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8 novembre 2017 3 08 /11 /novembre /2017 06:51
Humanitaire. Édouard, marin-pêcheur au secours des migrants

Septembre 2016. Édouard Courcelle effectue sa première mission humanitaire. À bord de l’Aquarius, le marin-pêcheur de Pleubian sauve des migrants en détresse en Méditerranée. Cette expérience bouleversante va changer sa vie. Il a décidé d’y retourner.

« En tant que marin, tu espères que si tu tombes à l’eau, quelqu’un te tendra la main ». Édouard Courcelle, 35 ans, est marin-pêcheur à Pleubian, dans les Côtes-d'Armor. Il pêche des coquilles Saint-Jacques et des homards. Mais, le 4 septembre 2016, il embarque, pour six semaines, sur l’Aquarius, bateau affrété par SOS Méditerranée et Médecins sans frontières. Pour tendre la main aux migrants. Pour leur sauver la vie.

« Comment en est-on arrivé là ? »

« En 2015, j’avais été choqué par les images de ces bateaux de migrants qui s’étaient retournés. Je me demandais ce qu’on pouvait faire ». Alors, avec ses compétences marines, acquises après une formation au lycée maritime de Paimpol (22), le Costarmoricain, originaire de Dijon (Côte-d’Or), veut aider. Au large des côtes libyennes, c’est le choc. « Une expérience bouleversante, qui marque ». Des migrants entassés sur des bateaux de fortune. Des enfants, des femmes enceintes et des bébés à l’agonie. Des corps flottants à la surface de l’eau. Depuis ses débuts au large de la Libye, en mars 2016, l’Aquarius a sauvé pas moins de 23.800 personnes, dont 15.500 depuis le début de cette année, parmi lesquelles 35 % de mineurs. « Comment en est-on arrivé là ? », s’interroge Édouard. « C’est l’enfer sur Terre. C’est fou ! ».

 

« Quand ils nous voient arriver, ils ne savent pas si nous sommes leurs amis ou ennemis », raconte le marin. « Ils sont en stress. Ils n’ont pas mangé, pas bu depuis longtemps. Leurs embarcations prennent souvent l’eau. Une grosse partie de notre challenge, c’est d’éviter la panique. Quand ils cèdent à la panique, leur bateau se retourne et c’est le carnage. Alors, on établit le contact avec un petit bateau pour leur expliquer qu’on est des sauveteurs mais que cela va prendre du temps. On leur donne des gilets de sauvetage. Puis, on commence par évacuer les personnes les plus vulnérables ». Les secouristes et humanitaires prennent en charge les personnes en grande détresse. « Ils viennent d’un peu partout en Afrique et arrivent en Libye avec des réseaux de trafiquants. Ils passent par des camps de rétention, où ils sont exploités, maltraités et violés. Puis, ils sont souvent poussés et contraints de monter à bord de ces embarcations. Ils n’ont pas le choix ».

J’ai l’impression d’être à ma place là-bas, d’être dans le vrai

Un an après cette expérience, les souvenirs sont intacts. « J’ai fait beaucoup de témoignages pour SOS Méditerranée. Cela m’a permis de structurer ma pensée. Mais quand j’arrive au point crucial de mon discours, à chaque fois, j’ai une émotion forte. Je suis au bord des larmes. J’ai la voix qui se ferme. L’émotion est toujours là ». À Pleubian, Édouard a repris son activité de pêcheur mais s’interroge. « J’aurais pu y retourner tout de suite. Mais cette expérience m’a changé d’une manière que je ne maîtrisais pas ». Il préfère prendre le temps de la réflexion. « J’étais révolté. Je voulais bousculer le système. On a tendance à politiser l’approche humanitaire. Mais, ce n’est pas bon, on doit juste être proche des gens. Les sauver, c’est notre devoir. Il faut faire les choses du mieux que l’on peut avec nos moyens ».

Une nouvelle mission de neuf semaines

Pour Édouard, « la réalité n’est pas toute rose mais le repli sur soi est le problème plus que la solution. Ce qu’il faut c’est tisser des liens ». Véritablement transformé, le marin a décidé d’arrêter la pêche à la fin de l’année pour se consacrer à l’humanitaire. « C’est un peu un aller sans retour de mettre les pieds dans ce monde. Tu ouvres les yeux sur une réalité que tu ne voyais qu’à la télé. Et, une fois que cela t’a touché, tu ne peux plus profiter du confort que tu as sans y penser. Tu n’oublies pas ». Le 11 janvier, il embarquera pour une nouvelle mission de neuf semaines de sauvetage en mer à bord de l’Aquarius. « J’ai l’impression d’être à ma place là-bas, d’être dans le vrai. C’est une réflexion profonde. Des vies humaines sont en jeu ».

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