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11 février 2024 7 11 /02 /février /2024 06:31

 

 

L’agriculture européenne et française doit nourrir près de 450 millions d’habitants de l’Union européenne et 68 millions de Français. Mais le modèle agricole actuel est en échec : il ne permet ni de garantir un revenu décent aux agriculteurs, ni d’assurer la souveraineté alimentaire de la France, ni de répondre au défi écologique !

Le constat est simple et accablant : les agriculteurs et agricultrices travaillent pour nous nourrir, mais nombre d’entre eux n’arrivent plus à vivre de leur travail ! Les revenus agricoles sont très bas, autour de 1 100 euros en moyenne nationale, mais avec des disparités très fortes en fonction des productions et des structures. 10 % des éleveurs gagnent moins de 800 euros par mois et 25 % sont sous le seuil de pauvreté. 20 % des agriculteurs ne dégagent quasiment aucun revenu. Rappelons que pour obtenir des revenus aussi faibles, leur temps de travail dépasse souvent 50 à 60 heures par semaine.

Un problème est au cœur de cette situation : les prix. Si les lois Egalim ont permis davantage de transparence sur les coûts de production, elles n’ont pas permis d’en finir avec les marges scandaleuses de l’industrie agro-alimentaire et de la grande distribution.

Dans ce contexte, il est clair que la suppression de la détaxe sur le gazole non routier, la hausse du coût de l’énergie qui touche les agriculteurs comme tous les Français et nombre de mesures de la loi de finances 2024 que nous avons combattue au Parlement, ne feront qu’aggraver la crise. Au-delà du recul du gouvernement sur le GNR, il faut annuler toutes les mesures qui rendent la vie toujours plus chère.

Hors l’enjeu des prix et des charges qui pèsent sur le monde agricole, c’est l’ensemble du modèle néolibéral, où le libre-échange règne en maître, qui affaiblit l’agriculture française et détruit l’environnement. Il est d’autant plus urgent de changer de politique que la moitié des exploitations devront être transmises d’ici 10 ans, pour cause de départs en retraite. Si rien n’est fait, elles ne trouveront pas preneur.

Les politiques de l’Union européenne ne protègent pas notre agriculture. Au contraire, elles aggravent la situation, tant par la frénésie du libre-échange que par une Politique agricole commune (PAC) qui encourage la course au gigantisme des exploitations et la spécialisation des producteurs comme des régions agricoles, sans se soucier de garantir des prix rémunérateurs aux agriculteurs, de préserver la biodiversité et de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

L’heure est à un Grenelle de l’agriculture pour construire un pacte d’avenir avec tous les agriculteurs de notre pays, en les associant directement aux grandes décisions et à la gestion de nouveaux outils d’intervention.

 

Nos 15 propositions

Nous commencerons par revenir sur l’ensemble des mesures de la loi de finances 2024 qui rendent la vie toujours plus chère : maintien de la détaxe sur le gazole non routier, suppression de la hausse des tarifs de l’énergie et des franchises médicales...

 

Garantir un travail rémunérateur et une pension digne aux agriculteurs et agricultrices

1. Instaurer des offices publics qui, production par production, seront chargés d’établir un prix plancher, soit un prix minimum versé au producteur. Mettre en place des conférences permanentes territoriales associant la profession agricole, les filières, les pouvoirs publics et la société civile qui permettront la fixation démocratique d’un prix d’objectif, couvrant les coûts de production des agriculteurs. Instaurer un coefficient multiplicateur entre prix d’achat aux producteurs et prix de vente aux consommateurs pour encadrer les marges de la grande distribution.

2. Mettre en place un régime public agricole d’assurance et de gestion des risques climatiques, sanitaires et environnementaux, géré par les acteurs de l’agriculture et l’État et non pas par le secteur assurantiel et bancaire privé.

3. Porter toutes les retraites agricoles à un minimum de 85 % du Smic dans un premier temps puis au niveau du Smic.

 

Protéger nos agriculteurs face à l’ouverture des marchés agricoles

4. Remettre en cause les traités de libre-échange et porter de nouveaux accords de coopération agricole, pour en finir avec les importations de produits alimentaires provenant de pays qui ne respectent pas les mêmes normes sanitaires et environnementales que celles exigées à nos producteurs. Convoquer également en urgence une conférence européenne sur les conséquences agricoles et alimentaires de la guerre en Ukraine.

5. Garantir la traçabilité par l’étiquetage de l’origine pour tous les produits agricoles en imposant l’obligation de la mention d’origine des produits alimentaires pour tous les produits bruts ou transformés. C’est une exigence indispensable pour défaire l’opacité qui règne dans les échanges et une demande très forte des consommateurs comme des producteurs européens, notamment vis-à-vis des productions extracommunautaires importées.

6. Activer systématiquement les clauses de sauvegarde dès qu’une production française fait face à une distorsion de concurrence en matière sanitaire ou environnementale, et exiger le respect de la réciprocité des normes pour tous les produits entrant sur le marché français.

7. Définir des calendriers d’importation pour protéger les productions françaises en fonction de leur saisonnalité et leur arrivée sur le marché face à des productions importées moins-disantes.

8. Créer une police de la sécurité alimentaire européenne dotée de vrais moyens de contrôle aux frontières, comme à l’intérieur de l’Union européenne, pour un contrôle large et réel de la qualité des produits agricoles commercialisés. Renforcer significativement, dans le même temps, les services publics nationaux de contrôle que sont la Douane et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudeurs (DGCCRF), tout particulièrement en nombre d’agents.

 

Développer l’agriculture française pour manger sain et à sa faim : objectif 500 000 agriculteurs en 2030 !

9. Doubler les fonds de la dotation d’installation des jeunes agriculteurs avec une attribution tenant compte des critères d’emploi sur l’exploitation, d’éco-conditionnalité et de durabilité avec l’objectif de permettre plus d’une installation pour un départ. Lancer un grand plan de relance de l’enseignement agricole public et de valorisation des apports de la recherche agronomique jusqu’à l’exploitation, en portant à la fois un soutien spécifique à la formation initiale mais aussi un véritable droit à la formation continue tout au long de la vie professionnelle.

10. Assurer une répartition des aides de la PAC selon d’autres critères permettant d’assurer le maintien et le développement des exploitations familiales et de petite taille : plafonnement et dégressivité des aides en soutenant prioritairement les premiers hectares et en les couplant avec les premiers volumes de production.

11. Créer un fonds alimentaire national doté de 10 milliards d’euros annuels, alimenté par l’État et par une contribution spécifique sur les revenus financiers de l’agroalimentaire, de l’agrofourniture et de la grande distribution, pour développer une restauration scolaire et collective avec des productions locales et de qualité à un prix accessible à toutes et tous.

12. Changer le rôle des banques et réorienter le crédit bancaire qui étrangle les exploitants agricoles et les pousse au surinvestissement et au productivisme, avec :

- un grand plan d’installation des jeunes agriculteurs, assorti de prêts à taux négatif sur des critères écologiques et sociaux, refinancés par la Banque centrale européenne ;

- une renégociation des dettes, jusqu’à certaines annulations, conditionnée là encore au respect de critères sociaux et écologiques ;

- une aide à la transformation agro écologique (dont la mise à niveau aux normes environnementales) avec des prêts à taux négatifs, financés par un fonds public de bonification, privilégiant le secteur mutualiste, refinancé par la BCE, sous condition d’engagements écologiques et sociaux précis, suivis en lien avec les conférences permanentes.

 

Engager vraiment la transformation agro écologique

13. Soutenir l’élevage herbager au moyen d’une aide couplée spécifique. Les prairies permanentes contribuent en effet au stockage du carbone et abritent une riche biodiversité.

14. Soutenir toutes les pratiques permettant d’améliorer la fertilité et de stocker du carbone dans les sols : polyculture-élevage ; mise en place de couverts végétaux intermédiaires ; agroforesterie…

15. Reconstruire un plan de sortie efficace des usages des pesticides de synthèse et de réduction de notre dépendance aux intrants, sur la base d’un accompagnement systématique de l’ensemble des agriculteurs (intégration des surcoûts économiques et des besoins en travail supplémentaire dans la définition des coûts de production et des prix d’achat, soutien de long terme à la déspécialisation agricole à l’échelle des exploitations comme des régions agricoles).

 

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