A la commission Finances du mardi 12 janvier à Morlaix-Communauté nous a été présenté un document préparatoire au Débat d'Orientation budgétaire 2016 qui prépare le débat budgétaire qui aura lieu le lundi 25 janvier 2016, en Conseil de Communauté.
Qu'est-ce que nous pouvons en retenir essentiellement?
D'abord, il y a une forte pression sur le financement des actions communautaires liée à la baisse drastique des dotations d'Etat. 800 000€ vont être encore retirés à la Communauté d'agglomération en 2016, contre 800 000€ en 2015 et 400 000€ en 2014. En tout, entre 2013 et 2017, ce sera en cumul 10 millions d'euros qui auront été perdus du côté des dotations d'Etat par la communauté (par rapport à une situation hypothétique de maintien des dotations d'Etat de 2013). C'est considérable, d'autant que certaines compétences nouvelles ont été transférées et que le climat de crise n'est pas propice à une augmentation de la fiscalité locale et que les bases d'imposition de cette communauté éloignée des centres métropolitains et sans dynamisme démographique n'augmentent pas. Et c'est à rapprocher évidemment avec la politique libérale (moins d'Etat, de solidarité, moins de services publics) et pro-patronale du gouvernement.
Non seulement la répartition des richesses dans l'entreprise continue à se déséquilibrer au profit du capital contre le travail (en 1980, les salariés consentaient 10 jours de travail pour payer les dividendes des actionnaires, aujourd'hui, c'est un mois et demi, 45 jours; la part de la rémunération du capital sur le volume globale des richesses produites était de 5% en 1980, elle est de 28% aujourd'hui), mais le gouvernement Hollande-Valls-Macron en maintenant les 200 milliards d'aides annuelles diverses aux entreprises qui existent déjà, en accordant 50 milliards aux patrons et actionnaires dans le cadre du CICE et du Pacte de Responsabilité, réduit en proportion le financement des services publics et des collectivités locales.
Les conséquences sont multiples:
- une hausse de l'endettement pour les collectivités: avec l'importance des investissements du Pôle d'échange multimodal de la gare, le projet Espace des Sciences, l'aménagement de la Manu, l'endettement a augmenté de 8 millions d'euros à Morlaix-Communauté entre 2014 et 2015.
- une réduction du potentiel d'auto-financement sans recourir à la dette.
- une forte pression exercée sur le budget pour augmenter les impôts et tarifs et Morlaix-Communauté prévoit de réévaluer à la hausse ses tarifs tous les ans (par exemple dans les transports) et d'augmenter la fiscalité: une hausse de 2% du taux de la Taxe d'Habitation, de la Contribution Foncière des Entreprises, et de la Taxe d'Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM). Pour la taxe d'habitation, l'augmentation du taux de Morlaix Communauté (qui était resté stable depuis le transfert de cette part d'impôt local qui était autrefois prélevé par le département au niveau de la communauté d'agglo en 2011) coïncidera avec une augmentation d'environ 3% de la taxe d'habitation pour l'usager (1% de plus au titre de la revalorisation forfaitaire) et rapporterait selon les estimations 400 000 € (soit, si l'on compte environ 33 000 ménages dans l'agglomération, 13€ en moyenne de plus par ménage à l'année). Le problème est que si la moitié des ménages reste non imposable à la taxe d'habitation, cet impôt est néanmoins peut progressif et peu juste, beaucoup de personnes à bas revenus le payant à un niveau élevé. L'augmentation de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pourrait elle rapporter 224 000 € en recettes.
- une forte pression exercée sur le personnel, ses conditions de travail (toujours plus de productivité demandée), d'indemnisation, et l'emploi public, puisqu'on cherche à faire autant, voire plus (la communauté a désormais de nouvelles compétences - PLUI, droit des sols - et de nouveaux postes de dépense en personnel: Espace des Sciences mis en service en 2018, avec des effectifs de personnels constants) avec moins.
- une restriction des ambitions en terme de couverture de service public. Dans ce contexte d'austérité, on peut douter qu'il y ait la volonté de créer une régie publique des transports en commun urbains, péri-urbains et ruraux plus performante. On peut craindre aussi que l'on ne veuille pas faire les investissements préalables pour le passage en régie publique de la gestion de l'eau (assainissement et distribution) à l'échelle communautaire. On peut supposer que l'obligation légale au titre des nouvelles normes de rénover, d'équiper les déchetteries ou de fermer certaines d'entre elles s'accompagnera d'une réduction de l'offre de service public de proximité en termes de gestion des déchets.
- une qualité de service qui peut s'en ressentir ça et là pour les usagers.
- moins d'investissements pouvant soutenir le secteur du bâtiment et les entreprises locales. Les collectivités locales représentent 70% des commandes du BTP. Et actuellement, le secteur du bâtiment voit son nombre de chantiers chuter d'environ 22%.
- restriction du soutien aux communes et aux associations: la Communauté d'agglo se concentre sur ses compétences strictement délimitées et ses priorités de mandat (projet de territoire). Des associations actives dans le domaine social et la vie quotidienne peuvent se faire du souci sur le maintien ou l'obtention de leurs subventions. Il est ainsi écrit dans le document du DOB 2016 que, "à périmètre constant, les dépenses générales et les subventions doivent baisser".
- renoncement à des projets améliorant la vie quotidienne des habitants du territoire et structurants par rapport au développement de celui-ci.
Pour toutes ces raisons, combattant la politique d'austérité soutenue par les formations de la plupart des élus de droite et du PS de Morlaix Communauté et qui impacte considérablement les marges de manœuvre de la collectivité, j'imagine que je pourrai difficilement voter le budget 2016 de Morlaix Communauté, même si tout n'est évidemment pas à rejeter tous les projets, dont certains portent des ambitions intéressantes, notamment pour le rebond de la ville centre, Morlaix, qui, on l'a vu, a encore perdu des habitants sur les 5 années avant 2014.
Les orientations 2016 en terme d'investissement de l'exécutif de Morlaix-Co nous ont été présentés ainsi:
- 4,7 millions d'euros pour le PEM (pôle d'échange multimodal de la gare)
- près de 6 millions d'euros pour la Manufacture (projet SEW, Espace des Sciences, lequel ne pourra jamais être à l'équilibre en fonctionnement du fait des dépenses de personnel importantes, parking de l'IUT).
- renforcement de la compétence développement économique (1,2 millions d'euros)
- La commission Environnement devrait aussi absorber beaucoup du budget d'investissement (7,5 millions d'euros), avec la phase d'études pour la réhabilitation et la transformation du schéma des déchetteries, l'achat des conteneurs enterrés, les études liés au schéma de transport associé au renouvellement de DSP...
Ismaël Dupont.
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