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6 octobre 2011 4 06 /10 /octobre /2011 10:11

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Le temps presse pour la riposte. Alors: A vos agendas!

 

 

 

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LE VENDREDI 7 OCTOBRE A 20H00

Salle Le Gallouédec à SAINT MARTIN DES CHAMPS  

 

Conférence-débat du Front de Gauche sur la Crise Financière

 

Quelles politiques nous y ont plongés? Quelle exploitation en font les gouvernements européens pour renforcer la domination de la finance sur nos sociétés? Comment en sortir?

 

Introduction au débat par YVES DIMICOLI

économiste, membre de la commission Finance-Economie du PCF

 

Après le débat il est prévu de faire le point avec tous nos sympathisants pour réfléchir à l'animation de la campagne des Présidentielles et des Légistatives 2012 du Front de Gauche dans notre circonscription.     

 

 

Pour se mettre en bouche et clarifier par avance ses idées sur les tenants et aboutissants de la crise de la dette et de la crise financière actuelle en prenant de la distance par rapport aux pédogogies du renoncement et de l'acceptation de l'austérité, voici deux brillants articles datés d'il y a quelques jours de notre prochain conférencier, Yves DIMICOLI.

Décréter l'état d'urgence.

Les choix faits depuis mai 2010 et, encore plus, lors du sommet de l'euro-groupe de juillet dernier, conjuguent surenchères dans les politiques d'austérité, graves reculs de la démocratie et de la souveraineté populaire. C’est un véritable une fuite en avant au service de la domination des marchés financiers. Ces choix débouchent sur un énorme fiasco du point de vue même de l’objectif qu'ils prétendent viser: le recul de l'endettement public. La fragilisation de l'Europe qu'engendre l'aveuglement des dirigeants de la zone euro et dont se réjouissent les fonds spéculatifs, anglo-américains notamment, va conduire au désastre : freinage de la croissance, augmentation du chômage, rationnement des services publics et étouffement des revenus salariaux. Il faut rompre avec cette logique folle qui assassine les Grecs, et qui prépare l'éclatement de la zone euro au risque d'une confrontation fratricide entre Européens à coup de dévaluations compétitives.

La gauche, en France, a une responsabilité immense. Il ne suffit pas de se proclamer pour une opposition à la « règle d'or » en évoquant le caractère spécieux de l'initiative de Sarkozy. Il faut appeler les salariés, les chômeurs, les retraités, les jeunes à une grande mobilisation exigeant un changement de logique avec une autre utilisation de l'euro et de la création monétaire de la la BCE :

 -  Une grande expansion concertée des services publics, rompant avec les orientations des pactes de stabilité et de l'euro plus, et posant la nécessité de  choix budgétaires de relance sociale pour 2010;

-  Une maitrise populaire du crédit et des banques pour sécuriser l'emploi, la formation, les revenus salariaux, de conserve avec une répression systématique de la spéculation.

 Rejetons toute tentation d'union sacrée derrière les marchés financiers. Cessons de diaboliser, comme la droite et l'extrême droite, les déficits et les dettes publiques. Décrétons l'état d'urgence pour imposer une réorientation des pratiques des banques et des grands groupes en exigeant des droits et pouvoirs d'intervention des salariés, des citoyens et des élus sur l'utilisation de l'argent des profits, des fonds publics et du crédit.

Les institutions bancaires et de crédits doivent redevenir du domaine public et fonctionner selon une logique anti-spéculative et de soutien à la relance sociale et économique, aux salaires, emplois, aux investissements socialement utiles et générateurs de croissance.

 

 

 

A propos de l'accroissement de la dette publique.

Analyse des causes de la crise financière, économique et sociale par Yves Dimicoli et présentation des moyens d'en sortir. Article placé initialement à la mi-septembre 2011 sur le blog du PCF de Clichy.   

 

IOù en est-on de la dette publique aujourd'hui?

■ En France, elle augmente depuis trente ans. Mais, c'est à partir de la fin des années 1970 et, plus encore, du début des années 1980, avec le recours de plus en plus systématique au marché financier, que le dette publique française commence de s'envoler.
De 21,2% du PIB en 1978, elle passe à 36% en 1983, pour bondir à 60% en 1998. Les années 2000, après une courte période de latence due à une nette reprise de la croissance dans les pays développés, donnent lieu à un véritable emballement: De 63,3% du PIB en 2003, l'endettement public passe à 79% en 2009, puis 82,3% en 2010, soit 1591,2 milliards d'euros.
La seule dette de l'État, qui était de 44 milliards d'euros en 1978, a été multipliée par 25 depuis, pour atteindre 1101 milliards d'euros fin 2009. Avec 50 milliards d'euro, la charge d'intérêts de la dette est devenue le troisième poste de dépense du budget.

■ Tous les pays avancés ont connu un tel phénomène:

Par exemple, depuis 1981, date d'envolée du dollar et des marchés financiers aux États-Unis, la limite d'endettement public décidée par le Congrès y a été relevée cinq fois: de 8 000 milliards de dollars entre 1981 et 1985, sous Reagan, elle a été portée à plus de 10 000 milliards avec Bush père (1989-1992), puis prés de 13 000 milliards sous Clinton (1993-2000), pour atteindre 14 294 milliards de dollars avec Bush junior... Obama vient, avec difficultés, d'obtenir son relèvement de 2100 milliards de dollars et, pour la première fois, la dette publique des Etats-Unis a dépassé le seuil de 100% du PIB.
Au Japon, depuis un point bas de 63,2% en 1992, la dette publique a progressé jusqu'à 197,2% du PIB en 2010.
Les pays de la zone euro n'ont pas échappé à cette tendance: Alors que, rapportée au PIB, la dette publique agrégée de la zone enregistrait une moyenne de 67% du PIB de 2000 à 2008, elle passe brusquement à 78,8% en 2009.


II – Appel au marché financier ou à la création monétaire de la banque centrale?
C'est par une loi "Pompidou-Giscard" du 3 janvier 1973 que le choix a été fait, en France, de mobiliser la force de l'Etat pour promouvoir le marché financier et soutenir les opérations financières des banques ordinaires.
Elle stipule en son article 25 que "le Trésor public ne peut être présentateur de ses propres effets à l'escompte de la Banque de France". En pratique, cela signifie qu'on interdit à la République française l’accès direct à la création monétaire de la Banque centrale en l'obligeant à emprunter auprès des banques privées sur les marchés d'obligations à des taux d'intérêt dépendant de la conjoncture de ces derniers.
Par cette réforme, "il s'agissait à l'époque de constituer un véritable marché des titres à court, moyen et long terme, qu'ils soient émis par une entité privée ou publique" confirme V. Giscard d'Estaing . Et il la justifie: "la possibilité du prêt direct de la Banque de France au trésor public a généré partout où il fut appliqué une situation d'inflation monétaire permanente".
Constatation très discutable, car ce n'est pas, en soi, l'appel public à la création monétaire de la Banque centrale qui est inflationniste, mais la façon dont cette création monétaire, utilisée par l'État pour de massifs transferts en direction des capitaux monopolistes, n'a pas engendré une croissance suffisante des richesses réelles, d'où l'inflation.
Les dispositions de l'article 25 de la loi de janvier 1973 ont été reconduites par une loi du 4 août 1993. L'enjeu était non seulement l'endettement de l'État au service des grands groupes, mais aussi le financement de ces derniers: Face aux défis de partage de la révolution informationnelle et pour la rentabilité financière, ils étaient en effet appelés à se lancer dans de vastes opérations de restructuration et de fusions-acquisitions à l'échelle du monde entier, requérant d'énormes fonds levés sur les marchés.
Cela a ouvert la porte à une longue période d'essor du marché financier et à une envolée de la dette publique qui y est financée à partir de 1978. De fait, avec le ralentissement de la croissance et la montée du chômage, avec les transferts de plus en plus massifs de l'État vers les grandes entreprises faisant exploser les gâchis de financements publics, avec l'inauguration des politiques d'austérité raréfiant les recettes fiscales et sociales, les comptes publics de la France ont commencé à s'enfoncer structurellement dans le rouge à partir de 1974 pour, depuis, ne plus jamais revenir dans le vert.

Par la suite, l'accumulation de la dette et la progression des intérêts engendrés ont fait surgir un phénomène "boule de neige" avec une croissance économique de plus en plus ralentie: la dette publique augmente mécaniquement, du fait que le taux d'intérêt payé sur elle est plus élevé que le taux de croissance des ressources qui servent à la rembourser.
Aujourd'hui, la seule charge d'intérêts de la dette coûte plus de 50 milliards d'euros à la collectivité et représente le troisième poste du budget de l'Etat. La pratique de l'appel par l'Etat au marché financier pour financer ses déficits est devenue encore plus systématique et d'ampleur avec le passage à un euro conçu, précisément, au service de la domination des marchés financiers, avec une banque centrale "indépendante" et interdite par traité de toute monétisation de dettes publiques.


III – Insuffisance de recettes et gâchis de dépenses publiques:

Les dettes publiques augmentent brutalement en 2008-2009 avec l'intervention massive des Etats face à l'explosion de l'excès d'endettement privé accumulé depuis des années en contrepartie, surtout, d'opérations et placements boursiers, de LBO, de délocalisations, d'investissements contre l'emploi et de formidables spéculations boursières et immobilières.
L'endettement public a pris ainsi le relai de l'endettement privé pour continuer de soutenir l'accumulation capitaliste.
Aux Etats-Unis, près de 800 milliards d'euros sur deux ans ont été injectés, dont 40% en réductions d'impôts. Dans la zone euro, l'ensemble des plans adoptés ont injectés 200 milliards d'euros.

En France, après un plan d'aide à l'investissement, contre l'emploi et les salaires de 26 milliards d'euros, Sarkozy a lancé un "grand emprunt" obligataire de 35 milliards d'euros.
Tout cet argent public a été accordé sans aucun changement des critères du crédit et sans contrepartie en emplois exigées sur les aides. Cela permit de sortir de la récession , mais avec une croissance très insuffisante, très peu d'emplois et le maintien, par le chômage, d'une lourde pression sur les salaires. Par contre, les profits financiers et la spéculation ont repris de plus bel.
En France, après une récession au cours de la quelle le PIB recula de 2,2% en 2009, année où la bourse de Paris enregistra, elle, une augmentation de 22,32%, la croissance réelle a atteint péniblement 1,2% en 2010. Et, après une croissance nulle au deuxième trimestre, l'année 2011 s'annonce fort médiocre. Cette insuffisance de la croissance réelle accentue l'insuffisance des recettes publiques par rapport à la dépense qui, elle, est poussée par des besoins irrépressibles (santé, éducation, recherche, accompagnement social...) ce qui, dans ces conditions, creuse les déficits, lesquels grossissent la dette.

Pour contrer cette évolution, il aurait fallu, outre la recherche d'une plus grande efficacité sociale de la dépense, augmenter les prélèvements obligatoires. Or, ceux-ci, relativement au PIB, sont toujours restés sensiblement inférieurs aux dépenses publiques, de 7,9 points en moyenne de 2003 à 2008, mais de 12,8 points en 2009 et de 12,2 points en 2010.

Cela tient, avant tout, au fait que les gouvernements successifs n'ont cessé de multiplier les cadeaux fiscaux et para-fiscaux (Ex.: allègements de "charges sociales", suppression de la taxe professionnelle,baisse de l'Impôt sur les sociétés) au profit des entreprises, au nom de la compétitivité, et des grandes fortunes, sous prétexte que cela inciterait leurs détenteurs à ne pas les délocaliser.

Outre les cadeaux faits aux plus riches (allègement ISF, Bouclier fiscal...), ce sont les allègements d'impôts (la suppression de la taxe professionnelle par exemple) et de cotisations sociales dont ont bénéficié les entreprises qui sont au cœur de cette évolution.
Selon le Conseil des prélèvements obligatoires , le manque à gagner total, pour l'Etat, des allègements accordés aux entreprises est de 172 milliards d'euros en année pleine, soit 67,7% du total des recettes fiscales nettes du budget 2011 et 1,87 fois le déficit prévu!
Dans ce total, on retrouve les exonérations de cotisations sociales patronales dont la compensation coûte annuellement quelque 30 milliards d'euros désormais (29,8 milliards en 2009).
Le cumul de ces exonérations, accordées par tous les gouvernements en alternance depuis 1992, se monte à 250,5 milliards d'euros!
Au cœur des facteurs concourant à l'augmentation de la dette publique, il y a la volonté des dirigeants français et européens de développer le plus possible le marché financier pour attirer le maximum de capitaux vers les entreprises.
D'où deux phénomènes:

1 – La progression régulière et importante de la part des richesses produites dans les entreprises captée par les prélèvements financiers (intérêts et dividendes..);

2 – Les efforts répétitifs des gouvernements pour, au nom de la compétitivité, faire reculer la part des richesses produites dans les entreprises allant aux prélèvements obligatoires.

Bref, pour laisser le capital financier prélever une dime de plus en plus importante sur la richesse nationale, les politiques gouvernementales ont systématiquement cherché à faire reculer la part des richesses produites qui sert au financement des services publics et de la protection sociale.
Le recours systématique à l'endettement a permis ainsi, bon an mal an, de faire face aux dépenses croissantes, tout en les contenant, sans avoir à augmenter les prélèvements obligatoires.


IV – Et l' Euro là-dedans?
L'euro a été conçu au service de la domination des marchés financiers en prétendant rivaliser avec les États-Unis dans l'attraction des capitaux mondiaux moyennant un taux d'intérêt offert supérieur en permanence à celui de la devise américaine.
Avec l'euro, les dirigeants européens cherchent à disputer aux États-Unis le privilège exorbitant dont il dispose avec le dollar. La monnaie nationale des États-Unis est aussi, en effet, monnaie commune mondiale de fait.
Cela leur permet de s'endetter énormément auprès du reste du monde et de rembourser en émettant de nouveaux dollars, en faisant "marcher la planche à billets" (la FED vient de racheter pour 600 milliards de dollars de bons du Trésor des USA).
Face à cela, la zone euro, avec sa BCE "indépendante" et vouée à soutenir la force financière de l'euro, cherche à promouvoir tant et plus ses marchés financiers. Simultanément, avec le pacte de stabilité, les dépenses de services publics sont rationnées dans le but de tenir les déficits publics sous la barre de 3% du PIB.
L'euro a facilité un fort endettement des États membres, à commencer par ceux d'Europe du sud, en retard de développement, qui ont pu ainsi bénéficier de taux d'intérêt très abaissés.
Mais cet argent emprunté, au lieu de servir à développer les capacités humaines, a servi à la croissance financière des capitaux et à la spéculation, immobilière notamment, sans parler des exportations de capitaux et délocalisations. Simultanément, les services publics végétaient et les dépenses d'armement et de soutien aux capitaux financiers s'envolaient.
D'où une croissance réelle insuffisante, pauvre en emplois, très déséquilibrée et qui s'est effondrée quand cette "bulle" a éclaté.
C'est cela qui a fait apparaitre excessif l' endettement public de ces pays, relativement à leurs capacités réelles de rembourser, et déclencher une intense spéculation faisant brutalement remonter leurs taux d'intérêt.

Cela a débouché sur une grave crise de surendettement public et de vives tensions au sein de la zone euro.
Des réponses d'ampleur ont été apportées. Mais elles demeurent insuffisantes et, surtout, très contradictoires: Elles cherchent, avant tout, à rassurer les créanciers, à consolider les marchés financiers, au prix de l'écrasement des dépenses salariales et sociales et des services publics. Elles cassent donc la croissance et l'emploi et rendent encore plus improbables les remboursements.
D'où la poursuite de la spéculation contre les pays concernés, dont le défaut de paiement est anticipé, mais aussi contre tout le système de l'euro, avec les risques d'une contagion.
Le Fonds européen de stabilité financière (FESF) a été mis en place pour tenter d'endiguer cette crise et d'empêcher sa contagion, de conserve avec le FMI et la Commission européenne.
Il dispose de la garantie des États de la zone euro, ce qui lui permet d'emprunter jusqu'à 440 milliards d'euros sur les marchés financiers et de reprêter aux États en difficulté avec des conditions punitives.
Cette logique consiste donc à emprunter encore et toujours plus sur les marchés et donc à encourager leur croissance cancéreuse et leur domination sur le social et le public, au lieu de faire appel à la création monétaire de la BCE vouée, elle, à maintenir l'euro "fort". Cela ne peut qu'accentuer les cercles vicieux de la dette contre l'emploi, les salaires, la formation, les services publics et la croissance réelle européenne.
Désormais, ces tentatives de réponse portent gravement atteinte aux souverainetés nationales et à la démocratie, la BCE, sur mandat des gouvernements, s'arrogeant le pouvoir de dicter à un pays comme l'Italie un terrible plan d'austérité.


V – Il faut une tout autre politique:

1)- Arrêtons de diaboliser la dette publique!
La dette n'est pas mauvaise en soi. Il y a de bonnes et de mauvaises dettes. Tout dépend de l'utilisation que l'on fait de l'argent emprunté. S'il est utilisé pour accroître les richesses réelles, par exemple pour la santé, l'éducation, la recherche, le logement social, la sécurisation de l'emploi, de la formation et des salaires, l'environnement, cela fait de la croissance durable et saine. Celle-ci va alors entrainer un accroissement des recettes publiques (impôts et cotisations sociales), ce qui permettra de rembourser l'argent emprunté.
Par contre, si l'argent emprunté sert à spéculer sur les marchés bousiers et immobiliers, à délocaliser, à détruire des emplois, à déqualifier et à tirer les salaires vers le bas, cela freine la croissance, raréfie les recettes, ce qui creuse les déficits et les dettes.

  1. Ce n'est pas fatal d'aller chercher l'argent dont on a besoin sur les marchés financiers:

    a) – On peut augmenter et rendre plus efficaces les prélèvements obligatoires :
    Il faut une réforme de la fiscalité, non seulement pour accroitre les recettes des impôts et faire reculer les inégalités mais aussi pour pénaliser la croissance financière des capitaux, la recherche de l'argent pour l'argent, les délocalisations et, au contraire, encourager les comportements favorables à la croissance de l'emploi et des richesses réelles. Il faut aussi de nouvelles ressources immédiatement pour la protection sociale.
    Quatre exemples:
    ► Impôt sur les sociétés: Nous voulons le moduler de façon à pénaliser les entreprises qui investissent pour diminuer l'emploi et la masse salariale, préfèrent faire des placements financiers ou cherchent surtout à payer des dividendes; nous voulons, par contre, encourager les entreprises qui investissent en programmant des créations d'emplois, des mises en formation correctement rémunérés et contrôlés.
    ► Impôt territorial sur les entreprises: Nous voulons établir un impôt local sur le capital des entreprises pour en dissuader les gâchis. Il s'agirait d'une "taxe professionnelle" moderne qui serait assise non seulement sur les équipements des entreprises, mais aussi sur les actifs financiers des sociétés et des banques. Cela permettrait aux collectivités territoriales de disposer de quelque 20 milliards d'euros supplémentaires tout de suite et de voir l'emploi progresser sur leur territoire, ce qui augmentera la base de leurs recettes futures, plutôt que de s'endetter tant et plus auprès des banques ou des marchés financiers.
    ► Impôt sur les grandes fortunes: Nous voulons accroître son rendement, non seulement en augmentant son barème, mais aussi en élargissant sa base; par exemple en faisant contribuer les fortunes professionnelles de façon modulée, selon que les entreprises concernées augmentent ou non l'emploi et la masse salariale, alors qu'aujourd'hui les équipements professionnels sont exonérés de l'ISF.
    ► Cotisations sociales patronales: Nous proposons de faire cotiser les revenus financiers des entreprises et des banques au même taux que les salaires.


    b) – On peut utiliser autrement l'argent des prélèvements obligatoires:
    ► Nous voulons un contrôle et une évaluation publics et sociaux de la dépense publique, au lieu d'un rationnement systématique avec la RGPP et la prétendue "règle d'or des finances publiques". Celle-ci ne vise qu' à faire entrer dans notre Constitution des principes pour dessaisir automatiquement les élus de la Nation de tout pouvoir de décision budgétaire et mieux conformer les dépenses de l'Etat, des collectivités territoriales et de la protection sociale aux normes des pactes de stabilité et de l'euro plus, aux injonctions de la BCE et des marchés financiers.
    ► Il faut en finir avec les baisses de cotisations sociales patronales au nom de la compétitivité (et de l'emploi qui en dépendrait). Nous voulons, pour accroître l'efficacité sociale des entreprises, non pas baisser les "charges sociales", comme le préconisent la droite et le PS, mais pérenniser un financement efficace de la protection sociale et baisser les charges financières des entreprises (intérêts payés sur les crédits).
    Pour cela, nous proposons:

- De réformer le calcul des cotisations sociales pour accroitre durablement leurs recettes: Leur taux serait modulé de façon à décourager la croissance financière, les politiques salariales régressives et à encourager la création d'emplois et de formations correctement rémunérés;

- De dédier à un Fonds national de sécurisation de l'emploi et de la formation les quelque 30 milliards d'euros d'argent public aujourd'hui utilisés à baisser les "charges sociales". Cet argent servirait à prendre d'autant plus en charge les intérêts payés aux banques par les entreprises sur leurs crédits pour l'investissement matériel et de recherche que celui ci programmerait plus d'emplois, de formations correctement rémunérés et de progrès écologiques.

- Décentralisé au niveau régional, ce Fonds national serait partie prenante d'un pôle bancaire et financier public à partir de la Caisse des dépôts, des autres institutions financières publiques ou semi-publiques et de banques re-nationalisées. Ce pôle aura pour mission de développer, sous contrôle social, un nouveau crédit pour l'investissement des entreprises dont le taux d’intérêt serait d'autant plus abaissé, jusqu'à devenir nul, voire négatif, que cet investissement programmerait plus d'emplois et de formations correctement rémunérés.

Tout cela permettra un vigoureux essor de la croissance des richesses réelles et, donc, des recettes publiques en impôts et cotisations, tandis que reculerait la spéculation en France.

c)- On peut faire appel à la création monétaire de la BCE:

C'est ce que font aujourd'hui la FED et la Banque d'Angleterre, à la différence de la BCE. Mais elles le font pour soutenir les dépenses d'armement, les cadeaux fiscaux aux riches, les profits financiers des banques et des groupes, les placements financiers,la spéculation...
La BCE a été contrainte de transgresser ses propres dogmes monétaristes, sous le poids de la crise. Désormais, elle rachète des titres de dette publique des États en difficulté, mais pas directement auprès d'eux sur le "marché primaire", ni pour aider au développement des dépenses de services publics et pour la croissance réelle.
Elle les achète sur le "marché secondaire", auprès des banques qui détiennent ces titres afin de continuer la course folle à l'endettement sur les marchés financiers...où les banques achètent les nouveaux titres de dette publique émis à taux d'intérêt élevés avec, notamment, l'argent que leur prête la BCE à 1%!
Il faut absolument que la création monétaire de la BCE serve à une vigoureuse relance des dépenses sociales et pour les services publiques.

  1. – Comment faire?


    a) – Des mesures immédiates pour le remboursement des dettes légitimes:
    Il est indispensable de commencer à frapper très durement les spéculateurs et mettre à contribution les institutions financières pour commencer à alléger celles de dettes publiques qui sont « légitimes ».
    La mise en place d'une taxe Tobin sur les transactions financières est plus nécessaire que jamais. En même temps, il faudrait mettre à contribution, par un prélèvement spécifique, les banques, les sociétés d'assurances, les OPCVM et tous les fonds spéculatifs, dans chaque pays et à l'échelle de l'Europe.
    Devraient être particulièrement pénalisés les opérateurs qui se sont assurés contre un risque de défaut grec (ou autre) dans un but essentiellement spéculatif. Il s'agirait, ce faisant, d'en finir avec les instruments financiers du type des « CDS » (Credit default swap).Les fonds publics ainsi collectés devront être affectés à une réduction de la dette publique grecque.
    En même temps qu'il faut refuser tout plan d'austérité en France et en Europe et, au contraire, augmenter les dépenses pour les services publics, il faut exiger que la création monétaire de la BCE soit sollicitée à cette fin.
    Ça suffit cette BCE qui n'a de compte à rendre à personne et qui se permet de détailler aux États en difficulté, par dessus les peuples et leurs élus, les mesures qu'ils doivent prendre!


    b) – L'enjeu majeur: créer un Fonds social et solidaire pour le développement européen:
    ► Ni "eurobligations", ni sortie de l'euro...
    Sortir de l'euro ferait redoubler les difficultés et la spéculation, exacerberait les rivalités entre Européens et, au total, consoliderait la domination mondiale du dollar, pourtant elle-même en crise très profonde. Surtout, cela reviendrait à se priver de la force d'une création monétaire commune à l'échelle européenne et, alors, à se contenter de conditions de financement qui serait très limitée, à l'heure de la mondialisation, par rapport à des pays-continent comme les États-Unis ou la Chine.
    Le bond en avant dans le fédéralisme européen, avec notamment l'émission d'euro-obligations, ne contribuerait qu'à éloigner encore plus les centres de pouvoir des salariés, des peuples et de leurs élus, pour les concentrer au service de la domination des marchés financiers.
    De plus, les euro-obligations interdiraient de conduire des politiques différenciées selon les besoins propres de chaque pays, de chaque région. Émises au nom de la zone euro prise comme un tout elles imposeraient, pour garder leur notation, aux pays les plus faibles en termes de productivité de s'aligner sur les normes des pays qui dominent, Allemagne en tête, et pousserait vers une politique budgétaire unique.
    Non, l'enjeu est bien celui de commencer à rompre, de façon cohérente et pas seulement en paroles, avec cette logique qui consiste à faire accumuler de nouvelle dettes, pour tenter de régler celles en cours, en empruntant toujours plus sur les marchés financiers.
    ► Utiliser l'euro et la BCE autrement:
    De partout on voit grandir les luttes sociales en Europe et dans le monde. Le développement récent des mouvement des "indignés" le confirme. Toutes ces luttes cherchent à tâtons les voies de constructions politiques qui permettraient enfin de s'émanciper de la dictature des marchés, de la course aux armements et de disposer des moyens financiers et des pouvoirs pour imposer des solutions conformes à leurs besoins sociaux et culturels de développement.
    Ces luttes ont besoin de converger vers de grandes exigences formant cohérence alternative face à la cohérence des "adorateurs du veau d'or".
    Il faut viser une autre utilisation de l'euro, de la création monétaire de la BCE, du crédit bancaire, des fonds publics nationaux et européens pour de nouvelles interventions de solidarité européenne des États. Mais cela, non pour renforcer la domination des banques et l'hégémonie d'un noyau autour de l'Allemagne (fédéralisme), mais pour un développement de progrès social et un rattrapage effectif des retards de productivité des pays en difficulté.

  2. Le PCF, dans le Front de gauche, et le Parti de la gauche européenne (PGE) proposent de construire un Fonds social et solidaire pour le développement européen.
    Seraient ainsi émis des titres nationaux de dette publique rachetés par la BCE à un taux d'intérêt nul dont les recettes alimenteraient ce nouveau Fonds. Celui-ci serait chargé de les répartir, démocratiquement, entre chaque pays, selon leurs besoins respectifs, dans le but, expressément, de développer leurs services publics et leur potentiel de croissance sociale nouvelle, en coopération, au lieu d'une création monétaire inflationniste.
    La dénonciation du pacte de stabilité, le rejet déterminé du pacte de l'euro +, marcheraient alors de paire avec le lancement d'un nouveau pacte pour une croissance sociale, écologique et solidaire européenne.
    Il s'agirait, inséparablement, de réorienter la politique monétaire de la BCE dont le contrôle devrait être assuré par les parlements européen et nationaux, au lieu de l'indépendance actuelle au service de la domination des marchés financiers.
    Le taux d'intérêt auquel elle assure le refinancement des banques ordinaires devrait être modulé: il devrait être d'autant plus abaissé, jusqu'à être nul, voire négatif, que les crédits que la BCE refinance servent à des investissement programmant plus de d'emplois et de formation correctement rémunérés. Ce taux d'intérêt serait, par contre, d'autant plus relevé que les crédits à refinancer serviraient à spéculer, délocaliser ou diminuer les masses salariales.
    c)- Une affaire mondiale et pas seulement européenne:
    Il faut en finir avec la dictature des agences de notation privées pour le compte des marchés financiers et la spéculation. Cela nécessite une profonde transformation du système monétaire international dans le cadre d'une nouvelle conférence mondiale qui serait au moins de la portée de celle de Bretton Woods de 1944.
    L' Europe peut jouer un rôle majeur dans ce sens, de concert avec sa propre transformation, à l'appui des luttes:
    - En se tournant vers les besoins énormes de développement du monde arabe en révolution et de l'Afrique sub-Sahara avec un nouveau plan de type Marshall sans domination;
    - En se rapprochant des pays émergents pour faire reculer le rôle du dollar et aller vers la création d'une monnaie commune mondiale de coopération, à partir des droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI, comme l'envisagent désormais explicitement la Chine, la Russie, la CNUCED... et d'une refondation des institutions monétaires, financières et commerciales internationales. YVES DIMICOLI

 

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16 septembre 2011 5 16 /09 /septembre /2011 06:00

Comment des révolutionnaires proclamés et M. Dominique Strauss-Kahn peuvent-ils simultanément invoquer Jean Jaurès ? Pourquoi continue-t-on de se demander si le tribun pacifiste qui harangua en 1913 les foules du Pré-Saint-Gervais contre la prolongation du service militaire aurait, un an plus tard, rejoint l’Union sacrée lors du déclenchement de la première guerre mondiale ? Peut-être le journaliste Jaurès, auteur prolifique (1312 articles dans La Dépêche de Toulouse, 2650 dans L’Humanité), a-t-il produit tellement de munitions que celles-ci ont pu ensuite alimenter toutes les artilleries intellectuelles. Le chef socialiste « n’a pas peur de se répéter », de frapper sur le même clou. Mais, dans une période aussi agitée que la sienne (1859-1914), on doit parfois modifier son appréciation des dangers et des priorités. La défense de la laïcité, par exemple, devient moins pressante quand l’Eglise « n’est plus capable de grands élans » et quand « l’argent menace plus que le cléricalisme ». Selon Charles Sylvestre, deux fils rouges équilibrent néanmoins chez Jaurès tous les changements de perspective et permettent, aujourd’hui encore, de distinguer les disciples des imposteurs : « Faire du sort réservé aux ouvriers la mesure en tout » ; « Qui ne pose pas la question de la propriété n’est pas socialiste ». Serge Halimi , Le Monde Diplomatique

 

 

  la passion du journalisme

 

 

Charles Silvestre, ancien journaliste et rédacteur en chef adjoint de l'Humanité, président de l'association des Amis de l'Humanité, sera invité par la section PCF de Morlaix le lundi 7 novembre à 20h, salle du Cheval Blanc à Plourin les Morlaix, pour y animer une conférence-débat sur "Jaurès journaliste". Cet homme passionné et truculent cherchera à retrouver les moments d'élaboration d'une pensée politique au fil des évènements qui interpellaient Jaurès chroniqueur de l'actualité (le boulangisme, le scandale de Panama, la répression des grandes grèves de mineurs, viticulteurs, fonctionnaires, l'affaire Dreyfus, les aventures coloniales...).

 
 

 

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3 juillet 2011 7 03 /07 /juillet /2011 22:00

Réunion publique organisée par la section PCF de Morlaix le 4 juillet à Plourin les Morlaix.   

 

 I. Introduction par Daniel Ravasio:

 

Réforme territoriale: halte au massacre.

 

Le Préfet du Finistère a lancé une consultation sur le projet de schéma départemental de la coopération intercommunale concocté par ses services. Toutes les communes, les communautés de communes et d’agglomération, les syndicats intercommunaux vont devoir rapidement se prononcer (sans consultation de la population).  Cette consultation s’intègre dans la réforme des collectivités locales votée de justesse en décembre 2010.

 

Revenons donc pour entamer notre réunion, notre débat sur cette réforme.

Le gouvernement a pour objectif prioritaire de faire des coupes sombres dans les dépenses publiques jugées excessives, budgétivores, responsables de la dette publique … et j’en passe. Pour ce faire il a trouvé un outil terriblement efficace, tout en mettant au pas la démocratie locale : la réforme des collectivités territoriales. Le remodelage administratif et politique devrait prendre effet d’ici 2 à 3 ans. Que prévoit-elle ?

 

Suppression progressive de l’essentiel des communes et à terme de tous les départements transformés, avant leurs disparitions, en rouages captifs et dociles de l’État.

-Regroupement autoritaire en intercommunalité.

 -Transfert de compétences à la majorité simple.

Incitation financière illusoire pour la transformation des intercommunalités en « commune nouvelle ».

Financements croisés quasiment interdits (alors qu’ils représentent 5 % des dépenses globales).

Obligation pour les collectivités de financer leurs projets à 50 % sur leurs fonds propres.

-Compétence générale supprimée sauf pour les communes… qui n’auront plus les moyens de l’exercer.

 

-Constitution de féodalités avec des super-régions et métropoles.

 

Avec cette réforme le gouvernement prétend s’attaquer au « mille feuille » des institutions. En réalité elle se traduira par la création des super-territoires qui seront des monstres éloignés des citoyens, des « archipels » du profit financier !

 

Éloignement le plus possible des citoyens des lieux de décision.

 

-Création de conseillers territoriaux cumulant des pouvoirs rendant impossible leurs fonctions avec la proximité des citoyens et transformés en élus techniciens.

 

- 5660 conseillers généraux et régionaux seraient remplacés par 3471 conseillers territoriaux élus sans contraintes de parité (alors que lae scrutin de liste avec proportionnelle oblige et permet donc cette parité) et de non – cumul des mandats.

 

-Au nom d’un développement de la coopération intercommunale rationalisation (quel bon mot bien à la mode !) de la carte des syndicats intercommunaux par regroupement dans des structures plus larges (départementales voire régionales).

-Absence de moyens supplémentaires pour un exercice élargi de la citoyenneté.

 

Retour d’un État qui ne paye rien et commande tout. L’arbitraire est de retour avec le « Grand Paris », des préfets omnipotents, la « RGPP » qui réduit à peau de chagrin les services déconcentrés de l’État. Le monde associatif, sportif et culturel est en détresse financière.

 

Division par deux des agents de la fonction publique territoriale. Alors qu’ils sont les acteurs irremplaçables des services publics de proximité, alors que les collectivités sont des amortisseurs des désastres sociaux provoqués par la crise.

 

C’est un boulevard pour la privatisation des services publics, « leur externalisation ».

- C’est une catastrophe pour les personnels et les petites communes.

 

L'étranglement financier des collectivités locales est un coup de grâce qui sonne l’agonie financière de ces collectivités Comment : en supprimant la taxe professionnelle. Créée par Jacques Chirac, la taxe professionnelle, un impôt légitime qui responsabilise les entreprises, a été sommairement jugée « impôt imbécile » Au lieu de la moderniser, notamment par la taxation du capital financier, au lieu de s’assurer d’abord de la santé financière des comptes publics, elle est supprimée à la hussarde. Là aussi, les citoyens seront les principales victimes ! Que l’on juge sur pièces : la taxe professionnelle représente 50 % des ressources fiscales des communes. Les ménages contribuent pour les autres à 50 %. Avec la réforme, les recettes fiscales proviendront pour les 2/3 des ménages et seulement pour 1/3 des entreprises. On en rigole encore au MEDEF !

Une bonne réforme des institutions, c’est aller dans le sens du progrès:

 

- Plus de démocratie locale : Priorité à plus de pouvoirs aux citoyens et au vivre ensemble

- Plus de moyens pour satisfaire les droits humains et plus de justice sociale

-  Sortir de l’asphyxie financière par des moyens financiers solidaires et une fiscalité modernisée et progressive responsabilisant la sphère de l’économie et de la finance

-  Encourager les collectivités à promouvoir un nouveau mode de développement, une écologie populaire

-  Mettre au coeur des politiques locales les mutualisations, les partenariats, les coopérations, un aménagement du territoire fondé sur la solidarité, affirmant le besoin d’un développement harmonieux de la ruralité, complémentaire d’une construction urbaine, économe en ressources naturelles, imprimant un nouveau type de développement à tous les territoires

Plus de services publics par un plan de reconquête, de développement, d’amélioration et de financement, de création de services publics

 

C'est UNE LUTTE HISTORIQUE : Il ne faut pas laisser passer cette entreprise de démolition des richesses, des talents, des innovations et des sagesses de notre démocratie de proximité !

 

II. Explication du projet préfectoral et synthèse du document de schéma de coopération intercommunale (par François Plassart).

 

La loi du 16 décembre 2010 prévoit d'achever la carte communale des EPCI, de rationaliser la carte communale des EPCI, de supprimer et de transférer les compétences des syndicats inter-communaux (voirie, gestion des collèges, des centres de secours, des transports scolaires...). Le Finistère était plutôt en pointe sur le passage à un maillage de tout le territoire par des communautés de commune de plus de 5000 habitants. Aucune commune avait refusé son intégration à une communauté de commune à part Ouessant et Molène, îles qui ont des intérêts spécifiques: le Préfet les laisse décider souverainement de leur intégration ou non à une EPCI et accepte tacitement qu'elles gardent leur statut. De même, il fait des concessions pour avancer sur d'autres dossiers sur les 2 EPCI de moins de 5000 habitants du Finistère: Yeun Elez et communauté de communes des Monts d'Arrée. En revanche, le préfet exige la dissolution des syndicats locaux d'électrification, de gestion de la distribution de l'eau (avec une concession éventuellement qui consisterait à créer deux syndicats départementaux d'harmonisation de la gestion de l'eau dans le Finistère Nord et le Finistère Sud), et la départementalisation de ces compétences. D'ailleurs, la réforme territoriale avait été lancée avant l'heure, dès 2007, par le Préfet, pour ce qui est de la gestion de la compétence électricité.

 

III. Enjeux de cette application de la réforme territoriale aux communautés de commune (par Ismaël Dupont).

 

Quelles sont les principales critiques que l'on peut faire au contenu même de cette réforme?

 

C'est une remise en cause de la démocratie locale, de la décentralisation et de la spécificité française et républicaine d'un territoire maillé par 36000 communes dans lesquels des élus proches de leurs concitoyens cherchent à répondre au mieux à leurs besoins en intervenant auprès d'autres échelons de l'Etat.  

 

 

D'abord la méthode employée pour mettre en oeuvre rapidement cette réforme grâce à des pouvoirs exhorbitants confiés au Préfet pour vaincre les résistances au niveau des élus locaux dont on réduit considérablement les prérogatives et les marges de manoeuvre témoigne d'une forme d'autoritarisme jacobin en cohérence avec le contenu de cette réforme des collectivités territoriales qui revient en arrière par rapport aux réformes de décentralisation menées depuis le début des années 80.

Les collectivités deviennent de simples rouages de l'Etat: le préfet les transforme et réduit les compétences des communes en les consultant pour la forme mais sans leur reconnaître aucune forme de souveraineté pour décider de leur avenir. Les conseils communautaires et municipaux n'ont qu'un avis consultatif à émettre par rapport au schéma de coopération intercommunale remis par le préfet. Si pas ils n'émettent pas d'avis au bout de 2 mois jusqu'à la fin juillet, cela vaut pour accord... Exemple: pour le regroupement départemental des syndicats mixtes d'électrification, une seule réunion de la Commission Départementale de Coopération Intercommunale (CDCI) présidée par le préfet: compte rendu biaisé pour servir les intérêts de la réforme.

 

Cette réforme, c'est la casse d'une démocratie de proximité qui n'est pas achevée ni irréprochable dans son fonctionnement actuel, mais qui est moins en crise que la démocratie à l'échelon national, les citoyens faisant davantage confiance à leurs élus locaux, réputés plus abordables, plus dévoués à l'intérêt général. La droite veut manifestement éloigner la population des instances et des espaces de décision et déssaisir les élus locaux d'une partie de leurs missions.

S'y substitueront des super-élus techniciens ou managers ayant moins de compte à rendre directement à leurs concitoyens et aux décisions et actions moins connues du grand nombre, et plus sûrement encore des administrateurs de collectivités aux dimensions hypertrophiées et aux règles de fonctionnement toujours plus complexes et inaccessibles au profane.

 

Ces réformes des compétences des communes et communautés de commune ne s'accompagnent pas d'une véritable démocratisation de leur fonctionnement. Le projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux abaisse de 3500 hab à 500 hab le seuil de population des communes auxquelles est applicable le scrutin de liste pour les élections municipales. Il prévoit une fausse élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires par un système de fléchage sur les listes communales. Nous aurions préféré deux élections séparées, avec des élus communautaires ne représentant plus leurs communes mais l'intérêt général de l'ensemble du pays sur lequel s'applique la gestion de la communauté de commune et élus sur un projet politique cohérent, connu, et partagé. Dans le projet de loi, il existe des objectifs acceptables pour limiter la sous-représentation et la sur-représentation des centres urbains dans les conseils des EPCI (Etablissements Publics de Coopération intercommunale): mais l'équilibre déliquat à trouver et les mesures avancées sont d'une efficacité douteuse.

Nous proposons nous une véritable transformation de la démocratie locale qui passe par des moyens financiers de fonctionnement restaurés pour la démocratie locale et les élus locaux (VS. Suppression de la taxe professionnelle- coût de 7 milliards d'euros pour les collectivités, 50% des recettes fiscales des communes- transferts de compétence non compensés), une valorisation du rôle et du travail des élus (statut plus protecteur, droit à la formation et à la reconversion...), l'instauration de la proportionnelle à toutes les élections (dans la réforme des collectivités territoriales, scrutin uninominal à un tour par circonscription -canton- pour 80% des élus territoriaux, les 20% restant se partagageant entre les candidats et les partis ayant fait les meilleurs scores derrière), la limitation du cumul des mandats (aller vers un mandat unique?) et le respect de la parité, le droit de vote et d'éligibilité pour tous les résidents étrangers. Nous voulons surtout instituer un partage des décisions entre élus et citoyens en systématisant le recours à la démocratie participative: ateliers et panels de citoyens tirés au sort ou volontaires, budgets participatifs, association à l'élaboration des décisions budgétaires.

 

On peut parler aussi d'une réforme territoriale néo-libérale qui remet en cause la qualité des services publics de proximité et offre un boulevard pour de nouvelles externalisation ou privatisation des missions d'intérêt général assurées jusqu'ici dans le cadre de la fonction publique.

 

On peut, pour rappeler les motivations de cette réforme des collectivités territoriales, en faire un petit historique. Objectifs de la RGPP: faire des économies d'argent public en rationalisant et optimisant les fonctionnements des services publics, des collectivités; en diminuant le nombre de fonctionnaires dans le but de désendetter, de diminuer les impôts, de transférer au privé supposé gérer de manière optimale certaines activités de service, et d'accroître la compétitivité de l'économie française.

Le total des dépenses des collectivités locales représente environ 200 milliards d'euros – 20% de la dépense publique- et a augmenté beaucoup plus fortement depuis 2000 que le budget de l'Etat et de la Sécurité sociale sous l'influence des transferts de compétence liées aux décentralisations Raffarin et à l'autonomie budgétaire relative et contrainte (car moins d'aides directes de l'Etat qui diminue lui même ses impôts directs et les impôts des entreprises) des collectivités locales. Depuis 2007, effectifs de la fonction publique territoriale augmentent de 5,2% là où les effectifs de la fonction publique d'Etat diminuent. Un des buts de la réforme des collectivités territoriales proposée par le comité Balladur en 2009 (et entérinée en novembre 2010 au Sénat par une courte majorité de 4 voix) est de réduire l'emploi public, la dépense publique, et le champ d'intervention du service public.

 

Avec les pertes de ressources pour les communes liées à la dissolution des syndicats mixtes locaux à compétence unique qui rapportaient des recettes telles que l'électrification et la gestion de la distribution de l'eau, comment vont-elles payer leurs agents?

 

La création dans le cadre de la réforme territoriale de grandes structures (EPCI, métropoles aux compétences élargies, sociétés publiques départementales de gestion de l'énergie) laisse à penser que les collectivités recouriront plus facilement sans doute à des externalisations d'activité confiées à des opérateurs privés, à des DSP... On peut certes négocier des contrats plus avantageux à un niveau supérieur d'organisation territoriale mais on est également sans doute plus en congruence avec les intérêts financiers, plus sensible à l'action des lobbies. Le futur des régies directes municipales et intercommunales de gestion de l'eau est très compromis et il est frappant que départementalise la gestion de la distribution qui rapporte de l'argent tandis que l'on garde au niveau des EPCI la gestion de l'assainissement qui coûte de l'argent.

 

En créant des EPCI et des syndicats de coopération départementale surdimensionnés, des usines à gaz, on risque de donner plus de champ à une technocratie moins efficace que les élus de proximité, ce qui pourra donner lieu à des décisions coûteuses et moins directement en phase avec les besoins sociaux, mais aussi à des dépenses de personnel plus fortes. De plus, des structures plus lourdes, s'exerçant sur un plus vaste territoritoire, ont tendance à coûter plus chères. Si on fait des économies dès lors, ce ne sera pas tant, comme l'a dit François Plassart lors d'une réunion de préparation, des économies de fonctionnement que des économies de non fonctionnement (délais d'intervention qui découragent la demande, besoins non satisfaits faute d'interlocuteurs disponibles et de réponse rapide...).

 

IV. Le débat.

 

Martine Carn fait remarquer que les communes ont 3 mois pour donner leur avis et que le principe « Qui ne dit mot consent ». Cette procédure accélérée n'est pas innocente: elle vise à empêcher les conseillers municipaux déjà débordés de prendre le recul de la réflexion et du débat sur ce texte. Une inquiétude forte sur la gestion de l'eau, assurée par un syndicat public à Plougonven et Plourin. Si cette distribution d'eau part dans une grande firme, les citoyens vont voir le coût de leur facture d'eau tripler ou quadrupler. Or, actuellement, les régies publiques de l'eau fonctionnent très bien. Comme pour les syndicats de l'électricité, dont les budgets additionnés au niveau du département équivalent au budget du Conseil Général, il semble que de gros prédateurs s'intéressent à ces marchés. Les élus sont remontés contre ce projet préfectoral qui passera de toute façon quoiqu'ils en pensent, d'autant qu'ils s'inquiètent sur la périnnité des recettes de leurs collectivités. Cette année, l'Etat a versé en dotation la même somme qui était prévue dans le cadre de la taxe professionnelle, mais qu'en sera t-il l'an prochain?

 

François Plassart fait remarquer que les communautés de commune vont être obligées de prendre des compétences des syndicats mixtes avec des charges supplémentaires: elles aussi vont sans doute être contraintes de réduire de moitié leur personnel.

 

Jean Luc Le Calvez rappelle que ce sont les élus communistes au Sénat qui ont pris la tête de la fronde contre la réforme des collectivités territoriales et qu'ils ont été écoutés au-delà de leur camp.

 

Daniel Ravasio rappelle pour exemple qu'à Saint Thegonnec, la gestion de l'eau est assurée par un syndicat intercommunal à cheval sur deux communautés de commune: qui va prendre en charge cette compétence?

 

Martine Carn rappelle que le citoyen n'aura plus dans quelques mois de référent au niveau de la commune quand il aura un souci. Le but est aussi de supprimer de multiples communes rurales ou de réduire leurs compétences à la plus simple expression: état civil, arbitrage pour prévenir les conflits de voisinage, ramassage des chiens et des chats crevés. Comment vont se débrouiller les communes qui ont investi dans des maisons médicales? Celles qui perdent leur bureau de poste?

 

Marie-Hélène Le Guen nous dit que tout ce tient: la reconversion forcée des employés de la fonction publique territoriale, la loi du licenciement des fonctionnaires en cas de refus de 3 propositions d'emplois, l'objectif de non remplacement d'un fonctionnaire sur deux. On face de nous: il y a des gens qui pensent et qui ont un agenda précis pour transformer le service public en champ de ruine sur lequel pourront se faire des affaires. Ils procèdent avec méthode, progressivement.

 

Alain David affirme que les choses se sont organisées de manière méthodique ces dernbières années, le but étant qu'aucun aspect de la vie de la société ne doit échapper aux organismes financiers. Aujourd'hui, 75% des investissements sont gérés par des collectivités locales qui ont aussi la compétence des services à la personne en pleine expansion à assurer. C'est une masse de pognon qui échappe pour l'instant, mais peut-être pas pour longtemps, aux intérêts financiers. Le processus de la réforme territoriale a débuté par la mise sous tutelle de toutes les collectivités locales liée à la suppression de la taxe professionnelle, qui leur enlève le pouvoir de gérer leurs propres recettes, désormais constituées essentiellement de dotations de l'Etat. Il y a eu de fortes oppositions chez les élus locaux, au Sénat et à l'Assemblée, quand la réforme des collectivités territoriales s'est mise en place mais ceux qui qui étaient bec et ongle contre ces textes sont-ils prêts à les remettre en cause quand ils seront au pouvoir. C'est moins sûr.

 

Ismaël Dupont rappelle qu'en effet cette réforme renforce les logiques de concurrence entre les territoires, que ne désapprouve pas les socialistes tout à leur obsession de la compétitivité dans le cadre de l'adaptation à la mondialisation libérale. De plus, elle renforce le bipartisme par le mode d'élection honteux et anti-démocratique des conseillers territoriaux (80% d'entre eux seront élus lors d'un scrutin uninominal à un tour qui renforcera mécaniquement l'UMP et le PS et les 20% de sièges de conseillers territoriaux restant à répartir à la proportionnelle iront encore à 50 ou 60% à l'UMP ou au PS, les autres partis et sensibilités politiques n'ayant qu'à récolter les restes). Il faut je pense subordonner des accords électoraux avec le PS à l'abrogation de la réforme territoriale et des institutions étouffantes de la Vème République, à l'acceptation de la proportionnelle aux élections.

 

Alain David: Ce qu'on cherche à gommer avec cette réforme, c'est la spécificité française du pluralisme politique et de la possibilité de l'alternative. Le bipartisme, c'est: on change de dirigeants mais on ne change pas de politique.

 

Martine Carn: La population n'a pas été mise au courant de cette réforme. Il n'y a pas d'information dans les journaux régionaux que lisent les gens, ou alors biaisée. Mais il est vrai qu'entre les gens victimes de la crise qui sont englués dans leur problème et auxquels personne ne prête attention et les autres, complètement déploitisés, qui ne songent qu'à agrandir leur terrasse ou s'acheter une voiture plus puissante que le voisin, c'est difficile de faire bouger les gens.

 

A la fin de la réunion, l'assemblée prend plusieurs décisions pour organiser la riposte contre cette réforme des collectivités territoriales, sensibiliser la population et les élus à ses enjeux: 1) conférence de presse avec les élus locaux communistes et sympathisants des pays de Morlaix, Saint Pol, Lanmeur 2) envoi d'une lettre d'explication et d'argumentaire aux élus de la région 3) diffusion d'un tract assorti peut-être d'une pétition pour alerter la population sur les risques de destruction des services publics de proximité liés à cette réforme.

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8 juin 2011 3 08 /06 /juin /2011 11:27

 

 

Après avoir présenté les intervenants (Jean-Yves Guézenec et Alain Rebours) et la démarche de co-élaboration de notre programme dans le cadre de ces débats pour construire un programme partagé, celui-ci étant le troisième après ceux portant sur les services publics en janvier, puis la démocratie et les institutions en avril, Jean-Luc Le Calvez a rappelé que le maire, Agnès Le Brun, nous avait refusé sous des prétextes un peu douteux la salle de MAJ à la Boissière pour accueillir la réunion. Yves Abramovicz a fait remarqué qu'il était inacceptable qu'en nous imposant cette salle située au premier étage sans ascenseur, on accepte d'exclure d'emblée que des handicapés puissent assister à une réunion citoyenne. Hervé Penven (père) a rappelé ensuite que la salle du rez de chaussée prétendument réservée aux services techniques que la mairie nous a refusée trouvait en réalité couramment un usage pour des réunions de quartier. Christian, sympathisant du Front de Gauche, a donc émis la suggestion d'adresser un courrier au maire et à la presse émanant de toute l'assistance de cette réunion, et non pas seulement des trois organisations du Front de Gauche (PCF, GU, Pa rti de Gauche), qui serait signé par tous, et il s'est engagé à le rediger.

 

Exposé sur l'énergie de Jean-Yves Guézenec

(militant communiste des Côtes d'Armor, ancien ingénieur dans le nucléaire, membre de la commission nationale du PCF sur l'énergie).  

 

On est à l'aube d'un changement de civilisation. La facilité d'utiliser le pétrole, qui a permis un étalement des villes, touche à sa fin. Autant on a observé une transition douce, dans une forme de continuité dans le transmission de relais entre le bois et le charbon, puis entre le charbon et le pétrole, la source d'énergie la plus archaïque continuant à chaque fois à être utilisée, autant l'épuisement des réserves d'énergie fossile annonce une transition dure. En effet, aujourd'hui, les énergies consommées dans le monde sont essentiellement d'origine fossile: pétrole: 34%; charbon: 27%; gaz:21%. L'électricité dans le monde ne provient elle-même qu'à 14% du nucléaire, 21% du gaz, 42% du charbon, 16% de l'hydraulique.

Or, il va falloir d'ici quelques années, du fait de l'augmentation de la population, multiplier par 2 ou par 3 la consommation mondiale. Il faudra plus d'énergie pour les transports, l'agriculture et la pêche. Parallèlement, la lutte contre le dérèglement climatique lancée dans les institutions internationales aux sommets de Rio, Kyoto, Copenhague, impose de limiter les émissions de gaz à effet de serre de 3 gigatonnes par an afin de limiter le réchauffement climatique à moins de 2 degrés. Si l'on y regarde de près, la mise en œuvre de cet objectif impose de ne pas délaisser mais au contraire de développer le nucléaire: par exemple, 1kwh 'électricité produit en Allemagne est source de 7 fois plus d'émission de CO2 qu'1 kwh produit en France.

Les énergies de substitution sans carbone sont le nucléaire, l'hydraulique, l'éolien, le solaire, la biomasse, la géothermie.

Ne nous le cachons pas, le nucléaire est une industrie dangereuse: elle l'est d'abord du fait de son utilisation militaire, ensuite du fait du risque d'accidents graves sur les réacteurs dus pour Jean-Yves Guézéguel à Three Mile Island, Tchernobyl, Fukushima à des erreurs de conception sur les centrales et à une mauvaise organisation des autorités de sûreté que l'on peut éviter. Quant aux déchets nucléaires, pour JY Guézéguel, on surestime largement leurs dangers une fois enterrés: on devrait davantage parler à son sens des dangers des déchets de l'industrie chimique. Selon notre intervenant, la baisse des réserves d'uranium pourrait être conjurée et on pourrait produire quasiment pour 3000 ans d'électricité provenant du nucléaire si on mettait réellement en œuvre des réacteurs de la génération 4 (du type Superphénix, arrêté par le gouvernement Jospin) utilisant de l'uranium appauvri, résidu de l'activité des réacteurs classiques. J.Y Guézénec regrette qu'en ait arrêté de construire des centrales nucléaires pendant 15 ans, risquant ainsi de perdre un savoir-faire précieux. Il pense qu'à l'avenir, les pays développés ne pourront pas se passer de nucléaire et qu'il serait raisonnable de réserver le maximum d'énergie fossile aux pays pauvres.

Les autres énergies décarbonées alternatives au nucléaire présentent aussi certains inconvénients et ne peuvent se substituer totalement aux énergies fossiles. Le problème de l'éolien, c'est son intermittence. Les variations de puissance peuvent être très rapides. L'éolien peut mettre en cause la stabilité du réseau. J.Y Jézéguel regrette également l'espèce de « bulle spéculative » qui s'est créé avec les déductions fiscales et le rachat par EDF à prix surévalué de l'énergie émanant du photovoltaïque. La géothermie exigerait une mutualisation des puits et ne serait pas non plus sans dommage sur l'environnement car on fracture la roche.

Le problème de l'énergie nous place en face de chantiers économico-politiques:

 

  • créer un pôle public de l'énergie.

  • Quelles actions pour réduire les gaz à effet de serre? Résister à l'engouement pour le gaz?

  • Abrogation de la loi NOME qui impose à EDF de céder à bas prix l'énergie qu'elle produit à des opérateurs privés qui lui font concurrence et revendent l'électricité plus cher.

  • Créer un statut plus sécurisé pour les travailleurs du nucléaire.

  • Créer une traçabilité du carbone en Europe.

 

Alain Rebours (militant de la Gauche Unitaire du pays de Morlaix).

 

Je pense qu'au fond le débat sur « Quel type d'énergie? » pose au préalable la question de savoir quel type de société, quels types de conditions de production et de consommation nous voulons.

S'il ne nous reste que 30 ans de pétrole, les réserves d'uranium extractibles si le nucléaire tend à se développement en remplacement des énergies fossiles n'iront elles pas au-delà de 20 ans. La question qu'on doit se poser quand on a un débat sur l'énergie, c'est pas: quel type d'énergie? Mais: quel type de croissance, quel type de société voulons-nous?

Le débat est rendu difficile pour plusieurs raisons. D'abord, il n'y a pas de transparence sur ces questions qui impliquent l'existence de lobbies, d'intérêts financiers puissants. Les experts ne sont pas hors idéologie, hors pression des acteurs privés: leur indépendance est en général toute relative. L'énergie est un secteur où l'on utilise le secret au nom de l'intérêt national, de la compétition industrielle, de la question militaire.

Un des enjeux essentiels de la question de l'énergie, c'est la possibilité du débat démocratique. Or, quelles sont nos propositions communes, les propositions du Front de Gauche? Quelle politique mettrions-nous collectivement en œuvre si nous étions appelés à gouverner en 2012?

 

 

  • Il y a d'abord l'exigence d'une maîtrise publique du secteur de l'énergie dans la mesure où le système capitaliste et les logiques de marché servent des intérêts privés et non l'intérêt général. Cette maîtrise publique de l'énergie implique une renationalisation d'EDF, de GDF, d'Areva et de Total, condition pour mettre ces entreprises sous pilotage citoyen et démocratique, et une planification impliquant cadres contraignants et investissements de l'État pour entreprendre une conversion écologique.

  • Ensuite, nous créerons les conditions pour qu'ait lieu un grand débat public national sur la politique énergétique en France: quel type de croissance voulons-nous? Quel effort allons nous faire pour trouver des alternatives aux énergies fossiles et carbonées et comment allons-nous réduire nos consommations d'énergie? Faut-il faire le virage d'une sortie progressive du nucléaire? En France, il faut constater que depuis les années 50, on a tout miser sur le nucléaire et que si on ne dispose pas de technologie et d'ingénieurs pour les énergies renouvelables, ce qui nous oblige à importer le photovoltaïque de Chine, l'éolien d'Allemagne, c'est parce que les investissements considérables effectués dans la filière nucléaire ont bridé la recherche sur les énergies renouvelables. Il faut également explorer la piste très intéressante de la geothermie profonde, ce qui est particulièrement valable en région parisienne.

  • Il y a bien sûr une nécessité absolue de réduire la consommation d'énergie, mais il faut faire attention à ne pas pénaliser les plus pauvres, aujourd'hui très touchés par exemple par l'augmentation des prix du gaz et du carburant. Il faut définir une sorte de « code de conduite », de « registre des usages identiques » luttant en priorité contre les gaspillages ostentatoires d'énergie par les riches et facilitant la consommation d'énergie pour satisfaire les vrais besoins.

Sur la question du nucléaire, les forces du Front de Gauche sont divisées et ont trouvé le compromis du débat public suivi d'une consultation du peuple. Quand le précédent intervenant dit qu'on a eu tort d'arrêter Superphénix, cela m'apparaît absolument faux: en 12 ans, on a englouti 9,7 milliards dans ce projet, sans résultats probants. Il faut tout de même donner quelques arguments sur le nucléaire, qui sont une des raisons d'être de mon engagement en politique qui a commencé par la lutte contre les installations ou pour le démantèlement des réacteurs.

D'abord, on dit que le nucléaire serait une énergie propre. C'est valable si on met de côté les mines, les diffusions ordinaires de radioactivité autour des réacteurs, les déchets... Les mines d'uranium situées en Australie et au Canada principalement...

Elles sont hautement polluantes. Au Niger, rappellent deux intervenants anti-nucléaire dans la salle, les accords imposés par de Gaulle comme contrepartie à la décolonisation prévoyaient la possibilité pour la France d'acheter son uranium à très bas coût: résultat, en 50 ans d'extraction, plus de 20 milliards d'euros de manque à gagner pour ce pays qui est un des plus pauvres de la planète. Les communistes, qui se disent défenseurs de la solidarité internationale et du Tiers Monde, opposants au néo-colonialisme, devraient aussi prendre en compte cette réalité de la brutalité des rapports économiques internationaux sur laquelle est assise l'industrie nucléaire.

 

Ceux à quoi Yves Abramovitcz répond que ce ne sont pas les communistes qui ont extrait cet uranium et que c'est là leur faire un mauvais procès.  

 

Alain Rebours rappelle ensuite qu'on ne sait que faire des déchets nucléaires. Jusqu'à présent, on les enterre dans des fûts à 600 mètres sous terre. Or, il faut 170000 ans pour que le plutonium perde sa radioactivité et il n'y a pas d'autre façon de produire du nucléaire que de produire ces déchets là. Longtemps, les partisans du nucléaire ont placé toute leur confiance dans le progrès de la science en disant que pour l'instant, on ne savait pas faire, mais qu'immanquablement demain, on trouverait le truc qui résoudrait tous les problèmes... Mais le peut-être ne remplace pas une politique de prévention des risques.

Quant au risque de catastrophe nucléaire, il est d'une nature incomparable à celui de la catastrophe industrielle (telle AZF)... Pensons aux 800000 liquidateurs contaminés de Tchernobyl: 30 malades simplement selon l'AIEA... Pensons aux enfants nées avec malformation de Tchernobyl, ajoute Nicole Rizzoni.

Enfin, le développement du nucléaire civil est indissolublement lié à celui du nucléaire militaire: l'investissement dans le nucléaire militaire en France depuis les années 50 a représenté 230 milliards d'euros. Pensons à tout ce qu'on aurait pu faire avec cet argent... Aujourd'hui, 60% du fonds européen pour l'énergie est consacré au nucléaire. Ce n'est pas sérieux.

 

Hubert Peneau (Parti de Gauche) fait remarquer que le projet ITER dont le coût avait été sous-évalué est aujourd'hui évalué à 5 milliards d'euros supplémentaires.

 

Alain David: Il ne faut pas réduire cette question de l'énergie à un débat pour ou contre le nucléaire. Le problème de l'énergie est assez complexe pour qu'on évite les «il y a qu'à » et les « il faudrait que »....

La première urgence, c'est la réduction des gaz à effet de serre. La deuxième, c'est de trouver une réponse à des besoins en énergie qui croissent dans le monde du fait de l'augmentation de la population. C'est vrai que dans les sociétés développées, on peut faire des économies d'énergie, mais dans l'ensemble du monde, il y a beaucoup de besoins sociaux non satisfaits qui exige des productions nouvelles d'énergie. En troisième lieu, il faut s'interroger sur les moyens de trouver des alternatives aux énergies fossiles, fortement productrices de gaz à effet de serre et en voie d'extinction. Et il ne faut pas promouvoir n'importe quel type d'alternative, comme ces carburants de substitution que sont les agro-carburants et qui impliquent, pour produire de l'huile de palme ou de colza, déforestation et destruction de l'agriculture vivrière. Il y a une nécessité de trouver des équilibres. Il existe des substituts au pétrole qui produisent aussi des gaz à effet de serre. L'éolien et le solaire produisent une électricité qui ne se stocke pas. Ces sources d'énergie peuvent être utiles pour les heures de pointe mais elles posent un problème de continuité de la production. Le nucléaire a la contrainte inverse: une fois que cela produit, cela ne peut pas s'arrêter de produire, et il faut savoir que faire de l'électricité... Il nous faut donc un débat avec des experts libres, autant qu'ils puissent l'être, mais aussi un débat démocratique. Il ne faut toutefois pas évacuer la question de la critique du fonctionnement du capitalisme dans cette question de l'énergie et des défis environnementaux qu'elle soulève. Yves Cochet répondait il y a 15 jours à Morlaix à une de mes questions: le problème fondamental pour arriver à une sobriété énergétique et à un mode de vie durable, ce n'est pas le capitalisme mais le productivisme et vous êtes sur ce point (il le disait en croyant que j'étais socialiste) sur la même ligne que la droite, que l'UMP...

 

Michel Le Saint (EELV, groupe Idées):

Quelques remarques inspirées par les propos qui précèdent:

- Contrairement à ce que le premier intervenant a soutenu à l'aide d'une diapo représentant une courbe de corrélation, le niveau de consommation d'électricité n'est pas la cause de l'élévation de l'espérance de vie: il ne faut pas confondre corrélation et cause.

  • Certes, EDF est une entreprise publique mais il faut voir comment elle se comporte à l'étranger, avec quelles pratiques d'agressivité capitaliste pour prendre des marchés.

  • On ne soulignera jamais assez le lien indissociable entre le nucléaire civil et le nucléaire démocratique.

  • Ce n'est pas le statut public d'une entreprise qui garantit son fonctionnement démocratique.

  • L'estimation du coût du nucléaire en France est très largement sous-estimé: on ne prend pas en compte le coût des catastrophes possibles (non couvertes par les assurances), le coût de démantèlement des centrales nucléaires. Le nucléaire paraît peu cher mais c'est parce qu'on dissimule les coûts.

  • L'urgence pour nous, c'est la sobriété énergétique.

 

Jean-Yves Guézénec: c'est vrai qu'il n'y a pas de truc pour réduire les déchets nucléaires. Mais leur toxicité décroît dans le temps. Les déchets ultimes: on les enterre dans des conditions de sécurité satisfaisante. Les déchets radioactifs sont bien conditionnés: ils ne posent pas véritablement de problème technique mais un problème d'acceptation du public. Moi, j'ai davantage peur des déchets chimiques, mais on en parle très peu. Par rapport à la quantité d'uranium limitée, je réitère mes propos: la solution, c'était les surgénérateurs du type Phénix et Superphénix qui pouvait nous permettre de produire de l'électricité pendant des milliers d'années encore.

 

Un intervenant venant de Lannion (impliqué dans l'association Energicop de Bretagne): à EDF, GDF/Suez, qui sont des grosses entreprises: on ne fait pas grand chose pour les énergies renouvelables. Ce sont des petites et moyennes entreprises qui font du renouvelable. Comment concilier le soutien à ces petites entreprises dynamiques et innovantes qui préparent une reconversion industrielle vers une consommation et une production d'énergie plus durable avec les investissements nécessaires à la renationalisation des mastodontes de l'énergie que vous appelez de vos vœux (EDF, GDF Suez, Areva...).

 

Alain Rebours: Quand on dit un pôle public, cela va avec des injonctions politiques, un contrôle citoyen pour veiller à ce que ces grandes entreprises soient gérées dans l'intérêt du plus grand nombre. Cela implique une politique industrielle que la France a abandonné depuis 25 ans en confiant, suivant les politiques néo-libérales définies au niveau de l'UE, au marché le soin de s'auto-réguler pour la production des biens et de l'énergie, les politiques d'acquisition et de vente, de concentration industrielle, et en délaissant les outils d'intervention économique qu'il avait avec les grandes entreprises publics à monopole. Ceci-ci, même s'il faut travailler sur le contrôle des entreprises par les salariés, l'auto-gestion dans l'entreprise, la société n'est pas prête pour multiplier les soviets et il faut continuer à soutenir la vitalité du secteur des petites et moyennes entreprises. En revanche, des renationalisations sans politique industrielle définie politiquement ne changeront pas grand chose à la prise en compte des défis énergétiques et environnementaux.

 

Ismaël Dupont: Dans le programme partagé du Front de Gauche, dont nous disposons maintenant d'une version assez complète et dense mais qui sera encore enrichie par co-élaboration avec les citoyens d'ici 2012, à l'intérieur par exemple de comités législatifs, il est également dit que la conversion écologique de l'économie s'opérera grâce à des investissements de l'État dans des plans de travaux pour réduire la consommation d'énergie des bâtiments qu'il possède (habitats collectifs, équipements publics) et les rendre plus auto-suffisants en décentralisant au maximum la production d'énergie. C'est donc en tant que client que l'État servira le dynamisme des petites et moyennes entreprises du secteur du développement durable. Ensuite, nous prévoyons aussi d'ouvrir de nouvelles formations et d'investir dans la recherche pour développer en France des technologies innovantes pour aller vers plus de sobriété dans la consommation d'énergie et plus de diversification des sources d'énergie. Un autre pilier de notre projet en matière de réduction de consommation d'énergie et de prise en compte de la raréfaction des énergies fossiles qui va à l'encontre des dogmes libre-échangistes et de la mondialisation libérale construire en particulier au niveau de l'Europe, c'est la relocalisation de l'économie pour réduire les transports de marchandises inutiles, ce qui est valable aussi bien pour l'agriculture que l'industrie, et ce qui implique qu'on continue à produire de l'énergie en quantité suffisante sur notre territoire.

 

Intervenant membre d'un collectif anti-nucléaire et de promotion de la simplicité volontaire:

Je suis d'accord avec le deuxième intervenant (Alain Rebours) pour dire que le modèle énergétique conditionne largement un type de société. En France, depuis 45, en ce qui concerne la partie électricité, on s'est jeté à corps perdu dans l'électronucléaire, et on a exporté cette technologie a tour de bras en étant également responsable de ce fait de la prolifération du nucléaire militaire. Les émissions de gaz à effet de serre deviennent un argument pour développer le nucléaire: mais les vrais responsables de ces émissions sont 60 ans de productivisme, de consumérisme, de gaspillage, qui sont inséparables de la promotion de l'industrie nucléaire en France comme du tout pétrole partout dans le monde. Aujourd'hui, je pense que le seul comportement responsable, c'est de revenir aux vélos, aux logements isolés et chauffés de manière écologique, mais je ne suis pas dupe, pendant que je trime sur mon vélo dans les Monts d'Arrés, il y a des Rafales de la base de Landivisiau qui filent au-dessus de mois, déversant des quantités incroyables de CO2 dans l'atmosphère. C'est pourquoi il faut changer les comportements individuels, mais aussi les structures sociales. L'armée, c'est la plus grosse productrice de gabegie en termes énergétiques. C'est tout un modèle de société qu'il faut revoir, basé sur la dilapidation de l'énergie. Quant à l'État, on ne peut pas dire qu'il fasse de très grands efforts pour isoler et équiper ses bâtiments publics, ses HLM pour qu'ils consomment moins d'énergie. Or, plus on isole, moins on gaspille. La solution: simplicité volontaire, diversification dans la production énergétique, relocalisation des activités.

 

Yves Abramovitcz: Je suis d'accord avec la fin de l'intervention précédante pour dire qu'il faut rompre la proximité unissant le capital et la tête de l'État. L'agressivité d'EDF dans la recherche de parts de marché vient de ce qu'on a contraint cette entreprise à se comporter comme une entreprise privée et à faire cette politique au service de ses actionnaires plus que des citoyens, ses usagers. Pensons à tous les réseaux installés par cette entreprise cédés à des entreprises concurrentes. EDF se comporte maintenant comme une entreprise privée comme une autre: recherche continuelle de marchés, concurrence, tarifs différenciés. Idem pour Gaz de France: il faut replacer le débat sur l'énergie et l'absence de prise en compte suffisante des défis de la raréfaction des énergies fossiles, des émissions de gaz à effet de serre, dans le contexte de la privatisation du patrimoine national et de la casse du service public. J'aurais aussi eu des choses à dire sur le nucléaire, mais il ne faut pas non plus réduire la question de l'énergie à cet enjeu et je ne veux pas continuer à envenimer un débat où chacun reste sur sa position.

 

Ismaël Dupont: Pour compléter l'intervention d'Yves, on peut dire aussi que la nouvelle gouvernance libérale de la SNCF (liée à l'obligation d'auto-financement et à son fonctionnement comme une entreprise privée) comme la fin du monopole public et l'ouverture à la concurrence dans le domaine du transport de marchandise et bientôt de voyageurs pèsent lourd dans la difficulté à développer un grand service public de transport en commun à bon marché et surtout de transport de marchandises suffisamment développé pour constituer une alternative au tout camion. Ainsi, alors que la SNCF avait commencé à construire puis abandonné il y a quelques années une plateforme de fret ferroviaire pour exporter les légumes du Léon à St Martin des Champs, c'est aujourd'hui une entreprise privée à capitaux allemands soutenue par la SICA, la très puissante coopérative léonarde, Combiwest, qui a soufflé à la filiale de la SNCF, Novatrans, cette activité de fret ferroviaire. Les politiques libérales menées au niveau de l'UE par les conseils des ministres et la commission ont une très lourde responsabilité dans la persistance de transports de marchandises basés sur le tout camion.

 

Hubert Peneau: Pour comprendre la virilité du débat de ce soir, il faut comprendre que ce qui a fédéré et créé les mouvements écologistes en France a été d'abord, dans les années 70, le combat contre le nucléaire. Le nucléaire est un gouffre financier et son coût est systématiquement sous-estimé tant l'industrie est opaque: on est passé de 5 à 15 milliards pour le projet ITER, de 3 à 5 milliards pour l'EPR de Flammanville dans le Cotentin. Il y a clairement incompatibilité entre une filière nucléaire très consommatrice d'argent et le développement d'énergies renouvelables alternative et de la recherche de technologies nouvelles pour économiser l'énergie. Ceci dit, je ne suis par contre la production d'électricité: je suis menuisier et toutes mes machines fonctionnent à l'électricité, et c'est très bien comme ça. Il faut aussi recentrer le débat sur les énergies fossiles, qui constituent 83% de la consommation d'énergie: il va bien falloir s'en passer. Comment économiser d'emblée? J'apporterais quelques idées au débat: d'abord si un gouvernement Front de Gauche arrivait au pouvoir en 2012, il pourrait limiter considérablement le survol du territoire par le transport aérien, en limitant l'usage pour des raisons médicales, scientifiques, diplomatiques... On a de très bonnes routes, des transports ferroviaires, des ports en France: pourquoi ne pas s'en servir? On pourrait aussi interdire les grands prix automobiles en France...

 

Nicole Rizzoni:Il est faux de dire que l'industrie nucléaire ne produit pas de gaz à effet de serre: elle en est émet pour extraire l'uranium, pour le transporter vers les centrales, le transporter pour le retraitement. On dit que le nucléaire favorise notre indépendance énergétique mais il n'y a pas pire dépendance que le nucléaire: on se conduit comme d'odieux colonisateurs au Niger, il faut le savoir. Parlons aussi du coût du démantèlement des centrales nucléaires: à Brennilis, on en a pas encore fini, loin de là - la centrale continue de tourner car on ne sait pas l'arrêter- et on a déjà englouti plus des sommes folles et des années de travail. Parlons aussi des territoires qui sont balayés de la carte, des milliers de personnes contaminés par les accidents, des enfants qui naissent difformes... A supposé même qu'il n'y ait sur une génération, avant qu'il n'y ait plus d'uranium, 3 ou 4 nouveaux accidents nucléaires dans le monde. Est-on prêt à courir ce risque de rendre invivable toute une partie de notre planète? Pour se passer de nucléaire et d'une trop grosse production d'énergie polluante, la solution, c'est la sobriété, la simplicité volontaire: il faut en finir avec la démesure. Quand on a une maison maintenant, elle est presque 10 fois plus grande qu'après-guerre. Ce n'est pas raisonnable.

 

Jean-Luc Le Calvez: EDF est malmené en tant que service public: l'entreprise n'est plus considérée que comme une source de profit. 70% de ses profits considérables cette année sont redistribués aux actionnaires. La création d'un pôle énergétique public aboutirait à ne pas mettre de côté l'investissement dans la diversification énergétique et les économies d'énergie. Par exemple, combien de canaux, en Bretagne et ailleurs, sont aujourd'hui abandonnés, alors que le transoprt fluvial pourrait être une alternative au routier? La France a un parc nucléaire très important, dont on est devenu dépendant. C'est sûr qu'il faut chercher à diversifier. Mais, la Bretagne, par exemple, est entièrement dépendante l'hiver de la centrale thermique de Cordemais, des centrales nucléaires de Chinon et de Flammanville: sans nucléaire, on se demande comment on pourrait faire.

 

Compte-rendu réalisé par Ismaël Dupont.

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20 mars 2011 7 20 /03 /mars /2011 11:26

Il y avait une quinzaine de personnes mercredi 16 mars à MAJ à 20 h30 pour participer au débat du Front de Gauche sur la situation actuelle et l'avenir souhaitable de notre démocratie.

 

Après une introduction à la réunion publique par Daniel Ravasio, Ismaël Dupont a présenté pendant trente minutes environ une réflexion sur les fondements et les origines historiques de l'idée démocratique puis Alain Rebours a commenté et argumenté pendant une trentaine de minutes également les propositions provisoires du Front de Gauche en matière de rénovation des institutions françaises à l'échéance 2012:

  • Mettre en place une assemblée constituante travaillant en parallèle d'un Parlement s'occupant des affaires courantes. Cette assemblée constituante aurait la charge de préparer une nouvelle constitution qui serait ratifiée par référendum. Nous souhaiterions que cette constitution commence par exposer dans un texte à valeur juridique contraignante quels sont les droits et les libertés individuelles fondamentaux du citoyen, y compris les droits sociaux (santé, logement, culture, éducation, travail, revenu garanti).
  • Affirmer l'existence d'une citoyenneté de résidence pour rompre avec l'alignement insidieux vers une culture du droit du sang à l'allemande, ou l'idée qu'on le pourrait être plus ou moins français, ou que l'on pourrait être destitué de sa nationalité si on a des origines étrangères et si l'on n'a pas « mérité » d'être français. Habiter en France, y payer ses impôts, devrait donner un droit de vote et d'éligibilité.
  • Réorganiser la séparation des pouvoirs:

- En redonnant sa place de conception des lois et de contrôle de l'exécutif au Parlement.

- En élisant les députés au suffrage universel direct sur des scrutins de liste à la proportionnelle.

- En faisant du gouvernement une simple émanation de la chambre des députés.

- En peut soit supprimer purement et simplement le Sénat, soit le remplacer par une sorte de chambre consultative du type « Conseil économique et social » composée de représentants du monde associatif et syndical.

- Donner au peuple le pouvoir de proposer des lois si des textes conçus par les citoyens obtiennent suffisamment d'adhésion.

- Tout en conservant le conseil constitutionnel, faire en sorte qu'il soit une émanation des différents corps de la société et non qu'il soit composé des candidats des principaux dirigeants politiques dont il doit justement contrôler la constitutionnalité des réformes et des mises en cause judiciaires.

- Soit on garde un Président de la République élu sur un autre mode de scrutin avec un pouvoir symbolique de gardien des institutions, soit l'on supprime purement et simplement le poste.

- Il faut rendre l'autorité judiciaire réellement indépendante, en augmentant le nombre de juges d'instruction, en améliorant leur formation, en leur permettant de travailler en équipes et surtout en assurant leur indépendance par rapport au Parquet contrôlé par le pouvoir exécutif.

- Garantir l'indépendance des médias pour faire en sorte, par exemple, qu'un Lagardère qui vend des armes à la France et fait pression sur elle pour qu'elle conclut des traités commerciaux avec d'autres États, ne contrôle plus à travers le groupe Hachette ¼ de la presse en France. Nécessité de lois contre la concentration des groupes médiatiques au main de quelques magnats de la finance dans une situation de demandeur et de faiseur de roi vis à vis du monde politique. Nécessité de renforcer le service public de l'information et de garantir une indépendance effective vis à vis du pouvoir.

  • Garantir un droit de pétition pouvant déboucher sur des référendums d'initiative populaire.
  • Au niveau local, tendre vers des formes de démocratie participative ou d'auto-gestion: à Bobigny par exemple, ¼ du budget est géré en Assemblée Citoyenne, notamment pour ce qui touche les travaux de voirie, et cela marche.
  • Démocratiser la vie économique et financière qui ne saurait être dissociée de la sphère strictement politique de la Cité. Remettre en cause l'argument massue de la propriété privée pour promouvoir une émancipation concrète des salariés et mettre l'entreprise au service de l'intérêt général et non au service des actionnaires. Une entreprise est faite de capital fixe mais aussi de capital variable, les salariés.

Intervention des participants à la réunion publique:

 

Alain David: Les gens considèrent que ce type de réflexion, c'est quelque chose qui les dépasse: « on n'a qu'à laisser cela aux gens qui savent ». Au moment du conflit sur les retraites, le seul argument du gouvernement était celui de la légitimité du président de la République, de la majorité parlementaire et du gouvernement issus des urnes en 2007. Or, quand je relis la constitution de la Vème République, je lis: « La souveraineté nationale appartient au peuple qui peut l'exercer à travers ses représentants ou par référendum. Aucune section du peuple ne peut prétendre la confisquer... ». La question que l'on peut se poser, c'est: est-ce que les représentants sont représentatifs? Seraient-ils représentatifs de la diversité sociale? Combien de salariés à l'Assemblée Nationale qui ne compte que 0,5% d'ouvriers? Est-ce que la diversité politique est assurée? Non, on marche à grand pas vers le bipartisme, toute tendance que la réforme des collectivités territoriales renforce et que le PS ne combat pas résolument, c'est le moins qu'on puisse dire. Il y a des arguments souvent invoqués contre un scrutin de liste à la proportionnelle pour les législatives: « on ne pourra pas voter pour des représentants que l'on connaît dans notre circonscription, cela servira les apparatchiks... On ne pourra pas même choisir ses représentants. Cela augmentera l'influence du Front National ». Mais est-ce qu'un élu du peuple est là simplement pour s'occuper simplement des intérêts d'un canton, d'une circonscription? Ce qu'il faut dire, c'est que la proportionnelle apporte une solution au problème de mixité.

A l'évidence, la légitimité du peuple est de droit, l'autre, celle de ses représentants, n'est que déléguée. Qu'est-ce qui se passe quand les choix ne coïncident pas? Il semble que pour beaucoup de socialistes et la droite, dans le débat sur la ratification du traité de Lisbonne reprenant les dispositions et les déclarations de principe rejetés par les français avec le Traité constitutionnel européen en 2005 ou dans l'application du réforme des retraites désapprouvée par 70% des français, c'est la légitimité des représentants qui prime.

Il faudrait que nous proposions un recours fréquent au référendum d'initiative populaire pour voter des lois conçus par les Parlements français ou européens, mais aussi pour proposer de nouveaux textes, de nouvelles orientations. Il faudrait instaurer l'obligation pour les élus de rendre des comptes. Il faut surtout en finir avec la confiscation du pouvoir par Sarkozy et sa clique mais aussi par une oligarchie, tant la porosité entre les milieux politiques et les milieux d'affaires est grande. S'il y a nécessité pour le peuple de retrouver sa souveraineté, cela passe d'abord et avant tout par l'encouragement à la réflexion des citoyens, c'est à dire par une information et une formation de qualité.

La démocratie, ce n'est pas que le monde politique, c'est aussi l'entreprise, la culture: c'est dans ces sphères aussi qu'il faut faire primer l'intérêt général et l'accès à l'auto-détermination des citoyens.

Il faut enfin en finir avec la culture de la délégation de pouvoir, cultivée souvent au nom d'une méfiance vis à vis de la surveillance des citoyens et de l'efficacité.

Yves Abramovicz: Dans l'intervention d'Ismaël, je regrette qu'il n'y ait pas eu de référence à des justifications philosophiques plus modernes de l'idée démocratique, car la Grèce antique, cela nous fait remonter un peu loin... Est-ce qu'avant de parler de démocratie, on ne pourrait pas d'ailleurs parler de la République, et de ses valeurs fondamentales que l'on peut voir rappelées aux frontons des mairies, sauf à Morlaix: liberté, égalité, fraternité. Il faut aussi poser le problème de la laïcité: il est nécessaire de revenir à une école vraiment libre (c'est à dire laïque) et accessible à tous. Ceux qui comme Sarkozy font référence à un gène chrétien ou à une histoire chrétienne structurant l'identité française nous paraisse aller vers une pente qui est tout sauf démocratique. La France n'est pas né de l'Eglise: la nation est née de son acte de naissance démocratique pendant la révolution, et elle est d'abord réuni par un projet plus que par un héritage. Toutes les religions et les lieux de culte doivent être traités avec la même indifférence par l'État. On assiste aujourd'hui à une remise en cause inacceptable du droit du sol: quand on demande à des gens en vue ayant des parents ou des grands-parents d'origine étrangère de prouver leur nationalité, tout le monde s'indigne, mais des citoyens ordinaires se font harceler par les préfectures à la suite des lois anti-immigration dans l'indifférence générale. La démocratie implique aussi un meilleur partage des richesses, le rétablissement des services publics qui ne doivent pas être gérés comme cela se produit beaucoup maintenant suivant les principes de gestion capitaliste, avec un but de rentabilité. Il faut aussi établir des moyens de contrôle du respect des mandats des élus. Pourquoi ne pas introduire l'obligation pour un élu d'avoir des comptes-rendus de mandats réguliers pour les électeurs? Dans le temps, on voyait ainsi des assemblées publiques sous les préaux d'école où les élus locaux avisaient la population de leurs actions de représentants du peuple et demandaient un renouvellement de confiance. Il faut aussi mettre en place des gardes-fou pour éviter les conflits d'intérêt: on peut douter de l'honnêteté d'un ministre de la santé issu de l'industrie pharmaceutique...

Daniel Ravasio: Je voudrais insister, en me basant sur mon expérience à la FSU, sur la difficulté d'accomplir le travail syndical aujourd'hui: les documents sont remis de manière tardive, on ne nous laisse pas le temps nécessaire pour bien les analyser (par exemple, pour éplucher les lignes d'un texte de conseil d'administration). Il faut aussi se poser la question des capacités concrètes des citoyens pour exercer leurs droits démocratiques.

Ismaël Dupont: On peut aussi rappeler que de plus en plus on criminalise le mouvement social et les syndicalistes, en les gardant à vue quand ils participent à des grèves dures, des séquestrations provisoires de patrons ou de cadres, et en les obligeant à s'astreindre à un fichage génétique sous peine de prison en cas de refus. Pour ce qui est de l'opposition un peu brutale de mon introduction entre une démocratie grecque faisant la part belle à la revendication d'égalité sociale et au partage du pouvoir par tous les citoyens, indépendamment des considérations de naissance, de statu social, de niveau d'éducation, face à une démocratie parlementaire et bourgeoise garantissant la liberté de l'individu plus que l'égalité et la souveraineté du peuple, elle aurait mérité d'être dépassée mais je n'ai pas voulu faire traîner trop en longueur l'exposé. Il y a bien un philosophe moderne qui justifie la démocratie radicale, le refus de la délégation de la souveraineté et l'égalité sociale comme condition de la prise en compte d'un bien commun et de l'esprit civique, c'est Rousseau...

Thomas: C'est juste, on a des lois qui nous « permettent de... » mais en réalité il existe un système qui rend difficile ou impossible l'exercice de ces droits. Cette capacité à jouir de ses droits reconnus est souvent retirée au travers de petites manipulations. Exemples que je connais bien: exemple du rachat des points retraite: une loi a été votée en 1962 du temps de de Gaulle mais son décret d'application n'est intervenu qu'en 1992. En revanche, pour retirer la double imposition des français travaillant à l'étranger, Giscard d'Estaing a fait beaucoup plus vite, car la disposition touchait de très près les intérêts des milieux d'affaires. En réalité, disposer d'une loi basée sur des principes justes n'est pas suffisant si son imprécision empêche son application concrète.

Alain David:  On peut aussi parler de la création d'une véritable caste politique dans le pays. Depuis leur sortie de l'université, des jeunes militants se préparent à être dirigeants politiques, en prenant d'abord des responsabilités dans des organisations de jeunesse, puis en se professionnalisant et étant missionnés dans un cabinet ministériel, en tant qu'attaché parlementaire ou chargé de mission pour un conseil général ou régional... Cela donne des élus vivant dans un environnement fermé, déconnectés des réalités économiques du travail et des préoccupations de « monsieur tout le monde ».

Alain Rebours : Il faut réformer le statut de l'élu pour résoudre la question de la représentation de la diversité (femmes, salariés, catégories populaires, français d'origine étrangère...). Il faut interdire le cumul des mandats, voire prôner l'existence d'un mandat électif unique. Il faut casser l'ENA qui produit la pensée unique et les relations incestueuses des responsables politiques et des patrons de grande administration et des grandes entreprises. Dans le fonctionnement interne des partis politiques, il faut rendre possible le contrôle des élus par les militants et le droit de tendance comme cela se fait à la FSU aujourd'hui, à la FEN hier, c'est à dire le droit de s'organiser à l'intérieur d'un parti de manière indépendante par rapport à la direction.

Thomas: Je voudrais vous faire partager une citation que j'ai relevé et qui me semble adapter à ce que l'on a pu dire sur le climat xénophobe et l'absence de projet social de notre démocratie actuellement: « La démocratie est en danger quand les gens se rassemblent parce qu'ils se ressemblent et non parce qu'ils se complètent ».

Yves  Abromovicz: Il faut supprimer la fonction de président de la République. A quoi sert-il? La mascarade du présidentialisme nous serait ainsi épargnée. On ne voterait plus à la tête du client et on pourrait peut-être réconcilier le citoyen avec les élections...

Ismaël Dupont: S'agissant de la question de la revendication d'un Parlement élu à la proportionnelle intégrale, on peut se demander, même si l'objectif paraît tout à fait légitime du point de vue de la représentation de la diversité d'opinions des électeurs, si cela ne nourrirait pas l'instabilité parlementaire, les manœuvres politiciennes empêchant la mise en œuvre des plans de réformes sur la durée et une influence disproportionnée des petits partis pouvant faire basculer des majorités politiques comme cela se passe en Israël avec les partis religieux ou de droite sioniste ou comme cela se passait sous la IV ème République?

Alain Rebours: Il faut se méfier de ne pas reprendre à notre compte la légende noire d'une IVème République impuissance, instable et corrompue par l'opportunisme parlementaire, nourrie par le gaullisme après 1958. En réalité, la IVème République a été capable de grandes réalisations de la même manière que sans exécutif fort, avec une représentation fidèle de la diversité politique, les institutions de la IIIème République ont pu faire face aux débuts de la première guerre mondiale avec une relative efficacité. Par ailleurs, nous aurions un débat à mener sur le jacobinisme d'une certaine gauche, sur le rapport que l'État doit avoir aux spécificités culturelles. Rappelons que ce sont des gens de gauche qui ont empêché l'intégration de Diwan dans le service public d'éducation. Faut-il considérer que la République doit être forcément assimilatrice, homogénéisante, basée sur le culte de l'unité?

 

A la fin de la réunion, un rendez-vous est pris pour mai ou juin pour une nouvelle réunion-débat du Front de Gauche pour un programme partagé et populaire pour 2012 sur la question de l'énergie.

 

Merci à tous les participants de cette réunion publique !  

PS: Compte-rendu (forcément incomplet) réalisé par Ismaël.  

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20 janvier 2011 4 20 /01 /janvier /2011 20:57

Réunion publique organisée par le Front de Gauche à Morlaix Animation Jeunesse dans le cadre de la campagne nationale de réunions publiques pour l'élaboration d'un programme partagé en 2012.

 

Il y avait trente-sept participants à cette réunion publique. A la table: Alain Rebours (GU), Daniel Ravasio (PCF) et deux intervenants syndicalistes à l'hôpital public et à l'éducation nationale: Christiane Pouliquen et Daniel Crassin.

 

Préambule. Présentation de Front de Gauche par Alain Rebours.

 

Un rassemblement décidé à partir de 2008 à l'initiative de trois organisations politiques (PCF, Parti de Gauche, GU) qui s'accordaient sur un positionnement à l'intérieur de la gauche qui ne laisse pas faire le libéralisme. A partir de septembre 2010, le Front de Gauche a décidé de s'élargir aux citoyens pour faire émerger une gauche anti-capitaliste, anti-libérale. Un des moyens de cet élargissement et de cette appropriation populaire du Front de Gauche est l'élaboration d'un programme partagé, avec l'idée que notre programme politique ne doit pas venir d'en-haut, des appareils.

 

 Introduction aux interventions et au débat par Daniel Ravasio.

 

Une question centrale que nous devons nous poser aujourd'hui: Pourquoi des services publics? Quelle est leur nécessité? Quelle est leur fonction? Un des angles d'attaques de la politique de Nicolas Sarkozy est de prétendre moderniser les services publics pour mieux les démolir. Cela se traduit par un mal-être des salariés et des citoyens-usagers eux-mêmes confrontés à l'inefficacité de services publics étranglés financièrement. Nous devons nous poser des questions fondamentales: Le service public, pour nous, c'est quoi? Qu'est-ce qui devrait être service public? Est-ce qu'il ne doit pas y avoir un grand service public de l'eau? Est-ce que les services publics doivent fonctionner comme par le passé? Quelle doit être l'implication des usagers, des personnels dans la gestion?

 

Intervention de Christiane Pouliquen sur l'état du service public de la santé.

 

Quelques rappels: La santé est notre bien le plus précieux. C'est un état complet de bien-être physique, mental et social et elle ne consiste pas simplement en une absence de maladie ou d'infirmité. L'accès à la santé est un droit pour chaque individu dans notre société, ce qui implique l'impératif de solidarité.

 

Quelques dates importantes:  

  • Loi du 21 décembre 1941 et décret de 1943: l'hôpital rompt avec l'hospice pour s'ouvrir à l'ensemble des citoyens avec une activité de soin. L'hôpital devient un établissement sanitaire et social.

  • Ordonnances de 1958: les hôpitaux conjuguent trois missions: soin, formation, recherche.

  • A partir de 1960: l'hôpital connait un fort développement des services, des plateaux techniques et humains.

  • La loi du 31 décembre 1970 définit un service public hospitalier. En 1974 est mise en place la carte sanitaire divisant le territoire en 256 secteurs.

  • La loi du 19 janvier 1983 modifie le financement des hôpitaux par dotation globale.

  • En 1986: création du statut des salariés de la fonction publique hospitalière.

  • La loi du 31 juillet 1991 se substitue à celle de 1970, prévoyant un financement public et privé.

  • L'ordonnance Juppé d'avril 1996 organise un dispositif de maîtrise des dépenses de soin et de santé et la réforme de l'hospitalisation publique et privée. Création d'Agences Régionales d'Hospitalisation (ARH), chargées de trouver les moyens d'alléger les dépenses de santé.

  • Avril, mai 2002: Jean-François Mattéi entend rénover les hôpitaux, réorganiser leur fonctionnement.

  • Loi Douste Blazy: Généralisation de la tarification à l'activité.

  • Ordonnance du 4 septembre 2003 portant sur la simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé. Les compétences et les pouvoirs de l'ARH s'accroissent pour œuvrer à la réorganisation sanitaire. Création d'un Comité Régional d'Organisation Sanitaire (CROS).

  • Plan hôpital 2007 entendant passer d'une logique de moyens à une logique de résultats. Le directeur de l'hôpital, gestionnaire, prend plus de pouvoir par rapport aux médecins. Le directeur de l'ARS fixe des objectifs de performances et d'économie que le directeur de l'établissement doit atteindre et sur lesquels il sera jugé. Développement des rémunérations sur la base d'objectifs de production de soins, généralisation de la rémunération aux mérites, de la baisse des effectifs, de la délégation des tâches à du personnel moins qualifié.

     

Ces rappels montrent la volonté depuis le début des années 1990 de faire passer au second plan les besoins réels du service public de santé par rapport aux impératifs de rentabilité et d'économie. A l'hôpital de Morlaix, qui est un hôpital de proximité, qu'en est-il?

L'hôpital de Morlaix dispose d'un service des urgences, de services de court séjour, de réanimation, de chirurgie, de médecine gériatrique, de maternité – pédiatrie, de séjours de convalescence et rééducation, de maisons de retraite, de services de psychiatrie et d'hôpitaux de jours, d'écoles d'aide-soignantes et d'infirmières, et enfin de nombreux services logistiques (blanchisserie, cuisine, entretien, réparation...). En tout, l'ensemble de ses structures emploient 2000 salariés, dont 300 contractuels.

Au quotidien, la dégradation du service de santé à l'hôpital de Morlaix se manifeste par des diminutions de durée de séjour (notamment en maternité, sans considération des dépressions post-acouchement et de la prise en charge des mamans novices pour qu'elles remplissent bien leurs nouvelles fonctions), l'accroissement du délai d'attente pour les consultations et les urgences, l'augmentation du forfait hospitalier à la charge des patients, l'augmentation du nombre de médicaments déremboursés, la remise en cause de la formation professionnelle pour le personnel de nuit, l'absence de moyens pour les décharges syndicales, la rotation intense des personnels entre les services, le manque d'effectif dans les services qui se traduit par une charge de travail et une pression psychologique accrue pour les personnels. Souffrances au travail, risques professionnels se trouvent ainsi amplifiés.

Avec l'ARS, Morlaix risque de dépendre de Brest avec de grandes conséquences par rapport au personnel. Il nous faut nous interroger sur les moyens de défendre l'hôpital, de faire en sorte que les services continuent à exister.

 

 Intervention de Daniel Crassin sur le service public d'éducation 

 

Pendant près de 40 ans, j'ai exercé comme prof d'allemand et pendant autant d'années j'ai été militant du SNES-FSU. Pendant toutes ces années je me suis battu pour la défense du service public en général et du service public d'éducation en particulier, contre des gouvernements de droite et aussi contre des gouvernements de gauche, les pires n'ayant pas toujours été ceux que l'on pourrait croire.

Je rappellerai deux citations:

 

La première: « Les moyens d'améliorer le système d'éducation existent, il suffit de les prendre dans le stock existant » (Michel Rocard).

 

La deuxième: « il faut dégraisser le mammouth » (Claude Allègre).

 

Ces deux citations résument assez bien la conception de nos dirigeants en matière de service public. Au mieux, on fait avec les moyens du bord, au pire on réduit, autant que faire se peut les moyens.

Pour moi, il y a deux domaines qui devraient être absolument prioritaires en matière de services publics: l'éducation et la santé. Que devrait faire un gouvernement de gauche en matière d'éducation? Je pense qu'il y a trois objectifs à avoir:

  

    • Le service rendu aux usagers (et non pas aux clients ou aux consommateurs)

    • Le service rendu au pays

    • La situation des personnels.

       

  1. Le service aux usagers. On constate tous les jours que la société dans laquelle nous vivons est très inégalitaire. Il faut donc que l'objectif prioritaire assigné à l'école soit, autant que faire se peut, de compenser ces inégalités. C'est tout le sens du service public. Il me paraît normal qu'on accorde plus de moyens à un collège de banlieue qu'à celui de Neuilly. Or, à chaque fois qu'un gouvernement a accepté ce principe (cela a été le cas par exemple lors de l'instauration des ZEP), à chaque fois les moyens supplémentaires accordés ont été les moyens supprimés dans les années suivantes, au nom des économies à réaliser. Deux exemples pour illustrer que la notion de service public est incompatible avec la notion de rentabilité: -Quand on supprime un collège rural, c'est uniquement parce que dans un tel collège le taux de remplissage des classes est nettement inférieur à celui des établissements de ville. - Quand on supprime des options dans un lycée, c'est la même logique: il est plus facile d'avoir une classe de 35 élèves en anglais qu'en serbo-croate!

  2. Le service rendu au pays.

    Plus un pays donne une formation aux jeunes et plus il en tire de profits. Toutes les études prouvent que, plus les jeunes ont un niveau de formation élevé et plus les reconversions sont faciles. Il faut élever et diversifier les formations, ce n'est pas l'orientation qui est prise en ce moment. J'en veux pour preuve l'attaque frontale que subit l'enseignement technologique qui a pourtant permis à des générations entières d'accéder au niveau bac.

  3. La situation des personnels.

    Je suis de plus en plus persuadé que des fonctionnaires bien formés, bien rémunérés et ayant des bonnes conditions de travail sont la garantie d'un service public de qualité. De plus, c'est un point d'ancrage pour toutes les autres catégories sociales, quand elles ont à revendiquer une amélioration de leurs statuts. Dans tous les pays où les fonctionnaires sont mal payés, on voit s'installer la corruption. Depuis les années 90, la situation financière des fonctionnaires s'est dégradée. Au début de ma carrière, quand le SMIC était au niveau de 100, un prof débutait à 174: aujourd'hui, le rapport est de 123/100. Autre exemple: c'est en 1990 que le taux d'absentéisme a été le plus faible chez les enseignants du second degré. C'est aussi l'année où le taux de personnels précaires était le plus faible. La précarité est inévitablement une source de stress.

     

    En conclusion, je voudrais dire que seul un candidat s'engageant sur de tels objectifs pour la fonction publique aura ma voix. Certes, ce n'est pas qu'une question de moyens! Mais ce n'est pas en supprimant toujours plus de moyens comme le fait le gouvernement actuel ou comme le préconise le FMI qu'on améliorera le service public. Que chacun s'en souvienne lors du deuxième tour!

     

LE DEBAT 

 

Ismaël Dupont (PCF): Je voulais compléter l'intervention de Daniel Crassin en évoquant plusieurs phénomènes inquiétants pour l'évolution du service public de l'éducation.

Depuis cette année, après leur Master et leur Capes, les nouveaux professeurs titulaires ont immédiatement 18h de cours à assurer avec une formation professionnelle réduite à la portion congrue et sans pouvoir prendre du recul pour préparer et repenser leurs cours et discuter avec d'autres stagiaires.

La réforme de la formation des enseignants qui prévoit une spécialisation de certains masters dans l'enseignement, sans garantie aucune de réussite des étudiants au concours, offre également à l'éducation nationale les moyens, pour faire face aux fluctuations de ses besoins et renforcer ses dispositifs pour faire des économies, de recruter des contractuels mieux formés pour assurer des cours en remplacement et à l'année dans les établissements. Comme par ailleurs il est prévu d'accorder de plus en plus d'autonomie aux chefs d'établissement, et jusqu'à la possibilité de recruter eux-mêmes leurs personnels, cette évolution ira dans le sens d'une moindre indépendance des professeurs pour refuser des heures supplémentaires ou l'application de consignes mortifères pour la transmission des savoirs et l'éveil de l'esprit critique.

Parallèlement, il faut rappeler aussi que le gouvernement supprime 16000 postes dans l'Education Nationale cette année et que depuis que Sarko est élu, près de 40000 postes ont été supprimés en tout. Cela se traduit par des effectifs très chargés (il est très rare de voir des secondes à moins de 30 ou 33 élèves), ce qui est d'autant plus préjudiciable que les élèves présentent peut-être plus de difficultés de concentration et de tendance à l'agitation. Seuls 10% des postes supprimés le sont dans l'enseignement privé, qui scolarise 20% des élèves. La droite favorise également le privé en obligeant (loi Carle) les communes qui ne disposent pas d'écoles privées dans le primaire ou le secondaire à dédommager les communes qui accueillent leurs enfants dans le privé au travers d'un forfait correspondant au coût de la scolarité d'un élève à l'année pour la collectivité. De manière générale on s'achemine dans bien des régions, et en particulier la région parisienne, vers un enseignement à deux vitesses, ce qui est facilité par la suppression de la carte scolaire: les établissements prestigieux de centre-ville et l'école privée servant à la discrimination sociale en accueillant les enfants des classes moyennes et supérieures, même de gauche, qui ne veulent pas mélanger leurs gamins avec des bambins d'origine plus défavorisée. On observe aussi dans les consciences un affaiblissement du sens du service public au profit des valeurs d'individualisme et de compétition.

Depuis quelques années le gouvernement cherche aussi à imposer sur les cycles de maternelle, primaire, collège et lycée une réforme de l'évaluation, mettant au premier plan, non plus la capacité à s'approprier des savoirs, mais la maîtrise de compétences, savoirs-faire et savoirs-êtres, dont beaucoup sont définies en fonction des besoins de l'orientation professionnelle future et du monde de l'entreprise. On s'achemine ainsi avec le Livret National de Compétences qui vise l'harmonisation de notre système scolaire avec ce qui se pratique ailleurs en Europe et dans les pays anglo-saxons, vers un appauvrissement des contenus de connaissance enseignés et un recentrage de l'école sur l'acquisition de des compétences basiques au détriment de l'éveil et de l'exigence intellectuelle. Cela traduit la nature du néo-libéralisme qui ne correspond pas simplement comme le libéralisme classique au « laisser faire », à la non intervention de l'Etat dans le champ social, mais qui cherche à réformer les conduites, à enrégimenter afin d'adapter les individus aux besoins du monde du travail capitaliste. Cet impérialisme culturel que nous impose le néo-libéralisme dans l'éducation en nous forçant à adopter des pratiques pédagogiques et des modes d'évaluation qui ne correspondent pas à nos traditions scolaires dégoûte les enseignements de leur métier en rendant leurs missions incohérentes et leur impose de plus en plus de paperasse.

 

Un intervenant (sympathisant du NPA): la droite est si près de considérer l'école privée comme un service public qu'elle voulait obliger, dans un amendement qui a été heureusement rejeté, les collectivités à mutualiser les moyens de l'école privée et de l'école publique quand elles étaient en difficulté financière pour pallier aux besoins des deux. Par ailleurs, je m'interroge sur le pourquoi de la baisse du niveau des élèves.

Daniel Ravasio (PCF): Il ne faudrait pas se focaliser sur les problèmes de l'éducation nationale. Par ailleurs il est absolument faux de dire que le niveau des élèves a baissé ces dernières décennies. Ce n'est qu'en français, et tout particulièrement en orthographe, qu'il a baissé. Dans tous les autres domaines, et en particulier en mathématiques, le niveau monte.

 

Daniel Crassin: Ce qui explique la baisse de niveau indéniable des élèves en français est qu'en l'espace de 20 ans, du fait du renforcement et de la naissance d'autres disciplines (langues...), un élève a perdu l'équivalent d'une année sur toute sa scolarité en français. Cela s'explique aussi par le fait que le fil conducteur de toutes les réformes de l'enseignement a été: comment faire des économies?

 

Jean-Luc Le Calvez (PCF): Il faut se poser la question: pourquoi depuis des décennies le service public est-il attaqué? Il faut rappeler les justifications du service public: activité qui remplit un besoin fondamental, collectif et individuel (santé, transport, éducation) et qui doit être accessible à tout le monde. Avant la Libération, la plupart de ces activités étaient prises en charge par le privé avec des objectifs de rentabilité qui s'opposaient à la prise en compte de l'intérêt général. Le discrédit porté sur la droite et la force de la volonté de changement à la libération ont permis de changer la donne. Mais, depuis le Traité de Rome de 58 et le renforcement de l'Union Européenne, on a cherché à faire prévaloir le principe du renforcement de la concurrence et de la suppression des monopoles publics avec l'idée que le privé s'acquittait toujours plus efficacement de missions utiles socialement que le public. On nous confronte toujours à l'argument du réalisme économique, de la nécessité de rentabiliser les services. A ce titre, il faut rappeler a contrario quels sont les arguments de notre engagement à l'intérieur du collectif pour le retour de la gestion de l'eau en régie municipale à Morlaix et St Martin des Champs. Un rapport récent nous apprend que nous n'avons plus la trace de 4 millards d'euros de dotations des collectivités non justifiées par Véolia. Où sont-ils passés? N'ont-ils servi qu'à alimenter le profit des actionnaires? La gestion privée de l'assainissement et de la distribution de l'eau se traduit, pour rentabiliser l'investissement, par un moindre entretien des réseaux nuisible à la qualité de l'eau et à l'environnement, et par une hausse des tarifs de l'eau pour l'usager.

 

Yves Abramovitcz (PCF): Je crois que l'erreur des militants de gauche est souvent d'aborder la question des services publics d'un point de vue gestionnaire. Or, le service public, c'est la valeur fondamentale de la République, basée sur la solidarité, la redistribution des richesses à travers la mise à disposition des moyens de couvrir tous les besoins fondamentaux (connaissance, santé, culture, transports, énergies...). Ce qu'il faut souligner aussi, c'est la dimension intéressée, vénale des réformes libérales du service public. Quand l'Etat privatise une partie des services publics (SNCF, La Poste), il privatise les parties les plus rentables. On cherche à enrichir les amis à faisant basculer des pans entiers des services publics de l'énergie ou de la santé dans le secteur privé. Le souci des politiques libérales est de faire en sorte que les moyens aillent au privé.

 

Yvette Prigent (PCF): Pour revenir sur les réformes à l'école, il est évident qu'à travers la suppression des postes, on cherche à affaiblir le public, à créer une école à deux vitesses: le privé pour la bourgeoisie, le public pour les classes populaires, avec un enseignement au rabais.

 

Daniel Ravasio (PCF): S'il doit y avoir une justification fondamentale pour l'existence des services publics, c'est qu'à travers eux, on paye en fonction de ses moyens tandis que l'on reçoit en fonction de ses besoins, ce qui fait que seule la socialisation des activités utiles socialement permet aux besoins de tous d'être satisfaits.

 

Claire Le Bihan: Il faut se souvenir des stratégies adoptées par le FMI dans ses politiques d'ajustements structurels mis en place dans le Tiers Monde. On s'arrange pour dégrader le service public en l'étranglant financièrement de manière à ce que les gens s'en détournent et que l'on puisse justifier, de ce fait, de la nécessité d'un transfert au privé juteux pour les actionnaires.

 

Un intervenant. Il faut bien avoir en tête que toutes les politiques de modernisation, d'ouverture à la concurrence et de privatisation des services publics menées en Europe depuis des années sont des applications de l'AGCS, l'Accord Général sur les Commerces et les Services, signé et renégocié périodiquement par l'Europe au sein de l'OMC. Dans le plan hôpital 2007, ce que l'on observe en effet, c'est un transfert au privé des activités les plus rentables. Or, la sécurité sociale était basée sur la socialisation des moyens pour faire face aux dépenses de santé: il n'y avait rien qui allait aux dividendes des actionnaires et là était justement le scandale...

 

Daniel Crassin: On peut prendre l'exemple de l'enseignement à distance: tandis que l'enseignement public à distance pour les malades ou les enfants vivant à l'étranger n'est plus financé, ces dernières années, Acadomia a augmenté son chiffre d'affaires de 300% . Toute une partie de l'enseignement supérieur pendant ce temps est passé au privé. La technique est simple: on asphyxie financièrement des services publics qui fonctionnent pour transférer les activités au privé sous prétexte qu'elles ne fonctionnent plus.

 

Un intervenant: Il faut bien comprendre que nous sommes à l'ère de l'ultra-libéralisme financier. Les exigences de rentabilité des actionnaires atteignent les deux chiffres. La politique ultra-libérale est capable d'affamer des populations entières en spéculant sur le blé, sur le riz. La mondialisation ne s'accommode pas d'une politique sociale ni d'une politique de services publics. Tout doit être rentable. La politique industrielle de l'Europe, avec le traité de Maastricht et le Traité de Lisbonne, a été mise au main de la finance.

 

Un intervenant: Même le secteur de la sécurité est en train de passer au privé. Le gardiennage de prison sera bientôt confié à des entreprises privées. L'hôpital public se charge des fonctions peu rentables, les activités rentables étant confiées au secteur privé.

 

Alain Rebours (GU): Il faut replacer le débat dans un horizon de lutte des classes. Si on s'attaque en priorité aux salariés du service public, c'est pour casser le ressort des luttes en diminuant le nombre des fonctionnaires ou en cassant leurs mobilisations collectives. Les cheminots, les profs, les salariés de l'énergie, et les autres salariés du secteur public ont toujours constitué la colonne vertébrale des mouvements sociaux qui ont mis à mal la droite ces dernières années. Entre la droite et les sociaux-démocrates, il n'y a certes pas une différence fondamentale d'orientation, mais une agressivité plus ou moins grande vis à vis du service public. Néanmoins, la droite et les sociaux-démocrates continuent à financer des services publics (infrastructures, recherche, école publique, routes...) pour remplir des missions nécessaires au développement du capitalisme et de la richesse nationale. Il ne faut pas simplifier à l'excès les choses et prendre les libéraux pour des imbéciles qui se tireraient une balle dans le pied en privatisant tout. La recherche, par exemple, reste et restera en grande partie financée par le public même si des entreprises privées peuvent rentrer dans les conseils d'administration des universités. Pour combattre efficacement les forces du capitalisme, il faut bien comprendre leurs logiques.

 

Un intervenant: la grande stratégie de la droite, c'est la technique du saucissonnage: on s'attaque aux secteurs du service public et aux statuts les uns après les autres de manière à éviter la coalition des luttes et des résistances. Par ailleurs, on nous a dit que la mondialisation favorisait le développement et le rattrapage des pays les plus pauvres: or, il suffit de voir l'écart abyssal existant en Chine entre quelques oligarques et une majorité de pauvres pour voir que cette croyance est illusoire et entretenue pour des raisons d'intérêt. Je crois pour ma part qu'on ne peut plus rien contre le rouleau compresseur de la mondialisation libérale et du capitalisme financier. Même une sortie protectionniste des règles libre-échangistes de l'UE serait catastrophique.

 

Une intervenante: la question que je me pose, c'est comment est-ce que, pour être plus efficace dans l'action, on peut réaliser l'unité à gauche entre le PS, les Verts, le Front de Gauche, le NPA.

 

Nicole Labelle (PCF): La grande force du capital est la résignation des masses. Mais avant de parler d'union pour battre la droite, la question qu'on doit se poser est: quelle répartition des richesses? La gauche unie, oui, mais pour quoi faire? Le Front de Gauche présente l'amorce d'un rassemblement sur un contenu authentiquement de gauche mais il est nécessaire de le renforcer pour qu'il soit vraiment une perspective de changement.

 

Ismaël Dupont (PCF). Une des premières choses que devra faire la vraie gauche si elle revenait au pouvoir serait de changer les modalités de gestion des ressources humaines imposées aujourd'hui dans les services publics et importées des techniques du management prévalant dans le privé (individualisation du salaire à travers les primes, précarisation et différenciation des statuts, objectifs individuels et nécessité de rendre des comptes en termes chiffrés, augmentation de la productivité par le stress...). Pour cela, il faudrait sinon supprimer l'ENA du moins réformer en profondeur l'enseignement formatant actuellement les cadres de la haute fonction publique et les responsables politiques. Or, justement, ce qui nous empêche de penser que l'union est réalisable immédiatement avec les socialistes, c'est de constater que la majorité de leurs dirigeants, issus de ces écoles fabriquant de la pensée unique, a complètement intégré depuis le milieu des années 80 le logiciel libéral et sa « novlangue » sur la nécessité de la réforme et de la modernisation des services publics. Il faut se souvenir que c'est Jospin en 1999, alors que la majeure partie des pays européens étaient à gauche et que l'on pouvait croire à l'opportunité historique de construire l'Europe sociale, qui a signé avec Chirac à Lisbonne un traité européen prévoyant l'ouverture forcée à la concurrence des secteurs de l'énergie et du rail. Ce qu'il nous faut, c'est renforcer la stratégie d'indépendance du Front de Gauche pour redevenir une vraie force anti-libérale pesant dans le paysage politique et capable de peser sur la stratégie électorale du PS.   

 

Lucienne Nayet. J'ai entendu plusieurs fois abuser du terme d' « usager » pour parler du bénéficiaire d'un service public. Il est plus adéquat de parler de « citoyen ». Méfions-nous des mots: ils nous font vite penser quand on n'y prendre pas garde dans la logique des idéologies dominantes que l'on veut combattre. Etre républicain, c'est aussi accorder de l'importance au choix et à la précision des mots. Ce qui me chagrine un peu dans ce débat, c'est que l'on voit mal à nous écouter quel espoir on peut donner aux gens. Qu'est-ce qu'il est possible de faire? Quelle alternative à ce capitalisme qui ravage le monde? Est-ce qu'il a d'autres solutions? Ce n'est pas en passant notre temps à se lamenter ou à taper sur le PS que l'on va s'en sortir et rassembler autour de nos idées. Au moment de la bataille du référendum de 2005, les gens avaient travaillé, réfléchi, projeté des choses. Il faut créer des utopies justement et ne pas orienter sa pensée simplement vers la critique de l'existant. Il faut se donner des outils de travail pour faire grandir une gauche unie volontariste. Un des moyens, c'est l'appel à l'idée républicaine qui mobilise même au-delà de la gauche. Ce que l'on détruit aujourd'hui, c'est l'Etat républicain, les valeurs républicaines et l'Etat républicain. Il y a là indéniablement un thème de rassemblement.

 

903Jean Dréan (PCF). La défense de la République, les cheminots savent ce que c'est, eux qui se sont mis en grève insurrectionnelle en 44. Or, aujourd'hui les menaces sur le service public ferroviaire sont nationales et locales. En quelques années, on est passé de 250000 cheminots à 150000. Or, le service public ne peut pas bien fonctionner et avancer sans l'intervention de l'homme. C'est pourquoi les incidents se multiplient à la SNCF (erreurs d'aiguillage, trains qui ne s'arrêtent pas en gare), souvent dus à du personnel précaire insuffisamment formé, surtout dans les activités de frêt déléguées au privé. A Morlaix, on disposait il y a dix ans d'un centre train/ route dernier cri qu'on a laissé mourir, de même que l'on revient aujourd'hui sur des projets d'aménagement de la gare qui avaient déjà été proposés par la CGT-cheminots il y a des années, sans écoute politique.

Il serait peut-être temps aussi de s'occuper de cette fraction de 45% d'électeurs que constituent les personnes âgées dans le Finistère. L'ADMR 29, qui avec 3500 personnes s'occupe de 50000 personnes âgées, est en faillite depuis un an et on ne s'en occupe pas alors que les cantonales approchent. La gendarmerie est même intervenue à l'initiative du président du CG 29, Pierre Maille, pour chasser le personnel qui occupait ses locaux. Il y a plusieurs départements qui ont eu le courage d'encourir les foudres de la loi en présentant un budget en déséquilibre puisque du fait des compétences transférées par l'Etat, du gel des dotations et des réformes fiscales, ils ne parvenaient plus à faire face à leurs dépenses sociales nécessaires. Au lieu de cela, Pierre Maille ne finance plus que 18h de services à la personne avec l'APA (Allocation Personnalisée Autonomie) au lieu de 24h initialement: c'est là toute la différence entre une gestion humaine et une gestion économique.

 

Un intervenant. Pour sortir des lamentations stériles et combattre efficacement le libéralisme, il faut trouver un mouvement qui nous réunisse sur un axe, un combat symbolique, rassembleur et gagnable. En 2005, on a gagné en élargissant le mouvement. Le clivage principal, on le connait tous, c'est celui entre ceux qui n'acceptent pas la société telle qu'on la vit et ceux qui se contentent de l'aménager. Je me posais la question: a t-on prévu de créer une adhésion Front de Gauche ouverte au citoyen pour élargir le mouvement? A t-on prévu de se réunir régulièrement, par exemple tous les 15 jours, pour faire un travail de fond et construire vraiment des propositions venant de la base? Va t-on construire des comités Front de Gauche?

 

Babeth. Dans mon esprit, ce qui peut nous réunir, c'est avant tout la résistance aux mesures du pouvoir en place.

 

Annie Le Calvez (PCF). Au moment des élections régionales, il y a eu un véritable élan au sein des militants d'origine et de culture diverses, parfois non encartés, qui échangeaient et se battaient au sein du Front de Gauche breton. Les citoyens doivent apporter leur réflexion au FDG.

 

Jean-Luc Le Calvez (PCF). Il y avait pas moins de sept parties prenantes au Front breton de Gauche lors des régionales. Il faut nous inspirer de ce qui s'est passé à ce moment là car il y avait un foisonnement d'idées, une dynamique formidable. Le but maintenant, c'est de faire émerger un besoin d'aller plus loin pour élaborer quelque chose. Le contenu doit être un garde-fou pour tout le monde, ce qui protège l'unité et évite les dérives opportunistes ou l'instrumentalisation pour servir une ambition personnelle. LE PS s'est félicité de son résultat aux régionales mais n'a pas relevé que 50% des bretons n'ont pas été voter lors de cette élection. Il faut faire revenir l'électorat abstentionniste.

 

Jean-Louis Reungoät (Groupe idées, conseiller municipal). Certes, il est indéniable que les régions et les départements sont aujourd'hui étranglés financièrement. Mais le service public de demain ne doit pas avoir peur de la concurrence. La bonne gestion économe est et sera toujours un impératif. S'agissant des politiques nationales, qu'on le veuille ou non, la mondialisation est là, on n'y peut rien. Ce qui me préoccupe, c'est plutôt l'incompétence des élus. Par exemple, d'Agnès Le Brun qui est présidente du CA de l'hôpital de Morlaix. La ville de Morlaix a 21 millions de budget, ce n'est pas rien, et il est déplorable de voir quelle utilisation sans vision, sans perspective politique, la majorité municipale en fait. Le service public n'a rien à craindre de la concurrence. Il est légitime de parler de coûts dans l'administration: ce n'est pas interdit.

 

Alain Rebours (GU). Attention aux mots truqués. Je n'ai rien moi non plus contre la bonne veille gestion à la papa aboutissant à l'équilibre budgétaire et à une forme de prévoyance mais aujourd'hui, quand on nous parle de bonne gestion, on pense privatisation, suppression de postes, renforcement des cadences, course à la rentabilité.

 

913Hubert Peneau (Parti de Gauche). Cette année encore, alors que les gouvernements européens font payer tout le poids des crises de la dérégulation financière aux peuples à travers le démantèlement de leur protection sociale, de leurs services publics et souvent des baisses de salaires dans la fonction publique, les actionnaires et les PDG d'entreprises cotées en bourse se gavent, ignorant manifestement la crise. Il ne faut pas se tromper de problème et mettre en avant l'impératif de rigueur dans la gestion des services publics et des collectivités mais bien reconnaître la forfaiture de l'ennemi. Le livre de Stephane Hessel a lancé la mode de la pose indignée, mais aujourd'hui, face à l'offensive sans précédant du capital contre les peuples, qui joue habilement de la concurrence entre les systèmes sociaux et fiscaux au niveau mondial, il ne suffit pas de s'indigner, il faut s'insurger, mettre à bas le pouvoir de la finance. Non, évidemment, nous ne pouvons pas nous allier avec tout le monde: seul un parti ou un candidat anti-capitaliste peut être un partenaire pour nous.

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 A la fin du débat, un rendez-vous est pris dans quelques semaines pour une nouvelle réunion Front de Gauche pour l'élaboration d'un programme partagé en 2012 portant sur: La crise de la démocratie et les moyens de la renouveler (notamment par de nouvelles institutions et une VIème République).

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