C’est avec tristesse que les communistes brestois ont appris la disparition de l’écrivain brestois Jean-François Coatmeur. Auteur policier à l’écriture particulièrement riche mais aussi romancier humaniste il était toujours présent lors des grandes fêtes de l’Unité organisées par le Parti Communiste au parc de Penfeld.
Il avait su créer un lien particulièrement fort entre le public populaire de nos fêtes et la culture.
Le PCF salue la mémoire de Jean-François Coatmeur qui a porté bien haut l’image de Brest.
Né à Douarnenez (Pouldavid), Jean-François Coatmeur, l’écrivain aux 28 romans policiers, vivait depuis plus de 40 ans à Brest, ville inspiratrice. Où il vient de disparaître à l'âge de 92 ans. Comme Simenon, ce maître du suspense a donné au polar ses lettres de noblesse. Il considérait le genre comme « une tragédie à la sauce du temps ».
« C’est du Coatmeur. » Ses lecteurs, nombreux et fidèles, avaient l’habitude de commenter de cette efficace formule lapidaire chaque nouveau livre du romancier finistérien, qui vient de disparaître à l’âge de 92 ans.
L’une des plus grandes joies de Jean-François Coatmeur était, justement, « d’avoir des lecteurs partout, un public à la fois populaire et intellectuel, racontait l’écrivain, qui précisait aussi : Mais c’est Brest qui m’a fait écrivain. Moi qui trouvais la ville sinistre, qui ne pensais qu’à retourner dans le Finistère-Sud, c’est ici que j’ai trouvé mes premiers lecteurs. »
Prof de lettres classiques muté à Brest, Coatmeur, originaire de Pouldavid (Dournenez) a fini par s’y faire : « Je ne peux pas vivre ailleurs qu’au bord de la mer, confiait-il. Même pendant ma période de détestation de Brest, j’adorais me promener sur le port de commerce, je rêvais devant les noms des bateaux. Ce n’est pas un hasard si mon livre le plus connu est Les Sirènes de minuit. Une ville comme Brest peut offrir d’extraordinaires décors… »
La Bretagne reste la toile de fond de ses romans et leurs protagonistes sont confrontés à la loi, à la société et, surtout, à leur conscience : « Je conçois le roman policier comme une tragédie à la sauce du temps. J’invente des drames qui se déroulent dans mon décor quotidien, je démontre que le pire est possible partout, même ici, disait Coatmeur. Mes personnages, souvent issus de milieux modestes, sont aux prises avec des problèmes éternels, des difficultés de couple, des dénis de justice, une recherche laborieuse de la vérité… Universelles, mes histoires pourraient aussi se passer ailleurs. »
Mais c’est à Brest que son imaginaire se met en branle. Son roman Narcose, par exemple, lui fut ainsi inspiré par une belle inconnue à l’air angoissé, entrevue à l’église Saint-Louis : « On peut être à la messe et avoir des pensées profanes, mais c’est arrivé une seule fois ! »racontait Coatmeur lui qui, après ses études secondaires au Petit Séminaire de Pont Croix, avait failli devenir prêtre. Il en était resté croyant, pratiquant et… anticlérical !
« Je suis un rebelle anti-institutions. Je n’aime pas beaucoup les médailles, les militaires, les ecclésiastiques. Je donne des coups de griffe aux bourgeois, à la société de l’argent », expliquait l’écrivain qui s’était, à plusieurs reprises, engagé auprès d’Amnesty International ou contre l’expulsion des sans-papiers : « Je ne vis pas sur une île déserte. Je réagis donc à ce que je crois être de l’injustice. Je remarque, qu’aujourd’hui, les hommes n’aiment pas côtoyer la misère… »
Fausses pistes, manipulations, tous ses romans sont des polars, des romans psychologiques noirs : « J’ai connu l’époque où le roman policier était assimilé au roman de gare, vite lu, vite abandonné dans le train. Dans mes livres, où la police joue un rôle très limité, j’ai voulu démontrer que l’on pouvait écrire des romans à suspense comme de véritables œuvres littéraires. Je les appelle des « romans de mystères ». Un genre littéraire maîtrisé pour « faire passer mes idées, mon regard sur le monde, mes critiques sur ses dérives… »
À l’exception de Des croix sur la mer (1 991) inspiré par un événement autobiographique : le 5 août 1944, le jeune Jean-François passa une demi-journée en otage, aligné contre un mur face aux mitraillettes, sous les yeux de sa famille. Cet épisode marqua l’adolescent d’un sceau indélébile.
La raison, peut-être, pour laquelle l’œuvre de Jean-François Coatmeur sera, sans cesse, traversée par une tension née du dérèglement du quotidien…
Jean-François Coatmeur est l’auteur de 28 romans à suspense et de nombreuses nouvelles. Douze de ses romans sont publiés chez Denoël. Il publiait désormais chez Albin Michel dans la collection « Spécial suspense ». Grand Prix de la Littérature Policière en 1976 pour Les sirènes de minuit (Denoël, 1976), Prix Mystère de la Critique en 1981 pour La Bavure (Denoël, 1 980) et Prix du suspense 1990 et Grand Prix des écrivains de l’ouest pour La Danse des masques(Albin Michel, 1989).
Son dernier livre, Les noces macabres (Albin Michel, 2016) s’appuie sur une tragédie familiale dans l’atmosphère brestoise chère à l’auteur.
Coatmeur fut également Président du jury du prix du Goéland masqué, salon de littérature policière basé à Penmarc’h, de 2001 à 2014. Il était aussi Chevalier des Arts et des Lettres depuis 2004.
Plusieurs livres de Coatmeur, comme Morte Fontaine et Le squale, ont été adaptés au cinéma et à la télévision. Sa nouvelle La fiancée a fait l’objet de trois adaptations différentes, dont l’une Brestoise, par Olivier Bourbeillon. Le roman La bavure a aussi été adapté, ainsi que Les sirènes de minuit avec Philippe Léotard, tourné à Brest.
La nuit rouge, en revanche, n’est pas sortie en salle car jugée de « qualité insuffisante » par l’auteur et l’éditeur. Sa « plus belle expérience de cinéma » reste Des croix sur la mer » avec Laurent Malet et Isabelle Renauld, film auquel il participa activement.
Frédérique Guiziou, Ouest-France
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