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Maryse Montangon
Responsable commission nationale Santé et protection sociale du PCF
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Par un troisième recours à l’article 49.3 de la Constitution et le rejet d’une une nouvelle motion de censure, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 a été définitivement adopté par le Parlement, après le vote du Sénat le 17 février 2025, dans les mêmes termes que l’Assemblée nationale. Le texte sera promulgué après la décision à venir du Conseil constitutionnel, saisi par des députés le 20 février pour contrôle de la constitutionnalité de la loi.
« L’électrochoc » budgétaire voulu et attendu pour notre système de santé et de protection sociale par les organisations syndicales, les forces de gauche et les usagers n’a jamais été à l’ordre du jour de ce PLFSS 2025 !
Barnier, Bayrou : les PLFSS d’austérité se suivent… et se ressemblent
Même si quelques mesures dites phares du PLFSS présenté par le gouvernement Barnier ont été abandonnées pour l’instant (nouvelle journée de « solidarité », hausse du ticket modérateur) et si les enveloppes ONDAM (Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie) ont légèrement augmenté, passant de 2,8 % à 3,3 %, le compte n’y est pas. Il faudrait une augmentation d’au moins 5 % de l’ONDAM pour répondre à l’existant et 6 % pour l’ONDAM hospitalier selon la Fédération hospitalière de France (FHF), alors que celui-ci est proposé dans le PLFSS du gouvernement Bayrou à 3,8 %.
Si le projet de loi présenté par Michel Barnier pouvait présenter un timide début de remise en cause des exonérations de cotisations patronales pour un montant de 5 milliards d’euros sur un total de 92 milliards d’euros, le texte de François Bayrou les a réduites à 1,6 milliards d’euros. Une « taxe lapin » et la baisse du plafond des indemnités journalières en cas d’arrêt de travail sont également instituées. Les copies de Michel Barnier et François Bayrou ne sont certes pas identiques mais elles donnent la désagréable sensation que ce qui est donné d’une main est repris de l’autre avec un peu plus à chaque fois ! Aucun changement structurel de notre système de santé et de protection sociale alors que tous les voyants sont au rouge, que les scandales sanitaires éclatent au grand jour, ce qui aurait dû inciter le gouvernement Bayrou à porter des mesures beaucoup plus ambitieuses.
L’État s’arroge le droit de considérer la dette de la Sécurité sociale comme de la dette publique et donc d’en assurer la maîtrise. Mais le budget de la Sécurité sociale, ce n’est pas le budget de l’État, ce n’est pas l’argent du gouvernement. Elle a ses propres ressources, sa propre gestion, sa propre dette qui n’entre pas dans la dette remboursée par l’État.
Quand M. Bayrou permet d’augmenter le déficit de la Sécurité sociale (de 15 milliards d’euros à 24 milliards d’euros) en évitant certaines mesures d’économies, il le fait sans que cela ait le moindre impact sur le budget de l’État et sur sa responsabilité politique. Mais cela leur permettra à l’avenir de justifier des économies et des réformes, par exemple la réforme des retraites à l’issue des concertations, du système de santé, des cotisations sociales.
Retraites : financer une réforme de progrès, c’est possible !
La réforme des retraites de 2023 sera remise en chantier par une conférence avec les syndicats et le patronat qui s’est ouverte le 27 février, après la remise au gouvernement du rapport de la Cour des comptes sur l’état financier de nos régimes de retraite. Ce rapport, rendu public le 20 février, qui représente un démenti cinglant aux chiffres farfelus retenus par le Premier ministre (55 milliards d’euros de déficit) et à la « dette cachée », vient néanmoins entériner l’idée d’une nette dégradation de la situation financière des régimes de retraite.
On nous explique qu’entre autres, il ne faut pas de hausse du « coût du travail » qui pèserait sur la compétitivité et l’emploi, que la baisse de la natalité et le vieillissement de la population vont peser sur le nombre d’inactifs par rapport aux actifs (+25 % environ dans les 30 prochaines années). Mais les retraites sont financées sur les richesses produites par les actifs et le Conseil d’orientation des retraites (COR) lui-même estime l’augmentation du PIB sur la même période de l’ordre de 60 %. Une dramatisation du déficit, dont l’objectif est de forcer à faire des économies sur les prélèvements sociaux et publics et à préserver les prélèvements financiers du capital, celui-ci exigeant la ponction d’une masse de plus en plus élevée de richesses. C’est bien un bras de fer entre le capital et la société tout entière ! On comprend pourquoi le patronat, favorable à la réforme de 2023, avec une détermination infaillible, ne changera pas de position sur l’âge légal de départ à la retraite. Côté syndicats, s’il y a consensus sur un retour à 62 ans, il y a néanmoins quelques nuances et des bougés envisageables ainsi que sur l’aménagement ou l’abrogation de la réforme de 2023. Sans réelle surprise, comme à chaque discussion sur le financement du système des retraites, le patronat mais aussi le gouvernement (Gérard Darmanin, Gabriel Attal, Bruno Retailleau) recommencent à parler capitalisation pour sauver nos retraites, en d’autres termes, les exposer aux aléas des marchés financiers.
Trouver des recettes pour financer notre système de retraite par répartition, système solidaire, intergénérationnel et interprofessionnel, est bien à la portée de notre pays aujourd’hui et les leviers existent, mais voilà, il faut oser s’attaquer à l’appétit insatiable de la finance et du grand capital et son mandataire Emmanuel Macron.
Mais il ne faut pas non plus négliger le poids de leurs arguments dans la population à qui on martèle à longueur de journée qu’il n’y a pas d’argent ! Et ils comptent bien gagner cette bataille-là avant d’aller encore plus loin dans la remise à plat de notre système de protection sociale que Patrick Martin, président du MEDEF, estime « à bout de souffle ».
Pour riposter à cette offensive idéologique, ce numéro revient plus en détail sur les moyens de désintoxiquer les entreprises de la finance et de l’obsession de la baisse du « coût du travail », de les emmener sur le chemin d’une nouvelle efficacité sociale et écologique, et de créer ainsi plus d’emplois qualifiés, donc plus de richesses, base saine pour prélever les cotisations dont notre système de protection sociale a besoin.
Une gigantesque mobilisation du mouvement social est indispensable pour freiner, 80 ans après sa création, cette énième attaque de notre système de protection sociale. Nous savons bien que la privation de recettes de la Sécurité sociale est le cœur du problème et non ses dépenses, que son mode de financement par les cotisations sociales issues des richesses produites par le travail représente cette formidable avancée sociale voulue en 1945. Alors, plus que jamais, expliquons cela, défendons cette magnifique conquête et avançons nos propositions pour de nouvelles avancées permettant à chacune et à chacun, tout au long de la vie, de développer pleinement toutes ses capacités !
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