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5 octobre 2018 5 05 /10 /octobre /2018 15:50
Déclaration de Salah Hamouri libéré - 4 octobre 2018
DECLARATION DE SALAH HAMOURI

jeudi 4 octobre 2018

Cher·e·s ami·e·s,

Me voici enfin libéré, après 13 mois de détention, dans une sombre prison de l’occupation. 13 mois sans jamais connaître le motif de ma détention. 13 mois sans savoir quand je retrouverai la liberté.

Je connais bien les prisons de l’occupant et son système carcéral mais cette nouvelle détention m’a confortée dans le fait que l’occupation s’acharne à briser des hommes, des femmes et des enfants. La prison est un moyen d’isoler collectivement les Palestinien·ne·s. Dans ces prisons, tout est fait pour nous enlever notre humanité.

Nous sommes coupé·e·s du monde, coupé·e·s de nos proches.

L’occupation restreint l’accès à la presse, aux chaînes de télévision afin que nous ne puissions pas nous informer correctement sur ce qui se passe dehors. Nous ne pouvons pas non plus librement étudier ni recevoir des livres ni aucun courrier. Nous y sommes coupé·e·s de nos familles, une seule visite par mois nous permet de voir nos parents de premier degré uniquement, pendant 45 minutes, derrière une vitre, par l’intermédiaire de téléphones, nos conversations personnelles étant minutieusement écoutées et analysées, afin d’exercer des pressions sur nous.

Certain·e·s détenu·e·s se voient parfois privés de cette visite, arbitrairement. Pour ma part, j’étais privé de ma femme et mon fils pendant ces 13 longs mois, une véritable torture psychologique pour nous trois.

Mais dans la pénombre de cette prison, il m’arrivait des rayons de soleil qui me réchauffaient le cœur. Mes avocat·e·s et parents me tenaient informés durant les parloirs de la mobilisation en France, en Belgique et même plus loin dans le monde. De retour dans ma cellule, j’en informais mes codétenus.

Je tiens à vous remercier tous et toutes très chaleureusement pour votre mobilisation, vos actions diverses et variées, les rassemblements, les débats, les projections de film, les nombreuses affiches collées, pétitions signées, tracts distribués, les interpellations du gouvernement, les propositions de se constituer otage en échange de ma liberté, tout ce que vous avez fait m’a profondément touché. Je dois vous le dire aujourd’hui.

Merci aux citoyen·ne·s, aux militant·e·s des partis politiques, d’associations et de syndicats, aux avocat·e·s, aux artistes, aux intellectuel·le·s qui ont plaidé en ma faveur durant tout ce temps et qui n’ont absolument rien lâché.

Merci aux élu·e·s qui ont porté mon nom et l’exigence de liberté dans les villes, les départements, les régions, à l’Assemblée Nationale, au Sénat et jusqu’au Parlement européen, dans les hémicycles comme sur les frontons des édifices publics, qui m’ont fait citoyen d’honneur.

Sachez que c’est également un honneur pour moi d’être ainsi défendu par le peuple français et ses représentant·e·s.

Merci aux rares médias et journalistes qui ont parlé de ma détention, alors que la majorité de leurs confrères a préféré m’enfermer dans une seconde prison, celle du silence et de l’indifférence. Vous rendez honneur à votre profession, vous qui agissez malgré les pressions, préférant la vérité à votre confort personnel.

Enfin, merci au noyau dur de ce Comité qui a sans relâche organisé les évènements et fait vivre la campagne, aux côtés d’Elsa et de Jean-Claude. Vous avez toujours tenu la ligne, malgré les obstacles et les mauvais jours, je sais à quel point votre action a été importante aussi bien sur le plan politique qu’humain.

C’est votre action collective qui a permis de contraindre la diplomatie française à bouger, alors qu’elle aurait préféré laisser ce dossier dans un tiroir. C’est votre action collective qui a permis d’envoyer un message clair à l’occupant : les peuples solidaires du monde ne laisseront pas faire et ils marcheront le temps qu’il faudra aux côtés du peuple palestinien pour qu’il accède à ses droits légitimes de liberté et d’indépendance, comme tous les peuples du monde. C’est ensemble que nous écrirons cette page de l’histoire, nous Palestinien·e·s et vous solidaires du monde entier.

Encore une fois, mille mercis à toutes et tous.

J’espère pouvoir venir très prochainement en France, d’abord pour retrouver ma femme et mon fils dont je suis privé depuis maintenant 16 mois, et ensuite pour venir vous remercier et pour continuer le combat pour mes nombreux camarades encore incarcérés et pour défendre sans relâche les droits fondamentaux de mon peuple.

A très bientôt cher·e·s ami·e·s !

Salah Hamouri
Mercredi 3 octobre 2018, Jérusalem

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4 octobre 2018 4 04 /10 /octobre /2018 05:45

(Chronique à paraître dans l’Humanité-Dimanche du 4/10/2018)

Ces jours-ci sera annoncé le nom du lauréat ou de la lauréate du Prix Nobel de la Paix 2018. L'an dernier, cette éminente distinction fut décernée à la Coalition internationale pour l'abolition des armes nucléaires (ICAN), mouvement dont la magnifique campagne avait été à l'origine de l'adoption -historique !- d'un traité d'interdiction de l'arme atomique par 122 Etats, à l'Assemblée générale des Nations Unies. Le Comité Nobel s'honorerait à nouveau en attribuant cette année son prestigieux Prix à "l'Aquarius" et à la très méritoire association "SOS Méditerranée", qui affrète depuis 2016 ce bateau de sauvetage grâce auquel plusieurs dizaines de milliers de vies humaines ont pu être sauvées.

Un tel acte hautement symbolique serait d'autant mieux venu que la décision du Panama, sous la pression du gouvernement d'extrême-droite italien, de retirer son pavillon au navire humanitaire, compromet gravement la poursuite de ses missions si aucun pays ne se résout à l'immatriculer. Gageons que l'hommage du Prix Nobel de la Paix donnerait à ces héros des temps modernes un poids décuplé face aux Etats européens, aujourd'hui plus prompts à livrer les migrants aux pseudo "gardes-côtes" -et vrais criminels- libyens qu'à aider à organiser le secours à leurs victimes !

Plus généralement, un tel choix du Comité Nobel allégerait la chape de plomb du discours anti-migrant -tantôt ouvertement xénophobe, tantôt vicieusement ambigüe- qui s'abat depuis des mois sur une opinion publique en plein désarroi. Il aiderait, par exemple, cette majorité absolue de Françaises et de Français, troublés par la campagne ambiante , mais qui conservent une bonne opinion des ONG qui aident les migrants (1) , à reprendre confiance dans les valeurs humaines et à s'engager plus hardiment dans l'action pour les faire vivre au quotidien. "L'Aquarius est un symbole politique -note avec perspicacité un observateur averti de la société française- (...) Il rappelle d'autres bateaux célèbres, comme "l'Exodus", qui transporta en 1947 des juifs rescapés de la Shoah, ou encore "l'Ile de lumière", navire affrété en 1979 pour secourir les boat people en mer de Chine" (2). On pourrait ajouter le cas, odieux et tragique, du "Saint-Louis" , transportant 938 juifs fuyant l'Allemagne en 1939 à destination de l'Amérique, où ils furent refoulés pour être finalement accueillis, après une longue errance, en Hollande, en France et en Grande-Bretagne. Un tiers de ces réfugiés finira dans les camps de la mort...

Vivement un sursaut ! Sinon, nos descendants risquent de nous voir un jour avec le même regard incrédule mêlé de honte que celui que nous portons aujourd'hui sur les "zoos humains" exhibant jusqu'à la seconde guerre mondiale des hommes, des femmes et des enfants "primitifs" ou "sauvages", arrachés à leur terre africaine, sud-américaine ou australienne pour divertir les visiteurs des pays "civilisés".
---------
(1) Voir sondage ODOXA (27/9/2018)

(2) Jérôme Fourquet, Directeur du département Opinion de l'IFOP (Le Figaro, 26/9/2018)

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3 octobre 2018 3 03 /10 /octobre /2018 06:01
Dominique Vidal

Dominique Vidal

Lire aussi: 

Israël-Palestine: Interview exclusive de Dominique Vidal pour Rouge Finistère, septembre 2018

Orient XXI - 2 octobre 2018 

Tout commence le 5 décembre 2010. Ce jour-là, une importante délégation arrive à Tel-Aviv ; elle comprend une trentaine de dirigeants de l’Alliance des partis européens pour la liberté et les droits civils. Comme son nom ne l’indique pas, cette organisation rassemble… une série de partis d’extrême droite. C’est la première fois depuis sa création que l’État d’Israël accueille une pareille brochette de leaders, dont le Néerlandais Geert Wilders, le Belge Philip Dewinter et le successeur de Jorg Haider, l’Autrichien Heinz-Christian Strache.

Que font en Israël ces néofascistes et souvent négationnistes, voire nostalgiques du IIIe Reich ? Ils participent à un colloque organisé par l’aile droite du Likoud et consacré au combat antiterroriste. Malgré le caractère officieux de l’initiative, le ministre ultranationaliste Avigdor Liberman s’entretient longuement avec le très islamophobe Wilders, qui lui rend la politesse en allant haranguer des colons en Cisjordanie. Selon l’Agence France presse (AFP), l’homme qui rêve d’interdire le Coran aux Pays-Bas a « plaidé contre la restitution de territoires en échange de la paix avec les Palestiniens, proposant l’installation “volontaire” des Palestiniens en Jordanie », puis défendu les colonies juives de Cisjordanie, « petits bastions de la liberté, défiant des forces idéologiques qui nient non seulement à Israël, mais à tout l’Occident, le droit de vivre dans la paix, la dignité et la liberté »

Tout est dit : dans leur « croisade » contre les Palestiniens, la droite et l’extrême droite israéliennes sont prêtes à toutes les alliances, même contre nature. Ce premier pas d’il y a huit ans a été suivi de bien d’autres. Si bien que, désormais, le flirt de Benyamin Nétanyahou et de ses alliés/rivaux israéliens avec tout ce que l’Europe compte de populistes, à commencer par les héritiers du fascisme, a pris des allures de passion durable. Même lorsque les obscurs objets de leur désir dissimulent mal leur antisémitisme. Ces liaisons dangereuses méritent d’être connues, d’autant que, gênés aux entournures, nombre de médias, y compris en France, les taisent.

LE DOUBLE LANGAGE DE VIKTOR ORBAN

La plupart des observateurs savent ce que le premier ministre israélien faisait le 16 juillet 2017 : il écoutait, ravi, Emmanuel Macron déclarer lors de la commémoration du 75e anniversaire de la rafle du Vél d’Hiv : « Nous ne céderons jamais à l’antisionisme, car c’est la forme réinventée de l’antisémitisme. »Beaucoup ignorent en revanche où il se trouvait le surlendemain : à Budapest, pour courtiser son homologue hongrois Viktor Orban. Et pourtant ce dernier, quelques semaines plus tôt, qualifiait d’« homme d’État exceptionnel »un certain Miklos Horthy de Nagybanya. Régent du royaume depuis 1920, il finit dans la collaboration : il obéit à l’Allemagne nazie, promulgua des lois antisémites et livra finalement à Adolf Eichmann — tout en faisant mine de s’opposer à leur déportation — quelque 430 000 juifs hongrois, pour la plupart gazés dès leur arrivée à Auschwitz. Cette apologie d’un criminel contre l’humanité n’a pas empêché le numéro un hongrois, en visite à son tour à Jérusalem en juillet 2018, de promettre à son hôte « une politique de tolérance zéro envers l’antisémitisme » (L’Express, 19 juillet 2018). Maître ès cynisme, Orban venait, trois mois plus tôt, de remporter les élections législatives au terme d’une campagne centrée sur la dénonciation du milliardaire philanthrope George Soros. Le « complot » prêté par le premier au second — organiser l’installation d’un million de réfugiés par an dans l’Union européenne — découlait, selon le premier ministre, de la pensée « cosmopolite » d’un financier juif évidemment« inféodé aux puissances d’argent », celles de Bruxelles comme de Washington.

Cet antisémitisme à peine camouflé ne constitue pas le seul point commun entre Budapest et Varsovie : les conservateurs se revendiquent dans l’une et l’autre capitale de ce qu’Étienne Balibar a baptisé l’« illibéralisme ». Nationalisme et protectionnisme y riment avec euroscepticisme et catholicisme conservateur.

LIBÉRATION DE LA PAROLE ANTISÉMITE EN POLOGNE

Sur les bords de la Vistule aussi, le Parti droit et justice (Prawo i Sprawiedliwość, PIS) fondé par les frères Kaczynski n’a eu de cesse, depuis son retour au pouvoir en 2015, de liquider les quelques acquis démocratiques, politiques et sociétaux de la Pologne post-communiste : augmentation des pouvoirs de l’exécutif au détriment de ceux du législatif, mainmise sur les médias, encadrement de la justice, durcissement de la loi anti-avortement, refus du mariage homosexuel comme de l’euthanasie, promesse d’un référendum sur la peine de mort, etc. Rien de tout ceci ne dissuade les dirigeants d’Israël de s’acoquiner avec ceux de la Pologne. Même lorsque ces derniers, sans craindre d’aiguillonner l’antisémitisme profondément enraciné dans ce pays, inventent une loi criminalisant la critique de la collaboration avec le IIIe Reich. Le projet prévoit jusqu’à trois ans de prison contre les personnes coupables « d’attribuer à la nation ou à l’État polonais, de façon publique et en dépit des faits, la responsabilité ou la coresponsabilité des crimes nazis commis par le IIIe Reich allemand (…), de crimes de guerre ou d’autres crimes contre la paix et l’humanité » (Le Monde, 1er février 2018).

Une modification cosmétique de la loi suffira à Nétanyahou pour blanchir son homologue Mateusz Morawiecki dans une déclaration conjointe. Que Yehuda Bauer, un des principaux historiens israéliens de la Shoah, qualifiera de « trahison stupide, ignorante et amorale de la vérité historique sur l’implication polonaise dans l’Holocauste ». Ce réquisitoire reprochait, pour résumer, au texte commun de présenter les Polonais en héros ou en victimes, minimisant leur participation massive aux crimes antisémites

Irresponsable, la trahison du premier ministre israélien n’a pas manqué de se retourner contre les juifs de Pologne : il a alimenté la « libération de la parole antisémite jamais vue depuis 1989 » (Le Monde, 20 avril 2018) que la loi a provoquée. Cette appréciation, le correspondant du Monde à Varsovie la fonde sur une série de faits inquiétants : dérapages médiatiques, caricatures dans la presse, délires sur Internet, pressions ministérielles sur le musée Polin, campagnes de haine contre le directeur du musée d’Auschwitz-Birkenau et contre celui du Centre de recherche contre les préjugés. Ce dernier a déclaré : « Il y a clairement une épidémie de langage de haine qui se propage dans le discours public en Pologne. Celle-ci a commencé avec la crise migratoire de 2015. Depuis, la parole antisémite a bondi, de pair avec la parole antimusulmane et xénophobe. »

UN « DEAL » AVEC LES RÉVISIONNISTES EUROPÉENS

Le cas de la Lituanie est plus douloureux encore que celui de la Pologne : le pourcentage de juifs exterminés pendant la guerre atteint, selon les sources, 95 % ou 97 %. La plupart furent assassinés durant l’année 1941, souvent par des unités de collaborateurs lituaniens — une partie fut même massacrée avant l’arrivée des Einsatzgruppen (groupes d’intervention). Nétanyahou ne peut l’ignorer : sa famille a quitté le pays peu avant le génocide. Et pourtant, lors de sa visite à Vilnius, fin août 2018, il salue les « efforts » de son homologue, Saulius Skvernelis en matière de commémoration de la Shoah. « Il n’y a jamais eu de réaction israélienne à la distorsion de la Shoah,rétorque Ephraïm Zuroff, du Centre Simon Wiesenthal. Il n’y a rien eu. Nada. Gornisht [rien en yiddish]. Les Lituaniens peuvent dire absolument tout ce qu’ils veulent, ils peuvent glorifier des gens qui ont assassiné des juifs » (The Times of Israel, 24 août 2018). À condition, faut-il préciser, qu’ils jouent, comme les Lettons et les Estoniens, les avocats de Tel-Aviv au sein de l’Union européenne.

Voilà le deal. Nétanyahou l’avait d’ailleurs avoué avant de s’envoler pour Vilnius : « Je souhaite parvenir à un équilibre dans les relations pas toujours amicales de l’Union européenne envers Israël » (Le Figaro, 23 août 2018). Et de détailler son mode d’emploi : « Je le fais par des contacts avec des blocs de pays de l’Union européenne, des pays d’Europe de l’Est et maintenant avec des pays baltes et d’autres pays bien sûr. » Il s’agit de réduire l’isolement diplomatique de l’État d’Israël, que la radicalisation de son gouvernement risque de rendre infréquentable, sauf pour Donald Trump. Au centre de cette stratégie figure le groupe de Visegrad, que dirigent, désormais, des populistes de droite (Pologne, Hongrie, Tchéquie) ou de gauche (Slovaquie) et sur lesquels Israël compte pour infléchir la politique proche-orientale de Bruxelles, déjà très peu critique vis-à-vis de Tel-Aviv.

L’ENTHOUSIASME DES NÉOFASCISTES

À l’ouest, Tel-Aviv jette aussi ses filets. Plus les néofascistes progressent, et plus ils l’intéressent. Avec des résultats significatifs. Le jeune chef de la Ligue italienne est revenu enthousiaste d’un voyage en Israël en 2016. Deux ans plus tard, à la veille des élections qui l’ont porté au pouvoir, il déclarait :« J’éprouve une grande estime et un profond respect pour la force de résilience d’Israël qui vit dans une région aussi difficile » (LPH Info, 25 février 2018). Et d’annoncer que, victorieux, il modifierait la politique de l’Italie vis-à-vis d’Israël dans les institutions internationales et reconsidèrerait l’aide financière italienne à des institutions telles que l’Unesco « qui se plaît à l’attaquer ».

Même un leader de la droite dure suisse comme Oscar Freysinger, l’inventeur de la « votation » sur l’interdiction de la construction de minarets en novembre 2009, se laisse aller au lyrisme : « Si Israël disparaissait, nous perdrions notre avant-garde. (…) Aussi longtemps que les musulmans sont concentrés sur Israël, le combat n’est pas dur pour nous. Mais aussitôt qu’Israël aura disparu, ils viendront s’emparer de l’Occident »

Les succès électoraux de l’Alternative für Deutschland (AFD) ont suscité des réactions contradictoires à Tel-Aviv. Car, si la présidente du parti, Beatrix von Storch, ne perd pas une occasion de souligner son soutien à Israël dans le combat commun contre l’islamisme4, d’autres dirigeants multiplient les provocations, douchant toute velléité de dialogue. Ainsi Alexander Gauland, l’un des deux porte-parole, a-t-il expliqué que les Allemands pouvaient être « fiers » du combat de leurs soldats pendant la guerre, regrettant la façon dont la République fédérale allemande (RFA) « appréhende sa responsabilité dans l’Holocauste et dans les relations spéciales entretenues avec Israël ».

Ancien ministre et chef du Mossad, rendu célèbre par l’enlèvement d’Eichmann, Rafi Eitan n’a, lui, pas éprouvé d’état d’âme en saluant l’AFd : « Chacun de nous, en Israël, apprécie votre attitude envers le judaïsme, a-t-il assuré. Je suis sûr que, si vous travaillez avec force et, plus important, de manière réaliste, au lieu de représenter une “Alternative pour l’Allemagne”, vous pourriez devenir une alternative pour toute l’Europe » (Times of Israel, 4 février 2018). Et de prôner la fermeture des frontières « dans les meilleurs délais pour empêcher l’immigration musulmane »

EN AUTRICHE, L’ENFER EST PAVÉ DE BONNES INTENTIONS

Seul le Rassemblement national (RN, ex-FN) reste encorepersona non grata en Israël, même si le compagnon de Marine Le Pen a séjourné en Israël. Mais le porte-parole du ministère israélien des affaires étrangères, Emmanuel Nahshon, répète :« Le gouvernement israélien n’a pas de contact avec le Front national, étant donné l’idéologie et l’histoire de ce parti » (Times of Israel, 4 février 2018). En revanche, la question des relations avec le Parti de la liberté autrichien (Freiheitliche Partei Österreichs, FPÖ) se pose en coulisses : un député du Likoud, l’ultranationaliste Yehuda Glick, a même rendu visite au parti qui a failli arracher la présidence de la République et appelé ses collègues au dialogue.

À défaut de se compromettre officiellement avec les successeurs de Jorg Haider, Israël invite en juin dernier le chancelier autrichien Sebastian Kurz, qui dirige une coalition incluant les néonazis. Provocateur, le jeune homme visite Yad Vashem et ne craint pas d’y déclarer : « En tant que chancelier d’Autriche, je reconnais que l’Autriche et les Autrichiens portent un lourd fardeau (...) Nous, Autrichiens, savons que nous sommes responsables de notre propre histoire » (La Croix, 8 juin 2018). Cet évident mensonge provoque même un incident avec sa guide, une juive d’origine autrichienne. Devant les caméras de télévision, Deborah Hartmann fait observer à Sebastian Kurz que le FPÖ compte encore des politiciens « qui ont besoin qu’on leur explique ce qu’était la Shoah ». Qui doit s’excuser ? Le Mémorial de Yad Vashem ! Car, dès son entrée en fonction, le chef de gouvernement avait annoncé que « dans son programme, [il voulait] approfondir les relations bilatérales avec Israël » (The Times of Israel, 22 juin 2018). Ces bonnes intentions — dont on sait néanmoins que l’enfer est pavé — lui valurent d’être promu par Nétanyahou « véritable ami d’Israël et du peuple juif »...

« VOTRE FASCISTE JABOTINSKY »...

« Qu’importe qu’ils soient antisémites pourvu qu’ils soient sionistes » : tel pourrait être le fil rouge de la « drague » ostensible, voire ostentatoire, à laquelle se livre le premier ministre israélien dans les milieux populistes et néofascistes européens. Mais on aurait tort de réduire ces manœuvres à l’expression d’une simple realpolitik. Car elles relèvent aussi de sa génétique personnelle et politique. Personnelle, car son père, Benzion Nétanyahou, a toujours milité aux côtés du leader révisionniste Zeev Jabotinsky dont il fut même, un temps, l’assistant. Politique, car les ancêtres du Likoud, l’Irgoun, le Betar et le Lehi fricotèrent avec le fascisme et le nazisme.

À force de rabâcher que le mufti de Jérusalem, Amin Al-Husseini, a rejoint (seul) Berlin et créé deux légions SS(bosniaques), on finirait par oublier que le Lehi, en tant que tel, proposa en 1941 une alliance au IIIe Reich. Et que le Betar, puis l’Irgoun, dès les années 1920, bénéficièrent du soutien politique et matériel de Benito Mussolini, qui appréciait Jabotinsky : « Pour que le sionisme réussisse, estimait le Duce, il vous faut un État juif, avec un drapeau juif et une langue juive. La personne qui comprend vraiment cela, c’est votre fasciste, Jabotinsky ».

Voilà les gens qui, toute honte bue, osent accusent d’antisémitisme quiconque critique leur polit

Dominique Vidal

Journaliste et historien, auteur de Antisionisme = antisémitisme ? (Libertalia, février 2018).

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3 octobre 2018 3 03 /10 /octobre /2018 06:00

 

À la suite du Brexit, la Commission européenne a choisi de revoir le tracé des corridors maritimes bordant le continent, en ne retenant aucun port français. Des députés communistes et la CGT montent au créneau.

Les vagues provoquées par le Brexit n’ont pas fini d’être utilisées par les instances de l’Union européenne pour libéraliser et désorganiser l’économie et l’activité des pays membres. Cette fois, la lame touche les ports français. En effet, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), entamée le 29 mars 2017, a conduit la Commission européenne à modifier les trajets des navires marchands dans les océans et les mers qui entourent le continent. Une révision censée éviter d’isoler l’Irlande de la partie continentale de l’UE. C’est ce qu’a annoncé le 1er août dernier Violeta Bulc, la commissaire européenne aux Transports, en présentant le projet de modification du corridor du réseau central transeuropéen entre la mer du Nord et la Méditerranée. Sauf que, si de nouvelles liaisons sont ajoutées entre les ports irlandais de Dublin et Cork et les ports belges de Zeebrugge et Anvers ou encore celui de Rotterdam (Pays-Bas), aucun port français n’est prévu dans ce nouveau plan. Une situation que dénoncent les députés communistes Jean-Paul Lecoq et Pierre Dharréville dans une lettre au premier ministre. Relayant « la stupéfaction et l’incompréhension de la communauté maritime et portuaire nationale », les parlementaires, dont les circonscriptions comprennent notamment les ports du Havre et de Marseille-Fos-sur-Mer, rappellent l’évidence : « Il suffit de prendre une carte pour s’apercevoir que vouloir créer des corridors maritimes entre les ports irlandais et les ports belges et néerlandais en écartant nos ports nationaux (…) constitue un non-sens. »

« Affaiblir économiquement la Grande-Bretagne pour la punir du Brexit en misant sur l’Irlande »

Xavier Bertrand, président (LR) du conseil régional des Hauts-de-France, dont les ports de Calais et de Dunkerque sont également exclus du nouveau corridor, a également réagi, estimant que « la Commission européenne doit revoir sa copie et le gouvernement réagir ». Un risque pour les ports français de regarder passer les navires plutôt que de les voir accoster, et ce, alors que l’efficacité y est parfois supérieure aux autres places portuaires. C’est le cas au Havre, qui traite 23 conteneurs à l’heure, contre 16 seulement pour le port de Rotterdam, pourtant automatisé en grande partie. Jean-Paul Lecoq y voit aussi une volonté d’« affaiblir économiquement la Grande-Bretagne pour la punir du Brexit en misant sur l’Irlande et en faisant de ce pays une plateforme portuaire majeure reliée à des autoroutes maritimes vers le cœur de l’Europe ». Un « jeu dangereux », juge le député havrais, « parce qu’ici ce n’est pas l’intérêt général qui prime, celui des États membres et des peuples de l’Union, mais un intérêt économique, de guerre économique, de dumping économique ». Si Pierre Dharréville et lui se sont associés avec d’autres députés pour saisir la commissaire européenne et lui réclamer d’intégrer les ports français au corridor, ils ont également demandé à Édouard Philippe de quelle façon une telle proposition a pu être élaborée sans que le gouvernement et la communauté portuaire n’y soient associés. En outre, comment ce dernier a-t-il pu ne pas voir que le financement des ports français par l’Europe dans le cadre des investissements prévus pour le futur réseau transeuropéen de transport (RTE-T) serait remis en cause ?

Des marchandises qui devront être acheminées par route avec un impact écologique désastreux

Pour Serge Coutouris, secrétaire général adjoint de la fédération CGT des ports et docks, la réponse est à chercher du côté du lobbying exercé à Bruxelles par « des places portuaires qui ont déjà bénéficié largement des aides de l’Europe ». Il y a dix ans, le port de Rotterdam bénéficiait déjà de 900 millions d’euros de fonds européens alors que les ports français devaient se partager seulement 174 millions d’euros. Le syndicaliste pointe aussi l’inertie du gouvernement, auquel la CGT réclame la création d’un véritable ministère de la Mer, afin de « promouvoir une politique d’investissement ambitieuse et à la hauteur du statut de la France et de sa particularité géographique ». Le gouvernement préfère orienter l’économie sur le tourisme, plutôt que de valoriser ses atouts industriels, dont les ports sont une pièce maîtresse, selon Serge Coutouris. Certains petits ports français seraient même mis en danger, et avec eux « toute l’économie du territoire environnant », fait-il remarquer. L’inquiétude est d’autant plus grande que les marchandises, qui devront être acheminées par route des ports belges et néerlandais vers la France au lieu d’y arriver directement par bateaux, auront un impact écologique catastrophique. Dans un communiqué commun, la CGT des ports et docks et celle des douanes sollicitent elles aussi le gouvernement et réclament qu’il obtienne des modifications de ce projet, exprimant leur refus de « subir les conséquences de décisions des technocrates de l’Europe sous le diktat des lobbyings ». Chez les travailleurs portuaires et dockers, la date de la mobilisation du 9 octobre sera un premier pas pour faire entendre la voix des ports et de ceux qui les font vivre.

 

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3 octobre 2018 3 03 /10 /octobre /2018 05:57
BRÉSIL. LA COMMUNISTE MANUELA D’AVILA À LA CONQUÊTE DU JABURU (L'Humanité, 3 octobre 2018)
BRÉSIL. LA COMMUNISTE MANUELA D’AVILA À LA CONQUÊTE DU JABURU
Mercredi, 3 Octobre, 2018

La députée du Rio Grande do Sul, à peine 37 ans, est candidate à la vice-présidence du Brésil aux côtés de Fernando Haddad, l’ancien ministre de l’Éducation de Lula. L’ex-président est interdit de se présenter au scrutin des 7 et 28 octobre.

Avec un enthousiasme plein de fraîcheur, Manuela D’Avila écume le Brésil. Des salles de conférences aux favelas, en passant par des meetings de rue, la candidate à la vice-présidence de Fernando Haddad, du Parti des travailleurs (PT), ne ménage aucun effort pour interpeller, convaincre. Voilà presque un an que le Parti communiste du Brésil (PCdoB) l’a investie pour porter les couleurs de la formation à l’élection présidentielle des 7 et 28 octobre. À l’époque, déjà, elle bataillait contre la cabale politico-judiciaire qui a jeté arbitrairement en prison Luiz Inacio Lula da Silva, alors désigné par le PT pour concourir au scrutin. Concurrents mais pas adversaires. Lorsqu’il a été incarcéré, le 7 avril, « Manu » était à ses côtés parce qu’« une élection sans Lula est une fraude ». On sait depuis ce qu’il est advenu : le pouvoir judiciaire, des hauts gradés de l’armée, l’oligarchie y sont allés au forceps pour empêcher le fondateur du PT de se présenter, parce que toutes les enquêtes d’opinion lui accordaient une ample victoire. 

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3 octobre 2018 3 03 /10 /octobre /2018 04:55
Ian Brossat

Ian Brossat

"A partir de la deuxième moitié des années 1970 et durant toute une décennie, , les Brigades de la défense étaient en fait une milice de hors-la-loi financée par l'argent public. Jusqu'à 1985, leur chef, Rifaat al-Assad (le frère de Hafez), était un chabbih au plein sens du terme. Un homme vulgaire, grossier, violent, cupide et débauché dont la cruauté et la corruption étaient sans limites. Il détenait en grande partie le monopole de la contrebande des antiquités. C'était un homme impulsif, contrairement à son frère, calculateur et patient. Rifaat a été l'acteur principal du massacre de Hama en 1982, et deux ans plus tôt de celui de la prison de Palmyre. Quand à Hafez, il "excellait" en tout. La preuve était la torture sauvage des prisonniers politiques islamistes durant une vingtaine d'années, dans la prison de Palmyre..." 

(Yassin Al-Haj Saleh, intellectuel communiste syrien, opposant au régime)

 

Yassin al-Haj Saleh nous fait pénétrer au coeur du système fasciste et criminel d'une cruauté sans limites du pouvoir des Al-Assad dans "La question syrienne"

"La question syrienne" de Yassin Al-Haj Saleh - La révolution des gens ordinaires face au pouvoir fasciste et mafieux du clan Assad

"La révolution des gens ordinaires", extraits d'un article de juin 2011 de Yassin Al-Haj Saleh (La question syrienne)

 

 

Rifaat Al Assad poursuit Ian Brossat en diffamation pour avoir estimé que la propriété parisienne du Syrien, exproprié, a été « obtenue avec de l’argent volé au peuple ».

«Le bien mal acquis, obtenu avec de l’argent volé au peuple syrien par l’un des pires régimes au monde, va servir à l’intérêt général. » Cette phrase qu’aurait prononcée Ian Brossat (PCF), rapporte RTL en 2016, n’a pas plu à Rifaat Al Assad. L’oncle de l’actuel dirigeant syrien a intenté un procès en diffamation contre l’adjoint parisien au logement et le journaliste à l’origine de l’article, Rémi Sulmont. L’audience se tient aujourd’hui au tribunal correctionnel de Nanterre (L'Humanité, 1er octobre 2018)

 

Emission de France Inter le 2 septembre 2017: 

L’oncle du président syrien, Rifaat Al-Assad, est dans le collimateur de la justice française. Elle enquête sur son patrimoine immobilier évalué à 90 millions d’euros.

Enquête de Benoît Collombat

C’est un véritable « Monopoly » en plein Paris. Rifaat Al-Assadpossède deux luxueux hôtels particuliers (dont l’un de plus de 3000 mètres carrés, avenue Foch), ainsi qu’une quarantaine d’appartement dans les beaux quartiers parisiens. Il est également propriétaire d’un château de 45 hectares à Bessancourt, dans le Val d’Oise, de deux terrains, à Paris et dans l’Ain. Il possède encore 7 300 mètres carrés de bureaux à Lyon.

 

Des biens acquis entre 1984 et 1988. Un patrimoine estimé à plus de 90 millions d’euros par le fisc.

Suite à la plainte de deux associations (« Sherpa » et «Transparency international France ») une information judiciaire a été ouverte en avril 2014 sur l’origine de ce patrimoine considérable. Le juge Renaud Van Ruymbeke instruit cette enquête.

En juin 2016, Rifaat Al-Assad est mis en examen pour :

  • blanchiment de fraude fiscale en bande organisée
  • détournement de fonds publics
  • travail dissimulé

Une enquête à l’échelle européenne

L’enquête s’étend à toute l’Europe : en Espagne d’abord, où des perquisitions ont eu lieu dans la station balnéaire de Marbella. Là aussi, Rifaat Al-Assad dispose d’un patrimoine impressionnant, évalué à plus de 600 millions d’euros. Investigations en Angleterre également autour d’une luxueuse propriété londonienne dont il semble être le propriétaire à travers un trust.

« Cette instruction ne concerne pas seulement Rifaat Al-Assad, mais aussi la façon dont les autorités françaises ont validé ces opérations de blanchiment », estime l’avocat de « Sherpa », Marie Dosé.

Mais avant d’être inquiété par la justice, Rifaat Al-Assad a longtemps été protégé par la France.

Un exil doré

Dans les années 1970, il est le bras droit de son frère, Hafez Al-Assad, qui dirige la Syrie. Il est à la tête d’une brigade spéciale chargée de museler toute contestation dans le pays. L’homme est également un intermédiaire incontournable dans de nombreux marchés.

« Dans les années 70, la Syrie bénéficie d’une aide exceptionnelle de la part des pays du Golfe dans le cadre de la lutte contre Israël,explique le spécialiste du Proche-Orient, Fabrice Balanche. Ça représente quasiment 40% du PIB syrien. C’est la grande époque des achats d’usines, clés en mains, à la Tchécoslovaquie, à la Roumanie ou à la Russie… avec de confortables commissions pour les dirigeants syriens. »

Mais à partir des années 1980, les choses se gâtent. Rifaat Al-Assad tente de renverser son frère. Son coup de force est un échec. En 1984, il doit quitter la Syrie. Direction : la Russie, la Suisse, puis la France, où il est accueilli à bras ouverts.

« À cette époque, la famille Al-Assad était assez proche des dirigeants français, notamment du président de la République, François Mitterrand », se souvient l’ancien ministre des affaires étrangères, Roland Dumas.

Le 28 février 1986, Rifaat Al-Assad est fait Grand-Croix de la Légion d’Honneur par le président Mitterrand. Il est également invité aux chasses présidentielles, comme le révèle un courrier rédigé par le responsable des chasses et « l’homme de l’ombre » de l’Elysée, François de Grossouvre. Voici ce qu’il lui écrit le 19 décembre 1988 :

« Monseigneur, Le président de la République m’a confié le soin d’organiser en votre honneur, une chasse à Rambouillet, le vendredi 20 janvier 1989. Je vous accueillerai en tant que représentant du Président de la République à 9h30 au château de Rambouillet. Des battues se dérouleront de 10h à 13h (faisans, canard), suivies d’un déjeuner. Souhaitant que cette invitation vous agréez, permettez-moi, Monseigneur, de vous assurer de ma très haute considération et de mes meilleurs sentiments. »

Rifaat Al-Assad n’est pas seulement proche du pouvoir socialiste. Il soigne également ses réseaux à droite, avec l’entourage deJacques Chirac, président du RPR et Premier ministre de 1986 à 1988. Le 20 janvier 1988, Rifaat Al-Assad reçoit, par exemple, les bons vœux du ministre de l’Intérieur, Charles Pasqua.

Malgré son exil en France, il maintien des liens avec le régime de Damas. Il garde même le titre de vice-président syrien jusqu’à la fin des années 1990.

Le « deal » secret avec les services secrets français

Pour comprendre pourquoi toute la classe politique est « aux petits soins » avec lui, il faut se plonger dans le contexte politique de l’époque.

Dans les années 1980, la France est visée par de nombreux attentats, au Liban. L’ambassadeur de France est même tué dans un attentat à Beyrouth, en septembre 1981. Les « services » français soupçonnent alors le régime syrien. Ils décident donc de faire passer un message à Rifaat Al-Assad. Une rencontre est organisée, à l’été 1983, près de Genève.

« Nous avons fait comprendre à Rifaat Al-Assad qu’il fallait arrêter de lancer des bombes et d’assassiner des diplomates, se souvient l’ancien chef du service de renseignement de la DGSE, Alain Chouet. Sinon, il y aura des représailles contre lui. Il a immédiatement compris. Un « téléphone rouge » a été mis en place. Et les attentats se sont arrêtés. »

 

Une sorte de « deal » est donc conclu : plus d’attentats, et en échange, on le laisse faire tranquillement des affaires.. D’autant plus que l’oncle de Bachar Al-Assad peut donner un « coup de pouce » dans certains gros contrats de matériels militaires, comme dans cette vente d’hélicoptères à l’Arabie saoudite, à l’été 1988.

Voilà ce que Jean-Claude Sompairac, le patron de la SOFRESA (la société chargé d’exporter l’armement français en Arabie saoudite) écrit, à l’époque, à Rifaat Al-Assad :

« Excellence, ainsi que vous le savez, le contrat d’hélicoptères pour l’Arabie saoudite dont nous avions parlé lors de notre dernier entretien a été signé il y a quelques semaines. Je tiens à vous remercier de l’aide que vous avez pu apporter à la France dans la conclusion de cette opération qui va resserrer les liens qui la lient à la nation arabe. »

Un homme très protégé

La France profite également de son carnet d’adresses au Moyen-Orient. L’ex-homme fort du régime syrien bénéficie même de la protection des services secrets français.

« Nous n’avions aucun intérêt à lui faire des misères, reconnaît Alain Chouet. On préférait le mettre à l’abri d’un certain nombre de choses. C’est une décision qui a été couverte par le pouvoir politique. »

Cette protection va durer un long moment, comme l’ont constaté les habitants de la commune de Bessancourt, dans le Val d’Oise, où se situe le château de Rifaat Al-Assad.

« Lorsque j’ai été élu maire de Bessancourt en 2001, deux membres des Renseignements généraux sont venus me faire passer un message, se souvient Jean-Christophe Poulet. Rifaat Al-Assad est pour nous un partenaire, il ne faut rien faire contre lui. »

Jusque dans les années 2000, des hommes en arme ont même circulé autour du château, braconnant parfois à l’arme de guerre.

Petits arrangements entre amis

À l’origine, le château de Bessancourt était la propriété de la famille royale saoudienne, qui l’a cédé au début des années 1980 à Rifaat Al-Assad. Lors de leurs investigations, les enquêteurs ont d’abord découvert d’étranges pratiques avec la municipalité de l’époque. Lorsque les Saoudiens ont voulu agrandir le château, ils ont versé 2 millions de francs à la commune pour mieux faire passer leur permis de construire.

« Les saoudiens ont fait un don à la commune qui a permis de financer la construction d’un gymnase pour les arts martiaux,confirme un ancien élu aux enquêteurs, le 23 mai 2016.L’opposition aurait pu dire quelque chose mais il y a eu des consignes de l’Elysée pour taire ces faits. »

Quant à Rifaat Al-Assad, il aurait également versé de l’argent aux associations locales pour être tranquille.

Logement précaire et argent noir

De l’argent liquide circule également autour du château pour payer les nombreux Syriens à son service. Quatre cents personnes sont ainsi venues de Syrie dans les années 1980. Il en resterait entre 60 et 70 aujourd’hui : des soutiens ou des employés de Rifaat Al-Assad, logés dans d’anciens haras, sur une quinzaine d’hectares, autour du château de Bessancourt, dans des conditions parfois précaires.

« Nous avons constaté des problèmes d’asthme sur certains enfants en bas âge, à cause de l’humidité et de la moisissure, raconte le directeur du Centre communal d’action social de Bessancourt, Elie Domergue. Nous avons relogé une famille. »

La plupart des employés étaient payés au noir. Selon un ancien responsable du personnel entendu par les enquêteurs, la famille Al-Assad retirait chaque mois 200 000 euros en espèces. L’enquête a en effet montré qu’entre 80 000 et 120 000 euros étaient retirés chaque mois sur un compte Société Générale d’une de ses épouses. Ces paiements en espèces auraient duré, selon les investigations, jusqu’en novembre 2010, avant d’être réalisés par virement.

Dans les paradis fiscaux

D’où vient tout cet argent ? Comment Rifaat Al-Assad a-t-il pu acquérir son patrimoine immobilier ? Il affirme que c’est essentiellement grâce à l’aide de la famille royale saoudienne qu’il a acheté ses biens.

« Notre client a bénéficié d’une aide massive de l’Arabie saoudite qui lui a permis de se constituer son patrimoine », expliquent à la justice française les avocats. L'un de ses fils, Siwar, affirme :« L’Arabie saoudite a financé la lutte de mon père pour pousser l’État syrien à entamer des réformes sérieuses en Syrie ».

Rifaat Al-Assad a notamment fourni aux enquêteurs un chèque de 10 millions de dollars de l’Arabie saoudite, encaissé en juillet 1984. Mais pour les enquêteurs, cet argent ne permet pas de financer tous ses achats immobiliers, dans les années 1980.

Les avocats ont également produit à la justice trois virements saoudiens effectués, à la fin des années 2000, soit un total de 40 millions d’euros versés à Rifaat Al-Assad entre 1984 et 2010.

Selon un rapport de synthèse des enquêteurs, « la volonté de dissimulation de Rifaat Al-Assad relative à son patrimoine est caractérisée ».

Aucun achat n’est effectué à son nom, mais à celui de proches ou de sociétés dont l’oncle de Bachar Al-Assad est le bénéficiaire. A chaque fois le circuit de l’argent révèle le passage par des sociétés offshore, dans des paradis fiscaux : sur l’île de Curaçao (dans la mer des Caraïbes), au Liechtenstein, au Panama, à Guernesey ou à Gibraltar.

Un budget syrien qui explose

Les enquêteurs ont également recueilli le témoignage d’anciens dignitaires du régime syrien qui accusent Rifaat Al-Assad d’avoir récupéré de l’argent du régime, mais aussi de l’argent libyen.

Un ancien ministre des affaires étrangères syrien explique, par exemple, qu’Hafez Al-Assad aurait versé 300 millions de dollars à son frère, dont 200 millions viendraient des caisses de l’Etat et 100 millions d’un prêt libyen.

Autre témoignage : celui de l’ancien ministre de la défense, Mustafa Tlass (qui est mort en juin 2017, à 85 ans). Il affirme sur procès-verbal que Rifaat Al-Assad aurait « vidé la banque centrale syrienne » et empoché « 200 millions de dollars américains en liquide, par avion, à Damas. » Des témoignages jugés « erronés » et « orientés » par ses conseils.

Les enquêteurs ont également constaté qu’au moment où il quittait la Syrie en 1984, les dépenses de la présidence syrienne quadruplaient, de façon exceptionnelle, accréditant ainsi la piste d’argent public détourné.

Entendu à plusieurs reprises par le juge Renaud Van Ruymbeke, Rifaat Al-Assad explique qu’il ignore tout de son patrimoine. Ce n’est pas la conviction de la justice pour qui il possède « la complète maîtrise de l’intégralité de son patrimoine ».

Des soupçons de trafic archéologique

Selon nos informations, l’enquête sur le patrimoine immobilier s’est récemment élargie à un possible détournement du patrimoine archéologique syrien.

Un avocat syrien, exilé en Suède, affirme auprès de la justice française avoir été spolié d’un trésor découvert par les hommes de Rifaat Al-Assad en 1975.

L’histoire est la suivante : son grand-père, agriculteur, était le maire d’un village, dont les terres auraient été confisquées par Rifaat Al-Assad pour construire un aéroport militaire. Des travaux sont lancés, lorsque les ouvriers du chantier font alors une découverte incroyable. « Ils ont découvert sous un rocher un trésor archéologique romain sublime, explique l’avocat du plaignant syrien, Joseph Bréham. Il y avait des statues d’hommes et de chevaux à taille réelle en or, des pièces d’or… Rifaat Al-Assad a rapidement débarqué en hélicoptère pour récupérer ce trésor. Les syriens ont été spoliés d’une part de leur patrimoine. »

Des accusations qualifiées de « fantaisistes » par les avocats de Rifaat Al-Assad, qui rappellent qu'en 2015 le journal Le Mondeavait été condamné pour diffamation après avoir relayé ces mêmes accusations

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1 octobre 2018 1 01 /10 /octobre /2018 19:24
Pascal Torre, responsable secteur Moyen-Orient du PCF, avec Berivan Firat, responsable du Mouvement des Femmes Kurdes en France, sur le stand du Finistère à la fête de l'Humanité 2018. Pascal Torre devrait être présent à la fête de l'Huma Bretagne du 1er au 2 décembre avec des militantes kurdes engagés pour la défense de la démocratie et de l'égalité des droits en Turquie et en Syrie

Pascal Torre, responsable secteur Moyen-Orient du PCF, avec Berivan Firat, responsable du Mouvement des Femmes Kurdes en France, sur le stand du Finistère à la fête de l'Humanité 2018. Pascal Torre devrait être présent à la fête de l'Huma Bretagne du 1er au 2 décembre avec des militantes kurdes engagés pour la défense de la démocratie et de l'égalité des droits en Turquie et en Syrie

MOYEN ORIENT

la poudrière

 

Le Moyen-Orient connaît une tragédie humaine et politique. Celle-ci conjugue des éléments de longue durée provoquant un engrenage de violence dont les solutions d’avenir peinent à émerger.

Un baromètre des changements mondiaux

La décolonisation n’a pas été suivie par un proces­sus de construction de l’État et s’est accompagnée d’une inadéquation entre l’État territorial et les espaces post-impériaux ou coloniaux alimentant des tensions. Pour y faire face, des régimes autoritaires stabilisateurs se sont installés afin de juguler les mouvements populaires. De plus toutes les promes­es de développement se sont progressivement enlisées. Enfin, les puissances occidentales, pour s’emparer des richesses régionales, ont soutenu ces dictatures et entretenu des conflits qui ont assommé ces sociétés.

Après avoir été au cœur des relations internationales dès l’après-guerre, le Moyen-Orient n’exerce plus la même attractivité. La fin de la Guerre Froide a mis un terme aux affiliations obligées engendrant une autonomie croissante des États ainsi qu’une atomi­sation du jeu régional. La substance des conflits s’en est trouvée modifiée opposant moins les États entre eux que les États à des lambeaux de sociétés. La nature sociale des conflits neutralise la puissance tandis que la menace devient plus mobile.

La solidité apparente du monde arabe a volé en éclat dans les années 90, permettant au néolibéra­lisme et à l’islamisme de laminer les forces progres­sistes. Le conflit israélo-palestinien a été structurant pour la région de 1950 à 1970. Le retour de la droite extrême au pouvoir a amplifié le caractère religieux et identitaire du projet sioniste. Les lois discrimina­toires se sont multipliées aboutissant au texte d’apartheid qui proclame qu’Israël est l’État nation du peuple juif. Le déplacement de l’épicentre de la conflictualité dans le Golfe marginalise aujourd’hui la question palestinienne favorisant la colonisation d’autant que l’Autorité palestinienne est durable­ment affaiblie. Pour autant, Israël est, du fait de sa politique, confronté à une crise profonde. Ces diffé­rents facteurs ont provoqué une véritable implosion du Moyen-Orient.

Mouvements populaires et engrenage de violences

Les printemps arabes de 2011 ont révélé la vitalité et les attentes des sociétés rejetant l’impéritie des États et leur violence tout en exigeant des réformes démocratiques. Ces mouvements ont suscité chez les dirigeants arabes un brusque retour de l’autori­tarisme. En Égypte, la répression a suspendu le temps politique n’atténuant pas la colère populaire. En Turquie, R.T. Erdogan multiplie les purges, les arrestations et la guerre à outrance contre les Kur­des. Ce régime de terreur a plongé le pays au bord du gouffre économique tandis que son expansion­nisme enracine au nord de la Syrie de véritables « djihadistans ». Dans ce contexte, la résistance du HDP, seule force progressiste et pacifiste, constitue un point d’appui pour les luttes à venir. Désormais, une conflictualité généralisée délite l’Irak, la Syrie et menace toute la région. On ne dira jamais assez combien l’intervention américaine en Irak a eu des effets déstabilisateurs sur la région. En dépit de la victoire de la coalition contre Daesh et l’esquisse de reconstruction de l’État irakien, la violence demeure tandis que la situation économique s’avère catastro­phique. Des mouvements sociaux secouent le pays et ont permis à la coalition conduite par Moqtada al-Sadr et les communistes d’arriver en tête du scrutin législatif.

En Syrie, le régime sanguinaire de Bachar al-Assad, avec l’appui des Russes et des Iraniens, est en voie de remporter le conflit. Pour autant, sa résolution pacifique est loin d’être acquise. Les Occidentaux, marginalisés sont réduits à miser sur la faillite diplomatique russe ou conduisent des expéditions punitives illégales sans lendemain. La Syrie est désormais divisée en trois zones d’influence entre le régime de Damas, les Turcs et une présence améri­caine au Rojava. Mais la Syrie de l’après Daesh devient le terrain d’affrontement des rivalités régio­nales comme en témoignent les bombardements israéliens qui font craindre un embrasement et place aussi la question kurde dans une position périphé­rique.

Ces guerres façonnent un nouveau paysage régional éclipsant l’Égypte, l’Irak et la Syrie tandis que les États du Golfe prospèrent et tentent de tirer parti des États fragilisés. L’Arabie Saoudite occupe une posi­tion dominante poursuivant une politique confes­sionnelle, hégémonique et mortifère au Yémen. Le Moyen-Orient est devenu une poudrière concentrant 40% des armes vendues dans le monde. Elles pro­viennent des États-Unis, de la France, de la Grande Bretagne et d’Allemagne favorisant l’internationali­sation des conflits et la souffrance humaine. L’Ara­bie Saoudite et Israël affirment ensemble désormais que l’Iran est pour eux une menace existentielle dans le sillage de D. Trump qui transfère l’ambas­sade américaine à Jérusalem et rompt l’accord de Vienne sur le nucléaire. D. Trump fait le pari que les difficultés de Téhéran à maintenir l’ordre isla­miste permettront un changement de régime. Rien n’est moins sûr d’autant que l’Iran ne renonce pas à sa politique milicienne qui contribue elle aussi à la fragmentation des sociétés. Cette politique peut conduire à une déflagration qu’attise la perspective de constitution d’un OTAN arabe.

Dans ce contexte le PCF appelle à des mobilisations de solidarité les plus larges possible pour atténuer les tensions et ouvrir une perspective de paix 

PCF 

 

Moyen-Orient: la poudrière (PCF)
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1 octobre 2018 1 01 /10 /octobre /2018 18:48
Libération de Salah Hamouri: D'abord de la joie, puis de la vigilance (Pierre Laurent, PCF)

Libération de Salah Hamouri : "D'abord de la joie, puis de la vigilance" (Pierre Laurent)


C'est d'abord de la joie. Salah est sorti de Prison. De la joie pour sa famille, ses proches, ses ami.e.s, ses camarades. De la joie que je partage avec les communistes, les participant.e.s de la fête de l'Humanité, les militant.e. du mouvement de la jeunesse communiste, des centaines de milliers de jeunes et moins jeunes qui se sont mobilisé.e.s dans tout le Pays pour sa libération.

Après plus de 400 jours de détention administrative, sans jugement ni motif, si ce n'est l'illégitime arbitraire de B. Netanyahou et de son ministre de la défense A. Liebermann, notre compatriote Salah Hamouri a enfin été libéré;
Avocat franco-palestinien, il fait, comme beaucoup d'autres, l'objet d'un harcèlement des autorités israéliennes qui entendent briser les voix qui dénoncent la colonisation, les arrestations et les massacres.

Mais c'est aussi de la vigilance. Salah Hamouri, par son engagement, est un militant de la paix qui doit désormais pouvoir rentrer chez lui à Jérusalem, recouvrer sa complète liberté de circulation et de déplacement, y compris à l'étranger. Aucune entrave ne doit lui être imposée pour pouvoir vivre avec sa famille, sa femme et son fils.

Encouragées par la politique de D. Trump qui a transféré l'ambassade américaine à Jérusalem, supprimé les aides financières à l'UNRAW et aux Palestiniens, la droite et l'extrême droite israéliennes multiplient les lois discriminatoires, amplifiant, par la loi d'"apartheid", le caractère religieux, identitaire et raciste du régime.

Des voix s'élèvent, plus nombreuses, pour dénoncer ceux qui tentent de nier l'existence du peuple palestinien et son droit à disposer d'un Etat.
Après la libération de Salah Hamouri nous appelons à la libération de tous les prisonniers politiques dont Marwan Barghouti. C'est un encouragement à amplifier la solidarité avec le peuple palestinien en constituant un front large, sans exclusive, avec toutes les forces démocratiques qui rejettent l'expansionnisme colonial et l'ultranationalisme.
Aucune paix ne sera possible dans la région sans le règlement de la question palestinienne.

Pierre Laurent,secrétaire national du PCF,

Paris, le 30 septembre 2018.

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1 octobre 2018 1 01 /10 /octobre /2018 18:45

Décès d'Antoine Sfeir : le PCF salue sa mémoire
C'est avec beaucoup de tristesse que nous apprenons la mort d'Antoine  Sfeir. Journaliste et intellectuel, spécialiste reconnu du Moyen-Orient,  il a durement payé cet esprit d'indépendance qui le caractérisait.
Esprit libre, il a su faire partager les exigences de rigueur à des générations de jeunes chercheurs tout en oeuvrant pour la paix dans cette région meurtrie.

Nous avions la fierté de partager avec lui les valeurs humanistes  auxquelles il est demeuré fidèle toute sa vie.
Le Parti Communiste Français salue sa mémoire et présente ses condoléances sincères à sa famille et ses proches.

Parti communiste français,

Paris, le 1er octobre 2018.

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1 octobre 2018 1 01 /10 /octobre /2018 16:45
Communiqué d'Elsa Lefort sur la libération de Salah Hamouri

Communiqué d’Elsa Lefort
 

Salah Hamouri est enfin sorti de la prison du Néguev où il était enfermé depuis 13 mois, suite à une décision strictement politique du gouvernement Netanyahu.

J’ai donc la joie de vous l’annoncer : Salah Hamouri est enfin libéré !

C’est lui, et personne d’autre, qui nous a annoncé la nouvelle de sa sortie. C’est totalement incroyable mais c’est particulièrement significatif.

Les plus hautes autorités françaises, jusqu’à la dernière minute et malgré nos demandes, nous ont expliqué qu’elles ne « savaient pas » ce qu’il adviendrait le 30 septembre quant à la libération de Salah Hamouri. Il convient de savoir aussi qu’un rendez-vous accepté en juillet entre le Président Emmanuel Macron et moi-même a été annulé brutalement au mois d’août. L’engagement élyséen a été rompu tandis que le Président recevait un député franco-israélien particulièrement extrémiste qui avait injurié Salah dans l’hémicycle. On peut difficilement faire plus complaisant avec les autorités israéliennes et ses inconditionnels soutiens français !

On ne peut pas concevoir des relations diplomatiques déloyales et déséquilibrées avec aucun pays au monde. Pourtant c’est ainsi avec Israël. Nous n’oublions pas qu’il y a eu des prises de position des autorités françaises – positions que nous avons saluées. Mais il n’y a pas eu, de toute évidence, les moyens de la réussite mis en œuvre qui soient à la hauteur de la situation concrète, ni d’éléments mis dans la balance qui soient de nature à lever le mutisme, le mépris et l’arbitraire des autorités israéliennes.

Cela pose un problème plus vaste à nos « élites ». Il faut, si la France veut jouer un rôle dans cette région, qu’elle soit au diapason des réalités de ce pays qui sort des normes classiques de la diplomatie et qui viole quotidiennement le droit international. Elle doit tirer des leçons de son impuissance à se faire respecter et à se faire entendre sur ce cas qui touchait clairement à des valeurs fondamentales non-négociables. C’est une question d’efficacité mais aussi d’honneur et d’image de notre pays dans le monde.

Cela ne fait que souligner un fait essentiel : la libération de Salah Hamouri est d’abord le fruit de l’action et du rassemblement d’élu-e-s de tous « niveaux », de nombreuses personnalités françaises ou étrangères ; de dizaines de milliers de citoyen-ne-s ; d’associations diverses multiples ; de quelques journaux et de journalistes qui ont fait leur travail honnêtement ; de partis, de syndicats et d’avocat-e-s. Une grande diversité s’est rassemblée, s’est élargie et est restée unie pour cette cause fondamentale : celle de la liberté.

En ce moment tout particulier je tiens à vous remercier chaleureusement, en mon nom bien sûr mais aussi au nom de Salah, et nous tenons à vous assurer de notre plus profonde et sincère reconnaissance. Nous n’oublierons pas ce moment de forte solidarité humaine.

La « détention administrative » telle que pratiquée en Israël est synonyme d’arbitraire. Salah Hamouri est libre au terme d’une rude bataille où jamais ses soutiens n’ont mis un genou à terre. Mais il reste des centaines d’autres cas similaires dans les prisons israéliennes, des enfants, des femmes et des hommes.

Il reste aussi des milliers de prisonniers politiques que Salah s’est engagé, et nous avec lui, à défendre plus efficacement en devenant avocat. Et nous pensons, en ce jour, à toutes celles et à tous ceux qui sont encore dans les glauques prisons israéliennes et qui ne devraient pourtant pas y être. C’est tout un peuple que la « Force occupante » veut casser ou chasser de sa terre natale.

Nous avons remporté un combat. Il y en a d’autres à venir. Et il nous faut remporter la bataille pour la pleine liberté du peuple palestinien. Cela fait 70 ans qu’il en est privé.

Avec cette belle nouvelle que nous savourons et que nous sommes heureux de vous annoncer et de partager avec vous, nous devons maintenant, vous le comprendrez, panser quelques plaies et prendre un peu de temps pour nous, pour nous retrouver tous les trois qui avons été privés si longtemps de vie familiale. De sorte que nous ne manquerons de vous informer des suites de cette libération car des obstacles peuvent encore être posés par les autorités israéliennes pour empêcher Salah de nous rejoindre rapidement en France et de nous serrer dans ses bras.

En vous remerciant de nouveau, nous vous prions de croire que nous n’entendons pas en rester là.

Merci encore et retenons la leçon : la preuve est une nouvelle fois apportée qu’il n’est de combats perdus que ceux qu’on ne mène pas ! Même contre des extrémistes notoires. C’est le bon chemin. La vie et l’histoire le montrent.

Nous avons bon espoir dans des temps meilleurs. C’est un « mal incurable » que nous avons en commun.


Elsa Lefort
Dimanche 30 septembre 2018

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