Le Président du Parlement européen Martin Schulz passe la main
Mercredi 14 décembre
Le Président du Parlement Martin Schulz (SPD Allemand) a dressé le bilan de ces 5 années de présidence.
La présidence du Parlement est normalement partagée entre le groupe socialiste et les chrétiens démocrates, chacun faisant un demi-mandat. Martin Schulz a réussi l’unique performance de cumuler la charge pour la seconde moitié du mandat 2009-2014 et la première du mandat 2014-2019. Longtemps il a même paru en mesure de rester à la tête de l’institution européenne pour la seconde partie du mandat 2014-2019.
Il l’a fait en jouant sur le fait que toutes les autres institutions européennes sont tenues par la droite, en travaillant sa relation de travail avec Juncker, mais surtout en devenant expert pour faire passer les accords de la grande coalition chrétiens démocrates et socialistes. Surtout quand ils n’étaient pas évidents pour les socialistes.
Cette maîtrise du Parlement et de son fonctionnement lui avait permis de faire passer en force plusieurs textes ou d’en retarder d’autres en attendant que la grande coalition s’entende.
Il a toutefois su donner une réelle visibilité au Parlement européen, notamment en mettant en avant le fait que les élections européennes devraient aussi donner la couleur du président de la Commission européenne (alors qu’il est officiellement désigné par les gouvernements européens). Il va désormais tenter une carrière politique nationale en Allemagne, tandis que les conservateurs européens peuvent récupérer la présidence du Parlement européen.
Aussi gardons de sa présidence la visibilité qu’il a donnée au Parlement. Celle-ci est d’autant plus nécessaire compte tenu des pouvoirs dont dispose cette institution face aux autres comme la Commission et le Conseil, et de l’influence grandissante mais trop méconnue qu’elle a sur nos vies.
Libéralisation totale du rail en 2020
Mercredi 14 décembre
Le Parlement adopté à une courte majorité le volet politique du « 4ème paquet ferroviaire ».
Le vote de ce mercredi marque la victoire de la Commission qui obtient son grand marché ferroviaire européen au dépend des usagers comme des employés du chemin de fer. Cette ouverture à la concurrence la Commission l’a obtenue par une suite de directives et règlements regroupés dans des « paquets » législatifs qui ont forcé progressivement l’ouverture des marchés ferroviaires nationaux.
Entre le premier paquet de 2001 puis ce dernier, 15 années se sont écoulées. D’abord ce fut le fret ouvert à la concurrence en 2007, puis les lignes internationales, et désormais les lignes nationales et locales à partir de 2020 avec ce 4ème paquet ferroviaire.
Quinze ans après, un bilan aurait pu être fait de ces ouvertures : sur le fret qui est en chute libre faute d’investissement, sur les conditions des personnels qui se détériorent, sur l’ouverture du transport international qui n’apporte aucune baisse des prix mais au contraire pousse les compagnies ferroviaires à dégager le plus de marges possible en augmentant les tarifs. Ce ne fut pas le cas et c’est désormais le pire qui s’annonce avec cette ultime libéralisation.
Deux textes votés au Parlement ce 14 décembre organisent l’arrivée de nouveaux concurrents à la SNCF sur le territoire français à partir de 2020.
Le premier sur « l’ouverture du marché des services nationaux de transport de voyageurs par chemin de fer », ouvre les marchés ferroviaires nationaux à la concurrence à partir de 2020.
À partir de cette date-là, l’État, les régions, passeront des appels d’offres de marchés publics d’une durée maximale de 10 ans pour les différentes lignes qui doivent être exploitées. Fini, les TGV, train corail et TER de la SNCF. Bientôt un opérateur italien, espagnol, allemand pourra concourir avec la SNCF pour l’obtention de ces marchés. Non seulement c’est le monopole, le savoir-faire et toute l’organisation du service public qui est remise en cause, mais c’est pour les remplacer par des concessions très courtes (10 ans ce n’est rien pour le ferroviaire), qui décourageront les investissements de longs termes nécessaires. L’exemple du RER B nous montre que ce n’est pas un autre logo sur un train qui améliore le service : c’est l’investissement.
Or cette ouverture le Parlement l’a validé d’une très courte tête, puisqu’il a rejeté notre amendement de rejet par 330 voix contre 354 et 20 abstentions. Pour ce faire c’est toute la droite et les libéraux qui se sont mobilisés contre notre groupe de la gauche unitaire européenne/gauche verte nordique, les verts et les socialistes. Le même équilibre s’est malheureusement retrouvé sur notre demande que les personnels bénéficient des mêmes droits et acquis lorsqu’ils sont transférés d’une entreprise à une autre.
Le second texte sur la « gouvernance de l’infrastructure » reprend un vieux rêve de la Commission : la séparation de la SNCF avec son réseau ferré.
Dans la logique libérale cette séparation doit permettre de faciliter l’arrivée de concurrents sur les réseaux nationaux. Mais après les tentatives catastrophique de mettre en place cette séparation qui ont amené la création de Réseau Ferré de France RFF, les États s’y sont opposés. Le mal est déjà fait : des doublons ont été créées au niveau de la SNCF et RFF et ce nouveau texte va créer une véritable muraille de Chine entre Réseau Ferré de France et la SNCF : tout sera séparé de la prise de décision jusqu’aux personnels. C’est tout le partage d’information et de connaissances, ces synergies qui font la richesse du service public qui sont mises de côté au profit de la concurrence.
Là aussi nous avions proposé de rejeter cette stricte séparation réseau-train, et certains libéraux nous ont même suivi sur notre amendement de rejet, mais cette fois-ci les socialistes ont préféré rejoindre la droite, faisant ainsi tomber cet amendement par 459 voix contre 250 et une abstention.
Avec le volet technique adopté en avril pour favoriser la circulation des trains d’autres compagnies européennes sur le réseau français la libéralisation est désormais complète.
Pour nous usagers, comme pour les cheminots les conséquences sont colossales. L’entrée d’une logique de profit et la libéralisation marque la fin du service public assuré par une compagnie publique. Peut-on imaginer une compagnie privée faire des investissements de longs termes pour entretenir l’infrastructure, la développer, et faire rouler des trains dessus dans le seul but d’assurer une desserte territoriale, même à perte ? Peut-on imaginer une entreprise privée mettre en place des logiques de péréquation pour financer les lignes les moins rentables par les plus rentables, mettre en place des tarifications spéciales, privilégier le service sur le profit ? Non. C’est bientôt la seule logique du profit qui s’imposera aux usagers comme aux cheminots.
Continuons de refuser ce modèle et montrons-nous vigilants comme usagers et citoyens, lorsque nos régions passeront les premiers appels d’offres ferroviaires.
Débat sur la situation en Pologne
Mercredi 14 décembre
Le Parlement européen a débattu une nouvelle fois des évolutions de la situation de l’État de droit en Pologne, en présence du Président de la Commission, Frans Timmermans.
Depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement ultraconservateur du PIS, la Pologne a engagé une véritable contre révolution réactionnaire et autoritaire. De nombreux journalistes des médias publics ont été remerciés, la tête des principales administrations d’État changée au profit de partisans du gouvernement, et la Cour constitutionnelle est visée par une réforme cherchant à la mettre au pas. Le gouvernement polonais a récemment émis l’idée de faire sortir le pays de la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique.
Le dialogue officiel entre le pays et les institutions européennes est totalement rompu depuis la fin juillet et le rejet par le gouvernement polonais des recommandations que lui a adressées la Commission dans le cadre du mécanisme dit d’État de droit. Celle-ci doit décider si elle enclenche la procédure qui peut amener à suspendre les droits de vote de la Pologne au Conseil européen. Elle est très réticente à le faire car elle considère que c’est une mesure beaucoup trop forte pour l’instant, seulement la situation se dégrade de jour en jour et le dialogue ne mène à rien et aucune solution à l’amiable n’est aujourd’hui envisageable.
Des actes pour Alep
Mercredi 14 décembre
Nous avons débattu de la situation critique à Alep avant le sommet européen du lendemain.
En présence du Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, et du délégué du gouvernement de la Slovaquie pour la Présidence slovaque du Conseil de l’UE, Ivan Korčok, une grande partie de l’hémicycle a dénoncé l’inaction du Conseil européen.
La nouvelle Présidente du groupe des Verts / ALE, Ska Keller, a mis les États membres devant leur contradiction en dénonçant leur double discours, lorsqu’ils dénoncent la situation syrienne mais ne font rien pour résoudre la crise humanitaire et accueillir les réfugiés dans des conditions décentes.
Mon collègue de la Gauche unitaire européenne / Gauche verte nordique, Takis Hadjigeorgiou, a dénoncé notre responsabilité commune dans cette terrible usine de la mort.
Jean-Claude Juncker a appelé à laisser les populations civiles quitter la ville en toute sécurité. Manfred Weber, député allemand et Président du groupe de droite Parti populaire européen, a également insisté sur l’urgence d’une aide humanitaire à Alep et de l’amélioration de l’accueil des réfugiés en Europe.
Jeudi 15 décembre à Bruxelles, les dirigeants des vingt-huit États membres ont exprimé leur volonté de faire entendre leur voix sur le front humanitaire et ont dénoncé la brutalité du régime syrien et de leurs alliés, la Russie et l’Iran. Le texte des conclusions ne fait aucune mention de sanctions contre la Russie, faute d'unité entre les États membres.