D'après nos informations, le député Dominique Tian (LR), membre de l'équipe de campagne de François Fillon et grand pourfendeur de la fraude sociale et des “assistés”, fait l'objet d'une citation directe devant le tribunal correctionnel de Paris pour « blanchiment de fraude fiscale » et « omission dans sa déclaration de patrimoine ».
ns l’équipe Fillon (ou plutôt sa dernière version), Dominique Tian est chargé de plancher sur « le financement de la protection sociale ». Au sein de la droite, il passe en effet pour un expert de la lutte contre la fraude sociale et s’est fait une spécialité de pourfendre les assistés – pas tant les patrons qui omettent de payer leurs cotisations que les prestataires abusant des “allocs”, de la Sécu ou du RSA. Désormais, son discours aura plus de mal à passer.
D’après nos informations, le parquet de Paris a décidé, à l’issue d’une enquête préliminaire ouverte en 2015 sur signalement de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (Hatvp), de faire citer Dominique Tian devant le tribunal correctionnel pour « blanchiment de fraude fiscale » et « omission dans sa déclaration de patrimoine ». Pourra-t-il rester dans le prochain organigramme de campagne de François Fillon, en pleine recomposition ?
Également premier adjoint au maire de Marseille, ce dirigeant d’entreprises, longtemps proche de Bruno Le Maire, a en effet détenu des fonds en Suisse, non déclarés au fisc, de la fin des années 1990 jusqu’en 2014, date à laquelle il s’est décidé à les rapatrier via la « cellule de dégrisement » de Bercy – un dispositif de relative indulgence à l’égard des évadés fiscaux mis en place par le ministre Bernard Cazeneuve pour inciter ces derniers à rentrer.
Entretemps, en 2012, le député a rempli une déclaration de patrimoine muette sur ses actifs cachés à l'étranger, qui dépassaient alors 2 millions d’euros. C’est ce document, remis à l’ancêtre de la HATVP, qui se retrouve aujourd'hui dans le viseur de la justice, épaulée dans ce dossier par les enquêteurs de l'Office central de lutte contre les infractions financières et fiscales (OCLCIFF). Sollicité mardi 7 mars par Mediapart, Dominique Tian nous a simplement répondu qu'il n'avait « aucune information » sur la procédure en cours.
« Ce compte en Suisse a été ouvert par mon père, tentait-il de relativiser en 2015, lorsque nous l'avions interrogé. C'est un héritage. On l'a appris tardivement. C'était compliqué à gérer, comme dans toutes les familles. La procédure Cazeneuve est faite pour ça. » Après l'héritage, il s'est toutefois passé plus d'une décennie avant qu'une régularisation soit entreprise. Pire : les fonds répartis entre plusieurs banques ne seraient pas restés dormants, loin de là. Au-delà d’un éventuel redressement fiscal, Dominique Tian devra donc s’expliquer, en prime, à la barre d’un tribunal correctionnel et en audience publique.
Avant d’apprécier les faits, les juges pourront d’ailleurs consulter la prose du député lui-même. Dans un rapport d’information sur la fraude sociale, Dominique Tian écrivait en effet ces mots définitifs : « La fraude (…) ne constitue pas seulement une perte de ressources très importante et une masse considérable de dépenses injustifiées pour nos finances (…), elle est aussi source d’injustice, de déséquilibre économique et plus fondamentalement elle sape la confiance des assurés dans notre système de protection sociale (…). Nos concitoyens, à juste titre en ces temps de crise, ne l’acceptent plus. »
En avril 2016 déjà, un autre parlementaire anciennement détenteur d'un compte en Suisse, le sénateur Bruno Sido (LR), a été condamné à six mois de prison avec sursis et 60 000 euros d’amende pour « blanchiment de fraude fiscale » et « omission dans sa déclaration de patrimoine ». À l’issue d’une procédure de plaider-coupable à la française (comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité), Bruno Sido a cependant échappé à toute peine d’inéligibilité et retrouvé son siège au palais du Luxembourg. À vrai dire, il ne l'a même jamais quitté.
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