Le Mouvement Breton du XIX ème siècle jusqu'à la Seconde Guerre Mondiale : une chronologie
par Ismaël Dupont
Le premier Emsav
L'Emsav est un terme qui suppose l'idée d'un soulèvement, d'un relèvement. Il désigne le Mouvement breton, la revendication culturelle, régionaliste ou nationaliste bretonne. La première époque de l'Emsav, qui court du début du XIXe siècle à la Grande Guerre, a été marquée par l'essor d'un patriotisme littéraire breton d'essence romantique et souvent critique vis-à-vis des Républicains ou carrément contre-révolutionnaire, nostalgique d'une Bretagne mythifiée d'Ancien Régime et du Moyen-Age dont le peuple bretonnant aurait gardé les vertus en même temps que la foi, et par des mouvements régionalistes conservateurs regroupant surtout des notables comme l'Association bretonne puis l'URB (Union régionaliste bretonne). En même temps, des tentatives émergent aussi ça et là, liées à des personnalités singulières, pour faire sortir le mouvement revendicatif breton de sa gangue conservatrice.
1839 : publication du Barzaz Breiz
Le marquis Hersart de la Villemarqué, né à Quimperlé et ayant grandi à Pont Aven, diplômé de l'école des Chartes, devenu barde au Gorsedd gallois en 1838, publie la première version de son anthologie de chants populaires de Bretagne. Hersart de la Villemarqué en collectant et retravaillant une riche littérature orale bretonnante à dimension historique et patriotique entend redonner la fierté de leurs origines aux Bretons.
1855 : création de l'Académie bardique.
Les fondateurs, Hersart La Villemarqué, François-Marie Luzel, collecteur de contes et de chansons populaires, et le poète Jean-Pierre Le Scour, ancien séminariste, huissier puis greffier à Morlaix, organiseront aussi ensemble en 1867 à Saint-Brieuc le second congrès inter-celtique.
1890-1893 : cours sur l'histoire de la Bretagne d'Arthur de La Borderie à la faculté des lettres de Rennes.
Le 4 décembre 1890, en ouvrant son cours d'Histoire de la Bretagne, l'avocat vitréen diplômé de l'école des Chartes fait sensation en déclarant : « La Bretagne est mieux qu'une province, elle est un peuple, une nation véritable et une société parfaitement distincte dans ses origines, parfaitement originale dans ses éléments constitutifs ». Politiquement, le conseiller général d'Ille-et-Vilaine et député La Borderie était monarchiste et conservateur.
13 août 1898 : naissance de l'URB - l'Union régionaliste bretonne.
L'URB est crée à l'issue d'un « Appel au peuple breton » proclamé à l'hôtel de ville de Morlaix. Son manifeste reconnait l'unité française mais réclame le droit à une « vie régionale ». Il est signé par des écrivains comme Anatole Le Braz, des artistes, des ecclésiastiques et des industriels. L'URB compte bientôt environ un millier d'adhérents, parmi lesquels des noms aussi importants pour la culture bretonne que Charles Le Goffic, ou François Vallée. Régis de l'Estourbeillon, député anti-dreyfusard et traditionaliste de Vannes, devient le président de l'URB en 1902 et le restera jusqu'à sa mort en 1946. Le député Albert de Mun est lui aussi un des membres importants de l'URB.
1901 : création du Gorsedd (assemblée) des druides, bardes et ovates de Petite-Bretagne.
Il est dirigé par le druide Taldir Jaffrennou à l'issue du Congrès de l'URB de Guingamp. Ses pratiques rituelles et ses costumes s'inspirent du collège bardique gallois. Taldir Jaffrenou adapte d'un chant gallois le Bro Gozh va Zadou (« Vieux pays de mes pères »), publié la première fois en 1898 dans l'hebdomadaire de droite catholique La résistance de Morlaix.
1903 : congrès de Lesneven de l'URB
La déclaration de ce congrès de l'URB est éloquente sur les présupposés conservateurs du premier Emsav : « Nous ne faisons pas de politique, nous faisons seulement œuvre de préservation sociale ». L'URB fonctionne comme un groupe d'influence et de concertation et rassemble surtout des notables du monde rural attachés à la défense des intérêts bretons et de l'ordre social traditionnel, et qui veulent s'opposer à la pénétration des idées socialistes, modernistes et laïques dans le milieu rural.
1905 : création du Bleun-Brug (Fleur de Bruyère) par l'abbé Jean-Marie Perrot.
En plein contexte de séparation de l’Église et de l'Etat, l'association culturelle bretonne née au Château de Kerjean se donne pour tâche d'associer et de défendre l'une par l'autre la langue bretonne et la religion catholique. Jean-Marie Perrot, né à Saint-Vougay en 1877, choisit la bruyère pour symboliser la ténacité bretonne. A ses côtés, collaborent le comte Charles de Coatgouderen, propriétaire du château de Kerjean, le comte Gaston de Kermenguy de Cléder, et le comte Albert de Mun, député du Finistère très conservateur qui affronte Jaurès à la Chambre lors de nombreuses joutes oratoires, notamment à l'occasion du débat sur la laïcité.
1907 : naissance du KLT.
Les parlers de Cornouaille, Léon, Trégor sont fédérés sous l'impulsion de Vallée et Le Roux ( Meven Mordiern) pour donner naissance au KLT (Kerne, Leon, Tregor). Le breton vannetais reste alors isolé, se développant de manière indépendante autour du journal Dihunamb de Loeiz Herrieu, tandis que la plupart des autres organes de presse indépendants, particulièrement ceux des régionalistes et nationalistes, utiliseront désormais le KLT.
1911 : Jean-Marie Perrot prend la direction de Feiz ha Breiz (Foi et Bretagne),
Cette revue fondée en 1865 par l'évêché de Quimper, interrompu en 1884 et relancée en 1899, sera animée par l'abbé Perrot jusqu'à sa mort en décembre 1943. Avant guerre, Feiz ha Breiz compte 7000 lecteurs. En 1939, le nombre de lecteurs, signe d'une certaine déchristianisation déjà, tombera à 1500. L'idéologie de la revue était catholique traditionaliste mais le militantisme breton s'y affirmera de plus en plus. Un article de Jean-Marie Perrot dans la revue en avril 1907 donne le ton : « Va gouenn, va yez, va bro » : ma race, ma langue, mon pays.
Juillet 1911 : scission au sein de l'URB et création de la FRB (Fédération régionaliste de Bretagne).
Sous l'impulsion du collecteur de contes lorientais Yves Le Diberder, du poète fouesnantais d'origine irlandaise Joseph Parker et de l'industriel Jean Choleau, une partie des militants de l'URB conteste au congrès de Saint Renan l'orientation passéiste, conservatrice, folklorique de l'URB. Ils veulent rendre compatible l'engagement pour la culture et la dignité bretonne avec les idées républicaines, la modernité, et une action revendicative plus efficace pour l'usage public de la langue bretonne et pour le développement économique de la Bretagne et la décentralisation. La Fédération Régionaliste de Bretagne créée à Rennes quelques mois après la scission de l'URB au congrès de Saint Renan compte un peu plus d'une centaine d'adhérents en 1911, moins de prêtres et de nobles, plus de professions libérales et intellectuelles des villes que l'URB. Parmi les créateurs de la FRB, on trouve aussi des bardes comme Berthou et Jaffrennou qui veulent rénover la celticité par un retour au paganisme druidique. De nouveaux et jeunes militants viennent à la FRB, qui s'illustreront dans le mouvement nationaliste et culturel de l'entre-deux guerres : Maurice Duhamel, Camille Le Mercier d'Erm, Emile Masson, le grammairien et lexicographe François Vallée, le collecteur de contes lorientais et défenseur du dialecte vannetais Loeiz Herrieu. La FRB entrera en déclin à partir de 1923 et sa revue, Le Reveil breton, disparaîtra en 1929.
Juillet 1912 : création de la revue Breiz dishual (Bretagne libre).
Breiz dishal est la revue du premier PNB. Ce Parti nationaliste breton créé par Camille Le Mercier d'Erm, le poète et druide Joseph Duchauchix et Louis-Napoléon Le Roux (à distinguer du second PNB, Parti National Breton), naît à l'issue de l'inauguration du « monument de honte » à Rennes en octobre 1911. Scandale fondateur : avec le maréchal Lyautey comme invité de marque, la cérémonie d'inauguration du monument de l'artiste Boucher célébrant dans une niche de la mairie de Rennes l'union de la Bretagne à la France, par une sculpture représentant Anne de Bretagne à genoux devant le roi de France, est perturbée par les sifflets puissants et le tapage réprobateur de Camille Le Mercier d'Erm. Le PNB rejette la plate-forme de revendication de réorganisation administrative du régionalisme comme une manière de ratifier la dépendance de la Bretagne : « le régionalisme, si l'on veut bien y prendre garde, n'est en somme, en ce qui concerne la Bretagne, que l'affirmation de l'emprise étrangère ». Ce premier PNB, dont l'existence éphémère s'achève à l'été 1914, entend prioriser le combat national, passant par l'enseignement des deux preuves et supports de la nationalité bretonne, l'Histoire et la langue, sur l'affrontement entre républicains et traditionalistes ou réactionnaires. Le PNB et son journal ne survivent pas à la première guerre mondiale.
1913 : création de la revue Brug par Emile Masson.
Cette revue libertaire bilingue, créée par le professeur d'anglais de Pontivy Emile Masson, socialiste révolutionnaire qui a signé l'appel de Camille Le Mercier d'Erm pour la constitution d'un Parti nationaliste Breton en 1912, veut répandre partout en Bretagne « les paroles émancipatrices des Reclus, Ibsen, Tolstoï, Proudhon, Renan, Kropotkine ». La revue s'arrêtera au bout de 19 numéros en 1914.
Avril 1916 : la Pâques irlandaise.
La prise de la Grande Poste de Dublin qui lança la révolution au pays de Padraig Pearse et de James Connolly, sera un modèle pour une nouvelle génération, plus révolutionnaire et radicale, de militants nationalistes bretons. L'insurrection irlandaise reçoit le soutien de François Vallée et Taldir Jaffrennou. Leur journal Kroaz ar Vretoned est suspendu, du fait de l'alliance franco-anglaise. A quatorze ans, le jeune François Debauvais, fils d'un préparateur en pharmacie et d'une mère qui faisait les marchés, colle déjà des papillons « Vive l'Irlande » sur les WC publics de Rennes par enthousiasme pour le soulèvement irlandais contre la domination britannique. La révolution irlandaise et l'IRA constitueront des sources d'inspiration durables pour le mouvement nationaliste breton.
1914-1918 : la Grande Guerre.
Environ 130 000 Bretons des cinq départements ont trouvé la mort pendant la guerre (22 % des appelés, contre une moyenne de 17 % des appelés pour l'ensemble des victimes militaires françaises du conflit). Toutes les familles bretonnes sont endeuillées. Elles voient revenir beaucoup de survivants abîmés, traumatisés et handicapés. La guerre et les tranchées qui ont fonctionné comme grand creuset de la découverte de l'autre et de la formation d'une « culture moyenne » française, accélèrent l'acculturation. Cela n'est pas sans générer d'innombrables dégâts psychologiques causés par les deuils, les absences et les personnalités meurtries, les problèmes de transmission aussi. La génération trop jeune pour partir à la guerre va vivre un véritable désarroi ou complexe identitaire, entre un sentiment d'infériorité (par rapport aux pères et aux frères qui ont combattu), une absence des pères parfois, un besoin d'affirmation guerrière, un rejet des institutions qui ont accompagné le désastre, une suspicion vis-à-vis des valeurs officielles et patriotiques traditionnelles, une idéalisation du sacrifice, une mystique de l'engagement porteur de renouveau radical des valeurs et de la société. Si dans l'immédiate après-guerre, la victoire et l'ampleur des sacrifices accomplis pour la Patrie rendent particulièrement déplacés et inaudibles tout propos autonomiste ou séparatiste breton, l'ampleur des pertes chez les Bretons et l'idée qu'on les a sacrifiés en priorité en première ligne sur le front comme de la chair à canon négligeable (on parle dans l'après guerre de 200.000 à 250.000 poilus bretons tués) vont servir un peu plus tard dans l'entre-deux guerres de puissants moyens de propagande pour le mouvement nationaliste breton naissant.
Le second Emsav
Cette époque du mouvement régionaliste et nationaliste breton qui conduit d'une guerre à l'autre se caractérise par l'entrée en scène d'une jeune génération plus radicale, moins conservatrice, porteuse, non d'une nostalgie et d'une ambition de retour à un âge d'or, mais de projets politiques modernes en lien avec les idéologies du temps, plurielles et contradictoires. Certains de ces militants seront séduits dès les années 30 par un nationalisme dur, et verront dans le fascisme et le nazisme une source d'inspiration. D'autres possibles existent pourtant, incarnés par les engagements internationalistes, progressistes, pacifistes d'autres militants de l'Emsav. Mais pendant la guerre, à quelques rares exceptions, le mouvement breton va basculer dans une collaboration multiforme qui prendra, pour une petite centaine d'individus, la forme extrême d'une lutte armée au côté des Allemands contre la Résistance.
Septembre 1918 : création du groupe régionaliste breton
Morvan Marchal, son frère cadet Yves, Joseph Boreau de Roincé, vingt-deux ans, hobereau du Haut-Léon, Saig Le Goff, ancien combattant comme Job de Roincé, Goulven Mazéas, Yann Karof, Prado, Deschars, Losquin, sont les membres fondateurs du groupe et de la revue Breiz Atao. Camille Le Mercier d'Erm et Job Loyant, venant du PNB, les rejoignent.
La première réunion de Breiz Atao, sous la présidence de François Vallée, a lieu à Saint-Brieuc dans un local prêté par l'Action Française.
Le leader du groupe, « l'homme du destin » selon Olivier Mordrelle (qui bretonnisera vite son nom en « Olier Mordrel »), est Maurice (dit Morvan) Marchal, passionné de chouannerie.
Marchal, étudiant aux Beaux Arts de Rennes, aspirant architecte, visage poupon, vêtu d'un costume bas-breton, est le fils d'un contrôleur des postes d'origine lorraine. Il est cultivé, créatif, impétueux, enthousiaste, et érudit en traditions bretonnes.
En dehors du Bigouden Youen Drezen, ancien séminariste, Morvan Marchal est en 1919-1920 le seul jeune du groupe des jeunes turcs de Breiz Atao à connaître quelques phrases de breton et il maîtrise surtout excellemment l'histoire et le folklore.
Il produit une très forte impression sur deux jeunes recrues rencontrées au début de l'année 1919 et appelées à jouer un grand rôle dans le mouvement breton d'entre-deux-guerres : François Debeauvais (dit Fransez Debauvais) et Olivier Mordrelle. Ce dernier, tout juste sorti du lycée avec une solide culture classique et rhétorique, a dix-huit ans. Il prépare l'école des Beaux-Arts. C'est le fils d'un général de l'armée coloniale originaire de Plerguer, près de Dol-de-Bretagne, maurassien et marié à une descendante d'une grande famille corse. Olivier Mordrelle a passé sa prime jeunesse rue de Grenelle et les écoles réputées des beaux quartiers de Paris avant d'arriver à Rennes pour y finir ses années de lycée.
Janvier 1919 : premier numéro de Breiz Atao (Bretagne toujours!)
La revue du « Groupe régionaliste breton », préparée au domicile de Morvan Marchal, au n°4 Place de Bretagne à Rennes, n'est pas tirée à plus de 500 exemplaires et ne compte qu'une cinquantaine d'abonnés en 1919. Le texte inaugural écrit par Marchal intitulé « Ce que nous sommes » évoque les buts du « Groupe régionaliste breton » : « travailler activement au relèvement de la Patrie bretonne », « veiller à la conservation de la langue, des costumes et des traditions bretonnes », « unir plus fortement Haute et Basse-Bretagne », « développer des liens d'amitié entre les peuples celtes », obtenir « l'autonomie administrative » de la Bretagne. Morvan Marchal désigne comme adversaire le socialiste jacobin et anti-clérical morlaisien, Yves Le Febvre, contempteur du caractère régressif des traditions populaires bretonnes. Les auteurs de Breiz Atao se décrivent encore « régionalistes »: « Ce que nous sommes. Régionalistes parce que bons Français et même d'excellents Français ».
Mai 1920 : Breiz Atao devient l'organe de l'UYV, l'Unvaniez yaouankiz vreiz, l'Union de la jeunesse bretonne
Le nom du nouveau mouvement est né d'un heureux hasard : « Notre bonne fée voulut que notre aîné Fanch Gourvil nous fît cadeau d'un lot de magnifiques insignes émaillés, qui avaient été commandés pour une Unvaniez laouankis Breiz restée au paradis des bonnes intentions bardiques, sur lesquels se détachait une branche de gui » (Olier Mordrel). Fanch Gourvil, né à Morlaix en 1889, ancien tailleur, journaliste pour Ar Bobl de Taldir Jaffrenou, est alors libraire à Morlaix. Il écrit pour Breiz Atao. A partir de 1921, Breiz Atao se démarque du régionalisme et affirme son nationalisme. De 1921 à 1924, Breiz Atao aura pour gérant Debauvais, initié à la langue bretonne par Fanch Eliès (Abeozen), professeur agrégé de lettres et fils d'un terrassier de St Sauveur, et Youen Drézen.
Septembre 1923 : naissance du mouvement culturel et artistique des Seiz Breur
« Les sept frères », référence à un conte en gallo de Jeanne Malivel daté de 1920, étaient les « Sept Saints fondateurs de la Bretagne » : Brieuc, Malo, Samson, Patern, Corentin, Pol Aurélien et Tugdual. Le mouvement, qui regroupera une cinquantaine d'artistes, se forme d'abord autour de Morvan Marchal, de René-Yves Creston, de Fanch Elies, de Youen Drezen et Xavier de Langlais. Ce groupe d'artistes bretons régionalistes entend dépoussiérer la culture bretonne, renouveler les arts en Bretagne en réinterprétant et actualisant des motifs celtiques. Il veut créer un art national moderne renouvelant et réinterprétant la tradition bretonne et celtique, travaillant aussi dans les domaines réputés mineurs des arts appliqués, de l'artisanat et de la production d'objets utilitaires. Une figure emblématique de ces Seiz Breur est la peintre et illustratrice Jeanne Malivel, née à Loudéac, élève de l'atelier d'art sacré de Maurice Denis. Jeanne Malivel prend une part importante à la conception du pavillon breton pour l'Exposition des arts décoratifs de Paris en 1925. Elle décède peu de temps après à Rennes en septembre 1926, âgée de 31 ans. C'est René-Yves Creston qui prend la responsabilité des Seiz Breur par la suite. Le Nazairien, ethnologue et artiste, créera en 1929 la revue artistique Kornog (l'ouest ou l'occident).
Février 1925 : Roparz Hemon lance la revue Gwalarn
Roparz Hémon, anagramme bretonnisé de Louis Paul Némo pour l'état civil, a 25 ans quand il fonde Gwalarn. Préparant l'agrégation d'anglais en 1924-1925 à Paris et logeant dans le même hôtel que Mordrel qui préparait son diplôme d'architecte à l'école des Beaux-Arts, il écrivait déjà dans Breiz Atao. Gwalarn, c'est le "Noroît", le vent de nord-ouest.
Gwalarn est d'abord supplément littéraire en breton au journal Breiz Atao avant de devenir une publication indépendante en juillet 1926, puis une publication mensuelle en 1930.
Gwalarn fait travailler de grands écrivains bretons : Fanch Elies-Abeozen, Youen Drezen, Jakez Riou. Mais la revue qui compte bientôt 300 abonnés touche surtout les néo-bretonnants. Elle paraîtra jusqu'en 1944 et 165 numéros furent publiés. La direction de Gwalarn prend en charge une maison d'édition et des publications annexes : Eschyle, Tchekhov, Edgar Poe, Cervantès, les frères Grimm sont traduits en breton, comme des traités et manuels scientifiques, des ouvrages de littérature générale... Gwalarn rompt aussi avec la tradition du bilinguisme, et de la promotion de la culture bretonne en français. Au moment où le druide Taldir Jaffrennou écrit dans l'Ouest-Eclair qu'aucun homme de bon sens n'aurait formulé « l'énormité qui consisterait à vouloir proscrire le français », Roparz Hémon, professeur d'anglais au lycée de Brest, s'élève contre les timidités du bilinguisme : « Tuons le français, ou le français nous tuera. » Il est vrai que lors de l'inauguration du pavillon breton de l'exposition des Arts décoratifs, à Paris, en 1925, le ministre de l'Instruction publique pouvait ainsi déclarer sans voile : « pour l'unité linguistique de la France, la langue bretonne doit disparaître ».
10 et 11 septembre 1927 : création du Parti Autonomiste Breton (PAB)
L'UYV se transforme en un parti politique véritable, le Parti autonomiste breton (PAB) à l'occasion du congrès de Rosporden.
La revue Breiz Atao et le mouvement politique UYV connaissaient des grosses difficultés financières. Debauvais est malade, Marchal en retrait. Instable, fantasque, penché sur la consommation d'alcool, il a démissionné de Breiz Atao à plusieurs reprises, dont la première fois en 1921, avant d'y revenir. C'est Mordrel, depuis Guingamp, où il vend des aspirateurs à domicile, et a installé la documentation du journal dans une chambre d'hôtel, et son cousin Yann Bricler, depuis Le Havre, qui organisent à grand peine ce congrès de Rosporden.
Les effectifs de l'UYV ou de Breiz Atao sont alors très faibles comparés, par exemple, aux 1500 à 2000 militants des Ligues d'extrême-droite nationalistes en Bretagne en 1926-1927 : 80 militants environ.
Le congrès de Rosporden adopte pour drapeau breton le gwenn-ha-du conçu par Morvan Marchal en 1922 sur le modèle du drapeau américain : neuf bandes, cinq noires pour les cinq évêchés de la Haute-Bretagne et quatre blanches pour ceux de la Basse-Bretagne. Les hermines, les couleurs blanches et noires étaient les symboles utilisés par les souverains bretons depuis le XIIIe siècle.
Le nouveau Parti Autonomiste Breton se fixe un but : la Bretagne aux Bretons !
Sont présents au congrès des autonomistes bretons des nationalistes irlandais, gallois, flamands, corses, tchécoslovaques, et des Alsaciens promis à un avenir sulfureux : Hermann Bickler et Hans-Otto Wagner, futurs dirigeants nazis. Bickler deviendra haut gradé des services de renseignement de la SS en France pendant l'occupation, puis chef de la Gestapo à Paris. Wagner, étudiant autonomiste en 1927, deviendra responsable des services de renseignement militaires de l'Abwerh, collaborateur à ce titre de l'Institut d’Étude Celtique, faux nez des services de renseignement.
Toutefois, avant le début des années 30, personne à Breiz Atao ne défend le nazisme ou les idées fascistes et racistes. Le groupe situe son combat politique dans la visée d'un fédéralisme européen et d'un anti-impérialisme fondé sur l'idée démocratique et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
La dimension panceltique du combat breton apparaît alors moins prometteuse que la réunion avec les nationalistes alsaciens, corses et flamands dans le cadre d'un Comité central des Minorités nationales de France, tout comité qui est inauguré au terme du Congrès au café de l'Epée de Quimper, le 12 septembre 1927.
Morvan Marchal et Olier Mordrel sont nommés co-présidents du nouveau Parti autonomiste Breton. Fransez Debauvais est l'administrateur du journal Breiz Atao. Un conseil politique et de rédaction est aussi nommé avec notamment Maurice Duhamel, le critique musical de Breiz Atao, et Yann Sohier, deux hommes de gauche proches de la mouvance communiste. De 800 exemplaires imprimés en 1927, Breiz Atao va passer de 2000 ou 3000 exemplaires tirés en 1928. Le congrès de Rosporden marque le début d'une dynamique de construction prometteuse pour les autonomistes.
Parmi les nouveaux militants qui rejoignent le PAB au congrès de Rosporden, deux jeunes appelés à jouer un grand rôle par la suite dans le Mouvement Breton : Célestin Lainé, de Ploudalmézau, alors étudiant à Navale à Brest, et Raymond Delaporte.
Août 1928 : le congrès de Châteaulin fixe l'orientation doctrinale du PAB
Le Parti autonomiste breton, qui ne compte toujours pas plus d'une centaine d'adhérents actifs, affirme l'existence d'une nation bretonne et le droit qu'elle a de disposer d'elle-même à travers une autonomie législative et administrative dans le cadre d'une structure fédérale européenne. Comme à Rosporden, de nombreuses autres minorités nationales ont été invitées. Le PAB demande la création d'un Parlement Breton, c'est à dire d'une assemblée législative élue, dont un exécutif serait issu, et la suppression des départements. A la suite des autonomistes alsaciens, soutenus à l'époque par le Parti Communiste, le PAB milite pour changer la constitution française afin de l'adapter aux réalités régionales. On décide de lancer Breiz Atao comme hebdomadaire. Le 29 octobre 1929, l'Imprimerie de Bretagne est créée, à la grande satisfaction de Debauvais qui sillonne la Bretagne à la recherche de souscripteurs. Debauvais se fait rémunérer par cette Imprimerie.
11 et 12 avril 1931, éclatement du PAB au congrès de Rennes
Debauvais est mis à l'écart, lui qui avait convoqué ce Congrès extraordinaire à l'hôtel Moderne, suite à la démission de Duhamel et à une campagne interne qui l'accusait de la déroute financière d'un journal qui ne paraissait plus depuis deux mois. Mordrel démissionne avec lui. Le Congrès nomme un nouveau Comité de rédaction, avec une majorité au courant fédéraliste de gauche, dirigé par Ronan Klec'h et soutenu par Morvan Marchal.
Debauvais reste néanmoins secrétaire du PAB et refuse de remettre à ses successeurs la comptabilité du journal. On sous-entend en face de lui qu'il aurait pu puiser dans les caisses, les frais normaux du journal n'expliquant pas un déficit de 130 000 francs en deux ans. La nouvelle direction du PAB, pour ne pas avoir à assumer les dettes de l'imprimerie de Breiz Atao, décide de saborder le journal et de créer à la place La Nation bretonne (gardant « Breiz Atao » en sous-titre) dont le premier numéro paraît le 7 juin 1931. Les sections de Paris et d'Angers, les plus nationalistes, s'indignent, parlent de coup d’État.
Mai-juin 1931 : création de Gwenn-ha-Du
Gwenn-ha-Du naît... à Paris, boulevard Saint Michel. Célestin Lainé, ingénieur chimiste sorti de Centrale, qui fait encore son service militaire comme sous-lieutenant de réserve à l'école d'Artillerie, est l'inspirateur et le chef de ce groupe terroriste. Autour de lui, son frère Albert, Meavenn, Francis Bayer du Kern, Yves Delaporte, Robert Merle, Girard,, Guillaume Berthou, et quelques autres. Ce groupe prend la suite de l'éphémère Kentoc'h Mervel (Plutôt mourir...), issu de la radicalisation d'une partie des jeunes Étudiants bretons après le congrès de Saint-Brieuc en 1930. Inspiré par le Sinn Féin, Kentorc'h Mervel était un groupe secret très hiérarchisé fondé en 1929 par Célestin Lainé et Guillaume Berthou, ingénieur chimiste lui aussi, et qu'avaient rejoint les frères Cattelliot, Théophile Jeusset, et Armand Girard. Meavenn rejoignit le groupe en novembre 1930, comme Bob Le Helloco. Lainé avait déclaré dissoute la société secrète Kentoc'h Mervel quand Jeusset avait quitté le PAB pour fonder Breiz da Zont. Meavenn, brestoise de Saint-Marc exilée à Paris pour y suivre des études en Sorbonne (notamment d'irlandais) tout en travaillant dans les Postes, avait 19 ans à l'époque. Elle milite déjà depuis six ans pour l'UYV, puis pour le PAB. C'est une très belle femme. Elle est probablement la fiancée de Célestin Lainé. En août 1931, elle part quelques semaines en Irlande où elle prend contact avec le trégorois Louis-Napoléon Le Roux, un des signataires du manifeste du premier PNB en 1911, qui est devenu depuis citoyen britannique proche du Sinn Féin, et Franck Ryan, qui prit part aux combats de la guerre civile, puis devint adjudant de la Brigade de Dublin. Ce voyage permet à Meavenn de développer ses compétences en matière de propagande et de suivre des stages d'activisme. Elle en revient en juin 1932, juste avant l'attentat de Rennes, et deviendra une des belles plumes de Gwalarn et de Breiz Atao.
Avril 1930 : échec des candidats autonomistes aux élections législatives
Goulven Mazéas, candidat présenté par le PAB dans la deuxième circonscription de Guingamp, négociant en pommes de terre, ne recueille que 2 % des voix (376 voix sur 16 777) malgré une campagne de trois semaines très active (80 réunions), animée en particulier par Debauvais et Mordrel. A l'élection législative partielle de Rennes Sud, le candidat du PAB, Ronan Arot, fait encore moins bien : 81 voix sur 16 088 ! Ces résultats piteux et leurs conséquences financières vont créer des divisions, une remise en cause de la voie démocratiques chez certains autonomistes qui envisagent alors d'autres stratégies pour servir leur cause.
Octobre 1930, les thématiques du fascisme s'invitent au congrès du PAB de Saint-Brieuc
L'avocat parisien Philippe Lamour, futur père de la Datar (Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale), passé par l'Action française, par le Faisceau de Georges Valois (dont il fut exclu en 1928) puis par un éphémère Parti fasciste révolutionnaire, est introduit au PAB et clôt le congrès par un discours qui remet en question la voie électorale et démocratique, prône une culture révolutionnaire basée sur une ambition d'hégémonie idéologique s'affirmant d'abord vers et par les « élites ». L'architecte quimpérois Olier Mordrel réclame un tournant « à droite toute » du PAB vers le « nationalisme exclusif ». A l'inverse, Marchal et Duhamel veulent le dépassement du « nationalisme de clocher » et une vision fédéraliste internationaliste enracinée dans les valeurs de gauche et de progrès.
Novembre 1930, création de la revue d'extrême-droite Breiz da Zont
Théophile Jeusset, alors élève de l'Ecole des Beaux-Arts de Rennes, lance cette revue nationaliste au nom signifiant « Bretagne à venir » ou « Bretagne de demain » sous une triple inspiration « séparatiste, nationaliste et catholique ». Avec Maurice (Morvan) Lebesque, un jeune et ardent instituteur nantais révoqué après un passage difficile en Brière, permanent sur une très courte période du PAB avant sa rupture avec Debauvais, et Henri Quilgars, le maire de Piriac, il crée avec un Parti Nationaliste Intégral de Bretagne qui se réclame du nazisme, puis du monarchisme à partir de 1932. Au Congrès de Breiz da Zont, « la salle des séances avait reçu... une décoration originale... Sur une tenture d'un vert espérance, le Juif, figuré par un épervier, avait été cloué, tenant le globe entre ses serres. Au-dessus la croix gammée victorieuse » (Breiz da Zont, n°2).
Février 1931 : fondation de la revue Adsao (« Relèvement ») par l'abbé Madec
Dissident du Bleun-Brug et de Feiz Ha Breiz, François-Marie Madec crée Adsao, une revue conservatrice dans la lignée de l'URB, mais plus revendicative sur les questions bretonnes, qui donne son nom aussi à un mouvement qui compterait au début des années 1930 autour de 6000 adhérents (mais la cotisation est facultative). Le conseiller général d'Ouessant, Pierre Mocaër est membre d'Adsao. Après la journée des Ligues d'extrême-droite du 6 février 1934, l'Adsao s'allie à des organisations d'anciens combattants et s'engouffre dans une lutte anti-communiste aux accents facistes. Quand l'abbé Madec meurt en 1936, son mouvement est déjà absorbé par celui des anciens combattants.
Juillet 1931 : le bulletin War Zao devient l'organe du Parti Nationaliste Révolutionaire Breton
Dans la région guingampaise, le groupe de Loeiz Derrien, essentiellement composé d'ouvriers, s'autonomise d'un PAB affaibli et divisé, et réussit à rendre populaire dans la région le bulletin War Zao, plus que jamais engagé dans la lutte sociale et teinté de marxisme. Le bulletin connaîtra ensuite une seconde vie en étant réutilisé par les avant-gardes bretonnes et régionalistes du Parti Communiste sous l'orthographe War Sao. Ce sera alors le bulletin des « Bretons émancipés » de la région parisienne proches du Parti Communiste et du Front Populaire, où collaborera l'écrivain Fanch Elies-Abeozen à partir de sa création en 1937, écrivain de gauche à cette époque, proche de Marcel Cachin dont il revoit les discours en breton, animateur du Secours-Rouge de Saint-Brieuc avec Louis Guilloux qui organise avec lui l'aide aux réfugiés républicains espagnols. Le groupe guingampais de Derrien, ancien membre du conseil politique du PAB, est actif dans le Trégor et participe avec les communistes à la lutte contre les ventes-saisies dans le domaine agricole.
Août 1931 : création de la Ligue fédéraliste de Bretagne
Les fédéralistes « de gauche » du PAB décident à Saint-Malo de créer cette Ligue fédérale de Bretagne. La LFB se veut démocrate, décentralisatrice, internationaliste et pacifiste: en font partie Mazéas, Marchal, Creston, Klec'h, Gefflot, Duhamel, Elies-Abeozen et d'autres. Ce mouvement va vite entrer en léthargie. Lors de leur congrès de Dol, en août 1932, on ne compte que 17 fédéralistes présents. La Ligue fédérale de Bretagne n'est pas un parti: la double appartenance est acceptée. Par exemple, Morvan Marchal, qui s'est rapproché du Grand Orient, sera aussi membre du Parti radical socialiste. La Ligue fédérale de Bretagne ne rassemblera qu'un quart environ des adhérents du PAB, soit une centaine d'adhérents. Son lieu d'implantation géographique est plutôt la Haute-Bretagne et Paris. La nation bretonne cesse de paraître fin août, bientôt remplacée par La Bretagne fédérale en novembre 1931. La Bretagne Fédérale sera un journal anticlérical marqué à gauche. Ce journal pacifiste, fédéraliste, qui prend le parti de « la Bretagne rouge contre la Bretagne blanche » paraîtra vingt et une fois en trois ans et demi.
Le 27 décembre 1931, création du PNB au congrès de Landerneau
Les délégués de ce mini-congrès ne sont que vingt-cinq. Ils font le procès de la politique suivie depuis le Congrès de Rosporden de 1927, marquée selon eux par trop de participation à la politique nationale, trop d'internationalisme fédéraliste, pas assez de formations des cadres, d'enseignement de la langue, d'organisation locale. Le PNB revient à un nationalisme étroit, sans programme politique international ni programme économique, se bornant à réclamer pour la nation bretonne des droits remis à cause par la domination française. L'ancienne direction du PAB est partiellement désavouée, même si Debauvais continue à travailler au nouveau journal Breiz Atao. Mordrel n'est pas présent lors des débuts de ce second PNB, désormais dirigé par les frères Delaporte. Il cesse de contribuer à Breiz Atao après avoir dit qu'il « se retirait de l'action politique pour des raisons familiales et professionnelles » puis il part en Allemagne, où il est reçu par Robert Ernst. Breiz Atao, à l'issue de ces mois de heurts et de divisions, aurait perdu 75 % de ses abonnés : il en compterait 302 en 1932, selon le journal. En vue du congrès de Landerneau, néanmoins, les anciens du PAB ont décidé de suivre le nouveau « Parti National Breton ». Sohier, Guiyesse, Bricler, Debauvais, Mordrel, responsable de la section de Paris, soutiennent ainsi le PNB.
7 août 1932 : l'attentat de Rennes et le rebond du nationalisme breton.
Quoi de mieux qu'une action d'éclat médiatisée et porteuse d'imaginaire pour revivifier la cause ?
L'annonce de cérémonies officielles pour commémorer le quatrième centenaire du traité d'Union de 1532 est appréhendée comme une provocation par les autonomistes bretons.
Conscients de la nécessité de dépasser leurs divergences, les mouvements issus du PAB tentent de créer un comité intergroupe afin de manifester en commun lors de la venue d'Edouard Herriot à Vannes, prévue les 6 et 7 août 1932. Fransez Kervella, Fransez Debauvais, Yann Bricler, Raffig Tullou, Raymond Delaporte, sont arrêtés à leur hôtel à Vannes à six heures du matin et placés en garde à vue.
Le même jour, à Rennes, au petit matin, se produit l'explosion du « Monument de la honte », tout à la gloire de la soumission de la Bretagne. Avec l'aide de Meavenn et de Jeanne du Guerny, Lainé préparait l'attentat depuis la fin juillet.
Gwenn-ha-Du adresse à la presse un communiqué triomphaliste : « Les Français célèbrent aujourd'hui le quatrième centenaire de leur victoire et de l'annexion de la Bretagne. Toujours Bretons, non conquis malgré quatre siècles d'occupation française, nous avons décidé de remettre entre les mains des Bretons les destinées de leur patrie, pour le plus grand bien de la nation bretonne. Nous ouvrons la lutte pour la délivrance de notre pays en ce jour anniversaire de notre annexion, par la destruction du symbole de notre asservissement qui trône au centre de notre capitale ».
Des militants nationalistes sont arrêtés mais les bénéfices politiques sont importants et immédiats . L'attentat de Lainé et Gwenn-ha-Du donnent une nouvelle radicalité romantique à l'engagement nationaliste et un caractère plus subversif et attirant pour une jeunesse qui se cherche et a soif d'absolu.
20 novembre 1932, un nouvel attentat à Ingrandes
Une explosion détruit la voie ferrée reliant Orsay à Nantes. Édouard Herriot devait se rendre à Nantes à l'occasion des fêtes de commémoration de l'Union de la Bretagne et de la France. Son voyage est reporté. Lainé avait donné l'ordre à Bayer du Kern, jeune ouvrier papetier, d'aller faire sauter les rails à Ingrandes mais d'éviter les morts en disposant des lanternes rouges pour que le train s'arrête à temps. A Breiz Atao, les attentats sont justifiés, même si on bannit officiellement la violence.
Le 12 mars 1933 : publication dans Breiz Atao du programme SAGA
Paraissant dans le numéro 170 de Breiz Atao, ce programme de gouvernement radical pour une Bretagne indépendante, est attribué à un certain Ap Calvez : le fils du Charpentier, le Christ-Sauveur lui-même... qui n'est autre que Mordrel ! Ce dernier propage des idées anti-démocratiques et d'inspiration nazie depuis le début des années 30. SAGA est un sigle pour désigner Strollad ar Gelted Adsavet, c'est à dire le « Parti des Celtes Réveillés » . C'est la matrice d'un nouveau parti national-socialiste breton, Mordrel envisageant de transformer le PNB en SAGA. En 1932, Mordrel était retourné en Allemagne et y avait fréquenté les meetings nazis. De fait, le programme SAGA est dans une large mesure une adaptation bretonne du programme de Hitler, devenu chancelier du Reich le 30 janvier 1933. Mordrel l'écrit tout de go dans le préambule de SAGA : « nous sympathisons avec le racisme allemand ». Le même numéro 170 de Breiz Atao met d'ailleurs en exergue une formule de Hitler lui-même : « Dieu aide ! Mais il aide seulement ceux qui ont en eux-mêmes la volonté de se relever ! ».
SAGA propose la priorité nationale bretonne, l'expulsion des indésirables et non assimilés, « l'exclusion des étrangers, et particulièrement des races latines et de couleur », des postes de responsabilité, à l'exception des races nordiques bien sûr. Il promeut l'idée d'un espace vital et d'un colonialisme bretons, la privation des droits civiques pour les Bretons qui n'adhèrent pas à la « communauté spirituelle », le contrôle de l'éducation de la jeunesse pour produire des individus sains moralement et physiquement conformément « au génie étouffé de notre race », la répression des idées contraires à la moralité ou au nationalisme breton, l'instauration d'un pouvoir révolutionnaire non démocratique de transition chargé de susciter une nouvelle vie sociale, politique et culturelle. La Bretagne fédérale qualifie SAGA de « Salade Armoricaine Garantie Authentique » concocté par « Ollier Ier », avant de s'opposer à la substitution d'un impérialisme breton fondé sur le racisme à un impérialisme français.
1933 : création de la revue Ar Falz par Yann Sohier
Yann Sohier, 32 ans, adhérent de l'UYV depuis 1921, puis du PAB et du PNB, a été initié au combat pour la langue et la culture bretonne par François Vallée à Saint Brieuc à l'époque où il préparait l'Ecole Normale. Il rêvait en 1930 de créer un syndicat des instituteurs fédéralistes de Bretagne, il est nationaliste breton, mais de gauche, proche de Marcel Cachin, son voisin de Plourivo, et sympathisant du courant syndical École émancipée. Le projet de cette revue avait été annoncé à l'occasion d'une lettre de colère adressée à la rédaction de Breiz da zont où Sohier, qui reste pourtant au PNB malgré son tournant nationaliste dur, déclarait n'avoir qu' « un seul souhait, la disparition de votre petit torchon ». Il annonçait au passage sur un mode ironique « une bonne nouvelle pour les émules d'Hitler, la parution prochaine d'un journal de défense bretonne et prolétarienne ».
Yann Sohier rédige la majorité des articles d'Ar Falz sous des pseudonymes divers comme « Fanch Divadou » (François sans biens) ou « Yann ar Ruz » (Jean le Rouge), « Mestr skol bihan » (le petit maître d'école). Une faucille, inscrite dans un motif celtique, orne la première page et illustre le titre, Ar Falz. Une vingtaine de numéros, de huit à seize pages, paraîtront entre 1933 et 1935. Ar Falz, « bulletin mensuel des instituteurs partisans de l'enseignement du breton », compte entre cent et deux cents abonnés. Son objet principal est la défense de l'enseignement du breton, la langue des prolétaires du pays, à l'école publique, la défense des idées fédéralistes, laïques, pacifistes, anti-colonialistes, anti-fascistes, et de revolution sociale. Kerlann (l'instituteur d'origine morlaisienne Jean Delalande), les Brestois Armand Keravel et Meavenn, première gérante d'Ar Falz en 1933, appuient le travail de Yann Sohier. Sohier meurt au mois de mars 1935, à trente-quatre ans, épuisé par le militantisme et par les problèmes financiers rencontrés par la revue, victime d'une septicémie contractée à la suite d'une plaie mal soignée. Ancien membre du PAB, Armand Keravel, qui dirigeait Ar Falz en 1940, suspendra l'existence de l'association et entrera en résistance dans le réseau de Tanguy-Prigent pendant l'occupation. Mais les convictions nationalistes et les opportunités d'affirmation publique de la culture et de la langue bretonne, l'espoir d'une plus grande autonomie bretonne, ont poussé Yann Kerlann et Meavenn, membres du PNB à participer à une certaine forme de collaboration aux côtés d'autres nationalistes. Kerlann, auteur de contes, d'écrits sur l'histoire et les mathématiques en breton, que Sohier avait désigné comme son successeur, qui traduisit l'Internationale en breton pour War Sao, dont il était un des contributeurs pendant le Front Populaire, ouvrit à l'automne 42 avec sa femme à Plestin-les-Grèves la première école privée dont l'enseignement était entièrement en breton, Cette école était financée par l'hebdomadaire « L'heure bretonne » et la revue de Roparz Hémon, Arvor, puis, plus compromettant encore, grâce à Célestin Lainé, par une partie de la solde des soldats du Bezen Perrot. D'ailleurs, pendant les deux ans d'existence de l'école bretonne de Plestin, les élèves seront tous ou presque des enfants de militants nationalistes bretons, dont plusieurs enfants de membres du Bezen Perrot engagés militairement au côté des Nazis. Kerlann a d'ailleurs écrit la chanson qui servait d'hymne au Bezen Perrot.
1933 : création par Raymond Delaporte de la Breuriez ar Brezoneg er Skoliou (BABES) . L'« Association du breton dans les écoles » est créée par Raymond Delaporte qui n'a que vingt ans. Ce dernier est à la fois membre de l'association catholique Bleun-Brug et dirigeant du PNB. Pour s'adonner au militantisme culturel breton sur sa terre natale de Châteauneuf-du-Faou, il a interrompu ses études de droit, mis en parenthèse son doctorat. Grâce à l'argent de la famille, notamment de sa tante Emma Dubuisson, une des principales donatrices de Breiz Atao, l'association distribue des livres en breton aux enseignants des écoles catholiques du Centre-Finistère.
1934 : création de Ar Brezoneg er Skol (ABES) par Yann Fouéré
Sympathisant du PNB depuis 1932, Yann Fouéré, proche de Camille Le Mercier d'Erm, le vieux militant nationaliste replié à Dinard, vient de créer avec d'autres étudiants bretons le « Cercle des étudiants bretons de Paris ». Il est né à Saint Aignan dans le Gers de parents costarmoricains, il a vécu à Paris mais passé beaucoup de vacances à Callac dans la commune de sa famille maternelle, où l'on compte plusieurs notables. Il s'engage avec Robert Audic, son professeur de breton à Paris, dans la création de cette association de promotion de l'enseignement en breton. C'est par un travail de lobbying, de sensibilisation des élus locaux, qu'ils comptent ouvrir des droits à l'enseignement du breton. Fouéré s'inspire de l'exemple du docteur Le Cam de Saint-Servan qui, dès la fin de l'année 1933 avait fait circuler à Guerlesquin une pétition réclamant l'admission du breton à l'école primaire. Des étudiants du « Cercle des étudiants bretons de Paris » de Fouéré mettent à profit leurs vacances d'été pour tenter de convaincre des élus locaux de communes du Finistère et des Côtes-du-Nord de soutenir à leur tour la cause du breton à l'école. Saint-Pol-de-Léon, sous l'influence de son jeune maire, Alain Budes de Guébriant, vote pour la motion exigeant la possibilité d'enseigner en breton à l'école primaire. C'est le cas aussi de Taulé, Morlaix, Carantec et Roscoff. Dès la fin de l'année 1934, ABES (Ar Brezoneg et Skol) adresse une circulaire et un exemplaire de vœux aux conseils municipaux de Bretagne : on postera 1500 à 2000 courriers deux fois par an, à la veille des sessions municipales, on contactera directement les maires, les parlementaires. Au terme de cette campagne de vœux menée par Yann Fouéré pour l'introduction du breton à l'école primaire, qui dura quatre ans entre 1934 et 1938, 305 communes sur 634 se prononcèrent pour, 50 seulement contre
Septembre 1934, parution du premier numéro de Stur (« Gouvernail »).
Son fondateur et directeur, Ollier Mordrel, veut l'élever au rang de revue doctrinale du PNB. Lancée par Breiz Atao, dont elle est dépendante au départ, la revue est vouée ensuite à faire son propre chemin, comme Gwalarn. Stur se veut une revue de réflexion et de théorie, inspirée par Spengler, les théories fascistes, culturalistes et raciales, promouvant le « racisme breton ». Sous l'influence de l'intellectuel nazi Gerhard Von Tevenar que Mordrel rencontre pour la première fois à l'hiver 1934, elle prône le réveil du « nordisme » en Bretagne contre la « dégénérescence » du latinisme et du métissage. Mordrel est inspiré par la « révolution conservatrice » allemande et la pensée néo-païenne, mystique et anti-humaniste de Friedrich Hielscher qu'il connaît, comme Lainé, par Gerhard Von Tevenar.
Un comité provisoire de rédaction est constitué, des collaborateurs nombreux vont s'exprimer dans Stur : l'Alsacien Hermann Bickler, l'abbé Gantois, futur collaborateur belge, Célestin Lainé, Roger Hervé alias Glenmarec, qui sera correspondant de la revue ésotérique Németon pendant la guerre, Yann Fouéré, Léon Millardet, et l'historien de Morlaix Joachim Darsel. Le démarrage de Stur est assez lent : deux mois après son lancement, elle ne compte que 17 abonnés. Ils sont 58 au second numéro, une centaine au bout d'un an. Aux dires de Mordrel, elle comptera 300 abonnés en 1937, dont une cinquantaine de donateurs. Cette influence limitée de Stur en Bretagne n'empêche pas que les thèses de la revue ont sans doute contribué à la radicalisation d'une partie des militants du PNB. Elles ont servi surtout de faire-valoir auprès des autorités nazies pour Mordrel et son petit cercle qui rêvaient d'une alliance en vue de jouer un rôle politique en cas de victoire de l'Allemagne dans une guerre contre la France qu'ils jugeaient inéluctable.
Avril 1936, nouveaux attentats de Gwenn ha Du.
Le groupe terroriste provoque des incendies dans les préfectures de Quimper, Saint-Brieuc, Rennes et Nantes. L'organisation secrète avait envoyé en février des lettres de menace au ministre de l’Éducation nationale, ainsi qu'à plusieurs personnalités et aux journaux, donnant un mois aux autorités pour organiser l'enseignement du breton dans les établissements scolaires de la Bretagne bretonnante. Debauvais défend publiquement le commanditaire des attentats et présente Lainé comme un « chef né ». Mordrel supporte mal que Debauvais célèbre un militant qu'il croyait contrôler et qui commence à lui faire ombrage.
1936 : création du Kardervenn.
La militarisation du mouvement national breton franchit un pas supplémentaire quand Lainé crée le Kadervenn, le « sillon de combat », un groupe d'entraînement paramilitaire qui vise à former l'embryon de la future « armée bretonne ».
12 et 13 août 1937 : Congrès de Carhaix du PNB.
Le Congrès qui réunit trente-six délégués engage le parti nationaliste, financé depuis au moins trois ans par les services de renseignements allemands, dont Debauvais et Mordrel sont devenus des agents, sur une ligne politique pro-allemande qui était déjà depuis longtemps celle de Stur. Raymond Delaporte, que Debauvais avait cherché à mettre en avant, alors qu'il était de plus en plus affaibli par sa maladie, pour contrer l'influence de Mordrel, démissionne de la direction du PNB par opposition à cette dérive pro-nazie incompatible sur le moment avec son orientation chrétienne-démocrate de responsable du Bleun-Brug.
Février-mars 1938 : campagne contre la préparation de la guerre contre l'Allemagne Nazie.
Après l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne le 12 mars 1938, Breiz Atao affirme que « l'union de l'Autriche et de l'Allemagne est dans la nature des choses ». A propos de la crise des Sudètes, la revue du PNB avance : « On ne peut reprocher au peuple allemand le droit de disposer de lui-même et de se réunir à ses frères allemands ». A partir de février, le parti nationaliste breton intensifie sa propagande et déclenche une campagne d'inscriptions sur les murs des bâtiments publics de Bretagne : « Gwenn ha Du », « La Bretagne aux Bretons », « La France est foutue », « A bas la guerre pour les tchèques », « Contre la guerre impérialiste », « Les Français dehors » etc. Au mois d'avril, un nouveau slogan apparaît sur les murs des villes bretonnes « la France aux Juifs, la Bretagne aux Bretons ». Ce slogan antisémite est une récupération du propos du ministre de l'Intérieur Marx Dornoy qui, devant les propos anti-juifs de la droite à l'Assemblée, tenus notamment par le député du Morbihan Paul Ihuel, s'était exclamé : « Bande de salauds. Et d'abord un Juif vaut bien un Breton ! », ce qui avait donné lieu à une suspension de séance et à des bagarres. L'antisémitisme de Breiz Atao devient alors de plus en plus systématiquement affirmé, la France étant brocardée comme étant sous contrôle des juifs.
22 juin 1938 : ouverture du procès des activistes bretons.
Ce procès collectif se transforme en procès de Célestin Lainé qui décide d'en faire un défi et une tribune politique. Lainé entre dans la salle en faisant le salut nazi. A la première question du président, il répond en breton et refusera tout au long du procès de s'exprimer en français, se contentant de faire lire en français des déclarations par son avocat, ce dernier expliquant que c'est « pour attirer l'attention sur la manière dont notre langue bretonne est traitée en Bretagne, dans notre pays, du fait de la domination et des lois françaises ». Lainé s'inspire en cela de nationalistes gallois passés pour sabotage devant la justice anglaise. L'abbé Jean-Marie Perrot, qui a déjà appris le breton à Mordrel, marié Debauvais à Anna Youenou en 1929, comparait comme témoin à décharge pour défendre Lainé. Ce dernier écope finalement de trois mois ferme, les autres de deux, à l'exception de Péresse, à qui sa jeunesse vaut une peine de un mois avec sursis. Debauvais seul, non présent, est condamné à six mois ferme par contumace. Les juges ont évité de prononcer le verdict d'un procès politique, se contentant de juger de banales dégradations sur du bien public.
Été 1938 : manifeste anti-fasciste de la Ligue fédéraliste de Bretagne.
Signé par Yves Gestalen, Morvan Marchal, Francis Bayer du Kern, Raffig Tullou, Per Goulven, tous anciens membres du PAB et anciens collaborateurs de Breiz Atao, le manifeste, tout en défendant un front uni des gauche bretonnes face aux formations fascistes et « au capitalisme désordonné et inhumain », écrit: « Nous réclamons le droit absolu, Républicains, Radicaux, Socialistes, Communistes, Libertaires, de lutter pour une société meilleure dans notre cadre le plus cher, dans notre pays, dans notre nation, la Bretagne. La pensée des racistes bretons semble singulièrement dangereuse pour la figure du futur État breton. Un pays aussi varié que le nôtre ne saura s'accommoder d'un État fondé sur le principe unitaire, ni au nom de la race aryenne, ni au nom d'une confession déterminée, ni au nom d'un celtisme imposé de commande. Le national-socialisme allemand nie également l'importance et les droits de la personne humaine ».
Septembre 1938 « Pas de guerre pour les Tchèques ».
16 500 affiches sont imprimées par le PNB avec ce slogan : elles procèdent non pas d'un pacifisme de principe comme celui des fédéralistes, mais d'une stratégie pro-allemande. Une information judiciaire est ouverte contre Debauvais et Mordrel qui fuient en Belgique. En application du décret-loi de Daladier créant un délit d'opinion en matière d'intégrité nationale le 16 octobre 1938, Debauvais et Mordrel sont inculpés en tant que dirigeants du PNB pour atteinte à l'intégrité du territoire. Le 25 octobre, Debauvais, cherchant à nouveau le procès exemplaire qui servira la publicité de la cause bretonne se constitue prisonnier. Dans une première comparution, il écope de quatre mois fermes. Mais le 14 décembre, Mordrel et Debauvais sont jugés en correctionnelle. Mordrel annonce dans Breiz Atao « le procès de la nationalité bretonne ». Lainé, hostile à Mordrel s'arrange pour mettre le chef breton Debauvais en vedette plutôt que Mordrel. Debauvais est condamné à un an de prison ferme, Mordrel, à un an avec sursis. En représailles, et selon un plan du Kuzul Meur, le conseil secret du mouvement breton, Gwen-ha-Du fait sauter le Monument de la Fédération bretonne-angevine de Pontivy rappelant l'adhésion à la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen et à la Révolution de 150 Fédérés bretons et angevins emmenés par le futur général Moreau. Au début 1939, le mouvement nationaliste breton fait donc l'objet d'une étroite surveillance policière. Les autorités ont connaissance des voyages en Allemagne de Debauvais, Mordrel, Lainé, Vissault de Coëtlogon, Péresse, du lien des trois premiers avec les agents allemands Wagner et Tevenar, dirigeants des services de renseignement de l'armée allemande (Abwerh II).
Août 1939 : l'affaire du Gwalarn.
Un débarquement d'armes allemandes devant servir à un soulèvement nationaliste breton à l'arrière du front est organisé dès juin 1939. Hervé dit « Bob » Le Helloco, avocat stagiaire inscrit au barreau de Quimper, recrute des membres du Kadervenn. Le 26 juillet, se retrouvent à Morlaix plusieurs hommes de Lainé : André Geffroy, éleveur de moutons à Locquirec, Guy Vissault de Coëtlogon, alors élève de l’École des hautes études en sciences sociales, Alain Louarn, instituteur à Quimper, Jacques Bruchet, élève architecte à Paris, Patrick Guérin, qui vient de détruire la statue de Bécassine au musée Grévin à Paris, Ange Péresse et Bob Le Helloco. Le Helloco récupère son cotre côtier, le Gwalarn, au port de Roscoff et la petite troupe d'autonomistes gagne Guernesey. Le 5 août, Le Helloco annonce enfin l'objectif de la mission : retrouver un cargo allemand dans la Manche pour récupérer du matériel. Lainé est dans le cargo qui a appareillé de Hambourg à destination de Vigo dans la nuit du 2 au 3 août et rejoint le bateau des nationalistes. On transborde des caisses et barriques pleines d'armes et de matériel de propagande mais au milieu de la manœuvre une caisse tombe à l'eau. Le soir, le Gwalarn arrive à proximité de la plage des sables blancs à Locquirec. Geffroy arrive enfin avec quelques hommes. On débarque les caisses et barriques du Gwalarn échoué à une dizaine de mètres du rivage et elles sont conduites dans plusieurs voitures vers une villa louée par Jacques de Quelen à Perros-Guirec. La marée n'étant pas favorable, l'équipage ne parvient pas à déséchouer le Gwalarn . Les tracts et les affiches anti-françaises de la caisse perdue sont retrouvés par un pêcheur de Jersey. Les occupants du Gwalarn ont eu le temps de fuir, abandonnant le bateau, mais les autorités françaises sont désormais au courant du complot pro-allemand des nationalistes bretons.
29 août 1939 : fuite en Allemagne de Mordrel et Debauvais, arrestation de Lainé
Les deux dirigeants se réfugient en Allemagne avec l'aide des services de renseignement militaire allemands deux jours avant la mobilisation générale. Célestin Lainé est arrêté le 28 octobre 1939 pour « atteinte à la sûreté de l'Etat ». Il est jugé à huis clos puis condamné à cinq ans de prison à la centrale de Clairvaux. C'est la progression de l'armée allemande qui l'en délivrera : Lainé réussit à s'enfuir de sa prison avec d'autres détenus le 14 juin 1940 à la faveur d'un bombardement allemand.
19 octobre 1939 : dissolution du PNB.
Les locaux de Breiz Atao sont perquisitionnés, les biens et archives saisis. Tout ce qui touche au mouvement politique et culturel breton va être soumis pendant des semaines à une intense activité policière de perquisitions, de violations de domicile, d'arrestations. Les fiches des Renseignements Généraux établies à cette époque ressortiront à la Libération et seront utilisées pour vérifier les activités pendant la guerre des sympathisants de la cause ou de la culture bretonne.
7 mai 1940 : Mordrel et Debauvais condamnés à mort par contumace.
Ils écopent d'abord en leur absence de cinq ans de prison en décembre 1939, puis, comme on vint remettre aux procureurs leurs imprimés clandestins anti-français rédigés depuis l'Allemagne, ils sont condamnés à mort par le conseil de guerre de Rennes. Debauvais et Mordrel travaillent alors pour les services de propagande allemands en animant une émission anti-française en breton entre mai et juin 1940.
Juin 1940 : recrutement des prisonniers de guerre par les nationalistes bretons
Alors que les troupes allemandes arrivent à Brest le 19 juin, bénéficiant ça et là du travail de sabotage (anecdotique) de quelques militants nationalistes bretons restés au pays comme Péresse et Le Bars , les nationalistes exilés en Allemagne ou en Belgique obtiennent de l'Abwehr la permission de recruter des prisonniers de guerre. Debauvais, Mordrel, Moyse et Geffroy participent à la tentative de recrutement de prisonniers de guerre bretons repartis dans les camps de Bad-Orb, Neu-Brandenburg, Sagan, Moosburg, Mülberg. Seuls 500 d'entre eux, sur 60 000, acceptent de suivre les nationalistes, parmi lesquels des militants bien connus : Augustin Catelliot, Roparz Hémon, Alan Al Louarn, Yann Goulet, Kerlann (Jean Delalande), Joachim Darsel, le capitaine Marty, Kenan Kongar (Jean Kervella). Ils se retrouvent avant et après la cessation des hostilités dans un camp réservé du sud de Berlin, où se réunissent aussi des officiers polonais d'origine ukrainienne couvés par les Allemands, avant de rejoindre la Bretagne. Les recruteurs ne sont pas épargnés par les insultes de Bretons qui les considèrent comme des traîtres. Cet embryon « d'armée bretonne » restera stationné sans armes en Belgique pendant que les Allemands progressent rapidement en enfonçant les défenses françaises.
3 juillet 1940, rassemblement de Pontivy et proclamation du Comité national breton.
Des drapeaux noirs et blancs tendus sur le château des Rohan, des discours pleins de forfanterie prononcés du haut d'un perron monumental. Une cinquantaine de militants nationalistes, dont trente ont été libérés avec la complicité allemande, se réunissent pour créer le Comité National Breton, conçu en Allemagne. Debauvais, le président du nouveau président du Comité Exécutif, ne manque pas de souligner la portée symbolique du lieu du rassemblement dans un discours en breton dont la traduction donne ceci:
« Il y a cent cinquante ans, un groupe de Bretons sans mandat, aveuglés par une fausse idéologie introduite en Bretagne par la France, se réunit à Pontivy, avec des étrangers et déclarent qu'ils n'étaient plus Bretons, mais Français. Bien qu'ils fussent persuadés d'introduire ainsi une ère nouvelle en Bretagne, ils ouvrirent en réalité le chemin à la ruine et à la destruction de notre nationalité. Nous, patriotes bretons, accourus aujourd'hui à Pontivy de toutes les parties de la Bretagne, proclamons devant le monde que notre seule patrie est la Bretagne. Nous jurons de défendre, dans toutes les circonstances, envers et contre tous, le droit des Bretons à vivre comme peuple libre... Que Dieu nous protège dans la lutte inlassable que nous ouvrons aujourd'hui pour notre pays. »
Des habitants de Pontivy, des jeunes notamment, manifestent leur hostilité aux nationalistes, immédiatement perçus comme des traîtres. Lainé et ses jeunes compagnons du Kadervenn, sous protection allemande, abusent de l'intimidation et de la violence avec eux. Les mêmes scènes se reproduiront dans d'autres endroits les semaines suivantes, à Quimper notamment.
12 juillet 1940 : Monseigneur Duparc condamne le séparatisme.
Dans un avertissement solennel publié dans la Semaine religieuse de Quimper et de Léon, avec instruction de le lire en chaire, l'évêque condamne vigoureusement les idées séparatistes:
« Quatre siècles d'histoire nationale commune, malgré les dissentiments qui ne regardent que nous, ont intimement resserré nos liens de cœur avec la France. Notre sang versé sans compter sur terre et sur mer lui a prouvé notre fidélité ardente. Notre vie intellectuelle, notre vie sociale, notre vie économique ont été constamment mêlées à la sienne... Nous lui sommes liés indissolublement. Nous ne la trahirons pas à l'heure de la douloureuse épreuve. Jamais Breton ne fit trahison. Potius mori quam foedari ».
Les journaux reçoivent des Allemands l'ordre de censurer le texte. Malgré tout, l'évêque de Saint-Brieuc, François Marie Serrand, prend le relais de Monseigneur Duparc en envoyant le 21 juillet une lettre semblable à ses prêtres.
Les autorités militaires et de renseignement allemandes comprennent, à travers l'attitude de condamnation des autonomistes par une hiérarchie catholique dont ils jugent l'influence décisive sur l'opinion bretonne, que la population dans son ensemble est très hostile au séparatisme des nationalistes bretons. Comme le Maréchal Pétain et le nouveau régime paraissent prêts à s'engager dans une attitude de collaboration avec l'occupant, la carte bretonne devient bien moins intéressante pour lui. Dès la mi-juillet, Von Ribbentrop donne ses instructions qui réduisent à néant le rêve des nationalistes bretons d'un État breton séparé sous tutelle allemande, espoirs appuyés pourtant sur des hypothèses sérieusement examinées jusqu'en juillet-août 1940 par Werner Best, Otto Abetz, Göring et Hitler lui-même :
« - Les mouvements séparatistes en Bretagne ne doivent plus être encouragés ;
- la collaboration avec les Bretons doit se limiter désormais au recrutement d'agents compétents dans la lutte contre l'Angleterre et à l'action en Irlande ;
- tout mouvement insurrectionnel contre le gouvernement français devra être évité »
14 juillet 1940 : premier tirage de l'hebdomadaire L'Heure Bretonne
Le nouveau journal du PNB est tiré d'abord à 55 000 exemplaires, financé par les services de propagandes allemands. Le premier numéro fait la part belle au «Rassemblement de Pontivy». L'Heure Bretonne, redescendra à 8000 exemplaires en mai 1941, remontant ensuite à 30 000 exemplaires imprimés. La diffusion assez large de L'Heure bretonne et les nouvelles perspectives et visibilités offertes par l'occupation et l'argent allemand aux nationalistes bretons vont renforcer le PNB. Le contenu de L'Heure Bretonne sera critique vis-à-vis de Vichy, mais pro-allemand, anti-anglais, raciste, antisémite, hostile à la Résistance, aux franc-maçons, pratiquant au besoin la délation.
Profitant de la nomination à Rennes d'un Gouverneur de Bretagne, le général Weyer, L'Heure bretonne pavoise en ce 14 juillet :
« La Bretagne existe désormais officiellement
Réparant le dédain dont la Bretagne fut pendant 150 ans l'objet de la part de l'administration française, les autorités allemandes ont reconnu officiellement l'existence de notre patrie.
1° En créant un poste de Gouverneur de la Bretagne ;
2° En groupant les 5 départements sous son autorité.
Le Général-Gouverneur Weyer s'est installé à la Préfecture de Rennes »
L'agence de presse officielle du Reich Deutsch Nachrrichten Büro reprend par une surprenante erreur cette information tendancieuse de L'Heure bretonne : « Afin de remédier à l'oppression dont la Bretagne a souffert pendant cent cinquante ans du fait de l'administration française, les autorités allemandes ont officiellement reconnu l'existence de la province en créant un poste de gouverneur dont l'autorité s'étendra aux départements bretons...».
Le 25 juillet 1940, la radio et les journaux du soir reprennent la « nouvelle » en annonçant la prochaine indépendance de la Bretagne. Toutefois, dès le surlendemain, le responsable de la Propaganda Abteilung en France avertit les chefs d'état major de Bretagne que l'information est erronée.
Les prétentions des activistes du mouvement nationaliste breton sont de toute façon en total décalage avec les préoccupations et les sentiments d'une population qui est très majoritairement et dès le début de l'Occupation hostile aux Allemands. Il y a en effet le souvenir des morts de la Première Guerre Mondiale, les 10.000 soldats bretons tués en mai-juin 1940, l'humiliation de la défaite et des 137.000 prisonniers transférés dès l'été dans les Oflags et les Stalags en Allemagne, les 900.000 réfugiés belges et français ayant tout abandonné qu'il a fallu accueillir, et aussi l'émotion créée par les récents bombardements de l'armée allemande, comme celui de la gare de Rennes en juin 1940 qui fait à peu près 600 morts, dont beaucoup de réfugiés venus du Nord de la France, suite à l'explosion d'un train de munitions.
Décembre 1940 : Raymond Delaporte devient le nouveau dirigeant du PNB
Debauvais, épuisé par sa maladie, sous prétexte qu'il cherche le compromis avec Vichy est mis à l'écart, remplacé par Mordrel. Début décembre 1940, les Allemands encouragent donc le Kuzul Meur à démissionner Mordrel et à choisir Raymond Delaporte, plus compatible avec Vichy et les milieux traditionalistes et cléricaux, moins farouchement séparatiste et anti-français. Mordrel est poussé à s'exiler en Allemagne. Signe d'un retour à un PNB plus proche des idées réactionnaires et conservatrices de la « Révolution Nationale » du Maréchal Pétain, une rubrique « Vie spirituelle » apparaît dans le numéro de L'Heure Bretonne du 14 décembre 1940 qui annonce la démission de Mordrel et l'arrivée à la tête du PNB de Delaporte. Mais « L'Heure bretonne » de Delaporte continue à porter les engagements nationalistes, racistes, antisémites, anglophobes et d'adhésion à l'Europe nouvelle de l'équipe précédente, du moins jusqu'en 1943, avant que le vent ne commence à tourner après Stalingrad. Se démarquant cependant de la stratégie de Mordrel, Raymond Delaporte cherche à faire avancer la revendication autonomiste auprès de Vichy à qui il déclare son loyalisme. Le PNB de Raymond Delaporte va connaître un certain regain au niveau du militantisme, triplant le nombre d'adhérents par rapport à l'avant-guerre dès 1941. Selon Alain Deniel et Bertrand Frélaut, les effectifs du PNB auraient été de l'ordre de 2500 à 3000 adhérents pendant la guerre. Cette estimation s'appuie sur une déduction à partir d'un rapport des Renseignements Généraux du Morbihan. Kristian Hamon réévalue à la baisse le nombre d'adhérents du PNB pendant l'occupation. A l'issue d'une enquête patiente, il évalue les effectifs maximums du PNB pendant la guerre à 1500, en comptant la Loire-Inférieure, et ceux des militants actifs à 300. Le PNB compte grâce à l'argent des Allemands, venant de l'Abwehr puis du SD, environ 60 permanents appointés pour le Parti et L'Heure bretonne.
Début 1941, création des Bagadoù Stourm,
Ce service d'ordre et groupe d'entraînement para-militaire de jeunesse du PNB est mis en place par Raymond Delaporte sous la direction de Yann Goulet alors qu'il cherche à contrer l'influence de Célestin Lainé, le dirigeant charismatique du Kardervenn, lâché provisoirement par les Allemands à cause des scandales à répétition que créent ses gours turbulents sur leurs lieux de cantonnement (au manoir de Kerriou, dans la région de Gouézec, notamment) où ils se conduisent comme « des soudards en pays occupé », selon la formule de Mordrel. Dès 1941, alors que Lainé est obligé de suspendre ses entraînements militaires, plusieurs membres du Kardervenn deviennent des agents appointés des services de renseignement allemands de l'Abwerh, spécialisés dans la surveillance et la délation. Ils le resteront tout au long de la guerre, comme d'autres nationalistes, qui seront recensés par les Allemands comme des agents de la Gestapo. Par différence avec le service spécial de Lainé, faut-il considérer les Bagadoù Stourm comme des scouts autonomistes aux pratiques calquées sur les Camps de Jeunesse du régime de Vichy, bien moins engagés dans une dérive fasciste ? Rien n'est moins sûr.
Les mots d'ordre de Yann Goulet aux Bagadoù Stourm, rappelés par Yann Goulet depuis son exil irlandais après-guerre, sont sans équivoque :
« Je vous invite à être des soldats.
Le Parti national breton dispose maintenant d'une Armée de volontaires. Armée avec un grand A.
Nous avons assez attendu des autres notre salut ; à nous de le gagner. Un bonheur se mérite, il se gagne durement.
Nous suivrons la trace de nos pères qui furent des héros et qui savaient mourir ».
Les jeunes du service d'ordre du PNB sont mis à contribution dans des Congrès et manifestations publiques qui s'entourent d'une liturgie militaire calquée sur celle des Nazis. Les bottes, l'uniforme sont noirs : un brassard ornementé d'un triskell et un calot noir d'où pendent deux rubans à l'écossaise, donnent une couleur celtique à l'ensemble. Le salut se fait à l'hitlérienne et les jeunes au garde-à-vous forment une haie d'honneur pour les Congrès du PNB et ses démonstrations. Le mouvement des Bagadoù Stourm est rebaptisé Strolladoù Stourm en 1943 (pour les initiales S.S, douces aux oreilles de l'Occupant, comme le Service Spécial de Lainé) : c'est une organisation de jeunesse d'autant plus menaçante qu'elle semble bénéficier de l'appui des troupes d'occupation et que ses symboles, jusqu'au drapeau à croix noire sur fond blanc, évoquent ceux des occupants allemands. Yann Goulet dans L'Heure bretonne du 4 juillet 1942 incitait les jeunes Bretons à faire « l'Europe nouvelle » dans le cadre du Reich, se réjouissant de l'effondrement de la République qui, selon lui, répandait « une odeur de compromission, de relents maçonniques, de grasses senteurs des Juifs ». Goulet s'était rendu en Allemagne nazie pendant les jeux olympiques de Berlin et il en avait gardé un certain attachement aux thématiques et aux parades du nazisme. Les camps de jeunesse des Bagadoù Stourm ont rassemblé quelque 400 jeunes militants et sympathisants du PNB. Certains d'entre eux ont pratiqué le coup de poing avec la population qui les considérait comme des « traîtres » et des « fascistes » à Landivisiau en août 1943 lors du camp d'été de Saint-Herbot, ou plus tard à Botmeur et à La Feuillée, dans les Monts d'Arrée. Fin 1943, certains d'entre eux rejoindront Lainé dans une voie de collaboration militaire avec les troupes d'occupation. Néanmoins, des membres isolés des Bagadoù Stourm, ou même des petits groupes pourront aussi rejoindre la résistance, comme dans le pays de Saint-Nazaire où un noyau de jeunes militants du PNB (9 militants, vendeurs de « L'Heure bretonne » et des sympathisants) va constituer le groupe de résistants Liberté dont Jean-Jacques Monnier a retracé l'histoire.
20 mars 1941 : parution du premier numéro de La Bretagne.
Le quotidien régionaliste fondé par Yann Fouéré bénéficie du financement de Jacques Guillemot, directeur des conserveries Pierre Chancerelle à Quimper, disciple de Maurras et partisan de la collaboration politique et économique. Parmi les souscripteurs, on trouve aussi Mme Friant, propriétaire de la biscuiterie « Les Filets bleus », Hervé Budes de Guébriand, le tout puissant président de l'Union des syndicats agricoles du Finistère et des Côtes-du-Nord, H. du Fretay, sénateur maire de Ploaré. En 1943, le tirage de La Bretagne, journal du soir, est d'environ 16 000 exemplaires tirés (2000 de moins que l'Ouest-Eclair) pour plus de 7000 vendus, avec un millier d'abonnements. Ses abonnés appartiennent en général aux classes les plus aisées. Le journal, comme l'Heure Bretonne, dont il se démarque par sa fidélité obséquieuse à Vichy, est violemment anti-anglais, anti-communiste, voue aux gémonies la IIIe République, les franc-maçons, les méridionaux et la gauche laïque. Des chroniques antisémites y paraissent au moment des persécutions contre les juifs dans la chronique collective signée du pseudonyme Lan Hag Herve, regroupant des artistes, écrivains, militants comme Xavier de Langlais, Youenn Drezen, Alain Le Louarn, Jean Piette, Yves Ollivier.
30 juin 1941 : Nantes et la Loire-Inférieure, séparés de la Bretagne
Après de nombreuses hésitations, Pétain décide par un décret en date du 30 juin 1941, mais publié le 1er juillet 1941, de fixer le cadre géographique de la préfecture régionale de Bretagne en la réduisant aux quatre départements d'Ille-et-Vilaine, des Côtes-du-Nord, du Morbihan et du Finistère, avec Rennes comme capitale. Nantes et le département de Loire-Inférieure sont détachés de la Bretagne pour être rattachés à la préfecture régionale d'Angers. Le lobbying des milieux économiques nantais a porté ses fruits, la nouvelle division régionale s'adapte aussi au périmètre de l'administration militaire allemande.
Mai 1942 : congrès fondateur de l'Institut Celtique de Bretagne.
L'Institut, créé sous l'égide allemande, est chargé de faire renaître la personnalité culturelle originale de la Bretagne par-delà cent cinquante ans d'acculturation post-révolutionnaire, selon les vues de Roparz Hémon, qui en devient le Président. L'Institut Celtique est constitué de onze commissions : Langue bretonne, Langue française, Beaux-Arts, Architectures et sites, Musique et spectacles, Sciences, Economie, Organisation sociale, Propagande, Documentation, Relations extérieures. La vie de l'Institut celtique se prolongera jusqu'en mai 1944, dominée par le leadership de Roparz Hémon et son ambition de bretonniser au maximum la vie et les échanges intellectuels en Bretagne.
Juillet 1941 : Roparz Hémon responsable des émissions bretonnes de Radio Bretagne.
Celles-ci se mettent en place sous la responsabilité du Sonderfürher Leo Weisgerber. Recruté par lui en mars 1941, Roparz Hémon est nommé responsable des émissions en breton en juillet 1941. Peu avant, en janvier 1941, Hémon avait créé Arvor, un hebdomadaire des amis de la langue bretonne d'abord bilingue, puis entièrement monolingue breton à partir d'août 1942. Les émissions bretonnes de Radio Rennes-Bretagne (ou Roazon-Breiz), filiale de Radio-Paris financée et contrôlée par les Allemands et les services de la Propaganda Staffel, sont animées par Fanch Elies, Youenn Drezen, Meavenn et quelques autres comme René-Yves Creston. Elles ne sont pas beaucoup écoutées mais le contenu des chroniques et émissions bretonnantes est publié dans Arvor, Gwalarn, voire L'Heure bretonne.
Juillet 1941 : institution du peurunvan, le breton unifié.
Le 8 juillet 1941, divers écrivains bretonnants, linguistes, grammairiens, s'entendent ainsi pour unifier les deux orthographes alors en vigueur, celle regroupant les dialectes de Cornouaille, Léon, Trégor, et celle du Vannetais. Dans une lettre à Meven Mordien (pseudonyme de René Le Roux) datée du 26 juin 1941, Roparz Hémon confie que les Allemands et Léo Weisgerber n'ont pas été étrangers à cet acte d'unification qui avait des visées plus politiques que culturelles : « L'ordre de parachever l'unification de la langue est venu du gouvernement allemand ». Radio Rennes va essayer la prononciation systématique de cette langue bretonne nouvelle unifiée et sera donc difficilement compréhensible pour le peuple, les bretonnants de naissance. Radio-Breiz semble de toute façon avoir eu des difficultés d'écoute en Basse-Bretagne, faute d'émetteurs suffisamment puissants.
Mars 1942, Yann Fouéré prend le contrôle sur La Dépêche de Brest et de l'Ouest.
Le journal, particulièrement lu dans le Finistère, tire à 60 000 exemplaires. Il appartenait jusqu'alors à un groupe d'actionnaires présidé par le sénateur-maire radical de Brest, Victor Le Gorgeu, qui, quoique peu favorable au Front Populaire, avait refusé les pleins pouvoirs à Pétain le 10 juin 1940 avec 79 autres parlementaires. Le préfet Ripert avait déjà réussi à le destituer de ses fonctions de maire le 30 décembre 1941 après que Le Gorgeu ait refusé de voter une motion de confiance à Pétain. Le journal est repris en main par Fouéré avec l'appui allemand. Ce dernier va accentuer la ligne éditoriale collaborationniste de La Dépêche. La Dépêche de Brest ouvre ainsi une chronique en 1942 intitulée : «Avec ceux de la Légion » valorisant la croisade anti-bolchevique de jeunes volontaires bretons.
Mai 1942, reparution de Stur, un organe de plus pour soutenir la collaboration totale
Stur continue à faire paraître sa prose favorable aux idées nazies au côté d'autres revues financées par les allemands, Nemeton de Morvan Marchal (membre du Rassemblement National Populaire de Marcel Déat entre mars 1941 et juillet 1943), une revue néo-druidique et raciste, et Galv de Fanch Elies et Hervé Le Hélloco.
Octobre 1942 : création du Comité Consultatif de Bretagne
Sous l'impulsion du préfet régional Jean Quénette, ancien député de Lorraine, en poste depuis le printemps 1942 en remplacement de François Ripert, cible du mouvement breton, le Comité Consultatif de Bretagne est conçu comme une assemblée consultative dont les membres sont nommés. Son rôle est extrêmement limité puisqu'il a pour « mission d'étudier, donner son avis, présenter ses suggestions sur les questions culturelles, linguistiques, folkloriques et, en général, tout ce qui peut intéresser les traditions et la vie intellectuelle bretonne ». On y trouve surtout des notables, hommes politiques et intellectuels de droite et proches de l'Emsav, présidents d'association régionaliste conservatrices : Régis de l'Estourbeillon, Pierre Mocaër, Joseph Martray, rédacteur en chef de La Dépêche, Taldir Jaffrennou, Yann Fouéré, Jean-Marie Perrot, Hervé Budes de Guébriant, le président de la Corporation agricole ; Edgard de Kergariou, sénateur-maire de Lannion, Jean des Cognets, le président du Conseil d'administration de L'Ouest-Eclair...
1942 -1943 : Lainé propose obstinément aux Allemands de lever une « armée bretonne »
Dès 1942, Célestin Lainé cherche à convaincre les Allemands de l'opportunité de constituer une formation militaire bretonne pour combattre les communistes. Lainé remet ainsi à Hans Grimm, bras droit de Pulmer, chef du SD de Rennes, qui mène la lutte contre la Résistance, des rapports sur les activités de son Service Spécial (SS) qui remplace le Kadervenn. Le 19 février 1943, l'idée est émise par Grimm et Lainé de soustraire de jeunes Bretons au STO et de les intégrer dans une division SS bretonne, sous commandement breton et utilisée en Bretagne. Finalement, les Allemands décident de temporiser et d'attendre que la division SS Wallonie soit créée afin d'en constater les résultats. En mars 1943, Lainé, qui cherche à prendre son indépendance par rapport au PNB, produit un nouveau rapport en vue de la création d'un « corps de troupes bretons contre les débarquements » sur la base de son Service Spécial, ce qui est l'occasion pour lui de demander des armes aux Allemands. Le 27 octobre 1943, Lainé confie aux Allemands un dernier rapport pour former une « Unité militaire bretonne » spécialisée dans la « répression du terrorisme », c'est à dire de la résistance, appuyant l'armée et la police allemandes grâce à sa connaissance du terrain et de la langue. Lainé propose tout de go l'intégration de son Service Spécial dans la SS allemande
12 décembre 1943 : assassinat de l'abbé Perrot
L'abbé est assassiné dans un chemin creux, sans doute par un jeune résistant communiste, alors qu'il revenait de dire une messe à la Chapelle Saint-Corentin, située à quatre kilomètres de Scrignac.
Un mois plus tôt, le 11 novembre, le nom de l'abbé Perrot était apparu en tête d'une liste de collaborateurs affichée sur le monument au mort de Scrignac. Ce même 11 novembre 1943 où Lainé et le colonel Hartmut Pulmer, chef du SD de Rennes, signaient la convention pour la création de l'unité SS bretonne sous commandement du SD allemand et non de la Wehrmacht.
Deux mois plus tôt, le 4 septembre 1943, le cousin de Mordrel, Yann Bricler, l'ancien administrateur de Stur, industriel et affairiste quimpérois, qui n'appartenait plus à la direction du PNB dont il avait été écarté avec Mordrel, était exécuté par la Résistance sur ordre du BCRA, les services anglais, suite à des dénonciations de sa part.
C'était un proche de l'abbé Perrot, un habitué du presbytère de Scrignac. Dans le coffre de Bricler, on trouva des documents de signalement destinés aux Allemands à partir d'informations émanant de l'abbé sur la receveuse des postes de Scrignac, Mme Duperrier, sympathisante communiste, et son mari, communiste, qui avaient fait jouer la Marseillaise par un haut-parleur sur la place de Scrignac le jour de la prise de l'Afrique du Nord par les Américains et qui mobilisaient la population contre les Allemands.
Parallèlement, à cette époque, Yann Vari Perrot, en pleine chasse à la résistance, publie plusieurs articles anticommunistes, dont ceux d'Herri Caouissin, dans sa revue Feiz ha Breiz. Chacun sait dans la région de Scrignac qu'il reçoit dans son presbytère régulièrement des autonomistes prônant la collaboration (Raymond Delaporte, Célestin Lainé, Mordrel, Tadir-Jaffrennou, Debauvais...), mais aussi des Allemands, dont certains hauts gradés.
Les raisons sont donc multiples pour que la Résistance décide de faire un exemple en l'exécutant comme traître, car ce n'est pas tant le curé anti-communiste ou l'autonomiste qui a été visé, mais bien le collaborateur. Son assassinat s'inscrit ainsi parmi douze exécutions commises dans le Finistère entre décembre 1943 et janvier 1944. Le mouvement breton n'est pas visé plus que les autres collaborateurs, même si trois militants nationalistes collaborateurs sont abattus, un autre évitant de justesse une exécution.
Les obsèques de l'abbé Perrot célébrées sous la garde des soldats allemands et en présence de tous les dirigeants nationalistes bretons par son meilleur ennemi, Monseigneur Duparc, ont lieu le mercredi 15 décembre dans une atmosphère tendue, le village étant en état de siège. Lainé, accompagné par quatre hommes du Service Spécial, dont Jasson, organise une cérémonie druidique pour rendre hommage à son ami. Ange Péresse propose à Lainé de baptiser l'unité SS qu'il commande du nom de Perrot. Le 15 décembre, les 33 premiers volontaires du Bezen Cadoudal votent à main levée l'appellation de Bezen Perrot. C'est à ce moment que la direction du PNB et Alan Al Louarn (Alain Louarn) rendent publique une lettre privée où Perrot désavouait, en écrivant à Madame Botros, non la collaboration avec l'Allemagne en tant que telle, mais le néo-paganisme de Lainé et de son Service Spécial. A l'inverse, Debauvais, mourant, va saluer avec chaleur la formation de l'Unité SS Perrot, « première formation bretonne armée depuis l'armée chouanne ».
Mars 1944 : les hommes de Lainé reçoivent l'uniforme SS.
Le Bezen Perrot est une unité de la SS rattachée à la police spécialisée dans la répression allemande, le SD-SIPO. De la fin décembre 1943 à mars 1944, les membres du Bezen opèrent en civil, armés de pistolets. Ils reçoivent des cours de télégraphie, de morse, de montage et démontage d'armes, mais aussi des leçons de langue bretonne et allemande, de celtologie, d'histoire et de géographie de la Bretagne. Ils montent la garde devant l'immeuble de la Gestapo à Rennes, participent à des arrestations avec les policiers du SD, surveillent des prisonniers. Les hommes du Bezen ne recevront que trois mois après leur incorporation l'uniforme de la SS et le calot à la tête de mort.
Kristian Hamon a identifié 66 membres clairement connus du Bezen, auxquels on pourrait ajouter quelques recrues tardives. Sur 60 membres, dont il a été possible de définir le lieu de naissance, 16 sont originaires des Côtes-du-Nord, 14 du Morbihan, 13 du Finistère, 10 d'Ille-et-Vilaine, 5 de Loire-Inférieure, et 2 de l'extérieur de la de Bretagne. Sébastien Carney parle lui d'entre 70 et 80 membres du Bezen Perrot à un moment où à un autre. Mordrel parle lui de 72 hommes qui auraient accepté d'intégrer la Formation.
En 1944, la moyenne d'âge des membres du Bezen Perrot est de 22 ans. Le recrutement de l'unité est globalement moins populaire, plus bourgeois et éduqué, que d'autres milices fascistes pratiquant la collaboration armée. Bon nombre des membres du Bezen ont leur baccalauréat, certains lisent Nietzsche, Ernst Von Salomon, Ernst Jünger. Certains ont adopté la mystique néo-païenne de Stur et de Lainé, d'autres restent des jeunes bourgeois chrétiens traditionalistes en croisade pour l'Occident contre le communisme. Jean Chanteau dit « Mabinog », l'amant de Meavenn, est le responsable chargé du renseignement, du service d'enseignement et de l'organisation technique des opérations. Il est moins soumis à Lainé et moins arrogant avec la troupe que les autres officiers : Léo Jasson dit « Gouez », Louis Feuntren, dit « Le maître », Ange Péresse dit « Cocal » sont les autres lieutenants de Lainé.
Juin 1944 : Vissault de Coëtlongon au secours des Badadoù Stourm braqueurs
Au printemps 44, pour faire rentrer de l'argent dans les caisses du PNB, à qui l'Allemagne a retiré ses subsides, fâchée de son recentrage opportuniste, et prenant le parti de l'autre composante, clairement nationale-socialiste, du mouvement autonomiste breton, celle de Lainé et de Mordrel, Yann Goulet conçoit un projet de cambriolage de la perception de Pouancé, dans le Maine-et-Loire, en se faisant passer avec ses compagnons pour des FTP. A cinq kilomètres de Pouancé, Yann Goulet et ses compagnons, L'Haridon, Hernot, Joly, sont rejoints par des gendarmes alors qu'ils sortent de la perception avec 600.000 francs. Une course poursuite à vélo a lieu, des coups de feu sont échangés mais finalement Goulet parvient à s'échapper avec une partie du butin qu'il remet à ses chefs. Les trois autres compagnons de Yann Goulet sont arrêtés, chacun en possession d'un port d'arme accordé par les Allemands. Conduits à la Gestapo de Rennes, les braqueurs sont libérés sur intervention de Guy Vissault de Coëtlogon, ancien de Gwenn-ha-Du et de l'opération de débarquement du Gwalarn. Toujours membre du PNB, celui est devenu agent appointé de la Gestapo au début de la guerre, officier de la LVF, puis agent de Herman Bickler, le colonel SS, l'ami autonomiste alsacien des nationalistes bretons depuis 1927, pour infiltrer la résistance et démanteler ses réseaux. Vissault a fait tomber le réseau « Bordeaux-Loupiac » spécialisé dans l'évasion des aviateurs alliés tombés en territoire occupé en octobre 1943, il a infiltré plusieurs maquis bretons entre l'automne 43 et l'été 44 avec d'autres autonomistes du PNB qu'il a recrutés : le Locminois Patrick Guérin, Jos-Yann Le Martolod, Roger Le Neveu, dit Le Légionnaire, et Joseph Le Ruyet. Ces gestapistes bretons font preuve de cruauté. Parmi ces hommes, se distingue tout particulièrement Joseph Le Ruyet, spécialiste de l'infiltration des maquis : cet ancien des Bagadoù Stourm, était avant-guerre surveillant d'internat à Loudéac. Le Ruyet et ses acolytes sont d'autant plus redoutables qu'ils utilisent la langue bretonne pour s'attirer la confiance des paysans ou des commerçants susceptibles de ravitailler les maquis.Le Ruyet était présent au Château des Rohan à Pontivy le 3 juillet 1940.
Décembre 1943 - août 1944, opérations meurtrières contre la Résistance
Si l'on compte les autonomistes et les sept anciens membres du PNB du groupe Vissault de Coëtlogon, au côté du Kommando de Landerneau, ceux du groupe d'Action (Georges Tilly de Perros Guirec), ce sont en tout 80 à 90 nationalistes bretons agissant sur les théâtres d'opération avec d'autres collaborateurs français du SD, de la milice (ou Franc Garde), le Groupe Action du PPF, le SSP (Selbstschutzpolizei, groupe d'auto-défense), qui vont participer activement à la guerre contre la Résistance au côté des Allemands. C'est donc un tout petit nombre de nationalistes bretons, surtout rapporté aux effectifs de la Résistance bretonne, une des plus vigoureuses du territoire français, qui a sévi dans la collaboration militaire, auquel il faut ajouter les informateurs et des membres de la LVF passés par les rangs nationalistes, mais cet engagement extrémiste a été préparé et en partie motivé par la collaboration idéologique et politique de plusieurs dirigeants, intellectuels, journalistes du mouvement nationaliste. Le climat d'anti-communisme, d'anti-gaullisme et de germanophilie de la presse nationaliste ou régionaliste bretonne en 1942 explique aussi que des jeunes élevés dans un climat catholique, réactionnaire ou conservateur, aient pu choisir à ce moment là d'adhérer aux organisations nationalistes, moins par passion de l'indépendance, que par envie de contribuer à la construction de l'Europe nouvelle délivrée des barbares communistes et revivifiée aux vertus du nordisme.
Ainsi, le cas de Jean-Marie Bouëssel du Bourg est exemplaire de l'itinéraire de jeunes issus de familles catholiques bien-pensantes et aisées, des anciens séminaristes, des idéalistes culturellement de droite, qui vont s'engager dans les formations para-militaires du mouvement nationaliste breton. Jean-Marie Bouëssel du Bourg découvre L'Heure Bretonne avec son père, il s'engage en 1941 dans le service spécial de Lainé, et la suite logique pour lui sa volonté d'engagement dans la formation SS Perrot en juin 1944, alors qu'il n'a que dix-neuf ans. Un engagement pour Dieu et la Bretagne, le combat anti-communiste et l'Europe nouvelle.
Entre la fin 1943 et la fin juillet 1944, le Bezen Perrot, le SD et ses collaborateurs français travaillant ou non sous uniforme allemand opèrent souvent en complémentarité avec la Wehrmacht, constituée à partir de juillet 1944 de la deuxième division parachutiste, d'éléments de la Kriegsmarine, de l'organisation Todt, des Feldgendarmes, mais aussi des « russes blancs » de la division Vlassov (des mercenaires géorgiens, ukrainiens, azerbaïdjanais…). Le Bezen Perrot va opérer contre la Résistance à Guer, Baud, Bubry, Camors, Quistinic, Callac, Saint-Nicolas-du-Pelem, près de Châteaugiron, à Combourg, à Locminé, à Rennes, près de St Malo, à Vannes, Arradon, Malansac, Maël-Pestivien, St Vincent sur Ouest, St-Jean-Brévelay, Guéméné-sur-Scorff, Uzel, Bourbriac, Scrignac, Broualan, St Marc sur Couesnon.
Pillages, incendies de fermes, tortures diverses pratiquées de manière systématique sur les suspects de résistance ou les résistants avérés, exécutions sommaires, humiliations seront à mettre à l'actif du SD de Rennes comme de ses supplétifs du Bezen Perrot.
La procédure engagée à la Libération contre Fritz Barkenow, adjoint d'Hartmut Pulmer, permet de faire une première estimation de ce qu'ont coûté aux bretons la répression du SD et de ses collaborateurs bretons : 1300 personnes interrogées et torturées à Rennes puis pour certaines disparues dans des camps de déportation ou fusillées. Il est certain que les soldats du Bezen Perrot ont participé à des opérations qui ont conduit à torturer des centaines d'hommes et de femmes partout en Bretagne, et à éliminer des centaines de résistants ou suspects, qu'ils aient succombé en déportation, des suites de leurs blessures, ou qu'ils aient été fusillés, exécutés sur le lieu de leur interpellation sans « procès ».
Le sentiment d'agir dans une guerre civile, où l'on est tué si l'on ne tue pas, l'ambiance de groupe et la chimère chevaleresque de l'unité d'élite, l'habitude de se sentir différents, en tant que « Bretons conscients », de « compatriotes » que l'on méprise, la déshumanisation de l'adversaire, terroriste rouge, français jacobin, mauvais breton, le risque, l'habitude prise de la violence, la fête et l'orgie après les rafles et les combats ou pendant les interrogatoires, l'endoctrinement préalable de jeunes esprits, la défaite presque assurée au bout, la peur de faire preuve de faiblesse, de se déshonorer devant les autres, tout doit contribuer à anesthésier les résistances morales des hommes du Bezen, sans parler des instincts cruels qui se réveillent avec la toute-puissance et la guerre, et à rendre tolérable ou même jouissive la violence et la cruauté.
Août 1944 : la retraite vers l'Allemagne
Le 1er août, les troupes de Patton franchissent le Couesnon à Pontorson et pénètrent en Bretagne. En fin de journée, une première colonne blindée alliée arrive au nord de Rennes. Hésitant à investir Rennes, les Américains bombardent la ville, pendant que les Allemands se défendent tout en faisant partir leur dernier convoi de déportés vers l'Allemagne, celui qui sera mitraillé par l'aviation alliée à Langeais. Le 2 août, Ange Péresse rassemble les hommes de la Bezen Perrot, et fait brûler les archives du QG de la rue Lesage, en dehors de quelques papiers personnels de Lainé. Un convoi rassemblant civil et miliciens est organisé à partir du siège du SD alors que les bombardements américains font rage. Les hommes du Bezen et des collaborateurs bretons compromis quittent Rennes pour Paris à bord de trois camions et d'une dizaine de voitures en fin d'après-midi.
Les trois quart des membres de la division Perrot ont gardé leur uniforme SS, une partie est en civil : le convoi embarque aussi l'imprimeur de L'Heure Bretonne, Marcel Guieysse et sa femme, leur fille Denise, Mme Péresse, Roparz Hémon, Jos Youenou, beau-frère de Debauvais, Meavenn, le concierge du Conseil National Breton, les fiancées et enfants des soldats de l'Unité. Quand il arrive à Strasbourg le 15 septembre 1944, le Bezen Perrot est réduit à la moitié de ses effectifs, plusieurs gour ayant déserté, comme Chanteau, certains ayant cherché à s'intégrer aux groupes de FFI dans ces jours d'anarchie en espérant y trouver une protection. Les hommes qui restent fidèles au Bezen, dont trois, Léo Jasson en tête, ont participé à l'exécution de 49 résistants à Troyes avec le SD de Rennes de Pullner, vont suivre les troupes allemandes dans leur repli outre-Rhin. En Allemagne, on leur donne le choix entre continuer la guerre dans la SS, sur le front de l'est en particulier, ou recevoir une formation pour devenir espions et saboteurs en France en travaillant dans la clandestinité pour l'Allemagne. Deux membres du Bezen seront ainsi arrêtés en Bretagne qu'ils avaient rejointe avec ces intentions juste avant la reddition allemande.
Après la défaite allemande, certains membres de la formation Perrot restèrent en Allemagne et parvinrent à s'y faire oublier comme Péresse, d'autres furent arrêtés après avoir essayé de rentrer en France avec des faux papiers, d'autres se firent passer pour des travailleurs du STO sur le retour. Quelques-uns réussirent à gagner l'Irlande (comme Heussaf). D'autres prirent le large pour l'Amérique du Sud, l'Argentine ou le Brésil.
1944-1947 : les nationalistes bretons face à l'épuration
Le procès des membres du Bezen arrêtés, revenus en France et démasqués, commence fin mai 1945. Ils ne sont qu'une vingtaine de membres du Bezen Perrot : le quart des effectifs de l'unité. Parmi eux, Léo Jasson (« Gouez »), qui poursuivit ses activités après le Bezen dans une division SS combattant à Bastogne en Belgique, et fut interpellé en mai 1945. Le procès établit qu'il fut impliqué dans des actes de tortures et exécutions, notamment dans le bois de Colpo. Il est condamné à mort. Tout comme André Geffroy (« Ferrand »), accusé d'avoir exécuté trois résistants dans la prison de Redon. Les deux nationalistes sont exécutés au stand de tir de Coëtlogon à Rennes le 17 juillet 1946.
Ce sont les seuls membres du Bezen Perrot condamnés à mort et exécutés. Six condamnations à mort par contumace sont prononcées contre les plus responsables des actes barbares commis contre la Résistance et la population bretonne. Des condamnations de travaux forcés à perpétuité, pour 20 ans, 10 ans sont aussi prononcées mais beaucoup de ces peines seront commuées, comme pour d'autres collaborateurs français, et les anciens du Bezen libérés après 4 ou 5 ans d'emprisonnement.
La proportion de condamnés à mort chez les Miliciens d'autres groupes ayant sévi en Bretagne contre la Résistance (ceux du groupe Action du PPF, ceux de la Selbstschutzpolizei) ou de collaborateurs français du SD, a été plus forte, certainement parce que les hommes du Bezen Perrot les plus impliqués n'ont pas pu être traduits devant les juges.
Des nationalistes bretons d'autres groupes de collaboration traquant la résistance sont exécutés eux aussi. Hervé Botros, qui infiltrait les maquis en servant d'indicateur pour le Kommando de Landerneau du commandant nazi Herbert Schaad, et qui avait accompagné la fuite du Bezen Perrot en Allemagne, est jugé le 25 septembre 1945 à Quimper et condamné à mort. Joseph Le Ruyet, qui se vantait en prison d'avoir tué lui-même une centaine de patriotes et Guy Vissault de Coëtlogon, sont fusillés, le premier le 5 novembre 1946, le second au fort de Montrouge à Paris, après avoir été arrêté à Sens par les Américains.
La Bretagne est la deuxième région française libérée, une région où la guérilla des maquis et sa répression impitoyable par les troupes allemandes aidées des collaborateurs, ont été extrêmement fortes. Les combats prolongés entre la résistance et les troupes allemandes, violents et meurtriers se poursuivent jusqu'en mai 1945 dans les ports de Lorient et de St Nazaire : 204 FFI tombés sur les fronts de Lorient et de la Vilaine, au nord-ouest de la poche de Saint-Nazaire. Ce contexte, les souffrances et humiliations de l'occupation, les 3743 déportés bretons, dont la moitié périrent en camps de concentration, les 2776 fusillés bretons, le millier de Résistants tués aux combats, auraient pu favoriser la vengeance incontrôlée contre les vaincus, et tout ce qui s'était rapproché de près ou de loin des occupants. La Bretagne aurait pu connaître une épuration très violente, extra-judiciaire et portée par les tribunaux de la Libération.
Contrairement à la légende noire de la Résistance et de la Libération qu'ont voulu propager les dirigeants nationalistes collaborateurs après la guerre, souvent depuis leur exil, relayée ensuite par une partie non négligeable du mouvement autonomiste quand il s'est reconstitué, il n'en a rien été.
Mordrel dans Breiz Atao (1973) parle ainsi d'une « orgie de sang » à la Libération, d'une « rafle monstre » organisée contre les nationalistes bretons par le général Allard et le commissaire de la République pour les quatre départements Victor Le Gorgeu, d'une justice emmenant les prévenus à l' « abattoir ». Yann Fouéré évoque lui dans La Bretagne écartelée (1962), « l'anarchie des mois rouges de l'été et de l'automne 1944 dont furent victimes, à côté d'une poignée de coupables, des dizaines de milliers d'innocents ». Il rapporte encore dans une Histoire résumée du mouvement breton (Cahiers de l'avenir de la Bretagne, Editions Nature et Bretagne, 1977) qu' « en Bretagne, la mise en pratique de l' « épuration » et de la répression n'ont pas eu seulement pour but de réprimer les « menées de collaboration ». Elles ont surtout été utilisées pour décapiter le Mouvement breton. Elles sont une réaction jacobine contre les tendances « centrifuges » du Mouvement breton et les atteintes portées par lui au dogme de l'indivisibilité de l’État. Elles adoptent à son égard les méthodes utilisées pendant la période révolutionnaire pour éliminer les « Chouans » et les « Fédéralistes ».
La réalité est assez éloignée de cette interprétation victimaire qui brouille les cartes et inverse les rôles. Certes, dans le climat de suspicion justifiée vis-à-vis de l'Emsav, et de ferveur patriotique de la Libération, les militants bretons ont dû vivre dans une certaine anxiété pendant quelques mois. Évidemment, compte tenu de la notoriété publique des accointances allemandes des chefs, de la collaboration armée de plusieurs jeunes, et de leurs manières d'être calquées sur les mouvements fascistes, les militants et sympathisants du PNB ont été particulièrement suivis, surveillés, et certains enfermés et interrogés par les RG, la DST, les renseignements militaires. Le PNB était qualifié de « mouvement de collaboration » par les autorités de la Libération en Bretagne. C'était même le plus gros mouvement politique de collaboration. L'exigence de purification de la nation se purgeant de ses traîtres pour construire une France nouvelle, régénérée, et venger les camarades victimes de la Collaboration et du nazisme, était effectivement portée dans les discours, les tracts et les affiches de la Résistance, communiste en particulier.
Le comité d'histoire de la seconde guerre mondiale parle de 9000 exécutions sommaires imputables à la résistance dans l'ensemble de la France sous l'occupation, pendant et après la Libération. D'après Christian Bougeard, il y eu en Bretagne 243 exécutions sommaires dans les Côtes-du-Nord, 214 dans le Morbihan, 113 dans le Finistère, 11 en Ille-et-Vilaine entre 1944, la fin de l'occupation, et la fin de l'année 1945. Cela relève de l'épuration extrajudiciaire, de l'exécution de collaborateurs, d'indicateurs et de dénonciateurs par la résistance, parfois aussi de l'épuration de voisinage lié à des règlements de compte. Les nationalistes bretons ne sont pas plus ciblés que les autres collaborateurs : selon Luc Capdevilla, une trentaine de nationalistes bretons ont été victimes de la résistance sur 582 personnes abattues par la Résistance dans l'ensemble de la Bretagne, et 95 % ont été exécutés en phase de guerre.
Pour ce qui est de l'épuration judiciaire, par des chambres civiques, à l'échelle des quatre départements de la Bretagne administrative, l'historien Luc Capdevila a recensé 117 militants ou sympathisants du mouvement breton (des PNB pour l'essentiel) sur 2 222 accusés pour indignité nationale. Contre 118 PPF, 99 Francistes, 236 MSR/ RNP avec leurs organisations de jeunesse.
En cour de justice de Rennes, qui traite de crimes plus graves, ceux des agents de l'Abwerh ou de la Gestapo, des miliciens, des soldats de la LVF, on compte 70 nationalistes jugés sur un total 1 299 accusés. Si on estime avec Kristian Hamon que le nombre de militants du PNB devait se situer entre 1200 et 1500 adhérents à la Libération, environ 200 militants bretons poursuivis, cela conduirait à penser que 15 % d'entre eux auront été traduits devant un tribunal d'épuration. Les militants de base du mouvement nationaliste ont été peu inquiétés, semble t-il, même si, en théorie, le simple fait d'appartenir au PNB, ou d'être soupçonné d'en faire partie, comme ce mouvement était défini comme organisation de collaboration, pouvait valoir d'être traduit en justice.
De manière générale, les condamnations judiciaires par les cours spéciales en Bretagne ne sont pas si nombreuses, compte tenu de la violence des derniers mois d'occupation et du nombre de personnes qui ont pu être mêlés à une forme ou une autre de collaboration. 543 personnes condamnées dans les Côtes-du-Nord de 1944 à 1946 (soit 0,10 % de la population du département précise Joël Cornette), 1477 personnes condamnées en Ille-et-Vilaine (environ 0,26 % des habitants). L'épuration judiciaire ne fut pas plus sévère avec les militants bretons ayant collaboré qu'avec les autres, même peut-être plutôt moins, en raison du jeune âge de bon nombre d'entre eux, et de la fuite des dirigeants les plus compromis. En tout cas, ce qui était jugé et condamné n'était pas les opinions séparatistes mais les actes de collaboration avérés. Dans le Morbihan, sur 33 militants ou sympathisants jugés, 10 ont été relaxés ou acquités par la cour civique de Vannes. La Chambre du Finistère n'eut pas la même mansuétude: sur 51 prévenus du PNB, il n'y eut que deux acquittés, la plupart étant condamnés à une peine de dégradation nationale, quelque fois aussi la confiscation d'une partie de leurs biens et par une interdiction de séjour. Le délit « d'indignité nationale », la peine de « dégradation nationale » sont les plus prononcés contre les collaborateurs, nationalistes ou non.
Les principaux chefs et figures emblématiques du mouvement nationaliste compromis dans la collaboration vont parvenir à échapper à la justice française et à l'épuration.
Lainé s'enfuit en Irlande dès 1945.
Fouéré passe par les prisons de Rennes et de Quimper avant de parvenir à s'éclipser, alors qu'il avait été remis en liberté provisoire, au cours d'un procès qui a lieu au début de l'année 1946 et qui le verra finalement condamné aux travaux forcés à perpétuité. Peine qu'il ne purgera pas car il rejoint le Pays de Galles après une brève période de clandestinité à Paris où il monte une filière pour obtenir des passeports et des protections outre-Manche, notamment auprès du révérend gallois nationaliste Dyfnallt Owen, vieil ami de l'abbé Perrot. Il accueille Taldir Jaffrennou au Pays de Galles avant de recevoir lui-même l'hospitalité en Irlande. Grâce à lui, Bob Le Helloco, condamné à mort par contumace, des membres du PNB et du Bezen Perrot reçoivent de faux certificats de démobilisation sur des noms d'emprunts qui leur permettent de monter des dossiers pour obtenir des passeports.
Au procès de L'Heure Bretonne et du PNB, en juin 1946, pour lequel Marcel Guieysse, déjà vieux, est le seul dirigeant présent, Yann Goulet, considéré comme le lieutenant de Lainé par la justice, absent de son procès, est condamné à mort. Entré dans la clandestinité, Goulet réussit à s'enfuir en Irlande. L'ancien sous-préfet Marcel Guieysse, fils d'un député radical de Lorient, devenu un vieil homme, écope d'une peine relativement clémente par rapport à son intransigeance et à la gravité des faits reprochés : 5 ans de prison, mais il sera finalement libéré en août 1948.
Reporté à mars 1947, le procès des Delaporte, Lainé, Mordrel se solde pas des peines plus lourdes. Raymond Delaporte, clandestin à Paris lui aussi avec son frère Yves, sous le nom de « Robert Duval », est condamné à 20 ans de travaux forcés : en avril 1947, il passe en Irlande avec son frère Yves et d'autres compagnons condamnés à 10 ans de travaux forcés. Raymond Delaporte deviendra enseignant à Cork avant de revenir en Bretagne, à Châteauneuf-du Faou, à la fin de sa vie.
Lainé et Mordrel sont condamnés à mort par contumace, leur peine sera prescrite en 1967. Mordrel, qui avait gagné l'Italie en 1945, et qui y fut interrogé par les services britanniques et américains, réussit à s'enfuir pour l'Argentine grâce à une filière ecclésiastique romaine en juin 1948.
Roparz Hémon est jugé le 3 juin 1946 après s'être livré aux Américains en Allemagne en 1945. Il est acquitté pour atteinte à la sûreté extérieure de l’État mais il est frappé de 10 ans d'indignité nationale, impliquant la perte de son poste d'enseignant, comme Kerlann qui fut lui aussi interdit de résidence en Bretagne pendant plusieurs années et perdit son statut d'instituteur. Roparz Hémon gagne Dublin en juin 1947.
D'autres écrivains et journalistes nationalistes auront à répondre de leurs compromissions. A titre d'exemple, mais il y en a d'autres, Fanch Eliès-Abéozen est emprisonné pendant 14 mois à la Libération, radié de l’Éducation Nationale, et interdit de séjour en Bretagne. Youenn Drezen, compromis comme lui dans des articles et des émissions de radio collaborationnistes, fait l'objet d'un internement administratif pendant plusieurs mois avant que son dossier soit classé sans suite. Morvan Marchal est condamné à 15 ans de dégradation civique pour appartenance au RNP de Marcel Déat : il déménagera en région parisienne et deviendra employé des gaz. Herri Caouissin, secrétaire de l'abbé Perrot, directeur d'O lo lê, rédacteur de Feiz Ha Breiz, deux revues proches des idées collaborationnistes, subit quelques mois d'emprisonnement, bénéficiant finalement d'un non-lieu, à la suite duquel il s'exile en région parisienne. Son frère Ronan Caouissin, collaborateur d'O lo lê, de nom de plume Ronan Caerleon, qui accompagna un temps le Kommando de Landerneau et fut un sympathisant des nationalistes les plus durs et les plus engagés dans la collaboration, s'exila lui aussi en région parisienne.
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