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14 juillet 2018 6 14 /07 /juillet /2018 05:26

À la veille du sommet de l’Otan, le président des États-Unis, tout à sa stratégie unilatérale, fait chanter ses partenaires. Il menace de leur retirer ledit « bouclier militaire » états-unien au cas où ils ne décupleraient pas leurs dépenses d’équipement en engins de guerre.

Le sommet de l’Otan qui s’ouvre aujourd’hui à Bruxelles s’annonce comme celui de toutes les surenchères. Donald Trump y arrive avec la ferme intention d’imposer à ses alliés une très forte hausse de leurs dépenses militaires. Après avoir décidé lui-même des augmentations historiques des budgets 2018 et 2019 du Pentagone, le président des États-Unis renforce la pression pour que les membres de l’Alliance atlantique intensifient leur effort d’équipement en engins de guerre. Il leur demande de le porter à au moins 2 % de leur PIB d’ici à 2024, comme le recommande un engagement pris au pays de Galles en 2014, lors d’un précédent sommet de l’Otan. Tout à sa méthode abrupte – celle de la diplomatie du deal –, il a envoyé une lettre comminatoire aux chefs d’État dont les pays seraient les plus en retard dans le respect de cet objectif. Parmi eux, le premier ministre canadien et, surtout, la chancelière allemande.

Donald Trump s’adresse à son opinion publique

Les termes du chantage sont nets : ou bien vous enflez vos budgets militaires ou bien les États-Unis « qui supportent l’essentiel de la charge » des dépenses de l’Alliance vous retireront ledit « bouclier militaire » états-unien. Pour appuyer le message, adressé aussi d’évidence à son opinion publique, Trump s’offusque d’un fonctionnement de l’organisation qui aurait permis à d’autres, dit-il en citant explicitement l’Allemagne, d’investir, parce qu’exemptés d’une trop grande charge militaire, pour se renforcer sur le terrain économique, donc exercer une concurrence « déloyale » à l’égard de l’Oncle Sam.

Dans nombre de capitales européennes, on craint que cette posture de la Maison-Blanche ne conduise à un nouveau clash entre alliés. Comme lors du récent G7 au Canada. Angela Merkel se défend que son gouvernement vient de décider une augmentation substantielle de son budget militaire à partir de 2019 et qu’il veut y consacrer 1,5 % de son PIB en 2024 (contre 1,2 % aujourd’hui), soit une très forte hausse « en termes absolus ». L’argument pourrait être rejeté brutalement par un Donald Trump qui mélange volontairement les genres en plaçant dans le même marchandage le forcing engagé pour accroître les contributions des États membres de l’Otan et l’offensive déployée tous azimuts sur le terrain commercial. Dans le deal recherché, la « sécurité » pourrait ainsi servir de monnaie d’échange à un abandon des menaces de taxes à 25 % sur les importations d’automobiles du Vieux Continent et singulièrement des grosses berlines allemandes. Ou inversement.

Paris constitue le meilleur appui de Washington

Sur le dossier de l’Otan, Paris constitue le meilleur appui de Donald Trump. La loi de programmation militaire française, adoptée au début de l’année, prévoit une forte hausse des dépenses pour atteindre les 2 % du PIB d’ici à 2024. Cette posture de vassal, si affichée déjà par le président de la République lors de sa visite d’État à Washington en avril, semble encore avoir été promue au rang de stratégie par Emmanuel Macron dans l’espoir d’amadouer « l’imprévisible » président états-unien. Paris voudrait ainsi plaider auprès de son bouillonnant collègue la complémentarité avec l’Otan de l’initiative européenne de défense à laquelle il vient de rallier huit membres de l’UE, dont Berlin et Londres. Un char franco-allemand, un nouvel avion de combat et le déploiement rapide de troupes européennes sur tout théâtre d’opérations sur la planète sont programmés.

Pas sûr que ces démonstrations de bonne volonté de l’Élysée suffisent à Donald Trump. Même s’il se garde de répéter ses propos de campagne sur le caractère obsolète de l’Otan, le lien transatlantique ne semble plus guère revêtir une priorité stratégique. Poursuivant un redéploiement des forces armées de l’hyperpuissance déjà engagé sous Barack Obama, il entend faire basculer le centre de gravité des capacités d’intervention du Pentagone vers l’Extrême-Orient pour contrer la montée en puissance de la Chine, traitée comme le plus « dangereux concurrent » et un « obstacle majeur » au rétablissement de la « grandeur de l’Amérique ». Quitte à envisager de sacrifier les bases américaines en Allemagne, héritage de la guerre froide, comme le suggérerait une étude du Pentagone qui vient de « fuiter » dans le Washington Post (1), ou même à réduire quelque peu la voilure militaire états-unienne sur le Moyen-Orient en cherchant à conclure un deal sur la Syrie avec un Vladimir Poutine, qui a tout misé, lui aussi, sur les capacités de marchandage que lui ouvre la puissance militaire. Donald Trump doit rencontrer le président russe à Helsinki le 16 juillet, au sortir du sommet.

On sait que le locataire de la Maison-Blanche est déterminé à imposer un nouvel ordre mondial débarrassé de nombreux règlements multilatéraux et mieux soumis à Washington. La pression sur les alliés en découle totalement. Elle ne se réduit pas seulement à la volonté de les embarquer dans le cofinancement de la course aux armements, elle est aussi destinée à accélérer avec ces mêmes alliés la mutation de l’Alliance – pensée durant la guerre froide comme un instrument de dissuasion et de défense – en un accessoire d’intervention à vocation pleinement offensive. Quel niveau d’alignement va exiger Trump de ses « partenaires » ? Rien ne perce sur les intentions du personnage versatile à la veille du sommet.

(1) The Washington Post du 28 juin 2018.

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Jens stoltenberg donne raison à donald trump

Seulement sept pays européens de l’Otan consacreront 2 % de leur PIB à leurs dépenses militaires en 2018. En citant ce chiffre, le secrétaire général de l’organisation, Jens Stoltenberg, a devancé délibérément hier les souhaits du président des États-Unis, qui multiplie les critiques acerbes contre les « mauvais payeurs » européens. « Le partage du fardeau n’est pas équitable », a-t-il estimé lors de la présentation du sommet à la presse. « Je ne serais pas surpris que les dépenses de défense donnent lieu à une discussion vigoureuse entre les alliés », a-t-il ajouté, en se faisant faussement perspicace.

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