10 octobre 2025
5
10
/10
/octobre
/2025
04:40
À LA LECTURE DE CE TÉMOIGNAGE ON MESURE ENCORE PLUS LE SCANDALE QUE REPRÉSENTE L'ABSENCE DE CONDAMNATION D'ISRAËL PAR LES AUTORITÉS FRANÇAISES
« Je suis violemment contraint à me mettre à genoux, face contre terre » : notre journaliste raconte l'arrestation de la Flottille pour Gaza
Après l’arraisonnement de leurs bateaux dans la nuit du 1er au 2 octobre, les militants de la Global Sumud Flotilla ont été pris en otage par l’État israélien et enfermés dans la prison de Ketziot pendant quatre jours avant d’être, pour la plupart, renvoyés vers la Grèce. Notre journaliste, Émilien Urbach, était parmi eux. Il raconte.
L'Humanité, le 7 octobre 2025
Émilien Urbach, journaliste à l'Humanité et passager de la flottille Global Sumud, témoigne de sa détention au centre de Ketziot, dans le désert du Néguev où il a passé quatre jours avec d’autres militants pro-palestiniens.
Chants, banderoles, applaudissements… C’est dans une véritable explosion de fraternité que plusieurs centaines de militants solidaires de la lutte du peuple palestinien ont envahi, ce lundi 6 octobre vers 18 heures, le hall de l’aéroport d’Athènes, pour accueillir, à leur arrivée, les quelque 250 participants de la Global Sumud Flotilla.
Israël intercepte la flottille humanitaire
Nous sommes tous encore vêtus du jogging gris et T-shirt blanc qui nous a été remis quatre jours plus tôt, lorsque nous avons été enfermés au centre pénitentiaire de Ketziot, dans le désert du Néguev, après l’interception des navires de la flottille au cours de l’acte de piraterie massif organisé par l’État Israélien, dans la nuit du 1er au 2 octobre.
Des dix membres de l’équipage du Mia Mia, le voilier à bord duquel j’ai embarqué et suivi l’odyssée méditerranéenne de cette flottille inédite, rassemblant, depuis plus d’un mois, une cinquantaine de navires en route vers Gaza dans le but de briser le blocus imposé par Israël à la population de l’enclave palestinienne, seuls les sept ressortissants de pays européens ont atterri dans la capitale grecque.
Les trois Tunisiens, qui ont navigué avec nous depuis Tunis, eux, n’en faisaient pas partie. Mardi 7 octobre, au matin, une quarantaine de participants à la flottille étaient encore otages des autorités israéliennes, sans que l’on sache de quel soutien consulaire ils vont pouvoir bénéficier.
Six soldats armés nous tiennent en joue
Le 2 octobre, le soleil vient à peine de se lever quand, vers 7 heures du matin, le capitaine du Mia Mia sonne l’alerte. Nous enfilons nos gilets de sauvetage et nous nous rassemblons dans le cockpit du navire. Un énorme vaisseau militaire tourne autour du voilier.
Au haut-parleur, un soldat répète en boucle : « Stop your Engine ! Stop your Engine ! » Un bateau plus petit se rapproche, aspergeant le voilier avec un canon à eau. Nous restons calmes, les mains en l’air, jusqu’à ce qu’un bateau pneumatique nous aborde. Six soldats armés nous tiennent en joue et montent à bord pour prendre les commandes de notre embarcation jusqu’au port d’Ashdod, un trajet de quatre heures.
J’ai à peine posé un pied sur le quai qu’un homme en uniforme noir m’inflige une clé de bras. Conduit sur un site délimité par des barrières parées de bâches sombres, je suis violemment contraint à me mettre à genoux, face contre terre. Les quelque 400 militants subissent, durant quatre heures, le même sort, à quoi s’ajoutent insultes et interventions musclées dès que l’un d’entre nous ose relever le visage.
Nous sommes ensuite déplacés vers un autre endroit du port, pour être à nouveau parqués dans la même position. Greta Thunberg aussi. À la différence qu’on oblige la jeune femme à porter un drapeau Israélien et à se tenir agenouillée, durant les heures suivantes, face à celui-ci.
Les militants crient « Free Palestine ! » face au ministre israélien de la Sécurité intérieure
À un moment, le ministre israélien de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, fait une apparition. « Vous êtes des terroristes, accuse-t-il, hilare, face au parterre de militants humiliés. Vous voulez la mort des enfants juifs. »
Face à cette provocation et malgré la présence d’une vingtaine d’hommes cagoulés qui entourent le ministre d’extrême droite, les militants pacifistes prennent leur courage à deux mains et crient « Free Palestine ! » en boucle, pour couvrir son discours de haine. En réponse, les hommes en noirs fondent sur nous et lient nos mains avec des serre-câbles en plastique.
Les uns après les autres, nous sommes conduits dans un grand hall où l’on nous dévalise de tout ce que nous possédons : habits, bijoux, livres, matériel de navigation… Totalement démuni, je me retrouve face à un officier qui m’explique que je vais être emprisonné.
Les yeux bandés, tout notre équipage est placé dans un camion borgne. À l’intérieur, sièges et parois sont de métal, la climatisation réglée à la température la plus basse.
À l’arrêt pendant près de six heures, nous avons pensé mourir de froid. Nos appels à l’aide sont restés vains. Pour nous réchauffer, nous nous serrons les uns contre les autres. Le camion finira par rejoindre la prison de Ketziot le lendemain.
Deux repas en 4 jours et huit lits pour 13 à 15 personnes
Sur place, pendant quatre jours, pas un coup de téléphone possible, pas de sortie pour se dégourdir les jambes, pas de rencontre avec des avocats, deux repas sur l’ensemble de la periode et seulement huit lits disponibles, dans chaque cellule, pour treize à quinze personnes.
Quant aux médicaments, ils n’ont été donnés, à ceux qui en avaient besoin, qu’au bout de longues heures de réclamations hurlées.
De cet enfer carcéral, la majorité des solidaires embarqués en sont sortis, après quatre jours, avec comme seul soutien celui des militants qui ne les ont pas quittés des yeux depuis un mois que la Global Sumud Flotilla a pris la mer. Les participants français, en tout cas, ne peuvent que témoigner de l’abandon inexcusable de leur gouvernement et des médias de leur pays. L’Humanité était à leur côté.
Published by Section du Parti communiste du Pays de Morlaix
-
dans
INTERNATIONAL
POLITIQUE NATIONALE
commenter cet article …
commenter cet article …
/image%2F1489059%2F20230703%2Fob_d3a7c7_capture-d-ecran-2023-07-03-a-19-07.png)
/image%2F1489059%2F20251010%2Fob_c533aa_bandeaulogohumanite.jpg)
