En passant par les Cévennes
Sur la Corniche des Cévennes, à mi-chemin entre Florac et Saint Jean du Gard, juste au-dessus de la petite commune de Saint Roman de Tousque, un parking sur la crête. S’offre à nous un point de vue magnifique sur la succession de chaînes et vallées Cévenoles. Une table d’orientation panoramique nous guide, et tout à côté... une stèle à la mémoire de la Résistance de la seconde guerre mondiale !
Rien d’extraordinaire, me direz-vous, sauf que, Ô surprise, sur la stèle qui comporte une cinquantaine de noms, ce sont majoritairement des noms … Allemands ! 31 au total qui, de Norbert Beisäcker à Karl Trinka en passant par Otto Kühne (1) ou encore Hermann Mayer voisinent avec 19 noms Français ainsi que des noms Russes et Espagnols.
La stèle est érigée juste en face du théâtre de leurs actes de bravoure contre l’occupant Nazi. C’était sur les contreforts de la Picharlarié sur la commune de Moissac vallée Française, où était basé le réseau de Résistance Bir Hakeim. A celui-ci s’était joint le réseau de résistance Montaigne basé, lui juste derrière, de l’autre côté de la crête au lieudit Galabartès en la commune de Saint Germain de Calberte, et composé d’antinazis étrangers, surtout Allemands, réfugiés en Cévennes.
Les Allemands antinazis, sont souvent des anciens combattants des Brigades internationales de la guerre d'Espagne et membres du Parti communiste allemand (DKP). Ils avaient fui l’Allemagne nazie dans les années trente. C’est donc tout naturellement, leur idéal communiste et internationaliste chevillé au corps, qu’ils s’étaient engagés sans hésiter et sans réserve dans la Résistance en France lors de l’occupation par les troupes Allemandes.
Belle œuvre de mémoire qui rappelle que l’idéologie nazie n’avait pas « contaminé » la totalité du peuple allemand, même s’il était difficile d’y résister au quotidien en Allemagne. Cela nous renvoie aussi au chef d’œuvre de Anna Seghers « Das Siebte Kreuz » (2) qui expose admirablement la situation des opposants, notamment communistes, dans la montée du nazisme, et où l’auteure nous montre que dans les circonstances les plus sombres, la dictature nazie n’est pas parvenue à éteindre l’idéal révolutionnaire et la solidarité ouvrière.
Une saine réhabilitation, donc, des actions antifascistes menées par des citoyens Allemands en nombre plus important qu’on ne le pense généralement. Cela fait chaud au coeur et nous assure que, même dans les moments de doute, la flamme brûle toujours et que, oui certainement, l’Internationale sera le genre humain !
Roger Héré
(1) ancien député communiste au Reichstag
(2) La septième croix, à lire !
commenter cet article …