Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
29 novembre 2016 2 29 /11 /novembre /2016 07:05

L'HUMANITE DIMANCHE

Jeudi 24 novembre 2016

Dossier réalisé par Cédric Clérin et benjamin König
Dessins : Camille Besse

 

Il est des tableaux qu'on aimerait éviter de peindre : quel visage pourrait bien avoir la France après cinq ans de droite, en 2022 ? Si rien n'est joué, la menace est là, bien réelle : quel que soit le candidat que la droite se sera choisi (lire page 19), son champion appliquera en cas de victoire une politique ultralibérale, réactionnaire, d'une brutalité thatchérienne, avec trente ans de retard... Sarkozy éliminé ? La belle affaire : les deux restants ne promettent aux Français que « du sang et des larmes », travailler plus pour moins de droits, moins de salaire et moins de démocratie. C'est un vrai projet de société que la droite veut imposer : la fin du « modèle social » à la française, accompagnée d'un recul sans précédent des libertés. Ce tableau d'horreur n'est pas le fruit d'une imagination débordante : il est la conséquence de la stricte application du programme de la droite. Au chiffre près.

 

L’école mise au pas. Zéro pointé pour l'égalité que la droite nous promet

Les élèves en difficulté sont mis de côté ou orientés vers l'apprentissage dès 14 ans... Le patronat exulte.

Salueeeeez... drapeau ! Tous les matins, les écoliers français débutent la journée par un « moment patriotique », avec salut au drapeau, et port de la blouse obligatoire. Conséquence des suppressions de postes, les classes comptent en moyenne 35 élèves. Surtout, avec la fin du collège unique et l'autonomie des établissements, chaque collège-lycée embauche directement les enseignants : les écarts entre les établissements explosent.

 

En ZEP, certains ont les pires difficultés et des postes restent vacants. Les élèves en difficulté sont impitoyablement mis de côté, ou orientés vers l'apprentissage, ouvert dès 14 ans. Le patronat voit là une source de main-d’œuvre sous-payée (entre 366 et 1 130 euros par mois). À l'université, la sélection est devenue la règle, et les frais d'inscription ont doublé. Petit à petit, la fac devient réservée à une élite.

 

Un choc fiscal et des caisses publiques vides

Une thérapie de choc digne de celle infligée à la Grèce. Le retour aux affaires de la droite marquera le début d'une nouvelle ère économique : celle du néolibéralisme intégral. Quand, dès le début du quinquennat, la dépense publique est réduite de 20 milliards d'euros par an, cela entraîne une baisse immédiate de la croissance. L'OCDE et le FMI avaient pourtant prévenu : un euro en moins de dépense publique, c'est deux euros en moins d'activité économique. Résultat : la France est officiellement en récession. Le PIB, déjà anémié par l'austérité socialiste, plonge : il perd près de 8 % entre 2018 et 2022. La suppression de l'ISF, la réforme de l'impôt sur le revenu (exemption des revenus du capital dans le calcul de l'impôt, suppression des tranches supérieures), ainsi qu'une baisse inédite des droits de succession ont laminé la redistribution. La France est devenue un pays de rentiers, où une minorité se transmet un patrimoine qui augmente sans cesse. La lutte contre la fraude et l'évasion fiscales est à son plus bas niveau. Aux 30 000 suppressions de postes depuis 2002 au ministère des Finances, la droite en a ajouté 15 000 de plus. Le taux de recouvrement ne cesse de baisser : de 53 % en 2014, il est autour de 40 % en 2021. Si les TPE-PME ont vu le taux d'imposition descendre à 25 %, les grosses boîtes du CAC 40 multiplient les montages fiscaux et ne paient plus que 5 %. Les caisses sont vides et la dette augmente. Le chômage aussi. Les inégalités explosent : le niveau de vie moyen des 10 % les plus pauvres n'a de cesse de chuter. En 2022, il est de 600 euros par mois, contre 658 en 2014. Malgré l'inflation...

 

En finir avec les syndicalistes !

 

Le programme de 2017 laissait entrevoir une vengeance impitoyable contre le monde du travail : la droite, de ce côté-là, ne déçoit pas. Après en avoir aperçu les prémices sous Hollande, la France assiste à une véritable chasse aux syndicalistes : limitation des mandats syndicaux dans le temps, mise en place de la délégation unique du personnel (sauf dans les TPE). Le nombre d'élus du personnel est réduit de deux tiers, ils n'ont plus le temps d'exercer correctement leurs missions. Au ministère du Travail, on valide à tour de bras le licenciement des salariés protégés, syndicalistes en tête. Le patronat a ainsi tout le loisir d'écarter les salariés gênants. Dans les boîtes, il est quasiment impossible pour les salariés de s'opposer aux desiderata des patrons. Le référendum d'entreprise est devenu la norme pour signer des accords : en cas de refus d'un salarié, il peut être licencié individuellement pour motif économique, selon la même logique que celle de la loi dite de « sécurisation de l'emploi » du PS, en 2013. En clair, le référendum est l'occasion d'un immense chantage : un vote favorable ou la porte. Le droit de grève est devenu symbolique : le service minimum est étendu aux raffineries, aux centrales nucléaires et au secteur aérien.

Surtout, le droit de manifester est remis en cause, dans la lignée de ce qu'avait fait le PS en 2015. Gouvernement et préfets n'ont de cesse d'utiliser le « risque de troubles à l'ordre public ». L'encadrement policier est si important qu'il est concrètement impossible de manifester. Au niveau national, le paritarisme hérité du Conseil national de la Résistance a quasiment disparu : le gouvernement a repris la main sur l'ensemble de la protection sociale.

 

La fonction publique exsangue

C'est une des premières mesures prises par la droite : le rétablissement des jours de carence pour les fonctionnaires, vite suivi d'une réforme brutale : la fin du statut des fonctionnaires et le passage à 39 heures. Et, depuis 2018, tous les fonctionnaires embauchés sont affiliés au régime général, et sous contrat de droit privé. Étant donné la faiblesse des salaires, les candidats fuient ces postes mal payés et devenus précaires. Les collectivités sont les premières en difficulté : elles ne peuvent plus assurer les services publics de base. Rues et voiries se dégradent, des crèches ferment, les écoles sont surchargées ; piscines, stades et bibliothèques sont contraints de réduire les horaires d'ouverture. Autre conséquence, inattendue celle-là : la liberté de recrutement dans les collectivités ouvre la voie à une vague de clientélisme.

L'Insee avait fait le calcul : entre 2017 et 2022, 560 000 fonctionnaires partaient en retraite, sur les 5,6 millions que comptait la France. Avec la droite, seulement 260 000 ont été remplacés. Cette saignée a littéralement désorganisé le pays. L'hôpital public et l'éducation nationale, comme prévu, sont les plus touchés. Le premier a perdu près de 45 000 postes, après les 22 000 supprimés sous Hollande. Idem pour les postes de professeurs. Seules la police et la gendarmerie y échappent, de peu. Dans tous ces secteurs, le privé s'engouffre dans la brèche. Au prix du marché : l'impact sur le pouvoir d'achat des ménages est immédiat.

 

 

La Sécu à terre... prête à être privatisée

Malgré leur attachement au système de santé, les Français voient s'effilocher sous leurs yeux la Sécu. Un sur deux renonce aujourd'hui à des soins pour raisons financières, contre 36 % en 2016.

Si le déficit de la Sécu n'explose pas à nouveau, c'est en raison des restrictions budgétaires, et bien sûr du renoncement de beaucoup concernant les soins, et pas seulement dentaires ou optiques.

Les déserts médicaux s'étendent : si les littoraux et les grandes villes sont épargnés, les campagnes voient fermer et s'éloigner les services. Il n'est pas rare de devoir faire 80 km pour accoucher, et les incidents prénataux se multiplient. Incroyable : le taux de mortalité infantile repart à la hausse, une première depuis 350 ans en temps de paix.

Après le plan d'économies de 10 milliards d'euros du PS en 2015, la droite est passée à 20 milliards, dont 6 milliards pour l'hôpital public. Pour la fonction publique hospitalière, c'est 45 000 postes en moins : les infirmiers enchaînent 35 patients par jour. Il n'y a plus de place pour l'humain. La chirurgie ambulatoire est généralisée : entré le matin, opéré à midi, sorti le soir.

Bien entendu, c'est le privé qui récupère les déçus d'un hôpital public exsangue. Ce dernier, comme au XIXe siècle, revient à une fonction d'hospice : des soins expéditifs et déshumanisés pour les pauvres et les indigents.

Le paritarisme remis en cause, la droite en profite pour exonérer encore le patronat de cotisations, qui sont compensées par l'impôt inégalitaire par excellence : la TVA, qui est aujourd'hui de 22,5 %.

Enfin, toutes les prestations sociales (logement, famille, RSA, primes de rentrée et de Noël) ont été regroupées. Pompeusement rebaptisé « revenu universel », ce regroupement consiste en réalité à plafonner ces aides à 600 euros par mois.

 

Travailler plus pour gagner moins et un max d'Uber pour les trimards

La durée du travail est fixée dans l'entreprise. C'est la directive européenne (48 heures/semaine) qui protège désormais les travailleurs!

 

L'âge légal de la retraite est maintenant de 65 ans, mais l'âge réel est de 66, 67 ans pour une retraite à taux plein. Il n'est pas rare que des retraités retournent à un petit boulot : distributeur de prospectus, balayeur. D'autres retraités, diplômés, remplacent les auxiliaires de vie scolaire : les emplois aidés ont été supprimés. Le CDD n'existe plus, mais le CDI peut être très facilement rompu et comprend une période d'essai d'un an. Cette précarité généralisée a de lourdes conséquences : sans patrimoine familial, obtenir un crédit ou un logement est très difficile.

La fin programmée des 35 heures n'a permis qu'une seule chose : la baisse des salaires. Les heures supplémentaires ne sont plus majorées, la durée du travail est fixée dans chaque entreprise, et c'est même la directive européenne (48 heures par semaine maximum) qui protège les travailleurs ! La productivité horaire chute, la souffrance au travail explose, et, avec elle, les suicides. La Dirrecte, chargée depuis 2013 d'apprécier les plans de licenciement, a pour consigne de ne plus étudier les dossiers au fond : l'administration valide le démantèlement accéléré de notre appareil productif.

Entre 2017 et 2022, la France a perdu 20 % de sa production industrielle. Enfin, pour les privés d'emploi, la situation est terrible : la droite a imposé la dégressivité des allocations chômage, instillant l'idée qu'un chômeur qui ne trouve pas de travail n'en cherche aucun. Après douze mois, les allocations sont réduites de 25 %, et après dix-huit mois, de moitié.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La sécurité contre la liberté ou l'avènement d'un État policier

La France vit sous état d'urgence depuis maintenant sept ans. Afin de satisfaire aux promesses de campagne, le ministère de l'Intérieur met la pression pour que la police fasse du zèle. Les mises en résidence surveillée se multiplient et leur taux d'annulation par la justice, qui était de 31 % en 2016, a explosé. Depuis 2017, le gouvernement a également multiplié les lois sécuritaires : abaissement v

Le parc de prisons, qui a augmenté de 20 000 places depuis 2017, est déjà saturé par le durcissement des peines et leur exécution systématique. Les seuls services publics qui réapparaissent dans les quartiers populaires sont des commissariats, ouverts uniquement la nuit, avec des agents aux missions exclusivement répressives.

Avec l'adoption de la présomption de légitime défense pour les policiers, les incidents se multiplient. La France vit désormais avec une pression extérieure due aux risques terroristes, mais aussi à des vives tensions intérieures entre police et population. La France se classait déjà 19e sur 26 en Europe pour le traitement respectueux des personnes par la police, en 2011, sous la présidence de Sarkozy, un classement qui chute encore depuis.

La police peut à présent exercer un contrôle individuel et social à l'aide du fichier national TES, très contesté, regroupant initialement les informations des cartes d'identité et passeports, qui a été étendu aux prestations sociales. Les procédures auprès de la Cour européenne des droits de l'homme se multiplient.

 

 

La démocratie et le vivre-ensemble tués par ordonnance

En 2022, les travées de l'Assemblée nationale sont vides. Le gouvernement, qui a déjà utilisé les ordonnances à 12 reprises pour faire passer des lois, utilise tous les subterfuges pour contourner l'Assemblée : 49-3, vote bloqué, procédure accélérée... « Il ne faut pas perdre de temps », ne cesse de répéter l'exécutif. Le nombre de députés sera d'ailleurs divisé par deux après les prochaines législatives, sans introduction de proportionnelle. Chaque circonscription comptera à présent en moyenne 225 000 habitants. En Saône-et-Loire, les désormais deux seules circonscriptions font 4 000 km2  chacune et Autun, où se trouve l'actuelle permanence parlementaire, est à 135 km de Saint Maurice-lès-Châteauneuf, au sud de la même circonscription. Plus personne ne fait attention au Parlement, le présidentialisme triomphe et vire à l'autoritarisme. C'est par ordonnances que le président a décidé d'arrêter l'immigration économique, le regroupement familial, ou institué la déchéance de nationalité pour les binationaux. Mesures facilitées par le fait que la France ne reconnaît plus la Convention européenne des droits de l'homme (Cedh). De plus, tous les signes religieux sont dorénavant interdits dans tout l'espace public. C'est évidemment l'islam qui est visé. La construction de mosquées a été divisée par deux et l'ostracisation de l'islam permet le développement des prêcheurs radicaux. Ce cocktail encourage les actes antimusulmans, passés de 500 en 2015 à 2 000 en 2022.

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : Le chiffon rouge - PCF Morlaix/Montroulez
  • : Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste. Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale. Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.
  • Contact

Visites

Compteur Global

En réalité depuis Janvier 2011