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4 juillet 2020 6 04 /07 /juillet /2020 06:03
Cisjordanie :  L’occupation c’est la terreur ; l’annexion c’est l’apartheid - Tribune collective publiée dans l'Humanité
Vendredi, 26 Juin, 2020 - L'Humanité
Cisjordanie : « L’occupation c’est la terreur ; l’annexion c’est l’apartheid »

Nos voix pour la paix s’adressent à Emmanuel Macron, président de la République française, et Josep Borrell, haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires extérieures et la politique de sécurité. Texte collectif.

 

L’annonce du plan Trump et la constitution du nouveau gouvernement israélien créent une situation nouvelle. Benyamin Netanyahou s’apprête à divulguer sa feuille de route le 1 er juillet en vue d’annexer la vallée du Jourdain et les colonies implantées, soit la moitié de la Cisjordanie. La terre palestinienne sera alors réduite à des sortes de « bantoustans », démilitarisés, sans continuité territoriale ni maîtrise des frontières. Parler d’État dans ces conditions est d’un cynisme révoltant.

Le pillage colonial légalisé

Le « deal du siècle » imposé par Donald Trump et Benyamin Netanyahou est l’acte de délinquants internationaux. Il entérine l’impunité des autorités d’Israël et le régime d’apartheid issu notamment de la loi État-nation, il enterre la solution à deux États et constitue un coup de force inacceptable contre la légalité internationale, la justice et le respect des droits humains. D. Trump et B. Netanyahou légalisent le pillage colonial et attisent les tensions dans une région déjà meurtrie. Le peuple palestinien est sommé d’accepter que son destin soit scellé sans sa participation.

Ce plan constitue une nouvelle grave violation des droits des Palestiniens, il n’amènera aucune paix mais, au contraire, quoi qu’il advienne, il ne fera qu’aggraver une situation insupportable pour les Palestiniens, mais aussi à terme pour le peuple israélien. Aucun plan n’aboutira s’il ne tient pas compte des intérêts des Palestiniens et des Israéliens, conformément au droit international.

Des décennies de lutte

En Israël et dans le monde, la mobilisation grandit pour empêcher l’annexion et l’application du projet destructeur de D. Trump. Les responsabilités de la France et de l’Union européenne sont dans ce cadre immenses. Il serait inadmissible, comme cela se profile, d’en rester à des déclarations de principe sans adopter des actes forts.

Il a fallu des décennies de lutte des mouvements de libération nationale face au colonialisme pour que la charte des Nations unies s’impose pour tenter de bâtir un monde de paix. Ne pas faire respecter les résolutions de l’ONU sur la Palestine, c’est se rendre complice de la désintégration du droit international et de la justice. En cela, Paris doit prendre l’initiative d’un vote au Conseil de sécurité.

Sans ambiguïté aucune, la France et l’Union européenne doivent condamner toute idée d’annexion et reconnaître immédiatement l’État de Palestine dans ses frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale. L’unanimité requise des États de l’Union européenne (UE) n’est qu’un irrecevable prétexte dilatoire.

Une paix juste

Sans attendre, des sanctions doivent être adoptées contre l’État d’Israël comme la suspension de l’accord d’association avec l’UE ou la coopération militaire. Il en va de même pour les entreprises qui maintiennent des relations d’affaires avec les colonies, ainsi que l’interdiction d’importer des produits des colonies. Ces exigences sont désormais portées par des voix de divers horizons.

Suspendre et contrecarrer toute perspective d’annexion par des sanctions immédiates, agir pour le plein respect du droit international et la reconnaissance de l’État de Palestine afin de permettre aux Palestiniens d’exercer leur droit à l’autodétermination contribueront à faire reculer la politique du fait accompli et la violence guerrière que B. Netanyahou et D. Trump exaspèrent. C’est la condition d’une paix juste et durable indispensable aux peuples palestinien et israélien, aux peuples de la région et du monde entier.

La liste complète des signataires

Gilbert ACHCAR professeur, université de Londres

Martine ADDED enseignante retraitée, animatrice PCF à Blagnac

Gadi ALGAZI historien, université de Tel Aviv

Tewfik ALLAL  militant associatif

Paul ALLIES professeur des Universités

Jean-Loup AMSELLE anthropologue à l'EHESS

Evelyne ANDRE citoyenne de Saint-Denis

Eliane ASSASSI sénatrice de Seine Saint-Denis, présidente du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE)

Henri AUSSEIL

Bertrand BADIE professeur émérite des universités à l'IEP-Paris

Myriam BARBERA BOYER députée honoraire, journaliste

Mustapha BARGHOUTI Secrétaire général de l’Initiative nationale palestinienne

Anne BAUDONNE

Cyril BENOIT membre de la coordination nationale du MJCF

Henri BERTHOLET ancien député

Omar BESSAOUD enseignant-chercheur en économie

Danielle BIDARD-REYDET Sénatrice honoraire

Isabelle BLOCH professeure émérite - université de Bordeaux

David BLUMENTAL

Jean-Pierre BOSINO maire de Montataire, conseiller départemental de l'Oise et ancien sénateur

Alain BOUVIER cadre d’entreprise retraité, militant du PCF

Rony BRAUMAN médecin, essayiste

Nadine BRIATTE retraitée

Corinne BRUNN médecin retraitée

Marie-George BUFFET députée de Seine-Saint-Denis, ancienne ministre

Maurice BUTTIN avocat honoraire, président d'honneur du CVPR PO

Mathilde CAROLY maire-adjointe PCF à Saint-Denis

Monique CERISIER BEN GUIGA sénatrice honoraire

Gérard CHAOUAT syndicaliste FSU, membre d'Ensemble

Alain CHOLLON journaliste

Laurence COHEN sénatrice du Val-de-Marne (CRCE)

Max COIFFAIT journaliste honoraire

Marie-José COLLET retraitée

Jean-Louis COMOLLI cinéaste, écrivain

Antoine COMTE avocat à la Cour

Jacqueline COUSTENOBLE retraitée

Janine COUX

Annie CYNGISER retraitée sociologue

Christiane DARDE consultante

Léon DEFFONTAINES secrétaire général du MJCF

Michel DELPACE

Jacqueline DERENS ancienne militante contre l'apartheid

Michel DIARD journaliste, syndicaliste, docteur en sciences de l’information et de la communication

Michel DOLOT pacifiste

Xavier DUBOIS conseiller municipal de Maubeuge

Bernard DUPIN militant associatif

Gérard FILOCHE porte-parole de la Gauche démocratique et sociale (GDS)

Pierre FLAMENT militant du Mouvement de la Paix en Seine-Saint-Denis

Jean-Luc FLAVENOT agent territorial, militant CGT et PCF

Léo GARCIA membre de la coordination nationale du MJCF

Fabien GAY sénateur de Seine-Saint-Denis (CRCE)

Olivier GEBUHRER co-animateur d'Une Autre Voix Juive

Pierre GETZLER

Marcel GHESQUIERE citoyen engagé pour la Palestine, membre de l'UJFP et de EuroPalestine

Marc GICQUEL militant de la solidarité internationale

Gérard GUERIN ingénieur agronome, retraité

Bertrand HEILBRONN président de l'Association France Palestine Solidarité (AFPS)

Adrien HELARY membre de la coordination nationale du MJCF

Françoise HILY membre de la section PCF de Nangis

Yves JARDIN professeur retraité, militant de la cause palestinienne

Jean-Pierre JOUSSANT cellule Bossel-Riou du PCF, quartier château-rouge Paris 18

Denise KARNAOUCH

Theo KECECIOGLU membre de la coordination nationale du MJCF

Mohammed KHATIB résistance populaire et non violente palestinienne

Jacqueline KISSOUS responsable associative AFPS

Robert KISSOUS économiste

Danielle LAMBERT retraitée de l'assurance

Françoise LAPIERRE ATHON retraitée, compagnon de route du PCF

Pierre LAURENT sénateur de Paris, vice-président de la commission des Affaires étrangères au Sénat

Ivan LAVALLEE docteur d'état es sciences, pupille de la Nation

Clémentine LE DUEY membre de la coordination nationale du MJCF

Méline LE GOURRIEREC membre du collectif Palestine du PCF

Christian LE GOURRIEREC responsable de l'AFPS Montreuil

Patrick LE HYARIC directeur du journal L'Humanité

Aurélie LE MEUR membre du collectif Palestine du PCF

Renée LE MIGNOT co-présidente du MRAP

Patrice LECLERC maire de Gennevilliers

Jean-Paul LECOQ député de Seine-Maritime, membre de la commission des Affaires étrangères

Pascal LEDERER physicien, co-animateur d'Une Autre Voix Juive

Jean-Claude LEFORT député honoraire

Léonard LEMA membre de la coordination nationale du MJCF

Daniel LESAGE

Jacques LEWKOWICZ Union des juifs pour la résistance et l'entraide (UJRE)

Nathalie L'HOPITAULT membre du collectif Palestine du PCF

Mélanie LUCE présidente de l'Unef, syndicat étudiant

Paulina MACIAS GONZALEZ psychanalyste

Patrick MARGATE militant du PCF

Claude et Simone MAZAURIC historien et philosophe, professeurs honoraires des universités

Fabienne MESSICA secrétaire générale adjointe de la LDH

Michel MULLER ancien agent diplomatique, journaliste retraité

Camille NAGET

Roland NIVET porte-parole national du Mouvement de la Paix

Josette PAC

Jeanne PECHON membre de la coordination nationale du MJCF

Gilles PERRAULT écrivain

Pierre PETER retraité

Stéphane PEU député de Seine-Saint-Denis

Ernest PIGNON-ERNEST  artiste plasticien

Boris PLAZZI secrétaire confédéral de la CGT chargé de l'International

Raphaël PORTEILLA enseignant, Université de Bourgogne

Françoise POTEAU retraitée de l'Education nationale et élue

Christine PRUNAUD sénatrice des Côtes-d'Armor

Bernard RAVENEL historien

Michel RIZZI cadre à la RATP

Fabien ROUSSEL député du Nord, secrétaire national du PCF

Alain ROUXEL

Alain RUSCIO historien

Laurent RUSSIER maire de Saint-Denis

Lydia SAMARBAKHSH responsable des relations internationales du PCF

Claude SARCEY

Aurore SARDA retraitée de l'Education national, syndicaliste dans la FSU et le SNUipp

Leila SHAHID ex Déléguée Générale de Palestine en France et auprès de l'Union européenne

Kobi SNITZ militant anticolonialiste israélien

Tauba-Raymonde STAROSWIECKI

Annie STASSE

Taoufiq TAHANI universitaire

Pierre TARTAKOWSKY président honoraire de la LDH

Jacques TESTART biologiste et essayiste

Eric THOUZEAU conseiller régional GDS des Pays de la Loire

Mathilde TRACLET membre de la coordination nationale du MJCF

Marie-Claude TREILHOU cinéaste

Dominique VIDAL journaliste et historien

Francis WURTZ député européen PCF honoraire

Natale ZICCHINA

Henriette ZOUGHEBI collectif 93 pour la libération des enfants palestiniens

Retrouvez l'intégralité des signataires ICI

Pour être signataire de cette lettre, merci d'envoyer un mail à collectif-palestine@pcf.fr en précisant votre qualité. Nous mettons à jour la liste le plus régulièrement possible.

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1 juillet 2020 3 01 /07 /juillet /2020 07:27
Mardi 30 juin 2020

Communiqué du Comité de soutien à Salah Hamouri / 30 juin 2020

Ce mardi 30 juin, alors qu’il se rendait à Jérusalem pour effectuer un test coronavirus (obligatoire) pour prendre l’avion samedi 4 juillet, pour se rendre en France, Salah Hamouri a été arrêté dans un centre médical par les autorités israéliennes. Il a été conduit au centre d’interrogatoire de la Moskobiyeh, à Jérusalem. Le motif de son arrestation ne lui pas été communiqué. Déjà en août 2017, Salah Hamouri avait été arrêté quelques jours avant un voyage prévu en France pour y retrouver sa femme et son fils et il avait alors purgé treize mois de détention administrative, sans peine ni jugement ni la moindre accusation prouvée. Cela suffit amplement ! Son comité de soutien, sa famille, ses amis et collègues en appellent solennellement aux autorités françaises pour qu’elles agissent immédiatement et fortement pour obtenir la libération immédiate et sans conditions de notre concitoyen qui a droit à la liberté de circulation.

https://www.france-palestine.org/URGENT-Agissez-pour-la-liberation-de-Salah-Hamouri

Pays De Morlaix Afps

Le Homard Enchaîné

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1 juillet 2020 3 01 /07 /juillet /2020 05:26
La Fédération du Finistère du PCF se joint à l'AFPS et appelle aux rassemblements le 01/07 à 18 h place de la Liberté  à Brest et  à 18 h place Terre-au-Duc à Quimper
La Fédération du Finistère du PCF se joint à l'AFPS et appelle aux rassemblements le 01/07 à 18 h place de la Liberté  à Brest et  à 18 h place Terre-au-Duc à Quimper pour dénoncer le plan Trump-Netanyahou d'annexion de la vallée du Jourdain en Palestine occupée.
De toute évidence, le Covid-19 n'entrave pas le projet colonial israélien. L’agressivité israélienne et la répression contre les Palestiniens ne faiblissent pas. L'armée et les colons profitent de la situation: assassinats en Cisjordanie, intervention violente à Jérusalem-Est, destruction de maisons tandis que les incursions militaires dans la bande de Gaza n'ont jamais cessé.
Depuis l'annonce du plan Trump, l'annexion de la vallée du Jourdain et d'une partie des territoires de la Cisjordanie se profile. Après l'accord de gouvernement entre B. Netanyhou et B. Gantz, le processus devrait débuter le 1er juillet contribuant à un regain d'instabilité et de tensions avec les pays voisins et notamment la Jordanie. Un nouvel embrasement régional s'annonce.
 
Le Parti communiste français dénonce avec force cette politique d'annexion et d'apartheid rendue possible par le non respect des résolutions internationales, le soutien inconditionnel des États-Unis et la complaisance des États de l'Union Européenne.
 
Le PCF exige la fin de tous les accords de coopération économique avec Israël. La paix dans la région ne reviendra pas sans la reconnaissance des droits légitimes du peuple palestinien à disposer d'un État dans le cadre des frontières de 1967.
 
Les périls sont chaque jour grandissants pour les Palestiniens. Partout la mobilisation doit grandir pour que la France et l'Union européenne condamnent le plan Trump et toutes perspectives de nouvelles annexions.
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23 juin 2020 2 23 /06 /juin /2020 05:19

Qui oserait, aujourd’hui, se réclamer de Donald Trump (nous parlons là de tout humain doté de raison) ? Sans aller jusqu’à faire le bilan de trois années de mandat, sa gestion de la pandémie du coronavirus et de la crise raciale qui a suivi la mort de l’Afro-Américain George Floyd en disent long sur le président des Etats-Unis. S’agissant de la crise sanitaire, il y eut d’abord, entre fin janvier et la mi-mars, dénégation, puis minimisation de la gravité de l’épidémie. Avec ses épisodes ubuesques. Quand, le 10 février, en meeting dans le New Hampshire, Trump déclare : « En avril, dès que les températures auront un peu remonté, ce virus disparaîtra. Comme par miracle. » Quand, en pleine réunion à la Maison-Blanche, le 23 avril, il « réfléchit » à haute voix et suggère d’injecter de l’eau de javel dans les poumons malades ou, pourquoi pas, un traitement aux UV ? « Les briefings de Trump mettent activement en danger la santé du public. Boycottez la propagande. Ecoutez les experts. Et s’il vous plaît, ne buvez pas de désinfectant », devra déclarer, soutenu par la communauté scientifique, Robert Reich, un professeur de la prestigieuse université de Berkeley. Entretenant la confusion, le locataire de la Maison-Blanche n’en appelle pas moins ses partisans à manifester pour « libérer » du confinement les Etats – Michigan, Minnesota, Virginie – gérés par des gouverneurs démocrates. Conséquence : une politique aussi incohérente tue les malades plutôt que la maladie. Désormais premier foyer planétaire du coronavirus, les Etats-Unis comptabilisent plus de 117 000 morts à l’heure de la rédaction de ce billet.

Même positionnement aberrant après la mort de George Floyd asphyxié par le policier Derek Chauvin à Minneapolis. La situation provoque un mouvement de colère historique, toutes communautés confondues (sauf celles des chrétiens évangéliques blancs, socle électoral du président). Sans un mot de compassion pour la victime et sa famille, Trump parle de déployer l’armée pour ramener le calme dans les villes que secouent d’importantes manifestations contre les violences policières et la discrimination raciale.

Même des figures du Parti républicain s’opposent désormais à la façon dont le businessman gère le pays. Depuis les colonnes du magazine The Atlantic, son ex-ministre de la Défense, James Mattis, est monté au créneau : « De mon vivant, Donald Trump est le premier président qui n’essaie pas de rassembler les Américains, qui ne fait même pas semblant d’essayer. Au lieu de cela, il tente de nous diviser. (...) Nous payons les conséquences de trois années sans adultes aux commandes. » Plus significatif encore : l’actuel titulaire du Pentagone, Mark Esper annonce en conférence de presse son opposition à l’usage de la Loi d’insurrection qui, pour rétablir l’ordre, permettrait d’utiliser l’armée contre les manifestants.


Dans sa logique impérialiste, dans son obsession de détruire le multilatéralisme et le droit international, la grosse patte rugueuse de Trump va jusqu’à menacer de quitter, en lui coupant définitivement les vivres, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), et à autoriser des sanctions économiques – son arme favorite contre les pays souverains qui lui déplaisent – envers tout magistrat ou responsable de la Cour pénale internationale (CPI) qui enquêterait sur des militaires américains ou les inculperait « sans le consentement des Etats-Unis » [1]. Est-il nécessaire de développer plus avant ?

Qui (nous parlons-là des personnes responsables) oserait encore soutenir le président brésilien Jair Bolsonaro ? Dès 2016, ce médiocre parlementaire d’extrême droite avait annoncé la couleur : « La carte de visite pour un marginal du MST [Mouvement des sans terre], c’est une cartouche de 7.62. » Nostalgique de la dictature militaire, arrivé au pouvoir grâce au coup d’Etat juridico-parlementaire contre Dilma Rousseff, puis l’emprisonnement arbitraire de Luiz Inácio Lula da Silva, Bolsonaro a nommé un ministre des Affaires étrangères à son image : Ernesto Araujo. Hanté par la « menace communiste », ce dernier voit en Trump « le sauveur de l’Occident ».
Négationniste comme son mentor du Nord face à la pandémie, Bolsonaro la « gère » de la même façon. Ministre de la Santé, le populaire Luiz Henrique Mandetta a été limogé en avril pour avoir prôné la distanciation sociale et exprimé son désaccord avec la politique du gouvernement fédéral. Il a été remplacé par un millionnaire, Carlos Wizard, dépourvu d’une quelconque expérience dans le domaine de la santé.

Pour tenter de cacher la réalité désastreuse du Covid-19 – plus de 44 000 morts désormais – alors que le président continue d’en nier la gravité, les autorités ont tenté de changer la façon de compter les cas de contaminations et de décès. Il a fallu que la Cour suprême intervienne pour les en empêcher. De la même manière, le juge Marcio Santoro Roch avait dû annuler un décret présidentiel publié le 27 mars pour exclure les églises, les temples religieux et les bureaux de loterie des mesures de quarantaine imposées dans certains Etats.

Durant une réunion ministérielle tenue le 22 avril, Bolsonaro, entre insultes et propos venimeux, a demandé à ce que la population soit armée pour éviter qu’une dictature ne s’installe à la tête du pays. Dans le collimateur : les maires et gouverneurs qui adoptent des mesures contraires à ses recommandations dans la lutte contre le fléau sanitaire.


 Si la température grimpe en flèche au Brésil, ce n’est toutefois pas uniquement en raison de la pandémie. Car, le 19 avril, à Brasilia, en haranguant des manifestants qui, brisant la quarantaine, s’étaient rassemblés devant la Caserne générale de l’armée, Bolsonaro a légitimé de fait leur demande : une intervention militaire et la mise en œuvre de l’Acte institutionnel n° 5 (AI-5). En 1968, celui-ci avait permis de supprimer de nombreuses garanties constitutionnelles et de fermer le Congrès.
Ces prises de position témoignent de l’embarras de l’extrême droite brésilienne. Un juge de la Cour suprême, Celso de Mello, a en effet autorisé l’ouverture d’une investigation sur les accusations selon lesquelles Bolsonaro a tenté de s’ingérer dans le travail de la Police fédérale à des fins politiques. Il s’agissait pour lui d’en faire remplacer le chef pour éviter des enquêtes concernant ses fils. Par ailleurs, le Tribunal supérieur électoral a ouvert une enquête pour déterminer si, lors de la campagne présidentielle de 2018, le « candidat Bolsonaro » n’a pas utilisé des réseaux illégaux disséminant des « fake news » – ce qui, de fait, remettrait en cause son élection.

Depuis lors, le ton monte contre l’Etat de droit. Le 21 mai, le député fédéral Bia Kicis (PSL-GO), un allié du chef de l’Etat, a suggéré une « intervention militaire constitutionnelle » au cas où l’on continuerait à empêcher celui-ci de gouverner. Alors que les voix se multiplient pour demander sa démission ou une procédure d’ « empeachment », Bolsonaro a explicitement averti (13 juin) la Cour suprême et le Congrès – où il ne dispose pas d’une majorité – que « les Forces armées n’obéissent pas à des ordres absurdes » et qu’elle n’accepteront pas le résultat d’un éventuel jugement politique destiné à le destituer.

Pour les Brésiliens, le message est clair : en affichant son désir de s’arroger tous les pouvoirs, en s’attaquant délibérément aux corps constitués, Bolsonaro prône rien moins qu’un retour aux méthodes de la dictature militaire du passé.

Qui (nous parlons là des citoyens moyennement informés) se répandrait en félicitations sur la gestion du président colombien Iván Duque ? Signés en 2016 avec la guérilla des Forces armés révolutionnaires de Colombie (FARC) les Accords de paix ont été torpillés. Dans l’impunité la plus totale, toutes les vingt-quatre heures, un dirigeant social ou populaire est assassiné.

Les scandales succèdent aux scandales. On apprend que, en 2019, dans la plus totale illégalité, des membres des services de renseignement de l’armée ont placé sur écoute et espionné 130 personnes – magistrats, opposants, journalistes (dont des reporters du New York Times, du Wall Street Journal et de National Geographic) [2]. On découvre que l’actuelle vice-présidente, Marta Lucía Ramírez, a payé 150 000 dollars de caution en 1997 pour faire remettre en liberté, pendant son jugement, son frère Bernardo Ramírez Blanco, arrêté à Miami pour narcotrafic. Celui-ci fut condamné à une peine minime eu égard aux charges qui pesaient sur lui, mais pendant plus de vingt ans, en Colombie, Marta Lucía Ramírez poursuivit sa carrière politique sans jamais rendre publique cette information.
Devant le tollé provoqué par cette révélation et les demandes de démission provenant d’un certain nombre de sénateurs, le ban et l’arrière-ban de la droite se sont mobilisés pour défendre la « persécutée ». L’intervention la plus remarquée a été celle de Samuel Azout, un « homme d’affaires respectable », ex-Haut conseiller pour la prospérité sociale du président Juan Manuel Santos, quand il a déclaré : « Que celui qui n’a pas un parent ou un ami qui ait été narcotrafiquant lui jette la première pierre [3] ! » Ce qui a au moins le mérité de la clarté.

Il convient de noter à ce propos que, depuis mai dernier, l’époux de la vice-présidente, Álvaro Rincón Muñoz, doit s’expliquer devant la justice pour ses liens d’affaires, dans le secteur immobilier, avec Guillermo León Acevedo, alias « Memo Fantasma », connu pour ses liens avec les paramilitaires et les narcotrafiquants. Et que la Commission d’investigation et d’accusation de la Chambre des représentants a ouvert une enquête préalable contre le président Duque en personne, mis en cause dans le cadre de la « Ñeñepolítica ». Pour mémoire : avant sa mort par assassinat en mai 2019, l’éleveur José Guillermo Hernández Aponte, dit « Ñeñe », lui aussi notoirement proche des mafieux, a révélé des « achats de votes » et une fraude électorale organisés sur la côte caraïbe et dans la Guajira, pour favoriser l’élection de l’actuel chef de l’Etat [4].

Dans ces conditions, faut-il s’étonner de la nomination récente, mais surtout particulièrement cynique, au poste de Coordinateur des victimes du conflit armé, au sein du ministère de l’Intérieur, de Jorge Rodrigo Tovar, fils de l’ex-paramilitaire Rodrigo Tovar Pupo, alias « Jorge 40 » ? Démobilisé en 2006, extradé aux Etats-Unis en mai 2008 pour trafic de drogues, prochainement libéré après douze années d’incarcération, « Jorge 40 », ex-commandant du Bloc Nord des Autodéfenses unies de Colombie (AUC), est directement responsable de 333 massacres dans les Départements de l’Atlantique, du César, du Magdalena et de la Guajira, avec un solde de 1 573 victimes [5]. Il a été exclu du programme Justice et paix, pourtant particulièrement clément, car clé de voûte de la stratégie du président Uribe vis-à-vis de ses alliés, pour n’avoir rien révélé des actes commis sous ses ordres et son désintérêt total pour leurs victimes.

Un fils ne peut être tenu pour responsable des crimes de son père. Mais, s’est interrogé le député Inti Asprilla (Alliance verte), en phase avec un sentiment largement partagé, « comment va être résolu le conflit d’intérêt : par exemple quand se présenteront à son bureau des victimes de son père [6] » ? Sachant que, publiquement, il défend son géniteur, le considérant comme un « prisonnier politique aux Etats-Unis » et un « héros ».

Dernière polémique en date. L’arrivée dans le pays des cinquante premiers militaires étatsuniens d’une Security Force Assitance Brigade (SFAB) en comportant dans le futur un nombre indéterminé – peut-être jusqu’à 800. Pour une telle incursion d’une force étrangère sur le territoire national, le Sénat colombien aurait dû donner son autorisation. Il n’a pas été consulté. Visée annoncée du déploiement : la lutte contre le narcotrafic (vingt ans après le début du Plan Colombie – 10 milliards de dollars pour le même supposé objectif – signé par les présidents Bill Clinton et Andrés Pastrana !). Avec une particularité relevée, entre autres, par le sénateur Iván Cepeda (Pôle démocratique alternatif ; PDA) : le manuel d’opérations de ces Forces spéciales « mentionne explicitement la fonction de conseiller des milices non gouvernementales et des associés irréguliers ». Faut-il traduire des groupes illégaux ? Si l’on excepte les guérillas encore en activité, par définition écartées d’une telle alliance, il n’en existe que de deux types (étroitement liés) : les paramilitaires (rebaptisés « bandes criminelles émergentes ») et les narcotrafiquants. Pour lutter contre les activités illicites dont ils sont les acteurs principaux ? Plus vraisemblable : avec les yeux tournés vers un certain pays voisin (au hasard : le Venezuela).

Trump, Bolsonaro, Duque [7]… Les défauts, tares et souillures qui ternissent leurs mandats sont unanimement réprouvés, et pas uniquement à gauche. Difficile pour quiconque défend une cause ou entend mettre en scène sa propre respectabilité de revendiquer publiquement l’appui de tels « parrains ». Quand bien même ils seraient votre « boss » (Trump) et vos deux partenaires privilégiés. Face aux humains dotés de raison, aux personnes responsables et autres citoyens moyennement informés évoqués précédemment, la mise en avant d’une telle confrérie se révélerait hautement significative. Et donc contreproductive.

Situation des plus inconfortables pour le président autoproclamé du Venezuela Juan Guaido, leur protégé. Il est en perte de vitesse, chez lui et à l’étranger. De larges factions de l’opposition vénézuélienne ne croient plus en lui. Voire entendent le mettre hors-jeu. Depuis septembre 2019, les secteurs « responsables » de la droite antichaviste négocient avec le gouvernement de l’authentique chef de l’Etat, Nicolás Maduro. Ils préparent ensemble le renouvellement du Conseil national électoral (CNE), en vue d’organiser des élections législatives en cette année 2020. S’ils disposent en s’alliant de la majorité au Parlement, l’opposition modérée et les chavistes, du fait de l’obstruction des radicaux, n’atteignent pas les deux tiers des voix nécessaires à la nomination des nouveaux recteurs du CNE. D’où une situation bloquée. Conformément à ce que stipule la Constitution, c’est donc le Tribunal suprême de justice (TSJ) qui, avec l’aval de la droite modérée, les nommera (le 13 juin). Provoquant qui plus est d’importantes scissions et luttes pour le contrôle des partis traditionnels – Action démocratique, Primero Justicia –, entre les partisans d’une sortie politique et les fous furieux pro-Guaido. Une catastrophe, une défaite politique majeure pour Washington (et ses supplétifs de l’Union européenne), l’extrême droite et le chef d’Etat imaginaire qui, en aucun cas, ne veulent d’un prochain scrutin. Il leur faut « faire tomber » Maduro dans le chaos, la violence et le sang. D’où la contre-offensive lancée depuis plusieurs semaines par Guaido. Mais qui pour se substituer à ses encombrants partenaires, dans le travail de propagande qu’il doit mener ?

 

Pour le quotidien français Le Monde, et s’agissant de la République bolivarienne, « toutes les compromissions sont sur la table ». Dans son édition datée du vendredi 12 juin, c’est donc lui qui offre une demi-page de « tribune » au protégé de Trump, Bolsonaro et Duque. Titre : « Sauvons le Venezuela ensemble ». Aucune surprise dans le texte, porteur de l’argumentation classique de l’extrême droite « bushiste » « trumpiste » et vénézuélienne depuis 2002. Objectif principal (et, d’une certaine manière, plutôt amusant) : « Nous appelons la communauté internationale à être particulièrement vigilante sur les efforts de Nicolas Maduro pour mettre définitivement fin à la démocratie au Venezuela. Il compte en effet organiser de nouvelles élections législatives cette année. » En lieu et place, l’homme lige de l’Impérialisme et de la réaction préconise un « gouvernement national d’urgence ». Cela ne coûtant rien, il lustre de quelques coups de brosse à reluire appuyés les « pompes » de l’ex-« socialiste » Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères rallié au président de droite Emmanuel Macron. Le Monde, bien entendu fait sa part du travail de sape. Destiné à demeurer imprimé dans l’esprit du lecteur, composé en plus gros, en lettres capitales et en couleur, l’intertitre reprend la plus spectaculaire des accusations de Guaido (et de Trump, son patron [8]) :

 

 

« La réalité est la suivante : une narco-dictature s’est saisie des institutions et confisque tous les pouvoirs au Venezuela ». En fin de dernière colonne, comme il se doit, également rédigée par le quotidien, ce qu’on appelle la « note signature » : « Juan Guaido Marquez est reconnu comme “président par intérim” de son pays par les Etats-Unis, la France et plus de cinquante pays ».

 « Ah ! non ! c’est un peu court, jeune homme ! », réagirait Cyrano de Bergerac devant une telle provocation. « On pouvait dire… Oh ! Dieu ! … bien des choses en somme… En variant le ton – par exemple, tenez… »

Juan Guaido, devient député en 2015, avec 91 000 voix (sur les 20 millions d’inscrits sur les listes électorales). N’a émis aucune désapprobation, blâme ou critique, quand, le 4 août 2018, une tentative d’assassinat de Maduro à l’aide de deux drones chargés d’explosifs a échoué de peu. Est élu « président par intérim » le 23 février 2019 par l’administration Trump après que, la veille, le vice-président Mike Pence ait appelé l’opposition à descendre dans la rue. Se proclame chef de l’Etat sur un bout de trottoir. Un mois plus tard, se fait aider par des criminels notoires – les narco-paramilitaires colombiens Los Rastrojos (1 500 victimes) – pour passer clandestinement en Colombie [9]. Destitue fin novembre son pseudo ambassadeur dans ce pays, Humberto Calderón Berti, après que celui-ci ait dénoncé d’importantes malversation des fonds de la supposée « aide humanitaire » de la part de l’équipe désignée par Guaido pour l’administrer.

Sans se préoccuper aucunement des souffrances infligées à la population, l’individu réclame et appuie les mesures coercitives unilatérales imposées par les Etats-Unis à son pays, dans le but de le mettre à genou économiquement (dernier épisode en date : le Département des Transports US vient d’infliger une amende de 450 000 dollars à la compagnie aérienne panaméenne COPA pour avoir transporté « illégalement », en leur faisant faire une escale évitant un vol direct, « interdit », 15 000 Vénézuéliens entre les Etats-Unis et leur pays). Guaido pille et laisse piller par la puissance impériale les actifs de l’Etat vénézuélien, dont ceux de sa compagnie pétrolière PDVSA, à l’étranger. Le 30 avril 2019, en compagnie d’un groupe réduit de militaires, il tente un dangereux coup de poker en feignant avoir « pris », à Caracas, la base aérienne de La Carlota, afin de faire basculer et l’armée et la population. Personne ne le suit. Le coup d’Etat échoue. Réussi, il aurait déclenché une tragédie.

Le 16 octobre 2019, Guaido signe un contrat avec Jordan Goudreau, ancien béret vert US et patron d’une compagnie de sécurité privée basée en Floride, Silvercorp [10]. En échange de 212,9 millions de dollars pour une opération durant globalement 495 jours, le mercenaire s’engage à conseiller et assister l’équipe du président élu par Trump, Bolsonaro et Duque « dans la planification et l’exécution d’une opération pour capturer / arrêter / éliminer Nicolás Maduro » (pour les respectables journalistes du Monde ne disposant pas d’un dictionnaire des synonymes, on précisera qu’ « éliminer », dans un tel contexte, signifie « assassiner »).

C’est ce même Goudreau qui encadre, avec deux autres mercenaires américains, l’opération « Gedeón » du 3 mai dernier : une tentative d’incursion de plusieurs dizaines de commandos (essentiellement des déserteurs vénézuéliens) pour s’emparer de Maduro, « éliminer » un certain nombre de dirigeants chavistes et provoquer la confusion – sachant que, à proximité immédiate, dans la Caraïbe, les Etats-Unis ont déployé une flotte navale, dont un porte-avions, susceptible d’intervenir pour des raisons « humanitaires », afin de « sauver des vies », en cas de chaos [11]

Entraînés par les hommes de Goudreau en Colombie, les assaillants y ont bénéficié au moment de leur départ de la collaboration non des Rastrojos, mais, cette fois, d’Elkin Javier López Torres, alias « Doble Rueda », l’un des principaux « capos » du narcotrafic de la région de la Guajira.

Au terme de ce nouvel échec (qui confirme les liens mafieux de sa mouvance), Guaido ne cache pas sa satisfaction lorsqu’il entend Donald Trump déclarer qu’il a « encerclé » le Venezuela à un niveau « que tout le monde ignore » et que « quelque chose arrivera » parce que Washington « ne supporte plus la situation [12] ».
A chacun ses références. Pour l’anti-Bolsonaro, le très respecté ex-président brésilien « Lula » – élu homme politique de l’année 2004, quand il était à la mode (pour de bonnes raisons) par le quotidien… Le Monde –, il y a longtemps que Guaido « devrait être en prison pour les violences meurtrières qu’il a co-organisées et ses tentatives de coup d’Etat [13]  ».

Voilà, somme toute, ce qui aurait pu figurer dans la « note signature »d’un quotidien d’information. Il n’en a rien été. Pourquoi ? La question est moins innocente qu’il y paraît. On ne prétendra pas ici que Le Monde est « à la botte du pouvoir » – ce qui serait particulièrement insultant. Mais on notera tout de même que, par le plus grand des hasards, la tribune de Guaido est parue le jour même où l’ambassadeur d’Emmanuel Macron au Venezuela, Romain Nadal, régulièrement épinglé pour son appui ostentatoire au président fantoche, devait être auditionné par le Sénat.


 


[1L’enquête souhaitée par la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, vise entre autres des exactions qui auraient été commises par des soldats américains ou des agents de la CIA en Afghanistan, pays où les Etats-Unis mènent depuis 2001 la plus longue guerre de leur histoire.

[2Curieusement, Jorge Mario Eastman, ex-vice-ministre de la Défense (sous Andrés Pastrana et Álvaro Uribe), puis secrétaire général de la Présidence de Duque, a également été espionné.

[3https://twitter.com/samuelazout/status/1271394953961377800

[4http://www.medelu.org/La-Colombie-aux-temps-du-cholera

[5https://bit.ly/2zcWE8w

[6 El Tiempo, Bogotá, 19 mai 2020.

[7Plus, évidemment, leurs habituels comparses : le chilien Sebastian Pinera (sauvé de la fureur des mouvements sociaux par l’explosion de la pandémie) ; l’équatorien Lenín Moreno (lequel, trahissant la gauche qui l’a élu, a détruit l’Equateur en deux ans) ; la bolivienne Janine Añez (présidente de facto après le coup d’Etat contre Evo Morales et manœuvrant pour se maintenir au pouvoir en tentant d’empêcher la future élection présidentielle de septembre prochain) ; ainsi que leurs amis conservateurs du Groupe de Lima – Canada, Costa Rica, Guatemala, Honduras, Panamá, Paraguay, Pérou. Sans parler, évidemment, de l’Union européenne.

[8Lire « Maduro mort ou vif » – http://www.medelu.org/Maduro-mort-ou-vif

[9« Venezuela : aux sources de la désinformation » – http://www.medelu.org/Venezuela-aux-sources-de-la-desinformation

[10http://www.medelu.org/Baie-des-Cochons-ou-Operation-Mangouste

[11A ce jour, 79 participants à cette opération ont été arrêtées par les forces de sécurité.

[12https://www.resumenlatinoamericano.org/2020/05/20/venezuela-embajador-ante-la-onu-ee-uu-no-tiene-un-jefe-de-estado-sino-un-ganster/

[13https://venezuelainfos.wordpress.com/2020/04/09/lex-president-lula-maduro-est-un-leader-democratique-guaido-devrait-etre-en-prison-le-blocus-etats-unien-tue-des-civils/

 

 

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21 juin 2020 7 21 /06 /juin /2020 07:33
La mort de Zeev Sternhell, historien antifasciste - Vadim Kamenka, L'Humanité, 21 juin 2020
La mort de Zeev Sternhell, historien antifasciste - Vadim Kamenka, L'Humanité, 21 juin 2020
La mort de Zeev Sternhell, historien antifasciste - Vadim Kamenka, L'Humanité, 21 juin 2020

Nous avons aujourd'hui eu la nouvelle du décès du grand intellectuel israélien Zeev Sternhell, historien spécialiste du fascisme, est mort. Celui qui en 2018 avait souligné que « En Israël pousse un racisme proche du nazisme à ses débuts », avait, en 2008, été victime d'un attentat perpétré à son domicile par un colon, dont il n’a échappé que par miracle.
 

À lire absolument cet entretien qu'il a accordé à L'HUMANITÉ en 2018.

 

Dimanche, 21 Juin, 2020

La mort de Zeev Sternhell, historien antifasciste

Vadim Kamenka - L'Humanité

(Mise à jour le 21 juin 2020).

Le quotidien Haaretz annonce la mort, à 85 ans, de Zeev Sternhell. Historien israélien, spécialiste de l’histoire du fascisme, membre de l’Académie israélienne des sciences et lettres, professeur à l’université hébraïque de Jérusalem, Zeev Sternhell nous avait accordé cet entretien le 3 mai 2018, entretien que nous republions, revenant sur un certain pourrissement de la société israélienne, marqué par la colonisation des territoires occupés et un régime d’apartheid.

HD. Comment réagissez-vous aux événements qui ont lieu dans la bande de Gaza ?

Zeev Sternhell. La réponse israélienne face à cette « marche du retour » a été bien trop violente… Il faut la condamner. Mais cette idée du retour des réfugiés peut être comprise par les Israéliens comme si les Palestiniens n’acceptaient pas non seulement les résultats de la guerre de 1967, ce qui est normal, mais la fin de la guerre de 1948-1949, ce qui est totalement inacceptable. Cela fait cinquante ans qu’on est là. Cinquante ans que, depuis la guerre des Six-Jours, Israël occupe la Cisjordanie. Et cela peut durer encore cinquante autres années. C’est donc une situation inextricable, sans solution. Bien évidemment, la riposte de l’armée israélienne est trop brutale.

HD. Pourquoi n’y a-t-il pas eu davantage de mobilisation en Israël pour dénoncer ce qui se passe à Gaza ?

Z. S. La société israélienne s’est révoltée au sujet du problème des réfugiés. En ce qui concerne les Palestiniens et l’occupation de la Cisjordanie, une majorité d’Israéliens pensent qu’il n’y a pas de solution. Ce qui est dramatique, car elle existe. Mais il faut une volonté politique d’acier pour y parvenir. La solution des deux États n’est pas encore impossible. On peut encore y arriver, si une volonté politique existe, avec une majorité gouvernementale. Mais c’est une illusion de penser que nous le ferons tout seuls. Nous avons besoin de l’aide et de l’intervention des États-Unis et de l’Europe. Il faudra aussi compter avec la Russie, qui est désormais un acteur important dans la région, en Syrie notamment. Ce pays ressemble à un protectorat russo-iranien. La Russie aura donc son mot à dire dans le dossier israélo-palestinien. Mais plus le temps passe et plus cela devient compliqué. L’Israélien moyen, si on lui laisse le choix entre une guerre avec les Palestiniens et se lancer dans une guerre civile qui serait le produit du retrait de la Cisjordanie, fera rapidement son choix. Car, en Cisjordanie, se trouvent plus de 350 000 colons. L’opinion publique israélienne a une bonne raison de ne pas bouger. Mais la responsabilité essentielle de cet échec des négociations de paix est bien la nôtre, en tant que puissance occupante.

HD. Alors, comment relancer le processus de paix ?

Z. S. La politique gouvernementale est aujourd’hui très claire : gérer la situation sans bouger. Donc, quel que soit le résultat d’une démarche dynamique, cela ne peut pas être pire que la situation actuelle. Depuis une décennie, les dirigeants israéliens ne font rien car ils estiment que c’est ce qu’il y a de mieux. Je n’ai jamais compris pourquoi l’ancien président des États-Unis Barack Obama, avec toute son intelligence, n’avait pas réalisé que Benyamin Netanyahou se moquait de lui, en entretenant faussement le processus de paix. John Kerry a passé près d’un mandat dans un avion entre Washington et Tel-Aviv. L’idéal pour les dirigeants israéliens est de laisser les choses en place, sous couvert d’une situation temporaire. Après tout, comme c’est temporaire, ils n’ont pas besoin de faire avancer le processus.

Mais je suis persuadé que, si on présentait un projet de paix réaliste à la société israélienne, la droite serait battue. Mais les Palestiniens devraient abandonner leur idée de droit au retour, accepter les frontières de 1948-1949 et discuter sur la Cisjordanie et du problème des colonies, en échange de compensations. Faut-il envisager qu’une partie du Sinaï égyptien soit rattachée à la Palestine ? Les possibilités d’un accord existent encore. Il faut une volonté politique. La société israélienne ne bougera pas tant qu’un vrai projet ne lui sera pas présenté. Elle ne se lancera pas dans l’aventure.

HD. La gauche, les partis progressistes peuvent-ils faire évoluer cette situation complètement bloquée que vous décrivez ?

Z. S. Le problème est qu’ils ne proposent aucun véritable projet auquel les Israéliens pourraient adhérer. Ils n’arrivent pas à se faire entendre. Le Parti travailliste, qui est de centre gauche, fait l’erreur depuis quarante ans de croire que, en se rapprochant de la droite, il aura davantage de chances de remporter les élections. Ce parti ne formule aucun projet, ni sur le conflit israélo-palestinien, ni en ce qui concerne la politique économique et sociale. C’est un non-sens et une erreur stratégique. À l’exception du parti Meretz, qui demeure la seule formation réellement de gauche en Israël, tous les autres n’ont aucune politique alternative au gouvernement. Ils ne parlent pas des territoires occupés. Et, forcément, les électeurs ne leur font pas confiance, car ils s’attendent à subir la même politique, quel que soit le gouvernement. Aujourd’hui, il est vrai que, pour ces partis, il leur faudra une coalition pour gouverner, et compter avec diverses formations religieuses. Le moins pire qu’on puisse espérer en Israël, c’est une politique moins dure que celle de la droite. Pour obtenir une politique totalement différente, alors il faudra une intervention des Européens et des États-Unis. Lors des dernières années de son deuxième mandat, l’administration Obama a compris que Netanyahou ne bougerait pas. Seulement, il était déjà trop tard.

La vérité, c’est que le conflit israélo-palestinien n’intéresse plus. Ni les Français, ni les États-Unis, ni les Britanniques ne s’en soucient. Alors, qui va s’en occuper ? L’Italie, l’Allemagne ? Du point de vue de l’Élysée, de la Maison-Blanche ou du 10, Downing Street, on se préoccupe davantage de la Syrie. Et déjà ils n’osent pas y intervenir, alors, pour quelques Palestiniens… Quel pays, quel gouvernement va prendre le risque d’un échec pour 50 morts palestiniens ? Pour eux, ce n’est plus important, et les Palestiniens n’ont rien à offrir. Même les pays du Golfe ne s’intéressent pas à leur sort. Il n’y a aucune charte de solidarité entre les pays arabes à leur égard. Et, finalement, les seuls qui s’intéressent à eux, ce sont les Israéliens. Et, en attendant, la colonisation et l’occupation pourrissent notre société.

HD. Que voulez-vous dire avec cette expression de « pourrissement de la société » ?

Z. S. Les gens s’habituent à tout. Et le nationalisme israélien, le nationalisme juif, se durcit depuis de longues années. Mais il y a eu une nette accélération, lors de ces dernières années, qui est le produit de l’occupation. Il y a un sentiment de supériorité ethnique qui se développe au sein de la droite israélienne. Cela n’a jamais existé par le passé. Jamais le mouvement sioniste n’avait développé un quelconque sentiment de supériorité envers les Arabes. Aujourd’hui, on parle de droits sur la terre fondés par la parole divine. Nous sommes les maîtres du pays. Et, dans le meilleur des cas, les ­Palestiniens n’auraient que la possibilité d’y vivre ou d’y survivre, plus exactement. Toute la question des droits de l’homme, du droit à l’indépendance, à la souveraineté, à la justice, n’est ancrée dans aucune réalité. C’est ce que la droite aujourd’hui dit ouvertement. Il y a vingt ans, elle ne faisait que le penser. Désormais, elle l’applique avec ce gouvernement. En même temps, elle s’emploie à modifier les structures institutionnelles. Cette démarche est antidémocratique et antilibérale, mais la droite la met en œuvre lentement et progressivement. Comme nous n’avons pas de Constitution écrite, le Parlement peut désormais légiférer en contournant la Cour suprême. Car le Parlement représente la souveraineté nationale face à une institution non élue. Il y a une infériorité de la troisième branche du pouvoir face à l’exécutif et au législatif. Cette démarche présentée par la droite se veut démocratique. C’est totalement faux ! La démocratie n’est pas restreinte à la loi de la majorité. Les droits de l’homme, la séparation des pouvoirs garantissent son fonctionnement. La société comprend mal ce statut de droits de l’homme et beaucoup mieux la loi de la majorité. C’est un élément fondamental que produit la colonisation. En territoires occupés, c’est le régime de l’apartheid qui prévaut. Et cela suinte sur la société israélienne. Car, ce système de colonisation est au bout de notre rue.

HD. Ce pourrissement de la société israélienne explique-t-il une immigration plus importante ?

Z. S. Cela a toujours existé. La situation à Tel-Aviv n’est pas insupportable, ni à Jérusalem. On n’y voit pas ce qui se passe de l’autre côté de la rue. Cela n’intéresse personne aussi longtemps que la situation économique reste bonne, que le chômage reste faible et qu’on assure aux classes défavorisées des satisfactions d’ordre moral. Aussi longtemps que le nationalisme remplace la justice sociale, les gens sont contents. Il ne faut pas se faire d’illusions. Les choses ne changeront pas du jour au lendemain.

HD. Le nationalisme en Israël résonne-t-il avec celui qui progresse aussi en Europe et dans les sociétés dites occidentales ?

Z. S. En effet, la droite israélienne est contente de voir qu’elle dispose de relais un peu partout et de mouvements proches d’elle en Europe, comme en Autriche, en Hongrie, en Pologne… Le nationalisme dur fait partie intégrante de notre culture et de notre civilisation. On pensait que l’Union européenne favoriserait les idées de la social-démocratie. Mais force est de constater que le nationalisme n’a pas été balayé en 1945, après la guerre. Il fait partie du paysage idéologique et intellectuel européen. En période de crise, il progresse et peut prendre des formes diverses, culturelles, économiques, sociales. Il n’y a pas de hasard. Le nazisme n’a pas commencé avec Hitler, mais à la fin du XIXe siècle. Le régime de Vichy n’est pas tombé du ciel et s’inscrit dans la suite du boulangisme et de l’affaire Dreyfus. C’est toujours là et toujours présent. En Israël, les cinquante années d’occupation ont développé des problèmes qui étaient relativement marginaux. Hélas, ils sont désormais au centre de notre espace culturel et politique.

entretien réalisé par Vadim Kamenka, L'Humanité


Citations de Zeev Sternhell :
« En Israël, il n’existe qu’une seule droite, la droite extrême, nationaliste et raciste. » Tribune dans « le Monde » du 12/03/2018.

« En Israël, pousse un racisme proche du nazisme à ses débuts. » Tribune parue dans « le Monde » du 18/02/2018.

« Si on ne stoppe pas l’occupation, ce sera tout simplement la fin de l’État d’Israël. » Entretien du 21 novembre 2014 sur www.humanite.fr.


Ouvrages:

« Aux origines d’Israël : entre nationalisme et socialisme », traduit de l’hébreu par Georges Bensimhon avec le concours de l’auteur, Paris, Fayard, 1996 ; Paris, Gallimard, « Folio Histoire », 2004.

« Les Anti-Lumières : une tradition du XVIIIe siècle à la guerre froide », Fayard, « L’espace du politique », 2006 ; Gallimard, coll. « Folio Histoire » (édition revue et augmentée), 2010.

Zeev Sternhell était un historien très stimulant sur l'histoire de l'extrême-droite française et européenne et un intellectuel de gauche israélien courageux...

Il manquera au monde des idées, ainsi que l'exprime l'historien Henry Rousso:

" Zeev Sternhell n'est plus. Les mots sont parfois difficiles à trouver pour rendre compte d'une amitié aussi profonde. Zeev a été l'homme d'une thèse déclinée en deux temps : l'idée fasciste est née en France par la rencontre du nationalisme et du socialisme et la France des années trente a connu une forte imprégnation fasciste qui explique le régime de Vichy, lui-même avatar non circonstanciel du fascisme. Je ne partageais pas toutes ses thèses, notamment la dernière, car le fascisme ne peut se réduire à une idée et les idées ne suffisent pas à expliquer toute l'histoire. Nous en avons parlé durant quarante ans, à mots feutrés, sans jamais creuser ces divergences, peut-être par la crainte réciproque d'un risque de brouille. Zeev était un bretteur, un homme tout entier pris dans ses convictions aussi bien politiques que scientifiques, un homme qui pouvait se fâcher à vie pour un désaccord intellectuel. Mais c'était aussi un homme d'une grande fidélité avec un sens très fort de l'amitié. Nous nous étions rencontrés aux rencontres de Pétrarque de Montpellier, vers la fin des années 1980. Bien que mon ainé de près de vingt ans, j'avais pris sa défense sans hésiter car ses premiers livres m'avaient profondément inspiré alors que je commençais mes recherches sur l'Occupation. Il était déjà attaqué de toutes parts, y compris par de grands historiens dont la plupart furent mes maîtres (René Rémond, Serge Berstein, Michel Winock) avec une virulence qui ne trompe pas. Quelles qu'aient été le caractère abrupt de certaines de ses thèses historiographiques, il avait touché un point hautement sensible de l'imaginaire national. Or le simple fait de faire semblant d'ignorer ce qui pouvait nous séparer, et sur un sujet central comme l'histoire du régime de Vichy, a suscité chez moi une admiration et une affection sans bornes.
Par ailleurs, Zeev a été bien plus qu'un historien. C'était un "super sioniste" qui s'est fait le farouche défenseur des Palestiniens. Il était classé à la gauche de la gauche et pourtant tout entier inscrit dans l'humanisme des Lumières. C'était un patriote universaliste, engagé dans tous les guerres de son pays sous son uniforme d'officier. Zeev, le jeune rescapé de la Shoah, l'enfant caché, était un homme du XXe siècle, un combattant, un résistant, adepte de la tolérance malgré les apparences, et sans doute mal à l'aise dans ce nouveau siècle identitaire et victimaire" - hommage de l'historien Henry Rousso

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13 juin 2020 6 13 /06 /juin /2020 05:27
Littérature, L'Odyssée sans retour d'Asli Erdogan, Sophie Joubert, L'Humanité - 11 juin 2020
Jeudi, 11 Juin, 2020
Littérature. L’odyssée sans retour d’Asli Erdogan

Poursuivie pendant quatre ans par la justice turque, la romancière et journaliste a été acquittée le 14 février dernier. Requiem pour une ville perdue, un recueil en prose poétique hanté par la mort, la solitude et la perte, vient de paraître.

 

C’est une femme seule, qui marche dans les ruelles de Galata, un faubourg d’Istanbul peuplé d’estropiés, de chats errants et de fantômes. C’est une femme seule, à sa fenêtre ou derrière la lucarne d’un toit, qui regarde les lumières d’une ville labyrinthique, matrice dont le souvenir s’éloigne. Qu’attend-elle, qui fuit-elle ? Qui sont ces cohortes de femmes en pleurs au visage couleur de cendre, « citadines assassinées, mises en pièces à force de crimes qui ne pèsent rien », qu’elle rejoindra dans la cave d’un palais qui ressemble à une prison ? Recueil de poèmes en prose, Requiem pour une ville perdue est une longue errance sans retour possible, la quête de soi d’une écrivaine qui scrute son visage, caché derrière des masques. « C’est une odyssée, mais Ithaque est perdue. Pour les femmes, il n’y a pas d’Ithaque », confiait l’écrivaine en exil à l’Humanité, en février dernier, à la veille du verdict de son procès.

Des mythes à l’intime

Paru en Turquie en 2009, ce livre est assez différent des romans et chroniques (Le silence même n'est plus à toi) qu’on a pu lire jusqu’ici. Rarement elle se sera autant dévoilée, même si la forme poétique laisse la place aux multiples interprétations, osant l’écriture à la première personne du (féminin) singulier. On retrouve dans ces textes au lyrisme tenu, où coule le sang des mythes, des thèmes ou des signes présents dans ses romans : le coquillage fétiche (l'Homme-coquillage), la pierre froide et les murs qui enferment (le Bâtiment de pierre), la solitude et le sentiment d’être en marge, d’errer dans un entre-deux. « Mais je suis là, entre hier et demain (…). Entre mon vrai visage et son image imprimée sur le verre, entre le temps et l’absence, entre les mots et ce qu’on tait toujours », écrit Asli Erdogan. Cet « entre », c’est aussi le territoire incertain entre la vie et la mort, si familière, la tension entre des pulsions antagonistes, l’union des contraires.

Loin dans les souvenirs

Livre nocturne, irrigué par le Livre des morts égyptien, Requiem pour une ville perdue est placé sous le signe du double, de Janus, le dieu aux deux visages, de Dionysos et d’Osiris, qui portent toujours un masque. Ainsi Özgür (« libre », en turc), une héroïne au genre ambigu, Orphée au féminin qui se retourne en remontant des Enfers, gagne-t-elle sa liberté quand elle prend conscience d’être mortelle. « Écrire, par conséquent, c’est toujours devoir porter le masque pour affronter la mort », écrit Asli Erdogan dans les Masques de Narcisse, un texte introspectif en treize points, qui interroge l’origine de l’écriture. Dans Lettres d’adieu, où l’on devine une tentative de suicide, elle fait le récit des nuits fiévreuses où les mots se fraient douloureusement un passage et « tombent à la renverse dans le désert blanc, vaincus par le silence » avant que le matin ne tombe comme un couperet. Fouillant loin dans ses souvenirs, elle exhume l’image d’une petite fille de 3 ou 4 ans, s’emparant chaque jour d’un livre qu’elle « lit » pour convoquer ensuite des voix et s’inventer des histoires dans la solitude de sa chambre. Forcée par sa grand-mère à avouer qu’elle ne sait pas vraiment lire, l’enfant dessine alors un oiseau sans ailes qui s’envole par le seul pouvoir des mots. De l’enfance émerge la figure récurrente de la mère, consolatrice et inquiétante, qui brise dans son poing trois statuettes de femmes laissées en cadeau par l’homme sans nom qui a quitté sa fille.

Donner une voix aux démunis et aux vaincus

Écrire, pour Asli Erdogan, c’est gratter ses plaies, creuser la perte, la séparation, l’incomplétude. C’est aussi aller vers l’Autre, tous les autres, les démunis et les vaincus, faire entendre « le pas lourd des condamnés dans leur cellule, des insomniaques dans leur chambre, le pas léger des cambrioleurs, le murmure des prières sans réponse, le chuintement des incendies au loin, le froissement des lettres qui n’ont pas été écrites ». À tous ceux-là, elle donne sa voix, comme un écho qui résonne à l’infini.

                                                                                                                                   

Requiem pour une ville perdue, d’Asli Erdogan, traduit du turc par Julien Lapeyre de Cabanes, est publié chez Actes Sud (144 pages, 17 euros, 12,99 euros en version numérique).

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12 juin 2020 5 12 /06 /juin /2020 05:14
Bolivie. La retorse mécanique du coup d'Etat contre Evo Morales - Rosa Moussaoui, L'Humanité, mercredi 10 juin 2020
Mercredi, 10 Juin, 2020
Bolivie. La retorse mécanique du coup d’État contre Evo Morales

Une expertise indépendante de chercheurs établis aux États-Unis juge « erronées » les conclusions du rapport de l’Organisation des États américains qui a ouvert la voie au renversement d’Evo Morales.

 

Le 11 novembre 2019, sous la menace de la police et de l’armée, le président bolivien de gauche, Evo Morales, s’envolait pour le Mexique, tandis qu’une sénatrice d’extrême droite issue de la bourgeoisie revancharde presque inconnue, Jeanine Añez, prenait ses quartiers au palacio Quemado en brandissant la Bible. Dans les troubles qui suivirent, des manifestations de paysans dénonçant le putsch furent écrasées dans le sang ; un déchaînement de violence raciste s’abattit sur les populations indigènes.

Un mois plus tôt, le Tribunal supérieur électoral (TSE) proclamait la victoire d’Evo Morales, certifiant que l’avance du président socialiste (47,06 % des voix) sur son principal adversaire de droite, Carlos Mesa (36,52 %), dépassait le seuil de 10 % requis par la loi bolivienne pour éviter un second tour. Aussitôt, la mécanique du coup d’État s’enclenchait. Avec, pour rouage central, l’Organisation des États américains (OEA), à l’origine d’audits compilés dans un rapport concluant à une fraude électorale généralisée. « Compte tenu de toutes les irrégularités observées, il est impossible de garantir l’intégrité des données et de certifier l’exactitude des résultats », annonçait l’OEA le 10 novembre. Ces déclarations eurent pour conséquence de galvaniser l’opposition de droite et ses séides au sein des appareils militaire et policier. Elles furent aussitôt reprises par le secrétaire d’État américain Mike Pompeo pour justifier l’éviction d’Evo Morales.

Invalidation des allégations de fraude

Dans son rapport final publié en décembre, l’organisation régionale donnait encore un blanc-seing aux putschistes en faisant état d’une « manipulation délibérée » des résultats de l’élection présidentielle. Elle assurait encore disposer des « preuves irréfutables d’un processus électoral entaché de graves irrégularités ». Problème : ces « preuves » tiennent à des données truquées. Le New York Times le reconnaissait dans son édition de dimanche, en s’appuyant sur une expertise indépendante des données fournies par les autorités électorales boliviennes au quotidien américain.

Conduite par Francisco Rodriguez, économiste spécialiste de l’Amérique latine à l’université Tulane, en Louisiane, Dorothy Kronick, de l’université de Pennsylvanie, et Nicolas Idrobo, statisticien, cette étude conclut bien à des irrégularités… mais dans le rapport de l’OEA : « Un examen attentif des données électorales boliviennes suggère que l’analyse initiale de l’OEA qui a soulevé des questions de truquage des votes – et a aidé à expulser un président – était erronée. » Francisco Rodriguez incrimine, entre autres, des problèmes « méthodologiques » : « Une fois ces problèmes corrigés, les résultats de l’OEA s’estompent et il n’y a plus de preuve statistique de fraude. » Ces allégations de fraude, validées par le Département d’État, avaient été largement reprises par la presse américaine et présentées, sans recoupement, comme des faits incontestables. Elles ont ouvert la voie au renversement d’un président élu, puis à l’installation d’un pouvoir sans aucune légitimité démocratique.

Des élections générales prévues en septembre

Avec la pandémie de Covid-19, les nouvelles échéances électorales, initialement fixées au 3 mai, ont d’abord été reportées ; sous la pression populaire, le Parlement a finalement approuvé, au début du mois, le projet de loi prévoyant des élections générales le 6 septembre. Dans un contexte de crise politique et de fortes tensions sociales, le parti d’Evo Morales, le MAS, n’a rien perdu de son ancrage. Son candidat à la présidentielle, Luis Arce, ancien ministre de l’Économie, conserve dans les sondages une confortable avance sur ses adversaires.

Cernée par les scandales de corruption – en particulier les malversations liées à l’achat de respirateurs, qui ont conduit à l’arrestation et au limogeage du ministre de la Santé (voir notre édition du 21 mai ) –, la « présidente par intérim », elle, fait face à la colère qui s’exprime ouvertement désormais dans la rue. En réponse à ces protestations, le pouvoir de fait déploie les tanks à La Paz comme à Cochabamba. Au nom de l’austérité, il envisage la suppression de trois ministères : Cultures, Sports et Communication. Économie attendue : 28,5 millions d’euros. Moitié moins que les budgets supplémentaires alloués à la police et à l’armée ces deux derniers mois pour l’achat d’équipements et de matériel de répression. Les putschistes fourbissent leurs armes.

Bolivie. La retorse mécanique du coup d'Etat contre Evo Morales - Rosa Moussaoui, L'Humanité, mercredi 10 juin 2020
Démission d’Evo Morales : réaction de Fabien Roussel, secrétaire national du PCF
 
La Bolivie vit ce soir des heures dramatiques. Le président Evo Morales a  démissionné pour éviter, comme il l’a déclaré, « un bain de sang ».
 
Les événements des derniers jours en Bolivie relèvent d’un conflit de classes exacerbé, d’un racisme déchaîné, d’une opposition enragée contre le système d’Etat plurinational constructeur de la redistribution des richesses et la conquête de la souveraineté nationale.
 
Sous le fallacieux prétexte de fraude électorale, la droite dont la logistique est assurée par les services nord-américains a refusé sa défaite, puis l’invitation au dialogue et enfin la convocation de nouvelles élections. Elle n’a pas accepté la victoire d’Evo Morales conquise grâce au vote déterminant des indigènes tellement il est
insupportable à la bourgeoisie, en majorité blanche, et pour une partie des couches moyennes, sorties de la misère par Morales lui-même, d’accepter le verdict des urnes. 
 
Les violences ne relèvent pas de la spontanéité. Des groupes paramilitaires y font régner la terreur : élues tondues, battues, incendies de domiciles de partisans de Morales, y compris celui de sa sœur, chasse aux indigènes. 
  
Face au déchainement, Evo Morales a cru devoir se retirer.  Existait-il une autre solution ?
 
Dans cette Bolivie aux dizaines de coups d’Etat depuis les années 1960 et jusqu’à l’élection d’Evo Morales en 2005, entre dictatures, violations des droits surtout des indigènes, inflation, corruption, trafics de drogue et refuge de chefs nazis comme Adolf Eichmann et Josef  Mengele, une porte s’est ouverte avec Evo Morales vers la démocratie et le mieux vivre pour les plus pauvres. Insupportable pour les plus riches, intolérable pour ceux qui ont largement bénéficié du développement économique (5% de croissance) et qui ne veulent pas partager.
 
Et pourtant. La prospérité économique et la refondation démocratique du pays doivent être mises au compte de la politique menée depuis l’arrivée au pouvoir d’Evo Morales avec un processus de récupération des richesses naturelles  au profit de conquêtes sociales en matière de santé et d’éducation et d’une vaste modernisation économique.  Je veux exprimer ce soir mon souhait que les violences cessent en Bolivie et que la vie et la dignité de tous soient respectées.
 
Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français, député du Nord. 
 
Paris, le 11 novembre 2019.
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10 juin 2020 3 10 /06 /juin /2020 05:25

 

La date fatidique du 01 juillet arrive... et avec elle la possibilité que le gouvernement israélien annexe toute une partie de la Cisjordanie et de la vallée du Jourdain.

 

Dans une première étape l’AFPS a lancé la signature d’une pétition pour que la France réagisse vite et fort face à cette menace qui met en cause le Droit international.

 

Un gouvernement dit « d’union et d’urgence » a été mis en place en Israël.

Pendant les 6 premiers mois censés être consacrés à l’urgence sanitaire, une seule décision politique est prévue : l’annexion de la vallée du Jourdain et des colonies israéliennes en Palestine occupée.

Cette mise en application du plan Trump - déjà à l’œuvre sur le terrain - est du vol en bande organisée : c’est une violation totale du Droit international et cela appelle des réactions fortes et immédiates de la communauté internationale.

Monsieur le Président de la République, je refuse ce déni du droit et je ne veux pas vivre dans un monde régi par la loi de la jungle.

Je vous demande de passer aux actes :

Vous devez reconnaitre immédiatement l’État de Palestine et interdire les produits des colonies israéliennes sur le territoire français

Vous devez reconsidérer les coopérations de la France avec Israël tant qu’Israël foulera aux pieds le Droit international

Vous devez demander à l’Union européenne de suspendre son accord d’association avec Israël

 

Pour signer voici le lien https://www.france-palestine.org/Petition-Depecage-de-la-Palestine-arreter-Netanyahou-StopAnnexion 

 

 

 

 

La deuxième étape de notre campagne, c'est de faire en sorte qu'un grand nombre de député.es et sénateur.rices sortent de leur torpeur sur cette question et agissent au niveau du Parlement. C'est la raison pour laquelle, nous nous permettons d'insister pour que vous aussi, en tant que citoyen.ne, vous écriviez à nos parlementaires pour qu'ils demandent au gouvernement de prendre des sanctions contre Israël et sa politique criminelle de colonisation, d'apartheid et, aujourd'hui, d'annexion. C'est très IMPORTANT.

 

Pour cela, c'est très facile : cela ne vous prendra que trois minutes et quelques clics, grâce à l'outil mis en place par l'AFPS sur son site:

 

1. cliquer sur ce lien: https://france-palestine.eaction.online/StopAnnexion

 

2. Sur Choisissez votre département, faites dérouler pour noter Finistère, puis cliquer sur Continuer 

 

3. Apparait alors la liste des députés et sénateurs du 29. Ils sont tous cochés. Pour choisir de ne s'adresser qu'à certains, décocher les autres. Mais, on peut aussi choisir de s'adresser à tous les parlementaires du Finistère.

 

4. Remplir les cadres pour vous identifier (Vous n'êtes pas obligés de noter votre adresse. Le nom de la commune et le code postal suffisent.

 

5. Répondre à la question d'arithmétique de très haut niveau : combien font ... ? au moyen de la petite flèche, à droite de la case.

 

6. Cliquer sur envoi ...... et le message qui n'est pas modifiable est envoyé aux parlementaires.

 

Nous pensons vraiment, qu'avec le boycott des produits d'Israël, ces adresses aux parlementaires constituent le volet le plus important de notre campagne contre l'annexion, car si nous voulons obtenir des sanctions, il faut que le plus grand nombre de parlementaires pèsent sur Macron et le gouvernement. Dans tous les cas, ces messages seront utiles :

 

Aux parlementaires qui ont déjà agi ou qui s'apprêtent à le faire, car ils ont besoin d'être confortés dans leur démarche. Nous leur montrerons que nous sommes nombreux à les soutenir et les encourager.

 

* À celles et ceux encore hésitants, pour les pousser à agir.

 

* À celles et ceux dont nous savons que nous n'obtiendrons rien, car cela leur montrera que leur soutien (déclaré ou implicite) à la politique d'Israël est désapprouvé par un grand nombre d'électeurs et électrices.

 

Le peuple palestinien a besoin de toute notre solidarité, c'est la raison pour laquelle, nous avons fait un retour sur le marché de Morlaix samedi dernier où nous avons eu un accueil plutôt encourageant (et des échos dans la presse locale) au point qu'avec les ami.es présent.es, nous avons décidé de nous donner rendez-vous de nouveau SAMEDI 13 JUIN à partir de 10H. Venez nous voir, venez discuter de l'urgence à agir vite pour contrer la menace d'annexion qui menace 30% de la Cisjordanie...

 

https://www.letelegramme.fr/finistere/morlaix/france-palestine-solidarite-au-marche-07-06-2020-12562735.php

 

https://www.ouest-france.fr/bretagne/morlaix-29600/morlaix-l-afps-s-affiche-au-marche-6860278

 

 

France Palestine Solidarité  du Pays de Morlaix

19, rue Waldeck Rousseau 29600-Morlaix

visitez notre site

et notre page Facebook

https://www.facebook.com/afpspaysdemorlaix/

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9 juin 2020 2 09 /06 /juin /2020 15:08
Turquie : Acharnement criminel de R.T. Erdogan contre le HDP (PCF, 9 juin 2020)
Turquie : Acharnement criminel de R.T. Erdogan contre le HDP

Rien n'y fait : épidémie de Covid-19, effondrement économique, guerres en Syrie, en Irak, en Libye... le président R.T. Erdogan poursuit de sa haine toutes les forces démocratiques de Turquie.

A nouveau, les députés du HDP, Leyla Güven et Musa Farisogullari, ont été interpellés et incarcérés avec la confirmation de leur condamnation et cela en dépit de leurs graves problèmes de santé. Le parlementaire CHP Enis Berberoglu vient de connaître le même sort. Tous trois ont rejoint les 45 maires destitués et les sept députés kurdes qui croupissent aux côtés de milliers de journalistes, d'intellectuels, de syndicalistes, de militants... dans les geôles turques.
Alors qu'il est affaibli, R.T. Erdogan s'est lancé dans une véritable fuite en avant répressive et agressive qui prive le peuple turc des libertés les plus élémentaires et accentue l'embrasement d'une région déjà exsangue.
Le Parti communiste français condamne la politique criminelle de R.T. Erdogan et exprime sa solidarité avec les démocrates emprisonnés. Il appelle à faire grandir les mobilisations pour que la France et les pays de l'Union Européenne sanctionnent cette politique liberticide et soutiennent les forces démocratiques.

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7 juin 2020 7 07 /06 /juin /2020 05:56
UN POMPIER PYROMANE EN CHARGE DU « PACTE VERT EUROPÉEN » (L’HUMANITE – Vendredi 5 Juin 2020 - Gérard Le Puill)

Ce 5 juin  est la journée mondiale pour le climat. Elle se déroule deux semaines après la journée mondiale  pour la biodiversité qui avait lieu le vendredi 22 mai. Histoire de donner à penser qu’elle prend en compte de tels dossiers, la Commission européenne a récemment publié un texte sur axé sur la protection de la nature intitulé « Biodiversité »  et un autre intitulé « De la ferme à la fourchette ». Ce second texte doit inspirer les ministres de l’Agriculture  des 27 pays membres de l’Union européenne  dans leurs débats  sur la prochaine réforme de la Politique agricole commune (PAC). Mais le premier préconise de laisser en friche 10% des terres agricoles en Europe, ce qui se traduirait par plus d’importations  et donc de déforestation en Amazonie et ailleurs !   

Au fil des ans  et des élargissements  de l’Europe,  la Politique agricole commune  devient  de moins en moins commune  et de plus en plus incohérente. Ainsi,  selon le texte intitulé « Biodiversité », dont la charge a été confiée  au vice-président de nationalité néerlandaise Frans  Timmermans, la biodiversité sera  favorisée en Europe en laissant  10% des terres agricoles européennes sans la moindre culture. Parallèlement, 25%  de la surface  agricole utile passerait en agriculture biologique d’ici  2030, une préconisation qui semble ignorer que les conversions dépendent  du nombre de paysans se sentant capable de sauter le pas chaque année, ce qui suppose aussi d’avoir de marchés en face. Toujours selon la Commission, l’usage des produits de traitement des cultures diminuerait de 50% en cinq ans tandis que la plantation 3 milliards d’arbres augmenterait les superficies forestières en Europe.

Une course à handicap pour les paysans européens

Avec toutes ces mesures mises bout à bout, la production agricole européenne reculerait sensiblement. De plus, une Europe qui imposerait  de telles mesures   à ses paysans handicaperait la compétitivité de ces derniers par rapport à ceux des pays tiers qui exportent des céréales, des viandes, du soja, du sucre de canne, de l’huile de palme, de l’éthanol et du diester en Europe. D’autant que la Commission continue de négocier  des accords de libre échange avec de nombreux pays tiers. Le CETA conclu avec le Canada est entré en vigueur dès sa signature, avant même d’avoir été ratifié par les pays membres de l’Union européenne. L’accord conclu en juin 2019 entre la Commission européenne et les pays de Mercosur  permettra à ces quatre pays d’Amérique du sud, dont le Brésil de Bolsonaro,   d’exporter des volumes accrus  de viandes bovines, porcines et de volailles   en Europe  sans prélèvements douaniers aux frontières communes  de l’Union. S’y ajoute un accord de même type qui vient d’être conclu entre le Mexique et la Commission. Parallèlement,  cette dernière négocie toujours avec l’Australie et la Nouvelle Zélande  qui veulent aussi exporter des quantités croissantes  de viandes et des produits laitiers en Europe.

La Commission n’a pas calculé ce que  seraient les conséquences d’un recul sensible de la production agricole en Europe. Elle semble ignorer que nous sommes  dans un monde où le réchauffement climatique  accroît  l’insécurité  alimentaire. Laisser 10% des terres agricoles européennes en friche  et étendre  la superficie  forestière sans même évoquer l’agroforesterie  est pour le moins incohérent. De plus, la Commission occulte-  de manière totalement cynique, où par une totale méconnaissance de réalité- le fait  que pratiquer de la sorte  revient à ruiner les paysans  européens en les soumettant   à une concurrence encore plus déloyale que celle qu’ils subissent aujourd’hui. Car les exportateurs des pays tiers que nous avons cités  n’ont pas ces contraintes environnementales  à respecter. Cette double peine obligerait les paysans européens à moins produire via le gel des terre et la réduction des fertilisants. Mais elle leur imposerait des prix plus bas, en même temps, via la concurrence des produits importés depuis des  pays pratiquant le dumping  social, fiscal et environnemental.

Incompétence  et lobbying potentiellement corrupteur

Pendant  que l’Europe  planterait 3 milliards d’arbres dans les 27 pays membres, ses importations accrues de viande bovines, porcines et de volailles auxquelles s’ajouteraient  le sucre de canne et le soja, cette politique d’importations accrues depuis le Brésil  se traduiraient par plus de 3 milliards d’arbres supplémentaires abattus  dans la forêt amazonienne. Dès lors se posent plusieurs questions. Faut-il  attribuer ces propositions de la Commission à  une incompétence  globale du collège des commissaires ? Doit ajouter que cette incompétence et  le cynisme qui va avec sont aggravés par le poids  des lobbyistes potentiellement corrupteurs  qui agissent en permanence  dans les locaux de la Commission comme dans ceux du Parlement européen ?

Car le lobbying est une pratique admise de longue date  auprès de la Commission européenne,  comme auprès du Parlement européen. Pour le «moraliser», la  Commission et le Parlement ont même créé le 23 juin 2011 « un registre  de la transparence, commun et public, en vue  de fournir des informations sur ceux qui cherchent  à influencer les politiques européennes». Ecrire cela c’est déjà  reconnaître que ces lobbyistes ont des intentions plutôt louches et ce rappel figure dans une note récente du Parlement  européen. Cette note nous indique aussi  qu’en « janvier 2020, 11.882 organisations  étaient inscrites au registre, dont  7.526 personnes accréditées auprès  du Parlement européen. L’inscription à ce registre  est obligatoire pour obtenir un badge d’accès en tant que lobbyiste pour le Parlement européen », lit-on dans cette note. Mais on n’y trouve aucune information sur les méthodes utilisées  par ces lobbyistes  pour tenter d’influencer la politique de la Commission et du Parlement en faveur d’intérêts très particuliers.

Ne pas confier  à des pyromanes la mission de pompier

 A Paris, le Conseil économique,  social et environnemental (CESE) a rendu public le 27 mai dernier son avis intitulé «Le rôle de l’Union européenne  dans la lutte contre la déforestation importée ». La déclaration du CESE  indique que  « la déforestation en Amazonie  atteignait un nouveau record, avec la disparition  de 1.202 kilomètres carrés  de forêt de début janvier à la fin janvier  2020, soit une augmentation  de 55% par rapport à la même période l’année dernière, selon   les données de l’Institut national de recherche spatiale  du Brésil (INPE) ». Du coup, « le CESE préconise d’adopter en 2020 un Plan d’action de l’UE contre la déforestation importée sous la responsabilité du Conseil européen, dont le suivi  et la coordination seront confiés au vice-président  de la Commission européenne en charge du Pacte vert pour l’Europe, sous la supervision et le contrôle du Parlement  européen ».

Cette préconisation  semble cohérente a priori. Mais elle semble ignorer les conséquences à venir  du « Pacte vert » de Bruxelles sur « la déforestation importée ». Agé de 59 ans, l’actuel  vice-président  de la Commission européenne  en charge du Pacte vert  pour l’Europe  est le social-démocrate néerlandais Frans Timmermans. Sa carrière débute en 1987 comme diplomate, mais il rejoint la Commission européenne den  1994 comme assistant  du commissaire  Hans van den Broek . De 2007 à 2014, il a été ministre des Affaires étrangères de son pays avant de devenir commissaire européen en 2014, puis  vice-président depuis 2019 dans le cadre de son second mandat.

C’est donc à cet homme  que le CESE demande  d’arrêter « la déforestation importée».

Le CESE  demande donc  au pompier Frans Timmermans d’éteindre l’incendie   en Amazonie en ne voyant pas que ce qu’il préconise pour l’Europe  fait de lui un pyromane en Amérique du sud et ailleurs.

 

 

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