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9 juillet 2022 6 09 /07 /juillet /2022 08:56

 

En Ile-de-France, comme en Bretagne, nous avons regardé dans la dernière semaine de juin les dépliants publicitaires édits par les enseignes de la distribution. Chacune tente de gagner des parts de marché contre la concurrence. En ce début d’été, les promotions se font surtout sur les vêtements et les boissons rafraîchissantes tandis que la viande perd du terrain, faute de prix bradés par les abattoirs. Quant au bilan carbone, c’est le dernier de leurs soucis.

Le mercredi 27 juin, une longue dépêche de l’Agence France Presse (AFP) diffusée à 3 h 18 du matin nous informait que les 27 pays membres de l’Union européenne avaient approuvé en début de nuit « de mardi à mercredi, cinq textes clés du plan climat de l’UE, s’accordant notamment sur le montant d’un fonds censé amortir pour les consommateurs l’impact du marché carbone élargi aux voitures et aux logements ». Selon cette dépêche, la Commission propose un fonds social alimenté par les recettes du nouveau marché du carbone sur le « logement et le transport routier » d’un montant de 72,2 milliards d’euros entre 2025 et 2032. Mais l’Allemagne, le Danemark, les Pays Bas et la Finlande ont trouvé ce fonds social trop élevé.

La France, qui assurait encore la présidence tournante des pays membres de l‘Union européenne, avait rallié la majorité des pays sur un compromis à 59 milliards d’euros entre 2027 et 2032. Concrètement, les travailleurs contraints d’utiliser leur voiture pour se rendre au travail paieront de plus en plus de taxes carbone. Mais les plus pauvres d’entre eux pourraient percevoir un petit quelque chose en échange. Ce genre de ristourne sera loin de compenser la somme dépensée via la taxe carbone et la TVA à chaque plein de carburant.

Six dépliants pour six enseignes différentes

En attendant, nous avions la semaine dernière dans les boîtes aux lettres de la région Ile-de-France un dépliant publicitaire de 48 pages de l’enseigne Leclerc et un autre de 72 pages édité par Carrefour. Les deux faisaient état des promotions entre le 28 juin et le 9 juillet. Mais dès le 4 juillet les boîtes aux lettres contenaient un autre dépliant de 64 pages édité par Carrefour et présenté comme « Spécial apéro d’été » avec des rabais de -60 % sur différents produits.

La semaine dernière, dans le cadre d’un déplacement contraint en région Bretagne, nous avons constaté qu’un dépliant de Leclerc de 48 pages proposait 32 adresses de magasins aux clients potentiels dans le Finistère, le Morbihan et les Côtes d’Armor. Dans les communes de ces départements bretons, les boîtes aux lettres des habitants avaient reçu une livraison groupée de 6 dépliants publicitaires provenant de six enseignes différentes. En plus Carrefour et Leclerc, Intermarché, Casino, Lidl, Netto et Espace Emeraude- cette enseigne ne vend pas de nourriture mais des tondeuses à gazon et divers autres équipements pour le jardin et la maison- complétaient le tableau.

Quand le vin rosé se substitue à la viande bovine

Tant que les abattoirs avaient besoin de déstocker de la viande fraîche, les promotions sur la bidoche figuraient dans les premières pages de ces dépliants. Mais, comme des années de prix bas ont obligé les paysans à vendre plus de vaches et des truies que prévu afin de payer les traites, cette décapitalisation débouche aujourd’hui sur une offre plus réduite, ce qui limite les prix de braderie. Car les abattoirs n’ont plus besoin de déstocker en cassant les prix. Voilà pourquoi les offres de viande occupent désormais peu de pages et sont reléguées en milieu de catalogue dans les dépliants des enseignes. En revanche, les vêtements d’été, les vins rosés et les bières sont en promotion dès les premières pages. En Bretagne le catalogue de Lidl affichait 36 vins rosés différents avec des premiers prix à 2,19 € la bouteille, à condition d’en acheter un lot de trois.

« En gros c’est moins cher », titrait le dépliant d’Intermarché et cela valait pour deux packs de bière totalisant 15 litres, mais aussi pour trois boîtes de thon en conserve, pour les six bouteilles de rosé du Pays d’Oc et pour un lot de six paquets de cacahuètes grillées et salées. Dans une note datée du 30 juin, l’INSEE indiquait que le chiffre d’affaires des grandes surfaces alimentaires a progressé de + 0,8 % en mai après +7 % en avril. Sur les seuls produits alimentaires, il ne progresse de +0,7 % en mai après +1,4 % en avril. Il est donc probable que les grandes enseignes prennent des parts de marché aux petits commerces ces derniers mois, tant les ménages sont soucieux de réduire leurs dépenses.

Les promotions étant différentes d’une enseigne à l‘autre, certains consommateurs peuvent aussi être tentés de faire plusieurs magasins concurrents pour trouver les bonnes affaires ; avec ce que cela suppose de kilomètres parcourus en plus, afin de réaliser quelques économies sur certains achats. Au final, le bilan carbone cumulé de la production, de la distribution dans les boîtes aux lettres et de l’usage qu’en font les consommateurs au moment de faire les courses est particulièrement élevé en plus d’être très consommateur d’un papier qui ne sera guère recyclé par la suite. De quoi faire flamber le prix du papier-journal, en hausse de 80 % sur les six mois premiers mois de l’année.

Taxer la publicité des grandes enseignes et au-delà

Nous sommes dans une Europe qui communique sans cesse sur la neutralité carbone en 2050. Elle le fait sans prendre les mesures qui permettaient d’y parvenir. Le moment n’est-il pas venu de mettre en place une taxe carbone, plutôt faible au départ, mais progressive au fil des ans, sur les dépliants publicitaires des enseignes commerciales ? Ne faut-il pas faire la même chose sur toutes les publicités diffusées sur les chaînes de la télévision publique et privée ? On pourrait utiliser une partie de cet argent pour verser une aide alimentaire mensuelle aux ménages les plus pauvres de notre pays.

Ces derniers jours plusieurs chaînes de la télévision ont invité Michel-Édouard Leclerc, qui aime se faire l’avocat des consommateurs en affirmant que faire jouer la concurrence sans retenue sur les prix des produits présentés comme des « marques de distributeurs » permettrait de baisser certains prix en magasin. Mais les distributeurs ne produisent généralement pas les produits de leurs marques. Ils imposent à leurs sous-traitants des prix d’achat qui ne couvrent pas les coûts de production, sauf à délocaliser certaines productions. Leclerc dit volontiers qu’on a manqué de moutarde car la production canadienne fut en recul en 2021.

Ce que Michel-Édouard Leclerc cache aux téléspectateurs

Mais il ne dit jamais que la production de graines en Bourgogne pour la moutarde de Dijon a été divisée par trois entre 2016 et 2020. Suite à la signature du CETA, l’accord de libre échange entre l’Europe des 27 et le Canada, les industriels de la moutarde de Dijon ont réduit leurs coûts de production en important des graines du Canada pour en faire baisser le prix de la même graine cultivée de longue date en Bourgogne. Du coup, les paysans bourguignons ont réduit les superficies pour faire du blé et du maïs à la place des graines de moutarde.

C’est aussi et surtout en contraignant leurs fournisseurs à importer des matières premières à bas prix que l’enseigne Leclerc et les autres ont augmenté la part des « marques de distributeurs » dans les linéaires des grandes surfaces. Mais avec la multiplication des ruptures dans les chaînes d’approvisionnement, suite au Covid, puis à la guerre en Ukraine, les spéculateurs sont entrés en scène et les prix ont déjà augmenté de 5,8 % en France entre juillet 2021 et juin 2022.

 

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