Morlaix pendant la Révolution (II)
Une histoire de Morlaix, troisième partie
Par Ismaël Dupont (compte rendu de lectures)
L'appauvrissement de la ville, la fin de la Manufacture
Début février 1791, un décret rétablit dans toute l'étendue du royaume la liberté de culture, de fabrication et de débit du tabac, ce qui met en péril les ressources de huit cent familles morlaisiennes. Le 12 mars 1791, le maire Yves-Joseph Le Denmat de Kervern est prévenu d'une prochaine pénurie de tabac. Il décide de demander l'autorisation de remplacer la manufacture par une régie nationale. L'Assemblée Nationale et le contrôleur des finances s'y opposent, prétextant la disparition du monopole d'État. Les bâtiments de la Manu sont vendus par lot. Il ne manque pas d'acquéreurs. Une production très réduite de tabac, à caractère privé, se poursuit dans l'enceinte de la Manu. Morlaix compte onze ateliers privés de fabrication de tabac à consommer. La Manufacture d'État ne rouvrira ses portes que sous l'Empire en 1811. En attendant, la création de pétits ateliers ouverts par des familles de négociants ne permet pas de refournir du travail à l'ensemble des anciens manufacturiers. L'accroissement de la misère provoque la colère du petit peuple et, le 6 mai 1791, une émeute éclate. Le Denmat de Kervern fait appel à la Garde Nationale, qui a auparavant fusionné avec le petit groupe des « jeunes patriotes », et les principaux meneurs de l'émeute sont enfermés au château du Taureau.
La proclamation de la nouvelle Constitution a lieu le 9 octobre 1791. Elle prévoit le maintien du suffrage censitaire et organise la prise de pouvoir politique et administrative de la bourgeoisie. Le 10 octobre 1791, la Garde Nationale morlaisienne doit intervenir pour mater une nouvelle émeute des anciens ouvriers de la manufacture, qui essaient de prendre d'assaut le bâtiment du District.
Le renchérissement des grains est une des causes de ces émeutes. Le 28 novembre 1791, la municipalité interdit tout embarquement de vivres. Et le 8 décembre, elle avertit le Directoire du Finistère de l'existence d'un trafic clandestin des grains ayant pour but de créer une disette des produits de première nécessité pouvant amener de nouveaux troubles. Le Département ne peut agir à cause de la liberté du commerce du grain. Morlaix est pourtant au bord de la pénurie et la pauvreté atteint le seuil critique.
Un rapport transmis par Jean Diot le 7 mai 1792 fait état, sur une population de 10 029 habitants, de 4607 d'indigents ayant besoin d'assistance (près de la moitié de la population!), de 1416 enfants de pauvres, de 579 vieillards ou infirmes hors d'état de travailler, de 500 pauvres malades et de 200 mendiants ou vagabonds. Jean Diot ajoute dans son document quelques propositions: « Il y aurait moyen d'établir à Morlaix diverses maisons de travail productives où l'on pourrait recueillir nombre de pauvres ouvriers tels que les tisserands, les fileuses. L'atelier de travail de l'hôpital de charité (créé en 1790) pourrait employer un plus grand nombre de pauvres s'il y avait des fonds pour acheter des matières premières. La demoiselle Kerallo emploie dans un atelier de charité pour une filature environ trente pauvres femmes et filles. Il faudrait à Morlaix une avance d'environ 50000 livres avec lesquelles on occuperait au travail les gens pauvres et oisifs dont la ville fourmille ». Le maire Jean Diot, après avoir annoncé à la Supérieure des Ursulines qu'elle ne peut enseigner à des filles de moins de quatorze ans, puisqu'elle n'a pas prêté serment, démissionne, fragilisé par sa tentative de dissolution de la très jacobine et anti-cléricale « Société des amis de la Constitution ».
Morlaix gérée par les « démocrates » ou républicains avancés.
Jean-Marie Baudier, chirurgien de profession et nouveau maire succédant à Jean Diot, applique les décisions nationales de suppression des congrégations à partir d'août 1792. En août toujours, avec des centaines de patriotes morlaisiens, il vient mater une révolte à Scrignac. En septembre 1792, une liste des suspects à interpeller est établi par François Andrieux, l'ancien chef des « jeunes patriotes » de 1789 et le nouveau Procureur de la commune. 49 femmes et 26 hommes dont Mathieu Beaumont (juge, banquier, et négociant, traitant avec les nobles émigrés, le père de Charles Beaumont, futur maire de la ville sous l'empire et la restauration, à qui l'on doit les travaux qui donnèrent naissance au Cours Beaumont, sur la rive Trégor du Port) Joseph Moreau (le père du général Moreau, notaire travaillant pour des nobles émigrés), sont arrêtés avec l'accord du conseil municipal, taxés d'incivisme et d'intelligence avec les Émigrés contre-révolutionnaires. Les femmes sont enfermées au Calvaire et les hommes dans une maison située quai de Léon. Cette rafle fait peur aux notables et personne n'ose s'insurger contre elle publiquement, craignant de connaître le même sort. Le 18 septembre 1792, la municipalité ferme la Chambre de Littérature et de Politique.
Le 21 septembre 1792 se tient la première séance de Convention Nationale proclamant l'abolition de la royauté et l'établissement de la République.
« Après ce bouleversement, écrit Bruno Baron, les bourgeois morlaisiens adhèrent aux doctrines révolutionnaires, ou demeurent monarchiens ou constitutionnels comme Pierre-Louis Mazurie de Pennanech (ex-député de Morlaix aux Etats Généraux en mai 1789) qui va, bien malgré lui, être propulsé sur le devant de la scène politique morlaisienne. En effet, le 2 octobre au soir, deux gendarmes de la Garde Nationale se rendent à son domicile et l'arrêtent pour avoir tenu une assemblée de citoyens actifs dans la cour du couvent de Saint-Dominique afin de rédiger une pétition demandant la liberté des personnes détenues depuis le 12 septembre, ou, en cas de culpabilité, leur transfert devant une autorité compétente. Pierre-Louis Mazurie de Pennanech est enfermé au château du Taureau. Le maire, François Andrieux, accablent l'ex-député dans une lettre envoyée au Directoire.
Le 24 octobre 1792, le conseil municipal annonce aux religieuses du Carmel, du Calvaire et des Ursulines qu'elles doivent quitter leurs bâtiments respectifs pour le 29 du mois. Le Carmel est transformé en prison et les Ursulines deviennent « l'hôpital militaire du Bel-Air ».
Le retour aux affaires d'une équipe municipale modérée, confrontée à la disette, à la guerre avec l'Angleterre et à la révolte paysanne dans le Léon.
Le Directoire du Finistère décide de gracier les détenus maintenus pour cause d'incivisme et de parenté avec les Emigrés. Jean-Marie Baudier n'est pas réélu comme maire aux élections municipales du 10 décembre 1792. C'est François Postic qui occupera désormais la fonction et tous les anciens membres du Conseil Municipal démocrate et révolutionnaire de Morlaix sont remplacés: on voit ainsi revenir des notables arrêtés 3 mois plus tôt, le 12 septembre, comme Jean Le Noan ou Joseph Moreau. François Andrieux, le procureur, est lui aussi évincé.
La nouvelle municipalité doit gérer à nouveau le grave problème des subsistances. Le 16 janvier, on apprend que le grenier public abritant des réserves de grains est vide. La famine menace la ville. Heureusement, les communes voisines de Guimaëc, Plouegat-Guerrand, Lanmeur, Plougasnou, Plouézoch, Garlan, Plouigneau, Taulé, Henvic, Carantec, Pleyber-Christ, Saint-Thégonnec, Plounéour Ménez (...etc.) décident d'approvisionner Morlaix.
Le 21 janvier 1793, Louis XIV est guillotiné. Les puissances européennes se dressent contre la France. Le ministère de la marine ordonne aux autorités de la région de Morlaix de « mettre embargo sur tous les navires anglais, prussiens, autrichiens et russes » et d' »interdire la sortie des ports de la République par tous les moyens » à ces navires. Le 7 février, le District demande au maire de prendre des mesures exceptionnelles pour protéger la baie par peur d'une attaque anglaise. Le mort est désormais presque interdit à la circulation, ce qui supprime la première ressource de Morlaix. Le 26 février arrive un deuxième ordre d'embargo touchant les navires espagnols et ceux des villes hanséatiques. Cela signifie la destruction du trafic international et la chute libre de l'économie locale.
Le 2 mars 1793, le maire lance un nouvel appel pour contrer la disette.
Le 14 mars, 20 volontaires morlaisiens partent rejoindre les troupes françaises. Dans la journée du 16, trois vaisseaux anglais tentent de s'emparer du château du Taureau mais un corsaire les met en fuite.
Le 19 mars, les canonniers de la Garde Nationale se rendent à Saint-Pol-de-Léon pour lutter contre une violente émeute paysanne où plusieurs personnes perdent la vie. Saint-Pol de Léon est assiégée par des paysans de Plouescat, Plougoulm, Cléder, Sibiril, Plouvorn, Saint-Vougay. Une colonne républicaine réussit à les repousser. Mais les insurgés tentent de s'emparer de Lesneven. Le général Canclaux les y attend. Les insurgés veulent couper les communications des républicains croyant Canclaux à Ploudalmézeau et détruisent le pont de Kerguidu. Les 400 hommes de la garnison de Saint-Pol de Léon comprenant des volontaires du Calvados et des 60 gardes nationaux de Morlaix marchent sur Kerguidu pour réparer le pont. Le 24 mars au matin, ils subissent et repoussent des attaques de plusieurs milliers paysans insurgés (3000?) à Plougoulm sur les collines auprès de la vallée du Guillec. Canclaux, avec entre 300 et 1000 hommes, vient à leur secours. La bataille, faite d'escarmouches, dure jusqu'en fin d'après-midi. Les insurgés perdirent entre 120 et 250 hommes à cette bataille de Kerguidu, en Plougoulm, tandis que les forces républicaines, en raison sans doute de la faiblesse de l'armement des rebelles, n'eurent pas de pertes. Les communes rebelles furent désarmés, mises à l'amende, et l'insurrection dans le Léon prit fin après cette bataille de Kerguidu qui annonce les guerres de la Chouannerie.
Pour maintenir l'ordre au sein du pays, on met en place des « comités de surveillance révolutionnaires » et une loi du 25 mars 1793 crée le « comité de sûreté générale » composé de 25 membres, dont Robespierre et Danton.
Sur le plan local, la nourriture continue à manquer. La ville fait face à une augmentation du nombre de malades, doit fournir la subsistance à de nouvelles forces militaires et subvenir aux besoins des femmes et enfants de ceux qui se sont engagés dans les armées républicaines. Pendant les mois de mai et juin 1793, la vie municipale s'organise autour de l'absence de vivres et de la participation aux conflits. Morlaix envoie des munitions et 25 hommes pour défendre Rennes contre les forces de la chouannerie.
Le 20 juillet, on organise une souscription pour acheter une partie de la cargaison d'un navire chargé de grains qui doit arriver au port et le 10 août, le conseil municipal veille au bon déroulement de la première « Fête de l'Unité et de l'Indivisibilité de la République ».
La loi sur les suspects, l'affrontement Montagne-Gironde et le début de la terreur
Le Procureur de la commune, Claude Guillaume-Durivage avertit les citoyens le 15 septembre 1793 que toutes les armoiries qui se trouvent sur les maisons doivent être détruites.
La Convention, écrit Bruno Baron, « promulgue la loi dite « des suspects » pour se protéger des sympathisants de l'Ancien Régime. De ce jour, les comités de surveillance révolutionnaires obtiennent « le pouvoir de faire arrêter, même sur simple dénonciation anonyme, tout citoyen qui ne pouvait présenter un certificat de civisme ou que la rumeur qualifiait de suspect ». Sont classés dans dans cette catégorie: « les partisans de la tyrannie et du fédéralisme, les ennemis de la liberté, les parents d'émigrés, les émigrés rentrés en France et toute personne à qui le certificat de civisme avait été refusé ».
L'installation de l'ordre nouveau et la laïcisation de la société prennent forme aussi dans les symboles: le 31 juillet 1793, la mairie de Morlaix récupère les registres des églises contenant mariages, naissances, décès. Les noms de rues et de places qui rappellent la religion ou l'Ancien Régime sont modifiés: la rue des Nobles (haut de l'actuelle place Allende, aujourd'hui rue du Mur) est rebaptisée « rue de l'Egalité », la venelle aux prêtres « rue de la rampe », la section Saint-Mathieu devient « section des Halles », la section Saint-Martin, « section de la Roche », la section Saint Melaine, « section de la Maison Commune ».
Face à toutes ces nouveautés, et en particulier face à la domination tatillonne de l'administration et des villes, à la misère qui s'installe et aux mesures prises contre les prêtres réfractaires qui vident les paroisses de leurs recteurs, les paysans du Léon prennent les armes, menés par d'anciens nobles. Alertée, l'administration du district garnit les abords de la ville de canons et envoie une délégation aux communes rebelles. Finalement, la Garde Nationale marche le 7 octobre sur la rébellion, dont les acteurs se dispersent sans combattre.
A la convention, les relations entre Girondins et Montagnards sont au conflit ouvert. Le Directoire du Finistère soutient le camp des Girondins, voyant d'un mauvais œil les interventions de plus en plus fréquentes des sans-culottes à la Convention. Dès septembre 1792, le Directoire arrête le représentant en mission de la montagne, Royou, dit « Guermeur », un ami de Marat. Celui-ci est enfermé au château du Taureau, mais sous pression des Montagnards, la Convention ne tarde pas à l'en faire sortir. La Montagne se souviendra de cette attitude des représentants du Finistère, qui le 15 décembre 1792 attaquent directement les chefs de la Montagne : «... Marat, Robespierre, Danton et leurs collègues... Ces hommes ont le titre de vos collègues, mais ils sont indignes de l'être. Vous n'avez rien de commun avec ces scélérats... Chassez-les donc. Éloignez-les au plus tôt, repoussez-les lors des délibérations... ». Le Finistère propose à la Convention une garde bretonne pour la « protéger » des sans-culottes des faubourgs : des centaines de « fédérés » brestois arrivent ainsi à Paris en janvier 1793.
Le 21 janvier 1793, la décapitation de Louis XVI change le rapport de force : 3 députés du Finistère sur 9 seulement ont voté la mort de Louis XVI (Gomaire, député de la convention et vicaire d'Expilly qui a pris sa place à l'Assemblée, vote le bannissement), les Girondins ont été mis en minorité. Le déclenchement de l'insurrection de Vendée en mars 1793 pousse à la radicalisation, dénonce comme traîtres à la Révolution en danger les tièdes et les modérés...
Jeanne L'herron raconte cet épisode tragique de la révolution dans notre département : « L'élimination des Girondins de l'Assemblée et l'arrestation de 27 d'entre eux le 2 juin 1793 amènent les représentants du Finistère à se révolter ouvertement. A l'initiative du Finistère, les représentants des cinq départements bretons réunis à Rennes décident de fédérer autour d'eux treize autres départements de l'Ouest «afin de former une représentation nationale provisoire si la dissolution de la Convention était rendue inévitable ». Le pas est franchi. La guerre est ouverte. Un comité central est formé qui a pour but de lever des troupes contre la « répression des anarchistes »... Les fédérés des départements de l'Ouest doivent rejoindre la troupe des fédérés de Caen afin de marcher sur la capitale « non pour combattre les Parisiens mais les délivrer de l'oppression de leurs tyrans ». En fait, la la grande aventure des fédérés se termine à Pacy-sur-Eure, que l'on peut à peine qualifier de bataille, où les Bretons se laissent surprendre par les maigres troupes de la Convention le 13 juillet 1793. La répression va suivre et s'exercer d'une manière impitoyable contre les administrateurs du Finistère soupçonnés d'avoir été le moteur du fédéralisme ».
A la Convention, les montagnards décident de transférer de Quimper à Landerneau le chef lieu de département et le 19 juillet, 18 administrateurs finistériens sont décrétés avoir «tenté d'usurper l'autorité du souverain en se rendant coupables d'entreprises contre-révolutionnaires ». L'évêque constitutionnel et ex-député Expilly est du nombre.
Le 12 octobre 1793, Alexandre Expilly est arrêté avec Yves-Joseph Denmat de Kervern, notable morlaisien. Ils sont enfermés à Saint-Pol-de-Léon. Une autre série d'arrestations est déclenchée le 17 brumaire an II (7 novembre 1793) et frappe plusieurs notabilités morlaisiennes, dont Pierre-Louis Mazurie de Penannech, le député des États Généraux, et François Barazer-Lannurien, le procureur de la commune. Jean-Marie Beaumont, à qui l'on reproche d'avoir protégé des prêtres réfractaires et des nobles, est lui aussi arrêté.
Les Montagnards qui composent le Comité de Surveillance, épurent la ville en se servant de la « loi des suspects ». Ces arrestations ébranlent Morlaix mais la municipalité, extrêmement prudente et apeurée sans doute, n'y fait aucune allusion lors de ses délibérations.
Le 7 novembre 1793, un décret substitue à la religion catholique un culte civique qui devient le 10 novembre le « Culte de la Raison ». La collégiale de Notre-Dame du Mur est transformée en temple laïque, puis deviendra « Temple des Lois et de la Raison » le 23 février 1794 (l'église, vendue ensuite comme bien national, sera amputée d'une partie de ses bâtiments et son clocher, encore plus haut que celui du Kreisker à Saint-Pol de Léon, s'écroulera le 28 mars 1806, fragilisé par ces transformations...).
Bruno Baron souligne que « le plus grand centre d'intérêt demeure le problème économique... Le Conseil Général de la commune fixe le salaire d'une journée de travail pour un ouvrier et le prix maximal pour la mouture de grain ». On commence à abandonner les sacro-saints principes du libéralisme économique. Morlaix donne donner des chevaux pour l'armée, les contributions pèsent lourds sur les habitants en période de crise et la ville, suite à une pétition, décide d'en prendre une partie à sa charge. La municipalité s'intéresse de plus à la question sociale. Elle a désormais la charge de l'hôpital, même si la gestion est toujours assurée par d'anciennes religieuses, les Filles de Saint-Thomas. Jeanne L'herron rappelle dans son livre consacré à Alexandre d'Expilly que le nouvel hôpital de Morlaix, édifié en 1737 à l'emplacement actuel de l'hôpital (partie basse), était présidé par l'évêque de Tréguier et sa bonne marche était assurée par des religieuses, les Dames de St Thomas de Villeneuve. L'hôpital n'était pas seulement un lieu de soins : on y trouve côte à côte « des vagabonds, des mendiants, des filles perdues, des enfants trouvés et enfin des malades... (Henri Stofft et Jean Segalen, Bouëtard, médecin, philosophe, franc-maçon, et jacobin) ». Sous l'ancien régime, l'hôpital reçoit des taxes des navires qui mouillent à Morlaix et fournit en échange un jeune mousse pour dix hommes d'équipage. En 1793, ajoute Bruno Baron, « les conseillers municipaux et notables de Morlaix décident de placer à la tête de l'hôpital six citoyens choisis sur une liste établie par la Société populaire, organisation regroupant des personnes qui se disent favorables au régime, espérant ainsi jouir d'une certaine tranquillité. Elle compte environ 200 membres, parmi lesquels on retrouve, sous la présidence d'Armand Dubernad, Jean-Baptiste Beau, Joseph Boutet, Jean-Jacques Bouetard de la Touche, Jean-Marie Baudier, le secrétariat étant assuré par Pierre Diot.
Mais, bientôt, plusieurs membres de cette Société Populaire sont arrêtés, et le maire aussi, François Postic,remplacé par Michel Gilbert. Michel Gilbert est tailleur de pierre, sa nomination correspond aussi à une évolution sociologique de la représentation communale. « Pour la première fois, les rênes de la ville échappent à la haute bourgeoisie », constate Bruno Baron. Sur l'équipe municipale resserrée de 13 membres, on trouve un cordonnier, un ferblantier, un perruquier, un taillandier et plusieurs négociants.
En janvier 1794, on saisit tous les objets de luxe des couvents et des églises et chapelles. L'argenterie est déposée à la maison commune et brisée par des orfèvres afin de mettre ce trésor à disposition de la République. Les biens des prêtres déportés sont également saisis. En février, le maire demande à expulser les sœurs responsables de la maison de charité et que l'on confie ce service à l'hôpital militaire situé dans l'ancien couvent des Ursulines.
La politique de déchristianisation est violente. Voilà ce qu'on peut lire sur le site infoBretagne.com au sujet de la terreur et de la politique anti-religieuse à Morlaix :
« Le 1er Nivôse an II (21 Décembre 1793), les cloches sont descendues de leurs tours et expédiées à Brest pour être fondues. Le 25 (14 Janvier 1794), ordre est donné de détruire les signes de féodalité et de royauté qui se trouvent dans les églises, et de faire disparaître de l’extérieur toutes les statues qui y sont placées. En Janvier et Février 1794, on enlève les grillages des églises supprimées, les croix et les images des Saints, et on interdit au curé constitutionnel de se livrer à quelque manifestation ostensible du culte. Le 14 Germinal (3 Avril), on interdit les sonneries de l'Angeluset de l'Agonie. Le 10 Floréal (29 Avril), le citoyen Derrien est convié à déguerpir de l’église de Saint-Martin, où il avait cherché asile, cette église devant servir désormais d’hôpital militaire. Le 16, on expédie à la Monnaiel’argenterie des églises de Morlaix.« A la date du 9 Thermidor (26 Juillet 1794), écrit M. Le Guennec, toutes les églises de Morlaix étaient désaffectées, sauf peut-être Saint-Mathieu, dernier abri du citoyen Derrien. Les Jacobins et les Capucins étaient transformés en casernes ; Saint-Melaine et le Calvaire en magasins, Saint-Martin et les Ursulines en hôpitaux, les Carmélites en prison ; le Mur, après avoir servi de Temple de la Raison, puis de Temple de l'Etre suprême, était abandonné et dans le plus grand délabrement. Partout, on avait décapité ou renversé les statues, objets de la vénération de nos ancêtres, brisé à coups de marteaux et de pierres les brillantes verrières armoriées, fouillé les tombeaux et troublé la cendre des morts pour arracher aux châsses leur enveloppe de plomb.Les tours, veuves de leurs cloches, demeuraient muettes. Plus d’enterrements religieux, de sermons, de processions ; à peine une courte messe basse hâtivement récitée, dans un coin d’église dévastée, par un prêtre jureur, et troublée souvent par de grossières incartades comme celle de cet officier qui monta certain jour dans la chaire du Mur pour entonner devant la foule indignée une chanson révoltante.Cependant, de vaillants confesseurs de la foi, bravant la prison et la mort, étaient demeurés cachés à Morlaix, et à travers mille périls, continuaient à exercer le ministère sacré, célébrant la messe dans les greniers, bénissant les mariages, baptisant les enfants, administrant les mourants. Dans la rue des Bouchers, paraît-il, la messe était dite régulièrement chaque dimanche, en une salle à la porte de laquelle veillait une bande résolue de solides bouchers, leur redoutable couteau à la ceinture. Les espions du District et de la municipalité les tenaient bien au courant, mais ceux-ci, malgré les arrêtés sanguinaires des représentants du peuple, répugnaient à pourchasser les prêtres, et ne s’y décidaient qu’à leur corps défendant. Un seul des ecclésiastiques cachés fut arrêté, c’était un capucin, le P. Joseph de Roscoff, que le tribunal révolutionnaire de Brest envoya à l’échafaud.Note : L’abbé Augustin Clec'h, prêtre de Plestin-les-Grèves, fut arrêté à Morlaix le 20 Juin 1794, et guillotiné à Brest le 1er Juillet suivant, avec Anne Le Prince et Anastasie Le Blanc, ses receleuses.
Le P. Noirot, ancien procureur des Jacobins, fut plus heureux. Il se trouvait chez une vieille dame, lorsque des officiers municipaux se présentèrent pour effectuer dans la maison une visite domiciliaire. Ils, allaient pénétrer dans la chambre où étaient le P. Noirot et la dame lorsque celle-ci eut une inspiration subite. Elle fit asseoir le moine, petit et maigre, sur un fauteuil, se plaça elle-même sur ses genoux, jeta autour d’eux un ample manteau, et reçut tranquillement les commissaires en s’excusant de ne pouvoir quitter son fauteuil à cause de son état de santé. Sans concevoir aucun soupçon, ceux-ci fouillèrent les appartements, puis se retirèrent bredouille »(Le Guennec).
Dans un hiver 1794 où la disette menace, Michel Gilbert se plie à toutes les mesures gouvernementales et dénonce des religieuses ayant refusé de prêter serment au Comité de Surveillance Révolutionnaire. Bruno Baron raconte que « le 29 ventôse, un groupe de citoyennes se rend au siège du district pour insulter ses membres. L'identité de ces femmes est bien entendu communiquée immédiatement au maire pour qu'il prenne des sanctions ». Le maire entend même faire un inventaire des biens à saisir appartenant à des émigrés de la ville mais son conseil municipal refuse, en précisant que seul le Directoire du District a la possibilité de remplir cette tâche.
Le 5 avril 1794 (29 germinal), Danton est conduit à la guillotine. Robespierre est pour quelques semaines le seul maître à bord. En avril toujours, le « procès » des dix-huit anciens administrateurs du Finistère a lieu à Brest, conduit par le Tribunal Révolutionnaire. Jeanne L'herron raconte que « le 19 mai 1794 (30 floréal), toute la garnison de Brest est sous les armes. Dès 6 heures du matin, 4000 hommes de troupe sont échelonnés le long des rues que les accusés doivent se rendre au Château à l'ancienne chapelle de la Marine devenue « temple de la Concorde », et sur la façade de laquelle on peut lire : « Justice du peuple ». 800 hommes sont chargés de l'escorte et de la surveillance des accusés le long du trajet ». Deux jours plus tard, le verdict tombe : les accusés, dont Alexandre Expilly, l'évêque bleu, amateur de Voltaire et de progrès social, sont condamnés à mort, accusés d' « être auteurs ou complices d'une conspiration contre la liberté du peuple français tendant à rompre l'unité et l'indivisibilité de la République ». Cheveux coupés, mains liés derrière le dos, ils sont envoyés en charrette à l'échafaud comme tant d'autres avant eux, lequel se situe sur la place du château rebaptisée « place du triomphe du peuple ». Autre histoire tragique typique de la Terreur, le père de Victor Moreauest lui aussi décapité à Brest à la même période, accusé de faire affaire avec les émigrés en tant qu'homme de loi, alors que son fils, général de l'armée du Nord, aligne les victoires en Hollande. Au printemps et à l'été 1794, bien d'autres morlaisiens ont été guillotinés : des habitants qui cachaient des objets du culte chez eux ou qui donnaient refuge à des prêtres réfractaires notamment.
La fin de la Montagne et de la Terreur: la situation sociale et économique à Morlaix reste difficile.
Robespierre est guillotiné le 10 Thermidor an II (28 juillet 1794). Dans le Finistère, le tribunal révolutionnaire cesse de fonctionner le 11 août 1794. Les portes des prisons s'ouvrent à des prisonniers politiques : Pierre-Louis Mazurie de Penannech, Jean-François Barazer-Lannurien, Mathieu Beaumont, Pierre Barrere et autres notables morlaisiens qui se retrouvent libres avec tous leurs droits de citoyens après un an d'incarcération.
La situation alimentaire dans la ville est toujours critique. Le conseil général de la commune, après requête auprès du Département, obtient 1580 quintaux de blé mais on s'aperçoit que c'est un vieux blé risquant de provoquer des maladies. Qu'importe, nécessité faisant loi, on le déclare apte à la consommation...
Cambry, qui n'est pas forcément un observateur impartial note dans son recueil d'observations « Voyage dans le Finistère » : « Les négociants persécutés par le régime de la Terreur, ruinés par les réquisitions, arrêtés par l'incertitude du moment, n'osent plus rien entreprendre, ils attendent des lois stables et des bases inébranlables sur lesquelles ils puissent bâtir. »Il ajoute : « Les mœurs des Morlaisiens sont doux ils ont eu en général moins de vivacité d'esprit que de conduite et de raison pendant les accès les plus brûlants de la fièvre anarchique. La société populaire n'a pas porté les premiers coups, elle agissait avec circonspection dans les moments d'incertitude. Aucune atrocité n'a souillé cette commune, elle n'a pas versé le sang humain ».
En octobre 1794, le conseil municipal du maire Michel Gilbert, qui reste en poste un certain temps malgré sa fidélité vis à vis de la politique montagnarde, établit des règles de distribution du blé : le blé ne sera remis que sur présentation de billets de subsistance. La force armée assurera la protection des grains pour éviter les désordres créés par chaque nouvel arrivage. C'est dire si le nombre d'indigents et d'affamés à Morlaix est nombreux... Le 14 novembre 1794, le maire demande à la Garde Nationale de distribuer la viande et de la surveiller sous la halle durant la nuit. De nombreuses plaintes, déposées au bureau municipal, prouvent qu'à cette époque, le marché noir se porte bien.
Le 1er Frumaire an III (décembre 1794), Michel Gilbert démissionne, sentant sans doute qu'il n'est plus en odeur de sainteté depuis la chute de Robespierre et il est remplacé comme maire par Jean Diotqui retrouve son ancien siège. La ville est entièrement menacée par la famine. Bruno Baron souligne : « Jean Diot essaie de trouver des solutions originales. Il écrit tout d'abord directement à la Convention Nationale pour lui demander d'intervenir immédiatement. Mais celle-ci est impuissante. Le 24 nivôse an III, le maire sollicite pour les ouvriers du tabac une augmentation égale à la moitié de leur salaire, espérant ainsi relever le pouvoir d'achat de la population. Puis la municipalité met en place un bureau pour la vérification des assignats, permettant de lutter contre la mise en circulation des faux documents ».
Jean Diot publie le 24 février 1795 un arrêté ordonnant « la prompte mise en liberté de toutes les personnes arrêtées et détenues comme suspectes par mesure de sûreté générale ». Mais il restait fort peu de prisonniers. Tout le monde ne bénéficie pas de la même indulgence. Les membres actifs du Comité de Surveillance Révolutionnaire de l'an II réclament le 28 avril 1795 un passeport leur permettant de quitter l'arrondissement, craignant des représailles. Les passeports sont refusés. « Le 4 mai 1795, Jean Diot avertit la Convention que l'arbre de la liberté a été frappé de plusieurs coups de sabre, qu'il soupçonne « des partisans du système de sang de l'infâme Robespierre », qu'il a procédé à l'arrestation des membres de l'ex-comité révolutionnaire » (Bruno Baron, p.73). Épuisé par l'exercice de ses fonctions, Jean Diot réclame que le conseil municipal soit remplacé car, dit-il, « nous avons beaucoup de travail et nous ne pouvons plus nous occuper de nos propres affaires … Nous ne pouvons plus continuer nos fonctions, nous sommes épuisés ».
Le 20 mai 1795, le nouveau maire (nommé sur proposition de Jean Diot) de Morlaix est Théodore Gratien. A ses côtés, que des notables : la haute bourgeoisie reprend le pouvoir. Le 27 mai 1795, Le Bozec, agent national, informe Théodore Gratien que les mesures nécessaires contre les partisans de Robespierre n'ont pas été appliquées. Deux jours plus tard, le maire reçoit l'ordre du Directoire du District de désarmer les hommes « connus pour avoir participé aux horreurs commises sous la tyrannie qui a précédé le 9 Thermidor ». « Le conseil, note Bruno Baron, refuse d'agir tant qu'il ne possède pas des preuves écrites de la culpabilité de certains citoyens » (p.74).
La chute de Robespierre marqua un temps d’arrêt à la persécution religieuse, mais ce n'était que provisoire. Vers la fin d'Avril 1795, une chrétienne de Morlaix afferma l’église de Saint-Mathieu, et ne cacha pas son dessein d’y ouvrir le culte public par des prêtres insermentés. A la même époque, trois prêtres fidèles, Lannurien, Savidan et Sannier, se présentèrent à la mairie, et les deux derniers déclarèrent qu’ils exerçaient en ville les fonctions du culte privé. Mais un décret du 7 Vendémiaire an IV (28 Septembre 1795), demanda aux ecclésiastiques de reconnaître par serment la souveraineté de l’universalité des citoyens français, et de promettre soumission aux lois de la République. Refusant ce serment, les prêtres insermentés de Morlaix durent de nouveau se cacher, pour éviter la peine de la déportation, prévue par un décret du 4 Brumaire (26 Octobre). Fin octobre, suite à un arrêté des représentants du peuple, on communique à Théodore Gratien la liste des prêtres à interpeller : les abbés Forestier, Savidan, Mathezou, Le Corre et Penn. On ne trouve aucun de ces prêtres. L’abbé Derrien et ses vicaires Cotty et Frout firent seuls le serment exigé par la loi.
Le 4 octobre 1795 (12 Vendémiaire), un groupe de conjurés royalistes attaque la Convention, mais l'insurrection est matée le lendemain par Bonaparte, sous les ordres de Barras. Suite à cela, les représentants du peuple Jean Bon Saint-André, Guezno, Guermeur, déclarent le Finistère en état de siègent craignant une intrusion des royalistes : le débarquement de Quiberon est resté dans les mémoires. Un peu partout des groupes se forment pour parer au péril royaliste. Dans les rues de Morlaix, on placarde la nuit du 6 au 7 octobre une affiche disant :
« Les citoyens Moreau, Barrere, Briand, De Valencour, Duplessix-Pegasse, Penannec'h, Prigent, Robinet et l'abbé Rouchon préviennent tous les habitants de Morlaix qu'ils sont décidés à ne plus faire les aristocrates attendu les circonstances actuelles, et qu'ils jurent de ne plus paraître en public comme royalistes, qu'au contraire ils seront désormais des terroristes forcenés et qu'ils ne fréquenteront plus les Diot, Dubernad, Boutin, Gratien, Huon, Boucault, Homon Neveu, Hyenne, Duplessix-Roquelin, et par même le banquier de Charrette, ni aucun chouan prêtre ». Les auteurs de cette annonce accusent une série de notables d'être ou d'être devenus clairement contre-révolutionnaires. Il n'y aura pas de réponse à ce placard qui sent le désir de régler des comptes, d'ailleurs partagé des deux côtés.
Le 26 octobre 1795, la Convention Nationale se sépare et laisse place au gouvernement établi par la Constitution de l'an III : le Directoire. L'organisation du découpage administratif et des pouvoirs publics est revue. Morlaix n'a plus un maire mais un président d'administration municipale. Il s'agit du docteur Jean-Jacques Bouestard de la Touche.
Ses fonctions restent essentiellement d'approvisionner la troupe (le 14 janvier 1796, Morlaix doit lui fournir 100 bœufs), de la loger (à l'été 1796, 10 000 soldats stationnent sur la commune), d'organiser l'approvisionnement de la ville vaille que vaille. La répression contre les prêtres réfractaires se poursuit. On crée une école primaire publique à Morlaix. L'hospice civil, qui doit donner une partie de ses ressources aux militaires, se voit « contraint » de chasser les indigents n'étant pas originaires de Morlaix mais des communes rurales alentour.
Jean-Jacques Bouëstard de la Touche démissionne de ses fonctions le 1er février 1797, épuisé lui aussi par la difficulté de la tâche et retourne à ses fonctions premières : il vient d'être nommé médecin titulaire de l'hôpital militaire. Denis Duquesne le remplace pour son second mandat. Bruno Baron atteste que c'est un bon maire : « Lors de son premier passage à la tête de la ville, Denis Duquesne avait laissé l'image d'un homme dévoué à ses concitoyens. Son second mandat ne trahit pas cette réputation. Le Président-maire veille sur le commerce, cherche des solutions pour apporter de l'aide aux plus défavorisés et prend de nombreuses mesures sociales. Il décide par exemple, le 9 fructidor an V (26 août 1797), d'accorder le quart des recettes des spectacles se tenant sur la commune aux veuves des défenseurs de la patrie et à l'hospice civil ».
Au Conseil des Cinq Cent à Paris, les conservateurs reviennent en force : le Général Pichegru et le Marquis Barbe-Marbois demandent l'abolition des mesures prises contre les nobles émigrés et les prêtres réfractaires. Barras décide d'un coup d'Etat pour perpétuer l'esprit de la révolution et fait arrêter 77 députés de tendance royaliste le 4 septembre 1797 (coup d'Etat du 18 Fructidor an V).
Ces événements provoquent aussi des remous à Morlaix. Le 29 fructidor (15 septembre), jour de la loi excluant les ex-nobles de la fonction publique, les administrateurs de Morlaix écrivent « aux citoyens législateurs et aux citoyens directeurs » pour affirmer leur soutien et leur indignation. Le 17 septembre 1797, dans un climat de paranoïa, Jean-Marie Jézequel, Commissaire du pouvoir Exécutif demande aux habitants de dénoncer les étrangers et d'indiquer ceux que la population héberge.
Malgré tout, expose Bruno Baron, « sous l'impulsion de Denis Duquesne, Morlaix reprend vie. Le Président-maire redonne une vitalité aux foires et marchés. Le 11 brumaire an VI (1er novembre 1797), il informe les communes de Thégonnec, Pleyber, Plounéour-Ménez, Sizun, Guimiliau, Guiclan et Landivisiau que leurs habitants peuvent désormais revenir vendre leurs toiles tous les samedis dans les salles basses de la Maison Commune. Le 25 brumaire an VI (15 novembre 1797), le Président-Maire écrit au corps législatif pour lui demander de lever un impôt indirect au profit de la commune, finançant les grands travaux dont la ville a besoin. Il avance même l'idée d'une taxe sur les boissons rentrant dans le port ». Denis Duquesne est réélu Président-maire le 14 juin 1798 (26 prairial an VI).
Le 20 mars 1799, on inaugure le Temple de la loi. Cette manifestation draine beaucoup de monde et le public peut assister aux discours de Denis Duquesne et de Jean-Jacques Bouëstard de la Touche.
Duquesne tient un discours dans l'esprit du temps, c'est à dire hostile aux idées révolutionnaires avancées, voulant garder les acquis libéraux de 1789 dans l'ordre et le respect de la propriété : « La souveraineté nationale se perpétue dans une république quand on règle l'usage de la liberté sur le bonheur public, et que l'amour de l'égalité se referme dans des bornes que la nature et les lois ont posées. Elle se conserve encore lorsque chaque citoyen souscrit à ses devoirs au nom de la patrie. Elle s'anéantit, au contraire, non seulement quand on prend l'espoir d'égalité, mais encore quand on prend celui de l'égalité extrême et que chacun veut être l'égal de celui qu'il a choisi pour exercer le pouvoir ».
Le discours de Bouëstard de la Touche est bien plus révolutionnaire et « robespierriste » dans l'esprit : « Citoyens, la fête que nous célébrons aujourd'hui suffira pour m'autoriser à vous dire que cette enceinte est auguste, qu'elle l'est par son nom seul. C'est le temple de la loi, qui doit avoir sa religion et son culte, car la loi, source de toutes les vertus sociales, émane de l’Être suprême. Le premier, il dicta ces lois éternelles, ces principes immuables par lesquels se meut et se conserve ce vaste univers, toujours puissant et toujours revivifié. O toi, qui sous les auspices de ce moteur universel fait constamment triompher nos défenseurs de ces hordes d'esclaves qu'arment contre toi les rois impies... ».
Morlaix, 30 décembre 2013
Morlaix: de la fondation de la ville au 17e siècle. Une histoire de Morlaix, première partie
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Morlaix pendant la Révolution (I), Une histoire de Morlaix, troisième partie
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