La menace fasciste sur le Brésil avec le score hallucinant du candidat d'extrême droite Bolsonaro nous rappelle de mauvais souvenirs.....
https://www.franceculture.fr/politique/jair-bolsonaro-le-trump-tropical-sabat-sur-la-democratie-bresilienne?
Comment Jair Bolsonaro en est-il arrivé là ? Comment le candidat d'extrême droite a-t-il pu séduire 27% des Brésiliens dans les sondages avant le premier tour d’élections générales dimanche prochain ? Malgré ses déclarations polémiques sur la dictature, les Noirs, les femmes ou les homosexuels.
A 63 ans, Jair Bolsonaro est la révélation de la campagne présidentielle au Brésil. Le candidat d'extrême droite du Parti Social Liberal (PSL) domine pour l'instant les intentions de vote. Plus de 147 millions de Brésiliens vont élire à partir de dimanche prochain leur président mais aussi les députés, gouverneurs et sénateurs, en votant sur des urnes électroniques.
Après 30 ans d’une carrière politique particulièrement discrète, ce député fédéral de l’état de Rio de Janeiro dont le premier mandat remonte à 1991 incarne la résurgence d’un Brésil raciste, homophobe, et la nostalgie de la dictature militaire. Il vient de sortir de sortir de l'hôpital après avoir frôlé la mort le 6 septembre, poignardé à l'abdomen par un ancien militant de gauche lors d'un bain de foule à Juiz de Fora, dans l'Etat de Minas Gerais (sud-est).
Un homme neuf et "propre"
Si l’impossibilité du grand favori Lula a permis à Bolsonaro de faire un bond de 10 points dans les sondages début septembre, son ascension a été constante depuis le scandale Lava Jato et les révélations d’une corruption généralisée au sein de la classe politique. Aujourd’hui encore, plus de la moitié des candidats dans ces élections générales sont encore sous le coup d’une procédure judiciaire. Jair Bolsonaro, lui, n’a jamais officiellement été pris la main dans le sac et il s’est donc construit une image d’homme neuf, "anti système" qui rejette les pratiques frauduleuses de la classe politique traditionnelle.
A titre informatif, en 2014, le député Bolsonaro dévoilait un patrimoine de 2 millions de reais, sa déclaration de biens s’élevait à 28 000 reais au début de sa carrière en 1990. Une évolution en adéquation avec ses revenus de député fédéral et la valorisation de son patrimoine d’après la revue brésilienne Congresso em Foco.
Religion et homophobie
C’est en 2008, à l’occasion d’un débat sur l’homosexualité dans les couloirs de l’Assemblée, que Jair Bolsonaro a senti le besoin de sortir de la "routine" de son mandat de député. Celui qui est aujourd'hui suivi par plus de 6,3 millions d'abonnés affirme ce jour-là que "Dieu l’a envoyé en mission".
Près d’un tiers des électeurs brésiliens qui se prononceront le 7 octobre sont de confession évangélique. Qu’ils soient baptistes, pentecôtiste ou protestants, selon un sondage publié par l’institut brésilien Ideia Big Data, près de 30% d’entre eux sont convaincus que Jair Bolsonaro est le candidat idoine pour défendre leurs positions à la présidence de la République.
Le slogan du candidat du Parti Social Liberal (PSL) est d'ailleurs clair : "Le Brésil au-dessus de tout, Dieu au-dessus de tous". En meeting à Paraíba, dans le Nord-est, en février 2017, il déclarait : "Cette histoire d'Etat laïc n'existe pas, non. L'Etat est chrétien et que celui qui n'est pas d'accord s'en aille. Les minorités doivent se plier aux majorités".
A propos de l'homosexualité, celui qui est surnommé par ses partisans "Bolsomito" (mélange entre Bolsonaro et "mito", qui signifie "messie" en portugais) a déclaré au magazine Playboy, en juin 2011 :
Je serais incapable d'aimer un fils homosexuel. Je ne serai pas hypocrite : je préférerais que mon fils meure dans un accident plutôt que de le voir apparaître avec un moustachu.
Libéralisation du port d’arme
C’est une des mesures de son programme. L'ancien capitaine de l'armée brésilienne se bat déjà depuis quelques temps pour modifier la législation sur les armes à feu. Membre de l’influent front parlementaire sur la Sécurité Publique, favorable à la libéralisation du port d’arme et à l’abaissement de la majorité pénale. Il a fait polémique en apprenant à une fillette comment faire le geste d'une arme à feu.
En avril dernier, Jair Bolsonaro a mandaté l’un de ses fils, Eduardo, également député de Rio de Janeiro pour le Parti Social Libéral, pour présenter un projet de loi permettant à tout citoyen de posséder une arme à feu dans un avion.
Les solutions proposées par la famille Bolsonaro dans l’un des pays les plus violents au monde séduisent les jeunes blancs brésiliens de classe aisée. 60% de l’électorat de Jair Bolsonaro a entre 16 et 34 ans.
Attaques verbales tous azimuts. Florilège
"Bozo", comme le surnomment ses opposants, aime la méthode Trump : celle qui dit combattre le politiquement correct pour asséner des contre-vérités, en s’appuyant sur une rhétorique agressive et une posture d’opposition permanente.
Quelques exemples choisis de la "pensée" bolsonariste. Des déclarations de ce père de 4 garçons et d'une fille, qu'il a qualifiée de "moment de faiblesse" :
"Je ne vais pas combattre ni même discriminer, mais si je croise deux hommes qui s’embrassent dans la rue, je frapperai." (2002)
"J’ai cinq fils… quatre sont des hommes et pour le 5e, je me suis planté, et une femme a vu le jour." (2017)
"Je suis allé à un quilombola (...). L'afro-descendant le plus léger pesait sept arrobes (ancienne unité de mesure, environ 80 kilos). Ils ne font rien! Ils ne servent même pas à la reproduction". (conférence au Club hébraïque de Rio de Janeiro, après sa visite dans une communauté quilombola, c'est-à-dire de descendants d'esclaves fugitifs, en avril 2017).
"L’erreur de la dictature a été de torturer et non pas de tuer." (2008)
En 2016, lors du vote d’impeachment au congrès contre la présidente Dilma Rousseff, Jair Bolsonaro a dédié son vote aux militaires de 1964 et au colonel Carlos Albertos Brilhante Ustra, ancien chef de la sécurité intérieure brésilienne et responsable pendant la dictature (1964-1985) d’avoir torturé des centaines de civils, dont la jeune opposante Dilma Rousseff.
En mai dernier, certains camionneurs en grève, soutiens déclarés de Bolsonaro, brandissait sur leurs pancartes le message "intervention militaire maintenant !"
"Non, pas lui !", manifestent des milliers de Brésiliennes
A huit jours du premier tour, des manifestations de Brésiliennes ont eu lieu samedi dans 62 villes du pays (mais aussi à Paris, Berlin ou Atlanta), selon le site internet d'informations G1. Soit près d'un demi million de personnes réunies sans incident selon les organisatrices, tandis que la Police militaire indiquait qu'elle ne fournirait aucun chiffre. Ce mouvement, "Les femmes unies contre Bolsonaro", a été lancé sur les réseaux sociaux via #EleNão.
"Je crois que l'on vient de se réveiller. C'est un mouvement contre la violence, contre le fascisme, le machisme, les préjugés, contre la régression, la barbarie. C'est tout cela que ce candidat représente pour moi.", a par exemple confié à Rio, à notre correspondante, Yvonne, venue avec sa fille. Une étudiante d'ajouter que Bolsonaro, qui "a déjà fait l'apologie du viol*" ne peut pas être le Président de "Notre Brésil".
*En plein hémicycle, Bolsonaro a dit à la députée de gauche Maria do Rosario : "Je ne te violerai pas, parce que tu ne le mérites pas". Il a ensuite précisé : "Elle ne mérite pas d'être violée parce qu'elle est très laide, ce n'est pas mon genre. Jamais je ne la violerais. Je ne suis pas un violeur, mais si je l'étais, je ne la violerais pas parce qu'elle ne le mérite pas". (interview au quotidien Zero Hora, décembre 2014).
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