À Morlaix, les sans-papiers « soutiennent l’économie mais on est exclus du pays »
Publié le 19/01/2021
Gaëlle COLIN
Environ 250 personnes se sont réunies pour inciter la préfecture du Finistère à régulariser les travailleurs sans-papiers, ce mardi 19 janvier 2021, à Morlaix (Finistère). Des salariés non-déclarés d’exploitation agricole étaient également présents. . Ils témoignent.
« Un contrat de travail est égal à un titre de séjour »
Les tambours et les chants résonnent devant la sous-préfecture de Morlaix (Finistère), ce mardi 19 janvier 2021. Environ 250 personnes se sont rassemblées pour demander la « régularisation tous les sans-papiers. Un contrat de travail est égal à un titre de séjour », martèle Marc Corbel, secrétaire de la CGT.
Au moins 77 salariés non-déclarés dans le Finistère
En effet, des salariés non-déclarés par leurs patrons officiaient dans des exploitations de ramassage de volailles dans le département. Dix-sept personnes étaient en situation irrégulière à Saint-Sauveur, mais onze aujourd’hui ont obtenu un titre de séjour provisoire. Six sont encore dans l’attente. « C’est pour régler cette incohérence qu’on se bat aujourd’hui, et pour tous les autres à venir », poursuit le syndiqué.
Deux autres exploitations sont également dans le viseur de l’inspection du travail, à Landivisiau et dans le secteur de Châteaulin.
« On était en première ligne pendant le Covid »
« L’inspection du travail a contrôlé l’exploitation le 17 novembre 2020. Ils ont découvert la maltraitance et les irrégularités », raconte un groupe de salariés non déclarés de Landivisiau. Ils sont venus manifester ce mardi, « alors que notre patron nous menace de nous licencier pour ça ». Mais ils ont « trop enduré ».
Ils racontent, en colère, les longues journées de travail, « pas entièrement payées. Si on ramasse des poulets pendant 35 minutes alors qu’on a fait deux heures de route et d’attente, on n’est payés 35 minutes ». Sans oublier le travail sans pause, sans le droit d’aller aux toilettes, sans boire. À devoir dormir dans un van sans chauffage. « Et si on veut dénoncer ça, le patron nous dit qu’il va nous renvoyer dans nos pays. » À savoir l’île Maurice, Guinée Conakry, Sénégal ou encore Burkina-Faso.
Ces hommes et ces femmes dénoncent aussi le manque de reconnaissance de la France, alors « qu’on était en première ligne pendant le coronavirus. On ne nous fournissait pas de protection. Et quand on tombait malade, le patron ne faisait pas ce qui était nécessaire et on ne pouvait pas se mettre en arrêt maladie ». Maintenant, une partie veut porter plainte auprès de la police aux frontières de Rennes. Comme l’ont fait les salariés de Saint-Sauveur.
Pour Jean-Pierre, « sans ma famille, ça serait la catastrophe »
C’était le cas pour Jean-Pierre. Sauf qu’il n’a pas pu porter plainte comme les autres, n’étant pas là le jour des auditions menées par la police aux frontières. Il se retrouve, depuis la liquidation de l’exploitation de Saint-Sauveur, sans aucune ressource, ni moyen d’en avoir. « Je suis dans l’attente de papier. Je suis aidé par le Secours populaire et hébergé par mon frère. Sans ma famille, ça serait la catastrophe. Je ne fais plus rien et je ne demande qu’à être régularisé. On soutient l’économie française mais on nous exclut du pays », raconte l’homme, originaire de la République démocratique du Congo.
Paul veut sortir de « cette angoisse de ne rien pouvoir faire »
Pour son collègue Paul, c’est la même chose. « Je me disais que la France était le pays des droits de l’Homme. On est tombés sur des employeurs malhonnêtes. Mais ça me fait plaisir de voir des gens mobilisés pour nous aujourd’hui. » L’homme rêve de pouvoir travailler, ou se former. « Je ne veux plus être dans cette angoisse de ne rien pouvoir faire. »
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