ENSEMBLE CONTRE LA GRANDE REGRESSION SOCIALE !
Morlaix 06-01-2020 Alain DAVID
Au temps de l’industrie et du capitalisme naissants, parmi les nombreuses prérogatives qu’ils s’étaient octroyées les propriétaires des usines ont érigé deux principes qu’ils voulaient intangibles.
D’abord la pleine propriété des richesses qui y étaient produites par le travail des salariés. A charge pour eux d’assurer l’ensemble des frais et de payer la main d’œuvre sous forme de salaires. Dès lors, ces gens n’étant pas des philanthropes, on conçoit aisément le pourquoi de leurs efforts pour réduire au maximum la part des richesses consacrée aux salaires. Il ne faut pas chercher ailleurs l’explication « des enfants de cinq ans travaillant dans les mines » que chante Jean Ferrat dans Ma France ou les véritables casernes où oeuvraient pour un salaire de misère les bataillons d’ouvrières des industries textiles.
Deuxième principe : le pouvoir absolu de décision concernant toute la vie de l’entreprise. Des choix d’investissement, de la production aux conditions de fonctionnement s’appuyant pour cela sur une maitrise aux ordres. Pouvoirs si exorbitants que Jaurès a pu dire que la République avait laissé la liberté à la porte des usines.
On le voit une situation d’exploitation et d’aliénation intolérable. Toutes les réactions individuelles ou collectives des salariés, leurs luttes nombreuses souvent sauvagement réprimées par le patronat et par l’état, l’action des organisations syndicales et des partis politique qu’ils s’étaient donnés ont eu pour objectif de faire cesser cette inégalité de droits, de pouvoirs et de traitement.
Ce combat, plusieurs fois séculaire, avec des avancées et des reculs, avec des temps forts aussi comme le Front populaire, la résistance et les programmes de son conseil national, toutes les luttes du 20ème siècle, mai 68, un rapport de force international aussi, tout cela a permis la mise en place d’une société originale permettant aux salariés et aux populations de bénéficier d’un certain nombre de droits, de statuts, de garanties, de sécurités. Un meilleur partage des richesses et une limitation du pouvoir patronal.
Mais cette situation n’a jamais été acceptée par les tenants du capital qui n’ont eu de cesse de les limiter et de les remettre en cause. Ambroise CROIZAT, le « père de la sécurité sociale » ne s’y trompait pas lorsqu’il disait « ne parlez pas d’acquis sociaux mais de conquis sociaux » persuadé que le patronat ne cesserait jamais de les remettre en cause. Le 4 octobre 2007, dans un article de la revue « Challenges », Denis KESSLER, ancien vice-président du MEDEF crache carrément le morceau. Analysant les différentes réformes du gouvernement (statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraites, refonte de la sécurité sociale, paritarisme, ..) et y apportant un soutien sans réserve, il explique qu’ « il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945 et de défaire méthodiquement le programme du Conseil National de la Résistance. »
C’est ce qui ne cesse d’être mis en œuvre depuis par les gouvernements qui se sont succédés tellement ce programme original contrarie de plein fouet les intérêts du Capital. Qu’on en juge dit toujours Denis Kessler : « caisses de sécurité sociale, statut de la fonction publique, importance du secteur public productif, conventionnement du marché du travail, représentation syndicale, régimes complémentaires de retraites, etc… » et de déclarer que cette situation « est à l’évidence complètement dépassée ».
Partout les forces du capital tentent par tous les moyens de « regagner le terrain perdu ». La mondialisation et les délocalisations permettent, en recherchant les coûts les plus bas, de contourner les salaires minimum, la législation du travail y compris en utilisant le travail des enfants. Dans le même temps la remise en cause du code du travail redonne les mains libres au patronat. Les attaques contre les représentations syndicales privent les travailleurs de leurs possibilités réelles d’intervention sur leurs conditions de travail, l’activité et l’avenir de l’entreprise. Les atteintes contre les Prud’hommes renforcent encore le pouvoir des employeurs déjà disproportionné par rapport aux salariés. L’union européenne est utilisée au maximum pour remettre en cause le secteur public pour cause de non-respect de la sacro-sainte « concurrence libre et non faussée ». Petit à petit, méthodiquement les budgets, les lois, la règlementation doivent se plier à une conformité de plus en plus pesante avec l’organisation libérale de la société.
La mise en place de la réforme des retraites, avec pour objectif leur ouverture aux banques et aux assurances est un nouvel avatar de cette volonté de mainmise du capital sur tous les aspects de la vie des gens. Comme on le voit, que cela heurte de plein fouet la volonté majoritaire de la population ne conduit pas le pouvoir à remettre en cause ses objectifs ni à revoir sa copie. C’est donc au peuple de prendre la parole et de la faire respecter.
Nous assistons à un véritable recul de société, à la remise en cause de tout ce que les combats des siècles et des décennies passées avaient permis d’obtenir ; au sacrifice de toutes les garanties et les sécurités sur lesquelles les populations pouvaient s’appuyer pour avoir la perspective d’un avenir où leurs besoins et leurs aspirations soient enfin pleinement prises en compte. Il est curieux que les beaux esprits qui dissertent, magazines, médias et caméras ouverts sur un supposé « grand remplacement », que rien ne vient étayer, n’aient pas un mot sur cette grande régression sociale qui, elle, menace pourtant ce qui fait l’identité même de notre pays.
Dans ce contexte naissent inquiétude, refus et volonté de s’opposer à ce désastre annoncé. Le pouvoir ne s’y trompe pas qui tente par tous les moyens, notamment médiatique, de semer la division parmi la population.
Ne tombons pas dans le piège. Face à la gravité de l’agression il est de la responsabilité de tous les démocrates de tout faire pour que la riposte de notre peuple soit à la hauteur des enjeux.
Alain DAVID
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