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11 mars 2025 2 11 /03 /mars /2025 06:07
Guerre en Ukraine, principes de sécurité collective, travail pour la paix - Intervention de Marianne Margaté, sénatrice communiste, au Sénat le 6 mars 2025

La guerre en Ukraine, trois ans après l’invasion russe, demeure une plaie ouverte au cœur de l'Europe. Derrière l’enlisement militaire et les discours belliqueux, une évidence s’impose : aucune solution purement militaire ne mettra fin à ce conflit. Les récentes déclarations d’Emmanuel Macron sur « l’autonomie stratégique européenne », évoquant notamment l’éventuelle extension du parapluie nucléaire français, révèlent moins une vision cohérente qu'un aveu d’impuissance. Ce projet, flou et dangereux, ne répond pas aux urgences actuelles : désamorcer l’escalade, assurer la sécurité collective et penser la paix hors des logiques de blocs.

Un million de victimes plus tard, le constat est implacable : l’escalade militariste a échoué. Les livraisons massives d’armes, censées faire barrage à l’agression russe, n’ont fait qu’alimenter une machine de guerre destructrice, affectant gravement les populations ukrainiennes, russes et européennes. Les profits record des industriels de l’armement (+29 % pour Lockheed Martin en 2024) contrastent violemment avec l’asphyxie des budgets sociaux européens, où inflation et dette publique fragilisent les services essentiels.

Cette guerre, issue d’une mondialisation capitaliste en crise, ne bénéficie à aucun peuple. Elle profite exclusivement à une minorité : oligarques russes avides de rentes énergétiques, fonds spéculatifs tirant profit de la dette ukrainienne, et complexe militaro-industriel occidental. Tandis que les armes font des centaines de milliers de victimes sur le terrain, c’est dans les capitales, les conseils d’administration et lors de négociations opaques que se décide l’avenir de ce conflit — un avenir où l’Ukraine risque de sortir exsangue, quel que soit le camp proclamé « vainqueur ».

Les projets de « reconstruction » de l’Ukraine, souvent présentés comme une lueur d’espoir, exigent une vigilance renforcée. Dirigés par des institutions telles que BlackRock ou le FMI, ces plans risquent de transformer le pays en laboratoire néolibéral : accaparement des terres agricoles par des fonds spéculatifs, privatisation des infrastructures au bénéfice des multinationales, droits sociaux sacrifiés sur l’autel de la « compétitivité ». Ce scénario, déjà observé en Irak ou en Grèce, imposerait une double peine aux Ukrainiens : après la guerre, la dilapidation.

L’Europe, quant à elle, paie le prix de sa dépendance stratégique. Pris de court par un Donald Trump isolationniste qui entend redéployer ses forces face à la Chine, Emmanuel Macron s’est livré à une rhétorique martiale, préparant les Français à un effort de guerre. Mais qu’en est-il de l’effort de paix auquel aspirent tous les peuples ? L’idée d’une guerre imminente contre une Russie prête à débarquer sur les Champs-Élysées apparaît davantage comme une justification commode à des politiques d’austérité qu’une réalité tangible.

Alors que nos collectivités locales cherchent désespérément à faire plus avec toujours moins, et que nos services publics s’épuisent à pallier les carences, le gouvernement semble pourtant capable de mobiliser soudainement des ressources considérables pour alimenter une escalade militaire aux objectifs incertains. Cette contradiction révèle un choix politique évident : sacrifier les besoins sociaux pour défendre une souveraineté factice, quitte à accentuer davantage les fractures internes d’une société déjà fragilisée par des crises successives. L’urgence véritable serait de reconstruire un modèle de coopération internationale fondé sur la solidarité, préservant ainsi à la fois la paix et le progrès social, plutôt que d’alimenter une spirale infinie de confrontations aux conséquences imprévisibles.

La France, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, a les moyens de sortir de l’immobilisme. Au lieu de s’enfermer dans une rhétorique guerrière, elle doit :

* Exiger un cessez-le-feu immédiat et soutenir des négociations sous l’égide de l’ONU, en impliquant des pays non-alignés (Inde, Brésil, Afrique du Sud) ainsi que les acteurs locaux ukrainiens et russes.

* Relancer les principes d’Helsinki de 1975, affirmant l’inviolabilité des frontières et la coopération paneuropéenne, tout en garantissant la sécurité de tous les États, y compris la Russie.

* Dialoguer activement avec les BRICS et organiser une conférence internationale sous l’égide du G20, afin de réduire le risque d'une guerre mondiale en incluant les pays du Sud global majoritaire.

La paix en Ukraine ne sera ni victoire ni capitulation, mais l’art fragile de concilier des intérêts antagonistes. À nous de refuser les simplifications dangereuses et de renouer avec notre vocation de puissance de paix, en exigeant l’arrêt immédiat des combats, en relançant le désarmement nucléaire et en construisant une sécurité européenne inclusive. Cela implique de rompre avec les logiques libérales qui ont laminé notre industrie, fragilisé notre souveraineté et jeté les peuples les uns contre les autres.

 

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