Concarneau et la Bretagne ne sont pas encore libérés mais les partisans du Front National organisent déjà la libération. Leur journal local à Concarneau, avec le sigle FN et le bonnet phrygien révolutionnaire et plébéien, définit trois buts immédiats avec un contenu peu localisé mais certainement à dimension nationale, une copie de déclarations nationales récentes: " 1°/ Libérer le sol de France de l'envahisseur 2°/ Châtier les traîtres 3°/ Procurer au Peuple de FRANCE la possibilité de se donner librement un gouvernement de son choix".
L'INSURRECTIONNEL
N°1, Organe local du Front National de lutte pour l'indépendance de la France - lundi 10 juillet 1944
Le Front National, groupement de tous les français contre les envahisseurs et les traîtres
La France meurtrie, trahie, envahie, a voulu se sauver. Ses fils de toutes opinions, et de toutes croyances, ont eu la même pensée patriotique: chasser les envahisseurs, se venger.
Tous les vrais fils de France ont compris que c'est seulement en sortant de la criminelle attitude attentiste préconisée jadis par les Darland et Cie, attitude qui a amené le sabordage de Toulon et l'occupation totale de la France. Les Français sont unis dans les organisations de résistance mais hélas, ces organisations n'ont parfois dans certaines villes aucun contact entre elles, et sont même quelques fois séparées par des animosités politique ou religieuse qui ne sont pas de mise actuellement.
Les jeunes catholiques se sont unis dans une J.O.C de lutte, les jeunes protestants dans une organisations protestantes (SIC), les partis communistes et socialistes se sont clandestinement réorganisés, les Francs-Tireurs ont été créés, ainsi que les groupes Libération, Vengeance, Résistance etc... organisations et partis qui chaque jour lutte (SIC) contre les bôches.
Les chefs de ces diverses organisations ont bientôt compris la nécessité d'un contact étroit entre eux pour accomplir des actes et des opérations coordonnés.
Le CONSEIL NATIONAL DE LA RÉSISTANCE a été formé par l'Union des chefs des différents groupements de résistance de forme militaire. Le FRONT NATIONAL groupe toutes les organisations de la résistance de forme militaire, politique, syndicale, patriotique.
Chaque commune doit former un COMITE LOCAL du F.N. Dans notre ville, ce comité vient d'être constitué et comprend actuellement: la MILICE PATRIOTIQUE, les FRANCS-TIREURS ET PARTISANS FRANCAIS, LES FORCES UNIES DE LA JEUNESSE PATRIOTIQUE, amalgames des organisations de jeunesse de toutes les opinions.
Le programme du F.N se résume par les trois buts suivants:
1°/ Libérer le sol de France de l'envahisseur
2°/ Châtier les traîtres
3°/ Procurer au Peuple de FRANCE la possibilité de se donner librement un gouvernement de son choix.
Les organisations militaires du F.N seront chargées d'aider les alliés à exécuter le premier but et sont entrées en actions dans cette intention dans plusieurs points de territoire.
La MILICE PATRIOTIQUE appuiera l'insurrection nationale qui, comme l'a dit le général de Gaulle, ne peut être séparée de la Libération Nationale et empêchera les traîtres de se sauver avec les allemands, procédera à leur arrestation les mettant par là dans l'impossibilité de nuire. Le Gouvernement de la République statuera sur leur sort. Les français ne veulent pas laisser leurs crimes impunis et espèrent de la part de leurs dirigeants une attitude aussi énergique que celle prise vis-à-vis du félon Pucheu et des membres de l'ignoble Phalange Africaine.
Avant que la voix populaire par le suffrage universel puisse se donner un gouvernement à son image, il sera nécessaire qu'une organisation patriote prenne les pouvoirs municipaux dans notre commune.
Le Comité du F.N propose que la municipalité élue au suffrage universel en 1935 et dissoute par le gouvernement Daladier en 1939 contre toutes les lois républicaines et sur les instances de la 5ème colonne qui trahissait la France, soit réintégré dans son mandat Les manquants et collaborateurs seraient remplacés par des membres de la résistance.
A la demande des FORCES UNIES DE LA JEUNESSE, le F.N luttera pour que les jeunes gens et jeunes filles de France, à partir de 18 ans... aient le droit de vote et soient éligibles.
Le F.N, par tous les moyens en son pouvoir, luttera également pour qu'une assemblée constituante soit élue au suffrage universel six mois au plus tard après la libération totale du territoire national.
Seule une assemblée élue de cette façon représentera la volonté du peuple tout entier et sera assez forte pour nous donner une vraie constitution républicaine.
En avant soldats du FRONT NATIONAL DE LUTTE POUR L’INDÉPENDANCE DE LA FRANCE pour accomplir, chacun dans votre rayon, les trois parties de notre lourde tâche.
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PEUPLE DEBOUT:
Le Peuple de France se trouve placé devant les tâches de la plus haute importance pour son avenir. Le débarquement tant espéré des troupes allées en Normandie a créé en effet, en France, une situation particulière caractérisée par la ruine complète de la clique de Vichy.
Cette situation nouvelle se produit au moment où l'Armée Rouge entame la bataille décisive, achève la libération du sol soviétique et se trouve à la veille de déferler sur l'Allemagne, signal de l'insurrection pour tous les peuples opprimés.
Il n'y a plus de place pour le hideux attentisme. Le Peuple de France tout entier est mobilisé par le véritable gouvernement de la France, celui qui est libre et commande, Vichy n'ayant plus même la force d'être le fantoche d'Hitler, et le laissant essayer de commander seul.
Plus une minute à perdre: Peuple debout contre l'envahisseur et les traîtres: Peuple debout pour libérer la France!
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L’EXÉCUTION D'UN TRAÎTRE.
Philippe Henriot, le ministre de l'information de Vichy, valet des bôches comme le prouve à ceux qui ne voulaient pas être édifiés son dernier week-end à Berlin, a cessé son honteuse carrière de pitre, de lâche et de traître que son verbe mensonger lui a permis d'accomplir.
Pitre, Henriot l'était par son éloquence cynique, son acharnement à faire croire à ses auditeurs qu'il disait toujours la même chose, poursuivait le même but, en se contredisant sans cesse, à l'image de son maître Hitler.
Lâche, Henriot l'était par ses vociférantes accusations de studio contre les plus purs et les plus braves figures de la résistance active, contre le maquis de Haute-Savoie et, dérision, contre les vrais français qu'il prétendait "éclairer et sauver".
Traître, Henriot le prouve par toute sa carrière: sa présence honteuse à la Chambre, son prétendu soutien à la République contre les "vendus d'extrême-gauche", alors qu'il faisait déjà partie de la 5ème colonne avec les Pétain, Laval, Déat, Darnand, Doriot, terrible équipe qui ne s'éleva contre la guerre que quand elle fut perdue.
Le pitre, le traître, le lâche Philippe Henriot ne trompera plus le peuple de France. De hardis patriotes n'ont pas hésité, au péril de leur vie, à éteindre à tout jamais le verbe mensonger et malfaisant d'un traître; donnant en ces journées historiques à la France toute entière l'exemple du châtiment qui les frappera tous.
Pétain, Laval, Déat, Darnand, Doriot... continuez à vociférer contre la France sous couvert de votre faux patriotisme et de votre fausse gloire, faîtes encore à la France le don de vos immondes personnes. Elle vient de vous prouver qu'elle s'en rappellera. Vos personnes sont à elle. Elle saura les châtier.
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Cherbourg vient d'être libérer (SIC), malgré l'opiniâtre résistance ennemie ouvrant aux alliés la perspective de grandes opérations et au peuple tout entier l'espoir de sa prochaine libération totale. En Italie, la glorieuse armée française vient de libérer l'île d'Elbe et la ville de Sienne se rapprochant chaque jour davantage de la frontière de la Patrie. En URSS, la libération de Viborg, Vitebst, Minsk, etc... confirme la déroute allemande, promet l'invasion prochaine du Reich, la destruction du nazisme et la paix pour le Monde.
Le deuxième numéro de "L'Insurrectionnel", daté de 4 jours après, le vendredi 14 juillet 1944, est un peu plus localisé. On y trouve par exemple en page deux une attaque contre le maire de Concarneau installée par Vichy en lieu et place de la municipalité de Front Populaire (avec un maire communiste) et la police:
"Notre Maire est un dictateur.
Les boulangers de notre ville ont fait du pain blanc prétend la rumeur publique. Ce n'est pas vrai réplique Aubert (notre Maire paraît-il), la preuve: un seul boulanger a eu une amende. Mais comment veut-il que la police qui mange du pain blanc donne une amende à ses fournisseurs?
De plus Ped Youn profite de l'occasion pour nous vanter les charmes de ses employés impolis et moqueurs et pour menacer d'amendes dictatoriales quiconque prétendra le contraire.
Pourquoi voulez-vous Monsieur Aubert que la population ait confiance dans une municipalité qu'elle n'a pas élue et ne connait pas.
La population pense de vous Monsieur Aubert ce qu'elle pense de Vichy. Vous ne l'en empêcherez pas. C'est la rançon de ce que vous croyez votre gloire".
Et la relation d'un massacre nazi contre la Résistance au Faouet:
"La Fosse du Faouet.
Dans la petite commune du Faouet, les assassins nazis ont tués en pleine nuit passé (SIC) cent français cent français qu'ils ont enterré dans une fosse commune. Parmi les victimes, il y avait une jeune fille et deux religieuse (SIC). Voici une signature aux crimes de Katyn".
La première page éditoriale est tout entier consacrée, avec une ouverture sur les couplets censurés de la Marseillaise ("Quoi! Ces cohortes étrangères/ Feraient la loi dans nos foyers:/ Quoi! ces phalanges mercenaires/ Terrasseraient nos fiers guerriers!/ Grand Dieu! par des mains enchaînées/ Nos fronts sous le joug se ploieraient/ De vils despotes deviendraient/ Les maîtres de nos destinées!") à un parallèle et à une identification entre la Résistance et les Soldats de l'An II, et entre le châtiment des partisans de l'Ancien Régime et de la servitude pendant la Grande Révolution et ceux de la Collaboration et de Vichy:
"Rêvez Philippe Pétain au tyran Louis XVI qui correspondait avec l'ennemi et s'enfuyait vers lui pendant que le sang des soldats français coulait à flot.
Rêvez Pierre Laval au sort du duc d'Orléans qui périt sur l'échafaud après avoir voté la mort de son cousin le roi" ...