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9 mars 2025 7 09 /03 /mars /2025 19:31
La lente accession des femmes françaises aux droits politiques - Des municipales de 1925 à l'égalité des droits en 1945 - par Piero Rainero

La lente accession des femmes françaises aux droits politiques.

Des municipales de 1925 à l’égalité des droits en 1945.

 

Dans le prolongement des luttes au retentissement national menées à Douarnenez en 1924 par les Penn-Sardin, le parti communiste décida de présenter des candidates féminines aux élections municipales de 1925 dans plusieurs villes de France.

 

À Douarnenez ce fut l’une des figures du mouvement des sardinières qui fut choisie, Joséphine Pencalet. Placée en 4 ème position avec 26 hommes sur la liste conduite par le maire communiste sortant, Daniel Le Flanchec, elle fut élue dès le premier tour le 3 mai 1925 avec 25 de ses colistiers.

Joséphine Pencalet a été la première femme élue en Bretagne dans une collectivité territoriale. Elle participa à 6 réunions du conseil municipal avant que son élection ne soit invalidée.

Parmi les femmes présentées par les communistes en France à ce scrutin, 10 furent élues mais leur élection fut partout annulée.

Comme Joséphine Pencalet, ces candidates furent élues par des hommes, les femmes n’ayant pas encore le droit de vote. Plusieurs propositions de loi avaient été déposées en ce sens depuis 1901, l’une d’elles fut même votée en 1919 par les députés mais bloquée au Sénat.

Le 26 juin 1924 le breton Marcel Cachin, député communiste de la Seine déposa sur le bureau de l’Assemblée Nationale une nouvelle proposition de loi visant à accorder aux femmes le droit d’être électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes, à tous les scrutins.

Le Parti Communiste était alors la seule formation politique à promouvoir la plénitude des droits électoraux des femmes.

Cette nouvelle démarche n’aboutit pas.

Les femmes n’étaient toujours ni électrices, ni éligibles.

Mais aucun texte de loi ne leur interdisait d’être candidates.

Le gouvernement de Raymond Poincaré, qui avait constaté cette étrangeté, avait envisagé en 1923 de faire voter une loi interdisant aux femmes de faire acte de candidature, mais ce dossier resta dans les tiroirs. Cette faille juridique permit en 1925 aux communistes de présenter des candidates, les bulletins en leur faveur furent dûment décomptés et pour 10 d’entre elles, leur élection proclamée, mais plus tard invalidée.

La République n’était pas à une contradiction près : s’il était impossible aux femmes d’être électrices et éligibles, à quelque élection que ce soit, elles pouvaient cependant être ministres. Ainsi, bien plus tard, en 1936, lors du Front Populaire, alors que les femmes n’avaient toujours pas de droits électoraux, trois d’entre elles furent nommées dans le premier gouvernement de Léon Blum à des postes de sous-secrétaires d’État, dont, à la Recherche scientifique, une jeune physicienne de 38 ans, Irène Joliot-Curie, qui venait de recevoir le prix Nobel.

Joséphine Pencalet est l’une des grandes figures bretonnes des combats pour l’émancipation féminine. Des rues, des places et des bâtiments publics perpétuent sa mémoire.

Je me souviens avoir entendu des femmes douarnenistes exprimer, 50 ans après, leur admiration pour celle qui avait accepté de se porter candidate, seule femme aux côtés d’hommes. On relit aujourd’hui avec effarement les écrits de ceux qui s’opposaient alors au droit de vote des femmes.

Ces candidatures courageuses pour l’époque, ont contribué à faire grandir l’ exigence démocratique de l’égalité femmes-hommes qui demeure un combat constant des communistes.

En 1922, lorsque le maire communiste de Douarnenez, Sébastien Velly, décida avec son conseil municipal de donner à une rue le nom de Louise Michel, les éléments conservateurs et rétrogrades se déchaînèrent. Le Préfet lui-même essaya sans succès de faire annuler cette décision. Pendant l’Occupation cette rue Louise Michel fut débaptisée pour recevoir le nom de...Pétain. Quelle offense au souvenir de cette grande dame !

Il fallut attendre 1944 pour qu’enfin, dans la foulée de la Libération et des lois progressistes qui furent votées, le droit de vote soit accordé aux femmes.

Un nom restera attaché à cette loi d’égalité, celui d’un dirigeant de la Résistance, le communiste Fernand Grenier, qui porta cette proposition à l’Assemblée Consultative d’Alger, faisant inscrire dans la loi du 24 mars 1944 un amendement précisant : « Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. ». Amendement repris dans l’ordonnance signée du Général De Gaulle en date du 21 avril 1944 dans son article 17.

Elles exercèrent donc ce droit, pour la première fois, aux élections municipales des 29 avril et 13 mai 1945.

Ce sont les communistes qui présentèrent le plus grand nombre de femmes sur les listes des quelque 38 000 communes existant alors. 17 femmes seulement furent élues maires en France dont 5 communistes. Parmi elles, la maire de Kernével, Marie Mahé, l’une des 5 premières femmes maires du Finistère.

Et le 21 octobre 1945, des femmes furent élues, pour la première fois, à l’Assemblée Constituante. Elles étaient 33 sur 586 député-es et parmi elles 17 communistes (50%) dont de grandes figures de la Résistance et du féminisme comme Marie-Claude Vaillant-Couturier qui fut la seule femme à témoigner au procès des criminels nazis à Nuremberg.

En faisant de ces trois mots « Liberté, Égalité, Fraternité » la devise de la République après la Révolution de 1789, la France avait omis un droit fondamental, celui des femmes à pouvoir s’exprimer par le vote, comme les hommes, et à accéder à toutes les responsabilités électives.

Et encore fallut-il, après l’introduction de ce droit dans la loi, le compléter par l’exigence de parité.

Alors que nous allons cette année commémorer les 80 ans du premier vote des femmes françaises, il reste encore beaucoup de chemin à faire, de luttes à mener, de bastilles à abattre pour une réelle égalité femmes-hommes.

Le principe en est pourtant inscrit dès 1946 dans le préambule de la Constitution, grâce encore au résistant communiste Fernand Grenier :

« La loi garantit à la femme dans tous les domaines des droits égaux à ceux de l’homme. »

Piero Rainero.

le 8 mars 2025.

 

 

 

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