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11 juin 2018 1 11 /06 /juin /2018 05:17
Front Populaire; un livre qui observe les logiques de blocs - article sur le livre de Jean-Paul Sénéchal sur le Front Populaire dans le Finistère par Bruno Salaün, Le Télégramme

Son ouvrage fouillé analyse le Front populaire dans le Finistère. Jean-Paul Sénéchal signe « Finistère du Front populaire, 1934-1938. Lutte pour l’hégémonie et logiques de blocs »*.

 

Jean-Paul Sénéchal avait soutenu une thèse, fin 2015, sur l’impact du Front populaire dans le Finistère. Le docteur en histoire en publie une synthèse éclairante dans un livre publié aux Presses universitaires de Rennes.

L’originalité de l’analyse tient à cette approche qui consiste à observer comment des blocs socio-économiques et politiques se sont comportés dans une société finistérienne très largement rurale et catholique. Une société peu pénétrée par les idées sociales au milieu des années 1930 et très imprégnée de rapports dominants-dominés.

 

Les fractures que l’auteur discerne en disent long sur la volonté des forces en présence de peser, voire de conserver une certaine hégémonie, alors que l’arrivée des gauches au pouvoir en France radicalise les positions, que les résonances sociales du Front populaire et les grèves incitent les uns et les autres à s’adapter.

 

 

 

« Ils ont agi avec une grande finesse »

 

Une illustration parmi d’autres. « Même si catholiques et agrariens bataillaient notamment sur la formation des élites paysannes, ils ont eu une réaction quasi groupée pour éviter que les campagnes ne soient contaminées par le mouvement social », décrit l’historien. « Ils ont agi avec une grande finesse. J’ai été impressionné par la capacité mimétique de l’Église. Elle réalise que le centre névralgique du mouvement social est plutôt situé à Brest. Ça bouillonne à la Maison du peuple. L’Église veut faire la même chose. Les cléricaux lancent une souscription pour créer une maison du peuple catholique, une démarche originale quasi unique en France », complète-t-il.

 

 

Seuls 2 % à 3 % des 60 000 ouvriers agricoles se sont, à l’époque, syndiqués dans le Finistère

 

Cette souscription marchera très peu dans les milieux ouvriers. « Mais le courant passe et permet à la CFTC d’atteindre, par exemple, entre 6 000 et 7 000 adhérents. Ça crée des bases pérennes », note Jean-Paul Sénéchal. Dans le même esprit mimétique, « les agrariens de l’Office de Landerneau, réseau coopératif très puissant, créent un syndicat patrons-ouvriers, alors qu’ils ne parlaient jamais des ouvriers agricoles avant les grèves », observe Jean-Paul Sénéchal.

L’Office de Landerneau ira jusqu’à éditer des tracts à l’été 1936, distribués dans les campagnes. « Il arrive à syndiquer quelques milliers d’ouvriers agricoles aux côtés des employeurs. Évidemment, ça ne peut pas marcher, même si, de l’autre côté, la CGT ne parvient pas à recruter dans les campagnes. Seuls 2 % à 3 % des 60 000 ouvriers agricoles se sont, à l’époque, syndiqués dans le Finistère. Après la guerre cependant, la CGT va en syndiquer des milliers », expose-t-il.

 

« La droite est restée forte »

 

Le docteur en histoire a également décrypté les conséquences politiques du Front populaire dans un département alors ancré à droite. « Il y a eu des satisfactions à gauche avec l’élection du député Tanguy Prigent. Mais l’autre grande figure politique de l’époque à gauche, le Concarnois Pierre Guéguin (PCF) perd de peu les législatives en 1936 face au candidat de droite, parce qu’un radical-socialiste s’est maintenu », rapporte l’auteur.

« La droite est restée forte, grâce notamment à la puissance des agrariens dorgéristes, qui s’appuient parfois sur les chemises vertes fascistes ou en sont eux-mêmes. Grâce aussi à l’appui de l’Office central de Landerneau qui s’assure, en temps de crise, les services d’éléments de la droite nationaliste. La démocratie populaire perd du terrain, les socialistes maintiennent des bastions et le PCF commence à émerger », résume-t-il.

Quant aux acquis sociaux, « une minorité d’ouvriers urbains (hors arsenal) et ruraux ont obtenu des avantages ». Il leur faudra attendre l’après-guerre pour bénéficier de certaines avancées du Conseil national de la Résistance, inspirées ou héritées du Front populaire.

 

* Aux Presses universitaires de Rennes, 393 pages, 25 €.


Le Télégramme, 6 juin 2018

Lire aussi: 

 

Jean-Paul Sénéchal, un historien analyse ce que fut le Front Populaire dans le Finistère

Sortie fin mars du livre de Jean-Paul Sénéchal: le Finistère du Front Populaire, tiré de sa thèse, aux Presses Universitaires de Rennes

Le Front Populaire dans le Finistère: C'était 1936, le Front Populaire vu de Bretagne

 

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