PORTS FRANÇAIS SACRIFIES
La Commission européenne choisit de revoir le tracé des corridors maritimes bordant le continent, en ne retenant aucun port français. Des députés communistes et la CGT montent au créneau.
Les vagues provoquées par le Brexit n’ont pas fini d’être utilisées par les instances de l’Union européenne pour libéraliser et désorganiser l’économie et l’activité des pays membres. Cette fois, la lame touche les ports français.
En effet, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), entamée le 29 mars 2017, a conduit la Commission européenne à modifier les trajets des navires marchands dans les océans et les mers qui entourent le continent. Une révision censée éviter d’isoler l’Irlande de la partie continentale de l’UE. C’est ce qu’a annoncé le 1er août dernier Violeta Bulc, la commissaire européenne aux Transports, en présentant le projet de modification du corridor du réseau central transeuropéen entre la mer du Nord et la Méditerranée. Sauf que, si de nouvelles liaisons sont ajoutées entre les ports irlandais de Dublin et Cork et les ports belges de Zeebrugge et Anvers ou encore celui de Rotterdam (Pays-Bas), aucun port français n’est prévu dans ce nouveau plan.
Une situation que dénoncent les députés communistes Jean-Paul Lecoq et Pierre Dharréville dans une lettre au Premier ministre. Relayant « la stupéfaction et l’incompréhension de la communauté maritime et portuaire nationale », les parlementaires, dont les circonscriptions comprennent notamment les ports du Havre et de Marseille-Fos-sur-Mer, rappellent l’évidence : « Il suffit de prendre une carte pour s’apercevoir que vouloir créer des corridors maritimes entre les ports irlandais et les ports belges et néerlandais en écartant nos ports nationaux constitue un non-sens. »
Un risque pour les ports français de regarder passer les navires plutôt que de les voir accoster, et ce, alors que l’efficacité y est parfois supérieure aux autres places portuaires. C’est le cas au Havre, qui traite 23 conteneurs à l’heure, contre 16 seulement pour le port de Rotterdam, pourtant automatisé en grande partie.
Les députés communistes se sont associés avec d’autres parlementaires pour saisir la commissaire européenne et lui réclamer d’intégrer les ports français au corridor, ils ont également demandé à Édouard Philippe de quelle façon une telle proposition a pu être élaborée sans que le gouvernement et la communauté portuaire n’y soient associés. En outre, comment ce dernier a-t-il pu ne pas voir que le financement des ports français par l’Europe dans le cadre des investissements prévus pour le futur réseau transeuropéen de transport (RTE-T) serait remis en cause ?
Pour Serge Coutouris, secrétaire général adjoint de la fédération CGT des ports et docks, la réponse est à chercher du côté du lobbying exercé à Bruxelles par « des places portuaires qui ont déjà bénéficié largement des aides de l’Europe ». Il y a dix ans, le port de Rotterdam bénéficiait déjà de 900 millions d’euros de fonds européens alors que les ports français devaient se partager seulement 174 millions d’euros.
Le syndicaliste pointe aussi l’inertie du gouvernement, auquel la CGT réclame la création d’un véritable ministère de la Mer, afin de « promouvoir une politique d’investissement ambitieuse et à la hauteur du statut de la France et de sa particularité géographique »
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