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Le candidat communiste à la présidentielle a choisi la petite ville de Billom, dans le Puy-de-Dôme, et les thèmes de l’agriculture, de l’alimentation et des ruralités pour lancer une campagne de six rencontres-débats avec les électeurs.
Large sourire, Fabien Roussel est satisfait. Il ne s’en cache pas : « Je suis heureux d’être en Auvergne, et d’avoir choisi pour premiers thèmes l’agriculture, l’alimentation, les ruralités. » « Cela a surpris certains qui ne voient les communistes qu’à la sortie des usines », a-t-il ironisé ce mercredi. La première des « Rencontre des jours heureux » est indéniablement un succès. Une salle comble. Attentive. Soigneusement agencée pour accueillir les questions des participants, des internautes et des citoyens filmés le matin même dans les allées du Sommet de l’élevage. Et au final, des militants confiants dans leur candidat que beaucoup découvrent dans l’exercice.
Accompagné des deux députés communistes auvergnats, André Chassaigne (Puy-de-Dôme) et Jean-Paul Dufrègne (Allier), Fabien Roussel a, en effet, commencé sa journée par une visite au plus grand salon de l’agriculture après celui de Paris, qui se déroule cette semaine à Clermont-Ferrand. Et appréhendé en direct l’étendue des difficultés des paysans, notamment des éleveurs, que le candidat assurera de son soutien résolu, plus tard dans la soirée, dénonçant l’inquiétante diminution du nombre de cheptels au profit d’importations massives (75 % de la viande consommée dans la restauration collective provient de l’étranger). Un sujet d’ailleurs prioritaire.
En fait, c’est une vision globale de l’agriculture qu’a défendue Fabien Roussel. « Que voulons-nous pour la France, a-t-il interrogé , 100 000 agrimanagers installés sur des structures qui n’auront plus rien d’humain ? » Dénonçant la logique de concurrence de la politique agricole commune (PAC), les « usines agricoles », nocives pour les animaux, la santé des humains et l’environnement, il s’est prononcé pour le développement d’exploitations familiales, à taille humaine. 500 000 emplois d’agriculteurs seraient alors nécessaires d’ici 2030. La France ne compte plus que 435 000 paysans, un sur deux va prendre sa retraite ou cesser son activité dans moins de dix ans. En Auvergne-Rhône-Alpes, 2 000 éleveurs jettent l’éponge chaque année. Première raison à cette hécatombe : les maigres revenus que la majorité tire de leur travail. Fabien Roussel considère que l’État doit taper du poing sur la table et s’octroyer des pouvoirs nouveaux pour garantir la rémunération au juste prix de la production agricole. Cela pourrait prendre la forme de conférences publiques annuelles par filière. « La rentabilité de nos exploitations est en chute libre », confirment Noël et Isabelle, un couple de céréaliers installés sur les terres pourtant riches de la plaine de la Limagne. Ils sont venus écouter Fabien Roussel par curiosité. La proposition d’un Smic fixé à 1 800 euros brut, applicable aux ouvriers agricoles, leur paraît « tout à fait raisonnable ». Le couple verrait en plus d’un bon œil la création d’une « rémunération pour service rendu à la société » en compensation de l’agriculture de conservation des sols (ACS) qu’il pratique depuis plusieurs années et qui leur permet de limiter drastiquement leur consommation d’énergies fossiles. À la tête d’une ferme d’un peu plus de 100 hectares née du regroupement de la fermette d’Isabelle et des deux fermes de leurs parents respectifs dont ils ont hérité, ils remarquent que les générations précédentes s’en sortaient, certes difficilement, en travaillant sur leurs exploitations. Ce n’est pas leur cas puisque Noël, comme beaucoup d’agriculteurs, a été contraint de prendre un emploi salarié à l’extérieur.
Lucie Lafforgue a chamboulé son emploi du temps pour témoigner de son expérience de jeune éleveuse bio et de la chance que constitue le développement des circuits courts pour son exploitation. Elle écoule sa production à moins de 30 kilomètres de sa ferme, dans les marchés et en fournissant des écoles. « Je ne parviens pas à satisfaire les demandes de mes clients. Il y a vraiment de la place pour tous, assure-t-elle , à la condition bien sûr d’améliorer le revenu paysan (Fabien Roussel propose de généraliser le repas bio à 1 euro pour tous les enfants dans les cantines scolaires – NDLR) mais également de réimplanter des services publics. » Le contraire de ce qu’il se passe depuis plusieurs décennies où médecins, écoles, gendarmerie, services fiscaux disparaissent peu à peu du paysage rural. À Billom, La Poste envisage de réduire son activité et les effectifs du bureau. Le candidat communiste veut inverser la tendance. « Je suis pour le renouveau de la ruralité. Une ruralité des jours heureux pour ceux qui la font vivre et ceux de plus en plus nombreux qui aspirent à vivre hors des grandes zones urbaines. »
Ne pas se raconter d’histoires : c’est un point de départ quand on est décidé à vraiment changer les choses. Fleurissent pourtant en ce moment méditations privées, conversations entre amis et tribunes de presse autour d’un thème : la nécessité de l’unité de la gauche pour faire face aux périls historiques qui nous guettent l’an prochain. L’air tient souvent de la lamentation : la salvatrice unité de la gauche serait essentiellement entravée par des egos de grenouille (celle de la fable, vous savez) ; crevez-les et pourrait alors s’ouvrir un chemin de victoire. Qu’il y ait des egos et des calculs de mesquine tactique ici ou là, c’est indéniable mais disons-le tout net : on se raconte des histoires en plaçant là les problèmes principaux : ego des uns ; unité des partis politiques de gauche.
Un. « La gauche », il faut s’y faire, c’est toujours des millions de personnes mais ce n’est plus que quelques millions de personnes. Les intentions de vote pour des formations de gauche ? Moins de 30 %, en allant de Arthaud (LO) à Jadot (EELV) – étant entendu que ce dernier se réclame de la gauche un jour sur deux… Combien de bataillons pour le « peuple de gauche » ? Prenez tous les sondages, c’est la bérézina : on navigue entre 13 et 20 % de personnes se déclarant de gauche. Rien d’étonnant quand la gauche déçoit crescendo, de Mitterrand en Jospin et de Jospin en Hollande. Croire que le rassemblement de ces 13-20 % est la clé de tout, c’est nager entre le rêve et la nostalgie.
« Quand la gauche déçoit crescendo, de Mitterrand en Jospin et de Jospin en Hollande, croire que le rassemblement de ces 13-20 % est la clé de tout, c’est nager entre le rêve et la nostalgie. »
Deux. Le problème d’unité n’est pas tant celui de dirigeants qui ne parviendraient pas à se mettre d’accord : c’est dans ce qu’il reste du « peuple de gauche » lui-même que les divisions sont extrêmement profondes. La question n’est pas nouvelle : se pose toujours l’enjeu des reports de voix au second tour face à la droite. Les électeurs socialistes des années 1970 n’aimaient pas toujours les communistes et, dans un second tour opposant un communiste à la droite, des voix pouvaient manquer à l’appel, quelles que soient les consignes de vote officielles. Il pouvait également y avoir de la perte (souvent moindre, il est vrai) dans l’autre sens : certains électeurs communistes n’allant pas voter socialiste au second tour face à la droite. Reste qu’on n’arrive pas à imaginer une déperdition de voix significative si l’adversaire à battre avait été non pas de droite mais d’extrême droite. Face à pareil danger, on voit mal le « peuple de gauche » se refuser à soutenir le candidat de gauche le mieux placé. Bref, division il y a depuis longtemps – et c’est heureux car les projets ne sont pas les mêmes : rêver d’une gauche sans division aucune, c’est signer la mort des familles idéologiques et politiques différentes qui la composent – mais une division qui, pendant plusieurs décennies, ne s’est pas révélée complètement insurmontable. Nous n’en sommes plus là.
On a beaucoup commenté, mi-avril, le fait qu’en cas de second tour d’un candidat de gauche face à Le Pen (hypothèse sans fondement au vu des intentions de vote de premier tour), la victoire du RN était au bout du chemin, Le Pen faisant 60 % face à Mélenchon, 53 % face à Jadot, 50 % face à Hidalgo(1). On en est resté là, et il est vrai que c’était déjà pas mal. Mais si on entre dans les détails, on trouve un paysage qu’il vaut la peine de regarder en face. En cas de deuxième tour Mélenchon-Le Pen, la majorité absolue des électeurs du PS (ici, dans l’hypothèse d’une candidature Hidalgo de premier tour) choisirait l’abstention (54 %) plutôt que le vote FI (42 %) ! La réciproque est un peu moins vraie mais le report d’électeurs FI du premier tour vers Hidalgo au second serait à peine majoritaire (53 %). Comment dire avec plus de netteté la profondeur des divisions, non pas entre ténors égocentriques, mais dans ce « peuple de gauche » lui-même ! On se paie de mots quand on cite paresseusement les enquêtes indiquant que les électeurs de gauche aspirent à un candidat unique. Oui, ils veulent un candidat unique : celui qu’ils portent dans leur cœur, mais surtout pas le voisin ! À aucun prix. Même face à Le Pen !
« Le monde qui nous attend après la pandémie ne sera pas de tout repos et ne laissera guère la place à des demi-mesures et des non-choix. »
Résumons : le « peuple de gauche » a fondu comme neige au soleil ; ce qu’il en reste est lourdement divisé, indépendamment des consignes des uns et des egos des autres.
Trois. S’il faut considérer PCF, FI, EELV, PS, qui peut sincèrement soutenir que ces formations portent un projet commun pour la France, viable et alternatif à ce qui se fait aujourd’hui et ce qui se promet du côté des libéraux et de l’extrême droite ? Prenons les grandes questions économiques, sociales : écoutons les uns et les autres, et mesurons la polyphonie (si on veut habiller de ce nom les contradictions d’une cacophonie politique). Prenons les institutions. Prenons la laïcité. Prenons même, comme y invitait récemment Serge Halimi, les questions internationales. Une chose est de gérer ensemble une commune, un département, une région ; autre chose est de gouverner un pays. Ajoutons car, décidément, il ne faut pas se raconter d’histoires. Déjà quand elles sont dans l’opposition et en campagne, les forces les plus timides de la gauche ne s’engagent pas sur des changements significatifs, alors on n’ose imaginer ce que cela pourrait donner au pouvoir face aux vents violents qui soufflent sur notre monde. Combien de semaines, de jours avant d’annoncer la « pause », avant d’amorcer un virage de rigueur ?
Car c’est bien là le – quatrième – problème, on ne s’en sortira pas avec un accord minimaliste façon plus petit dénominateur commun. Le monde qui nous attend après la pandémie ne sera pas de tout repos et ne laissera guère la place à des demi-mesures et des non choix. Alors qu’une hausse forte du chômage est à redouter, on entend déjà les musiques libérales, venues de Bruxelles, de Bercy ou du siège du MEDEF : il va falloir réformer rudement le pays. Le capital a faim et ne restera pas doux spectateur. Encore n’osé-je ici sortir de la dimension la plus conjoncturelle. Si on doit considérer avec sérieux les défis qui se posent à l’humanité, non dans mille ans mais pour ce siècle même, on ne peut pas penser un instant que trois ou quatre mesurettes feront l’affaire. Non, tout accord minimaliste mènera dans le mur et risque si sûrement d’installer, le coup d’après, Le Pen au pouvoir. Rappelons tout de même que ce n’est pas pure fiction. 1981 : l’extrême droite est microscopique. La gauche déçoit. Voici la percée du FN en 1983-1984 ; en 1988, Le Pen pèse déjà 15%. Quand est-ce que le même Le Pen arrive au second tour ? Juste après l’amère expérience de la gauche plurielle. Quand est-ce que Le Pen revient au second tour et dépasse, pour la première fois, les 7,5 millions de voix et les 20 % ? Au lendemain du désastre Hollande. Un petit accord à gauche sur base étroite et c’est le mur garanti.
« Tout accord minimaliste mènera dans le mur et risque si sûrement d’installer, le coup d’après, Le Pen au pouvoir. »
Que conclure après ces lignes aux allures d’apocalypse ? Il ne s’agit pas de pleurer en estimant qu’il n’y a pas d’issue. Il n’y a pas d’issue… dans l’addition des maigres forces en présence. L’issue, nous en connaissons le chemin : il faut se battre comme des chiens pour faire grandir la force et la perspective communistes dans notre pays, dans les combats électoraux et dans tous les autres. Cela ne veut pas dire refuser tout accord à gauche, bien au contraire, mais faire grandir le rapport de forces populaire pour arracher un pacte d’engagements qui soit au niveau des attentes, des besoins et des défis, un accord qui soit appuyé sur des millions de personnes conscientes déterminées à prendre en mains leur destin.
Guillaume Roubaud-Quashie, directeur de Cause commune.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance, mais je sais que M. Dussopt me répondra.
En février dernier, un grand journal du soir révélait dans le cadre d’une enquête dénommée « Openlux », l’existence de 55 000 sociétés offshore détenant 6 500 milliards d’euros d’actifs au Luxembourg. Cette semaine, un consortium de journalistes publie une nouvelle enquête, les Pandora Papers – bien que la boîte de Pandore ait été ouverte il y a déjà bien longtemps – par laquelle nous apprenons que 29 000 autres sociétés offshore viennent d’être mises au jour, créées et gérées par quatorze cabinets et officines spécialisés.
M. le ministre Bruno Le Maire s’est déclaré « choqué », quand tous nos concitoyens sont ulcérés par ces révélations incessantes faites par la presse ces dernières années.
Pour les milliardaires concernés, responsables politiques de très haut niveau, sportifs et trafiquants en tout genre, l’objectif est d’échapper à l’impôt et aux juges grâce à cette industrie de l’opacité. Le problème est systémique.
Monsieur le ministre, comptez-vous en rester au choc et à la vérification ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Bocquet, nous ne comptons pas en rester au choc.
Je l’ai dit, nous avons développé des outils de lutte contre la fraude fiscale. Il faut rendre à César ce qui est à César : le développement des outils de lutte contre la fraude fiscale date de plusieurs années. Lorsque l’on regarde les quelques années écoulées, on peut citer la loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « loi Sapin II », ainsi que les lois pour la confiance dans la vie politique de 2014, 2017 et 2018.
À chaque fois, les gouvernements successifs ont travaillé pour que les administrations soient dotées d’outils plus performants.
La loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a créé une police fiscale. Les échanges d’information que j’évoquais à l’instant permettent de dégager au niveau communautaire plus de 100 milliards d’euros de revenus supplémentaires via la lutte contre la fraude fiscale.
Vous me demandez si je veux en rester au choc et à la vérification. Nous en restons avant tout à la vérification et, chaque fois que nous le pouvons, menons des contrôles et prononçons des redressements.
Vous avez évoqué un certain nombre d’affaires révélées. Je voudrais revenir sur celle dite des Panama Papers. En la matière, l’administration fiscale française a identifié un certain nombre de contribuables français concernés, nous avons mené à leur terme 657 dossiers soit de régularisation, soit de redressement, à moins qu’ils n’aient fait l’objet d’une judiciarisation. Cela a permis à l’État français de recouvrer plus de 200 millions d’euros (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. David Assouline. Sur 11 000 milliards !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Vous dites 11 000 milliards, monsieur Assouline, comme s’il s’agissait de 11 000 milliards français ! Je vous parle, moi, des 657 contribuables français détectés dans les Panama Papers. Vous devriez vous en féliciter et féliciter l’administration plutôt que de faire des comparaisons qui n’ont ni queue ni tête. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
L’essentiel, pour moi, c’est que l’administration est au travail et que, quand elle travaille, cela paie et permet de sanctionner les fraudeurs. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. François Patriat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour la réplique.
M. Éric Bocquet. Ces scandales successifs qui se traduisent à chaque fois par des milliards en fuite pour la République nécessitent une réaction déterminée.
Vous le savez, nous sommes constructifs et nous nous permettons de vous suggérer trois pistes d’action immédiate.
Premièrement, vous pouvez recréer des postes de contrôleur dès le projet de loi de finances qui vient devant le Parlement dans quelques jours. Pour rappel, 38 000 emplois ont été supprimés depuis 2002 dans les finances publiques.
Deuxièmement, vous pouvez créer l’observatoire de la lutte contre la fraude fiscale, annoncé en 2018, jamais mis en place. Nous sommes candidats à titre bénévole. (Rires sur les travées du groupe CRCE.)
Troisièmement, la France va présider le Conseil de l’Union européenne à partir de janvier 2022. L’Union européenne a décidé hier de retirer de la liste des paradis fiscaux les Seychelles, en plein cœur des révélations du dernier scandale. Inscrivez à l’agenda de ce semestre une mise à jour de cette liste en y incluant notamment le Luxembourg et Chypre.
Alors que la question des retraites est reposée, le député communiste des Bouches-du-Rhône revient sur le débat intense qui a été stoppé par la pandémie. Démontant un à un les arguments de la majorité, il dessine les contours d’une réforme progressive. Entretien.
Vous venez de sortir un Manuel de la bataille des retraites (1), au moment où le débat revient sur le devant de la scène. Est-ce une façon de poursuivre le combat idéologique ?
Pierre Dharréville Le débat s’est interrompu brutalement avec la pandémie mais ils n’ont jamais lâché l’affaire. Je me suis dit qu’il ne fallait pas perdre la matière accumulée, et j’ai listé les questions qui avaient été au cœur des échanges. C’était une manière de prendre date, afin d’être prêt au moment où le débat reviendrait. Il fallait maintenir la braise chaude. La bataille ne fait que commencer. Depuis les trente dernières années, c’est le sujet qui a le plus mobilisé les Françaises et les Français. Ces mobilisations puissantes témoignent d’un attachement profond à ce droit à la retraite. Certes, les salariés les plus jeunes doutent mais cette angoisse montre qu’il y a une aspiration à ce que ce droit ne disparaisse pas. Il y a donc une conscience qui peut encore grandir et s’affermir, mais encore faut-il tracer des perspectives.
Édouard Philippe propose non pas un système universel mais une réforme paramétrique visant à faire reculer l’âge de départ en retraite. Tout comme Stanislas Guerini, qui en appelle désormais à une « réforme simple : les régimes spéciaux, les pensions minimums, des mesures sur l’âge, des mesures de justice ». Comment interprétez-vous ce rétropédalage ?
Pierre Dharréville C’est un aveu quant à la réalité de la réforme qui nous était proposée. Cette réforme soi-disant universelle parée de toutes les vertus qui était en réalité une réforme qui visait à jouer sur tous les paramètres, y compris sur l’âge de départ. Et c’était pour eux l’essentiel puisque c’est ce qu’ils mettent en avant aujourd’hui. Il y a une volonté de nous faire travailler plus, dans la journée, dans la semaine, dans le mois, dans l’année et dans la vie. C’est une vieille lune du capital de vouloir pressurer ceux qui travaillent. Il y a une volonté de tirer encore sur la corde. Or, si nous vivons plus longtemps, c’est grâce à la qualité de notre protection sociale. De plus, il est important d’expliquer qu’on ne cesse pas de travailler, entre guillemets, quand on est à la retraite. Certes, ce n’est plus le travail prescrit, mais les retraités continuent d’être utiles. La situation est plus contrastée qu’on ne le dit et il y a d’autres manières de dégager des marges suffisantes pour faire face au besoin de financement du droit à la retraite.
Comment ?
Pierre Dharréville Le partage de la valeur se fait entre le capital et le travail. Prendre aux retraités, cela revient à prendre au travail, il est donc possible de faire autrement. Il y a eu une explosion des exonérations fiscales. À chaque budget, le gouvernement invente de nouvelles exonérations. Et à chaque fois, il affaiblit la capacité de la Sécurité sociale à nous protéger. Notre protection sociale a un coût, il est nécessaire d’arrêter de tailler dedans. La Sécurité sociale doit être financée sur la base des cotisations ; c’est pour cela qu’une cotisation supplémentaire du capital peut être envisagée, notamment lorsqu’on voit toutes les sommes qui s’évaporent avec l’évasion fiscale. Nous avons esquissé un certain nombre de propositions qui se trouvent dans la loi que nous avons déposée à l’Assemblée nationale en 2019.
En présentant sa réforme, le gouvernement a soulevé les faiblesses du système actuel…
Pierre Dharréville Le débat des retraites a fait revenir la question du travail au cœur du débat public. Parler retraite revient à regarder ce qui s’est passé avant, puisqu’il s’agit, à la retraite, de solder les comptes. Faire une bonne réforme des retraites invite à repenser, à soigner le travail. Que ce soient les carrières hachées, le temps partiel subi qui frappe particulièrement les femmes, la question de la pénibilité, sur tous ces points des mécanismes correcteurs pour faire face aux inégalités doivent être apportés mais ce n’est pas suffisant. Le culte de la productivité, de la compétitivité en permanence écrase l’humain, si on vivait mieux le travail, on pourrait mieux envisager une bonne retraite. Nous pourrions garantir dans ce système une retraite minimale et digne fixée au niveau du Smic et revenir à un âge de départ raisonnable. Beaucoup de femmes et d’hommes ont du mal à arriver à l’âge de départ dans de bonnes conditions. La retraite progressive devrait permettre de partir avant l’âge pour celles et ceux qui le souhaitent, pas après. À l’inverse, la réforme des retraites proposée par Emmanuel Macron contribue à accroître cette logique de l’homme et de la femme productifs, avec la règle du « un euro cotisé doit donner les mêmes droits » : chacune, chacun garantit sa propre retraite. C’est la logique du travailler plus pour gagner plus poussée jusqu’au bout.
Le gouvernement souhaite également mettre fin aux régimes spéciaux. Pourquoi faut-il les préserver ?
Pierre Dharréville Les régimes ont tous une histoire, une raison d’être que l’on ne saurait balayer sans égards. Il y a parfois de petits régimes qui ont produit de fortes mobilisations, comme celle des danseurs et danseuses de l’Opéra. Leur régime permettait de prendre en compte leur situation particulière. On peut travailler à plus d’unité et plus de solidarité entre les régimes, d’ailleurs cela existe déjà. La caisse des électriciens et gaziers a été ponctionnée l’an dernier pour contribuer au régime général. Mais il n’y a pas besoin pour cela de passer par pertes et profits toutes les conquêtes sociales qui se sont exprimées à travers ces régimes spéciaux. On devrait plutôt s’en inspirer pour améliorer notre système des retraites que de les dézinguer.
Le budget de la Sécurité sociale est présenté ce mercredi, est-il à la hauteur des enjeux révélés par la crise sanitaire ?
Pierre Dharréville La majorité reste dans son moule, il n’y a pas de surprise. Elle fait semblant, c’est une des caractéristiques de la Macronie. Le gouvernement ne prend pas la mesure des besoins sociaux ou de la situation des hôpitaux, où les fermetures de lits et les restructurations se poursuivent. Le budget ne prépare pas l’avenir alors que les besoins sanitaires sont pressants. Sur l’autonomie, qui est un sujet majeur et souvent laissé dans l’ombre, il faudrait se hisser au bon niveau d’action parce que c’est un vaste terrain d’inégalités. Or, le gouvernement vient d’annoncer qu’il renonce à légiférer malgré les annonces répétées chaque année. En réalité, tout se passe comme si l’on voulait tailler dans les retraites pour financer la santé. Au lieu d’arrêter les exonérations et de s’occuper des ressources, on a l’impression qu’on organise à nouveau le déficit pour justifier demain de nouvelles mesures d’austérité et de casse sociale. On ne change pas de refrain : la Sécurité sociale coûterait trop cher. On connaît la chanson. Or, nous avons besoin d’une ambition sanitaire et sociale puissante. Et elle ne peut être que solidaire.
https://gabrielperi.fr/librairie/notes/manuel-de-la-bataille-des-retraites/
"Les retraites sont depuis toujours un champ de controverse. Imaginez le délire : payer des gens qui ont cessé le travail… Une invention sociale essentielle : le droit d’être libéré du travail prescrit après y avoir tant consacré dans la force de l’âge. Ainsi, par le travail, c’est vraiment tout un monde que l’on gagne pour les autres et pour soi-même. Le droit à la retraite est un puissant marqueur de civilisation. Il met radicalement en cause la loi naturellement impitoyable du marché et la chosification de l’humain. Ainsi, chaque producteur et chaque productrice sont posés en sujets faiseurs de droits, chaque personne en sociétaire du genre humain…
Le droit à la retraite est un puissant marqueur de civilisation. Une conquête sociale qui s’est construite dans la durée. Affichant un vaste projet de remodelage antisocial, le Président de la République avait pour projet un changement complet de système de retraite, basé sur un calcul par points. Ainsi, alors que le Covid-19 fondait sur la planète, toute la Macronie s’échinait à imposer une réforme des retraites qui, pourtant, suscitait un profond rejet. Mis en difficulté dans la rue comme dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, le Premier ministre dégainait le 49-3, puis confinait le pays. À l’issue de ce débat intense, l’auteur a dressé l’inventaire des nombreuses questions agitées dans la bataille. Bien lui en a pris : la question n’en finit pas de resurgir. Témoignage d’une confrontation âpre, il repasse les arêtes du débat, démonte les idées reçues, et dessine les contours d’une réforme progressiste, « pour une retraite qui va bien ».
Nous publions ce texte mis à jour avec les analyses des premiers effets de la crise sanitaire. Nul doute qu’il servira.
Pierre Dharréville, député PCF des Bouches-du-Rhône, porte-parole du Groupe de la Gauche démocrate et républicaine et membre de la commission des affaires sociales, fut l’un des acteurs de premier plan du débat sur la réforme des retraites à l’Assemblée nationale.
Les révélations des Pandora Papers remettent le sujet dans le débat pour la présidentielle. (...)
«Je souhaite un véritable débat sur l’évasion fiscale », ce « cancer pour notre économie » . Ce n’est pas la première fois que le candidat communiste Fabien Roussel porte le thème de la fraude internationale et des paradis fiscaux à l’agenda de la présidentielle, aujourd’hui encore saturé des éructations d’Éric Zemmour. « Les actifs financiers sont retenus dans des banques et des comptes offshore où l’argent produit par des salariés ici se retrouve mélangé à l’argent de la drogue, de la traite des humains et des trafics d’armes », s’est alarmé le secrétaire national du PCF ce lundi, en conférence de presse. Face à cela, il propose plusieurs mesures, parmi lesquelles des peines de prison ferme et la perte des droits civiques pour les fraudeurs, l’instauration d’un ministère dédié à la lutte contre la fraude fiscale, et la création d’une « COP fiscale mondiale » sur le modèle de la COP climat (propositions reprises des frères Éric et Alain Bocquet, auteurs de Milliards en fuite !).
« La nationalisation ou la fermeture » des banques délinquantes
Le député nordiste propose aussi le recrutement de 15 000 contrôleurs fiscaux supplémentaires. « Il y a eu une saignée ces dix dernières années dans nos services fiscaux. On devrait avoir une armée formée pour aller débusquer ces délinquants en col blanc », justifie le candidat. La parlementaire propose en attendant une filière de recrutement spéciale de la police judiciaire où l’on développerait les compétences spécifiques requises pour ce genre d’enquête.
Vient ensuite la question des sanctions, que certains appellent à durcir. « Il faut abroger tout de suite les lois mises en place par Darmanin permettant de négocier le montant des amendes avec les fraudeurs fiscaux », pose Fabien Roussel. Une référence à une disposition de la loi antifraude de l’automne 2018, votée alors que Gérald Darmanin était encore aux Comptes publics. Cette loi assouplit notamment le « verrou de Bercy », c’est-à-dire le monopole de l’administration fiscale sur la lutte contre la fraude, monopole problématique quand ledit fraudeur est à la tête de l’administration fiscale, comme dans l’affaire Cahuzac. Mais elle a aussi ouvert, au grand dam des oppositions de gauche, l’extension à la fraude fiscale de la convention judiciaire d’intérêt public, une mesure permettant à une entreprise de négocier son amende directement avec l’État afin d’éviter des poursuites et une reconnaissance de culpabilité.
Les révélations d’un pool international de journalistes d’investigation dévoilent l’ampleur des fraudes et mettent en cause des personnalités politiques de premier plan. Le phénomène progresse dans les pas de la financiarisation du capitalisme mondialisé.
Joliment baptisée « Pandora Papers », une nouvelle enquête du Consortium international des journalistes d’investigation (Icij) vient révéler l’ampleur de la fraude fiscale et le degré de corruption de certaines personnalités membres de l’élite politique mondiale, voire de certains chefs d’État en exercice. Elle atteint la bagatelle de 11 300 milliards de dollars (9 400 milliards d’euros). Les individus haut placés pris en flagrant délit les ont fait « prospérer » dans une myriade de sociétés offshore, basées dans des paradis fiscaux.
Les enquêteurs de l’Icij ont épluché quelque 11,9 millions de documents. Ils pointent comment 336 dirigeants et responsables politiques de premier plan ont triché pour parvenir à leurs fins lucratives. Nous avons sélectionné et dressé ici le portrait de quelques-uns des plus emblématiques de ces personnages, auteurs souvent des envolées les plus solennelles contre la corruption ou la fraude fiscale (lire ci-contre). Les îles Vierges britanniques se taillent la part du lion dans cette affaire, puisqu’elles sont à l’origine des deux tiers des montages d’optimisations de la fortune de tous ces grands personnages publics.
Ces Pandora Papers s’ajoutent à une déjà longue liste de scandales du même type. Baptisés Offshore Leaks, Panama Papers, Paradise Papers, LuxLeaks ou OpenLux, ces investigations lèvent, à chaque fois, un coin du voile sur des pratiques qui permettent de soustraire des milliers de milliards d’euros au financement des services publics, des hôpitaux, des écoles, de la recherche médicale… Elles livrent un décryptage saisissant des méthodes les plus sophistiquées employées par des fraudeurs qui se sont entourés d’une armée de financiers pleinement intégrés à la planète boursière, de banquiers forts de leurs réseaux mondiaux et d’avocats fiscalistes ayant pignon sur rue.
Au-delà de la ribambelle de personnages politiques sortis de la boîte de Pandora, l’un des mérites de cette dernière enquête en date est de révéler l’expansion et la banalisation des paradis fiscaux. Il apparaît, en effet, que ces derniers ont pu étendre leur périmètre d’activité bien au-delà des sphères traditionnelles, des Caraïbes au Luxembourg. De nouveaux flibustiers de la fraude fiscale sont venus s’ajouter aux champions d’un secteur déjà très fourni. Au sein de l’hyperpuissance mondiale, l’État du Dakota du Sud accueille ainsi depuis peu des fonds considérables venus de l’étranger au sein de sociétés-écrans en leur garantissant l’opacité la plus totale.
La qualité de ces investigations et les efforts fédérés par plusieurs grands titres de la presse internationale – ils vont en France du Monde à Libération en passant par Radio France – permettent à leurs auteurs de distiller, à chaque fois, de vraies révélations sans courir le risque d’un tir de barrage politique ou (et) juridique. Toutefois, l’extraordinaire accumulation de ce type d’enquête n’a jamais débouché sur un véritable tournant dans la lutte contre les fraudeurs mondialisés. Davantage de transparence, des régulations plus sévères, de nouvelles contraintes juridiques, voire la mise hors circuit des hôtes les plus avérés du dopage des fortunes personnelles ou des profits géants des plus grandes sociétés sont réclamées, à chaque fois, à juste titre et à cor et à cri. Sans jamais que rien ne change vraiment. Comme le prouvent les révélations publiées quelques mois ou quelques années plus tard. Un peu comme s’il s’agissait, à chaque fois, d’un nouvel épisode accablant versé à un dossier dont l’importance et la nocivité ne se réduisent pas. Mais qui fait preuve tout au contraire d’une résilience phénoménale, voire d’une capacité à continuer de croître et embellir.
En fait, la plaie de la fraude fiscale n’est béante et hideuse que parce qu’elle bénéficie d’un environnement systémique des plus favorables. La financiarisation des économies encouragée, impulsée ces dernières années par les grandes puissances, et singulièrement par Washington et Wall Street, a débouché sur un mode de régulation de la sphère capitaliste dont la caractéristique essentielle est d’ouvrir toujours davantage de possibilités aux fraudeurs et autres optimiseurs de gros magots.
« Au cours des 40 dernières années, l’industrie financière a pris un pouvoir considérable sur le reste de la sphère économique », relevait en 2020 un observateur allemand très en vue, longtemps membre de l’institut Ifo de conjoncture d’inspiration plutôt libérale. Cette évolution a été portée par un « assouplissement » des règles et des contrôles publics qui a démultiplié les possibilités de pratiquer les placements les plus lucratifs, assorti des moyens de leur faire éviter ou contourner les impôts et les taxes.
Tout a été subordonné aux résultats de la Bourse. Sans que les placements encouragés soient le plus souvent reliés au monde réel. Et ce sont les plus grosses sociétés d’investissement, comme l’États-Unien BlackRock, qui ont ainsi pu acquérir des pouvoirs d’influences nouveaux jusque dans les régulations, souvent codécidées avec la puissance publique. Elles ont pu ainsi lancer des produits au rendement exceptionnel. Nourrissant ce faisant une boursouflure financière mondiale au diamètre de plus en plus menaçant.
Les États-Unis sont à l’avant-garde de cette évolution comme du combat pour atteindre la plus grande compétitivité financière. Outre les nouveaux aventuriers du Dakota du Sud repérés par les enquêteurs de l’Icij, ils disposent de très longue date d’un outil majeur d’optimisation fiscale : l’État du Delaware. Il permet à toutes les compagnies qui y déclarent leur siège social de bénéficier de taux d’imposition très réduits.
Dans cet État peuplé de moins d’un million d’habitants, quelque 1,2 million de sociétés, dont la plupart des géants de Wall Street, ont installé quelques bureaux, parfois juste une plaque. Ce qui leur permet de réduire considérablement leurs prélèvements. Une entreprise installée ne paie aucune taxe locale et doit seulement s’acquitter de l’impôt fédéral américain. Le système est bien rodé et défendu jusqu’au plus haut niveau. Le sénateur du Delaware depuis 1972 n’est autre qu’un certain Joe Biden, aujourd’hui président des États-Unis. À quand des « Delaware Papers » ou un « Delaware Leaks » ?
Partout, les possibilités de placer son argent sans avoir à rendre le moindre compte à la puissance publique et à ses besoins d’investissements sociaux ou environnementaux ont atteint aussi une dimension nouvelle dans la dernière période, dont le bitcoin est le nom. Ces monnaies numériques, alternatives des devises émises par les grandes banques centrales, sont portées par les libéraux libertaires des États-Unis. Elles remplissent, à elles seules, tous les avantages offerts par les paradis fiscaux : aucun contrôle sur l’origine des fonds, aucune régulation publique et une promesse de rendements faramineux. Elles siphonnent aujourd’hui plus de 500 billions de dollars. Ce qui en fait le plus gros des récipients dévoués aux investissements hors taxes pour tous les agioteurs de la planète. Seule différence : le placement peut désormais s’avérer risqué quand la bulle des bitcoins se sent comme aujourd’hui des accès de faiblesse. Sur fond de risque bien réel d’éclatement de cette sphère ultraspéculative, qui pourrait bien menacer toute la planète financière.
Santé, écologie, énergie, jeunesse, emplois… D’ici la fin de l’année, le candidat du PCF à la présidentielle multipliera les déplacements pour six « agora » thématiques. Premier rendez-vous dès mercredi en Auvergne sur l’agriculture et l’alimentation.
Le candidat communiste à la présidentielle, Fabien Roussel, reprend la route. Après une caravane en une cinquantaine d’étapes le long des côtes cet été, le PCF lance à partir de mercredi les « Rencontres des jours heureux ». « On change de campagne : avant on faisait des meetings partout avec le même discours, là on fait le choix des thématiques et des territoires », explique le député du Nord. Le concept ? « Ce seront des Agora, des ateliers, des échanges à l’issue desquelles je présenterais nos propositions », poursuit-il. En la matière, pas « de demi-mesures », promet Fabien Roussel estimant que « toute la gauche paie encore les trahisons, les reniements » du quinquennat Hollande. Il y voit d’ailleurs une justification à la multiplication des candidatures : « La première mesure que Yannick Jadot veut mettre en place c’est de libérer les poulets, a-t-il dit au JDD. Moi la première mesure que je mets en place c’est de m’attaquer à la question sociale, d’augmenter les retraites et les salaires, même si je libérerai aussi les poulets pour avoir de l’élevage en plein air. »
La première des « Rencontres des jours heureux », prévue dès ce mercredi à Billom dans le Puy-de-Dôme, sera d’ailleurs consacrée aux enjeux de l’alimentation, de l’agriculture et de la ruralité. Un rendez-vous en soirée précédé d’une visite du salon de l’élevage à Clermont-Ferrand et suivi de la visite d’une exploitation laitière. « Je veux porter la voie des territoires, d’une ruralité nouvelle, du respect des collectivités », détaille Fabien Roussel qui souhaite profiter de chacun de ces déplacements pour aller « à la rencontre des élus locaux et valoriser ce qu’ils font sur le terrain ».
Ce sera ensuite le tour des questions de santé à Ramonville, près de Toulouse, le 16 octobre, avant l’écologie et l’énergie le 27 octobre à Rennes. « Se priver du nucléaire comme le proposent d’autres candidats est une folie qui va coûter cher aux Français », affirme dès maintenant le parlementaire. Alors que le gouvernement envisage de créer de petites centrales, il plaide pour « engager, sans attendre 2022, la programmation de 6 à 8 EPR afin de compenser la fermeture des 12 réacteurs annoncés d’ici 2035 » et pour investir davantage dans les « barrages hydro-électriques, deuxième source d’énergie décarbonnée et pilotable ». « C’est une question d’indépendance énergétique pour notre pays, estime-t-il. Mais c’est aussi la seule voie pour garantir aux Français et aux entreprises de notre pays l’électricité la moins chère et la plus décarbonnée d’Europe. » Après une rencontre la semaine dernière avec le président de la République à propos de ce coût de l’énergie, le candidat « regrette que le blocage des prix annoncés par le premier ministre ne soit qu’une mesure en trompe-l’œil ». « Ce sont vraiment des hypocrites, des truands », fustige-t-il pointant le rattrapage prévu en avril, et avançant l’idée « de baisser la facture tout de suite de 30 % puisque c’est le poids des taxes ».
Les rendez-vous suivants concerneront la jeunesse, le 10 novembre à Poitiers, puis l’éducation, le 3 décembre à Vénissieux. « Je reviendrais sur le pacte pour la jeunesse que j’ai lancé dès le début de ma campagne et sur cette proposition innovante qui fait débat d’allonger le temps d’enseignement à 32 heures pour nos enfants », annonce le candidat. Entre-temps, un grand rassemblement, avec « plusieurs milliers de personnes », doit avoir lieur à Paris le 21 novembre sur l’emploi et le pouvoir d’achat. Point d’orgue d’une semaine de mobilisation organisée localement entre le 9 et le 17 octobre par le PCF à travers la France. « L’extrême droite veut kidnapper la présidentielle. (…) Disons-le clairement : la haine ne remplit pas le frigo, elle ne paie pas les factures non plus. C’est sur l’emploi et les salaires que le débat doit porter. Nous voulons lancer une contre-offensive tous azimuts », explique Ian Brossat (entretien à retrouver ici).
Quant à l’évasion fiscale qui fait la une de l’actualité avec les Pandora Papers, elle fera l’objet d’une « rencontre des jours heureux » en Février, aux côtés d’une série de nouvelles étapes de ce tour de France. « J’appelle à désintoxiquer l’économie le plus rapidement possible », a d’ores et déjà indiqué Fabien Roussel mettant notamment sur la table à la fois des peines de prison fermes pour les fraudeurs fiscaux, la nationalisation des banques impliquées, et une Cop fiscale mondiale.
Julia Hamlaoui
Patrick Le Hyaric a annoncé son départ de la direction du groupe l’Humanité. Le conseil de surveillance a validé, mercredi, la nomination de son successeur, Fabien Gay. Le sénateur de la Seine-Saint-Denis devient le huitième directeur du titre, depuis sa création par Jean Jaurès en 1904.
L’un arrive, l’autre est sur le départ. Mercredi, le conseil de surveillance a validé la nomination de Fabien Gay au poste de directeur du groupe l’Humanité. Après vingt années à la tête du journal, Patrick Le Hyaric a décidé de quitter ses fonctions. L’occasion de revenir sur le parcours de ces deux hommes, le premier fils d’ouvriers, l’autre fils d’agriculteurs. Des trajectoires venues du monde du travail, dans la grande tradition de l’Humanité.
Les deux dirigeants se connaissent bien. Fabien Gay a été, durant dix mois, le collaborateur de Patrick Le Hyaric, à la tête du journal, en 2014. « C’était une expérience intense, confie le jeune sénateur communiste au téléphone. J’ai découvert, semaine après semaine, mois après mois, quelqu’un de très humain. Et une heure avec lui, c’est comme si tu avais lu un livre. J’ai beaucoup appris à ses côtés. C’est quelqu’un de dur au travail, d’exigeant, avec une rigueur intellectuelle hors du commun. » Le désormais ex-directeur de l’Humanité, de son côté, avait en tête le portrait-robot de son successeur : « Il convient d’élire un camarade qui connaisse bien l’Humanité et son fonctionnement, qui soit capable d’animer des équipes avec des personnalités fortes et diverses, qui soit capable de prendre des décisions parfois difficiles, et qui puisse maintenir des liens avec les institutions étatiques et le monde économique. » Toutes qualités qu’il a pu déceler chez Fabien Gay, dont il a proposé le nom.
Et Fabien Gay se dit « très heureux » de revenir à l’Humanité. Lui qui fut directeur sur trois éditions de la Fête, de 2015 à 2017, avant d’être élu sénateur, confie avoir « adoré » cette expérience, le travail, le sentiment d’urgence, et les équipes aussi. « La Fête, c’est ce qui rassemble toute la maison, estime-t-il, philosophe. Quand j’ai été élu sénateur de la Seine-Saint-Denis, en 2017, la seule chose qui m’a embarrassé, c’est de quitter le journal. » Il y revient « avec émotion, car c’est une très grosse responsabilité, en même temps qu’un très grand honneur d’y travailler ». Et a hâte de se mettre au travail, dans « cette belle maison qu’est l’Humanité ».
L’histoire est d’autant plus belle que Fabien Gay vient d’un milieu très modeste. Celui qui devient, à 37 ans, le plus jeune directeur de l’Humanité de tous les temps, est le fils d’une ouvrière et d’un tourneur-fraiseur devenu permanent de la CGT. Il a grandi dans un quartier populaire de Bordeaux, le Bacalan. Et il est le premier de sa famille à décrocher le baccalauréat, avant de se découvrir une passion pour l’étude à l’université de Bordeaux-III, où il décroche un master d’histoire contemporaine, de géographie, d’histoire des idées. « La fac, ça a été pour moi une révélation », avoue-t-il, de son accent chantant du Sud-Ouest. Parallèlement, il est très engagé dans son club de rugby, tour à tour joueur, entraîneur bénévole, éducateur. « Mon premier engagement militant, il est sportif », commente-t-il. Dans le club, se retrouvaient tous les gamins du coin, fils d’ouvriers, d’avocats ou d’architectes. « C’est un vrai lieu de socialisation, de vie, que je continue toujours à chercher dans le PCF comme dans mon rôle d’élu », affirme le jeune homme.
Côté engagement, il entre en politique avec la bataille contre le traité constitutionnel européen, puis les révoltes urbaines de 2005. Il prend assez vite des responsabilités au PCF, puis à la Jeunesse communiste (JC). Tout en poursuivant et finançant ses études, il travaille dans des champs de maïs, est tour à tour vendangeur, barman, serveur, et même, pendant neuf ans, animateur dans un village de vacances. Une expérience de la précarité qu’il n’oublie pas. C’est à cette époque qu’il collabore pour la première fois à l’Humanité, en participant au programme « Libres-échanges » qui ouvrait nos colonnes à de jeunes gens, avec un papier rageur sur Sarkozy et l’immigration. Fabien Gay a suivi son épouse en région parisienne, au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), où il est devenu permanent de la JC, avant d’entrer à l’Humanité, puis de devenir sénateur en septembre 2017. Thibaut Weiss, l’actuel directeur de la Fête de l’Humanité, a un souvenir ému de celui qu’il considère comme un « grand frère » : « Fabien a une vision. Il ne se contente jamais de rester strictement dans le rôle qu’on lui assigne. Il essaie d’aller le plus loin possible et d’emmener les gens avec lui, parce qu’il est généreux dans le travail, avec ses équipes. » Dans un moment où la Fête de l’Humanité doit être « réinventée », il considère que c’est « un atout » d’avoir comme directeur du journal quelqu’un qui en connaît les rouages.
Une page se tourne pour l’Humanité. Patrick Le Hyaric, en vingt années, a fait face à de véritables tornades. Il est arrivé en 2000, à 43 ans, dans un climat délétère, où le journal avait perdu des milliers d’abonnés. « Avec courage et abnégation, il a tenu le journal à bout de bras pendant deux décennies sans jamais se plaindre », dit de lui le PDG du groupe de la Dépêche du Midi, Jean-Michel Baylet, ancien président de l’Alliance de la presse d’information générale. « Ce qui m’a marqué chez lui, c’est qu’il est un véritable humaniste. En vrai radical-socialiste, j’apprécie beaucoup. Je l’ai toujours vu ouvert, jamais dans l’excès, ni dans l’intransigeance, à essayer de comprendre. Ça n’empêche pas les divergences. C’est un honnête homme dans tous les sens du terme », loue-t-il.
Et Patrick Le Hyaric a eu fort à faire. Il a été obligé, en guise de ticket de bienvenue, de procéder à un premier plan social qui l’a beaucoup affecté. Le dirigeant communiste, qui était directeur du journal la Terre, collaborateur d’André Lajoinie, a relevé les manches, convoqué les financements, placé inlassablement le personnel politique face à ses responsabilités. Il a dû affronter une véritable révolution dans les pratiques de lecture, d’abord avec l’arrivée des journaux gratuits, puis avec l’explosion d’Internet qui a totalement chamboulé tout le modèle économique des journaux. Son credo, durant toutes ces années : « Renouer avec les enseignements de Jaurès, et protéger l’Humanité pour la mettre au service de ceux qui en ont besoin », assure-t-on dans son entourage.
La dernière de ces tempêtes, en 2018, a failli signer la fin de l’aventure de l’Humanité, et il lui a fallu batailler pour inventer un nouveau modèle. Au final, d’une maison lestée par l’amertume et les ennuis financiers, en 2001, il laisse aujourd’hui une économie saine, un groupe de presse bien plus stable, composé de l’Humanité, de l’Humanité Dimanche, d’une plateforme Internet, mais aussi de la Terre et de Travailler au futur, avec des collectifs de travail soudés. « Ce qui caractérise Patrick, c’est son sens absolu des responsabilités, commente un proche. Il pèse ses choix, et les assume, même quand ce n’est pas facile. Ça ne veut pas dire qu’il ait raison sur tout, mais c’est l’inverse de la bravade et de la gloriole, il y a même un côté très pudique chez lui. »
Les directeurs de la rédaction qui se sont succédé depuis 2000 saluent aussi l’immense dévouement du directeur sortant. Pour Pierre Laurent, en poste de 2000 à 2010, « le bilan sur les années 1998-2021 est extraordinaire ». Patrick Apel-Muller, qui a pris sa suite jusqu’en décembre 2019, estime pour sa part que Patrick Le Hyaric « a su protéger l’indépendance du journal, alors que des difficultés financières attiraient des prédateurs de tout poil. Au fil d’un dialogue parfois animé avec la rédaction, il a tracé le sillon d’un quotidien ouvert, communiste et à la confluence des débats de la gauche, exigeant intellectuellement et accessible à tous. Une denrée rare dans le paysage médiatique aujourd’hui ». Sébastien Crépel, actuel codirecteur de la rédaction aux côtés de Maud Vergnol, assure que « Patrick a toujours joué le rôle de paratonnerre pour l’Humanité et ses équipes. En toute circonstance, il a pris la défense des journalistes et de ce qu’ils écrivent, même quand, en son for intérieur, il lui est arrivé de ne pas être d’accord sur tout. Quand on prenait des risques, c’est lui qui affrontait le danger. Et pourtant, il n’a jamais demandé à quiconque de se censurer, il est très attaché à la liberté de chaque journaliste. En échange, il attend que nous soyons solidaires les uns des autres. Pour lui, rassembler, à l’intérieur comme autour de l’Humanité , faire la chaîne pour être plus forts, c’est une préoccupation constante depuis vingt ans ».
Un nouveau chapitre du journal de Jaurès s’ouvre. Patrick Le Hyaric, qui continuera à s’occuper du développement de la Terre et de Travailler au futur, rappelle que « l’Humanité est un trésor que nous lègue le mouvement ouvrier et communiste. Il est le seul journal de cette nature dans le monde capitaliste, un journal d’inspiration, de combat et de création communiste. C’est un caillou dérangeant pour le talon de fer du capital, observé, jalousé, et qui, à n’en pas douter, continuera à faire l’objet de manœuvres pour l’ôter au courant communiste et progressis te ». Fabien Gay assure : « Nous continuerons à faire de l’Humanité un journal ouvert sur la société, avec des informations qu’on ne retrouve nulle part ailleurs, qui fait vivre ses valeurs, montre l’actualité sous un autre angle, la décrypte et la rend accessible au plus grand nombre. Et ce, avec tous les défis qui attendent ses équipes. »
Dans tous les cas, comme l’a déclaré Patrick Le Hyaric, « l’Humanité est un combat quotidien, qu’il faudra continuer à mener tous ensemble ».
Le conseil de surveillance de la Société nouvelle du journal l’Humanité (SNJH) s’est réuni ce mercredi 29 septembre 2021.
Il prend acte des résultats satisfaisants du bilan comptable de l’exercice 2020, avec un résultat net positif de plus de 3 millions d’euros.
Les membres du conseil de surveillance expriment leur satisfaction sur la pleine réussite de l’édition 2021 de la Fête de l’Humanité.
Alors que les premières tendances pour cette année 2021 montrent la possibilité d’un équilibre comptable, ils confirment la nécessité de respecter la trajectoire du plan de continuation et de mettre en œuvre l’ensemble des projets exposés lors du conseil de surveillance afin d’impulser le développement du groupe l’Humanité.
En ce sens, le quotidien et le magazine seront rénovés à la mi-novembre. Des initiatives nouvelles de relance des ventes et des abonnements, ainsi que de la conquête publicitaire seront prises. La plateforme numérique sera rénovée courant 2022. D’autre part, la migration de la Fête de l’Humanité au cœur de l’Essonne est un chantier important à réussir pour l’avenir du groupe.
Enfin, le conseil de surveillance prend acte de la demande de M. Patrick Le Hyaric, président du directoire, et directeur de l’Humanité, d’être remplacé dans ses fonctions.
Le conseil de surveillance élit M. Fabien Gay – qui a été membre du comité de direction de l’Humanité, directeur de la Fête – au poste de président du directoire, directeur de la publication. M. Patrick Le Hyaric l’assistera un temps dans ses fonctions et conservera la présidence de la filiale « Les éditions des futurs » portant les titres la Terre et Travailler au futur. Le conseil de surveillance remercie Patrick Le Hyaric pour le travail accompli et son engagement sans faille depuis vingt et un ans au service de l’Humanité.
Le conseil de surveillance exprime toute sa confiance et son soutien à M. Fabien Gay pour mener à bien la nouvelle période qui s’ouvre.
Saint-Denis,
le 29 septembre 2021
Prenant prétexte de la fin de la pandémie, le Président de la République et son Premier ministre ont donc décidé d'imposer la mise en œuvre de la contre-réforme de l'assurance-chômage en ce 1er octobre, malgré l'unanimité qu'elle rassemble contre elle.
Selon les chiffres de l'Unedic, avec l'entrée en vigueur de celle-ci, 1,15 millions de personnes vont ainsi voir aujourd'hui leurs droits baisser drastiquement, en moyenne de 17 % et jusqu'à 40 % pour les 400.000 les plus précaires, dont de nombreux jeunes. 50% des allocataires touchent moins de 860 euros par mois : Comment oser dire que l'on gagne plus au chômage qu'en travaillant !
Cette décision est une ignominie à l'égard des salariés concernés, jugés coupables d'un chômage dont seuls sont responsables les gouvernements successifs et le MEDEF.
Cette contre-réforme vise à faire 3 milliards d'euros d'économie sur le dos des chômeurs. Dans un pays qui compte plus de 6 millions de personnes privées d'emploi, plus de 10 millions de personnes sont dans une situation de pauvreté. Qui peut encore nourrir cette idée de folle de s'attaquer aux maigres droits des chômeurs plutôt que de travailler avec courage à l'éradication du chômage ?
Cette contre-réforme souligne par ailleurs le dogmatisme ultralibéral du pouvoir, qui préfère s'en prendre aux salariés que de travailler à éradiquer le chômage.
Le déficit de l'Unedic est d'abord nourri par la persistance d'un chômage de masse ! Les délocalisations en cascade, la course au profit et les cures d'austérité appliquées aux services publics comme aux communes sont responsables du chômage. De même, les bas salaires, les conditions de travail pénibles, le temps partiel subi sont dénoncés par des salariés qui ne veulent plus se faire exploiter quand, en même temps, les taux de marge des entreprises atteignent 35% selon la Banque de France.
Il faut une toute autre politique dans le pays, pour relever les immenses défis écologiques et sociaux.
Le PCF propose d'augmenter les salaires et de créer tout de suite les centaines de milliers d'emplois qui manquent dans nos services publics, en engageant notamment des pré-recrutements, à empêcher les restructurations organisées par les grands groupes, toujours accompagnées de plans de suppressions d'emplois, en déclarant un moratoire sur ces suppressions, à mettre un terme au grand déménagement industriel du pays.
Fabien Roussel, candidat à l'élection présidentielle, présentera l'ensemble des mesures en faveur de l'emploi, de sa sécurisation et des salaires, le 21 novembre à l'occasion d'un grand rassemblement à Paris.
Parti communiste français,
Paris, le 1er octobre 2021.