnie israélienne d’eau Mekorot. Les habitants de Susiya ne sont pas autorisés à s’y raccorder. À quelques minutes de là, en amont de la route 317, l’inégalité de traitement entre Palestiniens et colons saute aux yeux. Des tuyaux serpentent sur une colline pour alimenter Abigail, un avant-poste juif pourtant considéré comme illégal par la loi israélienne.

Pour la communauté palestinienne, les conséquences sont nombreuses. « Ils ne peuvent pas nettoyer et rénover leurs puits », et quand ils y ont accès, « la qualité de l’eau est médiocre », affirme Fadi Arouri, membre de l’ONG italienne GVC (Gruppo di Volontariato Civile). Pour répondre à leurs besoins en eau domestique, les habitants de Susiya sont aujourd’hui contraints de débourser jusqu’à « un tiers de leur salaire », évalue-t-il. Un budget qui les a obligés à se séparer progressivement d’une partie de leur bétail. « En 2000, nous avions 5 500 bêtes et il ne nous en reste plus que 1 800 », confirme Nasser Nawaja.

Ce lundi 2 juillet, Fadi Arouri vient superviser la livraison d’une cargaison d’eau potable financée par un programme de l’UNICEF. « Nous achetons l’eau aux compagnie privées au prix fort et nous la revendons aux habitants de Susiya à un prix symbolique. » Cette fois, l’opération se déroule sans problème. Mais ce n’est pas toujours le cas. « C’est très risqué pour moi de venir livrer ici », souligne le chauffeur du camion-citerne, Hijazi Bhais, originaire d’Hébron. « L’armée israélienne nous harcèle sans arrêt », poursuit-il, racontant avoir déjà reçu des amendes ou s’être vu confisquer son camion par les militaires.

Dans un futur proche, les experts craignent que la situation ne s’aggrave. « La combinaison des projections de croissance démographique et de changement climatique qui affectent déjà cette région permet d’estimer que les Territoires palestiniens seront confrontés à un déficit en eau de 271 millions de mètres cubes d’ici à 2020 », affirme Margaux Chinal. « Israël promeut ses propres intérêts aux dépens des Palestiniens, ignorant leurs besoins et leurs droits. Si la pénurie continue, il y a donc de grandes chances que les disparités s’approfondissent. Israël contrôlera encore plus fermement les ressources en eau et les Palestiniens souffriront d’autant plus », met en garde Adam Aloni.

 

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27 août 2018 1 27 /08 /août /2018 03:34

 

Sergueï Oudaltsov, coordinateur de l’organisation russe « Front de Gauche » et membre actif du comité de campagne du candidat de gauche à la Mairie de Moscou, Vadim Koumine , a été condamné à trente jours de détention administrative pour avoir pris part à une manifestation autorisée contre le projet de « réforme » des retraites du gouvernement russe. Il a depuis entamé une grève de la faim. Cette arrestation arbitraire intervient dans le contexte de mobilisation croissante contre le démantèlement du système de retraites qui restait un des derniers héritages sociaux soviétiques, alors qu’une journée de mobilisation nationale se prépare pour le 2 septembre. Sergueï Oudaltsov se retrouve également en prison alors que la campagne pour les élections municipales de Moscou, qui auront lieu le 9 septembre, voit une candidature inédite de la gauche russe, après des primaires, en la personne de Vadim Koumine, soutenu par le Parti Communiste de la Fédération de Russie, le Front de gauche et des militantes et militants de gauche.

Le PCF exige la libération immédiate de Sergueï Oudaltsov. Il apporte également son soutien fraternel aux militants communistes et de gauche, aux organisations politiques et sociales, aux citoyennes et citoyens russes qui se mobilisent, partout dans le pays, contre la « réforme » des retraites que cherche à imposer le gouvernement Poutine-Medvedev. Il souhaite enfin que la candidature de Vadim Koumine à la Mairie de Moscou rencontre le soutien populaire et citoyen le plus haut le 9 septembre.

 

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26 août 2018 7 26 /08 /août /2018 05:28

 

DES CENTAINES D’OFFICIERS NOSTALGIQUES DU FRANQUISME menacent les démocrates, les antifascistes, les partisans d’une République, et d’une nouvelle constitution, tous les militants engagés dans un inégal combat de mémoire, auquel le gouvernement actuel semble plus sensible que les précédents.

Nous avons souvent écrit qu’en Espagne il n’y a pas eu une véritable rupture avec le franquisme, qu’il s’est recyclé, ou enkysté, dans des secteurs comme la banque, la justice, la hiérarchie de l’Eglise, l’armée, et que l’Espagne tôt ou tard le paierait cher... Le « pacte de la transition » amnésique et paraît-il « modélique » , a volé en éclats... Cela ne veut pas dire, en ce qui nous concerne, que l’armée  espagnole actuelle reste globalement franquiste, mais, mais, mais... Traversée par des courants néo-fascistes, pilier de la longue et cruelle dictature, historiquement tournée contre le peuple, elle n’a pas été défranquisée en profondeur. La constitution de 1978 lui attribue un rôle tutélaire démesuré, garante notamment de « l’unité » d’une « Espagne une », d’une « monarchie » parlementaire pourtant illégitime... sans oublier « le libre-échange », inscrit dans le plomb constitutionnel.

 

Il convient de rappeler cette toile de fond pour prendre la mesure de la tempête politique soulevée par le « manifeste » pro-franquiste que viennent de signer et de publier plus de 600 officiers de réserve (181 au départ), militaires de haut rang retraités, qui s’attachent à faire « respecter » et défendre « l’image militaire du soldat Franco », qu’ils dissocient du « Franco politique » (celle-là, il faudra la retenir !!). Faut-il que ces « fachas » soient gênés aux entournures...

 

Ils dressent un panégyrique du « soldat Franco », « loyal », aux ordres des gouvernements, y compris en 1934, note perfide, lorsqu’il fut chargé par le gouvernement « républicain » d’écraser le soulèvement des Asturies... Généraux, colonels, lieutenants colonels, amiraux, menacent tous ceux qui voudraient toucher au système en place.

 

Les nostalgiques mettent en garde contre une « campagne infâme » dirigée contre « le rôle historique » du dictateur sanglant, bourreau de l’Espagne jusqu’à sa mort le 20 novembre 1975. Ils présentent Franco comme le sauveur d’une « Espagne agressée par le communisme international  adopté par le Front Populaire ». Si ce n’est pas du franquisme, cela lui ressemble fort... Selon les sabreurs prêts à ressabrer, le gouvernement voudrait un prétexte pour « cacher l’effondrement actuel de la nation » (allusion claire à la Catalogne) « lancent un appel à réhabiliter « le soldat Franco » contre une gauche « engagée dans une offensive viscérale pour une revanche » ; ils invitent à une réécriture de l’histoire, à ne pas toucher à la minimaliste « loi de Mémoire Historique... ».

 

Franco serait « héritier de la tradition patriotique et militaire espagnole » ; et ils n’ont aucune honte à en appeler à « continuer son œuvre », à « rétablir la vérité historique »... Ils s’opposent à l’exhumation des restes du dictateur et à leur transfert hors du mausolée fasciste du « Valle de los Caídos », entretenu, ne l’oublions pas, aux frais des contribuables.

 

Le gouvernement espagnol, qui a annoncé sa volonté d’avancer dans le devoir de mémoire, n’a cependant pas réagi au défi contre la démocratie avec la vigueur nécessaire.

 

Un officier de l’Armée de l’Air et historien, Flores Dimas Balsalobre, de ceux qui se lèvent dans les grandes tourmentes, vient d’adresser aux factieux une lettre ouverte dans laquelle il les taxe de « nostalgiques du franquisme ». Il rappelle que Franco fut un « criminel de guerre », un « un traître » à la tête d’un régime « de caractère fasciste ».

 

Les officiers factieux ne reculent devant aucun distorsion ; ils ont osé présenter le « Valle de los Caídos » comme un « symbole de réconciliation nationale », alors que le lieu glorifie les « vainqueurs de la Croisade », et que gouvernement et associations veulent enfin en faire un « centre pour la mémoire ».

 

Mais l’Espagne d’aujourd’hui n’est plus tout à fait la même qu’alors : 56,4 % des Espagnols, selon les données du « baromètre de la Sexta », pour un sondage réalisé par Invymark, sont favorables à l’exhumation et au transfert des restes de Franco hors du « Valle de los Caídos » alors que 33,8% déclarent y être opposés ; la majorité des électeurs favorables viennent de l’électorat de « Podemos », de « Izquierda unida » et du PSOE. L’opinion publique se prononce également majoritairement pour l’illégalisation (plus de 56% pour, 29,5% contre ; 60,4% des électeurs « populares » rejettent cette illégalisation ainsi que 46,6% des électeurs de « Ciudadanos »), illégalisation de la Fondation Franco, étroitement liée au Parti Populaire de Rajoy et Aznar. Ces revendications, avancées depuis plus de vingt ans par les associations mémorielles, les partis de « gauche », semblent ainsi aujourd’hui trouver un meilleur appui.

 

Il est aussi question d’exproprier la belle et immense demeure et propriété de la famille Franco, connue comme le Pazo de Meiras, « offerte », en fait « volée » par la famille. 68,8% des électeurs sont pour, 22,3% contre.

 

La situation mérite d’être suivie jour après jour ; de nombreux officiers ont engagé un bras de fer contre le peuple espagnol, qui commence à répondre « no pasarán ». La peur peut définitivement changer de camp. La défranquisation totale peut s’accélérer, si les Espagnols s’en mêlent vraiment.

 

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24 août 2018 5 24 /08 /août /2018 05:46

Au-delà des guerres et de la complexité géopolitique, les pays du Moyen-Orient sont frappés de plein fouet par les changements climatiques. Les températures en particulier ne cessent de grimper. Le Koweït détient depuis 2016 le record mondial de chaleur avec 54 °C, mais cela pourrait bientôt ne plus représenter une anomalie.

Koweït, envoyé spécial.– Il est presque midi et les ombres s’amenuisent au point de disparaître. Le thermomètre extérieur de la voiture de location ne cesse de grimper. Cela fait plus d’une demi-heure qu’il oscille autour de 48 °C. Je bifurque sur une piste non goudronnée pour me rapprocher le plus possible de la station météorologique de Mitribah, avant de me heurter à un grillage qui en interdit l’accès au public. Non pas qu’il y ait beaucoup de visiteurs dans ce coin de désert koweïtien. Sauf peut-être ceux qui veulent se rendre compte de ce que cela fait de parvenir au point le plus chaud jamais enregistré sur terre : 54 °C le 22 juillet 2016.

Toujours est-il qu’en ce jour de la mi-juin 2018, je n’ai croisé personne dans les environs. J’arrête la voiture sur le bas-côté, j’attends quelques minutes et je vérifie le thermomètre de bord. Ce n’est pas un instrument de mesure fiable, mais il offre une approximation. Il affiche 51 °C. J’ouvre la portière et je sors de l’habitacle climatisé. Il fait indubitablement chaud mais, aujourd’hui, l’humidité n’est pas trop prononcée, donc la chaleur se fait moins écrasante.

Le corps humain agit comme un échangeur thermique élaboré qui s’attache à maintenir une température constante, oscillant d’à peine un degré, entre 36,5 °C et 37,5 °C. Lorsque la chaleur extérieure conduit à une hausse de la température interne, le corps se met alors à transpirer : en s’évaporant, la sueur provoque un refroidissement qui permet de rétablir la valeur normale autour de 37 °C. Le problème démarre en cas d’exposition prolongée à de hautes températures. L’échangeur thermique qu’est la peau commence à faiblir et fonctionne moins bien. Il faut alors se reposer, chercher de l’ombre ou un endroit frais. Si cela s’avère possible, pas de souci, le corps revient à sa température normale et la peau récupère.

Malheureusement, un des phénomènes auxquels sont confrontés les pays du golfe Persique est la chaleur élevée continue. Autrement dit, la température ne baisse plus suffisamment, en particulier la nuit, pour offrir le répit nécessaire au corps humain. Cette année, fin juin 2018, Quriyat, une ville dans le sultanat d’Oman, a décroché le titre de ville avec la plus forte température minimale : pendant 24 heures consécutives, le thermomètre n’est pas descendu en dessous de 42,6 °C.

Un être humain confronté à de telles conditions, qui n’a plus la possibilité de retrouver pour quelques heures une température plus raisonnable, c’est-à-dire inférieure à 37 °C, se met alors à dysfonctionner. Les pores de la peau ne parviennent plus à réguler correctement la transpiration. Même lorsque le climat est humide et que l’on continue à transpirer abondamment, l’évaporation ne refroidit plus. Boire ne soulage plus la soif. La température corporelle se met alors à augmenter.

À partir de 40 °C, le corps cherche à refroidir la peau en détournant le sang vers les capillaires, rationnant les autres organes vitaux. Le cerveau n’est plus alimenté correctement et, en langage parlé, « on perd la tête ». Les dégâts commencent à devenir irrémédiables. Le cœur pompe et pompe encore du sang jusqu’à épuisement, conduisant à un arrêt cardiaque. On nomme cela une « attaque de chaleur ».

Au bout d’une dizaine de minutes dans le désert koweïtien chauffé à blanc, je regagne l’habitacle de mon véhicule et je quitte la zone de Mitribah. À une heure de route vers le sud, Koweït City, ses hôtels, ses villas, ses bureaux et ses centres commerciaux climatisés à un frisquet 20 °C permettent d’échapper à la fournaise environnante. Mais à une soixantaine de kilomètres vers le nord se situe la deuxième ville d’Irak, Bassora : plus de 2,5 millions d’habitants et, en dépit de son statut de capitale économique irakienne, une pauvreté écrasante, de fréquentes coupures d’électricité, et des services quasi inexistants. Comment ses habitants font-ils pour résister à une chaleur comparable, à quelques degrés près, à celle de Mitribah ?

Les 54 °C de Mitribah ne seront bientôt plus une anomalie

On a coutume de dire que les vagues de chaleur provoquent la mort invisible des gens invisibles : les pauvres, les personnes âgées, les nourrissons, ceux qui vivent seuls. L’épisode de chaleur d’août 2003 en France, qui a vu le thermomètre grimper d’environ 5 °C au-dessus de la moyenne saisonnière, incarne l’exemple typique : une surmortalité de 15 000 décès a fini par être comptabilisée, mais il a fallu plusieurs mois pour établir ce bilan et, pendant les semaines de canicule, le phénomène a été soit ignoré soit minimisé. Les plus vulnérables à la chaleur sont ceux que la société ignore le plus et, bien souvent, leur mort est mise sur le compte de leur âge, de leur santé ou de leurs conditions de vie, alors qu’elle est la conséquence directe d’une augmentation de la chaleur et d’une absence de possibilité de mitiger celle-ci.

Si les vagues de chaleur n’étaient qu’un phénomène météorologique récurrent, mais rare, il suffirait de s’en accommoder en haussant les épaules : « Il fait chaud, et alors ? Ça va passer ! » Le souci est bien évidemment que notre compréhension du climat et des changements qui l’affectent ne nous permet plus cette insouciance. Non, ça ne va pas passer. Bien au contraire, cela va se multiplier. Rien que sur la dernière décennie, des vagues de chaleur « anormales » se sont produites en Russie (2010), en Amérique du Nord (2012), en Australie (2012-13) ou en Chine (2013).

Dans ce contexte, le Moyen-Orient est un cas à part. Il y fait déjà chaud, et cela va s’aggraver. Au point de rendre difficilement vivable une région qui l’était déjà péniblement. Selon l’Institut Max-Planck, d’ici à 2050, les températures estivales en Afrique du Nord et au Moyen-Orient vont augmenter deux fois plus vite que la moyenne planétaire, et les épisodes de « chaleur extrême » au-delà de 46 °C seront cinq fois plus nombreux qu’au début du XXIe siècle, quand ils se produisaient en moyenne seize jours par an.

Les 54 °C de Mitribah ne seront bientôt plus une anomalie. L’Iran et l’Irak ont presque atteint une telle température en 2017, à quelques dixièmes de degré près. Toutes ces mesures ne prennent pas en compte l’humidité, qui joue un rôle important. Par exemple, une combinaison de 46 °C et de 50 % d’humidité, un taux assez fréquent dans les régions côtières du golfe Persique (surtout quand la chaleur accélère l’évaporation de la mer), permet à un être humain en bonne santé de fonctionner pendant six heures. Au-delà de cette durée, le corps est confronté aux symptômes décrits précédemment. Pour une personne affaiblie ou de constitution fragile, quelques heures d’exposition aboutissent à la mort. Selon une étude parue dans la revue Nature, si rien n’est entrepris pour atténuer les changements climatiques, la plupart des villes du golfe Persique dans la seconde moitié du siècle atteindront régulièrement 45 °C, avec des pointes à 60 °C à Koweït City, par exemple.

Au Koweït justement, la température moyenne a déjà gagné entre 1,5 °C et 2 °C depuis 1975, une progression plus forte qu’ailleurs sur le globe. Le niveau des précipitations (125 mm) est resté identique, mais au lieu d’être étalé sur toute l’année, il est atteint au cours de brusques phénomènes orageux, auxquels succèdent de longues périodes de sécheresse. Les tempêtes de sable et de poussière se sont également accrues en intensité. « Elles sont moins nombreuses qu’avant, mais beaucoup plus puissantes, explique Hussain al-Sarraf, un mathématicien spécialisé dans la modélisation du climat. On se focalise à juste titre sur les température, mais c’est tout l’environnement qui va changer pour nous au Koweït : la force et le sens des vents, l’humidité des sols, le niveau de la mer qui augmente. »

Assis à 22 h 30 dans un gigantesque centre commercial de luxe au centre de Koweït City, où toutes les boutiques sont ouvertes et où il est presque nécessaire de mettre un pull pour résister aux assauts de la climatisation alors qu’il fait 42 °C à l’extérieur, Hussain al-Sarraf balaie les environs de la main : « On peut très bien supporter 55 °C : nous vivons essentiellement à l’intérieur de nos maisons, de nos bureaux et dans nos voitures. Mais est-ce économiquement viable ? Les gens en sont conscients, mais ils préfèrent ignorer la question. »

Koweït City est une ville nord-américaine au milieu du désert : des banlieues étendues reliées par des autoroutes à huit voies et des gratte-ciel en verre. C’est-à-dire un urbanisme complètement inadapté aux lieux. Quand on regarde de vieilles photos de la ville au mitan du XXe siècle, avant le boom pétrolier, on voit des bâtiments de deux ou trois étages densément construits, avec des rues étroites, des venelles et des cours intérieures, érigés en bois et en pierre. Cette architecture cultivait l’ombre et la circulation d’air, elle réduisait les distances à parcourir et utilisait des matériaux préservant la fraîcheur. Tout le contraire d’aujourd’hui.

« Est-il nécessaire de régler le thermostat sur 18 °C, comme cela se fait fréquemment au Koweït ? »

Les immeubles de bureaux entièrement en verre à Koweït City, Doha ou Dubaï composent de formidables panoramas urbains concurrençant les skylines de New York ou Hong Kong. Mais ils sont une folie, dans un pays où le soleil les transmute en fours. Aujourd’hui, 10 % de la consommation d’électricité mondiale sert à alimenter des climatiseurs ou des ventilateurs, et ce chiffre doit être encore plus élevé dans les nations du golfe Persique qui ont à la fois les moyens et les ressources énergétiques pour installer des systèmes de refroidissement partout. En 2030, c’est-à-dire demain, un tiers du pétrole du Koweït (10 % des réserves mondiales) servira à produire de l’électricité et de l’eau, à travers les usines de dessalement, très gourmandes en énergie, qui fournissent la quasi-totalité de l’eau du pays. On voit bien le serpent qui se mord la queue…

Face à ces scénarios, qu’est-ce qui est fait ? Eh bien, pas grand-chose. Nasser Abulhassan, fondateur du cabinet d’architectes Agi, essaie de promouvoir des bâtiments plus petits, mieux orientés et moins gourmands en énergie. De son propre aveu, il n’est pas toujours bien reçu quand il dévoile ses plans à ses clients : « On me demande souvent : mais pourquoi les fenêtres ne sont-elles pas plus grandes ? Pourquoi n’y a-t-il pas plus de place dans les bureaux individuels ? Même quand on leur explique les gains économiques, les gens ont du mal à l’accepter. Alors on leur demande : de quoi avez-vous vraiment besoin ? Est-il nécessaire de régler le thermostat sur 18 °C, comme cela se fait fréquemment au Koweït, ou est-ce que vous vous sentez bien à 26 °C ? Essayez de petites ouvertures et vous verrez que vous aurez besoin de moins de lampes, car l’œil humain s’accommode. »

Bien qu’il conçoive des édifices, Nasser Abulhassan estime que les solutions à ce problème de surconsommation dépassent le simple cadre de l’architecture ou de l’urbanisme. « Nous devons avoir une approche holistique, qui prenne en compte les problèmes de réglementation – aujourd’hui par exemple, la luminosité minimale dans les bâtiments est fixée par les fabricants d’ampoules électriques –, de sociabilité – voulons-nous vivre éloignés les uns des autres ? –, de cohérence – nous sommes devenus bons pour recycler les bouteilles d’eau en plastique, mais nous continuons à aller les acheter en voiture au supermarché – et de choix politiques. Le Koweït est un pays providence, qui subventionne ses citoyens. Par conséquent, il est très difficile de les rendre responsables quand ils payent leur eau, leur essence ou leur électricité trois fois rien. »

Mais le Koweït est également un pays où 70 % de la population est composée de travailleurs migrants venus d’Asie, du Maghreb et d’autres régions du Moyen-Orient. Or ces gens-là ne sont à la fois pas « subventionnés » (ou bien moins) et ils sont les premières victimes des conséquences du changement climatique. Ce sont eux qui s’agitent en plein air sur les chantiers, dans les jardins, comme vendeurs de rue ou gardiens de parking. La législation interdit désormais le travail en extérieur entre midi et 16 heures, mais il n’est pas rare de constater que son respect laisse à désirer. Il suffit de se promener dans Koweït City pour observer des ouvriers du bâtiment œuvrant à toute heure de la journée, cherchant l’ombre d’un mur ou d’un échafaudage.

« Vu les systèmes de sous-traitance en cascade et la réglementation sur les permis de séjour qui régissent les relations de travail au Koweït, personne n’ose jamais se plaindre », confie Omar, le représentant d’un collectif (informel) d’ouvriers égyptiens sur le site d’un futur gratte-ciel de la capitale. « Personne ne recense leur nombre, mais il y a des centaines de morts chaque année sur les chantiers : des accidents bien sûr, mais aussi beaucoup d’ouvriers qui décèdent de coups de chaleur. On nous dit : il est mort de crise cardiaque parce qu’il était de faible constitution ou de déshydratation parce qu’il n’a pas assez bu, mais nous savons très bien que ce sont les conditions de travail avec la température qu’il fait ! »

Contrairement à ce que l’on pourrait penser en se fiant aux images spectaculaires de grimpeurs himalayens décédés lors d’une ascension ou en se focalisant sur les efforts déployés pour aider les SDF en hiver, on meurt assez peu de froid dans le monde aujourd’hui. Il suffit de protéger son corps du contact avec l’air et le sol en rajoutant des couches de vêtements et de se mouvoir pour échapper à l’hypothermie. La chaleur, en revanche, est un « tueur silencieux », qui provoque des dizaines voire des centaines de milliers de décès chaque année, mais que l’on a du mal à comptabiliser.

Même nu, même à l’ombre, même sans bouger, même avec de l’eau en quantité suffisante, si la température élevée ne baisse pas et si l’on n’a pas accès à une pièce relativement fraîche, la mort approche en quelques heures. Dans ces circonstances, la solution actuelle à une telle situation – la climatisation – ne fait que contribuer au problème, aggravant les causes du changement climatique. Avec toutes ses réserves de pétrole, le Moyen-Orient est directement confronté à ce paradoxe : sa richesse des soixante-dix dernières années condamne sa vie sur place dans les cinquante prochaines.

 

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24 août 2018 5 24 /08 /août /2018 05:37
PCF - SALAH HAMOURI : Un an de détention arbitraire pour notre concitoyen, défenseur des prisonniers politiques palestiniens, que les autorités françaises ont abandonné à leur sort

Le 23 août 2017, Salah Hamouri, avocat franco-palestinien, était arrêté par l'armée israélienne chez lui aux premières heures du jour. Depuis lors, et sans qu'aucune charge d'accusation ne puisse être étayée d'aucune preuve puisque Salah Hamouri n'est « coupable » que d'être le défenseur de prisonniers politiques palestiniens, sa détention a été arbitrairement maintenue par les autorités israéliennes.

Salah Hamouri reste en prison sous le coup d'une détention administrative, pratique illégale, inhumaine, qui ne vise qu'à décourager toute résistance à l'occupation et la colonisation israéliennes des territoires palestiniens au mépris des résolutions de l'ONU et du droit international. En mai dernier, le groupe de travail du Conseil des droits de l'homme des Nations unies a pourtant estimé que l'avocat franco-palestinien devait être libéré sur le champ. Mais le gouvernement de Benjamin Netanyahu persiste dans la violation des droits humains, aidé en cela par la torpeur d'un gouvernement français dont le président ne cesse de ménager son « cher Bibi ».

Dans le monde entier, et en Israël même, de plus en plus de voix s'élèvent pour exprimer leur indignation devant une politique qui bafoue le droit international, piétine toute chance de paix juste et durable, multiplie les actes de guerre contre la population civile et promeut la mise en place d'Etat d'apartheid en Israël. La libération récente de la jeune Ahed Tamimi, militante pacifiste et non-violente, démontre cependant que les mobilisation et la solidarité internationale portent leur fruit.

Le président et le gouvernement français ne peuvent décemment plus se voiler la face et continuer de prôner une prétendue retenue devant le gouvernement d'extrême droite israélien. Israël bombarde chaque jour la population de Gaza faisant de nombreuses victimes parmi lesquelles beaucoup d'enfants ; son armée cible maintenant les personnels médicaux qui viennent au secours des blessés. Des artistes sont arrêtés et emprisonnés pour leurs opinions, le centre culturel Said Al-Mishal a même été détruit par une attaque aérienne israélienne le 9 août dernier. Israël détient à ce jour 5820 prisonniers politiques palestiniens dont 446 en détention administrative, 270 enfants (dont 50 de moins de 16 ans) et 5 députés de l'Assemblée législative palestinienne parmi lesquels Marwan Bargouthi.

Le Parti communiste français demande à nouveau expressément au gouvernement français et à Emmanuel Macron d'agir pour la libération immédiate de Salah Hamouri, notre concitoyen, dont la justice israélienne est bien incapable d'établir une quelconque culpabilité. Le PCF continuera d'agir et de joindre sa voix à celles de toutes ceux et celles qui luttent pour une paix juste et durable entre Israélien-ne-s et Palestinien-ne-s, pour la reconnaissance de l'Etat palestinien dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale conformément aux résolutions de l'ONU, pour l'abrogation de la loi d'apartheid adoptée cet été été à la Knesset, pour la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens, pour le droit au retour des réfugiés et l'arrêt du blocus et des bombardement de Gaza : c'est le seul chemin véritable pour une paix juste et durable entre Palestinien-ne-s et Israélien-ne-s.

 

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