Après le Congrès de Tours, le tout jeune Parti communiste français (il s’appelle alors SFIC) doit se trouver un siège, la SFIO occupant le local du 37 de la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie (4e). Le 2 avril 1921, il lance un emprunt pour l’acquisition d’un bâtiment ; dès le 13 avril, l’objectif des trois cent mille francs de souscription est dépassé. Il acquiert au 120 rue La Fayette (10e) un immeuble de trois étages, avec un sous-sol et une salle de 250 places qui sera plus tard appelée la Rotonde.
Le « 120 » devient vite un lieu mythique. L’auteur dramatique Armand Salacrou, journaliste à l’Humanité, visite le 13 juillet 1921 le chantier de rénovation du local et imagine déjà la foule « qui viendra sous nos fenêtres acclamer le communisme maître du monde ». Aragon, en 1933, lui consacre un quatrain dans « Les Enfants rouges » :
« C’est rue La Fayette au 120
Qu’à l’assaut des patrons résiste
Le vaillant Parti communiste
Qui défend ton père et ton pain. »
Au lendemain du Front populaire, le Parti communiste voit son influence et ses rangs se renforcer. Aussi le 28 avril 1937, le Comité central déclare : « Notre parti, attentif à défendre le programme et à sauvegarder les conquêtes du Front populaire, doit avoir à Paris une maison qui réponde à son importance politique. » Il lance une souscription. En 5 mois elle atteint 1 255 610 francs, soit plus de 800 000 €.
Le PCF quitte en 1938 le « 120 » et s’installe dans un immeuble à la façade imposante, au Carrefour Châteaudun (9e), un immeuble qui sera couramment appelé le « 44 » par les communistes. Mais la façade est trompeuse, les pièces sont petites, le Comité central ne peut s’y réunir. Un autre immeuble est acquis au 19 rue St-Georges (9e), mais différents secteurs de travail sont dispersés dans six autres lieux, ce qui occasionne une perte de temps et d’efficacité.
Cependant, le 27 septembre 1939, le Parti communiste est dissout par décret. Et durant l’occupation, le « 44 » est occupé par la Milice française (en 1943) ; le 19 de la rue St-Georges est accaparé par la LVF (Légion des volontaires français contre le bolchévisme) dès 1941.
Le 19 août 1944, la Résistance reprend d’assaut le bâtiment ; le 24, elle repousse une attaque de l’armée allemande. Mais le premier Comité central qui suivra la libération de Paris se tiendra, le 31 août 1944, au 120 rue La Fayette (comme de nombreuses fois avant la clandestinité) compte tenu de l’exiguïté des locaux du « 44 ».
Le PCF, désormais appelé le parti des fusillés pour le lourd tribut payé dans la lutte contre le fascisme, reste considéré par ses adversaires comme un agent de Moscou. C’est pourquoi, quand en novembre 1956 l’URSS envahit la Hongrie, les fascistes, sous la protection de la police, viennent envahir et incendier le « 44 » puis attaquent le siège du journal l’Humanité. Ces agressions entrainent la mort de trois militants communistes.
Dans ces années d’après-guerre, le PCF va connaître une vague d’expansion de ses adhésions et tenir une place importante dans la politique française. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, tout comme en 1937, Maurice Thorez souhaite que le Parti se donne les meilleurs moyens pour assumer son rôle, en rassemblant tous ses secteurs de travail dans un seul et même immeuble. La décision est prise en 1966 ; c’est ainsi que le PCF va bientôt s’installer au 8 avenue Mathurin-Moreau.
Gérard Pellois
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