22 mars 2025
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Voici un poème de la première partie du livre « Que ma mort apporte l’espoir, poèmes de Gaza », poème écrit par une femme, Neeamat Hassan, sous les bombardements le 26 octobre 2023
ÊTRE MÈRE À GAZA
Être mère à Gaza
C’est ne pas dormir
C’est tendre l’oreille
Dans le noir
Tâter ses moindres franges
Trier un à un tous les sons
En choisir un, de quoi créer
Un conte à sa mesure
En faire une berceuse
Et quand tout le monde dort
Se dresser comme un bouclier
Face à la mort
Être mère à Gaza
C’est ne pas pleurer
C’est ramasser la peur
La colère
Et les prières
À pleins poumons
Attendre que les avions
Finissent de rugir
Pour libérer le soupir
Être mère à Gaza
C’est ne pas pouvoir être comme toutes les autres mères
C’est faire du pain frais grâce au sel de ses yeux
Et voir ses tout-petits mangés par la patrie
Neeamat Hassan
« Que ma mort apporte l’espoir, poèmes de Gaza », Libertalia, ORIENT XXI, poème sélectonné et traduit par Nadia Yafi
« Je rêve d’une mort retentissante, laissez-moi mourir comme je l’entends »
Par Haïdar Al Ghazali
Texte écrit le 27 octobre 2023
Là, maintenant, personne ne pourra me pleurer, personne ne pourra composer d’éloge funèbre, mon corps ne sera sans doute même pas retrouvé, et personne ne pourra donc m’enterrer, l’air libre sera ma tombe et le témoin de cette tombe un simple nuage, qui fera de l’ombre aux enfants, et ils grandiront.
Dieu merci, ils n’ont pas pu inclure l’air dans le blocus, ce qui me laisse encore la possibilité d’écrire cette folie, certes je ne suis pas libre dans cette absence, je ne suis pas libre puisqu’à tout moment exposé à une mort silencieuse, dont personne ne saura rien, je ne suis pas libre si je ne peux choisir ma mort, et pourtant je reste libre en mourant, alors allez-y détruisez toujours plus, faites exploser encore davantage, labourez donc la terre avec la mort, toute la terre, notre terre est une immense flûte de roseau, plus on y creuse de trous et plus elle est capable d’exhaler de nouvelles mélodies, de ces maqâms de l’impossible retour des ruines.
Il est maintenant vingt heures quinze, je vais me coucher, je vais préparer mon corps pour le missile impromptu qui l’explosera. Je vais préparer mes souvenirs, préparer mes rêves à devenir cette petite ligne de brève, ou ce simple numéro dans un dossier. Pourvu que le missile vienne dans mon sommeil, afin que je ne ressente aucune douleur ; voilà donc nos ultimes souhaits dans la guerre, une pitoyable conclusion de nos rêves grandioses.
Je quitte la frayeur de la famille vers mon matelas en me posant la question suivante : qui donc disait déjà au Gazaoui que le dormeur ne souffrait pas ? Et je me suis endormi. »
Haïdar Al Ghazali
« Que ma mort apporte l’espoir, poèmes de Gaza », Libertalia, ORIENT XXI, poème sélectionné et traduit par Nadia Yafi
Published by Section du Parti communiste du Pays de Morlaix
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